XVIIe législature
Session extraordinaire de 2024-2025

Première séance du jeudi 03 juillet 2025

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Première séance du jeudi 03 juillet 2025

Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Emploi des salariés expérimentés et évolution du dialogue social

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi adopté par le Sénat

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social (nos 1526, 1617).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Le projet de loi dont vous êtes saisis aujourd’hui répond à un objectif simple : assurer la transposition législative fidèle et complète de cinq accords conclus entre les partenaires sociaux entre novembre 2024 et juin 2025.
    Les trois premiers accords ont été signés le 14 novembre 2024, dans la sérénité et le compromis, et n’ont pas fait grand bruit. Ils portent pourtant –⁠ ainsi que ce projet de loi qui en découle – sur des sujets importants pour les salariés et les entreprises de notre pays : l’assurance chômage, l’emploi des travailleurs expérimentés –⁠ dits seniors – et le dialogue social.
    À l’automne dernier, avec le premier ministre Michel Barnier que je salue, nous étions convaincus de la nécessité de relancer le dialogue social. Nous pensions qu’il y avait matière à accord, au vu des tentatives qui, au cours de la dernière période, n’avaient pas pu aboutir. Nous avons donc demandé aux partenaires sociaux de se remettre autour de la table. Nous leur avons garanti qu’en cas de succès, les accords seraient transposés, soit par voie réglementaire, soit dans la loi.
    Après quelques semaines de négociation, le 14 novembre 2024, un triple accord est donc venu valider la pertinence de cette initiative : les partenaires sociaux ont signé très largement deux accords nationaux interprofessionnels (ANI), l’un sur l’emploi des travailleurs expérimentés, l’autre sur le dialogue social, ainsi qu’une nouvelle convention d’assurance chômage. À ces trois accords de novembre 2024 est venue s’ajouter la négociation paritaire sur le bonus-malus du 27 mai 2025, en vue d’adapter les modalités du dispositif de modulation du taux de contribution d’assurance chômage en fonction du nombre de ruptures de contrats de travail dans certains secteurs d’activité. Enfin, le 25 juin dernier, un ANI sur les transitions et reconversions professionnelles a été conclu. Attendu tant par les organisations syndicales que patronales, il répond à la demande que j’avais adressée en avril aux partenaires sociaux d’examiner les moyens de simplifier ces dispositifs. Ce projet de loi a été conçu, dès l’origine, pour intégrer les conclusions de cette récente négociation et la rendre rapidement opérationnelle.
    Au total, ce projet de loi tire donc les conséquences législatives de cinq accords, dont trois ANI et deux négociations paritaires. Cinq accords conclus en neuf mois, c’est beaucoup ! Il faut se féliciter de la vitalité du dialogue social et du sens des responsabilités des partenaires sociaux, que je salue.
    Je tiens à souligner aussi la très large représentativité de ces accords. Notre paysage syndical est complexe et fragmenté, mais l’ANI de novembre 2024 sur l’emploi des seniors comme celui de juin 2025 sur les transitions et les reconversions ont été signés par les trois organisations patronales et par quatre des cinq organisations syndicales.
    Je tiens enfin à remercier les équipes de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et de la direction générale du travail (DGT), qui jouent le rôle discret et difficile d’accompagnement et de facilitation des négociations.
    Une fois les accords conclus, nous avons veillé à ce que le projet de loi traduise fidèlement la volonté et les intentions des partenaires sociaux. Au cours des derniers mois et des derniers jours, de nombreux échanges ont permis de les associer pleinement à son élaboration, qu’ils aient ou non signé les accords, ce que je tiens à souligner. Cette méthode a été appliquée tant pour les accords de novembre que, tout récemment, pour l’ANI du 25 juin dernier.
    S’agissant de ce dernier accord relatif aux transitions et reconversions, le gouvernement exprime un léger désaccord, non sur les outils proposés mais sur la question de la gouvernance. En effet, l’accord ne nous paraît pas conforme aux exigences actuelles de simplification, qui nous commandent de ne pas créer de nouvelles instances, dans un paysage de la formation professionnelle déjà complexe.
    Il revient désormais au Parlement d’assurer la transposition législative des mesures contenues dans ces cinq accords et qui ont besoin de la loi pour exister. Comme moi, vous connaissez cet exercice particulier. Ensemble, nous avons su mener à bien la transposition de l’accord national interprofessionnel relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. S’agissant du texte qui vous est soumis, j’ai veillé à ce que les rapporteurs, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, soient pleinement associés à sa rédaction Le mois dernier, le Sénat l’a voté à une large majorité, sans aucun vote contre. Il y a quelques jours, la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale l’a également adopté, à l’issue d’un débat serein. Aujourd’hui, dans cet hémicycle, nous pouvons faire œuvre utile, avec pour objectif une adoption définitive avant la fin de la session extraordinaire, afin que les nouveaux outils soient opérationnels et disponibles pour nos entreprises et leurs salariés dès la rentrée.
    Nous avons un devoir envers les partenaires sociaux, qui ont négocié et conclu ces accords dans un esprit de responsabilité. Nous avons également un devoir envers les salariés, qui attendent des outils plus efficaces pour soutenir la continuité de leurs parcours professionnels, et envers les entreprises, qui ont besoin de lisibilité et de leviers pour développer les compétences utiles à leur activité.
    Venons-en au fond du texte. Sept des dix articles du projet de loi portent sur l’emploi des travailleurs expérimentés. Il s’agit d’un de nos points faibles : seulement 61 % des plus de 55 ans sont en emploi, et moins de 40 % des plus de 59 ans. La situation s’améliore néanmoins : depuis vingt-cinq ans, le taux d’emploi des 55-64 ans a progressé d’un point par an. Le taux d’emploi des 55-59 ans dépasse désormais d’un point la moyenne européenne. En revanche, après 60 ans, il décroche, atteignant seulement 38 % en France, contre 61 % en Allemagne et 70 % en Suède.
    La fin de carrière demeure donc, à juste titre, une source d’inquiétude pour de nombreux salariés. Cette situation n’est pas satisfaisante. Chacun doit pouvoir se projeter dans la vie, à tout âge. Collectivement, le sous-emploi des plus de 50 ans constitue une injustice, un gâchis humain et économique que nous ne pouvons plus accepter, ni nous permettre.
    Pour éclairer le Parlement, je rappelle que les changements législatifs dont vous êtes saisis aujourd’hui s’inscrivent dans un plan plus large, fondé sur le triptyque suivant : changer le regard porté sur les travailleurs de plus de 50 ans, en luttant contre les préjugés et les idées reçues ; changer les pratiques des employeurs, des opérateurs publics de l’emploi et des institutions ; changer la loi –⁠ c’est l’objet du projet de loi que vous examinez aujourd’hui.
    Concrètement, les deux premiers articles du projet de loi visent à renforcer le dialogue social, en obligeant les branches et les entreprises de plus de 300 salariés à mener tous les quatre ans des négociations spécifiques sur ce thème. En effet, il est essentiel que le dialogue social, à tous les niveaux, se saisisse des questions du maintien en emploi des 50 ans et plus, de la gestion de la deuxième partie et de la fin de carrière, de la transmission des compétences et du recrutement des salariés expérimentés.
    Pour apporter les bonnes réponses à la question de la fin de carrière, employeurs et salariés doivent s’y préparer en amont. L’un des enseignements majeurs tirés de l’expérience des pays d’Europe du Nord –⁠ qui ont en la matière une longueur d’avance sur nous – est clair : pour travailler plus longtemps, il faut anticiper. Il faut prendre les bonnes décisions avant qu’il ne soit trop tard, avant l’exposition prolongée à l’usure professionnelle ou aux métiers pénibles, avant qu’un départ pour inaptitude ou invalidité ne s’impose.
    En complément de cette négociation collective, l’article 3 crée, au niveau individuel, un nouvel entretien professionnel organisé dans les deux mois suivant la visite médicale de mi-carrière. Ce dispositif intégré a vocation à faire de ces rendez-vous de mi-carrière un moment clé pour aborder les enjeux de santé au travail –⁠ en particulier la prévention de l’usure professionnelle – mais aussi l’ensemble des questions relatives aux compétences et aux qualifications, aux besoins de formation, aux mobilités ou aux reconversions.
    L’article 4 apporte une réponse opérationnelle aux difficultés de recrutement identifiées par les partenaires sociaux.
    Il faut aussi évoquer le chômage des personnes de plus de 50 ans. Celles-ci représentent 19 % de l’ensemble des chômeurs, mais 35 % des chômeurs de longue durée, parmi lesquels elles sont surreprésentées. Leur durée moyenne d’inscription à France Travail est de 582 jours. C’est pourquoi nous proposons l’expérimentation pour cinq ans d’un nouveau contrat de valorisation de l’expérience –⁠ le CVE – destiné aux demandeurs d’emploi de 60 ans et plus.
    La situation actuelle est déséquilibrée : un salarié peut faire valoir son droit à la retraite quand il atteint le taux plein, mais l’employeur, lui, ne peut se séparer de son employé à ce moment-là, si celui-ci souhaite poursuivre son activité. Ce manque de visibilité est un obstacle à l’embauche, régulièrement souligné par les entreprises. On parle beaucoup du maintien dans l’emploi –⁠ c’est l’objet des articles précédents – mais nous devons aussi créer les conditions pour que l’embauche d’un salarié de 60 ans et plus devienne banale et normale.
    Ce nouveau contrat permet de sécuriser l’employeur, en lui donnant la garantie que s’il le souhaite, le salarié partira à la retraite dès lors qu’il aura atteint l’âge légal de départ à taux plein. Par ailleurs, l’employeur bénéficiera d’une exonération de cotisations sur les indemnités de mise à la retraite. Cet avantage est substantiel à l’échelle microéconomique. À titre de comparaison, le montant total des cotisations sur les indemnités de départ en retraite versées aux 57-64 ans s’élève aujourd’hui à 62 millions d’euros. De plus, le CVE n’a pas vocation à devenir la norme : le coût de cette exonération sera donc raisonnable.
    Les articles 5, 6 et 7 visent à faciliter les aménagements de fin de carrière. Dans des pays comme la Suède et le Danemark, où le taux d’emploi des plus de 60 ans est élevé, le recours au temps partiel est bien plus répandu. Il constitue une réponse adaptée car il permet de sortir de notre logique trop binaire qui oppose un emploi à temps plein à une retraite à temps plein.
    L’article 5 tend donc à faciliter les aménagements de fin de carrière, en obligeant les entreprises à motiver précisément les refus qu’elles sont en droit d’opposer aux demandes de passage à temps partiel.
    L’article 6 permet à l’employeur d’un salarié qui décide de réduire son temps de travail de lui verser, de manière anticipée, tout ou partie de l’indemnité de départ à la retraite afin de compenser partiellement la rémunération perdue par le salarié.
    L’article 7 clarifie les règles relatives à la mise à la retraite d’office, pour les rendre pleinement applicables aux salariés bénéficiant d’un cumul emploi-retraite et qui ont été recrutés après avoir atteint l’âge de la retraite à taux plein.
    Pour être tout à fait complète, je précise que ce projet de loi n’aborde pas la retraite progressive à 60 ans, pourtant prévue dans l’ANI relatif à l’emploi des travailleurs expérimentés. Son application relève en effet du décret. Ce dispositif entrera en vigueur le 1er septembre 2025.
    Pour l’instant, la retraite progressive n’est pas assez mobilisée : seules 0,5 % des personnes éligibles y ont recours chaque année, alors que cette proportion s’élève à 70 % en Suède ou aux Pays-Bas. L’ouverture de ce dispositif à 60 ans vise le même objectif que les dispositions que nous examinons : favoriser l’aménagement des fins de carrière en sortant de la logique binaire selon laquelle une personne est soit à 100 % en activité, soit à 100 % à la retraite. Il existe un spectre de solutions en fonction des aspirations des salariés et des employeurs. Le développement de la retraite progressive doit permettre aux salariés qui le souhaitent de réduire leur temps de travail en commençant à percevoir une partie de leur pension, tout en continuant à cotiser à taux plein.
    Si les sept premiers articles concernent l’emploi des salariés expérimentés, l’article 8 traite d’une question très différente, mais essentielle : la qualité et la continuité du dialogue social, objet du second ANI conclu le 14 novembre 2024. Les partenaires sociaux se sont très largement accordés pour supprimer la limitation à trois du nombre de mandats successifs que peuvent effectuer les membres élus des comités sociaux et économiques (CSE) ; nous y reviendrons lors de l’examen de l’article.
    L’article 9 traite de l’assurance chômage. Pour l’essentiel, la nouvelle convention Unedic qui a fait l’objet d’un accord en novembre a été agréée et est entrée en vigueur par décret le 20 décembre 2024. Au total, parvenue à son régime de croisière, cette nouvelle convention produira 1,5 milliard d’euros d’économies par an ; je le rappelle à l’intention de ceux qui accusent hâtivement les partenaires sociaux d’être incapables de faire des choix difficiles. Ils en sont capables tant lors des négociations que dans leur gestion, comme le prouve l’excédent des comptes de l’assurance chômage.
    Une proposition des partenaires sociaux, formulée dans l’accord du 14 novembre, n’a pas pu être intégrée dans le décret, faute de base législative. Il s’agit de la mesure qui améliore les droits des primo-entrants en abaissant de six à cinq mois la durée de travail nécessaire pour s’inscrire pour la première fois à l’assurance chômage. Elle vise à mieux sécuriser la situation de ces demandeurs d’emploi particulièrement fragiles, composés à 65 % de publics jeunes ; elle se justifie pleinement, eu égard à la remontée du taux de chômage des jeunes. L’article 9 du projet de loi tend à donner une base législative à cette mesure, et à permettre son intégration à la convention d’assurance chômage.
    Depuis le mois de novembre, les choses ont évolué. Fin mai, les partenaires sociaux ont signé un accord visant à réviser certains paramètres du mécanisme de bonus-malus créé en 2019, afin de réduire le recours aux contrats courts dans sept secteurs économiques particulièrement concernés. Un amendement du rapporteur Nicolas Turquois –⁠ je l’en remercie –, portant article additionnel après l’article 9, permettra d’intégrer au texte une partie des résultats, probants, de la négociation paritaire conclue le 27 mai. Il s’agit de recentrer le dispositif de bonus-malus en excluant notamment de son champ les fins de contrats pour inaptitude ou pour faute lourde. Adopter l’amendement est nécessaire pour tenir compte de cette évolution ; le reste de la transposition relève d’un agrément par décret.
    Enfin, l’article 10 vise à inscrire dans le texte les résultats de la négociation interprofessionnelle relative aux transitions et reconversions professionnelles qui s’est conclue le 25 juin. Ces dispositions s’intègrent parfaitement dans notre stratégie en faveur de l’emploi des personnes de 50 ans et plus et sont cohérentes avec l’accord sur l’emploi des seniors.
    Nous –⁠ les partenaires sociaux, le gouvernement et les parlementaires – posons, l’une après l’autre, les briques qui favorisent le maintien dans l’emploi des personnes de 50 ans et plus et qui leur permettent d’être recrutées comme n’importe quel salarié. Ces dispositions sont d’autant plus importantes que les fondamentaux de notre économie se transforment progressivement et qu’il nous faut accompagner les salariés, les entreprises et les territoires touchés par des restructurations pour assurer aux travailleurs une meilleure continuité professionnelle et salariale.
    Ces outils doivent permettre à un salarié licencié en raison d’une restructuration économique de rebondir près de chez lui, dans une autre entreprise ou un autre secteur de son bassin de vie et de travail. Nous en avons vraiment besoin : en un an, le nombre d’inscriptions à France Travail liées à ce type de licenciements a augmenté de 11 %. Ces outils doivent aussi fournir des solutions à des entreprises qui sont en bonne santé et qui ne détruisent pas d’emplois, mais qui souhaitent permettre à un salarié subissant l’usure professionnelle de changer de métier, soit au sein de la même structure, soit en rejoignant une entreprise du même territoire. En la matière, il était absolument urgent de changer de braquet ; toutes les organisations syndicales et patronales le demandaient.
    L’ANI du 25 juin permet trois avancées majeures.
    Premièrement, il crée un dispositif unique de reconversion à la main de l’entreprise, pour remplacer les myriades de solutions existantes. Cet outil unique, appelé période de reconversion, permet aussi bien de reconvertir des salariés pour leur donner les compétences nécessaires au projet de transformation de l’entreprise –⁠ c’est la reconversion interne – que de les former pour qu’ils occupent un emploi dans une autre entreprise –⁠ c’est la reconversion externe. Dans ce dernier cas, l’enjeu consiste à passer d’une entreprise à une autre sans passer par la case France Travail. En cela, l’accord renforce la sécurisation des parcours de reconversion et de formation des salariés.
    Deuxièmement, les partenaires sociaux proposent d’orienter davantage vers des métiers en tension les projets de transition professionnelle des salariés, de mieux cibler les publics et de réduire la durée de formation pour la rendre plus opérationnelle et plus pratique.
    Troisièmement, la modification de l’entretien professionnel, qui aura désormais lieu tous les quatre ans, améliorera le suivi des compétences et du parcours professionnel du salarié. Nous proposons de transposer directement toutes ces dispositions dans la loi par l’adoption d’amendements que le gouvernement a déposés hier.
    Depuis neuf mois, en tant que ministre d’abord dans le gouvernement Barnier, puis dans le gouvernement Bayrou, je me suis attachée à revitaliser le dialogue social. La démocratie sociale est bien vivante dans les entreprises, dans les branches, mais aussi au niveau national et interprofessionnel, comme le montrent les cinq textes que nous transposerons aujourd’hui. Je salue l’esprit de responsabilité des partenaires sociaux et leur sens du compromis, grâce auquel la démocratie sociale renforce la démocratie politique que vous représentez. Le Parlement doit maintenant jouer son rôle spécifique. Il s’agit pour le législateur d’être à la fois loyal et précis, pour assurer la bonne transposition des accords, sans renoncer à son pouvoir d’appréciation générale. Voilà la tâche qui nous incombe aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR ainsi que sur les bancs des commissions. –⁠ Mme Stella Dupont applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Viry, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Stéphane Viry, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    À l’automne, le premier ministre Michel Barnier, que je salue, et la ministre du travail ont pris l’heureuse initiative de relancer le dialogue social dans notre pays. Cette décision, je l’ai accueillie avec conviction, car elle rejoint une exigence essentielle de notre République : celle, inscrite à l’article 1er du code du travail, qui fait du dialogue entre partenaires sociaux le socle même de notre modèle social. À l’heure où, hélas, les fractures se creusent, redonner leur juste place à ceux qui vivent, incarnent et accompagnent le monde du travail est un acte politique de premier ordre.
    Plusieurs sujets ont été ainsi confiés à la négociation interprofessionnelle, parmi lesquels l’emploi des travailleurs expérimentés. Nous avons trop longtemps négligé cette question, alors que la population française vieillit. Ce constat ne pouvait rester sans réponse. Trop souvent, l’expérience est vécue comme un fardeau, alors qu’elle devrait être un atout ; trop souvent, ces femmes et ces hommes riches d’un savoir-faire patiemment construit sont écartés, alors qu’ils aspirent à transmettre, à contribuer, à continuer de faire société.
    Soyons lucides, ce sujet aurait mérité d’être traité avant la réforme des retraites. Avant de repousser l’âge légal de départ, il aurait fallu s’assurer que les conditions du maintien dans l’emploi soient réellement réunies. C’est un principe de justice et d’efficacité. Toutefois, tel n’est pas l’objet de nos débats présents. Si nous sommes réunis, c’est pour transposer fidèlement le compromis, obtenu à force de dialogue, que représentent les accords nationaux interprofessionnels du 14 novembre 2024 et du 25 juin 2025. Ces ANI témoignent de ce que notre démocratie sociale est capable de produire lorsqu’on lui en donne les moyens : une méthode, une ambition, la volonté commune de relever un défi national. Je tiens à saluer à mon tour la persévérance, la loyauté et le sens du compromis des partenaires sociaux. Ils ont démontré que, loin d’être un héritage dépassé, le dialogue social était un levier d’innovation, un gage de cohésion et une garantie de légitimité.
    Ces ANI, dans leur esprit comme dans leur contenu, traduisent une volonté qui m’anime et que je revendique comme un héritage de Philippe Séguin : refaire la France par le travail et par ses valeurs. Notre feuille de route, dans ce moment où les repères vacillent, doit être claire. Il s’agit d’écouter et de créer collectivement, de redonner un sens au travail, de faire en sorte que chacun y trouve pleinement sa place.
    Le texte que nous examinons va au-delà de l’accord concernant les salariés expérimentés. Le gouvernement propose également d’y intégrer, par l’adoption d’amendements à l’article 10 et portant article additionnel après l’article 10 –⁠ déposés après l’examen en commission –, les conclusions d’une négociation relative aux transitions professionnelles. Ce quatrième ANI s’ajoute aux trois premiers, constituant ainsi un ensemble cohérent tourné vers l’avenir du travail.
    Ces accords posent des jalons essentiels pour notre avenir collectif. Ils traitent de dialogue social, de reconversion, de formation, d’assurance chômage, de parcours professionnel. Ils sont le fruit d’une démarche exemplaire, et c’est précisément pour cela que nous devons les transposer avec fidélité. Je le dis avec la clarté que requiert le moment : l’Assemblée nationale n’est pas une chambre d’enregistrement, chacun le sait, mais dénaturer ce texte par voie d’amendement reviendrait à trahir l’équilibre construit par les partenaires sociaux. Ce serait rompre le pacte de confiance entre la représentation nationale et ceux qui font vivre le travail au quotidien. Libre à nous, ensuite, de défendre d’autres propositions, d’ouvrir d’autres débats ; rien ne nous interdit d’approfondir ces questions à l’avenir, de proposer de nouvelles avancées en matière de travail, de dialogue social ou encore de reconversion professionnelle. Dans l’immédiat, il nous revient de respecter le compromis.
    Mon collègue Nicolas Turquois et moi-même avons été, en commission des affaires sociales, les garants de cette loyauté. Nous avons maintenu le texte au plus près de sa rédaction initiale, conscients que notre rôle ne consistait pas à remodeler les accords mais à les traduire avec exactitude dans notre droit. C’est dans le même esprit de rigueur et de fidélité que nous abordons les débats en séance.
    Néanmoins, il ne faut pas s’y tromper : ce projet de loi n’épuise pas les enjeux. Il structure des réponses concrètes, donne de la visibilité aux personnes concernées, dessine une trajectoire –⁠ tout cela est très bien –, mais surtout, il nous engage à poursuivre. C’est pourquoi je vous invite à ne pas le faire dévier de sa trajectoire, à respecter le compromis, à voter le projet de loi tel quel, le prenant pour ce qu’il est : une avancée, une base, une respiration du dialogue social. En le votant, nous affirmerons notre confiance dans les corps intermédiaires. En le votant, nous rappellerons que l’avenir du travail ne se décrète pas toujours d’en haut, mais se construit ensemble, pas à pas, dans la négociation, l’écoute, le respect. En le votant, nous respecterons collectivement le dialogue social et préparerons les discussions à venir, notamment celles qui concernent les retraites. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Mme Stella Dupont applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Nicolas Turquois, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    C’est une grande satisfaction personnelle que d’être le rapporteur de ce projet de loi, ou plutôt son corapporteur –⁠ je salue d’ailleurs Stéphane Viry, avec qui les échanges ont été agréables et fructueux. Cette satisfaction a deux raisons. Premièrement, le texte est le fruit de plusieurs accords nationaux interprofessionnels. Or notre pays a besoin de dialogue social : ce procédé permet des avancées plus tangibles et plus efficaces, car il aboutit à des compromis acceptés par les uns et par les autres. Deuxièmement, plusieurs dispositions du texte renvoient à l’idée que le passage du statut d’actif à celui de retraité pourrait tenir davantage de la transition que de la rupture. Je milite depuis longtemps en ce sens. Au fond –⁠ mettons un instant de côté les postures –, quel sens y a-t-il à devoir travailler à 100 % jusqu’à la veille de la retraite et à 0 % le lendemain ? Réfléchissez-y !

    M. Stéphane Vojetta

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    C’est vrai !

    M. Nicolas Turquois, rapporteur

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    Je suis heureux qu’après le dialogue de grande qualité que les partenaires sociaux ont entretenu pour favoriser l’emploi des seniors et, de manière générale, les relations au travail, la discussion du projet de loi en commission des affaires sociales ait été également marquée par la volonté de trouver le consensus le plus large possible. Certes, l’exercice auquel nous nous prêtons est un peu particulier. En tant qu’élus intéressés par ces questions, nous avons tout naturellement tendance à nous réjouir des compromis trouvés par les organisations syndicales et patronales, mais en tant que législateurs, il nous semble souvent frustrant de nous astreindre à une transposition fidèle, sans rien retirer ni rien ajouter à ce que d’autres représentants ont signé.
    Autre particularité, depuis le début de la semaine dernière, d’autres mesures ont recueilli l’assentiment des organisations syndicales et patronales représentatives. Ces mesures portent sur les transitions professionnelles, sujet technique et particulièrement important. Il n’est évident ni pour vous ni pour nous, en tant que rapporteurs, de nous exprimer sur ces dispositions dont nous avons eu connaissance très tardivement. Cela concernera les articles 10 et suivants.
    Il me revient de rapporter les titres III à VII.
    Le titre III porte sur la création, à titre expérimental, d’un nouveau contrat de travail, le contrat de valorisation de l’expérience, qui vise à faciliter le recrutement des seniors. Nous aurons assurément beaucoup d’échanges à ce sujet, mais je crois profondément à l’intérêt de ce dispositif.
    Le titre IV limite tout d’abord les situations où l’employeur refuserait le recours à la retraite progressive. Comme l’a dit Mme la ministre, l’âge minimal requis pour en bénéficier sera abaissé par voie réglementaire de 62 à 60 ans. Le titre IV prévoit aussi que l’indemnité de départ à la retraite pourra être versée de manière anticipée à un salarié en fin de carrière souhaitant réduire son temps de travail. Enfin, il précise les modalités applicables pour mettre fin aux contrats de travail signés après 70 ans.
    Le titre V traduit la volonté des partenaires sociaux de revenir sur la limitation du nombre de mandats successif que peut exercer un délégué au comité social et économique, limitation introduite par les ordonnances de 2017. Le plafonnement à trois mandats n’a pas permis de renouveler les représentants du personnel : comme nos auditions l’ont montré, il a même pu rompre des relations qui, pour être de qualité, mettent du temps à s’établir, que ce soit entre les délégués eux-mêmes ou entre les délégués et les employeurs. Cette limitation a aussi pu s’avérer contre-productive en empêchant l’acquisition d’une expérience solide en droit du travail.
    Le titre VI concrétise deux autres accords interprofessionnels conclus dans le champ de l’assurance chômage. Le premier prévoit d’abaisser de six à cinq mois la condition d’affiliation antérieure ouvrant droit à l’allocation d’assurance pour les personnes qui n’auraient jamais été inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi ou qui ne l’auraient pas été depuis longtemps. Le second accord exclut du champ du calcul du bonus-malus certaines situations de rupture de contrats de travail.
    Enfin, c’est dans le titre VII que sont regroupées les dispositions déjà évoquées sur les transitions professionnelles. Mme la ministre aura l’occasion de présenter plus en détail les évolutions souhaitées par les partenaires sociaux en matière de conseil en évolution professionnelle, de compte personnel de formation (CPF), de la reconversion ou encore de la promotion par alternance.
    Cet unique projet de loi permet donc de retranscrire cinq accords interprofessionnels. À l’heure où notre pays traverse des moments difficiles, je crois que cela nous engage tous à faire preuve de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et EPR ainsi que sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    L’Assemblée nationale procède aujourd’hui à l’examen d’un projet de loi que la commission des affaires sociales a fort peu amendé et adopté à une très large majorité. Cette adoption a eu lieu à l’issue de travaux et d’échanges constructifs, dans un climat apaisé.
    Je tiens tout d’abord à en remercier nos deux rapporteurs, Nicolas Turquois et Stéphane Viry : tous deux ont pris soin de répondre avec précision à l’ensemble des intervenants et d’exprimer leur avis sur les amendements qui ont été défendus, avec un souci constant de clarté et de pédagogie. Je salue leur travail rigoureux, exigeant et profondément respectueux des équilibres qui structurent notre démocratie sociale. Leur rapport éclaire utilement nos débats et leur attachement à préserver tout au long des travaux en commission les accords patiemment construits par les partenaires sociaux a rendu nos échanges riches et constructifs.
    Je veux également saluer l’ensemble des députés de notre commission, de toutes sensibilités, pour la qualité de nos discussions. Celles-ci ont montré, une fois de plus, que lorsque l’écoute et la responsabilité prévalent, nous savons faire vivre une délibération parlementaire à la hauteur des enjeux. J’étends volontiers ces remerciements aux commissaires qui ont souhaité amender le texte et qui questionnent ses acquis car les critiques qu’ils formulent permettent à l’Assemblée nationale d’éprouver, comme elle doit le faire, la rédaction adoptée par le Sénat.
    Le texte que nous examinons aujourd’hui est particulier à plus d’un titre.
    Il incarne d’abord une réussite de la démocratie sociale car il est la traduction fidèle d’accords signés par les partenaires sociaux. À ce titre, il appelle une responsabilité particulière de notre part : nous devons respecter le contrat social que les partenaires sociaux ont su bâtir. Ces accords sont le fruit de discussions longues, parfois difficiles, mais aussi d’un esprit de compromis dont nous devons nous inspirer nous aussi.
    Lorsqu’elle fonctionne, la démocratie sociale aboutit à des solutions solides, équilibrées et acceptées par les parties prenantes. Elle ne doit donc pas être regardée comme une variable d’ajustement ou comme un préalable sans force à des décisions déjà prises, mais comme un pilier du dialogue républicain, à l’instar du Parlement.
    C’est là un enseignement que nous devons retenir. Nous avons connu récemment des moments où cette démocratie sociale a été mise en difficulté, non par la faute des partenaires sociaux, qui ont toujours répondu présent, mais faute de cadre clair, de méthode partagée, et, parfois, disons-le sans polémique, faute de volonté réelle de leur donner toute leur place.
    À rebours, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui montre ce que peut produire une concertation bien conduite et respectée. Il ne s’agit pas ici d’un texte imposé d’en haut, mais d’une construction collective que la France doit encourager. Ce que les partenaires sociaux ont réussi à faire, il appartient maintenant au législateur de le transcrire fidèlement. C’est notre rôle ici : nous devons être le trait d’union entre la démocratie sociale et la démocratie représentative. Il ne faut pas craindre de reconnaître que les corps intermédiaires ont un rôle essentiel à jouer dans la régulation de notre société. Bien au contraire, les encourager, leur faire confiance, c’est renforcer la cohésion dont le pays a tant besoin.
    En commission, M. Boyard nous a demandé à plusieurs reprises si nous aurions sauté dans le ravin si les partenaires sociaux nous l’avaient demandé. C’est leur faire bien peu confiance et les tenir en peu d’estime que de poser la question en ces termes, surtout quand il est question d’accords largement ratifiés, tant par les syndicats de salariés que par les organisations patronales.
    Nous n’avons pas peur d’affirmer que nous faisons confiance à la démocratie sociale. Nous devons donc témoigner de cette confiance en conférant une valeur législative aux engagements conclus dans ce cadre, et ce de la manière la plus fidèle possible.
    Je veux le redire avec force : quand le monde politique lui en donne les moyens et qu’il accepte ses conclusions, la démocratie sociale fonctionne –⁠ ce projet de loi en est la preuve.
    Nous avons aujourd’hui l’occasion de consolider ce lien en montrant que la parole donnée dans le cadre d’un accord interprofessionnel a valeur de promesse républicaine. Nous devons être à la hauteur de cet engagement. Je forme donc le vœu que nos débats en séance se tiennent dans l’esprit qui a prévalu en commission des affaires sociales –⁠ un esprit de dialogue, de responsabilité et d’exigence. Ce texte n’est pas seulement un acte technique, c’est aussi un symbole : celui d’une démocratie qui sait se parler, s’écouter et se construire ensemble. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et HOR ainsi que sur les bancs des commissions. –⁠ Mme Stella Dupont applaudit également.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à Mme Josiane Corneloup.

    Mme Josiane Corneloup

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    Nous examinons aujourd’hui un texte qui incarne ce que nous défendons avec constance sur ces bancs : la responsabilité, la concertation sociale et le pragmatisme au service de l’emploi.

    M. Nicolas Sansu

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    Quand c’est la droite qui dit ça, on sait ce que ça veut dire !

    Mme Josiane Corneloup

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    Je salue le travail rigoureux et exigeant des rapporteurs et les remercie pour la qualité de nos débats en commission des affaires sociales, qui sont toujours restés constructifs.
    Ce projet de loi porte transposition de deux accords nationaux interprofessionnels. Il ne s’agit pas seulement d’un texte technique, mais du résultat d’un véritable dialogue social, un exercice que nous respectons profondément car il met en jeu à la fois la responsabilité des partenaires sociaux et l’intérêt national. Qui, mieux que les partenaires sociaux, peut identifier les mesures favorables au maintien et au retour en emploi des seniors ? Ce projet de loi repose sur un fondement légitime, équilibré et sérieux, ce qu’il faut saluer.
    Le diagnostic est clair : en 2023, seuls 38,5 % des Français âgés de 60 à 64 ans occupaient un emploi, contre plus de 50 % en moyenne dans l’Union européenne –⁠ 65 % en Allemagne et près de 69 % en Suède. Il ne s’agit pas seulement de chiffres, mais d’un véritable échec collectif sur les plans humain, économique et social.
    L’âge reste le premier motif de discrimination à l’embauche. Il devient urgent de briser les préjugés qui écartent tant de Français du marché du travail dès 50 ans, souvent en dépit de leur expérience, de leurs compétences et d’une motivation intacte. L’âge ne doit plus être un facteur d’exclusion : chacun doit achever sa vie professionnelle dans la dignité et le respect. Il faut changer de regard et de pratiques.
    Le texte que nous examinons apporte des réponses concrètes. Il crée d’abord une obligation de négociation portant sur l’emploi et le travail des salariés expérimentés dans toutes les entreprises. Cette disposition concerne aussi les entreprises de plus de 300 salariés, qui devront en outre mener des négociations en matière de conditions de travail. Le texte renforce aussi les entretiens de mi-carrière, vers 45 ans, et de fin de carrière, à 58 ans. Ces entretiens permettent d’anticiper les aménagements nécessaires, notamment le temps partiel ou la retraite progressive, et de maintenir l’employabilité des salariés expérimentés. Le texte ouvre surtout la voie à une expérimentation ambitieuse, d’une durée de cinq ans –⁠ le contrat de valorisation de l’expérience.

    M. Nicolas Sansu

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    Et allez !

    Mme Josiane Corneloup

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    Il s’agit d’un CDI réservé aux demandeurs d’emploi de plus de 60 ans. Ce dispositif vise à sécuriser les fins de carrière tout en incitant les entreprises à recruter ces demandeurs d’emploi grâce à une exonération de la contribution patronale de 30 % sur l’indemnité de mise à la retraite. Nous saluons la création de ce contrat, qui a pour objectif de s’attaquer directement au frein du coût du travail et à la précarité.

    M. Nicolas Sansu

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    Et allez !

    Mme Josiane Corneloup

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    Nous approuvons également les mesures qui ont trait à la retraite progressive et au cumul emploi-retraite ainsi que la souplesse nouvelle accordée aux accords d’entreprise pour aménager les fins de carrière –⁠ voilà une façon intelligente de concilier les aspirations individuelles et les besoins économiques !
    Enfin, nous tenons à souligner l’importance des dispositions relatives au dialogue social, notamment la suppression de la limitation à trois mandats pour les élus au CSE. Cette mesure rétablit une forme de souplesse et de liberté dans les parcours syndicaux.
    Avec ce texte, nous déconstruisons les préjugés qui circulent sur l’emploi des plus de 50 ans, valorisons les atouts de ces derniers et guidons les employeurs et les salariés.
    Rappelons aussi que le taux d’emploi est la première variable d’ajustement de nos comptes publics. Si nous avions le même taux d’emploi des seniors que l’Allemagne, nous ferions entrer près de 20 milliards d’euros supplémentaires dans les caisses de notre protection sociale. Ce combat est donc aussi une nécessité budgétaire, au moment où chaque euro compte.
    Nous souhaitons que ce texte reste fidèle à l’équilibre trouvé par les partenaires sociaux. Nous resterons vigilants à ce qu’aucune disposition ne vienne rouvrir le débat sur la réforme des retraites et à ce que l’examen parlementaire ne fragilise pas le dialogue social, mais le valorise.
    Le groupe Droite républicaine votera avec conviction pour ce projet de loi parce qu’il est utile, attendu et responsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Ségolène Amiot

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    Allez, Sophie, explique-leur !

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Il y a deux ans déjà, lors de votre passage en force sur la réforme des retraites, nous relevions que votre politique était contradictoire : vous avez reculé l’âge de départ à la retraite sans vous préoccuper vraiment de la précarité des seniors en situation d’exclusion sur le marché du travail, alors qu’à 62 ans, en France, 40 % des personnes qui ne sont pas encore à la retraite ne sont déjà plus en emploi. Ces personnes seniors qui n’occupent pas d’emploi mais ne sont pas encore retraitées sont davantage exposées à la précarité. Selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), leur taux de pauvreté atteint 32 %. Quant aux seniors qui occupent un emploi, ils travaillent souvent dans de mauvaises conditions. Le report de l’âge de départ à la retraite à 64 ans a évidemment des effets amplificateurs : on comptera 200 000 personnes de plus dans le sas de précarité, pour 300 000 personnes seniors qui devraient retrouver un emploi, selon le chercheur Michaël Zemmour.
    Comme il n’arrivait pas à nous faire tourner la page de la réforme des retraites, le premier ministre a misé sur une opération politicienne sous couvert de dialogue social –⁠ le fameux conclave. Ce conclave est resté une concertation en trompe-l’œil car les organisations syndicales y participant n’ont pas pu discuter de l’essentiel : le vol de deux ans de nos vies par le report de l’âge légal de départ à la retraite, et le droit de veto accordé de fait au patronat.
    Pour François Bayrou, ce ne serait pas un échec. Dans quelle réalité vit-il ? Sur la pénibilité, le patronat ne veut rien lâcher, mais le premier ministre s’entête et cherche à sauver les meubles en nous assénant ses fausses vérités et en proposant –⁠ quel progrès ! – une visite médicale à 45 ans en amont d’une reconversion professionnelle. Règle-t-on le sujet ô combien grave de la pénibilité et des corps brisés avec une simple visite médicale ? Soit, la réintégration des trois critères de pénibilité –⁠ port de charges lourdes, exposition aux vibrations et posture difficile – qu’Emmanuel Macron avait supprimés en 2017 et celle d’une cartographie des métiers, annoncées par François Bayrou, sont des retours en arrière par rapport aux décisions que vous avez prises il y a quelques années. Nous nous en félicitons, puisque nous vous avions alertés sur ces sujets, mais cela ne suffit évidemment pas. Il faut aller beaucoup plus loin pour permettre à celles et ceux qui sont exposés aux facteurs de pénibilité, y compris au risque chimique, oublié par François Bayrou, de bénéficier de manière systématique d’un départ anticipé à la retraite. C’est une question de justice sociale : celles et ceux qui ont travaillé toute leur vie doivent pouvoir profiter de leur retraite en bonne santé !
    Plus largement, ce dont les salariés de ce pays ont besoin, c’est d’un plan massif d’investissement dans la prévention primaire, d’écoute dans les entreprises, de dialogue autour de l’organisation du travail, de confiance et d’une vraie considération pour les seniors. Le projet de loi n’apporte aucune réponse dans ces domaines. Il n’est pas à la hauteur ! Doté de 1 milliard d’euros sur cinq ans, le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (Fipu), uniquement à la main des employeurs, n’est pas assez utilisé : moins de 22 millions ont ainsi été consommés en 2025, selon les administrations concernées. Afin qu’il soit davantage mis à profit et que les salariés s’en saisissent, nous proposons d’en faire un objet de discussion collective en l’intégrant obligatoirement dans les négociations sur l’emploi des seniors.
    Le projet de loi vise à améliorer l’emploi des seniors et nous saluons évidemment cet objectif, mais comment peut-on appréhender le sujet essentiel de leur employabilité, de la valorisation de leur expérience, en faisant l’impasse sur les questions de la santé au travail et de l’emploi ? De même, comment peut-on inciter les personnes à travailler plus longtemps si l’on oblige les demandeurs d’emploi bénéficiant du fameux CDI senior prévu par le projet de loi à quitter leur emploi dès qu’ils ont atteint une retraite à taux plein, alors que beaucoup aspirent à continuer de travailler pour bénéficier d’une surcote lorsqu’ils partent à la retraite ? Vu le niveau des pensions, c’est un droit que nous ne pouvons pas leur refuser.
    Le groupe Écologiste et social souligne quelques avancées, notamment le retour sur les ordonnances Macron de 2017, que nous avions combattues. Nous sommes évidemment satisfaits que vous compreniez enfin leur caractère néfaste et nous saluons en particulier la suppression de la limite du nombre de mandats successifs des délégués du personnel et la réintroduction de l’obligation de négocier sur l’emploi, le travail et l’amélioration des conditions de travail. Ce sont toutefois des avancées en demi-teinte. Nous sommes heureux, chers collègues, que vous reveniez sur certaines dispositions des ordonnances Macron, mais cela ne suffit pas. Les enjeux sociaux sont immenses et les travailleurs seniors méritent mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Louise Morel.

    Mme Louise Morel

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    Notre assemblée examine aujourd’hui le projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social. L’importance de ce texte est significative et contraste avec son écho médiatique particulièrement faible. Au vu des avancées concrètes qu’il contient pour nos concitoyens, on ne peut que le regretter.
    Si cet hémicycle incarne le lieu du débat contradictoire, de la confrontation de visions de la société parfois antagonistes, il ne se réduit pas à cela. Notre travail de législateur consiste aussi à donner toute sa force au dialogue social, comme s’y attelle avec courage le premier ministre François Bayrou. Notre démocratie représentative ne peut pas et ne doit pas obérer les discussions entre partenaires sociaux. Démocratie délibérative et démocratie sociale sont complémentaires au sein de l’État de droit –⁠ le groupe Les Démocrates l’a toujours soutenu. Le premier article de la Constitution dispose d’ailleurs que « [l]a France est une République indivisible, laïque, démocratique, et sociale ». C’est pourquoi, au nom de mon groupe, je tiens à saluer la volonté du gouvernement de transposer fidèlement les différents accords conclus entre partenaires sociaux sur l’emploi des seniors, l’accès à l’assurance chômage ou de meilleures transitions et reconversions professionnelles.
    L’ensemble des organisations professionnelles représentatives des employeurs et des salariés, à l’exception de la CGT, ont signé les accords nationaux interprofessionnels du 14 novembre 2024 que le texte transpose. Pour rappel, ces négociations avaient été organisées à l’invitation du gouvernement pour négocier un « nouveau pacte de la vie au travail ».
    Je suis convaincue que nous devons changer notre rapport à l’emploi. Le travail n’est pas seulement la condition de notre prospérité économique dans un contexte de mondialisation débridée, c’est aussi l’un des piliers de notre cohésion nationale. Comment pouvons-nous nous satisfaire, en 2025, en France, d’une telle exclusion des plus de 60 ans du marché du travail ? Beaucoup a déjà été dit sur le sujet, je ne rappellerai donc qu’un seul chiffre : 39 %, soit la part des 60-64 ans en emploi, contre 51 % en moyenne dans l’Union européenne et plus de 65 % en Suède et en Allemagne, pays frontalier de mon département, le Bas-Rhin.
    Il est toujours intéressant de regarder ce qui se fait mieux ailleurs que chez nous. En ce qui concerne l’emploi des seniors, la comparaison avec l’Allemagne est riche d’enseignements. Comme l’a rappelé en commission mon collègue Frédéric Petit, député des Français de l’Europe de l’Est, deux différences principales entre les deux pays expliquent un tel écart de taux d’emploi.
    En premier lieu, différents travaux académiques, notamment ceux de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), témoignent de l’importance des politiques publiques d’emploi dites incitatives : durcissement de l’assurance chômage et relèvement de l’âge de départ à la retraite, en particulier. Ces politiques ont un effet mécanique sur la retraite : lorsque l’horizon d’âge auquel un travailleur est censé quitter le marché de l’emploi est repoussé, ce dernier devient, aux yeux d’un recruteur, davantage employable à 57 ou 58 ans.
    Mais les différences sont également culturelles. Outre-Rhin, les progressions salariales et managériales sont plus importantes au cours de la carrière. Les conditions d’entrée dans la vie active n’y déterminent pas mécaniquement l’évolution professionnelle des individus. Autrement dit, en Allemagne, un diplôme sanctionnant des études courtes constitue une réelle porte d’entrée sur le marché du travail et non un plafond difficile à dépasser, comme en France. À nous de rendre possible l’égalité des chances dans toutes les carrières ! De ce point de vue, l’instauration de rendez-vous professionnels de milieu et de fin de carrière, prévue à l’article 3 du projet de loi, doit être saluée.
    Enfin, si l’emploi des seniors est important, c’est qu’il renforce la population active globale. Or son augmentation est essentielle pour assurer la soutenabilité de notre modèle social, fondé, comme vous le savez, sur un degré élevé de prise en charge et une importante redistribution. D’après les projections du Medef, construites à partir des travaux de l’économiste Jean-Hervé Lorenzi, fondateur du Cercle des économistes, si notre pays atteignait le taux d’emploi des 60-64 ans des Pays-Bas, c’est-à-dire 65 %, nos finances publiques profiteraient de plus d’une centaine de milliards d’euros de recettes supplémentaires par an ! Vous l’aurez compris, le groupe Les Démocrates votera pour le projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Christophe.

    M. Paul Christophe

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    Ce projet de loi, par son ambition et sa méthode, répond à l’un des défis majeurs de notre société : l’emploi des salariés expérimentés et l’adaptation du dialogue social à l’ère des transitions démographiques, écologiques et technologiques. Depuis 2017, la France a connu des avancées notables : taux d’emploi historiquement élevé, réformes structurantes de la formation professionnelle, modernisation du dialogue social avec la création du CSE, et renforcement de la négociation collective. Pourtant, un constat demeure : l’emploi des 60-64 ans stagne à 36 %, loin derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. Notons également que près de 30 % de cette tranche d’âge n’est ni en emploi ni en retraite, et que les plus de 55 ans connaissent une durée moyenne de chômage de plus de dix-huit mois. Ce sont des réalités qui touchent des centaines de milliers de Français et auxquelles nous devons apporter des réponses concrètes.
    Ce texte est le fruit d’un dialogue social exemplaire qui a abouti à deux accords nationaux interprofessionnels signés le 14 novembre 2024 par l’ensemble des partenaires sociaux, à l’exception de la CGT. Il traduit, dans la loi, l’équilibre trouvé entre les organisations syndicales et patronales autour de quatre axes structurants : renforcer le dialogue social sur l’emploi des seniors au niveau des branches et des entreprises, avec une obligation de négociation quadriennale désormais clairement identifiée et détaillée ; préparer la deuxième partie de carrière en articulant mieux les visites médicales et les entretiens professionnels, et en instaurant un rendez-vous de fin de carrière pour anticiper les transitions ; lever les freins au recrutement des demandeurs d’emploi seniors grâce au nouveau contrat de valorisation de l’expérience, plus attractif et mieux ciblé que le CDD senior, dont l’usage est resté marginal ; enfin, faciliter les aménagements de fin de carrière en sécurisant le recours au temps partiel, en encadrant mieux les refus de retraite progressive et en permettant le versement anticipé de l’indemnité de départ à la retraite dans le cadre d’un passage à temps partiel. Le texte va plus loin en supprimant la limite de trois mandats successifs pour les élus du CSE, afin de concilier renouvellement des instances et maintien de l’expertise, alors que les mutations du travail exigent des représentants formés et stables.
    Le groupe Horizons & indépendants votera résolument en faveur de ce projet de loi, qui répond à un enjeu majeur pour les Français dans un esprit d’équilibre et de pragmatisme, fidèle à la lettre et à l’esprit des accords signés. Nous saluons la méthode : la concertation et la confiance dans la démocratie sociale par la reconnaissance du rôle des partenaires sociaux.
    En ce qui concerne l’article 10, je souligne le changement majeur intervenu ces derniers jours. Initialement, une habilitation à légiférer par ordonnance était prévue, sous réserve de la conclusion d’un accord sur les transitions et reconversions professionnelles. Or, le 25 juin dernier, les partenaires sociaux ont abouti à un accord national interprofessionnel sur ce sujet, qui sera donc intégré dans le texte par amendement gouvernemental lors de la présente séance publique –⁠ nous le saluons. Ce nouvel accord national interprofessionnel, très attendu, vise à simplifier et à sécuriser les parcours de transition professionnelle tout en préservant les droits des salariés. Il acte la création d’un dispositif unique de reconversion à la main de l’employeur, la « période de reconversion », fusionnant les dispositifs existants et encadrant strictement les conditions de recours, notamment par le maintien du contrat de travail et le droit de réintégration du salarié en cas d’échec de la mobilité externe. L’accord garantit aussi que le CPF demeure sous le contrôle du salarié : il ne pourra être mobilisé qu’avec son accord exprès et dans la limite de 50 % des droits disponibles en cas de mobilité interne.
    Nous saluons la capacité des partenaires sociaux à parvenir à un compromis équilibré, dans un contexte budgétaire contraint, et la réactivité du gouvernement qui proposera les amendements nécessaires à la transposition fidèle de ce troisième accord. Ce projet de loi, loin d’être un simple ajustement technique de notre droit du travail, comme nous l’avons entendu, constitue un acte politique fort. Il donne à la France les moyens de valoriser l’expérience, de lutter contre l’exclusion des seniors et de renforcer le dialogue social, qui reste l’un des piliers de notre modèle social. Nous espérons que la représentation nationale saura, dans l’intérêt des Français, soutenir ce texte d’équilibre, de responsabilité et d’avenir. (Applaudissements sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

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    Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires salue l’adoption des deux accords nationaux interprofessionnels, dans un contexte pourtant très tendu à l’époque, et alors que le gouvernement avait pris pour habitude de contourner le paritarisme –⁠ l’introduction de la lettre de cadrage ou les décrets de carence à répétition en sont des exemples. Notre groupe croit profondément au dialogue social, car les partenaires sociaux connaissent le marché du travail, les besoins des salariés et les employeurs.
    Nous regrettons toutefois qu’un plan sur l’emploi des seniors n’ait pas été proposé avant le déploiement de la réforme des retraites. Reculer l’âge légal de départ à la retraite alors que le taux d’emploi des seniors n’était pas bon revenait à prendre le problème à l’envers.
    Nous regrettons aussi la façon dont s’est déroulé le conclave sur les retraites. Notre groupe a toujours réclamé la tenue d’une conférence sociale sur les retraites, mais les interventions successives du gouvernement et le cadrage trop strict des négociations n’ont pas permis une issue positive ; nous le déplorons. La question est loin d’être close.
    Pour ce qui est de ce projet de loi, nous soutenons le rétablissement d’une obligation formelle de négociation sur l’emploi et les conditions de travail des seniors au niveau des branches ainsi que pour les entreprises de 300 salariés et plus –⁠ notre groupe a défendu à de nombreuses reprises de telles dispositions. Nous considérons toutefois qu’un mécanisme de sanction en cas d’absence d’accord aurait pu permettre de s’assurer de cet objectif. Nous sommes convaincus du rôle essentiel de la négociation pour diffuser au sein des entreprises la culture de dispositifs encore trop ignorés des salariés et des employeurs.
    C’est aussi le rôle des entretiens professionnels, qui seront mieux articulés avec les visites médicales, notamment à mi-carrière et en fin de carrière. Toutefois, cela demandera du temps et du personnel, alors que nous connaissons actuellement une pénurie de médecins du travail.
    Actuellement, 37 % des salariés ne se sentent pas capables de travailler jusqu’à la retraite. Les seniors sont particulièrement vulnérables aux accidents et aux maladies. Cela doit nous alerter sur l’importance d’aménager les fins de carrière, notamment en offrant la possibilité de réduire le temps de travail. Pourtant, les dispositifs comme la retraite progressive sont encore peu mobilisés. Plus largement, seuls 25 % des salariés de plus de 55 ans travaillent à temps partiel en France, alors que ce taux atteint 40 % aux Pays-Bas. Un changement de mentalité est nécessaire, mais il faut surtout des simplifications législatives –⁠ que permet en partie ce projet de loi.
    Nous sommes plutôt réservés quant à la création du contrat de valorisation de l’expérience en raison de la possibilité de mise à la retraite dès que le salarié peut liquider sa retraite à taux plein et de l’exonération de cotisation sur l’indemnité de mise à la retraite. Nous ne sommes pas convaincus de la pertinence et du caractère protecteur de ce nouveau contrat, mais nous comprenons qu’il était un élément de l’ANI et, compte tenu de son caractère expérimental, nous ne nous y opposerons pas. Enfin, notre groupe soutient les mesures relatives au dialogue social et à l’accès facilité à l’assurance chômage.
    Nous souhaitons rappeler l’engagement et le travail du groupe LIOT sur ce sujet, notamment lorsque nous avions défendu, en mai 2024, une proposition de loi visant à protéger le modèle d’assurance chômage et à soutenir l’emploi des seniors. Nous proposions des mesures pour donner plus de force au dialogue social, en remplaçant notamment le document de cadrage par un document d’orientation moins contraignant, en amont des négociations sur l’assurance chômage. Nous regrettons que ce projet de loi ne puisse être l’occasion d’intégrer cette disposition.
    Enfin, la signature du dernier accord relatif à l’accès à la formation et aux transitions professionnelles nous paraît constituer un levier essentiel. L’intégrer par voie d’amendement de manière tardive n’est toutefois pas une méthode de travail optimale pour la représentation nationale.
    Chaque fois qu’elle le peut, la loi doit favoriser et protéger l’emploi des seniors, mais elle ne suffira pas à atteindre cet objectif. Le dialogue social est un outil puissant pour y parvenir mais, plus généralement, il nous faut amorcer un changement global des pratiques et des mentalités. (Applaudissements sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Depuis le recul de l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans en 2010, toutes les études ont montré que repousser l’âge de départ pour effet d’allonger la période entre la fin de la carrière professionnelle et le début de la retraite. De fait, en moyenne, entre 55 et 61 ans, 21 % des travailleurs –⁠ surtout des ouvriers et des employés – ne sont ni en emploi ni à la retraite. La dernière étude de l’Unedic montre que les entreprises ont tendance à se séparer brutalement de leurs salariés expérimentés et à moins recruter à ces âges du fait de mécanismes de discrimination, ce qui contraint ces travailleurs à des périodes de chômage de longue durée, ou à passer du chômage aux minima sociaux avant de pouvoir enfin percevoir leur pension de retraite. Avec la réforme inique de 2023, contre laquelle je rappelle que notre assemblée s’est prononcée par le biais d’une résolution déposée par le groupe GDR le 5 juin dernier, des dizaines de milliers de travailleuses et de travailleurs seront encore plus précarisés.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Absolument !

    M. Nicolas Sansu

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    C’est d’autant plus vrai que les plans de licenciement s’amoncellent, frappant les plus âgés. La précarisation des travailleurs expérimentés relève en réalité de causes structurelles que vous éludez. Cela vient d’être dit, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), en 2019 –⁠ donc déjà avant le passage à la retraite à 64 ans –, 37 % des salariés ne se sentaient pas capables de tenir jusqu’à la retraite du fait de conditions de travail dégradées, de reculs en matière de prévention et de santé, et d’une pénibilité insuffisamment reconnue.
    Outre que ce texte ne traite nullement de ces causes structurelles, il pèche aussi par le fait qu’il transpose non pas un, ni trois, mais désormais quatre accords nationaux interprofessionnels, puisque la réécriture express de l’article 10 par le gouvernement permet de transposer la dernière négociation conclue sur les reconversions et les transitions professionnelles. Cet article rédigé à la va-vite se traduit par la spoliation d’un bénéfice individuel, confisqué pour être mis au service de l’entreprise.
    Ce n’est donc pas sans de grandes réticences que nous abordons l’examen de ce texte, d’autant que ses dispositions principales sur les travailleurs expérimentés sont au mieux très timides, au pire régressives. Si nous approuvons l’obligation de négocier sur l’emploi des travailleurs expérimentés tous les quatre ans, celle-ci n’équivaut pas à une obligation de conclure un accord ou même seulement de produire un plan d’action type, et encore moins d’en respecter les termes quand ils existeront, car aucune sanction afférente au non-respect de cette obligation n’a été instaurée.
    Ensuite, vous nous ressortez la vieille lune du patronat et de la droite, avec la création à titre expérimental pour cinq ans d’un contrat de valorisation de l’expérience, qui reviendra à affaiblir le contrat à durée indéterminée, puisqu’en réalité ce contrat arrivera à échéance dès que le travailleur aura réuni les conditions d’un départ à la retraite à taux plein, ce qui ne signifie pas une retraite pleine pour tout le monde. Ce nouveau contrat fait donc perdre beaucoup aux salariés, tout en faisant gagner un peu plus encore et toujours aux employeurs. Ceux-ci seront en effet exonérés de la contribution patronale spécifique de 30 % sur l’indemnité de mise à la retraite. Madame la ministre, vous avez annoncé au Sénat que cette mesure coûterait 123 millions d’euros. Les dizaines de milliards consacrés au soutien aux entreprises et aux exonérations totales et partielles de cotisations sociales ne suffisent donc jamais ; c’est un puits sans fond.
    Enfin, nous nous interrogeons sur la possibilité d’affecter l’indemnité de départ à la retraite au maintien total ou partiel de la rémunération d’un salarié en fin de carrière qui passerait à temps partiel, ce qui est une aubaine pour les employeurs puisque l’opération est, pour eux, à coût nul. Mais pour les salariés, et particulièrement pour ceux qui subissent des carrières hachées, cette disposition a un coût et est foncièrement injuste, puisqu’il leur revient d’aménager eux-mêmes leur temps de travail en fin de carrière sur les deniers de leur indemnité de départ de retraite à venir. Tout le monde est favorable à une retraite progressive, mais ce n’est pas aux salariés de la financer eux-mêmes.
    Certes, ce texte acte la suppression de la limite des mandats successifs pour les élus des CSE et il prévoit d’adapter les conditions d’activité requises pour les primo-entrants à l’assurance chômage. Mais sur le sujet principal, celui des travailleurs expérimentés, comme cela est déjà visible et si prévisible, il ne permet nullement de répondre à la précarisation des travailleurs de plus de 60 ans, dont un nombre croissant devra vivre avec les minima sociaux.
    Notre pays, sixième puissance mondiale, est un pays riche, madame la ministre. Il abrite de plus en plus de millionnaires et surtout de centimillionnaires. L’enjeu réside, à notre sens, dans un autre partage des richesses et non dans la recherche incessante d’économies au profit d’une petite caste qui se gave. Face aux fermetures d’entreprises, notamment industrielles, dont le nombre repart à la hausse, avec pour corollaire la remontée du taux de chômage, le texte que vous nous présentez sera de bien peu d’effet pour les travailleuses et les travailleurs. Pour toutes ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne pourra pas approuver ce projet de loi. (Mme Sophie Taillé-Polian applaudit.)

    M. Erwan Balanant

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    Le dialogue social vous remercie !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Olivier Fayssat.

    M. Olivier Fayssat

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    Notre pays traverse une période de tensions durables, économiques et sociales, qui appelle de notre part des réponses concrètes. Indiscutablement, l’emploi doit être au cœur de notre réflexion. Seul le travail produit de la valeur. Par conséquent, augmenter le taux d’emploi, c’est accroître la production de valeur. Parmi les grands défis contemporains, celui de l’emploi des salariés expérimentés s’impose avec force. Il s’agit là d’un impératif économique, d’un enjeu de justice sociale et d’un test pour notre cohérence collective.
    Le vieillissement démographique n’est pas une surprise, mais nous avons trop longtemps différé l’adaptation de nos politiques publiques à cette réalité. La conséquence est connue : le taux d’emploi des 60-64 ans, dramatiquement faible en France –⁠ 38 % en 2023 –, se situe bien en deçà de celui de nos voisins européens, qu’il s’agisse de l’Allemagne, où il est de 65 %, ou des Pays-Bas.
    Selon une note du Medef, si nous avions en France le taux d’emploi des Pays-Bas, les recettes publiques seraient supérieures d’au moins 140 milliards d’euros, soit le budget cumulé de l’éducation nationale et de la défense. Ce n’est pas un hasard si les systèmes de protection sociale de ces pays sont plus solides et leurs finances publiques plus saines. Il ne s’agit pas seulement de gérer un stock de population âgée, mais bien d’agir sur notre capacité productive globale, sur le bon usage de toutes les compétences, de tous les parcours, de toutes les expériences.
    C’est dans ce contexte que nous examinons le projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés. Ce texte, s’il ne prétend pas résoudre tous les problèmes, inscrit les principaux leviers d’une action cohérente et concertée. Il traduit fidèlement l’accord signé par la quasi-totalité des organisations syndicales et patronales, à l’exception de la CGT bien évidemment, le 14 novembre dernier. Il ouvre une ère nouvelle pour le dialogue social en imposant une négociation dans les branches et les entreprises d’une certaine taille ; il inscrit la question de l’emploi des seniors dans le quotidien du dialogue professionnel ; il redonne aux partenaires sociaux un rôle central et légitime.
    Ensuite, il agit sur l’anticipation et l’adaptation des parcours professionnels, en renforçant les entretiens à 45 ans et à 60 ans et en les articulant à la visite médicale de mi-carrière. Il permet ainsi d’identifier les risques, les opportunités, les aspirations et donne du sens aux parcours.
    Enfin, il innove en créant un nouveau contrat, le contrat de valorisation de l’expérience, destiné aux demandeurs d’emploi seniors. Trop souvent laissés sur le bord de la route, ces femmes et ces hommes cumulent actuellement toutes les faiblesses : une durée moyenne de chômage plus longue, une probabilité d’embauche plus faible, une invisibilité croissante. Ce contrat est un outil, expérimental certes, mais structurant, puisqu’il redonne une perspective à ces travailleurs. À ces mesures s’ajoutent des dispositions pragmatiques sur l’adaptation du temps de travail en fin de carrière, sur la mobilisation des dispositifs de transition et de reconversion professionnelle et la qualité du dialogue social au sein des entreprises.
    L’ensemble compose un texte équilibré, utile, qui a le mérite de répondre par le droit à une urgence économique et sociale. Le groupe UDR votera donc en faveur de ce projet de loi, parce que nous partageons la volonté de répondre à la réalité du terrain et de favoriser le dialogue entre partenaires sociaux. Le rôle du Parlement est aussi de respecter le fruit de la négociation sociale lorsqu’il est équilibré et ambitieux, et qu’il porte des solutions concrètes.
    Néanmoins, le vote de ce texte est assorti de deux réserves sur des points que nous appelons à corriger. La première concerne le délai de carence prévu dans le contrat de valorisation de l’expérience. Le texte initial prévoyait six mois, mais ce délai a été porté à deux ans. Nous considérons, comme les partenaires sociaux, que cette modification nuit à l’efficacité du dispositif. Elle en réduit considérablement la portée et pourrait en détourner les entreprises.
    La seconde réserve concerne l’entretien professionnel renforcé autour de 45 ans et son articulation avec la visite médicale. Le texte introduit une interdiction de transmettre à l’employeur les recommandations du médecin du travail, même avec l’accord du salarié. C’est selon nous une rigidité inutile. Il ne s’agit pas ici de rompre le secret médical, mais bien de permettre, dans le respect du volontariat, un échange utile pour prévenir l’usure professionnelle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thomas Ménagé.

    M. Thomas Ménagé

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    À mon tour, je veux d’abord saluer la méthode qui nous réunit. Transposer dans la loi un accord national interprofessionnel, c’est reconnaître que le monde du travail ne se gouverne pas depuis un bureau à Paris, mais qu’il se construit sur le terrain avec les partenaires sociaux. Le Rassemblement national tient à rappeler que le travail avec les partenaires sociaux doit être un préalable dès que cela est possible. Nous croyons au dialogue social, non par posture, mais parce que c’est une question de bon sens : ce sont les partenaires sociaux qui connaissent le mieux la réalité des branches, des métiers et des contraintes.
    En matière d’emploi des seniors, notre modèle reste à la traîne et la réforme des retraites de 2023 n’a rien réglé : elle s’est contentée de repousser l’âge légal sans se soucier des réalités vécues par ceux qui usent leur santé au travail. Je le vois tous les jours dans le Gâtinais, quand je reçois, comme vous, des personnes qui ont 50 ou 55 ans, qui ont travaillé toute leur vie, qui sont au chômage et qui peinent à trouver un emploi. Ces situations nous prouvent qu’il faut des réponses concrètes, adaptées et qui partent du terrain aux questions que sont la préparation de la seconde partie de carrière, la création de nouveaux dispositifs pour faciliter le retour à l’emploi ou encore les aménagements de poste pour les travailleurs expérimentés.
    Mais, il faut le dire, ces mesures ne suffiront pas si l’on ne se pose pas une autre question, tout aussi fondamentale : celle de l’entrée et surtout de l’âge d’entrée des jeunes sur le marché du travail.
    Dans les années 1980, les pouvoirs publics ont voulu que 80 % des jeunes obtiennent le baccalauréat et poursuivent des études supérieures. Cette volonté était nourrie d’un certain mépris pour les filières technologiques et professionnelles.
    Quand 20 à 50 % des étudiants d’une filière se retrouvent au chômage ou chez McDonald’s après un bac + 5, il faut peut-être se poser la question de l’adéquation des formations aux besoins économiques du pays : nous n’avons jamais compté autant de chômeurs que depuis les mandats d’Emmanuel Macron.
    Aujourd’hui, un jeune sur cinq est au chômage. Beaucoup enchaînent les stages, l’intérim et les CDD, sans jamais accéder à la stabilité ; d’autres prolongent leurs études. L’âge moyen du premier emploi stable se situe autour de 25 ans, alors qu’il était à 20 ans en 1975.
    Au Rassemblement national, nous croyons fermement qu’il vaut mieux travailler deux ans de plus au début de sa vie professionnelle plutôt qu’à la fin, quand on est fatigué, usé, et parfois malade.

    M. Erwan Balanant

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    Il faudrait faire moins d’études, quoi !

    M. Thomas Ménagé

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    Nous devons donc développer de nouveaux dispositifs pour permettre à nos seniors de travailler et de transmettre leurs savoirs en fin de carrière.
    Cela suppose d’investir réellement dans la formation, l’alternance et la revalorisation des filières professionnelles ainsi que d’encourager le tutorat, afin que l’expérience des aînés bénéficie à ceux qui débutent.
    Nous ne voulons pas détricoter l’équilibre trouvé par les partenaires sociaux, mais plutôt ouvrir des débats de fond : sur la formation, la transmission et la valorisation des compétences, les conditions de travail ou encore la prévention de l’usure professionnelle.
    Ce texte marque un progrès, mais il faudra aller beaucoup plus loin. Nous devons préparer une stratégie puissante et cohérente comprenant l’emploi des seniors, l’accès des jeunes au premier emploi, la lutte contre la précarité, la hausse des salaires et la lutte contre le chômage –⁠ tout est lié.
    Enfin, comment aborder ce débat sans évoquer la question centrale des retraites ? Si nous parlons aujourd’hui du maintien en emploi des seniors, c’est bien parce que la réforme des retraites de 2023, imposée sans vote, comme l’a rappelé le rapporteur, a repoussé l’âge légal à 64 ans, sans traiter de la pénibilité, du chômage des seniors ou encore de l’espérance de vie en bonne santé. Il aurait peut-être fallu se poser ces questions cruciales en amont de cette réforme.
    Si nous sommes dans cette situation, c’est aussi à cause de nos collègues de gauche, qui surjouent leur opposition à la réforme des retraites Borne-Macron, tout en enchaînant les trahisons : pas de vote de la motion référendaire proposée par le RN, obstruction insensée, et surtout refus de voter, le 31 octobre dernier, notre texte d’abrogation de la réforme des retraites, qui aurait permis de redonner deux ans de vie aux Français.
    Collègues socialistes, de votre côté, vous avez récemment cherché à vous racheter une bonne conscience à peu de frais, avec un conclave fumeux. Vous continuez à mentir aux Français en leur faisant croire qu’en censurant le gouvernement Bayrou, les Français auraient pu partir plus tôt à la retraite. Ils ne sont pas dupes.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    C’est le gouvernement Bayrou qui a lancé le conclave !

    M. Thomas Ménagé

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    Il faudra rouvrir le débat sur les retraites. Les Français pourront compter sur les députés du Rassemblement national pour abroger la réforme de 2023 au profit d’une réforme de justice sociale, qui prendra en considération les carrières hachées et la pénibilité du travail des femmes, premières victimes de la réforme.
    Pour finir, saluons l’exemple donné par les partenaires sociaux et soutenons tout ce qui peut l’être, mais n’oublions jamais que le dialogue social doit rester la règle. Dans les mois à venir, ne recommencez pas à passer des textes par la violence d’un 49.3. Privilégiez le dialogue : un bon accord sera toujours mieux qu’une décision imposée de force par le gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Louis Boyard

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    Soyez rassuré, vous gardez le monopole du fascisme !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Joséphine Missoffe.

    Mme Joséphine Missoffe

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    Ce projet de loi dépasse la simple question du droit au travail. Il touche au cœur de notre modèle social, à la place que nous accordons à nos aînés et à la manière dont nous construisons une société du travail équitable et inclusive.
    Si l’on regarde les chiffres, la France affiche un taux d’emploi des seniors de seulement 39 % pour les 60-64 ans, bien loin des 65 % observés en Allemagne ou des 69 % en Suède. Ce constat alarmant met en lumière un retard que notre pays doit rattraper. Pourtant, ce retard n’est pas une fatalité. Le texte porte la promesse d’un changement profond, en modifiant la manière dont nous considérons les seniors dans le monde du travail.
    Dans la circonscription bretonne de ma collègue Christine Le Nabour, comprenant la communauté d’agglomération de Vitré, le taux de chômage est de 3,8 % : c’est l’un des plus bas de France. Nous pouvons en être fiers, mais cela ne doit pas masquer la réalité. Derrière ce chiffre, il y a des hommes et des femmes qui ont consacré une vie de travail à notre économie et qui, à l’approche de la retraite, sont parfois mis de côté.
    Je tiens à le dire clairement : dans ces territoires où l’emploi est une priorité, les seniors sont une ressource précieuse et déterminante. Leur savoir-faire, leur expérience et leur vision du travail sont des atouts irremplaçables pour les entreprises. Une activité ne se construit pas uniquement sur la jeunesse, mais plutôt sur l’alliance de l’expérience et de l’innovation. C’est dans cette alliance que réside la force de nos territoires.
    C’est pourquoi ce projet de loi, qui transpose des accords nationaux interprofessionnels, est un acte politique fort. Par le biais du contrat de valorisation de l’expérience, de la reprise des négociations de branche ou encore de la revalorisation du temps partiel choisi, nous redonnons des perspectives à celles et ceux qui, trop souvent, se voient relégués en marge du marché du travail bien avant l’âge légal de départ en retraite.
    Ce texte propose un véritable changement culturel dans l’entreprise, en ancrant durablement la question de l’emploi des seniors dans les pratiques sociales et les négociations collectives. Ce n’est pas une obligation supplémentaire, mais une nécessité pour adapter notre société au vieillissement de la population. Nous devons permettre à chaque salarié expérimenté de continuer à contribuer au monde du travail avec dignité, compétence et fierté.
    Le groupe Ensemble pour la République soutient donc pleinement ce projet de loi, car il est fondamentalement aligné avec nos valeurs : l’égalité des chances, la reconnaissance du mérite et la juste place de chacun dans le monde du travail.
    Il faut aussi rappeler qu’il s’inscrit dans un objectif plus large : celui d’atteindre un taux d’emploi des seniors de 65 % d’ici 2030. Cela ne pourra se faire qu’avec des actions concrètes, des réformes ciblées et un travail de conviction dans les entreprises.
    Pour nous, l’emploi des seniors n’est pas une option, mais une nécessité. Nous avons tous un rôle à jouer pour changer les mentalités et valoriser les compétences des travailleurs expérimentés. Le groupe Ensemble pour la République votera en ce sens. (Applaudissements sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    Vous nous présentez, la bouche en cœur, la transposition de l’accord professionnel sur la convention de l’assurance chômage. Cet accord permet l’ouverture, sous conditions, des droits à l’assurance chômage pour les primo-entrants et les saisonniers, en abaissant d’un mois l’exigence de cotisation. Toutefois, il ne nous fera pas oublier que le gouvernement a exigé les coupes budgétaires de la nouvelle convention d’assurance chômage de novembre 2024.
    Alors même que, d’ici 2026, nous connaîtrons une vague de 200 000 licenciements économiques, vous avez exigé la sortie de l’indemnisation d’environ 17 000 personnes et la perte de cinq à six jours d’indemnité en moyenne par an, ce qui défavorisera 900 000 allocataires en raison de la mensualisation, des cadeaux sociaux aux patrons ainsi qu’une nouvelle baisse de la cotisation chômage employeur. Voilà donc le bilan d’un gouvernement et d’une droite qui arrivent à mépriser et à détester un peu plus chaque jour les personnes privées d’emploi.

    M. Aurélien Saintoul

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    C’est honteux !

    Mme Ségolène Amiot

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    Ces mêmes entreprises qui bénéficient de cadeaux sociaux sont pourtant les premières à discriminer à l’embauche nos collègues de plus de 50 ans. Entre 55 et 61 ans, un assuré sur cinq n’est déjà plus ni en emploi ni en retraite. Parmi ces seniors, ce sont les femmes, ouvrières et employées, qui subissent les plus longues périodes de privation d’emploi après 50 ans.
    Cet ANI ne nous fera pas oublier votre passage en force sur la retraite à 64 ans, que vous avez voulu conforter avec le fameux conclave. Dans quelle langue faut-il le dire ? Les Françaises et les Français veulent l’abrogation de la réforme des retraites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Sophie Taillé-Polian applaudit aussi.)

    M. Louis Boyard

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    Exactement !

    Mme Ségolène Amiot

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    Madame Panosyan-Bouvet, vous nous avez invités à changer de regard sur l’emploi des seniors. Vous voulez que nous acceptions que celles et ceux qui sont déjà en situation de précarité le soient encore plus : jamais nous ne l’accepterons ! Nous ne participerons pas au réenchantement de la mise au travail forcée de nos aînés.
    C’est pour ces raisons que nous ne soutiendrons pas vos fameux contrats de valorisation de l’expérience, qui, derrière un total social washing, cachent un nouveau cadeau fait au patronat, avec une nouvelle exonération de cotisations qui va venir s’ajouter aux 90 milliards déjà offerts aux entreprises sous la forme d’aides accordées sans contreparties.
    Le 1er juillet, un salarié de 35 ans est mort au travail à cause de la chaleur. Soutenir la retraite à 64 ans, c’est accepter que nos collègues plus âgés aient les mêmes conditions de travail et soient exposés encore plus longtemps à ces risques. Avec vous, ce n’est plus « Marche ou crève », mais « Travaille et crève ». (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Vous vous gargarisez de transposer ces accords dans le respect des partenaires sociaux, mais c’est quand ça vous arrange, en fait ! L’avis des syndicats, quand il s’agissait de faire passer la réforme des retraites, vous vous êtes assis dessus ! Ils n’ont signé que pour limiter la casse –⁠ votre casse. Vous avez éradiqué le principe de faveur du droit du travail et empêché les mécanismes permettant aux salariés de bénéficier des règles plus favorables. Les lois El Khomri de 2016 et les ordonnances Macron de 2017 ont cassé la protection des salariés contre le licenciement, les négociations collectives et la protection de la santé des travailleurs et des travailleuses.
    Ces derniers temps, je reçois des témoignages de détresse de la part d’élus au CSE. Le comité d’évaluation des ordonnances travail signalait pourtant leur déspécialisation. Il faut donc, à l’appel des syndicats, supprimer la limitation du nombre de mandats successifs des élus au CSE. (M. Aurélien Saintoul applaudit.) Cette avancée est bien timide. Elle ne prend en compte ni la surcharge de travail de ces derniers ni les moyens toujours plus diffus pour remplir leurs missions.
    Vous voulez vraiment agir pour les travailleurs et les travailleuses ? Ayez la volonté de combattre le fait que la France est la championne d’Europe des morts au travail ! Réintroduisez des délégués spécialisés qui se consacrent à la santé et la sécurité au travail, au sein des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ! Financez l’inspection du travail ! Abrogez la réforme des retraites à 64 ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard.

    Mme Océane Godard

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    Nous sommes toutes et tous des seniors en devenir –⁠ sinon, c’est que nous le sommes déjà ! (Sourires.) Ce projet de loi nous concerne donc toutes et tous.
    Je voudrais exprimer mon étonnement sur le fait que ce texte, fidèle au résultat de la négociation avec les partenaires sociaux, se focalise uniquement sur ce public cible, alors que les déterminants du maintien dans l’emploi se sont joués bien avant.
    Je sais que vous me rejoignez sur ce point, madame la ministre : le vrai sujet est moins celui de l’emploi que celui du travail, des conditions de travail et de l’accompagnement des actifs tout au long de la vie professionnelle.
    Naturellement, il faut bien commencer. Je tiens à le dire au nom du groupe Socialistes et apparentés : cette transposition fidèle de l’ANI a le mérite de poser des jalons. Nous saluons l’esprit de responsabilité des partenaires sociaux, dans une période où le paritarisme est malmené.
    Une fois ces jalons posés, nous voulons toutefois aller plus loin. La question de l’emploi des seniors interroge, en premier lieu, leur environnement et la capacité de celui-ci à s’adapter au vivier de compétences et d’expérience qu’ils représentent. Le cadre de travail doit impérativement évoluer et s’assouplir afin de tenir compte de la situation de chacun et de son vieillissement.
    Nous sommes marqués par des réflexes archaïques. Pourquoi parler de l’emploi des seniors seulement quand une réforme des retraites est en cours ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Exactement !

    Mme Océane Godard

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    Pourquoi ne pas parler de l’emploi des seniors lors des réformes de la formation professionnelle, ou lorsque l’on parle de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ? Cette approche segmentée a affaibli notre capacité à travailler à la bonne échelle. Je vous propose, madame la ministre, de considérer que nous aurons collectivement avancé lorsque le cœur de nos priorités sera la qualité des conditions de travail tout au long de la vie. Si pertinentes qu’en soient les dispositions, ce projet de loi court le risque d’échouer tant que l’on ne se pose pas, je le répète, la question des conditions de travail, de leur exercice, des moyens donnés aux entreprises, des garanties offertes aux salariés.
    Nous avons besoin qu’une volonté politique forte soutienne les opérateurs publics, paritaires, associatifs qui accompagnent les entreprises dans leur transformation. Nous avons besoin des savoir-faire de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), des agences régionales pour l’amélioration des conditions de travail (Aract), de la caisse d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat), de la médecine du travail, des opérateurs de compétences (Opco), de tant d’autres acteurs, tant de structures qui, dans les territoires, accompagnent les entreprises et diffusent cette culture nouvelle. Ce sont elles qui, avec les partenaires sociaux, sensibilisent les directions, forment les équipes chargées des ressources humaines et surtout les managers.
    En effet, comme il a été rappelé à maintes reprises lors des auditions préparatoires, le cœur du problème tient à la nécessité d’un changement culturel, à l’évolution d’organisations du travail et de pratiques managériales inadaptées, ce que confirme un récent rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Or, la portée du plan de développement des compétences ayant été affaiblie par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, ce changement culturel n’aura pas lieu sans un recours massif à la formation professionnelle continue pour les salariés en poste, particulièrement les managers. Aussi, je vous propose, madame la ministre, d’envisager un plan d’investissement ambition en matière de compétences managériales, afin d’accomplir cette révolution des pratiques dont les actifs, les entreprises et la société ont besoin.
    Je conclurai par quelques mots relatifs aux dispositions du projet de loi. Concernant l’accord relatif à l’emploi des travailleurs dits expérimentés, certaines vont dans le bon sens : le renforcement des obligations de négociation au sein des branches et des entreprises, l’enrichissement, pour ces salariés, des entretiens professionnels. Peu d’amendements prévoyant de réelles évolutions du texte ont été retenus lors de l’examen en commission ; je salue néanmoins l’adoption, à l’article 1er, d’un amendement socialiste visant à introduire la question du management dans le périmètre des négociations collectives portant sur l’emploi et le travail des salariés dits seniors.
    En revanche, notre vigilance demeure sur plusieurs points, en particulier l’article 4, qui prévoit l’expérimentation d’un contrat de valorisation de l’expérience : suivant mon hypothèse, il ne suffira pas d’un contrat ciblant un public donné et reposant sur une baisse du coût du travail –⁠ vieille recette des politiques de l’emploi – pour donner du sens à l’emploi des travailleurs seniors. S’agissant des transitions et reconversions professionnelles, la négociation s’est déroulée de façon correcte ; in fine, les propositions des organisations de salariés ont été acceptées par la partie patronale. Pour paraphraser l’un des représentants des salariés, ces derniers n’ont pas de nouveaux droits, mais n’en ont pas non plus perdu. Comme quoi, lorsqu’on laisse de l’autonomie aux partenaires sociaux, lorsqu’il existe de l’écoute, du dialogue, ils savent bâtir des compromis : nous nous félicitons d’ailleurs que le paritarisme soit préservé, en particulier au niveau régional. Nous voterons pour ce projet de loi, qui représente une première étape. (M. Jacques Oberti applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Stella Dupont.

    Mme Stella Dupont

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    Ce projet de loi a pour objectif de transposer l’ANI du 14 novembre 2024 portant sur l’emploi des salariés expérimentés, celui sur l’évolution du dialogue social et la convention relative à l’assurance chômage conclue le 15 novembre 2024 ; le tout dernier accord sur les transitions professionnelles, que je salue, sera transposé par un amendement du gouvernement. Ces accords illustrent le bon fonctionnement de notre démocratie sociale et confirment la capacité des partenaires sociaux à trouver des solutions pragmatiques, équilibrées, conformes à l’intérêt général –⁠ nous l’avons tous souligné. Je nous souhaite de pouvoir parfois dépasser nos divisions et, ici même, suivre cette dynamique. Nous pouvons atteindre ces résultats si nous mettons de côté nos querelles habituelles et nous concentrons sur une seule boussole : l’intérêt supérieur du pays.
    Bien sûr, toutes les négociations ne se concluent pas pour autant par un accord : récemment, celles menées dans le cadre du conclave sur les retraites n’ont pas abouti. À ce sujet, je salue l’attitude constructive des syndicats participants et je vous avouerai regretter une certaine rigidité du patronat –⁠ mais revenons au texte que nous examinons aujourd’hui. Outre l’expérimentation d’un contrat de valorisation de l’expérience et des aménagements de fin de carrière par les partenaires sociaux, il nous est proposé une obligation pour les entreprises de plus de 300 salariés de négocier au moins une fois tous les quatre ans sur l’emploi, le travail et l’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés. Je suis satisfaite de voir réapparaître cette mesure que j’avais défendue en 2023 lors de l’examen de la réforme des retraites, les conditions de travail étant une constante de nos discussions en la matière.
    Toujours en 2023, en France, selon le ministère du travail, 58 % des personnes âgées de 55 à 64 ans occupaient un emploi, contre 83 % des 25 à 49 ans ; comme l’a rappelé Mme la ministre, ce taux reste également plus de six points en deçà de la moyenne de l’Union européenne. Le travail des seniors constitue donc une priorité : nous devons absolument remédier à la relégation professionnelle des plus de 55 ans. Tout en soutenant ces accords, je pense qu’il va falloir persévérer, prendre d’autres mesures, tant est forte dans notre pays la culture de la mise à la porte –⁠ du moins à l’arrière-cour – des seniors ou salariés expérimentés : c’est une véritable révolution culturelle que nous avons collectivement à conduire. De grandes entreprises, par exemple, ne sont pas toujours exemplaires sur ce point, alors qu’elles disposent de possibilités et de moyens que n’ont pas les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME).
    Ces accords constituent des évolutions positives certaines, notamment s’agissant de l’anticipation dès 45 ans des fins de carrière, mais nous devons, je le répète, faire beaucoup mieux en matière de maintien dans l’emploi. J’espère ainsi que les mesures contenues dans l’accord en cause permettront des transitions professionnelles sans rupture, plus respectueuses de l’engagement des salariés concernés. Enfin, je suis très satisfaite des avancées concernant la retraite progressive, dont l’essentiel –⁠ vous l’avez dit, madame la ministre – sera transposé par décret, en vue d’une mise en application le 1er septembre 2025. Ce sont là des mesures attendues sur le terrain : dans mes terres angevines, on m’en parle très régulièrement.
    Madame la ministre, vous nous présentez une transposition fidèle des accords conclus entre organisations patronales et syndicales ; je tiens à saluer votre ténacité tranquille, particulièrement efficace. Le dialogue social, auquel je vous sais attachée, fait partie intégrante de notre démocratie. Nous devons lui faire retrouver une place centrale : c’est l’une des idées principales de la social-démocratie que je défends.

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.
    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Je constate sur vos bancs un attachement réel à la démocratie sociale, à faire vivre ce que les partenaires sociaux, dans un esprit de responsabilité, ont été en mesure de négocier. Je voudrais répondre à MM. Sansu et Castellani au sujet de la transposition de l’ANI du 25 juin en faveur des transitions et reconversions professionnelles : plutôt que d’attendre un autre projet de loi, nous avons préféré utiliser la fenêtre de tir constituée par l’examen de celui-ci afin de transposer rapidement ces outils opérationnels dont nos salariés ont besoin, notamment en cas de reconversion due à une restructuration économique ou à l’exposition à l’usure. Ce choix a été fait en bonne intelligence avec les partenaires sociaux ainsi que les rapporteurs du texte au Sénat et à l’Assemblée nationale.
    Utiliser cette fenêtre, encore une fois, nous permet de transposer l’ANI dès à présent –⁠ sous réserve, naturellement, du vote de cette assemblée – afin de disposer dès septembre de ces outils, qui faciliteront les reconversions. C’est une question de pragmatisme, et c’est pourquoi, lors de l’élaboration de cette transposition, nous avons travaillé quasiment en temps réel avec les partenaires sociaux, de manière à nous assurer que ce qu’ils avaient achevé de négocier le 25 juin se retrouvait dans les dispositions qui vous seront soumises.
    Monsieur Ménagé, je suis tout à fait d’accord avec vous pour affirmer qu’il ne faut absolument pas opposer le taux d’activité des jeunes à celui des seniors. Ce fut l’une des grandes erreurs de la France, dans les années 1970, que de penser qu’il importait de sortir les plus de 50 ans du marché du travail pour faire de la place aux jeunes ; résultat, à la fois le taux d’activité de ces derniers et celui des plus de 55 ans sont bas par rapport à ceux des pays d’Europe du Nord, auxquels je fais souvent référence, ou de l’Allemagne, qui tous réussissent sur les deux fronts. Avec le Comité national pour l’emploi, avec Mme Borne –⁠ en la matière, l’éducation nationale et nous devons travailler main dans la main –, nous remettrons à plat début juillet la stratégie touchant l’insertion professionnelle des jeunes. Il n’en sortira pas nécessairement un texte législatif ; pour autant, j’aimerais vraiment pouvoir m’appuyer –⁠ je le dis devant son président – sur les recommandations de la commission des affaires sociales, avoir un débat, un échange, avec vous.
    Madame Godard, merci de votre intervention : je fais effectivement partie de ceux qui ne veulent pas opposer travail et emploi. Au contraire, c’est en parlant du premier que l’on peut favoriser le second –⁠ par les conditions de travail, la santé au travail, les compétences. Sur ce dernier point, nous sommes réellement en retard : notre taux de formation des plus de 55 ans est quasiment inférieur de moitié à celui de la Suède, ce dernier restant supérieur même au taux français de formation –⁠ je parle bien sûr de formation professionnelle continue – des 20 à 50 ans ! Il y a donc un chantier immense en matière d’acquisition de connaissances tout au long de la vie. Cela passe, vous l’avez dit, par l’anticipation : côté entreprise ou côté salarié, ce n’est pas lorsque celui-ci atteint 55 ans que l’on se réveille pour traiter ces sujets.
    Peut-être pourrons-nous aller plus loin dans les mois ou les années qui viennent, mais nous aurons déjà cette obligation de négocier au niveau de la branche, de l’entreprise, cet entretien à mi-carrière qui offre une vue transversale sur les compétences et la santé. Je vous remercie également d’avoir cité l’Anact, belle institution qui travaille énormément et a fourni, sur un certain nombre de sujets, des contributions très concrètes. À l’intention de ceux qui pourraient penser que nous instrumentalisons la démocratie sociale, je suis ministre du travail depuis septembre : depuis septembre, nous avons eu cinq accords, que vous êtes aujourd’hui invités à transposer, la plupart signés par quatre organisations équivalant à 75 % de la représentativité syndicale. À bas bruit, sans éclat, on peut vraiment avancer au bénéfice des travailleurs de notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR ainsi que sur les bancs des commissions. –⁠ Mme Stella Dupont applaudit également.)

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Weber, pour soutenir l’amendement no 15.

    M. Frédéric Weber

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    « Le travail éloigne de nous trois grands maux, l’ennui, le vice et le besoin », écrivait Voltaire dans Candide. Encore faut-il pour cela qu’il soit accessible, que la loi n’oublie pas ceux qui dès 55 ans –⁠ j’ai bien entendu Mme la ministre, il y a quelques minutes, prendre cet âge pour repère intellectuel – sont progressivement exclus du marché de l’emploi. L’article 1er évoque « l’emploi et le travail des salariés expérimentés, en considération de leur âge », formule vague, bureaucratique et surtout totalement à côté de la réalité, car dans les faits le public concerné est celui de 55 ans et plus. Selon une étude de l’Insee publiée en 2023, 21 % des personnes âgées de 55 à 61 ans ne sont « ni en emploi, ni à la retraite », c’est-à-dire qu’un senior sur cinq se trouve piégé dans une zone grise, invisible aux yeux des statistiques officielles comme à ceux du droit. Pendant ce temps, les dispositifs en faveur de l’emploi des seniors se succèdent, s’empilent, échouent, sont remplacés par d’autres –⁠ autant de sigles sans effet concret.
    Ce projet de loi entend à son tour améliorer l’accès des seniors à l’emploi : très bien. Commençons, alors, par appeler les choses par leur nom. L’amendement vise à corriger cette imprécision juridique en fixant, pour définir la notion de salarié expérimenté, un seuil clair : 55 ans, âge à partir duquel le décrochage s’accélère, les embauches chutent, le chômage de longue durée grimpe et les reconversions deviennent exceptionnelles. À 55 ans, il serait possible d’anticiper la suite en formant, en accompagnant ; mais pour cela, la législation doit tracer un périmètre précis. En fixant ce seuil, l’amendement apporterait une sécurité juridique indispensable, évitant les interprétations aléatoires, les contournements, les blocages, les fausses négociations collectives.
    Enfin, cet amendement reflète un objectif clair : un droit du travail qui se concentre sur les publics véritablement fragilisés, et qui ne fait pas fi de la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 15, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Je ne pense pas qu’il soit opportun d’apporter une borne d’âge à la notion de salariés expérimentés comme vous le proposez, et ce pour plusieurs raisons.
    D’abord, les partenaires sociaux ont volontairement privilégié cette notion souple. Il convient de le respecter. Il y a quelques années, j’avais conduit une mission d’information sur la question de l’emploi des seniors ; nous avions alors déjà opté pour la notion de travailleurs expérimentés, préférant un terme générique, conceptuel, qui permettait d’inclure l’ensemble des personnes concernées sans borne d’âge. Je me félicite que cette terminologie soit désormais communément admise et qu’elle figure dans le texte de l’ANI.
    Ensuite, vous l’avez mentionné, la définition du vieillissement varie selon les branches et les secteurs d’activité, allant de cinquante à soixante ans selon les métiers. Dès lors, fixer une borne d’âge me paraît trop restrictif et ne me semble pas conforme à l’évolution de certains métiers.
    Enfin, la transposition de cet accord national interprofessionnel vise précisément à établir un cadre national, souple et général. Il pourra ensuite s’adapter aux spécificités des métiers et des branches. C’est pourquoi la notion de salariés expérimentés me paraît être la plus pertinente pour établir un système protecteur pour ces travailleurs que nous entendons reconnaître et valoriser.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Je pense, très franchement, que l’approche consistant à définir la notion de salariés expérimentés par le seul prisme de l’âge n’est pas pertinente. Il faut lui préférer une approche par métier.
    Je mentionnerai quelques données illustrant les fortes variations d’exposition à l’usure professionnelle en fonction des métiers. Selon une note de France Stratégie, le taux de sorties précoces de l’emploi pour inaptitude professionnelle entre 51 et 59 ans s’élève à plus de 30 % pour un ouvrier non qualifié du bâtiment et de la manutention, à 25 % pour les aides-soignantes, à 5 % pour les employés du secteur de la banque et des assurances. Compte tenu de la forte variabilité selon les métiers, il ne semble pas opportun de fixer une valeur uniforme à l’âge de 55 ans ; il vaut mieux conserver la rédaction actuelle, issue des travaux des partenaires sociaux. Elle emploie le terme de travailleurs expérimentés, définis en fonction d’un seuil différencié selon les branches et les métiers.
    Nous avons choisi de parler de salariés expérimentés plutôt que de travailleurs seniors afin de lutter contre les préjugés à leur endroit, qui sont particulièrement enracinés en France par rapport à d’autres pays. Nous voulons ainsi affirmer que l’expérience a de la valeur. Nous le savons tous ici : en tant que députés, nous faisons mieux notre travail aujourd’hui que lorsque nous avons débuté notre mandat il y a quelques mois ou quelques années. L’expérience a de la valeur : cela compte !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 15.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        50
            Nombre de suffrages exprimés                50
            Majorité absolue                        26
                    Pour l’adoption                21
                    Contre                29

    (L’amendement no 15 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 21, 6, 20, 32 et 105, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 6, 20, 32 et 105 sont identiques.
    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 21.

    M. Nicolas Sansu

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    Cet amendement est très simple. Comme j’ai commencé à l’expliquer durant la discussion générale, il vise à ce que la définition d’un plan d’action type en faveur des travailleurs expérimentés soit rendue obligatoire dans l’accord de branche.
    On nous dit sans cesse que le taux d’emploi des seniors n’est pas bon et qu’il faut faire des efforts. Il nous semble donc intéressant qu’un plan d’action type puisse s’appliquer à toutes les entreprises au niveau de la branche. C’est assez simple à mettre en place au niveau de la branche : les partenaires sociaux se mettront d’accord sur un plan d’action type. Il sera évidemment différent et adapté selon les branches.
    Nous verrons ultérieurement s’il convient de renforcer l’obligation en prévoyant des sanctions à l’encontre des entreprises qui ne la respecteraient pas.
    L’amendement no 20, qui fait partie de la discussion commune, est similaire, mais il ne prévoit pas de supprimer la fin de l’alinéa 8.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 6.

    Mme Océane Godard

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    Cet amendement vise à rendre obligatoire l’établissement d’un plan d’action type sur l’emploi des salariés expérimentés dans le cadre des négociations de branche pour les entreprises de moins de 300 salariés.
    L’ANI précise qu’un plan d’action peut être élaboré pour les entreprises de moins de 300 salariés ; il est donc facultatif. Dans la pratique, la simple faculté d’établir ce plan ne garantit ni sa mise en œuvre systématique ni son efficacité. Cela ne suffit pas à garantir une dynamique collective suffisante pour lutter contre la marginalisation professionnelle des salariés expérimentés.
    Nous voulons rendre ce plan d’action obligatoire pour donner une réalité tangible aux ambitions partagées dans l’ANI.
    Les branches professionnelles ont un rôle déterminant pour entraîner les entreprises, notamment les PME, dans les dynamiques d’actions concrètes et structurées. Un plan d’action type permet d’éviter l’improvisation, de proposer des repères et de mutualiser les bonnes pratiques.
    Ce dispositif a déjà fait ses preuves dans certaines branches. Par exemple, la branche du bâtiment et des travaux publics (BTP) a signé un ANI en 2009, étendu au début de l’année 2010.
    Notre responsabilité collective est de mieux préparer notre économie au vieillissement de la population active.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 20 de Mme Karine Lebon est défendu.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 32.

    M. Louis Boyard

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    Nous sommes très critiques vis-à-vis de cet article 1er.
    D’abord, il n’est pas contraignant ; même si un accord est trouvé, rien n’oblige à le respecter.
    Ensuite, il ne contient pas d’objectifs chiffrés ; nous demandons que ce soit le cas.
    Imaginez que je vous convie à une discussion, que je ne vous présente aucun objectif chiffré, et qu’à la fin, même si vous n’êtes pas d’accord, je puisse décider seul. Vous trouveriez cela juste ? C’est littéralement ce qui est écrit dans cet article 1er : à la fin, en l’absence d’accord, le patronat a le dernier mot.
    Par cet amendement, nous proposons de rendre ce plan d’action à la fois obligatoire et contraignant : en d’autres termes, il faut prévoir des mesures contraignantes pour assurer son application effective, faute de quoi nous légiférons sur du vide.
    Ce sont donc des amendements de bon sens qui visent à rendre ce texte opérationnel ; je suis certain qu’il y aura un consensus au sein de la représentation nationale en ce sens.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 105.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Nous pouvons quasiment tous nous accorder sur un constat : 40 % des personnes qui ne sont pas encore à la retraite ne sont déjà plus en emploi. C’est un problème majeur, aussi bien sur le plan individuel –⁠ pour chacune des personnes concernées – que sur le plan collectif –⁠ pour l’ensemble de la société.
    Face à cette situation, que devons-nous faire ? Faut-il en rester à des mesures incitatives ? Faut-il pousser un peu plus, prévoir des discussions au niveau des branches ou les entreprises, et s’arrêter là ? À l’évidence, il faut aller plus loin, en faisant en sorte de garantir au plus vite l’effectivité et l’efficacité des dispositions proposées.
    Aussi, nous reviendrons à chaque étape de la discussion de ce texte sur ce point fondamental : il faut prévoir des obligations. À l’issue du dialogue social, l’accord national interprofessionnel a proposé un certain nombre de dispositions. Nous, représentation nationale, devons jouer notre rôle. Le rôle de l’État est de garantir l’ordre public social et d’assurer l’effectivité des mesures prévues en ce sens. Il faut donc établir un régime d’obligations pour s’assurer que les dispositions prévues dans cet accord soient réellement mises en œuvre pour tous les salariés. C’est le sens de cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    J’émets un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements, pour plusieurs raisons.
    Vous proposez de rendre obligatoire la définition d’un plan d’action type dans les accords de branche. L’amendement de M. Monnet propose également d’étendre le champ d’application de ce plan à toutes les entreprises, y compris à celles de plus de 300 salariés. Ce faisant, vous vous éloignez profondément de la décision des partenaires sociaux.
    Je rappelle qu’il s’agit d’une obligation nouvelle, proposée par les partenaires sociaux. C’est donc un progrès. Les branches n’étaient en effet plus soumises à aucune obligation légale de négociation sur l’emploi des seniors depuis la suppression du contrat de génération intervenue en 2017. Cela montre donc le chemin parcouru. Depuis 2017, seules deux branches –⁠ celle des sociétés d’assistance et celle des casinos – avaient négocié spécifiquement sur ce thème.
    Dans l’ANI, les partenaires sociaux proposent très concrètement une négociation obligatoire sur l’emploi, le travail et l’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés pour les entreprises de plus de 300 salariés.
    Dans les entreprises de moins de 300 salariés, une négociation volontaire est prévue, de même qu’une faculté pour l’employeur d’appliquer un plan d’action unilatéral.
    Les partenaires sociaux ont également souhaité que l’élaboration d’un plan d’action par branche demeure une faculté, et non une obligation, ce dont je vous demande de prendre acte. Je peux comprendre l’esprit de vos amendements, mais je le redis avec force : le fait qu’il demeure une simple faculté n’est absolument pas contradictoire avec les progrès que les partenaires sociaux eux-mêmes ont proposés pour l’emploi des seniors.
    Je ne peux qu’émettre un avis défavorable en considérant que les contraintes que vous proposez iraient à l’encontre de notre objectif commun d’augmenter le taux d’emploi des seniors en activité, qui progresse déjà depuis dix ans.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Je compléterai simplement les propos du rapporteur en disant que l’établissement d’une telle obligation risque de transformer ce plan d’action en simple formalité. On le voit dans d’autres domaines : le seul fait d’établir un document ne conduit pas toujours à des changements tangibles. Ici, cela ne garantirait pas que les entreprises intègrent ces plans d’action dans une véritable stratégie de développement des compétences et de maintien en emploi des travailleurs expérimentés, dans le cadre d’un dialogue social actif.
    Le texte propose de reprendre au niveau des branches cette question absolument indispensable, saluons déjà cette avancée.
    Saluons aussi le choix fait par les partenaires sociaux de proposer l’élaboration d’un plan d’action type mis à disposition des entreprises de moins de 300 salariés, qui pourront choisir ou non de s’en saisir de manière facultative –⁠ je le répète : faisons confiance aux partenaires sociaux.
    Je suis agréablement surprise de constater que la question du maintien en emploi des travailleurs expérimentés devient de plus en plus prégnante face aux enjeux liés au maintien des compétences et des difficultés de recrutement dans certains métiers. Je préfère donc conserver l’équilibre trouvé entre partenaires sociaux sur cette question.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Ces premiers amendements nous donnent l’occasion d’engager sans attendre le débat sur le rôle de l’Assemblée nationale –⁠ au moins, ce sera fait. Nous ne sommes pas une chambre d’enregistrement.
    Évidemment, je suis tout à fait favorable au dialogue social. Il doit se déployer à tous les niveaux : dans chaque entreprise, au niveau des branches, au niveau interprofessionnel. C’est une excellente chose et nous devrions, en France, faire fleurir cette culture de la négociation. Pour ce faire, il faut tout de même que nous soyons lucides.
    Le rapport de force entre le patronat et les salariés est profondément déséquilibré. C’est la raison pour laquelle le travail a été fortement désavantagé par rapport au capital ces dernières années, et cette tendance n’est pas nouvelle. L’État doit donc assumer un rôle de rééquilibrage. Toutes les grandes avancées sociales dans notre pays ont été rendues possibles grâce à l’intervention de l’État, qui a permis de rétablir l’équilibre en faveur du salariat. Il est évidemment essentiel de partir de la base du dialogue social, mais il faut aussi savoir aller au-delà pour garantir de véritables avancées.
    Nous partageons la volonté d’augmenter le taux d’emploi des seniors et de permettre à chacun d’atteindre la retraite en bonne santé. Pour cela, il faut mettre en place des mesures réellement effectives.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard.

    M. Louis Boyard

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    Madame la ministre, il vous sera difficile de vous cacher derrière les partenaires sociaux durant ce débat. Hier, Matignon a assumé le fait de rejeter une partie de l’accord sur les transitions professionnelles. Vous ne pouvez pas vous cacher derrière les partenaires sociaux aujourd’hui parce que cela vous arrange, alors que vous avez acté votre désaccord la veille.
    Il sera également difficile de faire croire que vous vous rangez du côté des partenaires sociaux alors que vous avez fait la réforme des retraites. C’est un sujet majeur qui plane sur cette discussion, sans laquelle ce texte n’existerait pas.
    Enfin, vous parlez des partenaires sociaux, mais vous oubliez la CGT, qui n’est absolument pas signataire de cet ANI. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Oui, je parle bien de la CGT, qui représente 600 000 adhérents, des travailleuses et des travailleurs qui se battent pour faire avancer leur cause. Il y a plus d’adhérents à la CGT que de macronistes dans ce pays ; je vous prie de les respecter.
    Dans cet article, il n’y a pas d’objectifs chiffrés, pas la moindre obligation d’appliquer l’accord ! L’employeur peut prendre la décision qu’il veut si la négociation ne lui convient pas. Dans ces conditions, vous ne pouvez pas parler d’efficacité.
    Il comporte aussi de grands manques : où est la discussion sur la pénibilité ?
    Vous n’êtes pas crédible, je le redis, quand vous vous cachez derrière les partenaires sociaux. Ne nous dites pas que cet accord fera avancer les choses : c’est de la poudre aux yeux. Ne nous dites pas non plus qu’il est parfait et qu’il ne faut pas l’amender : sur la pénibilité, la représentation nationale est attendue.
    Ce ne sont pas les partenaires sociaux qui font la loi, mais les députés, au nom de l’intérêt général ; c’est bien ce que nous comptons faire ici aujourd’hui.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    J’étais en Allemagne hier pour le sommet social franco-allemand : le taux d’emploi des plus de 60 ans en Allemagne est de 61 %, contre 38 % en France. Ils ont atteint ce chiffre sans ces objectifs chiffrés et ces contraintes que vous demandez.

    M. Patrick Hetzel

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    Exactement !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    C’est donc bien qu’il y a d’autres moyens d’y parvenir, par le dialogue social, en utilisant mieux les outils à la disposition des entreprises, des organisations syndicales et des travailleurs, au niveau des branches ou des entreprises.
    Madame Taillé-Polian, vous parlez de rapport de force déséquilibré. Je souligne que ces négociations, commencées au printemps 2024, ont d’abord échoué. Les partenaires sociaux ont alors décidé de revenir à la table des négociations et ont abouti à un accord. Si la situation avait été aussi déséquilibrée que vous le dites, nous n’aurions jamais eu cet accord sur les seniors !
    Vous défendez maintenant la règle de l’unanimité, monsieur Boyard : ce serait un point nouveau. Mais je redis que l’accord sur les seniors a été signé par des organisations syndicales qui rassemblent 75 % des suffrages. N’écartons pas cela du revers de la main !
    Enfin, je ne crois pas que l’Allemagne ou les pays scandinaves aient la moindre leçon à recevoir de la France en matière de protection sociale.

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Ils réussissent très bien le pari du maintien en emploi des seniors comme de l’insertion professionnelle des jeunes sans les contraintes que vous voulez imposer, en faisant simplement confiance au dialogue social là où il doit s’établir.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Leurs accords, c’est autre chose que les nôtres…

    (L’amendement no 21 n’est pas adopté.)

    (Les amendements identiques nos 6, 20, 32 et 105 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois amendements, nos 30, 31 et 115, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 31 et 115 sont identiques.
    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 30.

    Mme Ségolène Amiot

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    Je soutiendrai également l’amendement no 31.
    L’amendement no 30 tend à abaisser le seuil d’application de l’accord à 50 salariés. Pour répondre par avance au rapporteur, nous proposons un amendement de coordination à l’article 2.
    Un grand nombre de salariés supplémentaires seraient ainsi concernés : nos près de 170 000 PME emploient en effet 4,5 millions de travailleurs et de travailleuses.
    Vous me direz aussi sans doute que seules 83,9 % des entreprises de plus de 50 salariés disposent d’une instance élue, à même de prendre part à cette négociation. C’est pourquoi l’amendement no 31 est un amendement de repli qui vise à fixer le seuil à partir duquel les entreprises devront ouvrir cette négociation à 250 salariés. De cette façon, toutes les entreprises concernées disposeront d’une instance représentative pour négocier.
    De plus, le seuil de 250 salariés est celui retenu par l’Union européenne, ainsi que par le décret de 2008 relatifs aux critères de classement des entreprises, pour définir les PME. Cet amendement est ainsi un amendement de cohérence, et donc de simplification.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 115.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Cet amendement s’attaque à l’une des grandes inégalités du droit social de notre pays, celle qui sépare les salariés des grandes entreprises de ceux des petites et moyennes entreprises.
    On comprend bien pourquoi les obligations des unes et des autres ne sont pas les mêmes : elles n’ont pas les mêmes moyens, les mêmes ressources. Cette réalité impose d’organiser le dialogue social différemment.
    Mais c’est bien là que l’État devrait intervenir : il devrait faire en sorte que les droits soient équivalents pour tous les salariés, quelle que soit la taille de leur entreprise.
    Je note que cette inégalité entre salariés reflète l’inégalité fiscale qui sépare les grandes entreprises des petites et moyennes, les premières étant beaucoup plus aidées que les secondes. Nous devrions donc changer de paradigme. Commençons par mieux protéger les salariés des petites et moyennes entreprises.

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 31 et identique, nos 33 et identique, nos 36, 34 et 35, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Avis défavorable. Je vous l’ai dit en commission, ces amendements ne produiraient pas les effets que vous en attendez : l’exposé sommaire indique que vous souhaitez étendre l’obligation de négociation dans l’entreprise ; ils devraient donc être déposés à l’article 2.
    En outre, vos amendements restreignent la possibilité d’utiliser le plan d’action aux seules entreprises de moins de 50 ou de 250 salariés, selon les amendements. Vous empêcheriez ainsi certaines entreprises, celles entre 50 –⁠ ou 250 – et 300 salariés, d’aller de l’avant et de signer un accord relatif aux travailleurs expérimentés. Là encore, cela me paraît contraire à l’esprit que vous recherchez.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Avis défavorable.
    Sur les seuils, madame Amiot, vous soulignez à juste titre qu’il existe une discordance notamment entre le droit européen et le nôtre. Vous serez saisis sous peu de la transposition de la directive relative à la transparence des rémunérations, sur laquelle nous travaillons déjà avec les partenaires sociaux. Le seuil sera en effet fixé à 250 salariés, limite retenue par l’Union pour les grandes entreprises. Il faudra donc un jour toiletter nos différents seuils.
    Nous avons retenu ici le seuil de 300 salariés parce que c’est celui qui s’impose pour la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) ; les entreprises concernées disposent donc d’outils de gestion des compétences. Je préfère en rester là.
    Quant au déséquilibre entre les entreprises, je rappelle qu’il existe des accords de branche, qui s’imposent à toutes les entreprises de la branche via le principe d’extension, en cas d’accord contraire dans l’entreprise.
    Nous discutons d’accords nationaux interprofessionnels, mais c’est aussi la vitalité des accords de branche qui se joue : c’est la bonne échelle pour parler de la réalité des métiers –⁠ dont je parlais tout à l’heure, par opposition à l’idée d’imposer une règle uniforme, comme le proposait M. Weber – et du tissu d’entreprises.

    (L’amendement no 30 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 et 115.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        56
            Nombre de suffrages exprimés                56
            Majorité absolue                        29
                    Pour l’adoption                13
                    Contre                43

    (Les amendements identiques nos 31 et 115 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 33 et 119.
    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 33.

    M. Louis Boyard

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    Le modèle allemand, avec plus d’un million de personnes de plus de 67 ans qui continuent de travailler, ne nous fait pas rêver, madame la ministre, et j’espère que vous non plus ! Quand on parle aux gens du travail des seniors en Allemagne, ils pensent d’abord à la pauvreté des seniors. Faut-il rappeler que ce pays a instauré le système des « minijobs » dans lequel, pour gagner quelque 500 euros par mois, les retraités doivent travailler 43 heures durant cette période ? C’est un système de précarité des seniors qui a été organisé.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Organisé par la gauche !

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    C’est votre style de gauche, pas le nôtre…

    M. Louis Boyard

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    Je le redis, cela ne nous fait pas rêver. Nous préférerions la retraite à 60 ans. C’est cette proposition-là qui est arrivée en tête lors des dernières élections, d’ailleurs.
    On ne peut pas faire croire, j’y insiste, que cet article 1er va changer quoi que ce soit. La question du travail des seniors ne se résume pas à un ensemble de petits cas individuels : c’est une discrimination systémique, c’est-à-dire à l’échelle de la société. Si vous refusez d’imposer des contraintes, vous n’obtiendrez pas d’avancées.
    Or nous n’avons pas de réponse sur ce point : il n’y a ici ni obligations ni contraintes. L’employeur peut décider unilatéralement de ce que devient la négociation. Voilà pourquoi nous proposons des contraintes, des objectifs chiffrés contraignants. Sinon, on parle dans le vide !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 119 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Avis défavorable. Vous souhaitez imposer des objectifs chiffrés de progression de la part de seniors en emploi dans l’entreprise, à hauteur de 5 % par an jusqu’à atteindre 15 % de seniors en emploi. L’intention est louable, mais ce n’est pas du tout l’esprit de cet accord national interprofessionnel. Les partenaires sociaux qui l’ont négocié n’ont pas voulu imposer de cadre national fixe et uniforme, mais au contraire laisser de la souplesse aux branches afin d’aboutir à des objectifs spécifiques selon les métiers et les contraintes spécifiques de chacune.
    S’agissant en outre de plans facultatifs, vos amendements pourraient au contraire inciter à ne pas signer d’accord, donc être contre-productifs.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Vous avez raison d’aborder la question des discriminations. L’âge, la Défenseure des droits l’a dit en décembre dernier, est le premier motif de discrimination sur le marché du travail en France. Quand vous avez plus de 55 ans, vous avez trois fois moins de chances d’être invité à un entretien de recrutement que quand vous en avez moins de 50. Viennent ensuite s’ajouter à cela d’autres discriminations que nous connaissons trop bien, liées au genre, à la domiciliation, ou aux origines réelles ou supposées. C’est un véritable problème.
    Cela dit, fixer un objectif chiffré en mode Gosplan ne me semble ni efficace, ni pertinent, ni opérationnel. Il faut également tenir compte de la réalité des territoires et de la pyramide des âges des entreprises, qui varie en fonction de leurs besoins de recrutement et selon les métiers. Plutôt que de fixer à Paris un objectif chiffré au niveau national, qui s’imposerait aux centaines de milliers d’entreprises de notre pays, faisons confiance au dialogue social, en particulier au dialogue de branche, qui, du fait de l’extension, s’impose à toutes les entreprises. Je le répète, la réalité des secteurs et des métiers, qui a des effets considérables sur les questions dont nous parlons, n’est pas suffisamment prise en compte dans le débat public. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    J’aimerais pouvoir faire confiance aux entreprises, mais nous avons déjà essayé. Le droit leur impose d’assurer l’égalité salariale entre les hommes et les femmes. C’est une obligation, contrairement à ce que prévoit ce texte, et il y a un objectif chiffré –⁠ on doit viser l’égalité. Malgré cela, au rythme où nous allons –⁠ parce que nous faisons confiance aux entreprises pour y arriver –, il faudra quatre cents ans pour atteindre l’égalité réelle entre les hommes et les femmes en France. Plutôt que de fixer un horizon de quatre cents ans –⁠ voire de huit cents ans, s’il n’y a aucune obligation à respecter le texte, à conduire des négociations et à conclure un accord pour faire cesser les discriminations à l’égard des personnes les plus expérimentées en emploi –, nous avons le droit d’être plus ambitieux.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 33 et 119.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        59
            Nombre de suffrages exprimés                59
            Majorité absolue                        30
                    Pour l’adoption                14
                    Contre                45

    (Les amendements identiques nos 33 et 119 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bérenger Cernon, pour soutenir l’amendement no 36.

    M. Bérenger Cernon

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    Madame la ministre, depuis le début de l’examen du texte, vous parlez beaucoup de la responsabilité des organisations syndicales, mais qu’en est-il de celle des entreprises ? Par cet amendement, nous proposons d’instaurer un droit de veto pour les représentants des salariés, qu’il s’agisse des organisations syndicales représentatives ou du comité social et économique. Ce veto est essentiel pour garantir que la négociation sur l’emploi des seniors ne soit pas un simulacre.
    Le texte prévoit que faute d’accord, l’employeur peut imposer unilatéralement sa version après une simple consultation du CSE, ce qui constitue une négation du dialogue social. Nous refusons cette logique de verticalité et ce mépris envers les représentants des salariés –⁠ le CSE n’est pas une simple chambre d’enregistrement.
    Les chiffres sont parlants : 98 % des entreprises ne procèdent pas à des aménagements du temps de travail pour leurs salariés seniors et 89 % d’entre elles ne modifient pas l’organisation du travail pour les maintenir en emploi. Ainsi, les seniors sont discriminés à l’embauche, au travail et dans leur fin de carrière.
    Oui, il faut contraindre les entreprises à conclure un accord majoritaire. C’est le seul moyen de garantir que la négociation produise des effets réels. Le droit de veto permettrait d’empêcher les employeurs d’imposer unilatéralement leur version, de garantir une réelle négociation et de nous assurer que des mesures concrètes de lutte contre les discriminations liées à l’âge figurent dans les accords. Il y va du respect des salariés expérimentés, de leurs représentants et de leurs droits sociaux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    C’est un amendement assez radical, si vous me permettez. Vous supprimez la possibilité pour l’employeur d’appliquer, à défaut d’accord collectif, le plan d’action défini au niveau de la branche. Votre amendement méconnaît complètement la portée de la disposition prévue par l’accord national interprofessionnel. Le risque n’est pas tant que l’employeur « décide unilatéralement de la politique d’emploi des seniors », comme vous le soulignez, mais plutôt qu’en l’absence d’accord, il ne s’intéresse pas à la question et ne mette en place aucune action.
    À défaut d’un accord négocié au niveau de l’entreprise, la mise en œuvre d’un plan d’action demeure une avancée positive pour engager des actions en faveur de l’emploi des travailleurs expérimentés dans l’entreprise. Il y a lieu de s’en réjouir, plutôt que de considérer que les employeurs se détourneront du dispositif et ne l’appliqueront pas.
    Par ailleurs, contrairement à ce que vous avez dit, il ne s’agit pas d’une décision isolée de l’employeur : d’une part, le plan d’action est défini au niveau de la branche –⁠ il y a une négociation en amont entre les partenaires sociaux ;…

    Mme Ségolène Amiot

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    Non !

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    …d’autre part, le comité social et économique et les salariés sont informés. Ainsi, il ne s’agit pas d’un pouvoir unilatéral de l’employeur. Il y a une concertation, sur une base de discussion très large, et ces dispositions sont plutôt incitatives. Avis défavorable.

    Mme Ségolène Amiot

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    Ils sont informés, ce n’est pas une négociation !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    L’enfer est souvent pavé de bonnes intentions. Vous proposez, monsieur le député, de supprimer la possibilité pour l’employeur, en cas d’échec des négociations relatives à l’emploi des salariés expérimentés, de mettre en œuvre par une décision unilatérale le plan d’action type défini par la branche. Rappelons que les accords nationaux interprofessionnels signés par les partenaires sociaux prévoient de définir au niveau de la branche un plan d’action type, applicable par l’employeur au moyen d’une déclaration unilatérale en cas d’échec des négociations –⁠ il en a été question lors de la discussion des amendements précédents. Si les négociations échouent, le plan d’action type s’impose. La branche, par sa capacité d’extension et par sa proximité avec les métiers et la typologie des entreprises, est vraiment le bon niveau. La solution que vous proposez n’est pas suffisamment opérationnelle. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Monsieur le rapporteur, selon vous, vouloir donner un droit de veto aux salariés traduit une vision radicale du dialogue social. Nous ne faisons qu’appliquer la vision du dialogue social du gouvernement, qui a donné un droit de veto au patronat dans le fameux conclave sur les retraites.

    Mme Ségolène Amiot

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    Eh oui ! Faites ce que je dis, pas ce que je fais !

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    En l’absence d’accord, la réforme inique des retraites est maintenue.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Non !

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    C’est ce qu’a dit le premier ministre : s’il n’y a pas d’accord, la situation restera inchangée. Face, les patrons gagnent, pile, les salariés perdent. C’est une conception bizarre du dialogue social –⁠ vous en parlez sans cesse, mais dans votre façon de faire, il est quelque peu biaisé.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bérenger Cernon.

    M. Bérenger Cernon

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    La hiérarchie des normes est quelque chose d’important dans le monde de l’entreprise –⁠ les salariés et les organisations syndicales y sont très attachés. Cela signifie qu’il y a un accord de branche et qu’ensuite, il peut y avoir un accord d’entreprise qui doit être mieux-disant. À quel moment, dans votre texte, l’entreprise sera-t-elle contrainte de conclure un accord mieux-disant que l’accord de branche ? À aucun moment, vous n’imposez réellement des négociations.
    Vous savez pertinemment comment le monde de l’entreprise fonctionne : il existe un lien de subordination entre la direction de l’entreprise et les salariés. Si l’on n’instaure pas un droit de veto, si les accords n’ont pas besoin d’être majoritaires pour s’appliquer, un accord ne sera jamais recherché –⁠ je n’ai jamais vu un patron décider en se levant le matin qu’il va proposer à ses salariés les 32 heures plutôt que les 35 heures !

    M. Emeric Salmon

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    Non, mais les patrons doivent s’occuper de la santé de leurs salariés !

    M. Bérenger Cernon

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    De tels changements ont toujours été imposés soit par la loi, soit par un rapport de force. Pour imposer un rapport de force dans le monde de l’entreprise, il n’y a pas trente-six solutions : soit ce sont les salariés qui se mettent en grève et imposent un accord, soit c’est la loi qui le fait. Soyons un peu responsables et faisons en sorte que ces accords soient mieux-disants. Nous parlons du travail des seniors. Quand on voit le taux de chômage aujourd’hui, on peut se poser la question des efforts qui ont été faits, notamment par la loi.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 36.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        65
            Nombre de suffrages exprimés                65
            Majorité absolue                        33
                    Pour l’adoption                14
                    Contre                51

    (L’amendement no 36 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements, nos 34, 117, 35 et 78, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 34.

    Mme Ségolène Amiot

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    Si vous m’y autorisez, je défendrai également l’amendement no 35.

    Mme la présidente

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    Je vous en prie.

    Mme Ségolène Amiot

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    Ces amendements visent à définir des sanctions à l’encontre des entreprises qui n’arriveraient pas à un accord ou qui ne le respecteraient pas. L’amendement no 34 prévoit que le montant de la pénalité ne puisse être inférieur à 1 % du chiffre d’affaires. L’amendement no 35, qui est un amendement de repli, plafonne ce montant à 1 % des rémunérations et des gains.
    Dans ce projet de loi, vous avez prévu la carotte –⁠ des cadeaux sociaux aux entreprises, pris sur le dos de la sécurité sociale, puisqu’ils ne sont pas compensés, –, mais pas le bâton. Les obligations existantes, notamment en matière d’égalité salariale entre les hommes et les femmes, s’accompagnent d’une carotte et théoriquement d’un bâton, qui ne s’applique jamais. On le voit, s’il n’y a pas un minimum de sanctions, cela ne sert rien, ou bien cela crée un effet d’aubaine, ce qui, nous le verrons, peut entraîner encore plus de discriminations. Afin de garantir au texte un minimum d’efficacité, nous proposons de sanctionner les entreprises qui ne respecteraient pas l’accord –⁠ quand bien même il s’agirait d’un accord de branche.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 117.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Nous souhaitons que les entreprises qui ne mettent pas en œuvre une politique volontariste s’exposent à un risque. Nous le savons, les entreprises ne sont pas là pour des raisons philanthropiques ni pour servir l’intérêt général. Leur raison d’être est de rapporter des bénéfices aux détenteurs du capital. C’est ce qu’elles font, c’est logique. Prenons-en acte et donnons-leur un intérêt à agir, celui d’éviter la sanction. Sinon, nous le savons, le dispositif restera inopérant.
    Une sanction a été décidée contre notre gré –⁠ contre celui du peuple tout entier : deux ans de plus pour tous les travailleurs et les travailleuses. Faisons savoir aux entreprises que si elles ne sont pas de bonne volonté, derrière, il y aura également une sanction.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 35 de M. Louis Boyard est défendu.
    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 78.

    M. Nicolas Sansu

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    Comme disait l’autre, « la confiance n’exclut pas le contrôle ». Nous devons mettre les moyens pour que les accords nationaux interprofessionnels s’appliquent vraiment au sein des entreprises –⁠ sinon, on ne brandit qu’un pistolet à eau ! À un moment, il faut savoir ce que nous voulons. Rappelons que ces discussions font suite à la réforme la plus inique qui ait jamais eu lieu : on a volé deux ans de retraite –⁠ les deux meilleures années –, à tous les salariés, à tous les travailleurs et travailleuses. Voulons-nous vraiment garantir l’application de dispositifs permettant aux seniors de rester dans l’emploi et de ne pas être fracassés par leur travail ?

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Oh, arrêtez, monsieur Sansu !

    M. Nicolas Sansu

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    Ayant longtemps été maire de Vierzon, j’ai souvent eu l’occasion d’échanger avec des dames qui, arrivées à 60 ans, n’en peuvent déjà plus parce qu’elles ont exercé toute leur vie un métier pénible –⁠ je pense par exemple aux aides à domicile. Vous leur avez collé deux ans de plus, contre l’avis du peuple et des organisations syndicales. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Si ce n’est pas une sanction !

    M. Nicolas Sansu

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    Je souhaite donc qu’il puisse y avoir un contrôle et des sanctions en cas de non-respect de l’accord. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Selon vous, cher collègue, « la confiance n’exclut pas le contrôle » ; mais là, vous êtes dans la défiance.

    M. Nicolas Sansu

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    Absolument pas !

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Vous avez employé tous les trois le mot « sanction ».

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est ce qu’on appelle une sanction !

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Ce n’est pas du tout l’esprit des négociateurs, qui veulent aller de l’avant. Par vos amendements, vous créez une pénalité financière à la charge de l’employeur en l’absence d’un accord ou de plan d’action, ou en cas de non-respect de l’accord. Vous présumez qu’il n’y aura pas d’accord et qu’il faut prévoir par anticipation une sanction.
    Pour ma part, je respecte ce que les partenaires sociaux ont décidé. Ils se sont entendus sur une obligation de négociation dans les entreprises de plus de 300 salariés. Vos amendements, en transformant l’obligation de négocier en obligation de conclure un accord sous peine de sanction, en changent la philosophie. Les partenaires sociaux croient au dialogue et en la capacité de converger vers des solutions. En plaçant la négociation sous contrainte, une telle sanction serait susceptible d’affaiblir la qualité du dialogue social.
    Laissons aux employeurs le bénéfice du doute : attendons de voir comment les accords seront déclinés. Dans deux ou trois ans, nous aurons de la visibilité sur la proportion d’entreprises qui n’auraient pas respecté l’obligation légale. Ces dispositions sont totalement contraires à la philosophie de l’accord et cela me paraît précipité. J’émets donc un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard.

    M. Louis Boyard

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    On tourne en rond, alors que la question de l’emploi des seniors est sérieuse ! Dès qu’on entend parler du fond de l’affaire, vous nous opposez que les partenaires sociaux s’étant accordés, on ne touchera à rien !
    Permettez-moi toutefois de vous donner des exemples de discussions qui sont censées avoir lieu et aboutir à des avancées, mais qui ne sont jamais organisées. Une négociation annuelle sur les salaires doit avoir lieu dans les entreprises : selon vous, est-ce que tout va bien de ce côté-là ? Une autre négociation doit porter sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde du travail : a-t-elle permis d’aboutir à une situation satisfaisante ? Les partenaires sociaux sont aussi censés aborder la situation des travailleurs en situation de handicap : leurs discussions ont-elles abouti à des avancées notables pour les personnes en situation de handicap ?
    Hypocrites, voilà ce que sont vos discussions ! Nous défendons des amendements tendant à pénaliser à hauteur de 1 % des dividendes les entreprises qui ne respectent pas l’accord sur l’emploi des seniors, ce qui semble être une mesure de base pour que la loi soit respectée.
    Enfin, j’observe que dans cet hémicycle, quand il s’agit de taper sur des allocataires du RSA ou des demandeurs d’emploi, la main qui s’abat sur eux pour leur imposer des contraintes ou les menacer de poursuites pour récupérer le moindre euro n’est jamais trop lourde. En revanche, dès qu’il s’agit de rendre opérante une mesure favorisant l’emploi des seniors, vous avez la main qui tremble.
    Cette différence trahit votre vision de classe et le camp que vous avez choisi. M. le rapporteur jugeait qu’accorder un droit de veto aux salariés serait radical, mais il ne voit pas d’inconvénient à en donner un à l’employeur : il a choisi la classe aux côtés de laquelle il se range !

    Mme Ségolène Amiot

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    À l’évidence !

    M. Louis Boyard

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    Sans contrainte, les seniors ne peuvent pas se défendre face aux discriminations qu’ils subissent sur le marché de l’emploi. Ces discriminations, vous en êtes responsables : la réforme des retraites a contribué à la situation que nous dénonçons. Vous ne pouvez pas vous cacher derrière les partenaires sociaux pour réfuter ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Nicolas Sansu

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    Exactement !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 34.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        63
            Nombre de suffrages exprimés                63
            Majorité absolue                        32
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                47

    (L’amendement no 34 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 117 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 35.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        65
            Nombre de suffrages exprimés                65
            Majorité absolue                        33
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                49

    (L’amendement no 35 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 78 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements identiques nos 22, 38 et 118, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 22.

    M. Nicolas Sansu

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    Il tend à imposer aux employeurs une obligation de résultat –⁠ l’obligation de conclure un accord – au lieu d’une simple obligation de moyens –⁠ l’obligation de négocier, comme le prévoit actuellement le projet de loi.
    L’amendement que défendait notre groupe au Sénat tendait d’ailleurs à corriger ce qui constitue à nos yeux une véritable incongruité.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 38.

    M. Louis Boyard

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    Une fois de plus, on touche au fond de l’affaire ! Le taux de chômage des seniors atteint un niveau très élevé et vous êtes en partie responsables de la situation, vous qui avez soutenu cette idiotie qu’est la dernière réforme des retraites : alors qu’on compte actuellement 6 millions de demandeurs d’emploi pour 500 000 à 700 000 emplois disponibles seulement –⁠ cherchez l’erreur –, vous demandez aux travailleurs de rester deux ans de plus à leur poste. Cela n’a pas de sens et nous défendons plutôt un plus grand partage du temps de travail.
    En attendant l’abrogation de la réforme et l’abaissement à 60 ans de l’âge de départ en retraite, il faut obliger les employeurs à conclure un accord ! Autrement, les négociations sur l’emploi des seniors ne seront pas opérantes et seront abandonnées, comme d’autres avant elles l’ont été. Je vous ai donné l’exemple des négociations annuelles sur les salaires : qui peut prétendre qu’elles ont permis des avancées ? Il en va de même de celles portant sur l’égalité entre les femmes et les hommes ou les travailleurs en situation de handicap.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce n’est plus le dialogue social, c’est le dialogue coercitif !

    M. Louis Boyard

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    Nous disposons des éléments nous permettant d’affirmer que les discussions portant sur l’emploi des seniors –⁠ qui donne lieu à une discrimination systémique – ne mèneront à rien.
    J’ai d’ailleurs le sentiment que notre débat ne sert pas à grand-chose.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce sont vos amendements qui ne servent pas à grand-chose !

    M. Louis Boyard

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    M. Barnier, dans sa déclaration de politique générale, avait annoncé le dialogue des partenaires sociaux. Ceux-ci ont trouvé un accord, que vous considérez comme une pommade passée sur la réforme des retraites, mais qui, en réalité, ne règle pas le problème.
    Vous ne voulez pas régler le problème, parce que vous ne savez pas le régler. Par conséquent, vous vous cachez derrière l’ANI et la décision des partenaires sociaux, mais cette décision est la conséquence nécessaire de la réforme des retraites, qui a été d’une rare violence contre les partenaires sociaux.
    Rien dans votre méthode et dans vos propositions n’est opérant, mais demander que les négociations se concluent par un accord me paraît être le minimum syndical –⁠ c’est le cas de le dire !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 118 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Il est défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Ce qui me dérange, dans les arguments développés par les collègues de gauche, c’est qu’ils dénotent un syndicalisme à géométrie variable.

    M. Patrick Hetzel

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    Exactement !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il y a deux ans, vous manifestiez dans la rue de façon très déterminée et vous mettiez en avant le fait que vous étiez soutenus par les syndicats, qui tenaient un discours semblable au vôtre. Ce discours était aussi celui de l’extrême droite, car vos positions étaient toutes alignées et vous avez voté ensemble les motions de censure déposées à l’époque, je me permets de le rappeler.

    M. Emeric Salmon

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    N’importe quoi !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Alors que vous mettiez en avant votre proximité avec les syndicats, vous semblez maintenant gênés face à un accord issu d’une discussion syndicale.

    M. Nicolas Sansu

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    Non !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Si ! Vous combattez ce texte alors qu’il émane d’un accord entre partenaires sociaux.

    M. Nicolas Sansu

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    Pas tous !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il est selon moi quelque peu dérangeant de voir la gauche combattre ce projet de loi qui ne traduit pas seulement la volonté du gouvernement, mais transpose un accord syndical très large. (Mme Françoise Buffet applaudit.)

    Mme Ségolène Amiot

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    Êtes-vous législateur ou anti-grévistes ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Nous ne combattons pas du tout ce texte, nous voulons seulement renforcer son caractère effectif et, à cet égard, nous sommes dans notre rôle.
    Les partenaires sociaux, dont les organisations syndicales –⁠ y compris les signataires de l’accord – ont accepté de dialoguer par conscience de l’urgence absolue qu’il y a à améliorer, même de manière très modeste et limitée, la situation des travailleurs. Celle-ci est dramatique : les salariés sont sous-payés, leurs conditions de travail sont très mauvaises et mettent en jeu leur santé.
    Les partenaires sociaux ont donc saisi la possibilité d’améliorer le moindre aspect de la vie des travailleurs, mais est-ce notre rôle de nous contenter de leurs travaux, dont l’effet sera très limité, alors même que nous constatons que les seniors font l’objet d’une discrimination très importante et que le fait pour certains d’entre eux de n’être ni en emploi ni au chômage les plonge dans une situation de grande précarité ?
    Nous prenons acte de l’accord national interprofessionnel et nous ne combattons pas le projet de loi qui en découle : nous voulons l’améliorer, ce qui est très différent.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 22, 38 et 118.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                55
            Majorité absolue                        28
                    Pour l’adoption                15
                    Contre                40

    (Les amendements identiques nos 22, 38 et 118 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 39 et 110.
    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 39.

    Mme Ségolène Amiot

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    Il tend à étendre le domaine des négociations prévues à l’article 1er à la santé et à la prévention des risques professionnels. La réforme des retraites, qui impose de travailler jusqu’à 64 ans au moins, a fragilisé les seniors. Or l’usure professionnelle est une question qui n’est plus abordée.
    Aujourd’hui, un salarié de plus de 55 ans sur cinq n’est ni en emploi ni en retraite. Dans certains cas, c’est la santé de ces actifs qui ne leur permet pas de retrouver un emploi dans leur métier, sinon au prix de nombreuses adaptations que peu d’employeurs acceptent de réaliser.
    Repousser l’âge de départ en retraite jusqu’à 64 ans revenait aussi à nier l’impossibilité de se maintenir en activité jusqu’à cet âge dans certaines branches. Les représentants de l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), que j’ai auditionnés, ont indiqué que dans leur secteur, l’âge moyen des travailleurs déclarés inaptes était de 54 ans.
    Il faudra que vous nous expliquiez comment pousser les travailleurs à partir en retraite après 64 ans s’ils sont déclarés inaptes dix ans plus tôt. Dans la branche du BTP, la réforme a eu pour effet immédiat une augmentation, décidée unilatéralement, de 9 % du montant de la cotisation aux régimes de prévoyance et de frais de santé. En effet, du fait de la réforme, certains travailleurs vont rester sans emploi pendant dix ans, ce que les défenseurs de la réforme n’avaient pas prévu.
    Pour pallier ces défauts, nous vous proposons de placer les enjeux de prévoyance, de santé, de prévention et de sécurité des travailleurs au cœur de la négociation prévue à l’article 1er. Nous souhaitons que la négociation porte obligatoirement sur ces questions.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 110 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Les partenaires sociaux ont souhaité que la santé au travail et la prévention des risques professionnels constituent un thème facultatif de la négociation sur l’emploi des seniors, parce qu’elles constituent un thème obligatoirement abordé dans le cadre des négociations de la GPEC, conformément à l’article L. 2241-1 du code du travail.
    Pour cette raison, mon avis est défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Il est également défavorable.
    D’abord, ces thèmes sont déjà abordés dans d’autres négociations, comme vient de le rappeler M. le rapporteur. Ensuite, l’accord que le projet de loi transpose comprend différentes briques.
    Au niveau de la branche et dans les entreprises de plus de 300 salariés, l’accord prévoit une discussion sur l’emploi et le maintien dans l’emploi des seniors. En outre, il prévoit que tout salarié de plus de 45 ans doit être convoqué à un entretien devant permettre de discuter de ses compétences et de sa santé. Cet entretien est très important, car il permettra d’envisager des aménagements de poste ou des reconversions.
    L’accord transition-reconversion, que nous allons aborder à l’occasion de l’examen d’autres articles, tend, grâce à un entretien réalisé à 45 ans et à divers outils, à faciliter très tôt les reconversions ou les aménagements de poste, c’est-à-dire à limiter l’exposition déraisonnable à des facteurs de pénibilité, particulièrement présents dans les métiers du BTP, que vous avez évoqués, ou du soin.
    Ce n’est peut-être pas le grand soir auquel vous appelez,…

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est clair !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    …mais au moins, nous avons des mesures efficaces. Pour ma part, au grand soir, je préfère les petits matins qui changent la vie des gens.
    Depuis que je suis ministre, des discussions très poussées avec les branches ont été engagées. J’ai rencontré les représentants du BTP il y a deux semaines, si bien que j’avais moi aussi en tête l’âge moyen des salariés présentant une inaptitude professionnelle –⁠ 54 ans. Je veux travailler avec cette branche, ainsi qu’avec celle de l’intérim, dont les salariés sont particulièrement exposés au risque d’accident du travail, sur la manière dont elles peuvent avancer et dont nous pouvons accentuer la pression mise sur les employeurs afin de trouver des solutions.
    Le seuil de 45 ans, la visite médicale, la négociation obligatoire au niveau des branches et des entreprises, sans oublier les outils de reconversion interne et externe, très utiles et dont nous parlerons très rapidement, peuvent changer la vie des travailleurs de notre pays.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gaëtan Dussausaye.

    M. Gaëtan Dussausaye

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    Le groupe Rassemblement national votera ces amendements parce que la question de la santé est, elle aussi, une question centrale pour l’employabilité des travailleurs expérimentés. On a rappelé à juste titre que parmi les Français âgés de plus de 50 ans qui sont au chômage, 10 % le sont pour des raisons de santé. C’est donc évidemment une question qu’il faut aborder dès que nous en avons l’occasion.
    Pour revenir sur les discussions relatives aux précédents amendements, je ne suis pas très étonné, cher collègue Sitzenstuhl, que La France insoumise ne soit, une fois de plus, guère à l’écoute de ce que disent les syndicats dans notre pays. Lors des débats sur la réforme des retraites, on se souvient tous ici que contrairement à ce qui était demandé par les syndicats et contrairement à ces centaines de milliers voire à ces millions de Français qui étaient mobilisés dans la rue, les députés de La France insoumise ont joué la carte de l’obstruction parlementaire en déposant plus de 20 000 amendements pour empêcher un vote sur l’article 7, le fameux article qui allait augmenter l’âge légal de départ à la retraite de deux ans. Je ne suis donc vraiment pas étonné qu’ils ne soient pas des plus attentifs à ce que disent les syndicats alors que nous, au contraire, nous serons toujours très disponibles…

    Mme Ségolène Amiot

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    Déposez des amendements sur ce texte alors !

    M. Gaëtan Dussausaye

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    …pour faire remonter ce qui est demandé sur le terrain, où l’on a toujours de meilleures idées que ce qui est décidé par certaines élites très déconnectées. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Mme Mathilde Feld s’esclaffe.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard.

    Mme Océane Godard

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    S’agissant des amendements précédents et des échanges qui se sont ensuivis, j’entends les frustrations qui s’expriment et j’en partage certaines. Elles témoignent de l’envie d’aller plus loin, que je partage bien sûr, notamment s’agissant des organisations du travail, parce qu’on ne peut pas se contenter d’avoir une vision palliative de ces questions, d’être seulement sur la défensive quand on parle de l’emploi des seniors. Je note d’ailleurs que cet article mentionne « leur maintien dans l’emploi », mais on a bien conscience qu’il faut traiter aussi des organisations et des conditions de travail, et savoir comment on accompagne alors les entreprises sur ces questions. Car c’est bien beau d’être dans la contrainte permanente, qu’elle s’exerce sur les demandeurs d’emploi, les salariés ou les entreprises, mais qu’est-ce qu’on fait pour apporter des solutions qui concilient leurs enjeux respectifs ? Je crois qu’il faut considérer ce projet de loi comme une première étape. En tout cas, c’est avec cet état d’esprit que le groupe Socialistes et apparentés aborde ce texte. Nous nous abstiendrons sur les amendements nos 39 et 110.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 39 et 110.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        60
            Nombre de suffrages exprimés                52
            Majorité absolue                        27
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                23

    (Les amendements identiques nos 39 et 110 sont adoptés ; en conséquence, l’amendement no 100 tombe.)
    (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 14 de M. Charles Sitzenstuhl est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Avis défavorable, parce que votre amendement ne concerne pas l’emploi des seniors,…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Certes.

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    …mais plutôt les conditions de départ à la retraite, lesquelles ont plutôt vocation à être évoquées dans le cadre des négociations sur l’aménagement de fin de carrière, ce que prévoit au demeurant l’ANI.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Il est très dommage que le collègue Sitzenstuhl ne développe pas la défense de son amendement. Je ne sais pas s’il l’a directement envoyé aux fonds de pension qui sont très demandeurs de sa proposition,…

    Mme Lise Magnier

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    Oh !

    M. Hadrien Clouet

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    …mais tout le monde en dehors de l’hémicycle doit comprendre de quoi il s’agit, en l’occurrence de promouvoir les retraites par capitalisation. Cet amendement provient d’un collègue qui, il y a quelques instants, versait des larmes de crocodile sur la démocratie sociale, disant qu’il faut faire tout ce que demandent les syndicats, juste avant de nous soumettre une proposition qu’aucun d’entre eux ne demande. Vos leçons de démocratie sociale, collègue, vous pouvez vous les mettre de côté !
    Le but de l’amendement, c’est évidemment de rattraper le conclave raté sur les retraites. Il a duré presque six mois, et l’une des grandes missions que s’était données M. Bayrou, c’était de promouvoir la capitalisation –⁠ dont personne ne veut, évidemment, car les gens voient bien ce qui se passe dans les pays où cela se fait déjà. Les États-Unis, du fait des réformes douanières de M. Trump, ont ainsi vu disparaître 6 000 milliards de capitalisation boursière dans des domaines où étaient investis les fonds d’épargne retraite. Je dis bien 6 000 milliards. Cela rappelle évidemment la crise des subprimes, lors de laquelle ces fonds avaient perdu 20 % de leur valeur. Avec vous, la même situation pourrait se produire demain en France. Si vous lisez The Guardian, vous y trouverez les témoignages de retraités britanniques qui disent : « J’avais 150 000 livres de côté, et depuis la réforme de M. Trump et la panique boursière qui s’ensuit, je dois retourner travailler dans le supermarché du coin comme caissier pour tenir. »
    Il y aura toujours des Sitzenstuhl pour dire : « Mais sur le long terme, cela s’équilibre. » Peut-être, mais à long terme, nous serons tous morts ! Allez demander au retraité d’attendre dix ans, le temps que le marché financier revienne éventuellement à l’équilibre ! Comment fera-t-il en attendant ? Devra-t-il se contenter d’un repas sur deux et retourner au travail chaque soir pour tenter de compenser la perte subie ?
    On voit très bien quelle est la manœuvre derrière cet amendement et il ne faut pas s’étonner que vous ne l’ayez pas clairement défendu.

    Mme la présidente

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    Veuillez conclure.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce type d’amendement vise uniquement à donner à la Bourse de New York le droit de jouer avec les pensions des Françaises et des Français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    M. Sitzenstuhl vous répond.

    M. Hadrien Clouet

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    Ah, tout de même !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je ne pensais pas qu’un petit amendement d’appel ferait autant d’effet à nos collègues de gauche, mais il est vrai que vous préparez toujours les séances de façon très sérieuse et que vous lisez avec attention.
    Non, cet amendement n’a pas été écrit à la demande d’un fonds de pension, je n’agis pas sur instructions de leur part. Vous voilà rassuré, en tout cas je l’espère.

    M. Hadrien Clouet

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    Un tout petit peu, vraiment pas beaucoup !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il s’agissait simplement d’entrouvrir un débat qu’il faudra un jour ou l’autre ouvrir pour de bon dans notre pays, car il porte sur un système qui existe depuis plusieurs années.
    Vous savez que dans une vie précédente, j’ai travaillé à Bercy et que dans la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, nous avons introduit les plans épargne retraite (PER) –⁠ auxquels, contrairement à ce que vous laissez entendre, de plus en plus de nos concitoyens souscrivent, sans doute même parmi ceux qui votent très à gauche. Ils sont de plus en plus en plus attentifs à ces produits financiers –⁠ ce n’est pas un gros mot –, parce qu’ils ont bien compris que souscrire à ces plans permettait aussi de disposer d’une forme de liberté dans la préparation de sa retraite. En France, ces produits ne sont pas distribués par de méchantes entreprises capitalistiques cotées aux Bourses de New York ou d’ailleurs, mais par des banques que nous connaissons tous, y compris des banques mutualistes parfois très proches de vos idées, notamment sur la RSE, la responsabilité sociale des entreprises. Il me semble donc, cher collègue, que vous êtes monté un peu vite sur vos grands chevaux.

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Monsieur le député Clouet, je vous rappelle tout de même que 15 millions de Français ont choisi, de manière collective ou individuelle, le dispositif de la retraite complémentaire par capitalisation. Aujourd’hui, la capitalisation ne représente certes qu’une toute petite partie des 14 % du PIB consacré à la retraite, mais elle concerne 15 millions d’actifs dans notre pays, dont 5 millions de fonctionnaires. Il me semble donc que ce dispositif est entré dans les habitudes,…

    Mme Ségolène Amiot

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    Oui, mais ça ne peut pas être un modèle social !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    …l’enjeu étant dorénavant de s’assurer qu’il ne concerne pas que les fonctionnaires ou les salariés des grandes entreprises –⁠ mais ce n’est pas notre débat. Au demeurant, si la retraite par capitalisation est entrée dans les habitudes beaucoup plus qu’on ne le croit, sa part dans la retraite globale doit rester limitée : chez les syndicats comme au sein du patronat, il y a un consensus sur le fait qu’elle ne doit en aucun cas se substituer au système par répartition. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Hadrien Clouet

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    Ce qui montre bien que vous-même ne croyez pas à la capitalisation !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 14 est maintenu.

    (L’amendement no 14 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 109.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Vu l’adoption des amendements identiques précédents, celui-ci apparaît comme un amendement de coordination pour que la santé, les conditions de travail et la prévention des risques professionnels soient, elles aussi, rendues obligatoires dans le cadre des négociations de branche.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 109.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        62
            Nombre de suffrages exprimés                62
            Majorité absolue                        32
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                30

    (L’amendement no 109 est adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 75 de M. Stéphane Viry, rapporteur, est rédactionnel.

    (L’amendement no 75, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 76 de M. Stéphane Viry, rapporteur, est rédactionnel et fait l’objet de deux sous-amendements.
    La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir le sous-amendement no 130.

    Mme Océane Godard

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    Je trouve dommage que l’avancée obtenue en commission par un amendement socialiste, qui introduisait un point de négociation sur les « pratiques managériales mobilisables », soit écrasée par cet amendement. Nous proposons de substituer au mot « gestion », le mot « management », parce que la gestion du personnel est distincte du management : elle couvre les actes de gestion des ressources humaines, de paye, d’évaluation, de formation, mais pas la question du management, qui doit pourtant, elle aussi, être au cœur de ce projet de loi, ce qui est l’objet de cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois, rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 143.

    M. Nicolas Turquois, rapporteur

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    Je me souviens en effet de cette discussion en commission des affaires sociales. Pour moi, le mot « gestion » intègre toutes les dimensions que vous évoquez, y compris la notion d’encadrement que je propose d’introduire avec mon sous-amendement. J’entends votre point de vue et je mesure l’importance de la notion de management que vous évoquez, mais il me semble préférable d’éviter un anglicisme dont tout le monde ne comprend pas forcément la signification.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces sous-amendements ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Tâchons de ne pas en faire une affaire d’État, c’est la sagesse qui doit ici prévaloir. Nous avons d’un côté le concept de management, qui n’est pas reconnu par le code du travail, de l’autre, le concept de gestion, qui est peut-être trop restrictif. Dès lors, la notion d’encadrement pourrait être une voie à retenir, c’est pourquoi j’émets un avis favorable au sous-amendement de Nicolas Turquois et je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur celui de Mme Godard.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Tout d’abord, je tiens à saluer les travaux de la commission qui ont introduit la question des pratiques managériales. Cela fait référence à un rapport de l’Igas qui montre que la France se caractérise en la matière par une forme de verticalité ne permettant ni l’autonomie ni la reconnaissance des salariés, contrairement à ce qui se fait dans les pays d’Europe du Nord et même dans des pays comme l’Italie. Le rapporteur a déposé un amendement qui va dans le même sens, mais l’Igas ayant mentionné les pratiques managériales, j’émettrai un avis de sagesse.

    M. Jérôme Guedj

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    Il faut toujours écouter l’Igas ! (Sourires.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Stella Dupont.

    Mme Stella Dupont

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    Comme Mme la ministre vient de l’indiquer, la France n’est malheureusement pas un modèle en matière de management et de pratiques managériales. Nombre de difficultés de coopération, de collaboration et de fonctionnement dans les entreprises et les services publics y sont liées à une fragilité du management ou des managers, causée par un manque de formation pour certains d’entre eux. Bien nommer les choses est utile et si le mot « encadrement » a du sens, il n’embrasse pas la totalité des compétences attendues chez un manager. Il me semble donc que le sous-amendement de Mme Godard est bienvenu, quand bien même la navette et la jurisprudence le feraient évoluer. L’adopter témoignerait de notre volonté d’un changement fort en matière managériale.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    Nous soutenons également le sous-amendement de Mme Godard parce que le burn-out est le grand absent de la liste des maladies professionnelles reconnues. Il est pourtant lié en très grande partie aux techniques managériales –⁠ toujours plus de travail, de reporting, de contrôles et de harcèlement des collaborateurs. En France, les méthodes managériales sont tellement néfastes qu’elles entraînent une explosion des affections de longue durée (ALD), notamment celles liées au burn-out, qui n’est pas reconnu comme une maladie professionnelle dans la plupart des branches alors qu’il devrait faire l’objet d’une surveillance particulière dans toutes les entreprises. En effet, quel que soit le métier, on peut avoir un manager parfait ou un manager toxique. Surveiller ce point serait précieux pour apprécier les conditions de travail de l’ensemble des travailleurs et des travailleuses.

    (Le sous-amendement no 130 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 143.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        67
            Nombre de suffrages exprimés                61
            Majorité absolue                        31
                    Pour l’adoption                27
                    Contre                34

    (Le sous-amendement no 143 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Maintenant qu’il est sous-amendé, les avis restent-ils favorables à l’amendement no 76 ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur et Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Oui.

    (L’amendement no 76, sous-amendé, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 37 et 108.
    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 37.

    M. Louis Boyard

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    Je rappelle le contexte : nous parlons d’une négociation de branche qui prévoit que l’employeur peut, unilatéralement, avoir le dernier mot et qui ne comporte ni obligation d’être appliquée ni objectifs chiffrés. Madame la ministre, vous avez parlé de grand soir ; nous considérons que ce n’est même pas le petit matin –⁠ tout juste peut-être la fin de la nuit –, mais nous cherchons à avancer pas à pas.

    M. Emeric Salmon

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    Le petit matin est la fin du grand soir…

    M. Louis Boyard

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    Par le biais de cet amendement, nous proposons que, préalablement à l’organisation d’une négociation, un diagnostic comprenant une liste des métiers exposant à des risques professionnels soit réalisé. Pour entamer une discussion sur l’emploi des seniors, il est utile de connaître les activités qui comportent de la manutention ou exposent aux agents chimiques, au travail de nuit ou, comme c’est le cas en ce moment, aux températures extrêmes. Je précise aux personnes arrivant dans l’hémicycle que, jusqu’à l’adoption d’un amendement il y a quelques minutes, il n’était pas obligatoire qu’une discussion sur l’emploi des seniors comporte un volet consacré à la santé au travail et aux risques professionnels. Heureusement que les députés Insoumis étaient là pour corriger cela !
    Une récente enquête Ipsos établit que, face au risque d’apparition de troubles musculo-squelettiques (TMS) ou psychiques chez leurs salariés, 70 % des entreprises n’adaptent pas leurs postes de travail, que 90 % ne modifient pas l’organisation du travail et que 98 % n’aménagent pas le temps de travail. Avec de tels chiffres, la liste que nous demandons paraît indispensable et l’accepter relève du bon sens pour que la discussion sur l’emploi des seniors puisse se dérouler dans la bonne foi et être efficace. Elle représente une petite avancée que nous devrions tous approuver, même si, à la fin, l’employeur a le dernier mot et peut ne pas appliquer l’accord.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 108.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Au-delà du cas des seniors, demander à toutes les branches de réaliser une cartographie des métiers pénibles présente un intérêt majeur. Cette avancée en permettrait bien d’autres. Regarder, branche par branche, quelles pénibilités comportent les métiers rendrait possible de déployer des politiques collectives de prévention et de réparation. Cela nous aiderait à y voir plus clair et à mieux cibler les métiers sur lesquels le travail doit être approfondi. Cet outil me paraît indispensable pour mieux prévenir la pénibilité, pour moins en subir les conséquences en fin de carrière et pour mieux les réparer quand elles n’auront pu être évitées.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Depuis avril 2023, dans le cadre de la mise en œuvre du Fipu, les branches sont tenues d’engager une négociation en vue d’aboutir à l’établissement d’une liste de métiers et d’activités particulièrement exposés aux facteurs de risques ergonomiques. Une cartographie des métiers exposés existe donc déjà. Je comprends la volonté de prévenir les risques professionnels dont témoignent les amendements. Toutefois, vous serez sans doute d’accord avec moi pour considérer que cela concerne l’ensemble des salariés et non les seuls travailleurs expérimentés dont nous parlons aujourd’hui. En cela, vos amendements ont une portée qui excède les négociations conduites par les partenaires sociaux.
    Je considère en outre que la question que vous évoquez a plus sa place dans le cadre des négociations obligatoires sur la GPEC, qui doivent prendre en compte l’exposition aux facteurs de risques professionnels. Votre demande est déjà pleinement satisfaite pour l’ensemble des salariés. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Il sera défavorable parce que le Fipu oblige déjà les branches à identifier les métiers exposés aux risques ergonomiques. Treize branches ont conclu des accords sur ce sujet et le fonds est doté d’un budget annuel de 200 millions d’euros qui finance des équipements spécialisés, des aménagements de poste et des reconversions pour les personnes exposées. On voit ainsi comment les briques se complètent puisque le Fipu sera une source de financement pour l’entretien de mi-carrière à 45 ans et pour les outils de reconversion dont nous parlerons plus tard.
    Par ailleurs, le compte professionnel de prévention (C2P) a été créé. Les branches sont invitées à définir des référentiels de métiers exposés et vingt-deux l’ont déjà été. Enfin, dans le cadre de la délégation paritaire permanente des retraites, des discussions sur les mécanismes de pénibilité ont eu lieu et au moins un accord sur la prévention a été conclu –⁠ c’est une excellente nouvelle. Il porte sur la réintégration des trois risques ergonomiques dans le C2P. Pour financer ces dispositifs et pour établir la cartographie dont vous parlez, je préfère en rester là pour le moment.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Avec ces amendements, nous avons la possibilité de vraiment faire avancer les choses. En effet, comme Mme la ministre et M. le rapporteur l’ont rappelé, une obligation existe déjà à propos des risques ergonomiques. Mais ce qui peut altérer la santé des travailleurs et des travailleuses ne se limite pas à ces risques.

    Mme Ségolène Amiot

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    Loin de là !

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Loin de là, effectivement ! C’est pourquoi nous voulons étendre les objectifs de la cartographie pour y inclure d’autres risques. Je ne nie pas l’importance des TMS que peuvent provoquer les risques ergonomiques, mais la pénibilité et les risques professionnels ne se réduisent pas à cela. Pour protéger les travailleurs et les travailleuses, il faut élargir la cartographie à tous les types de risques, qui sont nombreux.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    Tous les dispositifs dont Mme la ministre a rappelé l’existence, qu’il s’agisse de la GPEC ou des obligations de reconversion, interviennent a posteriori, une fois que le risque est survenu et que la santé du travailleur a été mise en jeu –⁠ on doit alors lui trouver un nouveau poste ou assurer une reconversion parce qu’il n’est plus en mesure d’effectuer les mêmes tâches jusqu’à l’âge avancé de 64 ans où il pourra enfin prendre sa retraite. Il faut intervenir avant.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Oui, à 45 ans !

    Mme Ségolène Amiot

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    Il importe de le faire en amont et en permanence. Nous devons privilégier la prévention et nous assurer qu’il n’y ait pas besoin de se reconvertir ou de changer de poste. Il faut faire en sorte que, tout au long de la vie professionnelle, l’exposition aux risques soit minimale et que les travailleurs et les travailleuses soient accompagnés pour éviter les maladies liées aux conditions de travail. C’est pourquoi nous proposons d’élargir le spectre et d’accorder une attention particulière à la prévention tout au long de la vie de tous les travailleurs et de toutes les travailleuses.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre, qui souhaite répondre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Je suis d’accord avec Mme Amiot sur la nécessité d’agir en amont. C’est précisément ce que permettra l’entretien de mi-carrière à 45 ans, dédié à la santé et aux compétences. On ne se réveille pas à 55 ou 58 ans.

    Mme Ségolène Amiot

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    Il faut le faire à 20 ans !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    En revanche, je suis en léger désaccord avec vous sur un point. Selon moi, certains métiers ne peuvent raisonnablement être exercés durant toute une vie, même avec un aménagement de poste.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est pour ça qu’il faut laisser les gens partir à la retraite avant 64 ans !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Dans ce cas, il faut envisager une reconversion. Voilà à quoi serviront les outils que nous soumettons à votre vote, avec des financements associés.
    Je résume mon propos. Premièrement, il faut agir en amont, voire dès 20 ans comme vous le proposez. En effet, l’exposition cumulée d’un égoutier, d’un ripeur ou d’une aide-soignante de 45 ans est très variable selon les aménagements de postes qu’il ou elle a connus et qui lui ont permis d’éviter les ports de charges, les postures pénibles ou les vibrations. D’où la nécessité de commencer à réfléchir à la seconde partie de carrière à 45 ans. Deuxièmement, certains métiers ne sont pas tenables toute une vie et il faut assurer des reconversions. Ce pari a été réussi, notamment dans les pays d’Europe du Nord.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Cette discussion est intéressante car la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) a récemment mené un travail sur le Fipu. Je rappelle à nos collègues de gauche qu’ils n’ont pas voté en faveur de la création de ce fonds alors qu’il dispose d’un budget annuel de 200 millions d’euros. Lors de la mission d’évaluation que nous avons conduite, nous nous sommes aperçus que l’enveloppe de 200 millions qui y est consacrée, même sanctuarisée, n’est pas dépensée.

    Mme Ségolène Amiot

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    Eh non !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Il y a là un problème. La montée en puissance du dispositif que nous avons récemment décidée a bien lieu, mais elle n’est pas suffisamment rapide. Par ailleurs, il est vrai qu’elle ne concerne que l’ergonomie, en particulier les risques musculo-squelettiques.
    Vu que cette enveloppe n’est pas entièrement consommée et qu’un nombre croissant d’arrêts de travail donnant lieu à des indemnités journalières sont dus au mal-être au travail –⁠ je ne parle pas de problèmes de santé mentale –, ne pourrait-on envisager, madame la ministre, qu’outre l’usure physique, cette enveloppe confiée aux partenaires sociaux puisse être consacrée à prévenir l’usure psychique ?

    Mme la présidente

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    Sur l’article 1er, je suis saisie par le groupe Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Sylvain Maillard.

    M. Sylvain Maillard

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    Ce débat sur la pénibilité au sens large est des plus intéressants. Mme la ministre a souligné l’importance de l’entretien professionnel à 45 ans ; il en faut sans doute même avant, mais laissons tout de même de la souplesse. Certains collaborateurs, certains travailleurs ne souhaitent pas changer de poste –⁠ le travail leur plaît –, en dépit d’une pénibilité que le chef d’entreprise lui-même estimerait, comme nous, excessive. Je crois qu’il faut garder de la souplesse en la matière.
    Je tiens également à rappeler qu’un travail difficile, pénible, doit avant tout être compensé par un supplément de salaire, ce qui permettra ensuite de percevoir une meilleure pension de retraite. Il convient de ne pas l’oublier. (Mme Sophie Taillé-Polian proteste.)

    Mme Ségolène Amiot

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    Ce n’est pas une question de salaire mais de conditions de travail ! Si on meurt avant la retraite, ça ne sert à rien d’avoir une meilleure pension.

    M. Sylvain Maillard

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    Dernier point : si nous voulons que le dispositif dont nous parlons pour l’instant entre nous soit réellement efficace, il nous faut certes améliorer le canevas général comme nous le faisons, mais surtout conserver un maximum de souplesse permettant de procéder entreprise par entreprise, d’autant que les salariés en changent de plus en plus souvent. Sinon, je sais comment cela va se terminer –⁠ nous avons déjà l’expérience : nous envisageons ici des mesures contre la pénibilité, mais sur le terrain, elles ne s’appliqueront pas complètement.

    (Les amendements identiques nos 37 et 108 ne sont pas adoptés.)

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Ce rejet est incompréhensible !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 1er.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        77
            Nombre de suffrages exprimés                66
            Majorité absolue                        34
                    Pour l’adoption                65
                    Contre                1

    (L’article  1er est adopté.)

    Après l’article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 41 portant article additionnel après l’article 1er.

    Mme Ségolène Amiot

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    Pour répondre à M. Maillard : nous ne vivons pas notre salaire quand nous sommes au travail, nous vivons nos conditions de travail. Je ne m’opposerai jamais à la réévaluation et à l’augmentation des salaires des personnes exposées à une forme de pénibilité, mais cela n’exempte absolument pas de l’effort pour améliorer les conditions de travail, bien au contraire.

    M. Sylvain Maillard

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    Bien sûr !

    Mme Ségolène Amiot

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    L’amendement no 41 vise à ce que toute rupture de contrat concernant une personne de plus de 45 ans soit transmise à l’inspection du travail, afin de protéger les salariés contre les licenciements abusifs, notamment ceux qui pourraient être liés à une incapacité physique progressive, résultant précisément des conditions de travail, mais aussi aux effets pervers que pourrait avoir le présent de projet de loi s’il incitait à licencier quelqu’un dans le but de l’embaucher à nouveau en bénéficiant de taux de cotisation moindres et de faire ainsi des économies. Il s’agit de permettre un regard de l’inspection du travail sur les conditions de licenciement : pourquoi tel salarié de plus de 45 ans va-t-il être licencié ? Est-ce pour le remplacer par un petit jeune de 18 ans, moitié moins payé, ou pour des raisons parfaitement légitimes ? Il n’est pas question de coercition, mais d’un simple document informatif transmis à l’inspection du travail.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Sur cet amendement, je voudrais rappeler –⁠ nous le faisons depuis une heure et demie –, la position de principe que nous partageons, mon corapporteur et moi : nous souhaitons respecter les termes de l’accord national interprofessionnel et nous en tenir à ce qui a été conclu entre les partenaires sociaux. Or cet accord ne prévoit absolument pas l’instauration d’un contrôle administratif des licenciements, tel que vous le préconisez.
    Par ailleurs, le champ d’application d’une telle procédure d’information serait particulièrement large, puisqu’elle concernerait tous les salariés de plus de 45 ans. Elle me paraît donc difficilement applicable.
    Surtout, un tel mécanisme constituerait pour les entreprises une incitation à ne pas recruter de travailleurs expérimentés par crainte d’un contrôle administratif supplémentaire, voire de sanctions, en cas de licenciement.

    M. Sylvain Maillard

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    C’est très factuel.

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Je rappelle qu’en tout état de cause, le code du travail interdit déjà les discriminations fondées sur l’âge des salariés.
    Plutôt que d’inventer de nouveaux moyens coercitifs, nous devons élaborer des outils permettant aux entreprises et aux salariés d’envisager plus sereinement les secondes parties de carrière. Telles sont les raisons pour lesquelles j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    Il est intéressant, monsieur le rapporteur, que vous parliez de coercition, lorsqu’il s’agit simplement d’informer l’inspection du travail. Vous évoquez en effet la peur du gendarme, la peur d’être contrôlé par l’inspection du travail. Or, si l’on n’a rien à se reprocher comme employeur, celle-ci est la bienvenue ; elle peut même vous faire des propositions et vous apporter des informations en vue d’améliorer les conditions de travail des salariés. En réalité, vous nous parlez donc de protéger les employeurs qui ne respecteraient pas la loi et passeraient outre le code du travail.
    J’en profite pour rappeler que tous les postes d’inspecteur du travail ne sont pas pourvus. J’alerte Mme la ministre sur la nécessité de recruter suffisamment. Alors que nous en manquons, vous n’en avez recruté que quarante-trois, ce qui ne suffira même pas à compenser les départs en retraite. Je vous invite à prendre cette question à bras-le-corps : si nous souhaitons que tout ce que nous votons aujourd’hui ait un sens et soit respecté, il faut aussi des personnels de l’inspection du travail pour s’en assurer par des contrôles.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Comme je le disais à propos d’un précédent amendement, l’enfer est parfois pavé de bonnes intentions. L’esprit de votre amendement, plein…

    M. Sylvain Maillard

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    De bons sentiments !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    …d’intentions louables visant à protéger les salariés de plus de 45 ans, me fait penser à celui de la contribution Delalande. Adoptée en 1987, cette disposition visait à imposer des pénalités…

    Mme Ségolène Amiot

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    Ça n’a rien à voir ! Il s’agit d’information.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    …–⁠ je sais qu’il ne s’agit de pénalités, madame Amiot, mais je parle de l’esprit – aux entreprises licenciant des salariés de plus de 50 ans. Il en est résulté un effondrement du taux de recrutement de salariés de plus de 50 ans.

    Mme Ségolène Amiot

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    Mais c’est une information !

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Si louable et sincère que soit l’intention, la mesure n’est pas nécessairement productive. Mieux vaut chercher à améliorer concrètement la santé, les compétences et, pour ceux qui sont au chômage, les chances d’être recrutés, plutôt que d’envisager de telles dispositions, qui ne sont pas vraiment opérantes. (Mme Ségolène Amiot proteste.)

    (L’amendement no 41 n’est pas adopté.)

    Article 2

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de six amendements, nos 23, 42, 24, 43, 86 et 83, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 23 et 42 sont identiques, ainsi que les amendements nos 24 et 43.
    Sur les amendements no 23 et identique, et no 24 et identique, mais aussi sur les amendements nos 45 et 44 qui ne font pas partie de cette discussion commune, je suis saisie par le groupe La France Insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 23.

    M. Nicolas Sansu

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    Les amendements nos 23 et 24 –⁠ que je défendrai conjointement – visent à abaisser le seuil de déclenchement de la négociation obligatoire sur l’emploi.
    Comme vous le savez, il existe trois seuils principaux de déclenchement des obligations prévues par le code du travail et par le code de la sécurité sociale, fixés à 11, 50 et 250 salariés. Je ne comprends pas bien pourquoi le texte en fixe un à 300 salariés. C’est pourquoi l’amendement no 23 vise à fixer ce seuil à 50 salariés, cependant que l’amendement de repli no 24 retient celui de 250 salariés, à des fins de cohérence et d’efficacité. S’il n’est pas question de multiplier les obligations, dès lors qu’à l’issue d’un accord national interprofessionnel, on décide le déploiement de dispositifs en faveur de l’emploi des seniors, il serait bon de prévoir quelques obligations, en plus des bonnes intentions.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 42.

    Mme Ségolène Amiot

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    M. le rapporteur nous avait indiqué qu’un tel amendement devait porter sur l’article 2 plutôt que sur l’article 1er. C’est chose faite.
    Nous proposons d’abaisser le seuil à 50 salariés pour que les PME soient intégrées au dispositif, dont nous avons déjà souligné qu’il n’était pas contraignant –⁠ il ne comporte ainsi aucune obligation, par exemple d’arriver à un accord, et ne prévoit aucun moyen de coercition pour imposer aux entreprises de faire un effort en faveur de l’emploi des personnes expérimentées. Les PME emploient plus de 4,5 millions de personnes en France : les inclure étendrait significativement le périmètre d’application des dispositifs favorisant l’embauche et le maintien en emploi de salariés seniors, conformément à ce que nous souhaitons.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 24 de Mme Karine Lebon a été défendu.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 43.

    M. Louis Boyard

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    D’excellents arguments ont déjà été avancés en faveur de l’amendement no 42, dont je recommande l’adoption en priorité, puisqu’en matière d’emploi des seniors, il serait normal que les PME participent. Ce n’est pourtant pas sur cette ligne-là que je vais tenter de vous convaincre.
    Je m’adresse particulièrement aux macronistes, à qui je demande qui a dit : « Nous n’aurons pas d’Europe forte et souveraine si elle n’est pas unie, tenue en elle-même, cohérente. » C’est une citation d’Emmanuel Macron.

    M. Sylvain Maillard

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    C’est excellent !

    Mme Liliana Tanguy

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    Bravo !

    M. Louis Boyard

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    Vous voulez réserver la disposition aux grandes entreprises ; or la Commission européenne a expliqué dans une recommandation du 6 mai 2003 que la qualification de PME ne pouvait s’appliquer qu’à une entreprise employant 250 salariés ou moins. L’adoption de l’amendement no 43 vous mettrait donc tout simplement en conformité avec le droit européen. Combien de fois nous avez-vous répété ici même qu’il fallait absolument le faire ? Alors je vous regarde, monsieur Maillard, et je vous appelle à agir « en Européen ». Je vous regarde, mes chers collègues, et je vous invite à « construire l’unité de notre continent » et à agir « en Européens ». Je vous regarde, madame la ministre, et je vous suggère de vous mettre en conformité avec le droit communautaire. Je vous appelle tout simplement à être cohérents, non avec l’Europe –⁠ nous estimons que ce truc-là ne marchera pas (M. Jérémie Patrier-Leitus s’exclame) –,…

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    Ah, on comprend mieux !

    M. Louis Boyard

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    …mais avec vous-mêmes, en votant en faveur de l’amendement no 43 –⁠ « en Européens » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 86 et 83 de Mme Sophie Taillé-Polian sont défendus.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    L’article 2 porte sur la négociation obligatoire dans les entreprises comptant plus de 300 salariés. Dans l’ensemble, les amendements que vous proposez à cet article procèdent du même esprit que ceux que vous avez déposés sur l’article 1er. Je reprendrai donc souvent des arguments déjà exposés et motiverai mes avis de manière condensée, afin de faire avancer nos débats.
    Avant d’émettre des avis défavorables sur vos amendements, je peux vous dire trois choses.
    La première, c’est que l’ANI retient le seuil de 300 salariés, de sorte que vos amendements tendent à revenir sur une décision des partenaires sociaux, sur un accord qu’ils ont signé ; je ne peux donc aller dans la direction que vous souhaitez.
    Comme Mme la ministre le signalait à l’occasion d’un précédent amendement, ce seuil a été fixé par parallélisme avec l’obligation de négociations relatives à la GPEC que prévoit le code du travail, raison pour laquelle il me semble conforme.

    M. Louis Boyard

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    Il n’est pas conforme au droit européen !

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Dernier argument, s’il en fallait encore : les entreprises de moins de 300 salariés ne sont pas oubliées, puisqu’il existe la possibilité d’engager volontairement des négociations sur le thème des travailleurs expérimentés et qu’en l’absence d’accord, ces entreprises sont incitées à adopter le plan d’action unilatéral.
    Voilà les arguments que j’ai à faire valoir sur vos amendements et qui seront encore les miens sur les amendements à venir –⁠ ce qui me permettra d’être plus court dans mes explications. Pour l’heure, avis défavorable sur tous ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis que le rapporteur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    J’ai entendu la ministre nous dire tout à l’heure, en utilisant les mêmes arguments que le rapporteur, que le texte est en conformité avec l’obligation de négociation qui s’applique aux entreprises d’au moins 300 salariés pour la GPEC. Elle a cependant ajouté que l’exigence de mise en conformité avec le droit européen imposerait un grand nettoyage, qui nécessiterait de passer en revue l’ensemble du dispositif.
    Chez moi, on dit qu’il ne faut pas repousser à demain ce que l’on peut faire aujourd’hui. C’est d’autant plus vrai si l’on tient compte de votre démarche actuelle, qui consiste à faire des économies sur tout et n’importe quoi ! Je vous propose donc de faire l’économie du travail des assistants ministériels, des assistants parlementaires et des services de l’Assemblée nationale, qui devront passer des heures à mener à bien ce nettoyage : faisons-le dès maintenant, puisque nous avons d’ores et déjà la possibilité de nous mettre en conformité avec le droit européen. De toute façon, le seuil relatif à la négociation sur la GPEC devra, comme les autres, être abaissé pour s’appliquer aux entreprises de plus de 250 salariés : commençons à faire le boulot proprement dès maintenant !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 23 et 42.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                15
                    Contre                53

    (Les amendements identiques nos 23 et 42 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 et 43.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                14
                    Contre                54

    (Les amendements identiques nos 24 et 43 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 86 et 83, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bérenger Cernon, pour soutenir l’amendement no 45.

    M. Bérenger Cernon

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    Il vise à instaurer une mesure simple, qui imposerait aux entreprises moyennes et grandes des objectifs chiffrés d’emploi des salariés seniors. Nous faisons face à une certaine hypocrisie en la matière : les seniors représentent 17 % des actifs mais seulement 6 % des recrutements. C’est de la discrimination assumée par le patronat ! Alors que l’on repousse l’âge de départ à la retraite à 64 ans, les employeurs se déchargent de toute responsabilité. Des milliers de seniors sont sans emploi, sans perspectives et bientôt sans indemnisation ; 40 000 d’entre eux sont pénalisés par la nouvelle convention d’assurance chômage et 17 000 en sont exclus.
    Nous proposons donc d’imposer un objectif chiffré aux entreprises employant moins de 15 % de salariés âgés de 50 à 64 ans, en précisant que l’objectif de progression ne pourra être inférieur à 5 % par an tant que le seuil de 15 % ne sera pas atteint. Ce serait le minimum pour corriger une injustice systémique. Si cet accord dont vous vantez les mérites est aussi merveilleux et ambitieux que vous le dites, les entreprises n’auront absolument aucun mal à y parvenir.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 45.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                15
                    Contre                53

    (L’amendement no 45 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 9 et 101, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 9.

    Mme Océane Godard

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    Nous proposons d’inscrire dans la loi que les entreprises de plus de 300 salariés doivent systématiquement examiner les possibilités de recours au fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle. La soutenabilité des parcours professionnels est au cœur des enjeux démographiques contemporains ; nous devons donc donner des moyens concrets aux entreprises pour qu’elles passent à l’action. Il ne s’agit pas simplement de négocier : il s’agit aussi de prévenir et d’anticiper les transformations des conditions de travail.
    Ce fonds a été doté de 1 milliard d’euros sur cinq ans, soit 200 millions par an jusqu’en 2027 ; or, en 2025, un peu plus de 20 millions seulement ont été utilisés. Nous proposons donc de faire en sorte que les employeurs concernés recourent davantage au Fipu au moment de négocier sur l’emploi des salariés ; c’est une mesure de bon sens qui a toute sa place dans la loi.

    Mme la présidente

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    Sur l’article 2, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 101.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Il est quasiment identique à celui de ma collègue Godard. Je souscris à ce qu’elle vient de dire : il est nécessaire de faire en sorte que le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle, donc de la pénibilité, soit mieux utilisé. Il faut bien sûr communiquer sur son existence mais je voulais aussi proposer, à la suite du collègue Isaac-Sibille, d’élargir la possibilité d’utiliser ce fonds au-delà des seuls risques ergonomiques, en l’étendant à l’ensemble des risques professionnels.
    C’est bien souvent parce que les entreprises manquent d’ingénierie –⁠ et aussi de volonté, malheureusement – pour vraiment travailler à la prévention des risques professionnels, mais aussi peut-être parce que son objectif est trop limité, que ce fonds ne trouve pas encore sa place et que tous les crédits mis à disposition ne sont pas utilisés. Il est donc nécessaire de l’exploiter davantage, comme y invite cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Vous souhaitez mentionner la possibilité de recourir au Fipu dans le projet de loi. Cependant, le choix a été fait, dans la transposition de l’accord, d’une référence plus large « à la santé au travail et à la prévention des risques professionnels », qui n’entre donc pas dans ce niveau de détail. D’une part, si le fonds en question changeait de dénomination, la rédaction proposée deviendrait obsolète ; d’autre part, le mentionner nous obligerait, par souci d’exhaustivité, à citer d’autres fonds, par exemple le fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (FNPAT). Nous en avons discuté en commission et je n’ai pas changé d’avis depuis : demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Nous en avons en effet discuté en commission : l’enjeu est d’améliorer le recours au Fipu et de rendre celui-ci plus opérationnel. J’ai donc la tentation de m’en remettre à la sagesse de l’Assemblée, voire d’être favorable à cette proposition. Néanmoins, pour des raisons de légistique, madame Godard, je vous demanderai de retirer votre amendement au profit de celui de Mme Taillé-Polian ; on me dit en effet que dans le vôtre, la référence au code de la sécurité sociale n’est pas complètement adéquate. Je suis donc favorable à l’amendement no 101. De façon générale, j’approuve la nécessité de rendre le Fipu beaucoup plus opérationnel, y compris pour le maintien en emploi des travailleurs expérimentés.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 9.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        60
            Nombre de suffrages exprimés                55
            Majorité absolue                        28
                    Pour l’adoption                27
                    Contre                28

    (L’amendement no 9 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 101 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 44 et 114, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 44.

    M. Louis Boyard

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    Rappelons les termes du débat. Les négociations sur l’emploi des seniors ne s’appuient sur aucun objectif chiffré ; en outre, rien n’oblige à respecter l’accord qui sera trouvé à leur issue. L’employeur dispose d’un droit de veto : il peut unilatéralement imposer sa propre décision ! J’en profite pour rappeler quelques statistiques s’agissant de l’adaptation des entreprises aux salariés seniors : 70 % d’entre elles n’adaptent pas les postes de travail, 90 % ne modifient pas l’organisation du travail et 98 % ne procèdent à aucun aménagement du temps de travail, sans parler des chiffres déjà mentionnés sur l’emploi des seniors.
    Voici donc l’objet du présent amendement : les salariés doivent eux aussi disposer d’un droit de veto à l’issue de la négociation. Comment pouvez-vous envisager que l’employeur dispose d’un droit de veto et ne soit contraint par aucun objectif chiffré ni aucune obligation de respecter l’accord, sans rien prévoir pour les salariés ? Permettez-moi une comparaison : un senior qui touche le RSA est contraint, lui, par des objectifs chiffrés. S’il veut continuer à percevoir cette prestation, il doit satisfaire à des obligations ; sinon, il en perd le bénéfice. S’il est inscrit à France Travail et qu’il refuse un emploi, il s’expose à des sanctions.
    Tout cela illustre bien la logique de classe qui est la vôtre : dès lors qu’il s’agit des employeurs, pas une seule obligation, pas une seule contrainte, pas une seule sanction ne sont prévues ; à l’inverse, s’agissant des salariés, a fortiori quand ils sont précaires, vous vous empressez d’introduire des objectifs chiffrés, des contraintes et des sanctions. Vous avez une logique de classe ! Si vous voulez éviter que ces négociations ne soient que des procédures formelles à l’issue desquelles l’employeur viendra unilatéralement imposer ses vues, les salariés doivent eux aussi disposer d’un droit de veto. C’est une question d’égalité ! Il serait inacceptable de dire l’inverse : cela n’aurait pas de sens.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 114 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Nous avons tous la volonté de maximiser le nombre d’accords comportant des mesures en faveur de l’emploi des travailleurs expérimentés. Je ne comprends pas comment vous pouvez envisager d’introduire un droit de veto dans un tel cadre de discussion et de négociation : cela risquerait de susciter d’emblée des conflits et de réduire le nombre d’accords conclus !

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est un rapport de force, en fait !

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    Vous évoquez la lutte des classes, monsieur Boyard ; je sais que c’est une ligne que vous défendez mais ce n’est pas la mienne. Quoi qu’il en soit, dans le cadre de la transposition de cet accord, je ne vois pas comment on pourrait admettre l’introduction d’un droit de veto qui serait de nature à menacer des accords en passe d’être conclus.

    Mme Ségolène Amiot

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    Il y a un droit de veto pour les employeurs !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Louis Boyard.

    M. Louis Boyard

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    Il y a littéralement un droit de veto pour l’employeur, monsieur le rapporteur ! Comment pouvez-vous dire qu’un droit de veto des salariés serait scandaleux et créerait du conflit, alors que l’employeur, lui, dispose d’un tel droit ? Vous dites que vous ne croyez pas en la lutte des classes, mais nous sommes en plein dedans ! C’est le « deux poids, deux mesures ». Notre amendement est précisément un amendement d’appel, qui vise à vous expliquer comment les choses vont se passer : il y aura bien une négociation mais si son issue ne convient pas à l’employeur, il pourra décider unilatéralement –⁠ c’est bien un droit de veto – de ne pas la respecter ; et même cette décision unilatérale, il ne sera pas non plus tenu de la respecter.
    Je ne vois donc pas pourquoi l’employeur bénéficierait de toutes ces prérogatives et pas les salariés. Vous passez votre temps à vanter les mérites du dialogue social en nous disant qu’il suffit de se mettre autour de la table et de discuter à égalité, puisqu’il n’y a pas de classes sociales dans ce pays, pour que tout fonctionne bien, mais vous donnez tout le pouvoir à l’employeur dans la négociation ! Ce n’est pas audible, monsieur le rapporteur, vraiment. Si vous voulez que les négociations aboutissent, il est indispensable de garantir à l’employeur et aux salariés un droit de veto équivalent. C’est une question de bon sens.

    Mme Ségolène Amiot

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    Oui, c’est un amendement de bon sens !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    En effet, monsieur le rapporteur, je ne comprends pas bien votre manière de voir les choses. La réalité, c’est que les employeurs disposent d’un droit de veto de fait sur toutes ces négociations. Ils ont l’obligation de négocier, mais pas d’aboutir à un accord. Si l’employeur n’a pas envie de s’y plier, il peut se contenter de faire semblant : il convoque les représentants des salariés à une réunion, leur soumet des propositions dont il sait pertinemment qu’elles sont inacceptables et les discussions s’arrêtent là. C’est ainsi que cela se passe dans bon nombre d’entreprises !
    Bien sûr, nous avons pris les choses à l’envers, par cet amendement, mais c’était pour mieux vous faire prendre conscience de la réalité des négociations dans les entreprises. Je le répète, en n’étant contraint qu’à sauver les apparences, l’employeur dispose d’une forme de droit de veto.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Maillard.

    M. Sylvain Maillard

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    Ce propos est purement politique.

    M. Hadrien Clouet

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    Quoi, de la politique à l’Assemblée nationale ?

    M. Sylvain Maillard

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    Certes, il existe un lien de subordination entre l’employeur et le salarié, mais l’équilibre se construit autrement : le salarié apporte sa force de travail à l’entreprise et est libre, en théorie, de partir si ses conditions de travail ne lui conviennent pas. Ce n’est pas un rapport de force.

    Mme Ségolène Amiot

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    Justement, si.

    M. Sylvain Maillard

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    L’entreprise n’est pas une démocratie mais il faut tout de même trouver les moyens de la faire fonctionner correctement. Si les salariés ont décidé de ne plus travailler, l’entreprise s’écroule et tout le monde y perd. À vous écouter, on a l’impression que c’est un combat permanent. Cela ne donne pas envie de travailler en entreprise ! Faisons confiance au dialogue social pour atteindre les objectifs que vous fixez.

    Mme Ségolène Amiot

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    Vous ne croyez pas au dialogue social ! Le principe du dialogue social, c’est un rapport de force.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Les gens veulent bien travailler mais ils veulent aussi être respectés.

    M. Sylvain Maillard

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    Un employeur n’est pas un tyran par nature. Si cela est nécessaire, il sera le premier à engager des discussions. Lorsqu’un accord unilatéral est pris, il est en général dans l’intérêt de l’entreprise de l’appliquer. Faisons confiance aux acteurs du terrain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 44.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                10
                    Contre                58

    (L’amendement no 44 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 114 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 2.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        68
            Nombre de suffrages exprimés                62
            Majorité absolue                        32
                    Pour l’adoption                62
                    Contre                0

    (L’article 2 est adopté.)

    Après l’article 2

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 2.
    La parole est à M. Thomas Ménagé, pour soutenir l’amendement no 72.

    M. Thomas Ménagé

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    Il s’agit de modifier la rédaction de l’article L. 2241-1 du code du travail pour y inscrire le principe du tutorat en entreprise et de la transmission des savoirs comme leviers de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. C’est un sujet que nous avons déjà abordé ce matin et vous avez été la première à reconnaître, madame la ministre, qu’il fallait rompre avec cette tendance qui consiste à opposer les jeunes aux travailleurs expérimentés. En faisant entrer le tutorat et la transmission des savoirs dans le champ de la négociation collective tous les quatre ans au sein des branches, l’amendement tend à encourager la transmission par les seniors aux jeunes actifs de leur savoir-faire et de leur expérience. Bon nombre d’entre eux sont en effet contraints de partir très rapidement, sans avoir eu le temps de partager leur connaissance du métier avec la nouvelle génération. Dans le même temps, beaucoup de jeunes ont du mal à trouver un emploi, et une fois en poste, peinent parfois à trouver leurs marques, faute d’avoir été correctement accompagnés dans leur prise de fonction. Nous devons donc favoriser la solidarité intergénérationnelle en l’inscrivant dans la loi.
    Vous avez cité des exemples étrangers, madame la ministre. Nous pouvons nous inspirer des modèles développés en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Suède pour encourager le tutorat et structurer l’alternance. Ainsi, en Allemagne, les jeunes entrent plus tôt qu’en France sur le marché du travail. C’est une question sur laquelle nous devrons travailler.
    Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron avait été marqué par des mesures en faveur de l’apprentissage et nous avions soutenu cet effort. Malheureusement, celui-ci ne s’est pas poursuivi sur le long terme et nous avons même pu constater un certain recul –⁠ nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les entreprises ont ainsi signalé que les aides avaient diminué.

    M. Sylvain Maillard

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    C’est à cause de la crise sanitaire !

    M. Thomas Ménagé

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    Nous devons continuer à soutenir les entreprises, mais aussi les jeunes, pour leur permettre de rallier la très belle filière de l’apprentissage. Notre amendement n’a pas d’autre objectif que d’encourager les entreprises à sécuriser les compétences des travailleurs expérimentés pour valoriser leur savoir-faire. Les seniors pourront enfin se sentir utiles dans l’entreprise et dans notre société, auprès des jeunes qu’ils contribueront à former dans de meilleures conditions. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard, pour un rappel au règlement.

    Mme Océane Godard

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    Rappel au règlement au titre de l’article 100 : l’amendement no 1 de mon collègue Thierry Sother ne figure pas sur le dérouleur.

    Mme la présidente

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    J’en fais part au service de la séance et je vous transmettrai leur réponse.

    Après l’article 2 (suite)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    L’amendement est satisfait dans le cadre de la négociation sur l’emploi des salariés expérimentés prévue par le présent texte. L’alinéa 20 de l’article 1er prévoit que la négociation porte obligatoirement sur « [l]a transmission de leurs savoirs et de leurs compétences, en particulier les missions de mentorat, de tutorat et de mécénat de compétences ». Je vous invite par conséquent à retirer l’amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

    (L’amendement no 72, ayant reçu un avis défavorable du gouvernement, est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements, nos 46, 112, 47 et 89, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement no 46.

    M. Hadrien Clouet

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    Pourquoi sommes-nous parfois sceptiques, du côté des Insoumis, quant au rapport entre la négociation et la loi ? Pour une raison simple : il est fréquent que des négociations n’aient pas lieu alors même qu’elles auraient dû l’être. C’est ce qui continuera à se passer avec le texte que nous examinons ce matin : rien n’impose que les négociations aient lieu. En général, tout le monde se réjouit que des négociations puissent se tenir et permettent ainsi de rassembler autour d’une table tous les acteurs concernés pour qu’ils arrivent à surmonter leurs désaccords en prolongeant les discussions ou en s’engageant dans une lutte sociale. Mais en l’espèce, votre texte n’impose nullement d’engager des négociations. Or l’emploi des seniors est un sujet sensible car il peut donner lieu à toutes les discriminations possibles, au niveau du poste de travail, de l’embauche, dans l’accès à la formation.
    Les statistiques établies par France Travail le mois dernier sont édifiantes : 21 % des plus de 50 ans sont inscrits à France Travail depuis au moins trois ans ; ils sont 25 % chez les plus de 60 ans et représentent un tiers des plus de 65 ans –⁠ car aussi étonnant que cela puisse paraître, 76 000 personnes de plus de 65 ans sont inscrites à France Travail. Alors qu’il y a urgence à agir pour l’emploi des seniors, vous nous proposez des négociations qui n’auront pas lieu. Vous aurez beau jeu de venir le déplorer d’un ton faussement plaintif, dans un an. Gagnez du temps et adoptez cet amendement qui tend à imposer l’ouverture et la conduite de négociations en prévoyant, au cas où elles n’auraient pas lieu, des sanctions à hauteur de 1 % du chiffre d’affaires ou de 1 % des rémunérations et dividendes versés, selon que vous retiendrez l’amendement no 46 ou l’amendement no 47.
    Cette mesure aurait le mérite de préserver le processus économique : tout le monde serait gagnant ! Le produit de la sanction serait versé à la Caisse nationale d’assurance vieillesse. La fraude que s’aviseraient de commettre ceux qui ne respecteraient pas le texte que vous prétendez chérir permettrait ainsi de financer nos pensions. Ce serait la moindre des choses que d’adopter cet amendement sans lequel tout le reste ne serait qu’une pantalonnade générale.

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 112 et 89 de Mme Sophie Taillé-Polian sont défendus et l’amendement no 47 de M. Louis Boyard vient de l’être.

    (Les amendements nos 46, 112, 47 et 89, repoussés par la commission et le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Madame Godard, l’amendement no 1 est irrecevable au titre de l’article 45 du règlement.

    Article 3

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 128 rectifié.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Je profite de l’article 3 qui prévoit de renforcer les liens entre la visite médicale de mi-carrière et l’entretien professionnel, pour transposer une partie de l’ANI du 25 juin dernier. Par cet accord, les partenaires sociaux ont souhaité faire de l’entretien professionnel un véritable outil de gestion de carrière. L’entretien professionnel devient ainsi l’entretien de parcours professionnel. Sa périodicité change : de bisannuel, il devient obligatoire tous les quatre ans avec un état récapitulatif tous les huit ans, pouvant donner lieu à une obligation d’abondement du compte personnel de formation du salarié en cas de manquement de l’employeur.
    L’entretien de parcours professionnel est renforcé : il doit permettre d’aborder les compétences du salarié et ses qualifications qui sont mobilisées dans l’emploi actuel ainsi que leur évolution probable au regard des transformations de l’entreprise ; mais aussi, plus largement, sa situation ainsi que son parcours professionnel en fonction de l’évolution des métiers de l’entreprise, sans oublier ses projets personnels qui pourraient le mener à une reconversion interne ou externe.
    L’entretien professionnel organisé par l’employeur est réalisé par un supérieur hiérarchique et se déroule durant le temps de travail. Des mesures d’accompagnement peuvent être prévues dans les entreprises de moins de 300 salariés : le salarié pourra ainsi bénéficier du conseil en évolution professionnelle, auquel les partenaires sociaux sont très attachés, tandis que l’employeur pourra solliciter son opérateur de compétences.
    Enfin, l’amendement prévoit que la base de données économiques, sociales et environnementales mise à la disposition du comité social et économique de l’entreprise intègre également un bilan des actions de formation entreprises à l’issue des entretiens de parcours professionnels.
    Ce sont donc des entretiens plus efficaces, qui permettront de mieux aborder les sujets liés à la santé, au métier, à l’aménagement de poste et à la reconversion –⁠ au sein ou en dehors de l’entreprise.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    L’amendement vise à transposer le volet relatif à l’entretien professionnel contenu dans l’accord national interprofessionnel conclu le 25 juin dernier entre les partenaires sociaux. Le contenu de cet entretien est enrichi en matière de formation et permettra d’aborder avec le salarié d’éventuels projets de reconversion et de transition professionnelles. C’est tout naturellement que j’y suis favorable.

    (L’amendement no 128 rectifié est adopté ; en conséquence, l’amendement no 12 tombe.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 48.

    Mme Ségolène Amiot

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    Il tend à rendre contraignantes les mesures préconisées par le médecin du travail et justifiées par des considérations relatives, notamment, à l’âge du travailleur. Nous l’avons constaté encore cette semaine, les conditions de travail doivent évoluer, ne serait-ce qu’en raison du changement climatique. Les recommandations formulées ponctuellement par la Carsat (caisse d’assurance retraite et de santé au travail), les anciens CHSCT (comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) ou les CSSCT (commissions santé sécurité et conditions de travail), ou encore la médecine du travail, par exemple à l’occasion d’un contrôle, ne sont pas contraignantes, au point que la France est la championne d’Europe en matière de morts au travail. Peut-être serait-il temps d’écouter ceux qui savent, notamment les médecins du travail, qui préconisent par exemple que toutes les fenêtres puissent être ouvertes lorsqu’il fait trop chaud ou que de l’eau soit mise à la disposition des travailleurs quand la température dépasse les 35 degrés. Ce serait sans doute le meilleur moyen d’éviter les accidents du travail ou les maladies professionnelles. Ce n’est manifestement pas le cas ; aussi conviendrait-il d’adopter cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Viry, rapporteur

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    L’article L. 4624-6 du code du travail prévoit déjà que l’employeur est tenu de prendre en considération l’avis et les propositions émises par le médecin du travail, même s’il peut y déroger, le cas échéant, par écrit, en notifiant aux salariés les motifs pour lesquels il s’y oppose. Votre amendement est donc satisfait en partie. Pour le reste, il faut laisser à l’employeur la possibilité d’adapter les recommandations du médecin du travail aux spécificités de son entreprise. Votre amendement serait trop contraignant pour l’employeur et il est contraire à l’ANI. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    J’aurai le même avis que le rapporteur.
    Madame la députée, vous avez évoqué les conditions climatiques, notamment les récents épisodes caniculaires –⁠ toujours en cours dans certains départements. Sachez qu’un décret a été publié aujourd’hui pour passer d’une logique d’incitation à une logique d’obligation des employeurs en matière de prévention du risque chaleur lors des épisodes caniculaires définis par référence aux seuils d’alerte jaune, orange et rouge de Météo-France.
    Concrètement, le décret impose plusieurs mesures de prévention telles que des aménagements de poste –⁠ ces derniers jours, de nombreux chantiers ont ainsi commencé à 7 heures du matin pour s’arrêter à midi –, des pauses, la mise en place d’équipements de protection solaire mais aussi la fourniture de trois litres d’eau par salarié et par jour en l’absence de raccordement à l’eau courante. Ainsi, des mesures sont déjà prévues.
    Par ailleurs, il est désormais possible de recourir au régime de chômage intempéries en cas de fortes chaleurs. Les chantiers qui s’arrêtent en raison de la canicule peuvent ainsi bénéficier du chômage partiel, ce qui devrait faciliter ces interruptions. Je signale qu’actuellement, l’inspection du travail n’a pas la possibilité d’interrompre des chantiers. Lui donner cette faculté suppose une disposition législative : je serais heureuse d’examiner ce sujet avec vous à l’occasion d’un projet ou d’une proposition de loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ségolène Amiot.

    Mme Ségolène Amiot

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    Le décret est en effet sorti, mais il ne fixe pas une température maximale d’exposition pour les salariés, pas plus qu’il ne renforce le droit de retrait. La recommandation du médecin du travail à laquelle l’employeur s’est opposé avec des justifications fait une belle jambe au salarié lorsque l’accident mortel survient ! Il ne reste alors aux familles que leurs yeux pour pleurer et la possibilité d’attaquer l’employeur en justice pour faute inexcusable. En attendant, l’accident est survenu.
    Il serait bon d’arrêter de prendre les recommandations du médecin pour quelque chose de superficiel et de facultatif. Au contraire, lorsque le médecin du travail préconise de protéger les gens dans le cadre professionnel en adoptant une organisation particulière ou en modifiant une façon de procéder délétère, lorsqu’il suggère de changer des machines ou d’adapter le travail, l’employeur, tenu de protéger l’intégralité des salariés, devrait prendre ses recommandations en considération. Pourtant, ce n’est pas ce qui se passe aujourd’hui et nous sommes, je le rappelle, les champions d’Europe en matière de morts au travail.

    (L’amendement no 48 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion du projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra