XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Troisième séance du jeudi 06 mars 2025

Sommaire détaillé
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Troisième séance du jeudi 06 mars 2025

Présidence de M. Xavier Breton
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1. Prévenir le développement des vignes non cultivées

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à instaurer un dispositif de sanction contraventionnelle pour prévenir le développement des vignes non cultivées qui représentent une menace sanitaire pour l’ensemble du vignoble français (nos 822, 1003).

    Discussion générale

    M. le président

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    Dans la discussion générale, la parole est à Mme Sophie Mette.

    Mme Sophie Mette

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    Je tiens à saluer et à remercier le rapporteur Hubert Ott pour le travail rigoureux qu’il a réalisé afin de tenir compte d’un enjeu crucial. En effet, cette proposition de loi s’attaque à un fléau majeur : la flavescence dorée, maladie dévastatrice transmise par la cicadelle de la vigne, qui se propage en particulier dans les vignes en friche. Les parcelles abandonnées, véritables foyers de contamination, aggravent considérablement la propagation du mildiou et du black-rot.
    Les études de l’Institut français de la vigne et du vin estiment à près de 2 000 hectares la surface des friches en Gironde, département où le vignoble est un pilier économique et culturel. Ce chiffre est alarmant, la viabilité des exploitations voisines étant menacée, mais la situation de la Gironde n’est pas un cas isolé. Elle reflète une crise plus large : les vignes non gérées deviennent des réservoirs de maladies aux conséquences économiques, sociales et environnementales désastreuses.
    Les vignerons de Gironde comme ceux des autres départements voient leurs rendements amputés et leurs efforts en matière de transition écologique compromis par l’usage accru de produits phytosanitaires pour protéger leurs parcelles. Ce problème touche l’ensemble des régions viticoles françaises où les friches, qu’elles résultent de difficultés économiques, de spéculations foncières ou d’un manque d’entretien, fragilisent un secteur déjà sous pression.
    La proposition de loi offre une réponse attendue en ciblant directement les causes de cette propagation, tout en s’inscrivant dans une logique de solidarité et de responsabilité collective. C’est précisément là qu’est sa force : en adaptant au plus juste et avec efficacité les moyens de lutte contre les vignes abandonnées, notamment en introduisant une sanction dissuasive et proportionnée –⁠ une amende de 1 500 euros –, elle apporte une réponse pragmatique, qui permettra d’inciter les propriétaires à agir sans pénaliser les viticulteurs précaires, de limiter la prolifération des cicadelles et, par effet domino, de réduire les pressions exercées par les maladies cryptogamiques.
    Ce texte ne prétend pas tout résoudre, mais il constitue une avancée décisive pour enrayer ce problème, protéger nos vignerons et préserver nos territoires viticoles, en Gironde comme partout ailleurs en France. C’est la raison pour laquelle nous le défendons avec force et détermination. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, DR et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Lise Magnier.

    Mme Lise Magnier

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    La viticulture n’est pas seulement un secteur clé de notre agriculture et de notre économie nationale, c’est aussi –⁠ et peut-être avant tout – un élément essentiel de notre patrimoine, qui contribue à la richesse de nos territoires. Elle participe au rayonnement de notre pays à l’étranger, tant notre vin est apprécié à travers le monde –⁠ c’est la députée de Champagne qui vous le dit.
    En 2023, la France s’est maintenue comme deuxième producteur mondial de vin en volume et premier exportateur en valeur. La viticulture génère près de 500 000 emplois directs et indirects, et pèse 92 milliards d’euros.
    Pourtant, ce secteur essentiel traverse une crise structurelle sans précédent. Intempéries, changement climatique, renouvellement des générations, concurrence accrue, inflation, déconsommation et, désormais, droits de douane : ces difficultés qui pèsent sur la filière doivent nous mobiliser pour assurer le rayonnement de notre viticulture, laquelle fait la fierté de nos terroirs et de nos territoires.
    Dans ce contexte difficile, tout doit donc être mis en œuvre pour aider nos agriculteurs et nos viticulteurs. Parmi les nombreux défis auxquels ils sont confrontés, celui des vignes laissées à l’abandon mérite toute notre attention. En effet, ces parcelles négligées représentent un véritable danger sanitaire, car elles deviennent des foyers de propagation pour les maladies et les parasites.
    Fortement épidémique, la flavescence dorée menace directement la survie économique de nombreux exploitants déjà fragilisés. L’augmentation des surfaces de vignes abandonnées complique la lutte contre cette maladie et contraint les viticulteurs à multiplier les traitements phytosanitaires, ce qui va à l’encontre de notre engagement à en réduire l’usage.
    Face à cette situation, le texte propose de modifier le régime de sanction existant pour non-réalisation d’une mesure de lutte contre un organisme réglementé. Nous passerons ainsi d’un régime délictuel à un régime contraventionnel, davantage proportionné. Un message clair et ferme est ainsi envoyé : la négligence n’est pas une option lorsqu’il s’agit de protéger notre patrimoine agricole commun.
    En commission, l’articulation entre le régime délictuel existant et le nouveau régime contraventionnel a été clarifiée afin d’assurer la pleine applicabilité du droit. Seule la non-application des mesures d’injonction sera désormais passible de sanctions pénales.
    Si la proposition de loi ne permettra pas de résoudre à elle seule la crise de la viticulture française, elle apporte une réponse adaptée et proportionnée pour dissuader les propriétaires de vignes d’abandonner des parcelles et renforcer l’efficacité de la lutte contre les risques sanitaires associés à cet abandon. Alors que les procédures actuelles d’arrachage administratif ou par voie judiciaire sont inadaptées, et compte tenu de la gravité et de l’urgence de la situation, elle arrive à point nommé.
    Je remercie donc le rapporteur et son groupe d’avoir inscrit ce texte à l’ordre du jour. Le groupe Horizons & indépendants le soutiendra. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et DR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Ce texte se veut avant tout pragmatique : il s’agit de faire en sorte que les propriétaires de vignes en friche se conforment à leurs obligations d’arrachage des pieds isolés contaminés par la flavescence dorée et des parcelles atteintes par la maladie à plus de 20 % –⁠ je découvre le sujet, je l’avoue. De fait, ces obligations ne sont pas respectées aujourd’hui et la sanction de nature délictuelle alourdit inutilement les procédures pénales, sans exercer d’effet dissuasif.
    Vous nous proposez de sanctionner le non-respect des obligations de lutte contre les organismes nuisibles par une contravention simple, de 5e classe, plus dissuasive. Créer une infraction mineure, plus simple à mettre en œuvre, pour remplacer une sanction lourde et inapplicable est une proposition à laquelle nous ne pouvons que souscrire tant l’impact et la propagation de la flavescence dorée inquiètent et mobilisent la profession viticole. Cette maladie de la vigne, qui n’est certes pas la seule, fait peser de lourdes charges sur les vignerons dans un contexte économique déjà très difficile.
    Nous voterons pour cette proposition de loi, mais nous restons dubitatifs quant à l’efficacité du dispositif, qui fait l’impasse sur les causes de la multiplication des vignes abandonnées. Nous soutiendrons donc l’amendement de nos collègues socialistes, qui soulignent avec raison la nécessité de mieux connaître les détenteurs de vignes abandonnées et leurs difficultés par rapport à l’arrachage sanitaire. L’objectif est de mieux comprendre les causes du développement des vignes abandonnées et d’envisager les évolutions législatives nécessaires.
    Dans un contexte de changement climatique et d’accroissement des maladies de la vigne, notre rôle de législateur ne peut se résumer à des sanctions ou à des dispositions conjoncturelles. La mesure que vous proposez pour faire face au risque d’anéantissement des récoltes est certes utile, mais elle ne peut méconnaître les difficultés financières bien réelles que rencontrent certains propriétaires de vignes abandonnées.
    La négligence de ces derniers a souvent pour toile de fond de graves difficultés économiques, lesquelles invitent à remettre en cause notre modèle productiviste tourné vers l’exportation et une politique agricole soumise aux logiques du marché, au détriment d’une diversification de la production, de la reconversion des producteurs, de leur juste rémunération et de la transmission de leurs exploitations.
    En raison des effets de plus en plus prégnants du changement climatique, nombre de viticulteurs ont l’impression de ne vivre que deux saisons par an, rythmées par des précipitations trop abondantes, des gels tardifs et des températures de plus en plus élevées.
    Ce contexte est malheureusement favorable à la dégradation de l’état sanitaire des vignobles et à la prolifération de maladies comme la flavescence dorée, le mildiou et l’oïdium. Ces dernières légitiment l’usage de produits phytosanitaires agressifs, qui menacent à leur tour tant les exploitations biologiques que la biodiversité.
    Nous aurions préféré que les dispositions de cette proposition de loi s’inscrivent dans une réflexion plus large, dans le cadre d’un projet de loi ambitieux sur l’avenir de la viticulture française. Même si l’exercice était plus difficile, un tel texte aurait permis de mieux prendre en compte les difficultés techniques et financières rencontrées par les propriétaires concernés –⁠ en bref, il aurait proposé une aide plutôt que sanctionné. L’État ne joue pas suffisamment le rôle d’accompagnateur qui doit être le sien face aux mutations du monde agricole, dont la multiplication des friches viticoles n’est qu’une illustration parmi d’autres.
    Conscients des attentes de la profession, nous soutiendrons votre texte, non sans quelques réserves qui tiennent, pour l’essentiel, au manque de volonté politique de faire face aux défis majeurs qui attendent nos agriculteurs comme nos viticulteurs. Il faut soutenir tant les producteurs que les efforts de recherche contre les maladies émergentes et pour l’adaptation au changement climatique.
    Je suis député d’un territoire dans lequel se trouve une importante zone industrielle, près du Havre. Lorsque des usines chimiques et des raffineries sont obligées de fermer pour cause de difficultés financières et de faillite, nous nous retrouvons avec des terrains pollués. Grâce à une loi adoptée par le Parlement, un fonds a cependant été constitué pour financer leur dépollution. Le principe est simple : quand les affaires vont bien, les entreprises alimentent ce fonds, qui finance la dépollution des terrains lorsque leur activité prend fin. Pourquoi ne pas nous inspirer d’un tel système pour aider les viticulteurs à financer l’arrachage des vignes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Maxime Michelet.

    M. Maxime Michelet

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    Avec près de 800 000 hectares de vignes, la France n’est pas seulement un grand pays viticole, elle est aussi le plus grand pays viticole du monde : à elle seule, elle représente un dixième du vignoble mondial. Richesse économique, commerciale, touristique, paysagère, culturelle et identitaire : on ne saurait imaginer la France sans son vignoble. Malheureusement, cette richesse est confrontée à de graves défis : guerres commerciales dans un monde toujours plus concurrentiel, baisse globale de la consommation de vin, aléas climatiques qui deviennent la norme, ordres et contre-ordres politiques, qui privent nos producteurs de visibilité et de lisibilité, ingérences d’idéologies décroissantes ou hygiénistes, menaces sanitaires. Les défis sont nombreux et la situation plus que préoccupante.
    Selon les estimations, la production française pour 2024 s’élèverait à 37 millions d’hectolitres, soit une baisse de 23 % par rapport à l’an passé et un recul de 16 % par rapport à la moyenne quinquennale. Cette chute brutale, qui s’inscrit dans un contexte général de recul de la production mondiale, est clairement imputable, en France, à une année calamiteuse sur le plan météorologique, entre précipitations, sécheresse et orages de grêle. Notre vignoble est donc une richesse en danger, qu’il nous faut défendre, protéger et préserver face aux défis, notamment sanitaires.
    En ce sens, nous saluons et nous voterons le texte de notre collègue du Mouvement démocrate, qui s’attaque au sujet épineux du développement des vignes non cultivées, lesquelles constituent autant de failles sanitaires dans nos vignobles. Du fait de son excessive sévérité, le dispositif existant était inopérant. En instaurant une amende de 5e catégorie, le texte ouvre la voie à une action plus efficace et pédagogique.
    Cette action sera également moins stigmatisante pour les propriétaires non exploitants qui ne trouvent pas de viticulteur, ainsi que pour les viticulteurs fragilisés, ces deux cas de figure étant à l’origine de la plupart des friches viticoles françaises. Les amendements adoptés en commission visaient d’ailleurs à manifester davantage encore cette volonté du législateur de ne stigmatiser personne, ce dont nous nous félicitons. Notre seul objectif, partagé sur tous les bancs, est de défendre nos vignobles contre des périls sanitaires parfois mortels, surtout lorsque s’y ajoutent des menaces économiques, commerciales, sociales, climatiques.
    Quoique attendues par la profession, ces avancées ne sauraient suffire : face à ces risques sanitaires, comme à bien d’autres défis dans notre pays, il est urgent de nous libérer de l’idéologie et de la bureaucratie qui complexifient et paralysent tout, de quitter la voie des contraintes excessives pour celle de l’innovation. Car face aux maladies de la vigne, la meilleure réponse sera toujours la recherche. « Pas d’interdiction sans solution », certes, mais « pas de solution sans recherche » ! Afin qu’ils trouvent dès demain les remèdes aux maladies d’aujourd’hui, libérons l’initiative des chercheurs des lenteurs, pesanteurs, délais, procédures administratives qui, en vingt ans, ont doublé le coût de la recherche, réduisant d’autant son agilité. Si l’on ajoute à cela les nombreuses interdictions sans solutions de rechange, on conçoit que la palette des procédés disponibles n’ait cessé de rétrécir.
    Cette exigence de recherche et de développement, je la soutiens avec d’autant plus de conviction que j’ai l’honneur d’être l’élu d’un territoire viticole, la Champagne, où ce combat a toujours été mené avec la passion de ceux qui veulent trouver des solutions. Ainsi, près d’Épernay, dans le domaine expérimental du comité interprofessionnel du vin de Champagne, près d’un hectare est aujourd’hui consacré à tester la confusion vibratoire, susceptible de perturber la reproduction des cicadelles qui propagent la flavescence dorée –⁠ fléau au sujet duquel j’avais interpellé Mme la ministre et qui nécessiterait une action déterminée.
    Pour le vignoble français, l’heure est grave : il faut des solutions fortes. Nous voterons en faveur du texte, qui constituera une avancée utile et importante ; mais nous devrons faire beaucoup plus, radicalement plus, si nous voulons pouvoir encore dire dans dix ans que la France est le plus grand pays viticole du monde –⁠ dans le cas contraire, elle ne serait plus la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Patrice Martin.

    M. Patrice Martin

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    Depuis plusieurs années, la flavescence dorée, transmise par un insecte, la cicadelle, ravage les vignobles avec une alarmante rapidité, mettant en péril l’un des fleurons de notre patrimoine : la viticulture française. Considérée par certains comme aussi destructrice que les fléaux du XIXe siècle, l’oïdium ou le phylloxéra, sa propagation inexorable menace l’avenir de milliers de viticulteurs. Face à cette situation critique, les professionnels du secteur se mobilisent : ils arrachent chaque année d’innombrables ceps, traitent régulièrement leurs parcelles, prennent toutes les mesures possibles pour tenter d’endiguer la progression de la maladie. Malheureusement, ces efforts sont souvent réduits à néant par l’inaction des pouvoirs publics et l’absence de mesures contraignantes à l’égard des propriétaires de parcelles abandonnées, véritables réservoirs de contamination.
    Principalement dû au manque de rentabilité ou de trésorerie, cet abandon favorise également d’autres maladies qui, elles aussi, menacent ensuite l’ensemble des vignobles. Faute d’une intervention rapide et adaptée, ces phénomènes risquent de s’aggraver, accélérant la disparition progressive de nombreuses exploitations. Or le cadre réglementaire ne permet qu’une sanction délictuelle, nécessitant une procédure sous l’autorité du procureur, ce qui allonge les délais et empêche une réponse rapide et efficace. Pendant ce temps, les foyers de contamination se multiplient : en quatre ans, leur nombre a triplé. Nos viticulteurs alertent, les fédérations professionnelles dénoncent la lenteur du gouvernement, mais il ne s’ensuit aucune action concrète à la hauteur de l’enjeu.
    Cette proposition de loi vise à rendre le dispositif plus opérationnel grâce à l’instauration d’une contravention de 5e classe, applicable aux parcelles non entretenues, afin d’assurer une lutte systématique contre cette maladie et de limiter sa propagation. Les modifications apportées par la commission prévoient de déclasser le délit pour non-réalisation d’une mesure de lutte contre un organisme réglementé au profit d’un régime contraventionnel plus proportionné, efficace et rapide, tout en conservant la possibilité d’une sanction délictuelle à l’encontre des propriétaires qui refuseraient de se conformer aux injonctions des services de l’État.
    Nous devons doter ces derniers de leviers réels. L’enjeu n’est pas seulement économique : au cœur de notre patrimoine, de notre culture, de nos territoires, la vigne façonne nos paysages, fait vivre des milliers de familles. Elle participe de l’identité même de la France. Peut-on imaginer notre pays sans vignobles, sans vin, sans vignerons ? La détresse du monde viticole fait écho à celle de nos agriculteurs et de nos pêcheurs. Chaque jour, des exploitations ferment, étranglées par les crises sanitaires, la concurrence déloyale, les normes toujours plus contraignantes. Face à l’urgence, les décisions tardent. Nos viticulteurs appellent à l’aide. Il est de notre devoir d’agir. Soutenir ce texte, en particulier l’article 1er, qui contient sa principale mesure, contribuera à protéger nos exploitations, à garantir la pérennité de nos terroirs et à défendre un héritage qui fait la fierté de notre nation.
    Le groupe Rassemblement national appuiera donc cette initiative. Nous appelons les parlementaires à prendre leurs responsabilités : laisser se propager la flavescence dorée, ou toute autre maladie de la vigne, c’est condamner nos vignobles à une destruction lente mais certaine. À nous d’agir avant qu’il ne soit trop tard. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Luc Fugit.

    M. Jean-Luc Fugit

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    Au nom du groupe Ensemble pour la République, je tiens avant toute chose à saluer la qualité du travail accompli par le rapporteur, Hubert Ott. Nous le savons, le secteur viticole rencontre de nombreuses difficultés : durement affecté par la baisse de la consommation de vin et les effets du dérèglement climatique, il doit aussi faire face à une pression sanitaire croissante, exacerbée par la persistance de maladies telles que le mildiou ou la flavescence dorée –⁠ désormais présente dans la quasi-totalité du territoire, notamment dans le Bordelais, mais aussi dans mon département du Rhône, où elle affecte la production de beaujolais et de coteaux-du-lyonnais. Beaucoup de viticulteurs rencontrés lors du Salon de l’agriculture nous ont parlé de ces problèmes : nous leur devons d’être à la hauteur des enjeux.
    Or le développement de friches viticoles aggrave la propagation de cette maladie : les parcelles laissées sans entretien par leur propriétaire deviennent des foyers de contamination pour les vignes voisines, contraignant les viticulteurs à intensifier les traitements phytosanitaires, ce qui ne correspond pas à l’orientation que nous souhaitons pour notre agriculture. Que l’inaction de certains propriétaires pénalise leurs voisins est inacceptable : il nous faut impérativement trouver une solution afin de freiner l’expansion de ces friches.
    Dans le cas de la flavescence dorée, la législation impose, en cas de contamination, l’arrachage des pieds isolés contaminés et des parcelles atteintes à plus de 20 %, mais elle n’est pas respectée en raison d’un cruel manque d’efficacité du dispositif. Le régime de sanction couvre l’ensemble des mesures de prévention, de surveillance et de lutte contre les dangers phytosanitaires liés aux organismes nuisibles. De nature délictuelle, il alourdit les procédures pénales sans être proportionné aux obligations d’arrachage des vignes. Il est en effet rare que des condamnations soient prononcées compte tenu de la sévérité de la sanction –⁠ six mois de prison, 150 000 euros d’amende.
    Notre ancien collègue de Gironde, Pascal Lavergne, nous avait interpellés à ce sujet au printemps dernier, à l’occasion de l’examen du projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture : son amendement n’avait pas trouvé d’accroche législative à l’époque. La présente proposition de loi vise, très justement, à pallier ces manques en prévoyant une contravention de 5e classe en cas de non-respect des obligations de lutte contre les organismes de quarantaine. Ce n’est là ni une sanction aveugle ni une punition arbitraire, mais un indispensable outil de responsabilisation.
    Soyons clairs : il ne s’agit en aucun cas de pénaliser les viticulteurs les plus fragiles. Cette mesure vise avant tout les propriétaires qui, ayant hérité de parcelles, les laissent à l’abandon, parfois dans une logique purement spéculative, dans l’espoir d’un reclassement foncier. Quant à ceux qui sont contraints à cet abandon par des raisons financières, les fédérations viticoles, pleinement conscientes de ces enjeux, œuvrent à les soutenir financièrement.
    Les viticulteurs ne nous réclament pas tant un appui financier que des outils réglementaires adaptés à la lutte contre la prolifération des vignes non cultivées. C’est pourquoi nous pensons que la disposition, adoptée en commission, qui prévoit de soumettre le dispositif à la présentation systématique d’une aide financière n’est pas appropriée pour un texte visant à doter les viticulteurs d’outils simples, rapides et efficaces. Une telle exigence risquerait même de rendre inopérant le dispositif proposé. Nous vous proposerons un amendement, le no 6, visant à la supprimer.
    Grâce à cette proposition de loi très attendue, nous réaffirmerons notre soutien à nos viticulteurs, à leur production, dont l’excellence fait la fierté de notre pays. Notre groupe votera en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Sylvain Carrière.

    M. Sylvain Carrière

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    En France, la viticulture constitue un héritage tant culturel que paysager et notre pays a longtemps été en pointe dans ce domaine. Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, son vignoble doit être préservé face aux menaces qui pèsent sur lui. Or son âge d’or est révolu ; la culture de la vigne se modifie, le changement climatique rend la production de plus en plus compliquée. Quatre des six dernières vendanges ont fourni une quantité de raisin anormalement faible : floraison précoce suivie de gelées tardives, tempêtes de grêle, sécheresse des années durant à laquelle succèdent des inondations et leur lot de maladies. Les incendies guettent, la désertification progresse ; le chiffre d’affaires est réduit, la trésorerie affectée, les viticulteurs sur les rotules. Des maladies telles que la flavescence dorée et le mildiou se développent, n’épargnant aucun bassin.
    La solution doit être collective et concerner tous les échelons : à la sortie des pépinières, pour les plants originaires de France et du reste de l’Union européenne, il faut généraliser le traitement à l’eau chaude ; sur toutes les parcelles, grâce à des moyens humains massifs et à une observation accrue des ceps, la détection de ceux qui sont contaminés doit être renforcée. L’exploitation achevée, la contravention pour défaut d’arrachage constituerait une solution lorsque le propriétaire de centaines d’hectares les laisse volontairement en friche, mais comment demander à des viticulteurs qui n’ont plus de trésorerie, plus de production ou plus d’acheteurs de consacrer des milliers, voire des dizaines de milliers d’euros à l’arrachage d’hectares de vigne ? Imposer des contraventions ne résoudra pas le problème de fond : l’appauvrissement généralisé des petits viticulteurs, obligés de s’endetter toujours plus sans aucune garantie d’écouler leur production. Il faut un accompagnement à l’arrachage national, dans tous les organismes de défense et de gestion (ODG) et dans toutes les interprofessions vinicoles, même dans celles qui ne le proposent pas aujourd’hui.
    Je tiens à remercier M. le rapporteur pour ce texte grâce auquel il est aujourd’hui question, dans l’hémicycle, de la viticulture, ce trésor français. La richesse du vin français réside dans la concentration d’un terroir, de ses paysages, de ses traditions, de sa météo, de ses ouvriers agricoles et de ses vendanges, des générations de viticulteurs qui ont perpétué ce savoir-faire. Une bouteille de vin est une carte postale à l’étranger, un formidable outil de rayonnement de la France à l’international.
    Cependant, le groupe LFI-NFP estime que limiter le débat au seul problème des maladies infectieuses est grandement insuffisant, si ce n’est contre-productif. Car la crise viticole a diverses origines et la maladie des ceps n’en est qu’une parmi d’autres. En 1950, les Français buvaient en moyenne 140 litres de vin par personne et par an, contre 40 litres aujourd’hui : faute de régulation efficace du marché et des droits de plantation, cette victoire pour la santé publique signera l’arrêt de mort des viticulteurs. Les goûts changent ; la consommation de vin rouge décroît nettement, le rosé et le blanc effervescent sont au contraire plébiscités, les jeunes recherchent des vins plus légers, plus frais.
    Aucun bassin viticole ne doit être laissé de côté au profit d’un autre, comme c’est malheureusement le cas à l’heure actuelle. Le Roussillon s’assèche, le Bordelais traverse une crise sans précédent et certaines interprofessions préfèrent la concurrence entre bassins viticoles plutôt que l’union nationale.
    La puissance publique doit donc accompagner la filière vitivinicole, de la vigne à la vente, pour répondre efficacement, collectivement et stratégiquement à cette transition. Les droits de plantation, conçus en 1957 pour piloter la production et supprimés en 2016 sous l’impulsion de Bruno Le Maire et de Catherine Vautrin, pour ne citer qu’eux, doivent être rétablis en France. Les viticulteurs endettés, qui voient leurs bouteilles affichées au prix de 1,50 euro chez Lidl, peuvent remercier la main invisible et la politique européenne du tout-marché.
    Les facteurs de la crise viticole sont multiples. C’est pourquoi les viticulteurs réclament des prix rémunérateurs. À cet égard, la loi Egalim n’est qu’un mirage –⁠ elle l’est pour l’agriculture de manière générale. Les viticulteurs ont besoin de prix garantis par l’État pour planifier leur transition de cépage, investir dans l’adaptation au changement climatique ou faire face à l’évolution des goûts des consommateurs. Ces prix garantis rendront la profession plus attractive, feront revenir les actifs agricoles, faciliteront la transmission, remettront les agriculteurs dans les champs et, assez naturellement, supprimeront les zones de vignes en friche. La carotte plutôt que le bâton.
    Vous l’aurez compris, les députés du groupe La France insoumise voteront ce texte sans conviction, en espérant qu’il n’aggravera pas la situation des petits producteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Pascale Got.

    Mme Pascale Got

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    Ne nous méprenons pas : la présente proposition de loi n’est pas la réponse à la crise profonde que traverse la viticulture française, dont les facteurs sont multiples –⁠ exportations, commercialisation, consommation, climat.
    Le changement climatique est en lien direct avec le texte que nous examinons ce soir. La plupart des vignobles sont soumis à des phénomènes climatiques complexes : des précipitations de plus en plus abondantes en toute saison, des températures de plus en plus élevées, des aléas climatiques fréquents. Résultat : l’état sanitaire des vignobles se dégrade sous l’effet de maladies diverses telles que la flavescence dorée, au cœur de ce texte, ou le mildiou, l’oïdium, le black-rot et bien d’autres. Ces maladies prolifèrent abondamment dans les vignes en friche, qui deviennent ainsi des foyers durables et contaminants pour les parcelles saines situées à proximité. Les raisons de ces friches sont diverses : abandons de fermage, problèmes juridiques de succession, réduction de la taille de la propriété, principalement.
    La prolifération des maladies est très difficile à endiguer, voire impossible. Il n’existe aucun traitement contre la flavescence dorée, si ce n’est l’arrachage sanitaire. Pour les autres maladies, c’est au prix de traitements répétitifs et coûteux que les dégâts peuvent être limités. De plus, ces modalités d’intervention contrecarrent les efforts consentis pour une viticulture plus vertueuse, menacent les exploitations biologiques, dissuadent ceux qui voudraient opérer une transition écologique et ajoutent de la crise à la crise pour tout le monde.
    Permettez-moi de saluer la veille sanitaire assurée dans mon département, la Gironde, par le groupement de défense contre les organismes nuisibles (GDON) et par la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) afin de repérer les foyers de flavescence dorée à endiguer. Cette veille est essentielle ; elle doit être respectée et rapide. Elle doit également être pédagogique et proposer un accompagnement aux petits propriétaires concernés. C’est l’engagement pris par les organismes viticoles lors des auditions. La veille sanitaire ne peut se résumer à des sanctions, surtout pour une filière en crise.
    Le groupe Socialistes et apparentés avait proposé, par l’intermédiaire d’un amendement, un fléchage des produits des contraventions vers le fonds d’urgence viticole européen. Dans un souci de transparence, cette mesure aurait permis de s’assurer que les produits des contraventions reviennent aux vignerons qui subissent les conséquences du développement de maladies dans leurs vignobles. Cet amendement a été déclaré irrecevable en vertu de l’article 40, alors qu’il a pu être examiné en commission –⁠ je le regrette vivement.
    Face au changement climatique, l’accroissement des maladies dans les vignobles est devenu un sujet de portée nationale, qui nécessiterait des mesures structurelles, à partir d’un suivi précis de la situation et de son évolution potentielle, ainsi que des financements fléchés vers la recherche et le soutien des viticulteurs en cas de crise. C’est le sens des amendements que nous avons déposés et qui, je l’espère, seront adoptés ; ils permettraient de parfaire un texte que le groupe Socialistes et apparentés soutiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Lepers.

    M. Guillaume Lepers

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    Nous sommes tous conscients des défis que les vignerons doivent relever : aléas climatiques, difficultés économiques, pression environnementale. Dans ce contexte, il est essentiel de leur apporter des solutions adaptées et de les accompagner dans la lutte contre les maladies qui menacent leurs exploitations.
    Dans leurs vignobles, les vignerons sont confrontés à la menace persistante de maladies végétales, telles que la flavescence dorée, qui peuvent anéantir leurs récoltes et dont la propagation est liée, entre autres facteurs, à la présence de vignes en friche et abandonnées.
    Protéger les vignes des maladies végétales n’est pas seulement une question de traitement ; c’est un engagement constant qui pèse lourdement sur les ressources humaines et financières des exploitations viticoles. En effet, les viticulteurs doivent redoubler d’efforts pour protéger leurs vignes, souvent au prix de traitements coûteux et chronophages. Ils consacrent des heures à les surveiller et à marquer les souches infectées et doivent respecter des délais stricts pour déclarer toute anomalie. Cette charge de travail, couplée aux pertes potentielles, fait de leur quotidien un défi permanent.
    Le dispositif de lutte contre ces maladies repose actuellement sur un arsenal juridique inadapté. Ainsi, le non-respect des mesures en vigueur est passible d’une amende disproportionnée de 150 000 euros, assortie d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à six mois ! Une telle sanction est non seulement excessive, mais aussi contre-productive. Elle stigmatise les vignerons et les traite comme des délinquants, alors qu’ils sont avant tout des agriculteurs en difficulté, qui méritent notre soutien.
    Il est donc temps de changer de logique et de passer d’une approche punitive à une approche incitative. Tel est le sens de la proposition de loi. Ce texte ne cherche pas à sanctionner à tout prix. Il vise à responsabiliser les propriétaires des vignes et à les encourager à adopter les bonnes pratiques de lutte contre la propagation des maladies.
    Il propose une sanction intermédiaire, plus juste et mieux proportionnée, sous la forme d’une contravention de 5e classe, avec une amende de 1 500 euros, pouvant aller jusqu’à 3 000 euros en cas de récidive. Cette sanction intermédiaire sera plus facilement applicable et aura un meilleur effet dissuasif que la peine actuelle. Elle conjugue deux impératifs : lutter contre la prolifération des maladies végétales, en permettant aux services de l’État de disposer d’un outil plus efficace, tout en proposant une réponse pénale proportionnée. Le groupe Droite républicaine votera donc en faveur de ce texte.
    Néanmoins, la question de la sanction ne doit pas occulter la nécessité d’un accompagnement renforcé des vignerons. Au-delà de la simple contrainte, nous devons être à leurs côtés en leur offrant un soutien pour la replantation des vignes et en encourageant la recherche et le développement de solutions innovantes et efficaces pour lutter contre la flavescence dorée et d’autres maladies. La lutte contre les maladies de la vigne est un défi collectif, qui nécessite un engagement fort de l’État, des collectivités territoriales et de l’ensemble des acteurs de la filière. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Bonnet.

    M. Nicolas Bonnet

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    J’essaierai de ne pas répéter ce qui vient d’être dit, mais ce sera difficile tant nous sommes tous à peu près d’accord sur le constat : la filière viticole française, qui fait notre fierté depuis de nombreuses années, pour ne pas dire des siècles, est en difficulté, non seulement parce que la consommation de vin a diminué, mais aussi en raison du changement climatique qui soumet l’agriculture à des contraintes de plus en plus fortes –⁠ la viticulture n’y échappe pas. Cette situation favorise la survenance de différentes maladies et le phénomène est amplifié par l’abandon de certaines vignes, en raison, par exemple, de successions au terme desquelles les terres ne sont plus cultivées. Les viticulteurs qui sont voisins de parcelles non exploitées, dans lesquelles les maladies peuvent se développer et ensuite les contaminer, s’en retrouvent fragilisés.
    Cette proposition de loi est pertinente puisqu’elle instaure un dispositif réellement applicable. Elle offrira ainsi une perspective aux viticulteurs qui exploitent une parcelle située à côté de vignes abandonnées, en permettant de limiter les risques sanitaires liés à ce voisinage. Certes, des sanctions existaient déjà, mais elles étaient inadaptées car bien trop faramineuses –⁠ 150 000 euros d’amende et six mois de prison. La sanction proposée dans ce texte, à savoir une contravention de 5e classe, avec une amende de 1 500 euros maximum, est davantage proportionnée et plus facile à appliquer. Elle répond clairement aux attentes de nos viticulteurs, qui souhaitent exploiter leurs vignes avec un minimum de risques sanitaires.
    Je tiens à souligner que cette proposition de loi a été adoptée à l’unanimité par la commission des affaires économiques ; j’espère qu’il en sera de même dans l’hémicycle. Enfin, permettez-moi de saluer le travail de notre collègue Hubert Ott, à l’origine de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et Dem.)

    M. le président

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    La discussion générale est close.
    La parole est à M. Hubert Ott, rapporteur de la commission des affaires économiques.

    M. Hubert Ott, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Je remercie l’ensemble des orateurs de leur soutien. J’ai bien conscience de l’état dans lequel se trouve le vignoble français. La crise est profonde, multifactorielle et implique que nous nous penchions sérieusement et collectivement sur cette question, afin d’y apporter les réponses appropriées.
    Ce texte, relativement court, vise à proposer une mesure d’urgence, ciblée, afin de répondre à une situation précise, que je qualifierais d’hémorragie de l’appauvrissement. En effet, la flavescence dorée contribue à rendre encore plus difficile le travail des viticulteurs qui survivent à la crise. Il faut donc la prévenir à tout prix.
    C’est à la demande de l’interprofession, qui souhaitait une mesure outil, que nous avons proposé ce texte, avant tout à leur service. Sanctionner n’est pas son objectif premier. Il vise prioritairement à faciliter sur le terrain les démarches de l’interprofession vis-à-vis des viticulteurs confrontés à la difficulté de l’arrachage et à lui fournir un outil supplémentaire pour motiver ces viticulteurs à agir dans des délais les plus courts possibles –⁠ la crise sanitaire nous y oblige.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

    Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire

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    Plusieurs orateurs ont évoqué la crise viticole. Bien que ce ne soit pas le périmètre de la proposition de loi, permettez-moi de revenir, en quelques mots, sur cette crise, qui est en effet profonde, ancienne et d’ampleur.
    Cette crise est multifactorielle. Parmi ses multiples facteurs, celui qui s’impose et qui n’est pas sans lien avec l’objet de la proposition de loi est évidemment le changement climatique, qui touche les filières végétales et animales.
    Au titre des facteurs structurels, il y a bien sûr l’évolution de la consommation de nos concitoyens : les Français consomment moins de vin, notamment moins de vin rouge. La demande étant plus faible, l’offre est supérieure à la consommation, ce qui met les viticulteurs en situation de surproduction et donc en grande difficulté. S’ajoute à cela la crise structurelle des coopératives, qui n’est pas sans aggraver les problèmes des viticulteurs.
    Bien sûr, l’État n’est pas resté sans réponse. Il a ainsi engagé, dans les années passées, près de 1 milliard d’euros en faveur de cette filière essentielle. Un plan d’arrachage visant à répondre à la surproduction a été lancé par mon prédécesseur, pour lequel 120 millions ont été consentis : 110 millions ont d’ores et déjà été consommés ; quant aux 10 millions restants, j’ai souhaité qu’ils soient affectés à la viticulture afin notamment d’aider les jeunes viticulteurs, percutés par la crise au moment où ils commencent leur activité et où ils ont des prêts importants à rembourser.
    J’ai par ailleurs instauré des prêts structurels, dont les premiers ont été signés durant le Salon de l’agriculture. Ces emprunts, qui peuvent aller jusqu’à 200 000 euros, sont garantis à 70 % par l’État et remboursables sur quatorze ans. J’ai également aménagé des dispositifs supplémentaires pour alléger les cotisations de la Mutualité sociale agricole (MSA) versées par les jeunes viticulteurs.
    Vous le voyez, la viticulture fait l’objet de tous les soins de la part du gouvernement. Le dispositif qui vous est proposé aujourd’hui a son utilité non seulement pour les vignes abandonnées, mais aussi et surtout pour les vignes en activité parce que la flavescence dorée, si elle n’est pas traitée par un arrachage, est appelée à se répandre et donc à perturber encore plus un secteur qui n’en a pas besoin.
    Voilà les remarques que je voulais faire en préambule, avant que nous n’attaquions l’examen des amendements.

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    Article 1er

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 8.

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    C’est un amendement de précision technique, qui vise à définir la disposition de manière objective. Si les délais fixés par l’administration doivent être raisonnables au regard de la jurisprudence, il n’est pas utile de le mentionner dans la loi. Sans changer quoi que ce soit sur le fond, la rédaction proposée rend la disposition plus claire.

    M. le président

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    Je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 5, par le groupe Rassemblement national ; sur les amendements no 6 et identique, par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire et Les Démocrates ; sur l’article 1er, par le groupe Rassemblement national.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis du gouvernement sur l’amendement no 8 ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Avis favorable. Monsieur le rapporteur, votre amendement me paraît tout à fait fondé. En effet, la notion de délai raisonnable n’a pas véritablement de fondement juridique et on peut laisser aux agents, qui, lors des contrôles, font preuve de discernement, le soin de fixer ce délai. La réglementation de l’Union européenne prévoit dans tous les cas une obligation de réactivité. Au total, les inspecteurs sont les mieux à même de déterminer les délais au regard des risques et des contraintes techniques.

    (L’amendement no 8 est adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Patrice Martin, pour soutenir l’amendement no 5.

    M. Patrice Martin

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    La lutte contre les maladies de la vigne est un enjeu vital pour notre patrimoine viticole. Pourtant la réglementation actuelle, trop lourde et centralisée, freine l’action des élus locaux face aux parcelles laissées à l’abandon, véritables foyers de contamination. Le présent amendement vise à donner aux maires les moyens d’appliquer plus efficacement les arrêtés de prévention et de lutte contre ces menaces sanitaires en s’inspirant des dispositifs existants pour les habitants en péril. Il ne s’agit pas de se substituer à l’autorité préfectorale mais d’apporter une réponse plus réactive et adaptée aux réalités du terrain. Simplifier ces procédures, c’est permettre une action plus rapide, délester les préfectures d’un grand nombre de démarches et mieux protéger nos exploitations. Nous devons donner aux élus les outils pour agir efficacement.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Nous avons pu constater, lors de nos travaux, que les mesures édictées dans le code rural en matière de protection des végétaux sont effectivement complexes. L’un des objectifs de la proposition de loi est justement de clarifier et d’améliorer l’application des mesures de lutte obligatoire contre les organismes nuisibles réglementés. Donner aux maires un pouvoir de police supplémentaire dans ces domaines n’aidera pas à la simplification, ni à la lisibilité des dispositions. Si plusieurs acteurs sont responsables de leur mise en œuvre, cela peut au contraire engendrer de la complexité, voire de la confusion. Par ailleurs, les services déconcentrés de l’État sont mieux outillés pour apporter des réponses efficaces et rapides quand la mesure sanitaire est imminente.
    Votre préoccupation est toutefois légitime. Sans doute faudra-t-il veiller à ce que les élus locaux soient mieux informés des mesures d’application prises dans leur territoire en matière de protection des végétaux ; mais cela ne se réglera pas dans le cadre de cette proposition de loi. Pour être utiles, les dispositions du texte doivent rester opérationnelles –⁠ et donc simples et claires.
    Je proposerai à l’auteur de l’amendement, M. de Lépinau, de réfléchir à l’implication des élus locaux dans la lutte contre les maladies liées aux organismes nuisibles réglementés dans le cadre des travaux du groupe d’études « Vigne, vin et œnologie ».
    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Votre amendement vise à offrir aux maires la possibilité de faire appliquer les mesures de lutte obligatoire, notamment sur les parcelles de vigne non cultivées infestées par la flavescence dorée, et de les faire exécuter d’office chez les propriétaires défaillants. Il est vrai que les procédures actuelles sont complexes et nécessiteraient d’être améliorées –⁠ c’est précisément l’objet de cette proposition de loi –, mais il ne me semble pas pour autant opportun de confier cette compétence aux maires.
    Actuellement, c’est le préfet de région qui a autorité compétente dans le domaine. Il s’appuie sur les services de l’État chargés de la protection des végétaux au sein de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf), formés à la reconnaissance des maladies des plantes et à la réalisation des prélèvements. Permettre aux maires de réaliser ces missions risque de créer de la confusion dans les attributions des différents acteurs. Il est préférable d’améliorer les procédures existantes.
    Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, je me verrai dans l’obligation d’émettre un avis défavorable.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 5.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        72
            Nombre de suffrages exprimés                72
            Majorité absolue                        37
                    Pour l’adoption                22
                    Contre                50

    (L’amendement no 5 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Pascale Got, pour soutenir l’amendement no 1.

    Mme Pascale Got

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    C’est un amendement rédactionnel mais qui conforte l’état d’esprit de la proposition de loi –⁠ dans le même sens, j’ai également déposé un sous-amendement visant à modifier le titre. Pour rester dans la logique selon laquelle on cherche non pas à punir mais à accompagner, je propose de substituer au mot « puni » le mot « passible ».

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Que l’on utilise le terme « passible » ou « puni » ne change rien ni en droit ni dans les faits. Je comprends que vous craigniez l’application mécanique, voire brutale, sans discernement, des sanctions à l’encontre d’agriculteurs en difficulté, mais ce n’est vraiment pas l’objet de cette proposition de loi. Dans les faits, rien n’empêchera les agents de police de privilégier la mise en garde lorsqu’ils constatent une première infraction ; rien ne les obligera à dresser un procès-verbal (PV) immédiatement. Ce genre de consigne ne relève pas du domaine législatif, mais il est évident que la sanction doit d’abord avoir une fonction dissuasive : dresser un PV ne doit être possible que si les premiers rappels à l’ordre sont inefficaces.
    J’ajoute qu’une contravention vise à sanctionner le non-respect d’une obligation : il n’est pas possible de la conditionner à une étude en amont, avec l’intéressé, sur les moyens de se conformer aux règles. En outre, les directions régionales du ministère de l’agriculture et les chambres d’agriculture diffusent régulièrement les informations sur les périmètres de lutte et les mesures à prendre. C’est également le cas de l’Institut français de la vigne et du vin (IFV) et des ODG que nous avons auditionnés. L’amendement est donc en pratique déjà satisfait ; je vous invite au retrait, sans quoi je donnerai un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Je me joins aux excellents arguments énoncés par M. le rapporteur. Par ailleurs, conduire une étude préalable à la mise en application des mesures, en plus de celles qu’effectuent les services de l’État, ne me paraît pas de nature à améliorer la connaissance de la situation…

    Mme Pascale Got

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    Ce n’est pas de cela qu’il s’agit !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    …et, surtout, conduirait à une complication supplémentaire alors que nous cherchons tous la simplification.

    (L’amendement no 1 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Sur les articles 2, 3 et 4, je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 6 et 9.
    La parole est à M. Jean-Luc Fugit, pour soutenir l’amendement no 6.

    M. Jean-Luc Fugit

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    Comme je l’ai annoncé dans la discussion générale, l’amendement vise à supprimer le conditionnement du dispositif de sanction présenté dans cette proposition de loi à la présentation systématique d’une aide financière aux viticulteurs. Si cette idée semble intéressante –⁠ on prétend garantir ainsi l’accès à la connaissance d’un droit –, elle devient inefficace dès lors qu’elle ne s’adapte pas à toutes les situations ; elle risque même de compromettre l’objectif du texte.
    Que veulent nos viticulteurs ? Comme je le disais tout à l’heure, ils demandent des outils réglementaires adaptés, rapides et efficaces. Soumettre le dispositif proposé par le rapporteur à des conditions ne répond pas aux attentes de nos viticulteurs. Je vous propose donc, avec cet amendement, de revenir à une rédaction plus opérante du dispositif en supprimant l’ajout adopté en commission des affaires économiques.

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 9.

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Comme l’a dit mon collègue Fugit, les professionnels sont déjà organisés pour trouver des solutions en cas de situation difficile, en privilégiant l’entraide et la solidarité. Il faut adopter une disposition claire, simple et opérationnelle, sinon nous risquons de ne pas être au rendez-vous des attentes de nos agriculteurs.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Favorable. Je suis d’accord : il ne paraît pas adapter de subordonner le dispositif à la présentation systématique d’une aide financière ; cela pourrait même le rendre inopérant, alors même que l’objectif de cette proposition de loi est de prévoir une meilleure gradation de l’échelle des peines pour assurer un meilleur respect de la réglementation.

    M. le président

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    La parole est à Mme Mathilde Feld.

    Mme Mathilde Feld

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    Pour celles et ceux qui n’étaient pas présents en commission des affaires économiques il y a quelques jours, je tiens à rappeler que cette formulation est issue de l’un de nos amendements, qui a été adopté. Elle a pour but de protéger les détenteurs pauvres qui risqueraient de subir une double peine : l’impossibilité financière d’arracher due à l’insuffisance de leurs revenus en raison de la crise viticole et, en plus, une contravention. Elle est essentielle pour inciter les interprofessions à structurer des mécanismes d’entraide là où ils n’existent pas encore et à accompagner ceux qui rencontrent les plus grandes difficultés financières. En supprimant cette formulation soucieuse des plus défavorisés, vous supprimez aussi cette précaution et cette incitation.
    Vous justifiez cette suppression, monsieur Ott, par deux arguments, l’un de forme, l’autre de fond. Sur la forme, les mots « arrachage » et « parcelle » ne sont pas réservés aux vignes. En conséquence, votre argument invoquant le risque de confusion est caduc.
    Sur le fond, vous indiquez que notre formulation subordonne le mécanisme à la présentation systématique d’une aide financière. Or ce n’est pas ce qui est écrit, puisqu’il s’agit de la nécessité d’informer sur les dispositions susceptibles d’aider celles et ceux qui veulent arracher.
    Je vais me faire un plaisir de citer Marc Fesneau (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem),

    M. Emeric Salmon

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    C’est jour de fête !

    Mme Mathilde Feld

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    …interrogé ce jour dans le journal Vitisphère : « La question est de revenir à un système contraventionnel plus opérant et plus facile à mettre en œuvre. Dans un contexte où il existe des dispositions pour aider ceux qui veulent arracher. »
    Monsieur Ott, vous avez assisté comme moi aux auditions des représentants des ODG, qui nous ont assuré exercer une mission d’entraide et de solidarité avec les plus démunis. La formulation introduite par notre amendement vise simplement à garantir que tel sera bien le cas dans les années à venir, y compris là où les mécanismes de financement de l’arrachage n’existent pas encore. Elle est donc essentielle pour garantir une loi juste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 9.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        79
            Nombre de suffrages exprimés                71
            Majorité absolue                        36
                    Pour l’adoption                66
                    Contre                5

    (Les amendements identiques nos 6 et 9 sont adoptés.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 1er, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        80
            Nombre de suffrages exprimés                80
            Majorité absolue                        41
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                4

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)

    Article 2

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 10, visant à supprimer l’article.

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    La volonté d’agir dans les meilleurs délais est satisfaite, l’administration veillant déjà à appliquer les mesures de lutte de manière efficace et rapide.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Le gouvernement est favorable à cet amendement de suppression. L’article 2 comporte l’expression « dans les meilleurs délais », dont nous avons indiqué, au cours de la discussion de l’article 1er, qu’elle n’était pas satisfaisante. Du reste, la réglementation européenne impose déjà une réaction immédiate des autorités et des détenteurs de végétaux.

    (L’amendement no 10 est adopté ; en conséquence, l’article 2 est supprimé.)

    Article 3

    M. le président

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    L’amendement de suppression no 11 de M. le rapporteur est défendu.
    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Avis favorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Pascale Got.

    Mme Pascale Got

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    Afin de rationaliser les nombreuses demandes de rapport, je propose de les regrouper au sein d’un même article. Tel est le sens de l’amendement no 3 rectifié que je défendrai dans quelques instants. Par conséquent, notre groupe s’abstiendra sur les amendements tendant à supprimer les autres demandes de rapport.

    (L’amendement no 11 est adopté ; en conséquence, l’article 3 est supprimé.)

    Article 4

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 12, tendant à supprimer l’article.

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Le dispositif vise la protection de tous les végétaux et pas seulement de la vigne. Le rapport demandé à l’article 4 n’est donc pas pertinent.

    (L’amendement no 12, accepté par le gouvernement, est adopté ; en conséquence, l’article 4 est supprimé.)

    Article 5

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 13, visant à supprimer l’article.

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Le rapport demandé ici ne saurait embrasser tous les enjeux ni tous les acteurs.

    (L’amendement no 13, accepté par le gouvernement, est adopté ; en conséquence, l’article 5 est supprimé.)

    Article 6

    M. le président

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    L’amendement de suppression no 14 de M. le rapporteur est défendu.

    (L’amendement no 14, accepté par le gouvernement, est adopté ; en conséquence, l’article 6 est supprimé.)

    Après l’article 6

    M. le président

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    La parole est à Mme Pascale Got, pour soutenir l’amendement no 3 rectifié, portant article additionnel après l’article 6.

    Mme Pascale Got

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    Vous affirmez qu’il n’est pas opérant de multiplier les rapports. Les effets du changement climatique sur le vignoble constituent toutefois un vrai problème. Nous avons donc besoin d’études et de recherches afin de trouver des solutions. Le rapport que nous proposons permettrait en outre d’apprécier l’opportunité d’une intervention de l’État, de préciser ses modalités et de prévoir les financements nécessaires dans les prochaines lois de programmation et de finances.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    L’amendement propose un rapport réunissant les différents thèmes des rapports demandés par les articles 2 à 6 que nous venons de supprimer. Avis défavorable.

    (L’amendement no 3 rectifié, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Titre

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 15, qui fait l’objet de trois sous-amendements, nos 16, 17 et 18.
    Les sous-amendements nos 17 et 18 sont identiques. 

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    L’amendement tend à clarifier le titre du texte, ainsi rédigé : « proposition de loi visant à instaurer des sanctions adaptées et proportionnées pour prévenir le développement des vignes non cultivées ».

    M. le président

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par le groupe Les Démocrates d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Pascale Got, pour soutenir le sous-amendement no 16.

    Mme Pascale Got

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    Ce sous-amendement vise à améliorer le titre du texte dans le même esprit que l’amendement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Mette, pour soutenir le sous-amendement no 17.

    Mme Sophie Mette

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    Si les mesures introduites par la proposition de loi constituent bien des solutions de lutte efficaces contre la flavescence dorée, elles concernent en réalité la protection de tous les végétaux. Plus généralement, le texte accroît la clarté et la cohérence des mesures de police imposant de lutter contre les organismes nuisibles réglementés, ce que notre sous-amendement permet de rappeler.

    M. le président

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    La parole est à M. Sylvain Carrière, pour soutenir le sous-amendement no 18.

    M. Sylvain Carrière

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    Monsieur le rapporteur, j’avoue que le nouveau titre que vous avez choisi m’étonne. Le titre initial de la proposition de loi, à savoir « Instaurer un dispositif de sanction contraventionnelle pour prévenir le développement de vignes non cultivées qui représentent une menace sanitaire pour l’ensemble du vignoble français », était conforme au contenu du texte présenté en commission. Puis vous vous êtes aperçu que le texte n’était pas conforme au droit européen. Comment défendre l’application d’un régime contraventionnel aux vignes en friche en excluant les abricotiers en friche, par exemple ? Vous avez donc entièrement réécrit la proposition de loi et vous avez fait disparaître toute référence aux vignes, ce qui est plus conforme au droit et à la hiérarchie des normes, je vous l’accorde.
    Alors que vous avez l’occasion de modifier à nouveau le titre de votre texte, vous le nommez : « Proposition de loi visant à instaurer des sanctions adaptées et proportionnées pour prévenir le développement des vignes non cultivées ». Le titre aurait dû faire référence à l’ensemble des végétaux qui pourront faire l’objet de l’amende contraventionnelle. L’amendement du groupe LFI-NFP vise donc à rétablir un peu de transparence dans le titre d’une proposition de loi dont le véritable champ d’application reste à déterminer tant elle a été modifiée depuis son dépôt initial. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces trois sous-amendements ?

    M. Hubert Ott, rapporteur

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    Avis favorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement sur l’amendement no 15 de M. le rapporteur et les sous-amendements dont il fait l’objet ?

    Mme Annie Genevard, ministre

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    J’émets un avis favorable à l’amendement de M. le rapporteur sous réserve de l’adoption des sous-amendements nos 16 et 17, en particulier celui de Mme Mette, qui élargit très opportunément à d’autres types de végétaux la notion de protection contre des organismes de quarantaine.

    M. Sylvain Carrière

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    Pourquoi ne mentionnez-vous pas le nôtre ?

    M. Erwan Balanant

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    Tu n’avais qu’à être sympa ce matin !

    (Le sous-amendement no 16 est adopté.)

    (Les sous-amendements identiques nos 17 et 18 sont adoptés.)

    (L’amendement no 15, sous-amendé, est adopté.)

    Explications de vote

    M. le président

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    Nous en venons aux explications de vote.
    La parole est à Mme Mathilde Feld.

    Mme Mathilde Feld (LFI-NFP)

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    Dans la crise inédite que traverse la viticulture, l’Entre-deux-Mers, en Gironde, est particulièrement touchée : des centaines d’emplois sont détruits –⁠ je pense en particulier à la situation de l’entreprise Yvon Mau à Gironde-sur-Dropt, qui se sépare de 80 % de ses employés, soit cinquante-sept personnes.
    Si la crise que traverse notre vignoble, indissociable du Bordelais et plus généralement de la culture française, est multifactorielle –⁠ cela a été rappelé à plusieurs reprises –, elle renvoie à des logiques et à des choix de production encouragés par une vision industrielle de la viticulture, partagée par les gouvernements successifs, et à l’absence de planification écologique et sanitaire, dont on voit à présent poindre les premiers effets. Elle témoigne aussi de l’échec des politiques agricoles menées jusqu’ici, car les nécessaires diversification et reconversion se brisent bien trop souvent sur les logiques de marché dans lesquelles sont enferrés nos agriculteurs.
    De telles logiques ne permettent pas de répondre à la crise viticole pas plus qu’aux questions brûlantes de renouvellement des générations et de transmission des exploitations, alors que nous sommes confrontés à une déconsommation globale du vin, du vin rouge notamment. Elles ne permettent pas davantage de satisfaire une revendication essentielle : une rémunération digne des producteurs, garantie par un prix juste.
    Qui plus est, cette crise nationale pourrait bien se doubler d’une crise internationale à très brève échéance si les droits de douane à 25 % brandis par les États-Unis venaient à s’abattre sur nos exportations. En effet, ce pays constitue la première destination des vins et spiritueux français, pour un chiffre d’affaires de 3,8 milliards d’euros.
    Dans un tel contexte, cette proposition de loi, avec son article unique, semble bien mince. Néanmoins, elle répond à la demande d’une partie de la filière, comme nous l’avons entendu au cours des auditions menées par M. le rapporteur et comme je l’ai constaté au cours de celles que j’ai conduites dans ma circonscription auprès des collectifs, des syndicats, des présidents de caves coopératives et des services de l’État concernés.
    Il est indéniable que pour lutter contre la flavescence dorée, il faut s’attaquer aux vignes laissées à l’abandon, afin d’éliminer les externalités négatives pour les exploitants voisins, qui affectent particulièrement celles et ceux qui ont fait le choix de produire en bio. C’est pourquoi les représentants des ODG et de la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie à appellation d’origine contrôlée (Cnaoc) réclament l’instauration d’une contravention qui doit inciter les propriétaires à agir. Nous tenons cependant à ce que cette contravention ne devienne pas un fardeau insurmontable pour ceux qui sont dépourvus des ressources nécessaires pour le faire.
    C’est pour cette raison que les amendements que nous avions fait adopter en commission étaient essentiels. Le même principe avait d’ailleurs conduit les parquets des tribunaux judiciaires de Bordeaux et de Libourne à ne cibler que des propriétaires ne rencontrant pas de difficultés financières lors des procédures judiciaires qu’elles avaient lancées à titre expérimental.
    En réécrivant totalement le texte adopté en commission des affaires économiques le 19 février dernier, vous faites peser un risque potentiel inacceptable sur les viticulteurs les plus défavorisés. Avec mes collègues du groupe LFI-NFP, nous avions fait le choix d’amender le dispositif pour nous assurer que la grande diversité des situations, et notamment celle des plus précaires, soit prise en compte, et que la contravention n’advienne qu’en dernier recours, après avoir porté à la connaissance du détenteur les solutions existantes pour le financement de l’arrachage.
    Contraints par l’article 40 de la Constitution, nous avions demandé des rapports pour nous enquérir des moyens mis en place par l’État pour lutter contre les maladies de la vigne. Nous le disons ici : ces moyens doivent être pérennisés. Détecter, prévenir ces maladies et lutter contre elles est un impératif absolu pour accompagner les viticulteurs et ne pas ajouter des crises sanitaires à la crise économique –⁠ cela a été rappelé ici plusieurs fois.
    À ce titre et eu égard aux différents entretiens que nous avons eus au Salon de l’agriculture, nous donnons l’alerte sur la nécessité de préserver une approche transversale de cette lutte, en garantissant le financement des Fredon, et d’éviter sa mise sous tutelle par les chambres d’agriculture, qui la réduirait à une approche de filière beaucoup moins efficace. L’État ne doit pas se contenter de fonctionner : il doit jouer son rôle d’accompagnateur et planifier une véritable stratégie en s’appuyant sur des acteurs reconnus, à l’heure où de nouvelles maladies émergentes sont à nos portes.
    Vous l’aurez compris, nous déplorons votre détermination à ne pas introduire, dans votre proposition de loi, une mesure qui visait simplement à encourager des organisations solidaires auprès des plus démunis. Nous nous abstiendrons donc. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à M. Frédéric Falcon.

    M. Frédéric Falcon (RN)

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    La flavescence dorée est une menace grandissante pour nos vignobles, comme dans ma circonscription de l’Aude, au cœur du Languedoc viticole menacé par la crise. Chaque année, elle progresse, détruit des ceps, affaiblit des exploitations et met en péril l’ensemble de notre filière viticole. Malgré les efforts déployés par les professionnels, leur mobilisation reste trop souvent entravée par l’inaction des pouvoirs publics et par l’absence d’outils adaptés pour répondre efficacement à cette crise. La réglementation en vigueur est inadaptée. La sanction pénale est lourde à mettre en œuvre, ce qui retarde l’application de mesures pourtant indispensables. Pendant ce temps, les foyers de contamination se multiplient, aggravant encore la situation. Il faut apporter une réponse plus rapide et plus efficace.
    La disposition clé de cette proposition de loi, qui instaure une contravention de 5e classe contre les parcelles abandonnées, permettra d’agir concrètement et immédiatement. En simplifiant les sanctions tout en conservant une réponse plus ferme pour les cas de refus d’exécuter les mesures de lutte, nous nous dotons enfin d’un levier utile pour protéger nos vignobles. Soutenir cette mesure, c’est répondre à la détresse du monde viticole ; c’est préserver un pan essentiel de notre agriculture ; c’est défendre notre patrimoine et notre identité nationale. Nous ne pouvons pas rester passifs face à cette catastrophe malheureusement engagée.
    Vous l’aurez compris, le groupe Rassemblement national votera avec plaisir en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        87
            Nombre de suffrages exprimés                83
            Majorité absolue                        42
                    Pour l’adoption                83
                    Contre                0

    (La proposition de loi est adoptée.)
    (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes EPR et HOR. –⁠ M. Guillaume Lepers applaudit également.)

    (La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)

    2. Sortie de l’indivision successorale

    Discussion d’une proposition de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de Mme Louise Morel et plusieurs de ses collègues visant à simplifier la sortie de l’indivision successorale (nos 823, 1004).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme Louise Morel, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    Mme Louise Morel, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Les sujets les plus techniques peuvent parfois revêtir des aspects très concrets pour nos concitoyens ; c’est le cas de l’indivision, particulièrement de l’indivision successorale. Avec mon collègue le député Nicolas Turquois, nous avons souhaité entamer des travaux sur ce sujet il y a maintenant deux ans, en nous inspirant des dispositifs en vigueur dans certains territoires de notre République, et tout singulièrement dans le droit local d’Alsace-Moselle et dans le droit ultramarin, en particulier la loi Letchimy de 2018, qui vise à faciliter la sortie de l’indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer.
    Le texte a recueilli l’unanimité en commission ; il nous reste une heure pour l’examiner dans le cadre de notre niche parlementaire. Je vous propose donc de passer rapidement à l’examen des amendements, pour apporter des réponses concrètes à des milliers de familles qui sont bloquées dans des indivisions persistantes, parfois depuis des décennies. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes EPR et HOR.)

    M. Erwan Balanant

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    La présentation la plus rapide de l’histoire ! (Sourires.)

    M. Olivier Falorni

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    Que cela inspire tout le monde !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Dix secondes, madame la ministre !

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Je vais essayer de raccourcir ! La présente proposition de loi répond à un problème ancien et bien connu, celui des indivisions successorales qui s’éternisent et paralysent notre foncier. Ces situations, sources de conflits, de blocages administratifs et d’inertie économique, sont devenues un enjeu d’intérêt général. Eu égard à la crise de l’offre que connaît le pays, nous ne pouvons pas nous permettre de voir des milliers de logements et de terrains laissés à l’abandon, faute d’accord entre héritiers. Nous ne pouvons plus accepter que des familles restent prisonnières d’une indivision qui leur interdit de disposer librement de leur patrimoine. Nous ne pouvons plus tolérer que la puissance publique soit entravée dans sa mission de préservation du domaine et de lutte contre la vacance immobilière.
    Cependant, la réforme que nous examinons touche à un équilibre délicat, celui entre le droit de propriété, qui est un principe constitutionnellement garanti, et l’impératif d’efficacité dans la gestion des indivisions successorales. Le dilemme est bien connu : l’article 545 du code civil prévoit que « nul ne peut être contraint de céder sa propriété », tandis que l’article 815 du même code nous dit que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision ». Cet équilibre, complexe à trouver, devient quasi intenable lorsque des indivisaires sont introuvables, silencieux ou opposés à toute solution.
    La loi dite Letchimy, du nom de son auteur, l’ancien député et actuel président de la collectivité de Martinique, dont je salue l’engagement (M. Erwan Balanant applaudit),…

    Mme Maud Petit

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    Oui !

    Mme Valérie Létard, ministre

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    …a été votée dans cet hémicycle en 2018. Elle s’attaquait à une réalité insupportable en outre-mer : du fait de successions non réglées, 30 à 40 % du foncier se trouvait immobilisé. Cette loi a permis des avancées mais elle n’a pas totalement trouvé sa cible. Les notaires ont encore du mal à s’engager dans les démarches nécessaires parce qu’elles sont coûteuses ; il faut rechercher des indivisaires et les procédures sont par ailleurs risquées sur le plan juridique.
    Je connais la mobilisation des parlementaires concernés et suis prête à travailler avec vous. La proposition de loi déposée par Mme Louise Morel et M. Nicolas Turquois comporte à son tour des mesures concrètes et efficaces pour accélérer la sortie des indivisions successorales et favoriser la mobilisation des biens vacants. Le texte initial a été substantiellement enrichi par les travaux de la commission des lois et je veux ici saluer la qualité du travail parlementaire, qui a permis d’aboutir à une rédaction plus équilibrée et plus opérationnelle.
    Ce texte est attendu par les élus locaux qui voient des biens se délabrer dans leur commune, par les notaires et par les juges qui sont confrontés à des successions interminables, et par les citoyens eux-mêmes, qui veulent pouvoir disposer librement de leur héritage. C’est une responsabilité collective de simplifier, de sécuriser et d’accélérer la sortie des indivisions. La proposition de loi qui vous est soumise y contribue de manière pragmatique et efficace ; c’est pourquoi le gouvernement vous appelle à l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    Discussion générale

    M. le président

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Quand vous circulez dans vos circonscriptions, demandez-vous pourquoi une maison de caractère se trouve à l’état d’abandon, sur la belle place du village pourtant totalement rénovée ou à l’entrée du bourg : c’est souvent lié à une indivision conflictuelle, à une succession qui a été mal préparée, et cela dure parfois depuis des dizaines d’années. Une telle situation est contre-productive : elle limite l’aménagement et l’embellissement du village ; elle fait obstacle à l’installation de nouvelles familles, et elle donne surtout au maire un sentiment d’impuissance. C’est ce problème que nous avons voulu traiter, Louise Morel et moi-même, en nous inspirant de dispositions existant dans le droit local mais aussi dans les territoires d’outre-mer, en particulier la loi Letchimy.
    Le droit à la propriété est constitutionnel, mais le fait que des indivisaires soient empêchés de vendre parfois pendant des dizaines d’années est aussi un frein à l’exercice du droit de propriété. C’est ce sujet que nous vous proposons d’examiner ce soir. (Mme la rapporteure et M. Jean-Carles Grelier applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Le sujet qui nous occupe en cette toute fin de soirée n’a a priori rien de très réjouissant, puisque nous parlons de successions, en particulier de celles qui traînent en longueur, faute d’entente entre les héritiers. Toutefois, au début de l’examen du texte, je vous avoue avoir eu quelques raisons de me réjouir, puisque votre proposition de loi visait initialement à étendre à l’ensemble du territoire national un dispositif que nous connaissons depuis 2018 en outre-mer : la loi Letchimy, qui vise à faciliter la sortie des indivisions de plus de dix ans.
    Dans les outre-mer, cette loi est en vigueur concurremment au droit commun : chez nous s’appliquent à la fois le code civil classique et la loi Letchimy. Elle permet, « pour toute succession ouverte depuis plus de dix ans, [aux] indivisaires titulaires de plus de la moitié en pleine propriété des droits indivis [de] procéder, devant le notaire de leur choix, à la vente ou au partage des biens immobiliers indivis ». Cela permet, lorsque les successions traînent en longueur, d’éviter la lourdeur d’une procédure judiciaire de liquidation et de partage, tout en laissant la majorité des indivisaires décider du sort de leurs biens –⁠ à charge pour eux soit de les partager, soit de les vendre.
    L’objectif poursuivi initialement nous convenait : même si la loi Letchimy est perfectible, elle a apporté chez nous un peu de souffle à toutes ces indivisions en souffrance. Votre texte, madame la rapporteure, était lui-même perfectible mais, en commission, vous l’avez profondément réécrit, au point qu’il n’a plus grand-chose à voir avec la loi Letchimy. Désormais, il vise principalement à instituer un système d’expropriation des biens indivis par la puissance publique, ainsi qu’un autre dispositif d’expérimentation, par les départements volontaires, d’une loi déjà applicable dans les départements du Haut-Rhin et de la Moselle. Nous voilà assez loin, finalement, de l’outre-mer, et ce que vous proposez ne correspond plus tout à fait au dispositif que nous approuvions à l’origine.
    Soyez tout de même assurée que ce n’est pas par chauvinisme que je m’oppose à votre texte : je crains simplement de voir inscrire dans la loi un nouveau dispositif d’expropriation, dépourvu de tout motif d’intérêt général, qui concernera principalement les successions les plus désargentées. Cela nous semble particulièrement attentatoire au droit de propriété, garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
    C’est la raison pour laquelle j’ai proposé un amendement de réécriture, comme je l’avais fait en commission, qui permet de retrouver l’esprit initial de votre texte et d’étendre le dispositif Letchimy en l’ajoutant au droit commun au lieu de s’y substituer –⁠ et cela sans prévoir de conditions nouvelles comme c’est le cas dans votre texte.
    Notre position sur le texte, vous l’aurez compris, dépendra de l’adoption de nos amendements, d’autant que vous souhaitez supprimer l’article, introduit en commission à l’initiative de mon collègue Frédéric Maillot, qui demande au gouvernement de dresser un bilan de la loi Letchimy. En l’occurrence, non seulement l’outre-mer a cessé de vous inspirer mais en outre, vous nous refusez un bilan de la loi de 2018 qui nous serait très utile puisqu’il n’y en a jamais eu depuis que le texte est en vigueur.
    Maigre consolation, votre article 1er crée une base de données qui recense les biens en état d’abandon. C’est un outil qui nous paraît tout à fait utile et même nécessaire, surtout dans les territoires qui sont confrontés à des problèmes de logements, comme c’est le cas chez moi à La Réunion. Cet apport me semble malheureusement un peu maigre, au regard des atteintes portées au droit de propriété et au droit successoral. En l’état, le vote du groupe GDR est donc suspendu au sort de ses amendements.

    M. le président

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    La parole est à Mme Lise Magnier.

    Mme Lise Magnier

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    Cette proposition de loi, à première vue technique, touche à l’un des sujets les plus structurants pour la vie des Français : le logement, dans sa dimension successorale. Le caractère très concret pour nos concitoyens des dispositions de ce texte, inscrit à l’ordre du jour de la niche du groupe Les Démocrates, ainsi que les questions importantes qu’il pose au sujet du droit de propriété, sans oublier la dimension affective des successions, en justifient l’examen approfondi.
    La tâche est d’autant plus sensible qu’elle intervient dans un contexte de crise du logement, aggravée par le nombre de plus en plus important de logements vacants alors même que, paradoxalement, nos concitoyens peinent à se loger.
    Le groupe Horizons & indépendants regrette de ne pas disposer de chiffres précis, toutefois, la hausse du nombre de logements vacants semble logiquement liée, au moins en partie, au cadre juridique des indivisions successorales. Les procédures actuelles de gestion des indivisions successorales sont en effet longues et conflictuelles en raison des droits contradictoires des indivisaires : au droit de rester dans l’indivision s’oppose celui de refuser la cession de propriété, ce qui a pour conséquence d’empêcher de remettre sur le marché des logements pourtant inoccupés, expliquant ainsi la pénurie de logements disponibles. Il convient donc de réfléchir collectivement aux mesures à prendre pour faciliter le règlement des successions complexes.
    Si le groupe Horizons & indépendants soutient pleinement les objectifs de cette proposition de loi, son caractère sensible au regard du droit à la propriété privée justifie une analyse article par article.
    Du fait des améliorations apportées en commission, notre groupe votera en faveur de ce texte qui pose une première pierre dans la réflexion que le législateur doit mener pour résorber la crise du logement dans notre pays, et prévoit des mesures utiles. Je tiens à en remercier chaleureusement la rapporteure. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Fayssat.

    M. Olivier Fayssat

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    Il est des héritages que l’on chérit, et d’autres que l’on subit. Il est des maisons familiales où résonne encore l’écho des rires d’antan, et d’autres qui sombrent dans l’oubli, prisonnières des lenteurs administratives et des querelles intestines. Notre code civil, depuis Napoléon, érige la propriété en droit fondamental, pierre angulaire de notre ordre juridique. L’article 544 dispose que « la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Lorsque l’indivision s’éternise, la pleine jouissance du bien devient un mirage.
    L’indivision successorale, telle qu’elle est régie aujourd’hui, est bien souvent un carcan, une impasse où le droit se fige et où les héritiers s’écharpent. La nécessité d’un consensus absolu, imposée par l’article 815 du code civil, transforme ce qui devrait être un patrimoine transmis en un champ de bataille juridique.
    Ce projet de loi s’attaque enfin à ces blocages. Il propose des mécanismes pragmatiques et équilibrés. Il abaisse ainsi la majorité requise de deux tiers à plus de la moitié pour certaines décisions, comme la vente d’un bien indivis. Il introduit un mécanisme de recensement des biens en état d’abandon pour mieux suivre les situations de blocage. Il donne aux autorités administratives le pouvoir de vendre un bien indivis dans certains cas où les indivisaires sont introuvables ou en succession vacante, sous le contrôle du juge. Il prévoit d’expérimenter pendant cinq ans un régime inspiré du droit alsacien-mosellan, où la procédure de partage judiciaire, plus souple, repose davantage sur le notaire et limite l’intervention du juge aux seuls cas de contestation majeure.
    C’est une réforme attendue, nécessaire, mais qui ne saurait être menée dans la précipitation, sans que des garde-fous soient prévus, car si nous devons déverrouiller l’indivision, nous ne devons pas pour autant ouvrir la porte aux spéculateurs et aux logiques purement marchandes. Une succession, ce n’est pas un bien comme un autre, ce n’est pas un simple actif à liquider. C’est une mémoire, une histoire, un ancrage.
    Nous devons veiller à ce que le droit de préemption des héritiers soit un véritable rempart contre la dépossession. De même, l’encadrement des délais de réponse ne doit pas précipiter les plus fragiles vers des choix irréversibles.
    Chers collègues, cette réforme est une avancée mais elle doit être accompagnée de garanties solides. Le prix de cession des parts indivises doit être déterminé de manière juste, pour éviter toute sous-évaluation abusive. La protection des indivisaires minoritaires doit être renforcée pour qu’aucun héritier ne se retrouve lésé ou contraint à vendre sous la pression. Notre rôle est de trouver l’équilibre entre efficacité et équité, entre fluidité et justice, entre la nécessaire transmission et la préservation des droits des héritiers.
    Le groupe UDR soutiendra donc cette réforme dans son principe, mais nous appelons à une vigilance accrue.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Guiniot.

    M. Michel Guiniot

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    Le texte que nous examinons vise à trouver des solutions à un problème que nous connaissons tous dans nos circonscriptions : la gestion des biens immobiliers en décrépitude souvent concernés par des indivisions successorales. Pour ce faire, vous avez choisi d’étendre au reste de la France un système qui a fait ses preuves dans l’Est pour faciliter la gestion des indivisions par les notaires en misant sur l’implication des familles concernées.
    Des amendements ont été adoptés en commission pour rendre ce texte plus constructif, afin de suivre les recommandations des différentes institutions auditionnées. Ce texte a une impulsion politique, certes, mais qui prend ses sources dans l’intérêt général, et je suis heureux que son examen en hémicycle soit possible, malgré l’heure tardive.
    Si la plupart de nos familles sont frappées, un jour ou l’autre, par des indivisions successorales, il faut préciser que toutes les indivisions ne seront pas concernées par cette proposition. Celle-ci s’applique à des discordes qui viennent durablement dégrader les paysages de nos circonscriptions, puisque les centres-bourgs et les centres-villes comptent tous des maisons en ruine qui leur font perdre leur attrait depuis parfois très longtemps, sans compter les risques qu’elles font courir aux voisins. Sans résoudre les problèmes, le texte donnera des clefs à toutes les personnes qui ont intérêt à faire évoluer la situation.
    Dans un premier temps, vous proposez de créer une base de données afin de recenser les biens qui ne sont plus entretenus, en état d’abandon, afin de permettre aux acteurs locaux d’agir. La constitution en sera difficile puisque ni les collectivités locales, ni les services de la publicité foncière n’ont beaucoup de temps ni de moyens à y consacrer, mais cet article représente une ouverture, une opportunité, pour faciliter leur action. Toutefois, il serait dommage de faire supporter une pareille charge à des administrations trop souvent démunies sans prévoir une quelconque compensation.
    Dans un second temps, vous proposez de compléter la publicité légale par un dispositif numérique. J’avais relevé que cette mesure pourrait réduire les revenus de la presse dite traditionnelle, déjà en difficulté, mais vos arguments m’ont globalement rassuré et j’espère que les rédacteurs et directeurs concernés, qui suivent peut-être ces débats, l’auront été également.
    L’article 2 offre au tribunal judiciaire la possibilité de faire intervenir l’autorité administrative chargée du domaine pour sortir de l’indivision. L’avis du juge sera sûrement plus neutre que celui des parties, qui peuvent se retrouver bloquées pour des raisons relevant davantage de l’humain que du juridique.
    L’article 3 prévoit d’abaisser le seuil requis pour aliéner un bien indivis avec l’autorisation du tribunal judiciaire, de deux tiers à la moitié des droits indivis. S’il s’agit initialement d’une disposition propre à l’outre-mer, le fait d’avoir concentré le dispositif sur un changement de majorité permettra de résoudre plus aisément certaines indivisions tout en laissant à chaque territoire ses spécificités.
    L’article 4 se rapporte à l’expérimentation des dispositions alsaciennes-mosellanes pour une durée de cinq ans dans les territoires volontaires.
    L’article 5 propose la rédaction d’un rapport faisant le bilan de la loi Letchimy. Il serait intéressant de connaître les effets de l’application, pendant sept ans, de cette loi en outre-mer.
    Enfin, l’article 6 prévoit également la remise d’un rapport, mais sur le principe de la voie de juridiction gracieuse qui existe dans les pratiques d’Alsace-Moselle.
    Selon le Rassemblement national, la volonté de mettre fin aux indivisions est louable car il s’agit de vitaliser nos campagnes, nos villes et de résoudre des problèmes du quotidien. Il est toutefois possible d’améliorer encore le texte. C’est ce que j’ai dit à plusieurs reprises lors des réunions auxquelles j’ai participé et je vous remercie pour l’accueil que vous m’avez réservé. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Huyghe.

    M. Sébastien Huyghe

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    En 2023, selon l’Insee, 3,1 millions de logements étaient vacants en France hors Mayotte, soit 8,2 % du parc de logements. De nombreuses raisons peuvent expliquer ce phénomène, les indivisions longues étant l’une d’elles.
    Le diagnostic est aujourd’hui indiscutable : alors que par nature une indivision doit être transitoire, certaines indivisions successorales litigieuses peuvent durer jusqu’à dix, vingt, trente, voire quarante ans. Les litiges découlent d’une mésentente entre indivisaires, d’une inertie de certains ou du fait d’une identité ou d’une adresse inconnue. Lorsque l’indivision s’étend sur plusieurs générations, la résolution du litige est d’autant plus complexe.
    Conséquence de cette réalité, nous assistons à une multiplication de biens immobiliers en état d’abandon qui peuvent être sources de nuisances préoccupantes. Je pense notamment aux squats et occupations illégales, à l’insalubrité ou encore à la dégradation du cadre de vie.
    N’importe quel citoyen peut se retrouver dans une situation d’indivision : nous traitons donc aujourd’hui d’un sujet d’intérêt général. Je tiens à remercier Louise Morel et Nicolas Turquois pour leurs travaux et, surtout, pour avoir permis que l’indivision successorale revienne à l’ordre du jour. C’est un sujet technique mais dont les répercussions seront très concrètes pour nos concitoyens.
    La procédure de partage est encadrée par les articles 816 à 842 du code civil, au sein du titre Ier intitulé « Des successions » du livre III. Il est néanmoins important de préciser que les indivisions ne sont pas uniquement successorales mais peuvent être de toute autre nature, notamment post-communautaires.
    Si une simplification de la procédure de partage est nécessaire, il est essentiel de réfléchir à ce que pourrait être la nouvelle procédure. C’est bien l’objet de la proposition de loi qui constitue une première étape.
    Il est prévu, à l’article 1er, de créer une base de données recensant les biens en état d’abandon. Le 1er bis tend à ce que la publicité de l’ordonnance du juge qui désigne l’État, en pratique la DNID, la direction nationale d’interventions domaniales, comme curateur dans le cadre d’une succession vacante, puisse légalement intervenir par voie numérique.
    L’article 2 vise à mettre fin aux indivisions constituées depuis au moins dix ans ou comprenant un indivisaire dont la succession est déclarée vacante. Il permet donc à l’autorité administrative chargée du domaine agissant comme curateur de vendre un bien indivis sur autorisation du tribunal judiciaire.
    Il est proposé dans l’article 3 d’autoriser les indivisaires d’une succession vacante depuis plus de dix ans, représentant plus de la majorité des droits indivis, à provoquer la vente ou le partage des biens immobiliers indivis. Ce seuil est déjà applicable dans certaines collectivités d’outre-mer en vertu la loi du 27 décembre 2018, dite loi Letchimy.
    L’article 4 introduit en droit commun, sous forme d’expérimentation d’une durée de cinq ans, dans les départements volontaires et dans des conditions fixées par décret, le principe de la voie de juridiction gracieuse issu de la loi du 1er juin 1924 du droit local alsacien-mosellan, afin de ne pas réserver la possibilité d’un recours en justice aux seuls cas où une procédure de partage amiable a été réalisée.
    Enfin, les articles 5 et 6 prévoient deux remises de rapport par le gouvernement au Parlement, le premier relatif au bilan de la loi Letchimy de 2018, le second consacré au principe de la voie de juridiction gracieuse de la loi du 1er juin 1924 du droit alsacien-mosellan.
    Cette proposition de loi apporte des outils pour simplifier la sortie de l’indivision successorale. Il s’agit d’un premier pas utile même si les travaux ont démontré qu’une réforme complète de la procédure de partage serait nécessaire. C’est naturellement que le groupe EPR votera en faveur de ce texte qui permettra, j’en suis convaincu, d’éviter certaines situations de blocage qui allongent et compliquent les sorties d’indivision. Il permettra également d’apporter sa pierre à l’édifice pour résoudre la question des logements vacants. Je souligne néanmoins la nécessité d’aller encore plus loin pour une refonte de la procédure de partage. Nous poursuivrons donc nos réflexions en ce sens. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Votre proposition de loi, madame la rapporteure, vise à simplifier la sortie de l’indivision successorale : en effet, vous le soulignez, des biens sont laissés à l’abandon à cause d’indivisions conflictuelles ou de successions vacantes. Nous partageons l’objectif de ne pas laisser à l’abandon des logements indispensables aux nombreux mal-logés de notre pays, en particulier dans les territoires ultramarins.
    Dès le premier paragraphe de votre exposé des motifs, vous évoquez le contexte de la crise du logement et la question des logements vacants –⁠ dont vous évaluez le nombre à plus de 91 000 dans l’Hexagone et outre-mer. Vous rappelez également le nombre de personnes mal logées en France, soit plus de 4 millions de personnes d’après le dernier rapport annuel de la Fondation pour le logement des défavorisés.
    Pourtant, malgré ces rappels de faits et de chiffres, rien dans votre proposition de loi ne permet de résoudre la problématique majeure que vous énoncez puisqu’elle ne comporte pas un mot sur la réquisition des logements vacants. Rappelons qu’aujourd’hui 2,7 millions de ménages sont en attente d’un logement social et que le nombre de logements sociaux accordés est inversement proportionnel à la demande : on compte 393 000 attributions en 2023, c’est-à-dire 100 000 de moins qu’en 2016.
    Pour répondre à la demande, faire face à la crise du logement et garantir le droit fondamental au logement, il nous semble primordial de compléter votre texte et d’étendre les possibilités de réquisitionner les logements vacants. La France insoumise souhaite que les biens en déshérence depuis plus de dix ans, quelle qu’en soit la raison, deviennent un patrimoine public, que le droit à la réquisition soit étendu aux maires, que le parc hôtelier touristique fasse partie de la liste des locaux réquisitionnables et, enfin, que la réquisition des locaux appartenant à des personnes morales soit prononcée après six mois de vacance, et non plus douze mois, sans possibilité d’y échapper.
    Tel est le sens de la proposition de loi visant à moderniser réellement la loi de réquisition des logements vacants pour garantir le droit fondamental au logement que nous avons déposée le 23 janvier 2024.
    Votre texte ne révolutionnera pas la réquisition des logements et ne changera absolument rien à la grave pénurie de logements décents et abordables pour les personnes les plus modestes, c’est pourquoi le groupe La France insoumise conditionne son vote à l’adoption des amendements du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

    M. le président

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    La parole est à Mme Céline Thiébault-Martinez.

    Mme Céline Thiébault-Martinez

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    Dans le cadre d’une succession, l’indivision survient lorsque plusieurs héritiers détenant un bien n’arrivent pas à se mettre d’accord sur son partage. Problématique assez méconnue, l’indivision successorale peut engendrer de nombreuses difficultés : conflits entre héritiers, impossibilité de valoriser ou d’entretenir un bien et blocage prolongé de la propriété.
    Les élus locaux doivent régulièrement traiter des situations dans lesquelles des biens immobiliers, qui ne sont manifestement plus entretenus, se dégradent au fil des ans et provoquent parfois des désagréments de toute sorte pour le voisinage. Ces biens peuvent être bloqués en indivision : c’est l’une des raisons qui a poussé le législateur à se saisir de cette question.
    Dans certains territoires d’outre-mer, on estime que près de 40 % des terres sont bloquées par l’indivision. Si ce chiffre impressionnant reflète l’ampleur du phénomène dans ces collectivités, le manque de données précises empêche une véritable évaluation du problème à l’échelle nationale. Dans son article 1er, la proposition de loi tente de résoudre cette difficulté en créant une base de données relative au recensement des biens abandonnés. C’est une disposition intéressante que nous saluons.
    Plus globalement, le texte contient un certain nombre de mesures visant à faciliter la sortie de l’indivision successorale. Pour ce faire, il s’inspire de dispositifs qui ont déjà fait leurs preuves dans certains territoires français.
    Son contenu a été en partie réécrit en commission des lois afin de mieux répondre aux préoccupations soulevées lors des auditions et des travaux qu’elle a menés. À l’issue des débats, le groupe Socialiste et apparentés s’est prononcé en faveur du texte.
    Toutefois, comme d’autres députés l’ont fait valoir, nous ne pouvons surestimer l’impact qu’auront ces dispositions sur la crise du logement. Un peu plus de 4 millions de personnes sont mal logées en France ; 350 000 personnes vivent sans domicile, dans la rue ou en hébergement d’urgence. La production de logements s’effondre : en 2024, seulement 259 000 logements ont été mis en chantier, dont à peine 82 000 logements sociaux. C’est un niveau historiquement bas si l’on regarde les vingt dernières années. Enfin, le nombre de ménages demandeurs d’un logement social ne cesse d’augmenter et plus de 19 000 ménages ont été expulsés de leur domicile cette année.
    Ces chiffres sont accablants : ils illustrent une crise d’une ampleur inédite, exacerbée par des choix budgétaires successifs qui, depuis sept ans, ont fragilisé l’accès au logement de millions de Français.
    Dans cette situation, faire du logement un droit effectif et accessible à tous est une nécessité. Comme nous l’avons affirmé lors des débats budgétaires, il est indispensable de soutenir l’accession à la propriété, par exemple en rétablissant le prêt à taux zéro. En effet, alors que sept jeunes âgés de moins de 35 ans sur dix souhaitent devenir propriétaires, plus de quatre sur dix en sont empêchés par manque de moyens.
    Il faut aussi défendre la location de longue durée et lutter ainsi contre la spéculation et la flambée des loyers. Il faut enfin construire et rénover des logements à loyer modéré pour répondre aux besoins urgents des classes populaires et moyennes.
    Alors que les besoins en matière de logement sont immenses, les actions législatives concrètes pour y répondre se font de plus en plus rares. Cet immobilisme inacceptable a des conséquences sur l’ensemble de la société.
    Nous voterons ce texte car il apporte une réponse aux difficultés liées à l’indivision successorale, mais cette proposition de loi, aussi utile soit-elle, ne saurait, je le répète, résoudre la crise du logement. Les Françaises et les Français attendent de nous une législation ambitieuse en la matière : soyons à la hauteur ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Dem. – Mme Léa Balage El Mariky applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Lepers.

    M. Guillaume Lepers

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    L’indivision successorale est une problématique qui concerne de nombreuses familles françaises ; lorsqu’elle se prolonge, elle peut rapidement devenir un véritable casse-tête juridique et administratif. Trop souvent, des héritiers se retrouvent prisonniers d’un bien qu’ils ne peuvent ni vendre, ni rénover, ni occuper, faute d’accord entre tous les indivisaires.
    Cette situation a des conséquences lourdes, avec des logements vacants qui se dégradent et des contentieux qui s’enlisent pendant des décennies. Les collectivités locales sont démunies devant ces biens en déshérence.
    Dans un contexte de crise du logement et de pression foncière, qui nécessite une réponse urgente, adaptée et efficace, la proposition de loi constitue une solution pragmatique et équilibrée. Elle simplifie en effet les règles de cession des biens indivis tout en maintenant les protections essentielles pour les héritiers les plus vulnérables.
    Certaines successions restent bloquées pendant des années –⁠ voire des décennies –, avec des biens qui tombent en ruine, faute de décision possible entre coïndivisaires. Cela n’est plus acceptable ! En facilitant la vente des biens indivis, en permettant aux tribunaux d’intervenir plus efficacement et en instaurant une base de données des biens vacants, ce texte s’attaque à un problème majeur. Il permettra à de nombreuses familles de sortir de situations injustes et évitera que des logements restent inoccupés alors qu’ils pourraient être utiles.
    Le texte ne profitera pas seulement aux héritiers : les collectivités locales, souvent démunies face à ces biens vacants, pourront, elles aussi, en tirer profit. Grâce à la simplification des procédures d’aliénation, elles disposeront de nouveaux outils pour récupérer et valoriser du foncier aujourd’hui inutilisable. C’est un levier important pour redynamiser certains territoires et répondre aux besoins de logements.
    Bien sûr, des points de vigilance demeurent : nous devrons nous assurer que les moyens nécessaires soient mobilisés pour rendre efficace la base de données des biens vacants. Nous devrons veiller à ce que les indivisaires minoritaires ne soient pas lésés et à ce que les tribunaux disposent des ressources suffisantes pour appliquer ces nouvelles dispositions.
    Il demeure que, dans l’ensemble, cette réforme est une avancée attendue depuis longtemps : elle apporte une réponse concrète à un problème qui concerne de nombreuses familles et offre des solutions adaptées aux réalités de terrain auxquelles les élus font face. C’est pourquoi le groupe Droite républicaine votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Léa Balage El Mariky.

    Mme Léa Balage El Mariky

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    L’héritage reste une source de discorde éternelle au sein de certaines familles. L’attachement sentimental des uns peut se heurter aux impératifs économiques des autres. La prise de décision est souvent ralentie par la nécessité d’obtenir l’accord unanime des héritiers, ce qui conduit à des blocages parfois interminables.
    Au-delà des tensions familiales qu’elles génèrent, les difficultés de l’indivision successorale ont un impact évident au niveau social : en effet, faute d’un consensus familial, de très nombreux biens restent inoccupés alors même que notre pays connaît une crise inédite du logement. Les chiffres rappelés par les auteurs du texte sont éloquents : les biens indivis représentent 22 % du stock de logements vacants.
    Il est donc nécessaire d’agir pour que ce patrimoine ne reste pas en déshérence ad vitam æternam. Dans le contexte actuel de crise du logement, la fluidification de la gestion des successions semble un objectif louable.
    Toutefois, nous ne devons pas tomber dans l’excès inverse et autoriser que certains héritiers soient lésés par des décisions prises sans leur consentement éclairé. Des garanties solides doivent absolument leur être accordées. En la matière, notre commission des lois a commencé à faire preuve de sérieux et de discernement.
    Je salue également la disparition d’une anomalie qui figurait dans le texte et que nos collègues socialistes et Insoumis avaient pointée en commission : les prérogatives accordées à l’administration en cas de succession vacante s’appliquent désormais à tous, et pas uniquement aux successions de valeur modeste. C’est une avancée dont il faut se féliciter.
    Cependant l’équilibre trouvé dans ce texte entre le déblocage des indivisions laborieuses et la protection des héritiers susceptibles d’être lésés pourrait encore être amélioré. C’est pourquoi le groupe Écologiste et social soutiendra les amendements du groupe GDR qui apportent davantage de garanties.
    Si ce texte est présenté comme un moyen de lutter contre le logement vacant, il ne saurait à lui seul répondre à la crise du logement. À Paris, où je suis élue, 7 000 logements vides supplémentaires sont dénombrés chaque année. La cause de ce fléau est parfaitement connue : c’est la spéculation immobilière qui prive les plus vulnérables d’entre nous de leur droit d’accéder à un logement.
    Il nous faut donc agir plus largement sur les logements inoccupés, qui constituent une réserve foncière indéniable. Plusieurs leviers peuvent être utilisés pour empêcher leur multiplication. Je pense à la proposition de loi, déposée le 4 février dernier par notre collègue sénateur Ian Brossat, qui prévoit de taxer davantage les propriétaires pour les inciter à les remettre sur le marché des logements qui n’y sont plus. Je songe aussi au droit de réquisition évoqué par mon collègue Insoumis. Ces propositions pourraient inspirer le groupe Les Démocrates dans sa lutte contre le mal-logement.
    En résumé, le groupe Écologiste et social est favorable à la simplification que propose ce texte, eu égard aux préoccupations dont il a été tenu compte en commission. Nous voterons en sa faveur mais il serait judicieux d’inscrire ces mesures dans une approche globale et cohérente de la problématique du logement. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et Dem.)

    M. le président

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    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    Article 1er

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Guiniot, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Michel Guiniot

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    Il vient préciser la notion d’état d’abandon. Celle-ci figure au sein du code général de la propriété des personnes publiques pour désigner les bateaux abandonnés sur le domaine public fluvial. Elle est aussi mentionnée dans le code rural à propos des terrains des associations foncières pastorales et dans le code des collectivités territoriales via la procédure d’état d’abandon manifeste.
    L’amendement vise à écarter tout risque de méprise dans l’interprétation, conformément à ce qui a été évoqué lors de l’audition de la direction nationale d’interventions domaniales.
    La formulation proposée permet également de prendre en considération uniquement les immeubles et non l’ensemble des biens –⁠ meubles et terrains –, tout en se fondant sur des critères objectifs et manifestes qui permettront de faciliter la récolte des informations.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Sagesse.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Défavorable.

    (L’amendement no 1 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 8 de Mme la rapporteure est rédactionnel.

    (L’amendement no 8, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    (L’article 1, amendé, est adopté.)

    Après l’article 1er

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Guiniot, pour soutenir l’amendement no 2, portant article additionnel après l’article 1er.

    M. Michel Guiniot

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    Je n’avais pas présenté cet amendement pour l’examen du texte en commission, le 19 février dernier. Il vise à lever certaines craintes évoquées lors des auditions et dont ont fait part les maires de ma circonscription.
    À mon sens, il faudrait ajouter, à l’article 809-1 du code civil, qui précise les modes de saisine de l’administration des domaines pour gérer les successions vacantes, que les maires ont bien un intérêt à agir lorsque des immeubles de leur commune présentent un état de dégradation important.
    En effet, les Domaines ne peuvent s’autosaisir des successions dites vacantes et, si les maires connaissent un grand nombre des biens appartenant aux successions, ils ne connaissent pas toujours les choses en détail.
    Une telle précision viendrait compléter utilement le dispositif prévu à l’article 1er puisqu’elle permettrait aux maires, sitôt la situation connue, d’engager une action. La loi ne doit pas être trop bavarde –⁠ je vous le concède – mais vous savez comme moi qu’un grand nombre d’indivisions complexes ne trouvent pas de solution. Avec cette disposition, nous apporterions une petite pierre à l’édifice de leur résolution.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Cet amendement est satisfait mais la commission l’a accepté au cours de la réunion qu’elle a tenue ce matin en application de l’article 88 du règlement.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Pour la même raison, j’émets l’avis inverse. Comme l’a dit la rapporteure, cet amendement est superfétatoire.

    M. Jean Terlier

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    Il est satisfait !

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 2.
    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        47
            Nombre de suffrages exprimés                44
            Majorité absolue                        23
                    Pour l’adoption                22
                    Contre                22

    (L’amendement no 2 n’est pas adopté.)

    Article 1er bis

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi, pour soutenir l’amendement no 14, qui tend à supprimer l’article 1er bis.

    Mme Émeline K/Bidi

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    L’article impose une publicité uniquement par voie numérique alors qu’aujourd’hui les annonces judiciaires et légales peuvent également être publiées dans la presse écrite. Il ne laisse pas le choix entre ces deux possibilités. Je comprends que cela puisse faciliter les choses mais je rappelle, d’une part, que de nombreuses personnes souffrent d’illectronisme et, d’autre part, que certains journaux ont besoin des annonces légales pour vivre. C’est pourquoi je propose de supprimer l’article et de nous en tenir au droit actuel.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Je comprends votre préoccupation mais je tiens à éclaircir ce point. L’article prévoit que la publicité de l’ordonnance judiciaire qui désigne les Domaines comme curateurs d’une succession vacante « peut être assurée » sur le portail numérique –⁠ ce qui correspond à une demande de la DNID. Cependant, cette modalité vient s’ajouter à la publicité traditionnelle dans un journal d’annonces légales, elle ne l’exclut nullement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Même avis pour les mêmes raisons.

    (L’amendement no 14 est retiré.)

    M. le président

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    L’amendement no 9 de Mme la rapporteure est rédactionnel.

    (L’amendement no 9, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    (L’article 1er bis, amendé, est adopté.)

    Article 2

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi, pour soutenir l’amendement no 15, qui tend à supprimer l’article 2.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Comme je l’ai expliqué lors de la discussion générale, le dispositif que vous proposez ne simplifie pas grand-chose. Il requiert le cumul de trois conditions : la succession doit être ouverte de plus de dix ans et comprendre un coïndivisaire décédé depuis au moins deux ans dont la succession est déclarée vacante. Par conséquent, très peu de successions seront concernées.
    En outre, et surtout, les solutions que vous proposez face à ces successions bloquées sont l’expropriation et la licitation par l’autorité administrative.
    Vous vous inspiriez pourtant au départ de la loi Letchimy, laquelle permet de régler un nombre beaucoup plus élevé de successions sans prévoir d’expropriation –⁠ je proposerai d’ailleurs, avec mon amendement no 16 à venir, d’appliquer cette loi à l’ensemble du territoire.
    Le dispositif prévu à l’article 2 concerne si peu de successions que ce n’est pas ainsi que vous réglerez la crise du logement. Par ailleurs, si l’administration a des vues sur une parcelle et a l’intention d’y construire des logements, elle peut toujours recourir à une déclaration d’utilité publique, exproprier et construire.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    J’aimerais donner quelques informations à Mme la députée. Certes, les conditions sont très restrictives mais je rappelle que le dispositif prévu est le fruit d’un travail mené avec les acteurs concernés que nous avons auditionnés. Nous souhaitions mettre fin à des procédures longues et complexes, or il est apparu que les critères retenus permettraient, par l’effet de levier produit, de débloquer ces successions.
    Par ailleurs, votre amendement, semble-t-il, ne tient pas compte des modifications apportées en commission. Le dispositif a été recentré puisque le demandeur doit désormais justifier de diligences entreprises en vue d’identifier et de localiser les indivisaires. Grâce à l’ajout de ces garanties, nous sommes loin de pouvoir parler d’expropriation.
    Enfin, conformément aux souhaits et aux inquiétudes formulées par plusieurs groupes de gauche en commission, nous avons supprimé la possibilité d’une vente au cas où l’un des indivisaires s’y opposerait ou ne serait pas en mesure d’exprimer sa volonté.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    L’objectif de l’article 2, tel qu’adopté par la commission, est de permettre à la DNID de vendre les biens indivis, y compris lorsqu’elle fait face à des indivisaires inconnus ou qui ne sont pas localisés.
    Je partage pleinement cet objectif puisqu’en droit positif aucun mécanisme ne permet de sortir de l’indivision lorsqu’il n’est pas possible d’identifier ou de connaître l’adresse d’un indivisaire.
    La nouvelle version de l’article 2 enrichit le texte initial en encadrant davantage le dispositif. La navette parlementaire sera l’occasion d’améliorer encore cette disposition qui va dans le bon sens et de prévoir le dispositif le plus adapté pour mettre fin aux indivisions bloquées tout en veillant à sa bonne articulation avec l’ensemble des dispositifs existants de sortie des indivisions prévus par le code civil.
    Le gouvernement demande le retrait de l’amendement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    M. Jean Terlier

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    Il faut retirer l’amendement !

    Mme Émeline K/Bidi

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    Madame la ministre, vous dites vous-même que la navette permettra d’améliorer le dispositif. Vous convenez donc qu’il est largement perfectible. Nous attendrons donc qu’il soit totalement abouti pour le voter. Je maintiens mon amendement.

    (L’amendement no 15 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Guiniot, pour soutenir l’amendement no 4 rectifié. Vous voudrez bien présenter en même temps votre amendement no 3, monsieur le député ?

    M. Michel Guiniot

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    Bien sûr. J’avais déjà déposé en commission un sous-amendement visant à préciser quel était le tribunal compétent –⁠ c’est l’objet de mon amendement no 4 rectifié. La rapporteure avait alors expliqué qu’elle avait sollicité l’avis de la DACS, la direction des affaires civiles et du sceau, sur cette question et elle avait émis un avis de sagesse.
    Lors des auditions, le Conseil supérieur du notariat a relevé dans la formulation initiale un problème quant à la juridiction désignée compétente pour contester. Le tribunal compétent n’étant pas précisé dans l’amendement, il faut l’indiquer afin d’éviter toute confusion entre le tribunal du lieu d’ouverture de la succession, le tribunal du lieu de situation de l’immeuble, le tribunal du ressort de l’autorité administrative concernée et le tribunal du ressort de l’indivisaire qui souhaite manifester son opposition à l’aliénation. Cet amendement vise uniquement à faciliter l’interprétation de l’article nouvellement rédigé.
    L’amendement no 3 est défendu.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    La proposition que vous formulez dans votre amendement no 4 rectifié est certes inspirée par une demande du Conseil supérieur du notariat, mais celui-ci a également recommandé de réserver les précisions de procédure au code de procédure civile. Sur cet amendement, j’émets donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
    Sur l’amendement no 3, j’émets un avis défavorable.

    (Les amendements nos 4 rectifié et 3, repoussés par le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    (L’article 2 est adopté.)

    Article 3

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi, pour soutenir l’amendement no 16.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Il vise à étendre à l’ensemble du territoire national le champ d’application de la loi Letchimy. Actuellement, lorsque des héritiers ne peuvent régler un conflit de succession à l’amiable, il leur faut saisir le tribunal en vue d’une procédure de liquidation-partage.
    La loi Letchimy offre une voie intermédiaire avec un dispositif qui concerne un nombre bien plus important de successions que le dispositif prévu par votre texte. Il suffira en effet, pour qu’il s’applique, que la succession soit ouverte depuis au moins dix ans et que la majorité des indivisaires soient d’accord pour décider du partage ou de la vente. Ainsi, on ne laisse pas les Domaines récupérer le bien et le mettre aux enchères. Aucun indivisaire n’est lésé, chacun reçoit sa part mais la règle de la majorité permet de sortir de la situation de blocage et d’éviter une procédure judiciaire.
    Ce dispositif, dérogatoire au droit commun, s’applique en outre-mer depuis 2018 à un grand nombre de successions. Il a fait ses preuves et mérite d’être étendu au territoire national. Certes il est perfectible mais nous connaissons bien ses modalités et son champ d’application.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Nous avons décidé de ne pas généraliser la loi Letchimy car une extension pure et simple aurait risqué d’entraîner des effets de bord importants compte tenu de la différence de situation entre les outre-mer et l’Hexagone en matière de foncier.
    Cependant, nous nous inspirons de la loi Letchimy puisque nous avons prévu l’abaissement du seuil pour la vente du bien.
    Par ailleurs, l’application du texte depuis 2018 doit prochainement faire l’objet d’une évaluation, à la demande de la commission des lois.
    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Les orateurs précédents n’ont cessé de répéter que votre loi était formidable parce qu’elle réglerait le problème du logement, mais lorsqu’on vous propose un dispositif qui s’applique sur l’ensemble du territoire national et qui vise justement à résoudre le problème –⁠ les indivisaires régleront eux-mêmes leur succession en se mettant d’accord soit pour vendre le bien soit pour le récupérer et habiter dans le logement –, vous n’en voulez pas car vous nous expliquez qu’il y aurait des effets de bord –⁠ sans préciser lesquels –, sous prétexte qu’aucun bilan n’aurait encore été dressé du dispositif outre-mer et que l’évaluation est à venir.
    Dans le même temps, le texte prévoit l’extension du dispositif appliqué en Alsace-Moselle pour lequel on ne dispose pas non plus de bilan –⁠ mais vous indiquez dans la loi qu’un bilan sera tiré.
    Tout cela n’est pas très cohérent.

    (L’amendement no 16 n’est pas adopté.)

    (L’article 3 est adopté.)

    Article 4

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Yadan, pour soutenir l’amendement no 17, tendant à supprimer l’article 4.

    Mme Caroline Yadan

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    Le texte adopté par la commission contient deux articles qui nous paraissent contradictoires, sentiment partagé par le Conseil national des barreaux.
    D’une part, l’article 4 prévoit une expérimentation, d’autre part, l’article 6 prévoit la remise d’un rapport. Or ces deux éléments sont contradictoires, puisqu’il faudrait d’abord attendre le rapport avant d’envisager une expérimentation, voire une évolution de la loi.
    Comme vous l’avez rappelé, madame la rapporteure, une procédure d’expérimentation est complexe, lourde, parfois coûteuse, et, dans tous les cas, contraignante. N’ajoutons donc pas de la complexité à la complexité.
    Je propose en conséquence d’en rester au stade du rapport, étant donné que l’expérimentation nécessiterait une évolution radicale qui affecterait tous les acteurs judiciaires : avocats, magistrats… Restons-en au rapport, puis nous verrons par la suite.

    (L’amendement no 17, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 21 et 5 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Caroline Yadan, pour soutenir l’amendement no 21.

    Mme Caroline Yadan

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    Il porte sur les modes alternatifs de règlement des différends et la possibilité d’autoriser un partage amiable en cas de contestation selon des délais et modalités fixés par décret.
    Cette proposition prend pour modèle le droit de la famille, qui propose aux parties une médiation ou tout du moins un mode de règlement susceptible d’ouvrir un espace de dialogue et d’écoute afin d’éviter les tensions.
    J’insiste sur le fait que ça marche. Dans 80 % des cas, la médiation fonctionne ; ne nous en privons pas. Nous avons la possibilité de l’inscrire dans la loi ; faisons-le !

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Guiniot, pour soutenir l’amendement no 5 rectifié.

    M. Michel Guiniot

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    La notion d’indivisaire taisant, que nous empruntons à la jurisprudence sur le sujet, permet de préciser que le droit de judiciariser la situation devrait être réservé aux indivisaires qui se manifestent. Un indivisaire qui demeure silencieux ne doit pas être pénalisé dans sa qualité d’héritier. Ce changement de procédure invite l’ensemble des indivisaires à s’exprimer quant à l’avenir du bien sans attenter à leurs droits.
    Le fait de rester taisant ne doit pas servir d’indice quant à leur volonté ou non d’effectuer un partage. Il permettra au juge d’avoir un regard objectif sur la situation afin de décider dans l’intérêt général. Ce dernier n’est-il pas au cœur de ce texte ?

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Je demande le retrait de ces amendements au profit de l’amendement no 13.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Même avis.

    (Les amendements nos 21 et 5 rectifié sont retirés.)

    M. le président

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    L’amendement no 12 de Mme la rapporteure est défendu.

    (L’amendement no 12, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 13 de M. Nicolas Turquois est défendu.

    (L’amendement no 13, accepté par la commission et le gouvernement, est adopté.)

    (L’article 4, amendé, est adopté.)

    Article 5

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 11, tendant à supprimer l’article 5.

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Cet amendement est retiré.

    (L’amendement no 11 est retiré.)

    (L’article 5 est adopté.)

    Article 6

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 20 et 10, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L’amendement no 20 de Mme Émeline K/Bidi est soutenu.
    Il en est de même de l’amendement rédactionnel no 10 de Mme la rapporteure.

    (L’amendement no 20, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 10, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 7 de M. Sébastien Huyghe est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Demande de retrait.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Sagesse.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 7.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        52
            Nombre de suffrages exprimés                47
            Majorité absolue                        24
                    Pour l’adoption                15
                    Contre                32

    (L’amendement no 7 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de l’amendement no 6 qui fait l’objet d’un sous-amendement.
    L’amendement no 6 de M. Charles Sitzenstuhl est défendu.
    Le sous-amendement no 23 de Mme la rapporteure l’est également.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Je suis favorable à l’amendement, à condition d’adopter le sous-amendement no 23.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Même avis sur l’amendement et avis favorable sur le sous-amendement.

    (Le sous-amendement no 23 est adopté.)

    (L’amendement no 6, sous-amendé, est adopté.)

    M. Michel Guiniot

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    Je me suis abstenu !

    M. le président

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    Merci monsieur le député, je ne l’avais pas vu, mais cela ne change pas le résultat du vote. Nous pouvons mettre l’article aux voix.

    Plusieurs députés du groupe Dem

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    C’est un scrutin public !

    M. le président

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    Il n’y a pas eu de demande de scrutin public sur l’article !

    (L’article 6, amendé, est adopté.)

    M. le président

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    Il n’y a pas de demande d’explication de vote. Je ne suis à l’instant saisi d’aucune demande de scrutin public…
    La voici ! Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis donc saisi par le groupe Les Démocrates d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Les cinq minutes réglementaires étant écoulée (Rires), je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        56
            Nombre de suffrages exprimés                56
            Majorité absolue                        29
                    Pour l’adoption                55
                    Contre                1

    (La proposition de loi est adoptée.)

    (Les députés du groupe Dem et plusieurs députés du groupe EPR se lèvent et applaudissent. –⁠ Plusieurs députés du groupe HOR applaudissent également, ainsi que M. Jacques Oberti.)

    M. Jean Terlier

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Louise Morel, rapporteure

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    Je remercie l’ensemble de mes collègues qui ont joué le jeu afin de faire adopter en un temps record.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie Mme la ministre ainsi que ses collaborateurs, M. l’administrateur de la commission et l’ensemble des députés porte-parole de groupe qui ont contribué à ce travail.
    Merci enfin aux députés du groupe Modem. Cette belle journée de niche parlementaire a été marquée par l’adoption de nombreux textes qui seront utiles à nos concitoyens. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, lundi 10 mars, à seize heures :
    Discussion de la proposition de loi simplifiant l’ouverture des débits de boissons en zone rurale ;
    Discussion de la proposition de loi sur la profession d’infirmier.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-deux.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra