XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du jeudi 22 mai 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du jeudi 22 mai 2025

Présidence de Mme Nadège Abomangoli
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Convention et accord internationaux

    Procédure d’examen simplifiée

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d’examen simplifiée, en application de l’article 103 du règlement, du projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Panama et de la convention d’extradition entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Panama (nos 1028, 1426), et du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord portant création du Centre de développement des capacités cyber dans les Balkans occidentaux (C3BO) (nos 944, 1377).
    Ces textes n’ayant fait l’objet d’aucun amendement, je vais les mettre aux voix, en application de l’article 106 du règlement.

    Entraide judiciaire France-Panama

    (Le projet de loi est adopté.)

    Centre de développement des capacités cyber dans les Balkans occidentaux

    (Le projet de loi est adopté.)

    2. Droit à l’aide à mourir

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir (nos 1100, 1364).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 612 à l’article 6.

    Article 6 (suite)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois amendements, nos 612, 502 et 539, pouvant être soumis à une discussion commune.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 612 de Mme Sandrine Dogor-Such et les amendements identiques no 502 de Mme Justine Gruet et no  539 de Mme Annie Vidal sont défendus.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir, pour donner l’avis de la commission.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir

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    Par ces amendements, vous proposez de substituer au terme « aide à mourir » les termes « aide active à mourir », « euthanasie », « suicide assisté » ou « mort programmée ».

    Mme Justine Gruet

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    Vous ne vous contentez pas de dire « défavorable », comme d’habitude, monsieur le rapporteur ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Vous souhaitez visiblement que nous reprenions le débat sémantique que nous avons déjà eu, je redonne donc avec grand plaisir mes arguments. Vous proposez de renommer…

    Mme Justine Gruet

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    J’ai bien compris votre point de vue !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Oui, mais vous voulez que nous ayons à nouveau un débat libre et éclairé, alors, discutons ! Je ne mets pas toutes les expressions sur le même plan. L’étymologie du mot « euthanasie » est intéressante puisqu’elle renvoie à l’idée d’une belle mort.

    M. Philippe Juvin

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    Passionnant.

    Mme Justine Gruet

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    Vous pouvez accélérer !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Nos collègues ayant souhaité revenir sur le débat sémantique,…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Nous savons bien pourquoi vous prenez votre temps !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    …j’explique la cohérence de notre vision de l’aide à mourir. Je pensais qu’il ne serait plus nécessaire de le faire –⁠ j’ai le sentiment de ressasser.

    M. Philippe Juvin

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    Bientôt, vous ne l’aurez plus car vos collègues seront arrivés.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Le terme « euthanasie » est marqué par l’histoire ; il est connoté, ce qui nous pose problème.
    Quant au « suicide assisté », ce n’est pas le suicide, qui résulte de drames personnels. Nous sommes tous ici très attachés à la politique de prévention du suicide. Dans son rapport de février 2025, l’Observatoire national du suicide (ONS) a analysé le lien, dans divers pays, entre politique de prévention du suicide et dispositif d’aide à mourir ; il montre avec beaucoup de pertinence que créer la confusion entre le suicide assisté et le suicide ne serait pas une bonne chose.
    Enfin, le terme « mort programmée » ne correspond pas à ce que nous voulons faire. (Protestations sur quelques bancs du groupe DR.)

    Mme Justine Gruet

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    Il ne figure pas dans les amendements !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Le droit à l’aide à mourir s’adresse à des malades en phase avancée ou terminale, dont le pronostic vital est engagé. Les formulations que vous proposez ne conviennent pas. Le débat sémantique n’est pas anodin, j’en suis parfaitement conscient. Toutefois, n’utilisons pas les mauvais mots ; « aide à mourir » est l’expression la plus adaptée.
    Avis défavorable.

    Rappels au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour un rappel au règlement.

    M. Philippe Juvin

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    Il se fonde sur les articles 100 et 70 du règlement. Monsieur le rapporteur, vous avez parlé cinq minutes. C’était passionnant. Mais tout le monde a compris que si vous avez parlé aussi longtemps, c’était pour retarder la mise aux voix, un vote que vous auriez perdu, faute de troupes dans l’hémicycle. La journée commence sur de bonnes bases !
    Madame la présidente, nous avons convenu hier, pour accélérer les débats, de nous en tenir à deux orateurs pour, deux orateurs contre, chacun s’engageant à ne parler qu’une minute –⁠ y compris M. le rapporteur et Mme la ministre. L’accord n’étant plus respecté, nous nous fixerons nos propres règles. Nous avons compris votre propos, monsieur le rapporteur, sur le fond et sur la forme. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et RN.)

    Mme Anne Le Hénanff

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    Exactement !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour un rappel au règlement.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il se fonde sur l’article 50, alinéa 4, du règlement : « L’Assemblée nationale se réunit le matin de 9 heures à 13 heures […] ». Précisons qu’à 9 heures, le rapporteur, en minorité dans l’hémicycle, allait perdre un vote. Il s’est donc senti obligé de prendre longuement la parole, alors que, depuis plusieurs jours, il nous appelle à être concis et à accélérer. Personne n’est dupe. Nous en prenons bonne note et nous aussi ferons valoir la nécessité d’aller au fin fond des sujets. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, DR, et HOR et sur certains bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    J’en profite pour rappeler la règle que nous suivrons : deux orateurs pour, deux orateurs contre sur chacun des amendements. Je vous invite à la concision –⁠ nous voulons tous que les débats accélèrent. Dans une longue discussion commune, le rapporteur disposera de plus d’une minute pour donner son avis.

    Article 6 (suite)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, pour donner l’avis du gouvernement.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles

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    M. le rapporteur a expliqué de façon détaillée les enjeux sémantiques. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 259, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    Il me semblait important d’ajouter par l’amendement no 502 le mot « active », pour montrer qu’il y a une action. Je suis surprise, monsieur le rapporteur, que, dans votre avis très détaillé, vous ayez parlé de « suicide assisté » et d’« euthanasie », termes qui ne figurent pas dans les amendements en discussion. Vous donnez votre avis sur des amendements qui n’existent pas ! La journée commence bien.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Ce n’est pas à la hauteur !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Arrêtez l’hypocrisie ! Vous présentez ces amendements pour la cinquantième fois. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS. –⁠ M. Christophe Marion applaudit également.) Cela vous a été expliqué cinquante fois et vous les défendrez encore deux, trois, quatre ou dix fois. Le rapporteur a eu raison de prendre son temps. Vous vous moquez de nous depuis cinq semaines ; nous avons le droit de montrer que, quand nous ne sommes pas d’accord, nous prenons nos dispositions pour contrer vos attaques incessantes sur la sémantique.

    Mme Justine Gruet

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    Il a parlé de « suicide assisté » ! Le terme ne figure pas dans les amendements !

    M. René Pilato

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    Vous devriez dire au premier ministre, qui a voulu qu’il y ait deux textes, qu’il est à l’origine des problèmes sémantiques. L’aide à mourir concerne l’accompagnement, les soins palliatifs, la sédation profonde et continue et, in fine, le droit à l’aide à mourir. À la suite de sa décision, nous nous sommes retrouvés en difficulté pour définir cet acte nouveau.
    Nous avons fait un travail sémantique en commission –⁠ ce n’est pas anodin, nous y avons passé du temps. Je comprends que des collègues aient souhaité y revenir parce que tout le monde n’a pas participé aux travaux de la commission, mais aller jusqu’à défendre cinquante fois le même amendement en séance publique, ce n’est pas sérieux ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN et DR.) J’irai dans le sens du rapporteur : nous devons voter contre ces amendements.

    M. Alexandre Portier

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    Nous avons du mal à concurrencer LFI en matière d’obstruction !
    Vous n’aimez pas le débat !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Je suis tout à fait d’accord avec mon collègue Pilato : votre attitude est hypocrite. Nous avons eu un débat sémantique, mais alors que le rapporteur a pris le temps de vous répondre, le terme « aide active » continue de revenir de façon systématique. Et puis, vous savez bien que faire traîner les débats fait partie du jeu ! Vous-mêmes vous y employez parfois. C’est quasiment de l’obstruction que vous faites quand vous présentez constamment le même type d’amendement. Il faut le dire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, LFI, SOC, EcoS et HOR.)

    M. Alexandre Portier

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    C’est le monde à l’envers !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Si nous défendons avec insistance des amendements sémantiques, c’est tout simplement parce que nous avons raison. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations et sourires sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    M. Sébastien Peytavie

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    Ça, c’est un argument !

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    C’est tout à fait notre droit de déposer des amendements qui vont dans notre sens. Nous ne partageons pas les mêmes positions mais nous, nous respectons les vôtres ; merci d’en faire autant.
    Monsieur Falorni, vous venez d’évoquer le suicide. Des études de suicidologie montrent que, quelle que soit la forme du suicide, assisté ou non, les proches vivent un deuil complexe, marqué par l’angoisse. Leur sentiment de culpabilité, parfois de colère, consécutif au drame peut les faire entrer en dépression. De plus, dans les pays où le suicide assisté est autorisé, les proches ne sont pas toujours informés ou peuvent être mis dans des situations de dilemme moral. Veillons donc aux conséquences qu’aurait l’autorisation du suicide assisté en France. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 612.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        93
            Nombre de suffrages exprimés                90
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                37
                    Contre                53

    (L’amendement no 612 n’est pas adopté.)

    (Les amendements identiques nos 502 et 539 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 259.

    Mme Justine Gruet

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    Nous proposons de substituer le mot « reconnue » au mot « regardée », qui n’a aucune signification juridique. En droit, on reconnaît quelque chose, un état ou une situation. Messieurs les rapporteurs, vous aviez, en commission, envisagé la possibilité d’adopter cet amendement pour mieux encadrer la procédure. C’est pourquoi je vous remercie de l’attention que vous porterez à cette proposition.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Panifous, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

    M. Laurent Panifous, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    En effet, nous avons eu ces échanges en commission. Au vu de la rédaction que vous proposez et de l’objectif qui est le vôtre, j’émets un avis de sagesse.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Le gouvernement regarde chaque amendement avec attention. Il est évident que le choix du mot « reconnue » peut contribuer à la clarté du texte. Dans cet esprit, le gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 259.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        97
            Nombre de suffrages exprimés                95
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                65
                    Contre                30

    (L’amendement no 259 est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 1279.

    M. Christophe Bentz

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    En plus de la mention « libre et éclairée », nous proposons d’ajouter celle de « non équivoque », pour sécuriser et protéger la volonté du patient, et supprimer ainsi toute ambiguïté.

    (L’amendement no 1279, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements, nos 2153, 2028, 2127 et 844, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Sur l’amendement no 2153, je suis saisie d’une demande de scrutin public par le groupe La France insoumise – Nouveau Front populaire.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Karen Erodi, pour le soutenir.

    Mme Karen Erodi

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    Il vise à compléter les dispositions sur l’évaluation du consentement, en introduisant une exception claire : lorsqu’une personne, qui disposait encore de son discernement, a formulé sa volonté dans des directives anticipées ou auprès de la personne de confiance, cette volonté doit être respectée, même si son discernement est altéré au moment de la procédure. Il s’agit ici de respecter un choix fait en pleine conscience, en amont, dans des conditions encadrées par la loi, loi qui prévoit justement cette perte de conscience.
    Le code de la santé publique reconnaît déjà la validité des directives anticipées et de la désignation d’une personne de confiance. Nous proposons simplement de mettre ce texte en cohérence avec les dispositions existantes, pour éviter que la volonté exprimée de manière anticipée ne soit injustement écartée.
    C’est une garantie pour les patients atteints de maladies neurodégénératives qui savent ce qui les attend –⁠ coma ou état végétatif – et souhaitent pouvoir poser des balises à l’avance, pour que leur fin de vie ne soit pas contraire à leur volonté. Nous vous invitons à adopter cet amendement de bon sens et conforme à l’esprit de la loi de 2016.

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 93, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 2028.

    Mme Danielle Simonnet

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    La loi Claeys-Leonetti a instauré les directives anticipées, qui permettent à chaque citoyen d’anticiper le moment où il ne pourra pas exprimer ses ultimes volontés. Nous proposons de prendre en compte ces directives anticipées quand la personne a voulu s’assurer qu’en cas de perte de son discernement, son souhait de bénéficier de l’aide à mourir serait respecté.

    Mme la présidente

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    Vous conservez la parole pour soutenir l’amendement no 2127.

    Mme Danielle Simonnet

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    Il prend en compte la situation d’une personne qui a engagé une procédure de demande à l’aide à mourir et qui perd sa capacité de discernement durant cette procédure. Si cette personne a exprimé dans ses directives anticipées sa volonté de bénéficier de l’aide à mourir et a nommé une personne de confiance pour en garantir la réalisation, anticipant ainsi la situation où elle perdrait son discernement ou sa conscience, il est important que sa volonté soit respectée.
    Pensez à ceux qui, souffrant d’une maladie neurodégénérative, souhaitent anticiper le moment où leurs facultés ne leur permettront plus de réitérer leur volonté libre et éclairée. Ils ont engagé une procédure d’accès à l’aide à mourir et, anticipant leur possible perte de discernement, ont écrit des directives anticipées et nommé une personne de confiance. Respectons leur volonté ! Et faisons en sorte que la personne de confiance puisse être la garante de leurs directives anticipées et de la réalisation de leur dernière volonté.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Stella Dupont, pour soutenir l’amendement no 844.

    Mme Stella Dupont

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    De concert avec notre ancienne collègue Cécile Rilhac, je vous propose de prendre en compte les directives anticipées dans l’examen de la demande du patient. Leur rédaction n’est jamais un acte anodin : celles et ceux qui en ont rédigé le savent, c’est un travail d’introspection intime, on en parle en général avec ses proches, c’est un acte mûrement réfléchi, en particulier lorsque la maladie est présente. Intégrer dans ce texte la prise en compte des directives anticipées, c’est respecter pleinement la volonté de ceux qui les ont rédigées.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    À l’instar du débat sémantique, c’est le énième débat sur le sujet des directives anticipées. Je ne le développerai donc pas, même si M. Juvin brûle d’entendre mes analyses…

    M. Philippe Juvin

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    Surtout à propos des racines grecques !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Si jamais je vous ai frustré, faites-moi signe et je reprendrai la parole. (Sourires.)

    M. Philippe Juvin

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    Il m’en faut beaucoup plus !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Même si j’en comprends le sens et si leur discussion est tout à fait légitime dans nos débats, j’insiste de nouveau, après m’être exprimé déjà une dizaine ou une quinzaine de fois à ce propos, sur la nécessité de ne pas voter ces amendements. Leur adoption, à ce moment de l’examen, introduirait de l’incohérence et affaiblirait le texte, auquel vous êtes attachés.

    M. Patrick Hetzel

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    Et mettrait en péril le vote final ! (Sourires.)

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    C’est pourquoi je suis défavorable à tous ces amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises. Il est absolument indispensable –⁠ c’est un des éléments clés du texte – que le patient puisse exprimer sa volonté à tous les stades de la procédure. Ces amendements vont à l’encontre de ce principe. Avis très défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Une nouvelle fois, je soutiens la prise en compte des directives anticipées, bien que mon groupe soit partagé sur le sujet. À force de refuser absolument d’employer le terme de directives anticipées dans cette proposition de loi,…

    M. Patrick Hetzel

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    Comme celui d’aide active à mourir !

    Mme Sandrine Rousseau

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    …nous risquons d’affaiblir une politique de développement des directives anticipées née il y a vingt ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et SOC.) Vous avez ainsi refusé la consultation systématique des directives anticipées pour aider le médecin à rendre son avis, ce qui vide ces directives de leur intérêt, d’autant plus que le texte ne permet même pas que celles-ci soient notées dans le dossier du patient.
    Je rappelle aussi que des personnes en coma irréversible, qui ont rédigé des directives anticipées, ne sont pas éligibles à l’aide à mourir, ce qui est problématique. Ainsi, Vincent Lambert, dont on a évoqué le cas à de nombreuses reprises dans cet hémicycle, n’aurait pas été concerné par cette loi. De même, entre un tiers et la moitié des patients atteints de la maladie de Charcot, –⁠ autre maladie qui nous a été énormément signalée –…

    M. Patrick Hetzel

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    N’essentialisez pas la maladie de Charcot !

    Mme Sandrine Rousseau

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    …sont atteints de troubles cognitifs, ce qui leur interdit l’accès à ce nouveau droit. À force d’exclure la prise en compte des directives anticipées, on écarte des personnes qui auraient besoin de l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Nous pensons que le patient doit pouvoir dire non au dernier moment. Par définition, s’il a exprimé sa volonté dans des directives anticipées mais qu’il se trouve dans le coma, incapable de dire non, la procédure prévue par le texte ne peut pas s’appliquer. C’est la raison pour laquelle nous nous opposons à ces amendements. Je comprends vos préoccupations, mais je pense qu’il y a plus d’inconvénients à intégrer les directives anticipées qu’à ne pas les inclure dans le champ du texte.
    Madame Rousseau, tous les malades atteints de la maladie de Charcot ne veulent pas mourir. Et pour rappeler un point peut-être ignoré, quand la maladie de Charcot en arrive au stade de ventilation et de nutrition par gastrostomie, la personne entre dans le cadre des dispositions de la loi Claeys-Leonetti.
    Monsieur Pilato, je trouve très positif que votre groupe dépose de nouveaux amendements sur les directives anticipées. Je n’y vois aucune obstruction, mais simplement l’expression de députés qui défendent une valeur. Quand, de notre côté, nous redéposons les mêmes amendements, ne venez pas nous dire que nous nous moquons de vous –⁠ c’est ce que vous avez dit tout à l’heure – ou que nous faisons de l’obstruction.

    Mme Danielle Simonnet

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    Il y a quand même un déséquilibre, vous avez déposé des centaines d’amendements !

    M. Philippe Juvin

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    Il est normal que les députés déposent des amendements. Je vous invite à continuer de défendre la prise en compte des directives anticipées, ce qui permet des débats très importants. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Chers collègues de gauche, vous nous reprochez de nous répéter sur les questions de sémantique,…

    M. Hadrien Clouet

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    C’est vrai !

    M. Christophe Bentz

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    …mais, pour ma part, je n’ai plus défendu aucun amendement sur ce thème depuis l’article 4 –⁠ j’estime que nous avons déjà eu le débat et je dis simplement « Défendu ».
    J’aurais tenu à peu près les mêmes propos que le rapporteur général dans son avis –⁠ tout arrive ! Nous avons discuté quarante fois de l’inscription de l’aide à mourir –⁠ le suicide assisté – dans les directives anticipées.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure de la commission des affaires sociales

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    Pas quarante fois !

    M. Christophe Bentz

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    Comme le rapporteur général, le président de la commission, la ministre et plusieurs autres groupes, le RN y est défavorable, pour une raison simple, que nous avons expliquée également quarante fois. J’ai beau combattre cette proposition de loi, son principe est clair : elle s’appuie sur la réitération de la demande par le patient. Cela, nous l’avons tous compris. Je vous pose donc la question : combien de fois encore allez-vous défendre votre position obstinée sur les directives anticipées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Autant de fois qu’il le faudra !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    En effet, nous avons déposé plusieurs amendements sur les directives anticipées, mais ils ne sont pas si nombreux que cela.

    M. Christophe Bentz

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    Quelques dizaines !

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Nous sommes quelques-uns à avoir la conviction qu’elles doivent être prises en considération dans certains cas, notamment lorsqu’un patient a réitéré une première fois sa demande mais n’est plus en capacité de le faire à la dernière étape –⁠ c’est l’amendement de notre collègue Danielle Simonnet.
    Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, je conçois que vous ne souhaitiez pas que toutes les directives anticipées soient prises en compte, mais nous aurions pu travailler sur ce cas particulier en sécurisant au maximum la procédure. Nous aurions ainsi répondu à ce qui est une forte attente de nos compatriotes.
    Monsieur le rapporteur général, vous avez reçu les mêmes courriers que nous : des personnes, qui ont également écrit au premier ministre, témoignent de la difficulté de leur situation et de leur volonté d’accéder à l’aide à mourir, quand bien même elles n’auraient plus la capacité de réitérer cette demande. Je regrette que nous n’ayons pas trouvé un terrain d’entente les concernant. Nous défendrons un amendement à leur sujet à la fin de l’examen du texte. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2153.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        107
            Nombre de suffrages exprimés                100
            Majorité absolue                        51
                    Pour l’adoption                33
                    Contre                67

    (L’amendement no 2153 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 2028, 2127 et 844, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 93 de M. Fabien Di Filippo est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 93.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        96
            Nombre de suffrages exprimés                94
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                62

    (L’amendement no 93 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1636.

    M. Thibault Bazin

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    Non, monsieur Pilato, je ne me moque pas de vous ; au contraire, je vous prends très au sérieux. Les débats d’hier sur les critères et la procédure ont été éprouvants et la nuit, rude. Ce dont nous parlons, au fond, c’est de la réponse que nous allons apporter à ceux qui souffrent, une réponse qui impliquera la société tout entière. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes DR et EPR.)

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Très bien !

    M. Thibault Bazin

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    S’agissant d’un acte d’une si grande gravité, il n’est pas illégitime de demander des garanties. Comme l’a déclaré le professeur Régis Aubry lors de son audition devant la commission spéciale le 22 avril 2024, un « sentiment d’indignité » se développe aujourd’hui chez les personnes âgées en situation de dépendance et chez les personnes atteintes de maladies chroniques. Selon lui, « ce sentiment d’indignité est mêlé d’un sentiment d’inutilité, voire d’inexistence ». Ce sentiment nous renvoie à notre responsabilité collective, car c’est le regard que porte notre société sur ces personnes qui leur fait percevoir cette dimension d’indignité. Mais elles n’ont pas d’indignité.
    C’est pourquoi je vous propose, par cet amendement, de compléter l’alinéa 3 de la phrase suivante : « De même, il ne peut être donné suite aux demandes de personnes exprimant un sentiment d’indignité. » C’est davantage le regard que chacun de nous pose sur l’autre qui doit être questionné. Notre regard respecte-t-il et reconnaît-il la dignité de l’autre ?
    Dans son éditorial du numéro automne-hiver 1999-2000 de la Lettre de l’espace éthique AP-HP, le professeur Didier Sicard écrivait : « La dignité n’est pas dans celui qui souffre […], elle est dans le regard que l’autre lui adresse, dans le regard porté sur celui qui est le plus faible, le plus désespéré, le plus condamné. Condamné à mort deux fois : par sa maladie, et par l’autre. »
    Pour s’assurer que la demande de mort n’est pas guidée par ce sentiment d’indignité, l’amendement propose d’exclure du droit à l’aide à mourir les personnes qui expriment un sentiment d’indignité. La société doit leur apporter la réponse qui convient : elle doit les accompagner jusqu’au bout. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Votre amendement soulève une question que M. Isaac-Sibille a abordée maintes fois en commission –⁠ il n’est pas là, mais je ne doute pas que vous lui transmettrez ma réponse : le sentiment d’indignité et d’inutilité, le sentiment d’être un poids pour la société, plus généralement le sentiment de dégradation de soi, ne peut en aucun cas être suffisant pour accéder à l’aide à mourir. Jamais.

    Mme Danielle Simonnet

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    Jamais !

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Pour bénéficier de ce droit, un patient doit répondre aux critères fixés par la proposition de loi : des critères précis, objectifs, soumis à une expertise médicale et collégiale –⁠ nous y reviendrons. Un sentiment de dégradation personnelle, quel qu’il soit, ne suffira jamais pour accéder à ce dispositif. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Monsieur Bazin, je vous ai, comme toujours, écouté avec beaucoup de respect, mais je veux vous dire que nous avons tous une conscience dans cet hémicycle et que nous réfléchissons au sens des mots. Ce débat interpelle chacun d’entre nous. Nous mesurons tous l’importance de la proposition de loi et nous respectons l’ensemble de nos concitoyens.
    Dès le premier jour du débat, dès la première heure, j’ai affirmé que ce texte n’avait rien à voir avec l’âge.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Oui !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Le fait générateur de l’aide à mourir est la pathologie. La personne doit être atteinte d’une maladie très grave –⁠ son pronostic vital doit être engagé – et répondre aux cinq critères que M. le rapporteur vient d’évoquer. Je le dis avec force, pour que nous n’ayons plus à y revenir : ce texte ne vise absolument pas les personnes âgées et les personnes handicapées ; tout le monde ici respecte ces personnes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS.) Nous savons que ce que nous sommes, nous le devons à celles et ceux qui ont précédé, nos parents et nos grands-parents –⁠ des personnes potentiellement âgées et très âgées. Les termes du débat sont, je crois, clairement posés.
    Quant à Régis Aubry, dont vous avez cité les propos, j’ai, comme vous, beaucoup de respect pour lui. Vous le savez probablement, puisque c’est public, il était particulièrement lié à Paulette Guinchard-Kunstler, ancienne secrétaire d’État aux personnes âgées, engagée à leurs côtés tout au long de sa carrière politique. C’est lui qui l’a accompagnée en Suisse quand elle a souhaité recourir au suicide assisté. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, sur plusieurs bancs du groupe EPR et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Avis très défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    M. le rapporteur et Mme la ministre ont très bien répondu à M. Bazin. J’ajoute une remarque : le sentiment d’indignité n’est pas seulement lié au regard des autres, il peut être lié au regard qu’une personne porte sur elle-même. Le patient peut souhaiter éviter une situation d’indignité par rapport à lui-même. C’est aussi important, selon moi, que le regard des autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mmes Stella Dupont et Sandrine Rousseau applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Si nous avons ce débat, c’est que nous sommes quelques-uns à considérer que ce texte pourrait engendrer une rupture profonde dans l’éthique de l’engagement soignant. Je ne suis pas le seul à le dire. Dans une tribune du 30 mars 2024, Emmanuel Hirsch, professeur émérite d’éthique médicale, nous alerte de manière claire sur le glissement qui pourrait s’opérer –⁠ ses propos sont dans le droit fil de ceux de Thibault Bazin : « Il nous faudra désormais assumer les conséquences humaines, sociales et éthiques d’une législation favorable à la mort donnée. Rien dans l’expérience tirée des pays qui nous ont précédés dans la libéralisation de l’euthanasie n’est de nature à convaincre que ces sociétés ont gagné en fraternité, en dignité, en liberté, en autonomie, en solidarité, en justice ou plus simplement en humanité. »
    Comme Emmanuel Hirsch depuis très longtemps, nous souhaitons être des lanceurs d’alerte. Soyons vigilants : une législation peut modifier le regard sur la maladie, que ce soit le regard des autres ou, comme l’a souligné M. Lauzzana, celui du malade sur lui-même. Nous devons inlassablement défendre la protection et la fraternité. Malheureusement, je ne suis pas certain que ce texte le fasse. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    Je souscris pleinement aux propos que viennent de tenir M. le rapporteur et Mme la ministre. Il me paraît important de répéter que, pour accéder à l’aide à mourir, une personne devra impérativement répondre à cinq critères précis : elle devra, entre autres, « être atteinte d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale » et « présenter une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement ».

    M. Stéphane Delautrette

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    Si la personne ne respecte pas ces conditions, elle ne peut prétendre à l’aide à mourir. À ceux qui craignent que la décision repose sur les épaules du médecin et qu’un patient demande l’aide à mourir en raison du sentiment d’indignité qu’il ressent, je rappelle que le médecin rendra son avis dans un cadre collégial –⁠ nous y reviendrons un peu plus loin –, après avoir discuté avec d’autres professionnels de santé, et que cet avis s’appuiera sur l’évaluation des cinq critères prévus.
    Je comprends que l’on veuille protéger les plus vulnérables –⁠ nous le voulons tous ici. (Mme Sandrine Rousseau applaudit.) Mais à trop vouloir protéger, gardons-nous de nous opposer à ce que les gens souhaitent vraiment. On ne peut pas protéger quelqu’un contre sa volonté –⁠ dès lors, bien sûr, que les cinq critères sont respectés ; nous y tenons toutes et tous ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Sandrine Rousseau applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Renault.

    M. Matthias Renault

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    L’amendement est pertinent parce que l’expression « mourir dans la dignité » sature le débat public et que ce discours mélioratif conduit à séparer ceux qui auraient une vie et une mort dignes de ceux qui auraient une vie et une mort indignes. Désigner comme indignes ceux qui, malgré la possibilité de demander la mort, choisiront de continuer à vivre coûte que coûte est source de pression sociale.
    Contrairement à ce qui a été dit, la dignité s’évalue toujours par rapport au regard d’autrui.

    Mme Danielle Simonnet

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    Pas du tout !

    M. Matthias Renault

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    Quand on juge soi-même qu’on manque de dignité, c’est qu’on intériorise le regard d’autrui. Nous sommes fondamentalement des êtres sociaux soumis au regard d’autrui. D’ailleurs, tout le monde s’est déjà senti indigne au moins une fois dans sa vie. La notion de dignité est donc tout à fait relative.
    Enfin, on nous oppose que cette supposée indignité ne suffirait jamais à elle seule pour demander l’euthanasie –⁠ encore heureux –, mais c’est sur la volonté du malade qu’elle pèse. La volonté libre et éclairée, à notre sens, doit être libre du regard d’autrui.

    (L’amendement no 1636 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1637.

    M. Thibault Bazin

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    C’est une disposition qui me tient à cœur : je propose qu’en cas de doute sur le caractère libre et éclairé de la demande de mort du patient, le médecin saisisse un psychiatre et que la décision du premier soit liée par l’avis écrit du second.
    Vous m’objecterez certainement qu’un amendement du gouvernement, no 2657, portant sur le même sujet a été déposé. Je l’ai lu et relu et il me semble insuffisant. Il y est question de « doute sérieux », mais y a-t-il des doutes qui ne soient pas sérieux s’agissant d’un acte d’une telle gravité ? Soit il y a un doute, soit il n’y en a pas. Étant donné la gravité d’une telle décision, on doit faire preuve de la plus grande prudence. De plus, l’avis du psychiatre ou du neurologue visé par l’amendement du gouvernement n’est pas écrit et ne lie pas la décision du médecin. Je pense que mon amendement est beaucoup plus solide et offre de meilleures garanties.

    M. Patrick Hetzel

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    Bien sûr !

    M. Thibault Bazin

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    Je terminerai en citant la présidente du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV) : « Nous ne savons pas encore distinguer avec certitude [les] désirs et demandes [qui] resteront stables, reflétant une volonté réfléchie et éclairée, de ceux qui seront plus fluctuants et ambivalents. […] À l’échelle individuelle, il est capital que le patient ait accès à des soins psychiques et puisse discuter avec un psychologue ou un psychiatre. Cela permettra d’une part d’être conscient des pressions familiales et sociétales, et d’autre part de poser un diagnostic. »

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 2334, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 1637 ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Selon moi, l’amendement présente trois défauts. D’abord, il prévoit  la consultation d’un psychiatre uniquement, non d’un psychologue ou d’un neurologue. Ensuite, il est déjà possible que le demandeur consulte un psychiatre, soit dans le cadre de l’orientation prévue à l’article 5, soit dans le cadre de l’avis prévu à l’article 6. Enfin, l’évaluation psychiatrique que vous proposez interviendrait avant le début de la procédure collégiale. Pour ces trois raisons, j’y suis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable, pour les mêmes raisons.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Pour appuyer les arguments de M. Bazin et pour répondre à ceux de M. le rapporteur général, je citerai le professeur Bringer, président du comité d’éthique de l’Académie nationale de médecine : « De nombreuses personnes atteintes d’une maladie chronique en phase terminale souffrent d’un état dépressif masqué, et sont susceptibles de formuler des demandes influencées par cette dépression non diagnostiquée. […] Concernant la procédure, nous estimons qu’il est crucial que le médecin propose systématiquement à la personne une orientation vers un psychologue clinicien ou un psychiatre, étant donné la prévalence des dépressions masquées dans les maladies incurables. » Compte tenu de cela, il paraît souhaitable que l’évaluation psychiatrique ait lieu relativement tôt dans la procédure. L’amendement nous semble donc pertinent.

    (L’amendement no 1637 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 1460 et 1461, je suis saisie par le groupe Horizons & indépendants de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour soutenir l’amendement no 2334.

    M. Hervé de Lépinau

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    Le suicide assisté, l’euthanasie reposeront sur une chaîne décisionnelle et logistique qui comprend les médecins, les aides-soignants, les pharmaciens, les curateurs ou encore les tuteurs. Les amendements de précision que nous avons déposés concernent chacun de ces acteurs.
    Tous sont appelés à rester dans leur silo –⁠ le médecin pratique la médecine, le juriste pratique le droit –, et nous ne saurions laisser un médecin traiter d’une question de droit essentielle et difficile sans baliser parfaitement le parcours. Or les débats d’hier ont montré que la notion de discernement gravement altéré n’était pas, aux yeux de nombre d’entre nous, suffisamment précise. Il faut donc laisser au médecin la possibilité de donner l’alerte lorsqu’il constate que la personne qui a demandé l’euthanasie ou le suicide assisté est sous l’emprise d’un tiers, pour des raisons potentiellement mercantiles. Ce point est important car si nous ne l’écrivons pas, le médecin non formé au droit et à l’enquête (M. Sébastien Peytavie secoue la tête) –⁠ si, monsieur Peytavie, c’est une réalité – se trouvera dans une situation difficile. Pourtant, sa décision sera déjà rendue difficile par l’application de la loi, si jamais… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. –⁠ Ce dernier est applaudi par les députés des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Nous sommes d’accord sur un point : une personne demandant l’aide à mourir sous l’influence d’un tiers ne doit pas accéder au dispositif. En revanche, nous sommes en désaccord quant à la nécessité d’un tel amendement, car l’hypothèse de l’influence est déjà couverte par le texte. Une personne sous influence ne saurait être reconnue comme exprimant une volonté libre et éclairée. L’entretien avec le médecin et la procédure collégiale permettront de vérifier si tel est le cas.

    M. Philippe Vigier

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    Voilà !

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Même si nous en avons déjà débattu et que c’est un point accessoire de votre amendement, j’ajoute que sa formulation, en introduisant les termes « euthanasie » et « suicide assisté », revient sur la terminologie « aide à mourir ».
    Pour ces deux raisons, mon avis est défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous en revenons à la question de l’évaluation, qui conduit à permettre ou non l’accès à l’aide à mourir. Le dispositif est destiné à des personnes qui souffrent, qui sont déjà en fin de vie et qui font un choix autonome ; la notion de décision prise « sous l’influence directe ou indirecte d’un tiers intéressé [au] décès ou pour des motifs frauduleux » couvre un champ beaucoup plus large, moins précis et qui ne correspond pas au recueil du consentement du patient. Je suis donc défavorable à l’amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’amendement de M. de Lépinau. Il pose à mes yeux une difficulté : il prévoit que le médecin, s’il soupçonne l’influence d’un tiers, « refuse la demande ». Or je considère la collégialité de la décision comme sacrée. Le médecin qui recueille la demande doit pouvoir consulter ses confrères, un auxiliaire médical ou encore un psychiatre au sujet d’éléments d’appréciation tels que ceux que vous visez ; c’est la sédimentation de tous leurs avis qui permettra d’arriver à une décision.
    Si l’amendement est adopté, il brisera –⁠ je le dis avec force, car c’est essentiel – la collégialité de la décision, laquelle constitue pourtant une avancée historique du texte, pensée par symétrie avec la loi Claeys-Leonetti. Tous les ajouts à la procédure qui interviendront en amont de la procédure collégiale et contribueront à briser la collégialité dégraderont gravement le dispositif. Les professionnels de santé ne seront plus protégés. Imaginez la manière dont votre amendement les exposerait ! La procédure collégiale permettra de trancher, et de trancher comme il faut.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je me suis absenté quelques minutes ; il paraît que M. le rapporteur en a profité pour répondre à ma question ! J’en poserai donc une autre sur le même sujet et j’aimerais que Mme la ministre me réponde, car on connaît le poids qu’a la parole d’un ministre en séance.
    Il n’est pas nécessaire d’être sous l’influence d’un tiers pour que la demande soit influencée. Les médecins savent bien comme cela se passe : ils croisent ce genre de cas quotidiennement. Une personne qui remplit les critères vous dira : « Je vois bien que tous mes proches sont mobilisés autour de moi, que mon conjoint, qui habite à cent kilomètres, vient me voir tous les jours et doit dormir à l’hôtel, que mes enfants sont plongés dans l’inquiétude, que mes petits-enfants me rendent visite. Personne ne sait quand je vais partir. L’équipe de soignants se donne un mal fou, et pourquoi ? » Elle pourrait souhaiter accéder à l’aide à mourir car elle se considère comme un poids pour son conjoint, pour ses proches ou pour l’équipe soignante.
    J’aimerais, madame la ministre, que vous puissiez nous dire, au banc, que ces personnes ne seront pas éligibles au dispositif. Elles ne sont pas sous influence, mais elles sont susceptibles de demander l’aide à mourir pour éviter d’être une charge, la société étant ce qu’elle est. Il est important que vous disiez clairement qu’elles ne sauraient être concernées par l’aide à mourir, quand bien même leur demande serait libre, éclairée et libre d’influence –⁠ si ce n’est de l’influence de la société.

    M. Sébastien Peytavie

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    Il faut présenter des souffrances réfractaires !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau.

    M. Hervé de Lépinau

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    En réponse à M. Vigier, je souligne que les cas visés par mon amendement sont relativement restreints. Dans ce type de cas, la solution n’est pas la collégialité médicale mais le juge. Nous parlons d’abus de faiblesse ; nous avons rappelé hier les chiffres annuels de ces faits délictueux. L’intérêt de l’amendement consiste à permettre au médecin d’arrêter immédiatement le processus. Libre à lui d’en parler ensuite avec l’équipe médicale et surtout, le cas échéant, d’en référer à un magistrat.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Monsieur Isaac-Sibille, nous avons déjà évoqué cette situation à plusieurs reprises, mais je comprends votre inquiétude. Un jour, le chef de service d’un centre de lutte contre le cancer m’a parlé de l’influence que peuvent subir les patients. Tous ceux qui, parmi nous, ont déjà accompagné un grand malade le savent, l’aidant est lui-même fatigué et peut être tenté de dire : « Docteur, il faut peut-être que cela cesse. » Ce sont des mots qu’un proche peut être conduit à prononcer alors même qu’il accompagne un malade avec amour –⁠ il n’y a rien de plus difficile que d’accompagner une personne qu’on aime et qui souffre.
    Cependant, la proposition de loi établit des critères. Je ne peux pas vous répondre, monsieur Isaac Cybille, qu’aucune de ces personnes sera éligible. Cela reviendrait à dire que le médecin se contente d’analyser les relations que le malade entretient avec son entourage alors que, bien évidemment, seul le patient est au cœur de la procédure.
    S’il est dans la situation que vous avez décrite, ce sera au professionnel de santé de juger que sa volonté n’est pas libre. Il reviendra au médecin de prendre la décision, en demandant à un psychiatre ou à un neurologue de s’entretenir avec le patient, de façon à affiner autant que possible son avis.
    Oui, la notion de discernement emporte une véritable responsabilité. À travers ses échanges avec le patient, avec ses confrères, le médecin doit évaluer le discernement de la personne. Vous qui êtes médecin, vous connaissez évidemment la relation particulière entre un médecin et un patient et la manière dont le médecin analyse les échanges avec celui-ci.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2334.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        124
            Nombre de suffrages exprimés                124
            Majorité absolue                        63
                    Pour l’adoption                43
                    Contre                81

    (L’amendement no 2334 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 1460.

    Mme Annie Vidal

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    Il tend à insérer l’alinéa suivant après l’alinéa 3 : « Le médecin doit prioritairement arriver, avec la personne, à la conviction qu’il n’y a aucune autre solution raisonnable dans sa situation et que la demande de la personne est entièrement volontaire. » Il s’agit d’un dialogue singulier entre le médecin et son patient, un dialogue de vérité pour un choix irréversible. Cette formule consacre un principe fondamental à mon sens : l’aide à mourir ne peut jamais être une réponse par défaut. (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.) Elle ne doit être envisagée qu’après avoir exploré tous les traitements envisageables, et toutes les autres possibilités. Cet échange entre le médecin et le patient doit avoir lieu avant de répondre à la demande.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je vous remercie, madame la ministre, pour votre réponse. Elle me paraît un peu différente de celle du rapporteur, que je n’ai malheureusement pas pu entendre : il soutenait que, lorsqu’elle était dans une telle situation, la demande de la personne ne correspondait pas aux critères établis par la proposition de loi. Nous sommes au cœur du sujet. Madame la ministre, mesurez-vous le poids, la responsabilité, qui pèse sur les médecins ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Mais oui !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Chers collègues, vous affirmez que c’est une loi sociétale, mais en réalité, c’est le médecin qui doit supporter le pouvoir, la responsabilité et les conséquences de la décision. Où est la société là-dedans ?
    On reproche souvent aux médecins leur trop grand pouvoir. Ce peut être vrai, face à la maladie. Mais ici, on leur fait endosser une puissance et une responsabilité sur la vie et la mort énormes. Madame la ministre, vous dites grosso modo que la responsabilité pèsera sur le médecin ou sur le collège. En tant que législateurs, pouvons-nous leur laisser ce pouvoir de décision de vie ou de mort, leur imposer un tel poids ?
    J’y reviendrai en présentant plusieurs amendements. Je pense que notre société doit s’engager, notamment à travers le juge. Puisque celui-ci représente la société, il doit valider le processus. Lorsqu’une personne demande une mise sous tutelle ou sous curatelle, le médecin, sur la base de son expertise, donne son avis, puis la société tranche. Pour une demande d’aide à mourir –⁠ une question de vie ou de mort ! –, la société est absente. Je le regrette.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    L’amendement no 1460 reprend une disposition essentielle du droit belge, selon laquelle la demande d’aide à mourir doit être entièrement volontaire et reposer sur le fait qu’il n’existe pas d’autre possibilité. L’alinéa que nous proposons d’ajouter vise à consacrer un principe fondamental : l’aide à mourir ne peut pas être une réponse par défaut. Avant d’accepter la demande d’aide à mourir, il faut avoir épuisé toutes les possibilités, exploré toutes les options médicales, psychologiques, palliatives et celles qui impliquent l’environnement familial. Nous voulons inscrire dans la loi et renforcer ce principe éthique.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    La rédaction proposée par l’amendement no 1460 repose sur l’idée que la possibilité de recourir à l’aide à mourir n’est proposée que faute de traitement. Madame Vidal, vous l’avez très bien dit : l’aide à mourir ne doit jamais être choisie par défaut, mais à défaut d’autres solutions. Je rappelle que le recours à l’aide à mourir ne peut être autorisé que si la maladie est en phase avancée ou terminale. Les critères sont cumulatifs et la demande de l’aide à mourir relève du choix de la personne malade.
    Monsieur Isaac-Sibille, vous soutenez que cela donne trop de pouvoir aux médecins, mais c’est précisément le contraire : si le médecin fait état de la situation et établit le diagnostic, c’est bien la personne malade qui prend la décision. Nous en revenons toujours aux mêmes arguments : encore une fois, il s’agit d’affirmer que, quand la maladie est en phase avancée ou terminale, le recours à l’aide à mourir est un droit, non une décision par défaut, du fait d’un manque de soins.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1460.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        118
            Nombre de suffrages exprimés                115
            Majorité absolue                        58
                    Pour l’adoption                45
                    Contre                70

    (L’amendement no 1460 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 425.

    Mme Justine Gruet

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    Je rejoins Cyrille Isaac-Sibille, car j’ai le sentiment que cette proposition de loi déséquilibre la relation entre le patient et le médecin. Dans vos arguments, vous affirmez que le patient est au cœur de la décision et en prend la responsabilité. Néanmoins, nous faisons porter au médecin l’appréciation des critères.
    Je l’ai dit en commission : si nous partons du principe de la liberté individuelle, qui permet à chacun de disposer de son corps –⁠ c’est la position que vous défendez, me semble-t-il, et je l’entends –, pourquoi donc établir des critères ? Et si ces critères, plus ou moins précis, existent, alors le médecin sera simplement là pour constater qu’ils sont respectés.
    Avec ce texte, vous prévoyez des dispositions qui impliquent totalement les médecins. Doublement même, puisqu’un même médecin peut recevoir la demande, valider les critères et exécuter le geste. Ne dites pas que la responsabilité des médecins n’est pas engagée et que seul le patient est concerné, c’est faux ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1823 rectifié, par le groupe Horizons & indépendants ; sur l’amendement no 1056, par le groupe Rassemblement national ; sur l’amendement no 1722 rectifié, par les groupes Ensemble pour la République et Horizons & indépendants ; sur les sous-amendements nos 2706 et 2707, par le groupe Droite républicaine.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Défavorable. Vous souhaitez judiciariser la procédure de validation de l’expression libre et éclairée. La collégialité, que vous remettez en cause –⁠ nous allons y venir – est réelle. Ce n’est donc pas un seul médecin mais plusieurs qui devront donner leur avis. Les médecins me paraissent mieux placés qu’un juge pour évaluer les cinq critères, notamment le cinquième.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Ce débat est fondamental. Hier soir, j’ai défendu un amendement visant à faire du recours à l’aide à mourir une décision du patient ; il a été rejeté, cependant nous le demandons de nouveau. Dans la rédaction actuelle, le patient formule la demande d’accès à l’aide à mourir, mais il ne prend pas la décision ; c’est le médecin ou le collège qui la prend en déterminant s’il est éligible. Nous devons être attentifs à toute la subtilité des termes que nous employons.
    Je suis d’accord avec vous, madame Rousseau, c’est le patient qui doit décider. Mais dans le texte, vous regarderez, ce n’est pas le patient qui décide, il formule une demande. Le poids et la responsabilité de la décision reposent sur le collège médical, tandis que la société –⁠ nous-mêmes, en quelque sorte – n’est pas présente dans la procédure. (Mme Sandrine Rousseau proteste.)
    Comme on l’a dit, un don d’organes intrafamilial est soumis à l’autorisation du juge. Nous sommes en train d’élaborer une loi supposée sociétale, dont la société est absente. Nous donnons aux médecins le pouvoir de décider, nous nous en lavons les mains et nous détournons le regard ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et UDR. –⁠ Mme Lisette Pollet applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Monsieur le rapporteur, vous faites preuve de constance en répondant que c’est au médecin d’apprécier le caractère libre et éclairé de la volonté. Mais alors, pourquoi demande-t-on au juge d’autoriser un don d’organe intrafamilial ? Pourquoi la décision de mise sous tutelle ou sous curatelle est-elle soumise au juge ? (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et UDR. –⁠ Mme Lisette Pollet et M. Dominique Potier applaudissent également.)
    Après que le patient a décidé d’accéder à l’aide à mourir –⁠ car c’est à lui de décider –, le médecin vérifie techniquement si les critères médicaux sont remplis. Cependant, l’évaluation de l’aptitude à « manifester sa volonté de façon libre et éclairée » dépend aussi de la société. Or la société est la grande absente de ce texte censé déboucher sur une grande loi sociétale. C’est paradoxal.
    On enferme le malade dans le colloque singulier avec le médecin. Nous viendrons à la collégialité, mais au moment où sa demande est examinée, il pourra n’avoir rencontré qu’un seul médecin. Aucune des dispositions ne prévoit le contrôle du respect des libertés ; c’est pourtant le rôle du juge dans notre société de droit. C’est tout ce que nous demandons, pas davantage. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et UDR. –⁠ M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Lisette Pollet et M. Dominique Potier applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    La société absente de ce débat ? Je veux rappeler que nous sommes élus et que, lorsque nous faisons la loi, nous représentons la société ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. –⁠ M. Cyrille Isaac-Sibille mime le geste de se laver les mains.) La société a été représentée aussi par la Convention citoyenne sur la fin de vie : des citoyens tirés au sort ont déterminé des objectifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.) Ensuite, chacun d’entre nous a tenu des réunions publiques dans sa circonscription, recueillant ainsi l’opinion des citoyens. Enfin, des sondages, même si vous n’y croyez pas toujours, témoignent que la société a évolué sur cette question.

    M. Philippe Juvin

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    Ah, s’il y a des sondages…

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Vous comparez l’aide à mourir au don d’organe intrafamilial, mais celui-ci concerne deux personnes, le donneur et le receveur.

    M. Philippe Juvin

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    Et alors ?

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Seule la personne qui demande à accéder à l’aide à mourir est concernée par la procédure. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    M. Philippe Juvin

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    Pas seulement !

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Enfin, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : la décision de la sédation profonde et continue jusqu’au décès n’est pas prise par une quinzaine de médecins, même lorsque le patient est hospitalisé dans une unité de soins.

    M. Philippe Juvin

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    Vous mélangez tout, c’est un minestrone !

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Il ne faut pas exagérer, ce n’est pas un convoi de médecins qui décide –⁠ souvent, cela se résume à un médecin, qui recueille éventuellement le conseil d’un cancérologue, une infirmière et un aide-soignant. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Ségolène Amiot applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Monsieur Juvin, nous parlons de vie et de mort. Le sujet est trop grave pour que vous évoquiez un minestrone.
    Le médecin a un rôle majeur, car c’est lui qui prend la décision, sur le fondement de critères médicaux. En quoi la procédure du don d’organe intrafamilial est-elle différente ? Parce qu’elle implique un bénéficiaire, celui qui reçoit le don. La demande d’aide à mourir, quant à elle, relève d’une décision du patient, laquelle est soumise à un avis médical, en fonction des critères que nous avons déjà évoqués.

    M. Philippe Juvin

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    Là aussi, il y aura des bénéficiaires, les héritiers !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Pas toujours !

    (L’amendement no 425 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 1461.

    Mme Annie Vidal

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    Il s’inspire d’une exigence centrale de la législation belge : il tend à préciser que le médecin doit mener avec le patient plusieurs entretiens, espacés d’un délai raisonnable au regard de l’évolution de l’état de ce dernier.
    La réalité de la souffrance, le caractère incurable de la maladie avec un pronostic vital engagé et l’expression d’une volonté libre et éclairée doivent être examinés dans le temps. Cette période d’échange et de maturation permet de s’assurer de la constance de la demande et de prévenir des demandes de mort formulées sous l’effet d’une détresse ponctuelle, notamment après l’annonce d’une pathologie grave et incurable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    Vous nous renvoyez souvent aux articles ou aux alinéas suivants, aussi je vous demande de m’indiquer à quel endroit précis du texte il est prévu que le médecin vérifie que le malade a toujours sa capacité de discernement pour réitérer une ultime fois sa demande.
    On est dans une société où il peut y avoir des pressions. Vous avez dit qu’il n’y avait pas de bénéficiaires dans cette procédure, que toutes les familles n’hériteront pas.

    M. René Pilato

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    Nous avons la solution : supprimer l’héritage !

    Mme Justine Gruet

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    Mais il suffit d’une personne. En tant que législateur, nous nous devons de la protéger ! Sans extrémisme ou idéologie aucune, je vous demande de m’expliquer quel alinéa du texte permet de contrôler que la demande n’est pas le fruit d’une pression sociale, familiale, ou d’un abus de faiblesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Gérault Verny applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Madame Gruet, je connais votre travail et je sais que vous avez plus que lu le texte. Je citerai, entre autres, l’alinéa 2 de l’article 6 et l’alinéa 3 de l’article 9. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1461.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        124
            Nombre de suffrages exprimés                122
            Majorité absolue                        62
                    Pour l’adoption                54
                    Contre                68

    (L’amendement no 1461 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 601 rectifié, 1638 rectifié, 1823 rectifié, 705 rectifié, 2226, 2661 rectifié, 2662, 1056, 1424, 90, 2010, 1722 rectifié et 1723 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements identiques nos 1722 rectifié et 1723 rectifié font l’objet de plusieurs sous-amendements.
    La parole est à Mme Sabine Thillaye, pour soutenir l’amendement no 601 rectifié.

    Mme Sabine Thillaye

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    Le texte ne garantit pas une véritable évaluation collégiale de la demande d’aide à mourir. Il se limite à un recueil d’avis consultatifs, laissant le médecin décider seul de l’éligibilité du patient. Une décision aussi grave requiert une collégialité et, quand cela est possible, des réunions physiques des professionnels. Tel est le sens de l’amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1638 rectifié.

    M. Thibault Bazin

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    Voici un amendement structurant que vous pourriez sous-amender, comme c’est l’usage quand on reconnaît l’autre comme force de proposition. Mais je crains que ce ne soit pas la méthode que vous avez retenue…
    Mon amendement prévoit qu’en cas de doute sur l’expression libre et éclairée de la personne –⁠ je parle bien de doute, non de « doute sérieux », un psychiatre participe au collège pluridisciplinaire. Il prévoit également que le médecin traitant, s’il n’est pas celui qui a reçu la demande du patient, est invité à faire partie du collège.
    Le collège pluridisciplinaire se concerte en présentiel, car le sujet est trop grave pour que l’on en discute à distance. Les médecins du collège –⁠ le médecin qui instruit la demande, le psychiatre ou le neurologue, si vous sous-amendez en ce sens, le spécialiste de la pathologie – peuvent recueillir l’avis d’autres professionnels.
    Enfin, le collège peut, à la demande de la personne, recueillir l’avis de la personne de confiance, si elle existe. C’est une mention qui ne figure pas dans votre amendement, monsieur le rapporteur.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1823 rectifié de Mme Nathalie Colin-Oesterlé est défendu.
    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 705 rectifié.

    M. Dominique Potier

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    Je dénonce avec fermeté l’illusion et le mensonge que véhicule l’utilisation du terme « collégialité » : c’est une imposture totale. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
    L’amendement que j’ai cosigné avec Jérôme Guedj –⁠ qui, contrairement à moi, soutient ce texte – garantit une véritable collégialité, pour un minimum de sécurité. Il tend à réunir la personne de confiance, le médecin traitant et tous ceux qui forment un entourage fraternel autour du malade. En effet, comment peut-on affirmer que le colloque singulier entre un médecin et la personne souffrante, dont le discernement peut être altéré, puisse suffire à déterminer une décision aussi importante ?
    Vous avez évoqué le don d’organe ; de nombreux autres exemples de la vie civile –⁠ une expulsion locative, une décision de surendettement – font l’objet de mille contrôles et vérifications, donnent lieu à des recours ; ce sont des procédures où toutes les parties sont représentées et défendues. C’est cela, l’État de droit. Mais pour cette décision d’une tout autre importance, le médecin est à la fois expert, décideur et exécutant. C’est dramatique. Faire société, c’est appeler la société, par la pluralité des expertises, par la fraternité des proches, à accompagner la personne dans son ultime décision.
    Lorsqu’une personne, dans un mal-être psychologique, s’apprête à prendre une mauvaise décision, on l’invite à prendre du temps, à prendre du recul, à en parler aux autres. C’est ce que George Orwell appelait « la décence commune ». Malheureusement, nous avons là un itinéraire bien différent, totalement déshumanisé.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2226 de Mme Delphine Lingemann est défendu.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 2661 rectifié.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous sommes un certain nombre à être très circonspects face à la procédure proposée. Comme l’a dit notre collègue Potier, il est choquant que l’on utilise le terme de collégialité. Je le dénonce une nouvelle fois : non, il ne s’agit pas d’une véritable collégialité !
    Vous pouvez ne pas être d’accord, mais permettez-nous de développer nos arguments. D’abord, la décision d’éligibilité doit être issue d’une collégialité d’évaluation, et non seulement procédurale. Il faut bien s’assurer que cette collégialité est réelle, qu’elle est intervenue à différentes étapes.
    Ensuite, il n’a pas été tenu compte de toutes les recommandations formulées par la Haute Autorité de santé (HAS), ni dans le texte, ni dans les amendements du gouvernement et du président de la commission des affaires sociales. Or la décision à prendre est grave : il y a de la vie d’un patient. Des garanties doivent être données, afin que la collégialité ne soit pas un vain mot, mais une réalité. Notre combat sera de garantir une collégialité d’évaluation et procédurale, qui prenne en compte l’avis de celles et ceux qui y auront contribué. C’est essentiel.

    Mme la présidente

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    Vous conservez la parole, pour soutenir l’amendement no 2662.

    M. Patrick Hetzel

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    La HAS insiste sur le fait qu’une procédure collégiale nécessite une réunion, voire plusieurs, si cela ne retarde pas la mise en œuvre des moyens adaptés pour soulager le patient. La réunion doit se dérouler en présentiel, le recours à la visioconférence ne devant se faire que dans l’intérêt du patient, quand le délai imparti l’exige.
    Selon la HAS, la délibération collective est constituée de trois grandes étapes : une étape individuelle, où chaque acteur construit son argumentation, une étape collective, puis une étape conclusive, où tout le monde participe à la prise de décision. Ces conditions ne sont actuellement pas réunies.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thomas Ménagé, pour soutenir l’amendement no 1056.

    M. Thomas Ménagé

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    Nous abordons un élément essentiel des débats, qui mobilise, sur tous les bancs de cet hémicycle, les opposants comme les partisans du texte. Si je suis favorable au texte, je considère que les garde-fous ne sont pas suffisamment développés.
    Comparons la procédure de l’aide à mourir avec celle prévue par la loi Claeys-Leonetti. Pour la décision de plonger le patient dans une sédation profonde et continue jusqu’au décès, une collégialité est prévue. Or pour une décision irréversible –⁠ l’administration d’un produit létal –, qui a un effet supérieur, aucune vraie collégialité n’est prévue.
    Cela interroge, comme le montrent tous les amendements qui ont été déposés. L’approche doit être pluridisciplinaire, afin d’éviter le poids moral d’une décision que le médecin prendrait seul, malgré les avis consultatifs, car il n’y a aucun retour en arrière possible.
    Il faut aussi écouter les médecins : lors des auditions menées par la commission spéciale l’an dernier, le président de l’Ordre des médecins avait interpellé la représentation nationale sur la nécessité de renforcer la collégialité.
    Enfin, cette collégialité a également été réclamée lors de la Convention citoyenne. Presque tous ces amendements diffèrent par leur rédaction –⁠ j’espère que nous-mêmes ou nos collègues sénateurs arriverons à trouver une version qui contente tout le monde. Celui-ci vise à garantir, outre la collégialité, l’absence de lien hiérarchique entre les médecins qui participeront à la décision et prévoit l’intervention d’un psychiatre. (Applaudissements sur certains bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1424.

    M. Yannick Monnet

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    Pour l’intelligibilité de nos débats, permettez-moi, chers collègues, une petite critique : chaque fois que nous abordons un sujet, on a l’impression que ce sera le seul déterminant en matière d’accès à l’aide à mourir. Je rappelle que ce texte prévoit d’autres conditions très strictes ! Par ailleurs, il est faux de dire que le collège donne son accord : il examine si toutes ces conditions sont réunies et émet un avis concernant la demande formulée par le patient. N’inversons pas les choses !
    Madame la présidente, je retire l’amendement ; non que la collégialité ne constitue pas un point central, un point d’équilibre, mais le no 1722 rectifié, dû au président Valletoux, est meilleur et mieux écrit. Je me suis seulement permis de proposer un sous-amendement, n’étant pas opposé à un plus grand formalisme de l’avis rendu par le collège.
    Une dernière remarque : nous aurions effectivement pu nous engager dans une procédure où le juge décide, mais le texte n’est pas conçu en ce sens ; il aurait fallu en élaborer un autre, où ce soit la justice qui s’empare de la demande. Partant de là, il faut, pour garantir l’équilibre de ce texte, renforcer la collégialité.

    (L’amendement no 1424 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 90.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    « Collégial » n’est pas le bon terme. Pour discuter des cas de pathologies graves, les médecins tiennent tous les jours des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) où le chirurgien, le radiothérapeute, l’oncologue, l’anatomopathologiste se concertent afin de savoir quel est le meilleur soin à apporter. C’est un peu ce que nous nous apprêtons à instaurer : une concertation pluridisciplinaire entre professionnels de santé, mais non un collège.

    M. Yannick Monnet

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    Ça revient au même !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Non, car un collège prendrait une décision. Une fois achevées les interventions au sujet de cette discussion commune, qu’allons-nous faire dans cet hémicycle ? Voter ! Il s’agit un peu de la même chose. Nous ne pouvons intituler « collège » une concertation pluridisciplinaire qui laissera un unique médecin porter le poids de la décision finale. Vous parlez de la société, chers collègues : elle s’implique dans nos débats, mais c’est à nous qu’il reviendra d’adopter le texte. De même, ce médecin se retrouvera bien seul.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 2010.

    M. Christophe Bentz

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    En défendant nos amendements de suppression de l’article, nous avons dit notre grande inquiétude. Comme nos collègues Potier ou Hetzel, nous estimons qu’il n’y a, en réalité, pas de collégialité. Le fait qu’un médecin en consulte un autre ne constitue même pas une concertation !
    Nous appelons votre attention sur le fait que cette absence de collégialité est dangereuse. L’amendement no 2010  vise à instaurer un vrai collège, qui comprenne des médecins spécialistes de la douleur –⁠ je rappelle que ce mot, central dans nos débats, est absent du texte – ou encore un psychiatre. Pour répondre à une demande de mort, grave, irréversible, ce serait bien le minimum. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Je demande une suspension de séance, madame la présidente, le temps que soit examinée la recevabilité d’un certain nombre de nos sous-amendements à l’amendement de M. Valletoux.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix heures trente-cinq, est reprise à dix heures quarante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1722 et 1723 rectifiés, qui font l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 2727, 2724, 2726, 2706, 2721, 2707, 2722, 2718, 2719, 2717 et 2723.
    Les sous-amendements nos 2706 et 2721, 2707 et 2722, 2718 et 2719 sont identiques.
    Je vous préviens par ailleurs que l’adoption des amendements nos 1722 et 1723 rectifiés ferait tomber les amendements suivants jusqu’au no 1420 inclus.
    La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 1722 rectifié.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Je constate que ces amendements identiques suscitent l’intérêt, puisqu’ils ont été considérablement sous-amendés durant les dernières minutes et continueront sans doute de l’être au cours de mon intervention. C’est très bien : le débat doit se coaliser –⁠ pardon, se coaguler…

    M. Patrick Hetzel

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    Lapsus révélateur !

    M. Philippe Juvin

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    La coagulation peut être dangereuse, monsieur le président, méfiez-vous !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    …en vue d’une coalition de vues partagées.
    La collégialité constitue en effet un sujet majeur ; depuis le début de l’examen de l’article 6, nous avons connu toutes sortes de nuances dans les interventions portant sur la manière de l’envisager.
    Je rappellerai tout d’abord que le code de la santé publique érige la collégialité en principe régissant la plupart des démarches médicales. C’est une incitation éthique au partage d’analyses, de diagnostics, afin d’élaborer un avis médical. La collégialité est systématiquement mise en avant dans le cadre des démarches éthiques, dont elle représente une dimension importante. Le terme peut également désigner, au sein du code de la santé publique, une procédure organisée.
    J’ai dit un peu vite, lorsque nous discutions des amendements de suppression de l’article, que la loi Claeys-Leonetti prévoyait une procédure de collégialité. Celle-ci relève en effet du règlement, la loi n’allant pas jusqu’à décrire l’organisation de cette collégialité. Reste que la déclinaison réglementaire a précisé cette organisation, reprise au sein de l’avis de la HAS et jamais remise en cause par quiconque sur ces bancs, que ce soit lors de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti ou au cours des travaux préparatoires à l’examen du projet de loi et du présent texte.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Très juste !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    L’amendement reprend les dispositifs législatifs et réglementaires de la loi de 2016. J’apprécie toujours les interventions de notre collègue Potier, mais il n’en a pas moins employé, au sujet de la collégialité, le terme « imposture ». Or, monsieur Potier, le texte de l’amendement Guedj, le no 705 rectifié, que vous défendez, n’est pas très éloigné du mien.

    M. Dominique Potier

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    Ni du texte actuel !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    C’est vrai, le dessin doit être précisé, et c’est bien pourquoi j’ai déposé cet amendement. Encore une fois, la collégialité n’est pas une notion abstraite, mais quelque chose d’éthique qui transparaît en permanence dans le code de la santé publique et se trouve même décrit pour certaines procédures, peu nombreuses –⁠ nous avons parlé de la loi Claeys-Leonetti, nous aurions pu mentionner les soins psychiatriques sans consentement ou l’assistance médicale à la procréation.
    L’amendement prévoit que le médecin saisi d’une demande d’aide à mourir réunit un collège pluriprofessionnel, composé de lui-même, d’un médecin spécialiste de la pathologie du patient, sans qu’il existe de lien hiérarchique entre les deux médecins, d’un auxiliaire médical ou d’un aide-soignant qui intervient dans le traitement de la personne ou, à défaut, d’un autre auxiliaire médical.
    La réunion du collège pluriprofessionnel se déroule en la présence physique de tous les membres. En cas d’impossibilité –⁠ si, par exemple, le médecin spécialiste exerce dans un centre hospitalier universitaire (CHU) situé à plusieurs centaines de kilomètres –, il peut être recouru à des moyens de visioconférence ou de télécommunication. Les médecins présents dans l’hémicycle savent que la collégialité ne s’exerce pas toujours dans le cadre d’une réunion physique ; ainsi, les centres experts qui travaillent pour des hôpitaux de proximité sont sollicités par visioconférence.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Exactement !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    La visioconférence permet de transmettre les dossiers de patients, d’accéder à des analyses poussées et à de nombreux documents tels que des radiographies. Le médecin n’a donc pas besoin d’être physiquement présent pour accéder à toutes les informations relatives au cas du patient sur lequel il est amené à se prononcer. Cela se pratique déjà au quotidien, et ce depuis longtemps.
    Cet amendement tient compte de nos débats en commission. Les sous-amendements permettront peut-être de préciser certaines modalités –⁠ nous serons attentifs aux avis des rapporteurs et de Mme la ministre en la matière. Dans la mesure où il reprend les procédures en vigueur pour la démarche de sédation profonde et continue, je pense qu’il sera de nature à rassurer nos collègues, sur l’ensemble des bancs.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur Panifous, pour soutenir l’amendement no 1723 rectifié.

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Cet amendement identique prend en compte les observations qui nous ont été faites sur la procédure collégiale, une procédure qui mérite d’être précisée et confortée dans son principe. Je souligne qu’il s’agit bien d’une procédure collégiale, non d’une décision collégiale. Le principe de collégialité de la procédure prévaut pour la sédation profonde et continue –⁠ nous avons choisi, pour la présente proposition de loi, de calquer ce fonctionnement.
    Permettez-moi de détailler les modifications que nous proposons d’apporter aux modalités de convocation du collège, à sa composition, aux conditions de réunion et au mode de restitution de ses décisions.
    D’abord, le médecin qui a reçu la demande d’aide à mourir est compétent pour mettre en place la procédure collégiale : il sera donc chargé de réunir le collège pluriprofessionnel. Ce collège sera composé du médecin lui-même, d’un médecin spécialiste de la pathologie du patient si le premier ne l’est pas, et d’un auxiliaire médical ou d’un soignant intervenant dans le traitement de la personne –⁠ ou, à défaut, d’un autre auxiliaire médical. Le médecin peut également convier à la réunion du collège d’autres professionnels de santé ou des professionnels travaillant dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, ainsi que des psychologues qui sont intervenus dans le traitement du patient.
    Plusieurs demandes ont été formulées en ce sens : nous précisons que, lorsque le patient fait l’objet d’une mesure de protection juridique, la personne chargée de la mesure de protection peut également faire des observations. Le médecin doit en tenir compte et les communiquer à l’ensemble du collège pluriprofessionnel.
    La réunion du collège pluriprofessionnel devra se dérouler en la présence physique de tous les membres, même s’ils sont simplement conviés. La règle de base est bien celle d’une réunion physique. Dans les cas où cette dernière serait impossible, la réunion pourra se tenir à distance. J’appartiens à un territoire où il est difficile d’imaginer faire se déplacer un oncologue. Compte tenu du phénomène de désertification médicale, que beaucoup de députés ici connaissent car elle est une réalité dans la majeure partie du pays, cette exception est nécessaire pour garantir l’effectivité de l’accès au droit à l’aide à mourir sur l’ensemble du territoire.
    Enfin, à l’alinéa 12, il est précisé que la décision sur la demande d’aide à mourir est prise par le médecin à l’issue de la procédure collégiale. Nous proposons une procédure collégiale, à l’image de celle suivie pour la sédation profonde et continue et qui n’a jamais été remise en cause, mais la décision reviendra bien au médecin, qu’il notifiera à la personne.
    Ces amendements identiques, qui visent à encadrer l’exercice de cette collégialité, prennent en compte, me semble-t-il, l’essentiel de vos demandes.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 2727.

    M. Thibault Bazin

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    Votre intention est louable et je la salue. Vos amendements montrent, comme nous le rappelons depuis un an, que la rédaction de cet article n’est pas satisfaisante, mais eux-mêmes ne sont pas suffisants. Sur certains aspects, ils entraînent même une régression du texte.
    La décision dont nous parlons est grave. Elle répond à la demande de personnes qui souffrent. J’estime qu’il faut au moins que l’avis soit motivé et écrit. Nous devons aussi garantir la bonne connaissance de l’état du patient : que deux médecins au moins le voient me semble un minimum. Si le patient le souhaite, la personne de confiance doit être présente si le patient le souhaite.
    Nous devons aussi nous assurer que les conditions seront réunies pour permettre la tenue d’une discussion sérieuse, tant la décision est importante. Or une discussion est toujours beaucoup plus sérieuse lorsqu’elle se déroule en présentiel plutôt que par visioconférence.
    Vos deux amendements ne reprennent pas totalement la déclinaison réglementaire de la loi Claeys-Leonetti, que vous avez plusieurs fois évoquée, puisqu’ils ne prévoient pas d’associer l’entourage du patient et l’équipe de soins qui l’accompagne.
    Ce premier sous-amendement prévoit la présence de l’équipe soignante. C’est un élément important, qui assure que l’on connaît bien le patient et que ses besoins sont pris en compte.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir le sous-amendement no 2724.

    M. Philippe Juvin

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    Nous sommes vraiment au cœur du sujet, sur le fond comme sur la forme. Cette proposition de loi affirme des principes, mais ils ne sont pas traduits concrètement dans les dispositions. Nous le regrettons.
    On nous dit qu’il s’agit d’une loi sur la fin de vie, mais nous comprenons que certains patients ayant encore plusieurs années à vivre pourront être éligibles. On nous dit que les critères d’accès à la demande d’aide à mourir sont très stricts, mais ils ne le sont pas. On nous dit que le texte permet de se prémunir des abus de faiblesse, mais il n’est pas prévu que le juge contrôle l’absence d’un abus de faiblesse. On nous dit qu’une procédure collégiale est prévue, mais la procédure décrite dans le texte ne l’est pas.
    L’amendement présenté par M. le président Valletoux ne change qu’une chose : il introduit la notion de réunion. Elle est certes importante, mais dans le fond, rien ne change. Il est toujours admis que le deuxième médecin puisse être dispensé de voir physiquement le patient. Cette fameuse réunion dont tout le monde se félicite ne réunira donc que le premier médecin et un auxiliaire médical –⁠ c’est en tout cas ce que je comprends en lisant le texte ! Le psychiatre ne sera pas présent. Vous avez même supprimé la mention de la présence de la personne de confiance, alors qu’elle figurait initialement dans le texte. De même, vous avez supprimé l’avis écrit.
    Permettez-moi de vous rappeler comment les choses se passent quand on envisage de ne pas envoyer un patient en réanimation et d’arrêter ou de limiter les soins. La famille du patient, le médecin qui l’a examiné et formulé la demande de limitation de soins ainsi qu’un second médecin se retrouvent à son chevet, même s’il est 2 heures du matin : les personnes se déplacent physiquement.
    Pardon de vous le dire, mais vous proposez une procédure très cosmétique, qui n’a rien de collégial.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 2726.

    M. Thibault Bazin

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    Ce deuxième sous-amendement prévoit que les professionnels amenés à se prononcer dans le cadre de la procédure collégiale examinent le malade. Cela leur permettra de rendre un avis réellement éclairé. On ne parle pas de cinquante professionnels, mais de trois : le médecin qui instruit la demande, celui qui connaît la pathologie, et l’auxiliaire médical. Il s’agit là d’une garantie minimale.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux sous-amendements identiques, nos 2706 et 2721.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2706.

    M. Patrick Hetzel

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    Vous avez enfin pris conscience qu’il était nécessaire de se pencher sur la question de la collégialité. C’est une bonne chose. Mais vous avez proclamé qu’il n’y aurait pas de collégialité de la décision, que la collégialité se limiterait à l’expertise médicale. C’est bien cela qui nous trouble.
    Comme hier, je me permets de citer un exemple issu du domaine judiciaire. Dans les formations de jugement comprenant un président et deux assesseurs, la décision est discutée, jusqu’à aboutir à un vote concluant. Il nous faut tendre vers une organisation similaire. Nous en sommes très loin.
    Surtout, vous proposez de supprimer la mention de la personne de confiance, ce que nous ne comprenons pas. Vous dites vous-mêmes qu’il ne faut pas que la personne meure seule. Or, si on veut créer du collectif, pourquoi ne pas y intégrer la personne de confiance ?
    Enfin, vous proposez de supprimer le caractère écrit de l’avis. Ces éléments sont très troublants. Vos amendements ne répondent pas à nos observations, nous ne pouvons nous en satisfaire.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 2721.

    M. Thibault Bazin

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    Vos amendements proposent de supprimer l’alinéa 10, qui prévoit que le médecin recueille l’avis de la personne de confiance, à la demande du patient et s’il en a désigné une. Je propose de maintenir cette disposition. Dans les situations couvertes par la loi Claeys-Leonetti, à laquelle vous vous référez pour ce qui est de la procédure, la personne de confiance est présente !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux sous-amendements identiques, nos 2707 et 2722.
    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir le sous-amendement no 2707.

    M. Philippe Juvin

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    La décision relative à une demande d’aide active à mourir est une décision grave, qui ne peut être prise à l’issue d’une visioconférence. Le médecin qui examine le dossier doit voir le patient, physiquement.
    On dit que le secret médical couvre tout ce qui est venu à l’attention du médecin ainsi que tout ce qu’il a compris en voyant le patient : même si l’on ne connaît pas le dossier, il suffit que l’on voie le malade, on sait déjà des choses. Il est donc nécessaire que le médecin voie physiquement le patient, ce qui n’est pas prévu en l’état du texte. La téléconsultation nous semble une très mauvaise idée.
    La réunion du collège, où se prend la décision, ne peut pas non plus se dérouler par visioconférence. C’est l’objet de ce sous-amendement.
    Autre point important : l’alinéa 7 de l’article prévoit la présence d’un auxiliaire médical qui intervient dans le traitement du patient. Vous avez raison, c’est indispensable ; mais l’article précise qu’à défaut, on peut faire appel à un autre auxiliaire médical –⁠ qui ne connaîtrait donc pas le patient. Parmi ces auxiliaires, on trouve les infirmiers, les kinésithérapeutes, mais aussi les pédicures-podologues : je n’imagine pas qu’on demande à un pédicure-podologue qui ne connaît pas le patient de participer à une telle décision ! Ce n’est pas votre volonté, bien sûr, mais il faut être rigoureux dans l’écriture de la loi.
    Cette procédure est tout sauf collégiale, mais aussi tout sauf rigoureuse.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 2722, identique au précédent.

    M. Thibault Bazin

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    Ce quatrième sous-amendement vise à exclure la possibilité de recourir à la visioconférence pour tenir la réunion, dont je rappelle qu’elle compte trois participants : le médecin qui instruit la demande, le spécialiste de la pathologie, l’auxiliaire médical évoqué par Philippe Juvin.
    C’est aussi une question de cohérence : ces trois professionnels doivent avoir vu le patient.
    Nous avons beaucoup discuté ces derniers jours du consentement libre et éclairé, et l’on nous a assuré que nous pouvions être rassurés par la présence du collège. Mais comment vérifier un consentement libre et éclairé à distance ? Vous me direz qu’en cas de doute du médecin qui instruit, on aura recours à un psychiatre –⁠ nous examinerons un amendement du gouvernement, no 2657, sur ce point. Toutefois, s’il n’y a pas de doute –⁠ et personne n’est infaillible –, alors il n’y aura pas de psychiatre.
    Si nous voulons vérifier l’ensemble de critères et prendre au sérieux la demande du patient qui souffre, ces trois personnes doivent le voir ; et puisqu’elles sont sur place, il est logique que la réunion se fasse en présentiel. Nous le savons tous pour pratiquer régulièrement des visioconférences : la visioconférence n’est pas la meilleure manière d’évoquer des sujets aussi graves, qui nécessitent des échanges.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir le sous-amendement no 2718.

    M. Yannick Monnet

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    Je défendrai en même temps le sous-amendement no 2717, car ils ont le même objet.
    Monsieur Bazin, la cohérence à laquelle vous appelez est nécessaire ; la bonne foi aussi. On ne peut pas à la fois prétendre vouloir de la collégialité et créer les conditions pour qu’il n’y en ait pas. Or c’est ce que vous faites : vos sous-amendements imposent de telles conditions qu’il y a très peu de chances qu’il y ait de la collégialité au sens où vous l’entendez.

    Mme Danielle Simonnet

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    Eh oui !

    M. Yannick Monnet

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    Mes deux sous-amendements visent à formaliser la dimension collective de la procédure. Même si c’est le médecin qui prend la décision, il doit pouvoir s’appuyer sur un avis non seulement collégial, mais aussi écrit et motivé. Ce serait de surcroît une garantie pour le médecin qui instruit la demande.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir le sous-amendement no 2719, qui est identique au précédent.

    Mme Justine Gruet

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    Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Le délai –⁠ quinze jours au plus, sans minimum – est déjà court : il est donc nécessaire de prendre le temps de laisser des traces écrites. Tel est l’objet de ce sous-amendement.
    Dans l’amendement, il n’est en effet pas prévu d’avis écrit du collège médical. Pourtant, lorsque l’on limite les soins, la formation collégiale émet un avis écrit, afin d’assurer une traçabilité de la décision dans le dossier.
    Nous avons déjà beaucoup parlé du caractère écrit ou non de la procédure. Nous avons adopté un amendement qui dispose que la demande expresse du patient se fait par écrit « ou par tout autre mode d’expression adapté à ses capacités » : la demande écrite n’est dans ce cas pas formalisée. J’aimerais que l’avis du médecin et celui du collège soient écrits, de manière à laisser une trace –⁠ comme c’est d’ailleurs le cas pour toute procédure médicale.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 2717 a déjà été défendu par M. Monnet.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 2723.

    M. Thibault Bazin

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    Ce dernier sous-amendement tend à préciser que le médecin prend la décision « en prenant en compte l’avis écrit et motivé de chaque membre » du collège. L’amendement ne comporte en effet aucune référence à un écrit, ce qui me paraît regrettable.
    Monsieur Monnet, j’essaie d’être de bonne foi. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est bien de le préciser parce que d’habitude, ce n’est pas évident.

    M. Thibault Bazin

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    Je ne vois pas en quoi des sous-amendements qui visent à impliquer l’équipe soignante ou l’entourage du patient, ou encore qui demandent que le patient soit vu par le médecin en présentiel empêcheraient la collégialité.
    Je chemine moi aussi au cours des débats. Il nous a été dit hier soir, pour nous rassurer, que la procédure retenue était inspirée de celle prévue pour l’application de la loi Claeys-Leonetti. Je me suis reporté à cette procédure réglementaire, dont la dernière version remonte à 2021. La personne de confiance comme l’équipe de soins y sont mentionnées.
    Je vous prends donc au mot : mes sous-amendements ne font que compléter vos propositions, en apportant ce qui est prévu dans le texte que vous revendiquez comme référence.

    Mme la présidente

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    Dans la discussion sur ces amendements, je donnerai la parole à davantage d’orateurs que deux pour et deux contre. Je m’en tiendrai néanmoins à une expression par groupe (M. Dominique Potier proteste) ; je vous laisse me dire qui sera le porte-parole de chacun.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures dix.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements et sous-amendements ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Parmi les amendements, deux me semblent parfaitement correspondre à ce que nous souhaitons.
    Je souligne combien la commission des affaires sociales joue ici tout son rôle ; on mesure bien tout l’intérêt de son travail préalable. Le président Valletoux, Laurent Panifous et moi-même avons non seulement écouté, mais entendu, je crois, les réflexions et préconisations présentées notamment par nos collègues Juvin, Gruet, Hetzel et Bazin.
    Je pense donc que les amendements présentés par Frédéric Valletoux et Laurent Panifous répondent à nombre des objections soulevées au cours du débat.
    Qu’est-il proposé ? D’abord, d’organiser une réelle réunion ; ensuite, d’instaurer une règle de présence physique des membres du collège, avec évidemment une exception en cas d’impossibilité ; enfin, et surtout, de clarifier la rédaction de l’alinéa 12, en précisant que le médecin prend la décision à l’issue de la procédure collégiale –⁠ car il s’agit bien d’une procédure collégiale.
    La rédaction proposée est identique –⁠ j’y insiste – à celle de l’article R. 4127-37-2 du code de la santé publique, qui traite de la décision de limitation ou d’arrêt de traitement.
    Ces amendements identiques sont donc tout à fait adaptés à ce que nous recherchons.
    J’émettrai en outre un avis favorable sur deux sous-amendements identiques, qui me semblent très intéressants : le no 2721 de M. Bazin et le no 2706 déposé par M. Juvin, Mme Gruet et M. Hetzel.
    Il est en effet nécessaire, à mes yeux, de rétablir le recueil de l’avis de la personne de confiance –⁠ si, bien sûr, elle a été désignée. Plusieurs de nos collègues des groupes Les Républicains, La France insoumise et Socialistes et apparentés avaient d’ailleurs insisté sur ce point.
    Si une telle disposition correspond à l’esprit du texte initial, je tiens en revanche à souligner que cet avis doit être recueilli en dehors de la procédure collégiale. Une personne de confiance ne doit pas être consultée dans le cadre d’une réunion de professionnels de santé.
    Je suis défavorable à l’ensemble des autres sous-amendements.
    En résumé : tout Valletoux-Panifous et rien que Valletoux-Panifous,…

    M. Hadrien Clouet

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    Tout le programme et rien que le programme !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    …mais avec les sous-amendements de MM. Juvin et Bazin.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Comme vient de le rappeler M. le rapporteur général, le texte qui vous est soumis est, dans son principe, le miroir de la loi Claeys-Leonetti. Il s’agit de prévoir une procédure collégiale qui permette d’engager une réflexion collective et de recueillir différents avis. Il n’empêche que celui qui prend la décision, c’est le médecin qui suit et connaît le patient –⁠ il est à la fois le responsable et le décideur.
    Je pense, moi aussi, que, grâce aux amendements identiques nos 1722 rectifié du président Valletoux et 1723 rectifié du rapporteur Panifous, la rédaction proposée pour la procédure sera beaucoup plus précise. C’est pourquoi j’émets un avis favorable sur ces deux amendements.
    J’aimerais revenir à présent sur un commentaire de M. Juvin à propos de l’auxiliaire médical. Vous connaissez trop bien le milieu médical, monsieur le député, pour ne pas savoir que ces termes désignent l’aide-soignante ou l’infirmier. Ces hommes et ces femmes sont aux côtés du patient au quotidien, l’écoutent et développent un lien de proximité avec lui. Il est donc très important de recueillir leur avis. C’est pourquoi nous avions expliqué l’an dernier, lors de nos débats dans l’hémicycle sur le projet de loi, que ces professionnels devaient faire partie du collège chargé de se prononcer.
    Je rappelle au passage que c’est le médecin, responsable de la décision, qui détermine quelles sont les personnes qu’il veut solliciter et interroger.
    Enfin, je comprends que, dans leurs sous-amendements, M. Juvin, M. Bazin, M. Hetzel et Mme Gruet mettent en avant la nécessité de consulter la personne de confiance. Convenons néanmoins que cet avis doit être sollicité en dehors de la procédure collégiale, car celle-ci vise à recueillir le point de vue médical. Il reste que l’adoption des sous-amendements nos 2706 et 2721 permettrait que le médecin chargé de prendre la décision interroge la personne de confiance. C’est pourquoi j’y suis favorable.
    Avis défavorable sur le reste des amendements et sous-amendements.

    Mme la présidente

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    Avant la suspension, j’avais proposé de donner la parole à un membre de chaque groupe dans le cadre de cette discussion commune. Cependant, comme il s’agit d’un débat important et que, au sein de certains groupes, les avis sont divergents, je laisserai deux orateurs s’exprimer au nom des groupes EPR et socialiste –⁠ si vous en êtes tous d’accord.
    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Le débat est important. Tâchons d’être précis car, face à tous ces amendements et sous-amendements, on peut se perdre.
    Nous souhaitons qu’il y ait un parallélisme des formes entre la procédure Claeys-Leonetti et celle que fixera ce texte. Il convient donc de rester fidèle à l’idée d’une délibération collégiale qui aboutit à une décision prise par le médecin référent. C’est très important.
    Dans le cadre de la procédure collégiale, le médecin référent doit recueillir l’avis d’un autre médecin, avec qui il n’entretient aucun lien hiérarchique et qui est spécialiste de la pathologie du patient, comme le prévoit le texte initial.
    Certes, il est souhaitable de privilégier les réunions physiques. Néanmoins, tout le monde doit bien être conscient qu’il ne sera pas toujours possible de trouver un spécialiste de la pathologie du patient –⁠ oncologue ou neurologue par exemple – disponible pour assister, physiquement, à une réunion pluriprofessionnelle, fixée à une date bien précise, au beau milieu de la Creuse. Soyons raisonnables : vu les déserts médicaux et le manque de spécialistes, une solution autre que la réunion physique doit toujours être possible.
    Je mets en garde plus largement sur le fait que, si l’on fixe trop de conditions à la procédure collégiale, elle ne pourra pas être engagée.
    Les amendements identiques de M. Valletoux et de M. Panifous répondent de façon satisfaisante aux besoins exprimés. Les sous-amendements nos 2706 et 2721 visent simplement à corriger une erreur commise dans ces amendements : s’ils étaient adoptés en l’état, il ne serait plus possible de solliciter l’avis de la personne de confiance, ce qui est pourtant important.
    J’insiste sur un point : même si la procédure collégiale permet de recueillir différents avis, c’est bien le médecin du patient qui prend la décision.

    Mme la présidente

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    Merci, madame la députée.

    Mme Danielle Simonnet

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    Toutes celles et tous ceux qui souhaitent que soit prévue la possibilité d’une contestation… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Ce débat est en effet très important et je vous remercie, madame la présidente, d’avoir assoupli la règle relative aux prises de parole pour cette discussion commune.
    Nous souhaitons l’adoption des amendements défendus avant ceux de M. Valletoux et de M. Panifous –⁠ en priorité, bien sûr, celui de Thomas Ménagé ou celui de Vincent Trébuchet.
    Nous voterons peut-être pour les amendements de M. Valletoux et de M. Panifous mais à la condition qu’ils soient entièrement sous-amendés.
    La loi de 2016 prévoit une collégialité réelle, notamment pour la mise en œuvre de la sédation profonde et continue jusqu’au décès,…

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Non !

    M. Christophe Bentz

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    …autrement dit le soin ultime. Dès lors, comment une telle procédure pourrait-elle ne pas être engagée dans le cas d’une demande de suicide assisté, d’une demande de mort, de l’administration d’une substance létale ?
    Nous souhaitons que la responsabilité d’une décision aussi grave et irréversible soit collective, étendue à l’ensemble du collège pluriprofessionnel, pluridisciplinaire et que celui-ci dispose de tous les éléments –⁠ médicaux, psychologiques, sociaux et humains – liés à ce dossier. Il doit en effet, pour prendre une telle décision, maîtriser l’ensemble des paramètres et connaître la personne dans toutes ses dimensions. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Rembobinons. Tout commence par la demande d’un patient. C’est son choix, sa liberté. On ne demande pas aux médecins de s’exprimer sur ce choix ; on leur demande de vérifier que les critères et la procédure sont bien respectés.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Absolument !

    M. Michel Lauzzana

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    La nuance est d’importance. C’est en effet pour cette raison que la procédure est collégiale mais que la décision revient au médecin qui a recueilli la demande ; la collégialité ne concerne que la vérification des critères.
    Concernant les réunions en présentiel, des réponses ont déjà été apportées. Il faut tenir compte des contraintes temporelles ainsi que territoriales. Je donnerai l’exemple des réunions de concertation pluridisciplinaires en oncologie, au cours desquelles on décide du traitement que l’on proposera au patient. Elles ne se déroulent pas toujours en présentiel, ce que, bien sûr, personne n’a remis en cause car cela créerait trop de contraintes. Calons-nous sur cette pratique. S’il faut avoir recours à une visioconférence, allons-y !
    Pour conclure : oui au Valletoux-Panifous, mais rien que le Valletoux-Panifous. (M. François Cormier-Bouligeon, Mme Stella Dupont et Mme Sandrine Rousseau applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Je rappelle à mon tour que nous parlons d’une relation bilatérale, au cœur du processus d’accompagnement du malade. Nous ne sommes pas dans le cas d’une personne dont le sort serait suspendu à la décision d’un jury. La collégialité est délibérative et non décisionnelle –⁠ ce qui était déjà le cas dans le dispositif prévu par la loi Claeys-Leonetti, contrairement à ce que j’ai pu entendre. Si la procédure prévoit un dialogue entre au moins deux médecins, sans rapport hiérarchique, la décision revient bien au seul médecin référent.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Oui !

    Mme Christine Pirès Beaune

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    On pourrait envisager une décision collégiale dans le cas d’un patient qui n’a pas la capacité de s’exprimer –⁠ il faudrait alors inclure également la personne de confiance dans le collège car la situation serait très différente. Or, parmi les cinq critères cumulatifs énoncés à l’article 4, figure la nécessité que le patient soit « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Je suis donc défavorable aux amendements qui visent à donner un pouvoir décisionnaire au collège.
    Enfin, je note que notre discussion est très centrée sur la collégialité hospitalière. Or un grand nombre de personnes souhaitent mourir –⁠ et meurent – à domicile. J’aimerais donc être rassurée sur le fait que les personnes qui sont éligibles à l’aide à mourir car elles remplissent toutes les conditions d’accès mais qui vivent en milieu rural, de manière très isolée, soient traitées de manière équitable. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Il s’agit d’un moment important du débat.
    Certes, les patients expriment leur volonté mais les médecins sont très engagés. En outre, nous vivons dans une société où tout est judiciarisé –⁠ et ce sera de plus en plus le cas. Les médecins ont besoin qu’un avis collégial soit rendu dans le cadre d’une réunion pluridisciplinaire avant de prescrire, voire d’injecter la substance létale.
    Cet acte, qui est souhaité par le patient, n’est pas banal pour un médecin. Par conséquent, la décision doit être précédée d’une réflexion collégiale. Je suis donc très favorable aux amendements du président Valletoux et de M. Panifous.
    D’autre part, j’estime qu’il faut consulter la personne de confiance, mais pas dans le cadre du collège, qui réunit l’équipe médicale et paramédicale.
    Tous ces avis sont importants, y compris parce qu’il convient de vérifier que l’on n’est pas face à une situation d’abus de faiblesse ; on pourrait en outre repérer à cette occasion une fragilité qui n’aurait pas été identifiée auparavant. La procédure doit être menée efficacement et ne pas prendre trop de temps, mais c’est absolument nécessaire.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Je tiens tout d’abord à saluer ce moment où notre assemblée a travaillé, suspendu la séance, été force de proposition, ce qui aboutit in fine à une proposition du président de la commission, du rapporteur Panifous et de Mme la ministre qui tient la route. C’est comme cela qu’on aime voir fonctionner notre assemblée.
    J’aimerais apporter une précision. Contrairement à la présente proposition de loi, la loi Claeys-Leonetti prévoit qu’il soit tenu compte des directives anticipées, donc que la personne de confiance soit incluse dans la collégialité. Dans la procédure dont nous discutons à présent, il est important pour nous que cette personne soit accompagnante, qu’elle soit à côté de l’équipe collégiale plus médicalisée qui va aider le médecin à déterminer si les cinq critères sont respectés. Nous sommes ravis que la personne de confiance soit raccrochée à cette procédure par l’alinéa 10 de l’article.
    J’invite nos collègues LR…

    M. Thibault Bazin

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    Il n’y a pas de LR, ici ! C’est DR !

    M. René Pilato

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    …à observer que nous sommes capables de tenir compte de leurs amendements lorsqu’ils sont constructifs et apportent un plus au débat.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Nous soutiendrons bien sûr les amendements identiques de M. Valletoux et de M. Panifous. Toutefois, je pense que, comme l’a fait notre collègue Lauzzana, il faut bien dire de quoi on parle. La demande émane d’un malade. Il me semble donc important de contextualiser ce dont il est question. Je crois nous sommes tous ici absolument convaincus que la procédure doit être collégiale. Que la personne de confiance puisse accompagner la procédure collégiale –⁠ je dis bien l’accompagner, c’est-à-dire se trouver à côté d’elle et non en être partie prenante – me paraît important, pourvu que le malade le demande, ainsi que le prévoit le texte.
    D’autre part, comme cela a été dit à plusieurs reprises, garantir la possibilité d’accéder à la téléconsultation, vue comme un moyen complémentaire de parachever l’avis issu de la procédure collégiale, me paraît nécessaire. Je crois avoir entendu tout à l’heure, au cours de nos débats, des propos –⁠ tenus par M. Bazin, il me semble – qui pourraient laisser penser que la téléconsultation ne serait pas aussi sérieuse que le travail en présentiel. Or les professionnels qui travaillent en téléconsultation le font tout aussi sérieusement qu’en présentiel ; il ne faut pas laisser penser le contraire à nos concitoyens.

    Mme la présidente

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    Monsieur Potier, voulez-vous prendre la parole ?

    M. Dominique Potier

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    Oui, madame la présidente ; merci pour l’ouverture dont vous faites preuve.
    On voit bien que l’inspiration philosophique du premier texte était plutôt individualiste, tandis que la loi Claeys-Leonetti procédait plutôt d’une logique personnaliste ; je suis heureux que nous cheminions pour retrouver cet esprit personnaliste. Il s’agit d’un progrès important parce qu’il nous conduit à reconnaître que nous sommes non pas des individus, des atomes isolés dans l’univers, mais bien des personnes reliées les unes aux autres, que nos décisions sont le fruit de nos interactions, de nos relations, de l’interdépendance qui nous unit aux nôtres et qu’elles ont des conséquences pour tous les autres.
    La collégialité réinstalle la société, dans sa pluralité, dans son expertise croisée, dans sa délibération. Je salue ce progrès, permis par le rapporteur Panifous et par le président de la commission. Des lacunes importantes demeurent toutefois. Je citerai simplement celle que notre collègue Monnet, du groupe communiste, a soulignée, en rappelant l’absence préjudiciable d’un avis collégial écrit. Le point le plus important, le point nodal est que cette collégialité remettra un avis à un médecin qui demeurera en dernière analyse l’exécutant de la décision. Je pensais quant à moi qu’il serait prévu qu’une véritable collégialité délibère et prenne in fine une décision, dans l’intérêt de la personne et de la société et sans jamais les opposer, comme cela se pratique en Ehpad lorsqu’il s’agit de décider de mettre fin à un acharnement thérapeutique ou d’envisager une sédation profonde et continue.
    Je me permettrai un dernier clin d’œil, si vous le permettez. Je suis obsédé par une question qui m’anime en tant qu’homme de gauche. Dans ma jeunesse, je me suis profondément rebellé contre la phrase de Thatcher :  « La société n’existe pas ». J’aimerais qu’à gauche, on redise aujourd’hui que la société existe. (Mme Justine Gruet et M. Gérault Verny applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Tout d’abord, merci, monsieur le rapporteur général, d’avoir approuvé le maintien de la référence à la personne de confiance que la commission avait introduite dans le texte. Permettez-moi tout de même d’insister sur un point que vous avez vous-même énoncé fort raisonnablement : la personne de confiance, par définition, ne fait pas partie du collège, qu’il ne s’agit donc pas de renforcer.
    Nous pensons qu’il demeure dans l’article des lacunes très importantes. C’est d’abord, bien sûr, l’absence d’un avis écrit, que relevait notre collègue Potier. Cette absence est d’autant plus incompréhensible qu’un tel avis contribuerait à la traçabilité d’une décision prise sans témoin, dans un colloque singulier. Il faut donc un avis écrit des différents acteurs, comme cela se fait dans les hôpitaux quand on décide d’arrêter des soins ou de les limiter.
    Ensuite, il n’est vraiment pas possible selon nous de prendre une telle décision par visioconférence. Le fait que le deuxième médecin, qui ne voit pas le patient, ne procède pas à son examen médical affaiblit la collégialité car ce dernier n’aura pas les mêmes informations que le médecin auquel le patient a demandé à bénéficier de l’aide à mourir. Peut-on parler de collégialité quand on demande à deux médecins qui n’ont pas le même niveau d’information de rendre un avis ?
    Les amendements identiques du président Valletoux et du rapporteur Panifous n’abordent pas la question des auxiliaires mais, puisque la ministre en a parlé, je me permets de le faire à mon tour. Le texte prévoit qu’un auxiliaire médical ou un aide-soignant qui connaît le patient donne son avis, comme vous l’avez indiqué, madame la ministre –⁠ mais il est prévu au même alinéa qu’à défaut, un auxiliaire médical qui ne le connaît pas donnera son avis.

    M. Patrick Hetzel

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    Eh oui !

    M. Philippe Juvin

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    Le terme d’auxiliaire médical peut renvoyer à bien des professions, comme celles de pédicure-podologue ou d’audioprothésiste. Le texte, pris à la lettre, ouvre donc la possibilité qu’un audioprothésiste qui ne connaît pas le patient donne son avis : mes amis, ce n’est pas sérieux ! Vous affirmez que vous aviez en tête les infirmiers et les aides-soignants. Dans ce cas, il fallait le dire, car ce qui est écrit ne correspond pas à la réalité.

    Mme la présidente

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    Merci, cher collègue.

    M. Philippe Juvin

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    Et, pardon… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. –⁠ Mme Justine Gruet applaudit ce dernier.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny.

    M. Gérault Verny

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    Depuis le début de l’examen du texte, beaucoup de lignes rouges relatives à l’encadrement de la démarche ont été franchies –⁠ je le dis alors que le texte lui-même constitue pour moi une ligne rouge. Comme il a été rappelé, nous n’avons toujours pas de formalisme de la demande, ce qui semble assez aberrant. Aucune garantie d’accès aux soins palliatifs n’est prévue, alors que c’est quelque chose d’essentiel : si nous avons examiné un texte sur les soins palliatifs, c’est bien pour que ces derniers puissent être proposés et il importe que les patients en fin de vie soient en mesure d’en bénéficier. Aucune intervention juridique n’est prévue dans la procédure pour sécuriser les soignants, alors que des recours seront –⁠ c’est une évidence – déposés contre eux. Le texte ne prévoit pas non plus d’évaluation objective.
    On nous explique que certains sous-amendements pourraient enrichir un peu le texte. Je pense pour ma part qu’il faut simplement nous rappeler la situation des soins en France : il s’y trouve des déserts médicaux et je crois, comme l’a rappelé notre collègue Juvin, que la collégialité sera bien pauvre dans les départements où il n’y a que peu de soignants. C’est une carence qui, parmi d’autres, demeure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Des nuances, parfois importantes, s’expriment encore mais je pense que la volonté, qui a animé le rapporteur Panifous et moi-même, de calquer la collégialité proposée sur le dispositif qui existe dans le cadre de la procédure de sédation profonde et continue inspire confiance à la plupart des groupes qui siègent dans cet hémicycle.
    En réponse à la remarque de M. Bentz sur la collégialité réelle, je redis –⁠ j’y insiste – qu’aux termes de la rédaction proposée par mon amendement et l’amendement identique du rapporteur Panifous, sous réserve que l’on adopte les sous-amendements identiques de nos collègues Juvin et Bazin, la collégialité et la démarche prévues sont les mêmes que celles que prévoit la loi Claeys-Leonetti.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Eh oui !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Il n’y a pas, d’un côté, une « collégialité réelle » qui organise la sédation profonde et continue et, de l’autre, ce que nous proposons aujourd’hui. Il y a un véritable parallélisme des choses. La composition du collège est à la main du médecin qui prend la responsabilité de l’organiser. M. Bazin affirmait qu’il serait composé de trois personnes, mais ce n’est pas vrai : le médecin auquel le malade a demandé l’aide à mourir peut décider qu’il a besoin de six avis, s’il se trouve face à un cas qui nécessite d’élargir le collège. C’est bien la souplesse de la proposition qui est faite ; c’est aussi celle de la procédure de sédation profonde et continue, qui permet au médecin de prendre la responsabilité d’organiser cette collégialité, qui repose sur un collège de trois personnes au minimum, et bien davantage s’il le juge nécessaire. Sincèrement, il n’y a pas, d’un côté, une « collégialité réelle », de l’autre, une collégialité qui ne le serait pas.
    Concernant la demande d’avis écrit, selon moi, elle est satisfaite. L’alinéa 12 de l’article 6, tel que nous l’avons adopté en commission, prévoit bien que « le médecin se prononce dans un délai de quinze jours à compter de la demande et notifie, oralement et par écrit, sa décision motivée à la personne ».

    M. Thibault Bazin et M. Philippe Juvin

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    Il ne s’agit pas de l’avis de chacun des membres du collège !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Certes, mais il s’agit de la décision du médecin, motivée par les éléments, avancés par le collège, qui ont pesé dans sa décision. Or ce n’est pas à vous, professeur Juvin, que j’expliquerai comment procèdent les médecins : ils tiennent évidemment compte des avis émis par les uns et les autres.
    Je trouve en outre que prévoir que l’avis de la personne de confiance puisse être recueilli constitue, c’est le cas de le dire, un facteur de confiance, qui va dans le bon sens.
    La rédaction à laquelle nous parvenons, quoiqu’elle ne soit peut-être pas totalement satisfaisante pour certains d’entre vous, me paraît équilibrée et se situer au confluent d’un certain nombre de préoccupations.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre. (« Allez ! Votons ! » sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je voudrais seulement revenir sur trois points.
    D’abord, vous parliez, monsieur Verny, de gens malades, qui pourraient vivre dans des territoires où ne se trouvent pas assez de soignants. Les personnes concernées sont tout de même atteintes d’une affection en phase avancée ou terminale. Chacune de ces personnes a donc autour d’elle une communauté de soins, que requiert son état de santé. C’est autour de cette communauté que le médecin qui la suit pourra prendre l’avis de médecins de spécialité ou, comme nous le disons depuis un moment maintenant, d’autres spécialistes. On voit donc bien que le contexte dans lequel s’inscrit la procédure qui nous occupe est tel que la personne demandeuse fait déjà l’objet d’un protocole d’accompagnement en matière de soins.
    J’en viens à la remarque de M. Bentz. Je comprends la préoccupation exprimée tout à l’heure par M. Ménagé, qui estimait nécessaire de s’assurer que la procédure prévue soit au moins aussi importante –⁠ je le dis avec mes mots – que ce que l’on pouvait avoir pour la sédation profonde et continue. Or la procédure de sédation profonde et continue a précisément été reprise en miroir. L’adoption des amendements identiques présentés par le président Valletoux et le rapporteur Panifous permettrait de repréciser le dispositif et celle des deux sous-amendements identiques de MM. Juvin et Bazin dont nous avons parlé assurerait le maintien dans le texte de la référence à la personne de confiance, qui, même si elle ne fait pas partie du collège, peut être amenée à donner son avis, lequel constitue un complément d’information tout à fait important.
    Pour toutes ces raisons, je réitère l’avis favorable du gouvernement sur les amendements identiques du président de la commission et du rapporteur Panifous et sur les sous-amendements identiques nos 2706 et no 2721.

    (Les amendements nos 601 rectifié et 1638 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1823 rectifié.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        175
            Nombre de suffrages exprimés                164
            Majorité absolue                        83
                    Pour l’adoption                70
                    Contre                94

    (L’amendement no 1823 rectifié n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 705 rectifié, 2226, 2661 rectifié et 2662, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1056.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        177
            Nombre de suffrages exprimés                173
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                71
                    Contre                102

    (L’amendement no 1056 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 90 et 2010, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à la mise aux voix des sous-amendements aux amendements identiques nos 1722 rectifié et 1723 rectifié.

    (Les sous-amendements nos 2727, 2724 et 2726, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 2706 et 2721.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        175
            Nombre de suffrages exprimés                172
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                172
                    Contre                0

    (Les sous-amendements identiques nos 2706 et 2721 sont adoptés.)
    (Mouvements divers.)

    M. Philippe Juvin

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    Tant que ça ne s’appelle pas la loi Juvin ! (Sourires.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 2707 et 2722.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        167
            Nombre de suffrages exprimés                151
            Majorité absolue                        76
                    Pour l’adoption                72
                    Contre                79

    (Les sous-amendements identiques nos 2707 et 2722 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 2718 et 2719.

    (Le vote à main levée n’étant pas concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        176
            Nombre de suffrages exprimés                172
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                96

    (Les sous-amendements identiques nos 2718 et 2719 ne sont pas adoptés.)

    (Les sous-amendements nos 2717 et 2723, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1722 rectifié et 1723 rectifié, sous-amendés.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        179
            Nombre de suffrages exprimés                173
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                112
                    Contre                61

    (Les amendements identiques nos 1722 rectifié et 1723 rectifié, sous-amendés, sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 465, 277 et identiques, 2351, 546, 2307, 154, 422, 1400, 447, 2504, 296, 1420 tombent, ainsi que les amendements nos 333, 848, 1284, 2046, 297, 487, 1641, 2660, 1642, 614, 1896, 693, 2480, 365 et identiques, 786, 852, 2579, 424 et identique, 1164, 2266, 1527, 467 et 2052.)

    Mme la présidente

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    La discussion reprendra donc à l’amendement no 2333 de M. de Lépineau.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à douze heures cinq.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Nous sommes passés sous la barre des 1 000 amendements : il en reste précisément 994 à examiner. Je vous propose de limiter à une minute la durée des prises de parole dans les discussions sur les amendements, avec une intervention pour et une contre pour les amendements isolés et deux de chaque en cas de discussion commune. Le débat avance plutôt bien : poursuivons dans cette voie !
    Les amendements nos 2333 de M. Hervé de Lépinau, 1639 de M. Thibault Bazin, 2559 de M. Philippe Juvin, 551 de Mme Annie Vidal et 1463 de Mme Nathalie Colin-Oesterlé sont défendus.

    (Les amendements nos 2333, 1639, 2559, 551 et 1463, repoussés par la commission et le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de douze amendements, nos 81, 405, 533, 2476, 1640, 220, 690, 1374, 1462, 1853, 2117 et 2560, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 220, 690, 1374, 1462, 1853, 2117 et 2560 sont identiques.
    L’amendement no 81 de M. Patrick Hetzel est défendu.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 405.

    Mme Justine Gruet

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    La rédaction actuelle de l’article 6 prévoit que le médecin consulté pour avis par celui qui instruit la demande d’aide à mourir peut, « s’il ne l’estime pas nécessaire », ne pas examiner le patient. Mon amendement vise à rendre cet examen systématique. Le précédent vote a confirmé que ce second examen pourrait avoir lieu en téléconsultation. Ainsi, il y aurait deux examens, dont un éventuellement réalisé à distance par un praticien qui, je le rappelle, ne jugera pas la demande au fond mais vérifiera seulement si le patient remplit bien les critères.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 533 de Mme Annie Vidal est défendu.
    La parole est à Mme Angélique Ranc, pour soutenir l’amendement no 2476.

    Mme Angélique Ranc

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    L’alinéa 6 de l’article 6 prévoit qu’un second médecin soit consulté dans le cadre d’une demande d’aide à mourir, mais sans exiger que ce praticien examine le patient. Cette souplesse affaiblit la rigueur attendue pour une procédure aussi grave et à la conséquence irréversible. Dans plusieurs pays ayant légalisé le suicide assisté, comme le Canada ou les Pays-Bas, les deux médecins doivent rencontrer la personne concernée et rendre des avis indépendants.
    Le contact direct avec le patient devrait être au cœur de l’évaluation, car il ne s’agit pas seulement de consulter un dossier, il convient d’apprécier la situation médicale dans toute sa complexité. Cette consultation n’est pas accessoire. Elle garantit que la décision repose sur une évaluation complète, sur les plans éthique et médical, de la situation du patient, à même de réduire le risque d’erreur ou d’incompréhension.
    En France, nous devons imposer ce même niveau d’exigence. Tel est le sens de cet amendement, qui vise à ce que la décision à propos du suicide assisté repose toujours sur un double regard médical réellement éclairé et pleinement assumé. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1640.

    M. Thibault Bazin

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    On peut le considérer lui aussi comme défendu. Cela ne veut pas dire que je ne tiens pas à mes propositions, mais elles portent sur des points dont nous avons déjà débattu et sur lesquels je regrette de ne pas avoir été suivi.

    Mme la présidente

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    Nous en venons aux amendements identiques.
    L’amendement no 220 de Mme Marie-France Lorho est défendu.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 690.

    M. Patrick Hetzel

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    Il nous semble nécessaire que le second médecin examine également le patient.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 1374.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il vise à supprimer, à la seconde phrase de l’alinéa 6, les mots « sauf s’il ne l’estime pas nécessaire ». Il s’agit d’un point important car ces termes ouvrent une nouvelle brèche dans le texte et y créent une marge d’interprétation. Loin de protéger le médecin, ils peuvent au contraire le mettre dans une situation compliquée et l’exposer à un risque de recours contentieux, notamment de la part de proches d’une personne ayant bénéficié de l’aide à mourir.
    On peut s’interroger sur la raison de la création de cette disposition permettant à un médecin de ne pas examiner le malade. Elle semble contradictoire avec les affirmations des promoteurs du texte, qui ne cessent d’expliquer que les dispositions qu’il contient sont extrêmement restrictives et bornées, alors qu’une lecture attentive révèle des voies d’exception et des termes flous. Pour que le texte soit strict, il faut supprimer ce morceau de phrase, trop vague.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1462 de Mme Nathalie Colin-Oesterlé est défendu.
    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 1853.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Pour protéger non seulement le patient mais aussi le médecin, pour éviter que le second avis soit purement formel ou comme donné par une chambre d’enregistrement, le second examen du malade ne doit pas être optionnel. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Mazaury, pour soutenir l’amendement no 2117.

    M. Laurent Mazaury

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    Je souscris totalement aux propos des orateurs précédents. J’ajoute que rendre le second rendez-vous obligatoire représenterait une garantie pour le médecin, certain que nul ne pourra lui reprocher ultérieurement de ne pas avoir pas examiné en dernière instance le malade. Cela me semble presque indispensable pour avoir l’adhésion du monde médical à la procédure.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2560 de M. Philippe Juvin est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Ils visent tous à rendre obligatoire l’examen du patient par le spécialiste saisi pour avis. En réponse, je rappellerai d’abord le caractère obligatoire de l’examen réalisé par le praticien qui reçoit la demande, dit médecin référent. Ensuite, je soulignerai que, dans le texte tel que nous venons de l’amender, un second examen, par un médecin spécialiste, est la règle. Il est toutefois prévu que cette règle puisse connaître une exception, si le spécialiste lui-même juge que l’examen n’est pas indispensable. Il pourra alors se contenter du dossier médical ou échanger avec le patient. Cela peut être utile, notamment dans les territoires, ruraux ou autres, où une forme de désertification médicale complique l’accès aux médecins spécialistes, ce qui pourrait constituer un frein dans des cas où le temps est compté. Il reviendra au médecin spécialiste de décider si l’examen physique du patient est indispensable.
    Avis défavorable sur tous les amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Le médecin qui suit le patient va rassembler une série d’avis ; dans ce cadre, le spécialiste consulté peut très bien demander à voir le patient –⁠ rien ne le lui interdit –, mais il peut aussi estimer que le dossier suffit. La souplesse de la rédaction me paraît correspondre à la pratique médicale.
    Avis défavorable sur l’ensemble des amendements –⁠ même si j’en comprends le sens.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Les réponses ont été satisfaisantes et claires. Notez que les spécialistes manquent non seulement dans certaines zones rurales, mais aussi dans les outre-mer !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Mazaury.

    M. Laurent Mazaury

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    J’avoue que les propos du rapporteur Panifous m’inquiètent. La désertification dont pâtissent certaines zones, notamment les banlieues, ne doit pas amener à escamoter le contrôle médical. On parle de vies humaines ! Je suis plutôt favorable au texte, mais ces considérations me font hésiter. Ne va-t-on pas entériner une médecine à deux vitesses ? Les habitants du Gers devront-ils mourir plus tôt que d’autres ? J’espère avoir mal compris, car je me vois ébranlé dans mes convictions profondes. Attention, cette visite ultime –⁠ une garantie de plus – est absolument indispensable ! (Mme Élise Leboucher, rapporteure, s’exclame.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il s’agit, je le rappelle, d’un cas spécifique : celui d’une procédure qui conduit à la mort. Les comparaisons avec des pathologies plus communes sont par conséquent surprenantes.
    Je suis ahuri par les arguments que je viens d’entendre, et très inquiet. Je pensais avoir une réponse sur le fond –⁠ dans les cas où l’on est certain, du point de vue médical, que c’est fini, on peut éventuellement se passer d’un nouvel examen –, mais voilà que le rapporteur évoque l’éloignement des services publics dans certains territoires ruraux –⁠ et dans les outre-mer, ajoute René Pilato. Vous reconnaissez donc une inégalité des Français devant l’accès aux services publics et l’on peut, en réalité, induire de ce raisonnement que ce texte est précisément là pour pallier les manquements dans l’organisation du service public de la santé dans notre pays.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Ah non !

    M. René Pilato

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    Ce n’est pas sérieux, comme argument !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    On en revient aux carences en matière de soins palliatifs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR. – M. Gérault Verny applaudit également.)

    M. Patrick Hetzel

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    Eh oui !

    M. Gérault Verny

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    Bien sûr !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Vous montrez, sans vous en rendre compte, le grand problème que pose ce texte. J’insiste : vos arguments sont inquiétants et ahurissants. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Le patient sera examiné –⁠ je l’espère – par le médecin auquel il adresse la demande. L’étude de la demande est importante, mais l’examen physique du patient l’est également. Si ce médecin s’adresse à un spécialiste de la maladie, celui-ci peut très bien formuler un avis à partir du dossier –⁠ c’est souvent ainsi que cela se passe, notamment dans les colloques dédiés au cancer. Ne prévoyons pas de choses trop complexes ! Que le patient soit examiné une fois, c’est impératif –…

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Évidemment !

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    …un médecin doit examiner son patient –, mais on n’est pas obligé de prévoir un examen à tous les étages, sinon on aura du mal à organiser les choses tant pour les patients que pour les médecins.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Merci pour vos propos, madame Darrieussecq !
    Je voudrais répondre aux observations qui ont été formulées.
    Bien sûr, ce n’est pas uniquement la désertification médicale qui poussera le médecin spécialiste à ne pas voir la personne ! Si les unités de soins palliatifs manquent en certains points du territoire, les soins palliatifs, eux, sont présents partout –⁠ il existe aussi des soins à domicile. Le texte dit clairement que, quel que soit le lieu, le médecin doit s’assurer de l’accès effectif –⁠ j’insiste sur ce terme – à des soins palliatifs, si cela est nécessaire et souhaité par la personne ; à défaut de cet accès, il ne peut pas donner suite à la demande d’aide à mourir. Je m’inscris donc en faux contre vos propos : l’accès à l’aide à mourir ne sera jamais ouvert par défaut d’accès aux soins palliatifs. C’est dit, redit et inscrit dans le texte. (Applaudissements sur certains bancs des groupes LFI-NFP, EPR, SOC et Dem.)
    Monsieur Mazaury, cher Laurent, l’argument du désert médical est insuffisant, je l’admets. La règle, sauf exception, est bien la consultation du spécialiste avec rencontre physique. Il existe néanmoins des pathologies où les examens biologiques, par exemple, rendent évidentes la gravité de la maladie et ses conséquences ; dans ce type de cas, un médecin peut considérer qu’il n’est pas indispensable de prévoir une telle consultation –⁠ Mme Darrieussecq vient de le dire. La désertification médicale est une réalité, et il faut la combattre, mais l’exception à la consultation physique ne s’y réduit pas : dans certaines situations, le médecin spécialiste pourra juger que la visite n’est pas nécessaire, vu la gravité évidente de l’état du patient.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Très bien !

    (Les amendements nos 81, 405, 533, 2476 et 1640, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 220, 690, 1374, 1462, 1853, 2117 et 2560 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune, pour soutenir l’amendement no 341.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Lorsque la personne qui demande l’aide à mourir s’adresse non pas à son médecin traitant mais par exemple à l’oncologue qui la suit dans le cadre de son hospitalisation, il s’agit de permettre qu’à sa demande, le médecin traitant puisse être consulté dans le cadre de la procédure collégiale.

    (L’amendement no 341, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 2663, 1057, 2657 et 2592 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 2663.

    M. Patrick Hetzel

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    Cette discussion commune devrait rapidement se concentrer sur l’amendement proposé par le gouvernement.
    Un mot sur nos attentes : vous le savez, l’une de nos inquiétudes qui n’ont pas été levées à ce stade des débats et des votes renvoie au fait que l’avis écrit, initialement prévu, ne figure plus dans le texte. Nous souhaitons éviter la comparaison systématique avec la procédure relative à la sédation profonde et continue, car les conséquences sont différentes.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    La conséquence est la même : la mort !

    M. Patrick Hetzel

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    L’intention de donner la mort est absente dans un cas, présente dans l’autre.
    Cela dit, je rappelle que la procédure qui concerne la sédation profonde et continue prévoit un compte rendu écrit de la procédure collégiale. En outre, dans sa fiche relative à cette procédure, la Haute Autorité de santé note que la collégialité implique au moins deux médecins, parmi lesquels un peut être extérieur à l’équipe ; l’équipe paramédicale est associée, ainsi que toute personne ressource ayant une connaissance du patient. La discussion est donc large.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1057, par le groupe Rassemblement national ; sur l’amendement no 2657, par les groupes Ensemble pour la République, Droite républicaine et Horizons & indépendants ; sur les sous-amendements nos 2711, 2712, 2673, 2671 et identique, 2672, et 2674 et identique, par le groupe Droite républicaine.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Thomas Ménagé, pour soutenir l’amendement no 1057.

    M. Thomas Ménagé

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    Comme cela vient d’être dit par M. Hetzel, cette discussion commune porte sur un sujet majeur et comporte un amendement gouvernemental –⁠ merci, madame la ministre, de proposer l’introduction du psychiatre dans la procédure.
    Mon amendement diffère du vôtre en ce qu’il tend à rendre cette consultation obligatoire. C’est le cas dans plusieurs autres pays, notamment aux Pays-Bas et dans les onze États américains qui autorisent l’aide à mourir. Je pense en effet que, favorables ou défavorables au texte, nous sommes tous d’accord que si l’aide active à mourir est légalisée dans notre pays, elle doit toujours procéder d’un choix libre et éclairé. Or, en l’état du texte, je doute de la capacité d’un médecin de s’en assurer.
    Il faut également protéger les personnes les plus vulnérables, les plus susceptibles –⁠ on en a débattu ces derniers jours – de faire l’objet d’influences extérieures.
    Enfin, rendre cette consultation obligatoire sécuriserait le médecin, car vérifier la capacité du patient à manifester sa volonté libre et éclairée n’est pas de sa compétence et n’entre pas dans le périmètre de sa formation. Je suis défavorable à l’introduction d’un juge parce qu’il n’est pas souhaitable de judiciariser la procédure –⁠ si l’on crée ce droit, celui-ci doit rester accessible –, mais rendre la consultation du psychiatre obligatoire m’apparaît comme un garde-fou salutaire, vu le caractère irréversible de la décision à prendre ; nous pouvons, je crois, tous en convenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2657, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises. Comme je l’ai maintes fois répété, le discernement du patient représente la clé de voûte du texte ; le recueil de sa volonté doit donc se passer dans les meilleures conditions possible. Le médecin qui suit le patient et qui, après avoir consulté ses collègues, aura à prendre la décision ne doit pas avoir de doutes quant à la volonté de ce dernier. C’est pourquoi l’amendement que je défends au nom du gouvernement tend à introduire la consultation d’un médecin psychiatre ou neurologue.
    Nos amendements, monsieur Ménagé, diffèrent sur deux points : d’une part, je propose cette consultation en cas de doute sérieux sur le discernement ; d’autre part, j’introduis la possibilité de consulter soit un psychiatre, soit un neurologue. Dans son esprit, l’amendement gouvernemental est très proche tant du vôtre, no 1057, que de celui de M. Hetzel, no 2663, mais je préfère sa rédaction.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir le sous-amendement no 2725.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Nous discutons de nouveau de la notion de discernement. Madame la ministre affirme que l’amendement du gouvernement est proche de ceux de nos deux collègues, mais je n’en suis pas sûr.
    J’ai déposé ce sous-amendement, peut-être mal rédigé, après que d’autres ont été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution : j’ai dû chercher une brèche afin de pouvoir faire de l’expression « doute sérieux » un objet de discussion.
    Madame la ministre, qu’appelez-vous « un doute sérieux » ? Soit il y a un doute, soit il n’y en a pas. Il en était de même pour la notion d’altération du discernement, objet de nos échanges hier soir : celui-ci est aboli ou il ne l’est pas, il ne peut l’être à moitié, au tiers ni « gravement ».
    Vous affirmez vouloir assurer aux malades une protection maximale, au moyen d’un dispositif solidement boulonné. Or cet amendement tend à introduire une forme de subjectivité, donc une insécurité juridique. Il eût été préférable de supprimer l’adjectif « sérieux » –⁠ mes amendements en ce sens ont été jugés irrecevables par les services de la séance au titre de l’article 40 ; à tout le moins devrions-nous être au clair sur la notion de doute sérieux : existe-t-il une jurisprudence la concernant ?
    Assez circonspect quant à la rédaction de cet amendement du gouvernement, j’attends qu’à l’issue de la présentation des sous-amendements, vous me répondiez : en droit, que signifie « doute sérieux » ? (M. Gérault Verny applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir le sous-amendement no 2711.

    M. Philippe Juvin

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    L’amendement du gouvernement tend à ce que le médecin recueille l’avis d’un psychiatre ou d’un neurologue « lorsqu’il a un doute sérieux sur le discernement de la personne » –⁠ point sur lequel je reviendrai plus tard, car, pour M. Hetzel comme pour moi, cet avis doit être recueilli systématiquement. Le présent sous-amendement tend à introduire la mention « quelle que soit son importance supposée » après le mot « personne ». Sans doute faudrait-il trouver une meilleure rédaction, mais l’intention est la même que celle qui nous avait amenés à proposer de modifier l’expression « gravement altérée », à l’alinéa 3 : soit le discernement est total, soit il est altéré, mais il ne peut être « gravement » ou « un peu » altéré. Si imparfaite soit-elle, ma formulation vise à souligner que la moindre altération du discernement doit être prise en considération, et non les seuls cas « graves », dont je ne sais pas au juste ce qui les rend tels –⁠ si mon discernement était « un peu » altéré, peut-être n’aurais-je pas dû prendre la décision qui a été prise.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir le sous-amendement no 2712.

    M. Philippe Juvin

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    Ce sous-amendement n’est probablement plus utile, mais que je voudrais que le rapporteur me le confirme. Je l’avais déposé afin de préciser que l’altération du discernement devait être prise en considération « quelle que soit son origine », car le texte ne renvoyait qu’à celle que provoquerait une maladie, alors que des émotions, l’environnement social, l’entourage ou diverses circonstances peuvent aussi altérer le discernement. Prenons l’exemple de l’autisme : vous m’aviez dit qu’il n’était pas nécessaire d’exclure les personnes concernées du champ de la loi, puisque celles dont le discernement est gravement altéré par une maladie le sont déjà. Or il se trouve –⁠ j’ai vérifié – que l’autisme n’est pas une maladie.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure

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    Cela a déjà été modifié !

    M. Philippe Juvin

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    En cela, cet amendement était utile, mais, comme je l’ai dit à l’instant –⁠ vous auriez dû m’écouter, madame Leboucher –, je pense qu’il ne l’est plus, depuis que nous avons supprimé les mots « par la maladie » hier.

    Mme la présidente

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    Vous retirez donc ce sous-amendement ?

    M. Philippe Juvin

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    Pour peu que M. le rapporteur ou Mme la ministre me confirme qu’il n’est plus utile, je le retirerai.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir le sous-amendement no 2728.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Une fois encore, ce sous-amendement n’est peut-être pas très bien écrit du point de vue légistique, mais il faut passer au travers du chas d’une aiguille pour éviter que nos propositions de modification du texte soient jugées irrecevables au titre de l’article 40.
    Madame la ministre, les insécurités juridiques que votre amendement tel qu’il est rédigé tend à créer, notamment pour les médecins, m’inquiètent –⁠ le problème est le même que pour l’expression « gravement altérée », dont nous avons discuté hier. Je vous rappelle à cet égard l’avis rendu le 4 avril 2024 par le Conseil d’État sur le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie : « Le Conseil d’État souligne cependant qu’il ne peut être exclu que des manquements dans la mise en œuvre de la procédure prévue pour l’accès à l’aide à mourir puissent donner lieu à des poursuites, notamment pour le délit d’homicide involontaire ».
    On sait bien que l’application de textes législatifs nouveaux risque d’autant plus de susciter des contentieux que ces textes font appel à des notions juridiquement floues ; or celles de « doute sérieux » et de discernement « gravement altéré », à mon sens, le sont. Ne serait-ce que pour rendre service au corps médical, il vaudrait mieux supprimer ces adjectifs qui introduisent de la subjectivité et nous en tenir à une normativité stricte.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2673.

    M. Patrick Hetzel

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    Je partage les doutes des collègues qui se sont exprimés sur la notion de doute sérieux, à laquelle je préférerais que le texte ne fasse pas référence, parce qu’elle est très floue.

    M. Erwan Balanant

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    Elle n’est pas floue : il existe toute une jurisprudence à son sujet.

    M. Patrick Hetzel

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    Monsieur Balanant, écoutez ce que nous disons, au lieu de perturber sans cesse les débats ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    J’en viens à l’objet du sous-amendement : si le médecin a besoin de solliciter l’avis d’un psychiatre ou d’un neurologue, je considère que cet avis doit alors s’imposer à lui. En effet, je trouverais troublant que le médecin puisse ne pas tenir compte de l’avis d’un spécialiste auquel ses propres doutes l’ont conduit à faire appel. C’est pourquoi je souhaite compléter l’amendement du gouvernement ainsi : « L’avis du psychiatre ou du neurologue sollicité s’impose au médecin » instructeur.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux sous-amendements identiques, nos 2671 et 2683.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2671.

    M. Patrick Hetzel

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    L’amendement déposé par le gouvernement n’affectera réellement la procédure que si le médecin chargé de l’instruire est en mesure de trouver un psychiatre ou un neurologue. Rappelons que depuis 2010, 310 postes de psychiatres n’ont pas été pourvus à l’internat ; qu’en 2023, 67 des 547 postes ouverts sont restés vacants ; que la capacité d’accueil des hôpitaux est passée de 100 000 lits à 80 000 lits entre 1997 et 2021. Le secteur de la psychiatrie est en grande difficulté, nous le savons tous.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure

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    Il est temps de s’en inquiéter !

    M. Patrick Hetzel

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    De ce fait, la possibilité de saisir un psychiatre risque de n’être qu’un droit formel. Pour rendre effective la saisine, il convient de suspendre la procédure jusqu’à la consultation du psychiatre.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 2683 de M. Dominique Potier est défendu.
    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir le sous-amendement no 2685.

    M. Dominique Potier

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    Nous traitons d’un enjeu à nul autre pareil : cet instant unique où la vie et la mort se rencontrent, de façon définitive –⁠ j’avais déjà cité Ricœur à ce sujet. Si nous considérons avec Mme la ministre –⁠ que je remercie de cette précaution – que l’avis d’un psychiatre pourrait être précieux, on ne peut accepter, à cause d’une carence, de prendre, en son absence, une décision susceptible d’être éternellement regrettée.
    La suspension de la procédure permettra que tout soit fait pour que la consultation ait vraiment lieu. Il s’agit pour nous d’affirmer qu’il ne s’agit pas d’une disposition facultative. Nous considérons au contraire qu’elle est essentielle, s’agissant d’une question de vie ou de mort.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2672.

    M. Patrick Hetzel

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    Toute la justification de la démarche de l’aide à mourir est l’autodétermination –⁠ nombre d’entre vous le soulignent régulièrement. Pour cette raison même, si le psychiatre ou le neurologue sollicité confirme que la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, il doit être mis immédiatement fin à la procédure.
    Faute de quoi, celle-ci se poursuivrait en contradiction avec les critères d’éligibilité fixés à l’article 4. Il faut donc inscrire à l’article 6 que la procédure s’interrompt dès lors que l’expert a considéré que le consentement libre et éclairé faisait défaut.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux sous-amendements identiques, nos 2674 et 2689.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2674.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce sous-amendement tend à introduire une disposition que nous jugeons des plus utiles : l’obligation de communiquer l’avis du psychiatre ou du neurologue aux proches et à la famille.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir le sous-amendement nos 2689.

    M. Dominique Potier

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    Je défendrai en même temps le suivant, si vous le permettez, madame la présidente.
    Le sous-amendement no 2689 est identique au précédent ; le no 2688 présente une petite différence, puisqu’il vise à ce que l’avis soit communiqué à la personne de confiance. Il s’agit dans les deux cas de l’environnement proche. Je persiste en effet à dire que nous sommes non pas des individus entièrement libres, des atomes isolés dans l’univers, mais des personnes reliées les unes aux autres : nos décisions ont des conséquences pour d’autres que nous-mêmes et sont conditionnées par d’autres que nous-mêmes. C’est fondamental, du point de vue de la philosophie politique. La moindre des choses serait donc de communiquer l’avis aux plus proches, parmi lesquels la personne de confiance représente en quelque sorte l’amitié sociale –⁠ pour reprendre une expression fameuse.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 2688 de M. Dominique Potier est défendu.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2592 rectifié.

    M. Philippe Juvin

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    À travers cet amendement, nous réaffirmons notre volonté que le psychiatre soit systématiquement consulté. On m’objectera sans doute qu’une telle consultation n’est pas utile, dès lors que la personne ne présente pas de pathologie psychiatrique. Toutefois, la prévention du suicide fait partie du métier des psychiatres –⁠ ils savent faire certaines choses que d’autres ne savent pas faire. Ces professionnels ont en outre une capacité à analyser les subtilités du consentement et à déterminer ce que veulent vraiment les individus. Demander leur avis de façon systématique n’a donc rien de scandaleux à mes yeux.
    Vous nous opposerez sans doute aussi qu’il est long d’obtenir une consultation psychiatrique ou neurologique, mais comme vous soutenez par ailleurs que le recours à l’aide à mourir sera très peu fréquent, ce supplément de sécurité pour les patients, ce droit d’être entendu, ne devrait pas poser de problème. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Dans cette discussion commune, nous entendrons six orateurs –⁠ trois pour, trois contre.
    Quel est l’avis de la commission sur les amendements et sous-amendements ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    J’émettrai un avis favorable sur l’amendement no 2657 du gouvernement. Il est vrai que le 2o de l’article 6 prévoit déjà que le médecin puisse recueillir l’avis d’autres professionnels de santé, donc d’un psychiatre, d’un neurologue ou d’un psychologue –⁠ et nous savons qu’il le fera au moindre doute. L’amendement proposé par le gouvernement me semble néanmoins équilibré, puisqu’il permet de solliciter un tel avis, à titre complémentaire, en cas de doute sérieux.
    Je suis défavorable à tous les autres amendements ainsi qu’aux sous-amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je suis, moi aussi, défavorable aux amendements autres que l’amendement gouvernemental ainsi qu’aux sous-amendements.
    Je vais répondre aux objections qui ont été soulevées, en commençant par celles concernant le doute sérieux. Il s’agit d’une notion juridique bien connue, puisqu’elle est utilisée par le juge des référés en matière de référé-suspension.
    J’en viens à la question, extrêmement importante, du médecin chargé de vérifier le discernement de la personne. Ce médecin s’assure d’abord que cette dernière remplit les différents critères et recueille les avis des autres membres du collège. Si un doute subsiste, il requiert l’expertise supplémentaire d’un psychiatre ou d’un neurologue, qui peut établir que la personne ne dispose effectivement pas de son discernement. Dans ce cas, vous avez raison, monsieur Hetzel : dans son avis, le médecin dira que l’un des critères n’est pas rempli et le patient ne sera pas éligible à l’aide à mourir. Nous en revenons alors aux conditions d’accès que vous avez adoptées à l’article 4. Votre amendement est satisfait.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Je vais dire quelque chose qui va peut-être vous choquer,…

    M. Gérault Verny

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    Oh, venant de vous…

    Mme Sandrine Rousseau

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    …mais je pense que vous faites une confusion à propos de la mission et des compétences du psychiatre : il est là pour diagnostiquer des maladies psychiques, ce n’est pas un spécialiste du discernement. (M. Vincent Caure applaudit.)

    M. Erwan Balanant

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    Exactement !

    Mme Sandrine Rousseau

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    La maladie psychique et l’absence de discernement, ce sont deux choses différentes. Ce que vous faites, chers collègues, est même assez dangereux :…

    M. Sébastien Peytavie

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    Oui, vous psychiatrisez !

    Mme Sandrine Rousseau

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    …confondre discernement et maladie psychique, c’est renvoyer toutes les personnes atteintes d’une maladie psychique à une absence de discernement, donc, finalement, à un statut de sous-citoyen qui nie leur capacité de réflexion.

    M. Sébastien Peytavie

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    Eh oui !

    M. Erwan Balanant

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    Elle a raison !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Ne vous adressez pas à nous ! Ce n’est pas nous, c’est le gouvernement qui a déposé l’amendement !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Or les personnes atteintes de maladies psychiques combattent depuis des années pour que soient reconnues leur autonomie et leur capacité à vivre en société !

    M. Philippe Juvin

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    Quel rapport ? Ça n’a rien à voir !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Amendement après amendement, en plaçant la personne sous la tutelle d’un psychiatre, vous oubliez un élément absolument essentiel : une maladie psychique peut parfois atteindre le discernement, mais elle peut aussi ne pas l’atteindre ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS. –⁠ Mme Ségolène Amiot, M. Erwan Balanant et M. Vincent Caure applaudissent également.)

    M. Gérault Verny

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    Vous confondez les saucisses et les merguez !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gaëtan Dussausaye.

    M. Gaëtan Dussausaye

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    Je suis évidemment en désaccord avec vous, madame Rousseau, parce que la consultation d’un spécialiste en psychologie ou en psychiatrie n’aboutira pas nécessairement à une fin de non-recevoir. La proposition de loi repose avant tout sur le principe du consentement, qui veut que l’on s’assure, du début à la fin de la procédure, de la volonté libre et éclairée du patient qui formule la demande d’aide à mourir. Or la volonté ne peut être libre que si elle est intégralement délivrée de toute contrainte, qu’elle soit extérieure –⁠ exercée par une tierce personne – ou personnelle, c’est-à-dire liée à l’état de santé, y compris mental, du patient concerné.
    La psychologie et la psychiatrie sont des spécialités médicales, on le sait : tout médecin ne dispose donc pas forcément de l’expertise correspondante. C’est pourquoi il est nécessaire de rendre obligatoire une vérification de l’état psychologique et psychiatrique du patient par un spécialiste.

    M. Erwan Balanant

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    C’est ce qui est prévu !

    M. Gaëtan Dussausaye

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    Dans cette perspective, l’amendement de mon collègue Thomas Ménagé me paraît beaucoup plus solide que celui du gouvernement, puisqu’il rend cette consultation obligatoire alors que le gouvernement la conditionne à un « doute sérieux » –⁠ une expression qui, comme l’a dit le collègue Sitzenstuhl, est un peu floue sur le plan juridique. Je vous invite donc à voter pour l’amendement de Thomas Ménagé plutôt que pour celui du gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur

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    De fait, nous apprécions les choses de manière très différente. Vous, vous considérez que toute personne qui fait une demande d’aide à mourir peut être suspectée de ne pas disposer d’un discernement suffisant.

    M. Sébastien Peytavie

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    Eh oui !

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur

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    Elle devrait donc justifier sa demande et systématiquement recourir à un avis psychologique et psychiatrique. C’est assez délirant ! Vous-mêmes défendez les dispositions de la loi Claeys-Leonetti : ce qui ne s’impose pas à la sédation profonde et continue jusqu’au décès devrait s’imposer pour une demande d’aide à mourir ? Excusez-moi, mais la finalité est la même ! D’ailleurs, comme l’a rappelé Mme la ministre depuis le début de l’examen du texte, ce qui tue, c’est la maladie, ce n’est pas le processus d’aide à mourir.

    M. Laurent Jacobelli

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    Bah si !

    M. Philippe Juvin

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    Vous administrez une substance létale !

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur

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    Ensuite, votre démarche est incohérente. Tout à l’heure, nous avons massivement voté pour la collégialité de la procédure, la manière collégiale dont le médecin recueille des avis et prend une décision : il me semblait que cet aspect du texte était issu d’un travail commun à l’ensemble des bancs, puisqu’il a été approuvé par le plus grand nombre. Et voilà que ceux qui ont voté pour la disposition en question viennent perturber les débats et changer la règle du jeu en cours de route ! Vous avouerez qu’il y a là quelque chose de pas très cohérent.

    M. Erwan Balanant

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    Eh oui !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Erwan Balanant.

    M. Erwan Balanant

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    S’agissant du fond du débat, nous avons défini des critères. Il est proposé ici de compléter le dispositif, mais vous estimez que les notions de doute sérieux et de discernement sont floues. Mais non, ce n’est pas flou ! Le « doute sérieux », c’est une notion utilisée par le juge dans le cadre du référé-suspension ; quant au discernement, je crois que nous disposons d’une jurisprudence suffisante pour pouvoir le définir et je suis d’accord avec ce que disait Sandrine Rousseau à l’instant.
    Ensuite, monsieur Hetzel, sur la forme, je réagissais tout à l’heure à vos propos parce que votre stratégie, qui consiste à sous-amender massivement pour créer des tunnels dans lesquels nous ne pouvons pas réagir, est bien connue. Vous m’excuserez de vous avoir déconcentré, ce qui me paraît étonnant connaissant votre pugnacité, mais je tenais à le dire. Nous avançons dans la discussion et la procédure dont nous parlons repose sur des bases juridiques fortes, qui sont à mon sens très protectrices. Oui, s’il y a un doute sérieux, un psychiatre pourra être consulté : que peut-on faire de plus ? Je comprends que vous vouliez faire durer les débats –⁠ je ne prononcerai pas le mot d’obstruction –, mais nous ne sommes pas dupes.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Le discernement est la capacité de l’esprit à juger clairement et distinctement les choses. Je suis donc surpris d’apprendre que les psychiatres et les psychologues ne sont pas compétents pour l’étude du discernement.

    M. Patrick Hetzel

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    Selon Mme Rousseau !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Ils seront ravis de l’apprendre ! Dans ce cas, j’aimerais bien savoir qui l’est. A priori, le médecin généraliste ne l’est pas davantage.
    Ce que je comprends de vos propos, c’est que, dans le cadre de cette procédure, le discernement ne peut pas être vérifié avec certitude, donc que la loi ne devrait pas aboutir.

    M. Nicolas Sansu

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    Oh là là !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    En la matière, tout doute me semble grave, en raison du caractère sensible du sujet. Le médecin est faillible, tout comme le psychiatre, car ce sont des individus. Qu’un doute soit nécessaire pour requérir un avis complémentaire est déjà aberrant, mais que ce doute doive être « sérieux » me pose un problème encore plus grand. Cela crée de l’insécurité juridique pour tout le monde. On refuse l’intervention du juge administratif dans cette procédure, tout en s’appuyant sur une notion maniée par ce même juge mais qui devrait être appliquée par le médecin ! Or le doute –⁠ ou l’absence de doute – du médecin ressort de son intime conviction.
    Enfin, je pense qu’en matière d’euthanasie, c’est un peu comme en amour : quand il y a un doute, c’est qu’il n’y a plus de doutes ; en l’espèce, il faut donc au moins un second avis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Des histoires d’amour sans doute ?

    Mme Sandrine Rousseau

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    Il faudra nous les montrer !

    M. Laurent Jacobelli

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    Peut-être n’a-t-il pas envie d’être déconstruit !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Philippe Vigier

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    J’avais demandé la parole, madame la présidente !

    Mme la présidente

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    Monsieur Vigier, vous faites partie du même groupe que M. Balanant, qui s’est déjà exprimé ; c’est pourquoi je ne vous ai pas donné la parole.

    M. Philippe Vigier

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    Parce que M. Bazin ne fait pas partie du même groupe que M. Hetzel ?

    Mme la présidente

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    M. Hetzel s’est exprimé en tant que défenseur d’amendement.
    Allez-y, monsieur Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Nous sommes au cœur de la vérification du consentement libre et éclairé, qui a été présentée à plusieurs reprises comme un élément fondamental du processus –⁠ c’est ce qui a justifié le refus d’intégrer la prise en considération des directives anticipées. On nous dit que la vérification sera collégiale, mais qui vérifiera ? Un seul médecin, en réalité, puisque l’autre médecin mentionné ne sera pas tenu de voir le patient –⁠ comment, alors, pourrait-il vérifier quoi que ce soit ? Et si le médecin vérificateur a un « doute sérieux », il pourra faire appel à un psychiatre ou à un neurologue, mais on ne sait pas ce qui se passera si ce dernier émet un avis négatif en jugeant que la personne ne manifeste pas une volonté libre et éclairée. Vous refusez de le préciser !
    Pour le coup, j’ai de plus en plus de doutes…

    M. Philippe Vigier

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    Des doutes sérieux ?

    M. Thibault Bazin

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    …sur cet amendement du gouvernement. N’y a-t-il pas là un faux-semblant ? Nous demandions l’intervention d’un psychiatre, mais vous ne le prévoyez pas de manière systématique et, dans les cas où il interviendra, vous ne voulez pas préciser que son avis va obliger le médecin qui instruit la demande. Cela nous interroge !
    Peut-être le juge utilise-t-il la notion de « doute sérieux » dans le cadre du référé-suspension mais, en l’espèce, on parle de vie ou de mort ! S’il y a l’once d’un doute à propos du consentement libre et éclairé de la personne, compte tenu de l’extrême gravité de la question posée et sachant que la réponse va engager l’ensemble de la société,…

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    C’est beaucoup trop long !

    M. Thibault Bazin

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    …il faut en tenir compte.

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Je crois que d’autres garanties sont nécessaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Gérault Verny applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Pour ma part, j’ai un doute d’un autre ordre. L’amendement du gouvernement a été déposé avant l’adoption des amendements de MM. Valletoux et Panifous –⁠ les nos 1722 rectifié et 1723 rectifié.

    M. Thibault Bazin

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    C’est ce que j’ai dit !

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Or qu’avons-nous fait en adoptant ces amendements –⁠ étant précisé que j’ai voté en leur faveur ? À l’alinéa 5, il était écrit que le médecin « recueille l’avis écrit » ; or nous avons supprimé ces mots pour indiquer que le médecin « réunit un collège pluriprofessionnel, auquel il participe ».

    M. Thibault Bazin

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    Eh oui ! Je l’ai dit tout à l’heure !

    M. Philippe Juvin

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    Absolument !

    M. Thibault Bazin

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    Il n’y a plus d’avis écrit et il n’y a plus de recueil de l’avis !

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Le présent amendement du gouvernement, que je soutiens sur le fond, aura pour conséquence d’inscrire la consultation d’un psychiatre dans la collégialité.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Bah oui !

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Cela signifie que l’on ajoute un nouvel élément obligatoire –⁠ la consultation du psychiatre – dans la procédure collégiale.
    Je n’y suis pas opposée, mais ce serait bien la conséquence de l’adoption de cet amendement, par suite de la réécriture des alinéas 4 et 5.

    M. Thibault Bazin

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    C’est ce que j’ai dit tout à l’heure ! Il y a un problème d’articulation !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Vous ne pouvez pas dire qu’il y a un problème d’articulation, monsieur Bazin. Vous devriez au contraire vous réjouir que nous prévoyions qu’en cas de doute sérieux, il faille solliciter un avis supplémentaire pour s’assurer plus avant du discernement. C’est une disposition qui, précisément, va dans votre sens !

    M. Philippe Vigier

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    Eh bien voilà !

    M. Erwan Balanant

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    Il fait semblant de ne pas comprendre.

    (L’amendement no 2663 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1057.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        150
            Nombre de suffrages exprimés                146
            Majorité absolue                        74
                    Pour l’adoption                58
                    Contre                88

    (L’amendement no 1057 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je vais maintenant mettre aux voix les sous-amendements à l’amendement du gouvernement.

    (Le sous-amendement no 2725 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 2711.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        152
            Nombre de suffrages exprimés                150
            Majorité absolue                        76
                    Pour l’adoption                67
                    Contre                83

    (Le sous-amendement no 2711 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 2712.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        151
            Nombre de suffrages exprimés                150
            Majorité absolue                        76
                    Pour l’adoption                64
                    Contre                86

    (Le sous-amendement no 2712 n’est pas adopté.)

    (Le sous-amendement no 2728 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 2673.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        151
            Nombre de suffrages exprimés                148
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                61
                    Contre                87

    (Le sous-amendement no 2673 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 2671 et 2683.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        152
            Nombre de suffrages exprimés                150
            Majorité absolue                        76
                    Pour l’adoption                62
                    Contre                88

    (Les sous-amendements identiques nos 2671 et 2683 ne sont pas adoptés.)

    (Le sous-amendement no 2685 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 2672.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        153
            Nombre de suffrages exprimés                147
            Majorité absolue                        74
                    Pour l’adoption                58
                    Contre                89

    (Le sous-amendement no 2672 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 2674 et 2689.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        148
            Nombre de suffrages exprimés                148
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                58
                    Contre                90

    (Les sous-amendements identiques nos 2674 et 2689 ne sont pas adoptés.)

    (Le sous-amendement no 2688 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2657.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        156
            Nombre de suffrages exprimés                105
            Majorité absolue                        53
                    Pour l’adoption                34
                    Contre                71

    (L’amendement no 2657 n’est pas adopté.)

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Eh bien bravo !

    (L’amendement no 2592 rectifié n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra