Deuxième séance du dimanche 09 novembre 2025
- Présidence de Mme Clémence Guetté
- 1. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
- Troisième partie (suite)
- Rappels au règlement
- Après l’article 21 (suite)
- Article 22
- M. Guillaume Florquin
- Mme Élise Leboucher
- Amendements nos 978, 643, 2523, 644, 645, 2524, 2107 et 2511
- Après l’article 22
- Article 23
- Mme Nicole Dubré-Chirat
- Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
- M. Jérôme Guedj
- Amendements nos 1151, 1668 et 1807
- Article 24
- Mme Joëlle Mélin
- M. Philippe Vigier
- M. Paul-André Colombani
- Mme Mélanie Thomin
- M. Thibault Bazin, rapporteur général
- Mme Stéphanie Rist, ministre
- Amendements nos 482 et 1135
- M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
- Amendement no 2526
- Sous-amendement no 2670
- Amendements nos 739, 2527, 2528, 1273, 2529, 2530, 984, 652, 784, 2531 et 741
- Mme la présidente
- Après l’article 24
- Amendement no 651
- Rappel au règlement
- Après l’article 24 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Article 25
- Rappel au règlement
- Article 25 (suite)
- Amendement no 1086
- Après l’article 25
- Article 26
- Rappel au règlement
- Article 26 (suite)
- Après l’article 26
- Rappel au règlement
- Après l’article 26 (suite)
- Article 27
- Après l’article 27
- Article 28
- Troisième partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Clémence Guetté
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (nos 1907 et 1999, 2057, 2049).
Troisième partie (suite)
Mme la présidente
Ce matin, l’Assemblée nationale a poursuivi l’examen des articles de la troisième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 1412 portant article additionnel après l’article 21.
Rappels au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un rappel au règlement.
Mme Mathilde Panot
Au titre de l’article 49, alinéa 15 de notre règlement, qui dispose que « si la conférence des présidents constate que la durée maximale fixée pour l’examen d’un texte est insuffisante, elle peut décider de l’augmenter ».
Je vous demande donc que la conférence des présidents se réunisse en urgence. Oui ou non, madame la ministre, allez-vous laisser l’Assemblée nationale voter sur les dépenses de la sécurité sociale et sur l’ensemble de son budget ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS.) Sont concernés la santé, le handicap, les Ehpad, les retraités ou encore l’année blanche.
Un refus d’ouvrir de nouvelles séances ne pourrait signifier, de votre part, qu’une volonté d’empêcher ce vote. Peut-être êtes-vous pressée de transmettre le texte au Sénat, pour que Retailleau fasse le sale boulot à votre place ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Si vous jouez la montre, c’est pour que le budget de la sécurité sociale, au bout du compte, soit pris par ordonnance – ce qui n’est rien d’autre qu’un super 49.3. Comme l’a dit le ministre en conférence des présidents, c’est en effet le texte du gouvernement qui passera en force et sera imposé au peuple de France.
Je réitère ma question, madame la ministre : allez-vous laisser l’Assemblée nationale voter, afin que le peuple de France puisse voir quelle position chaque député aura prise sur un texte aussi cruel que celui-ci ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Véronique Riotton
On a compris !
Mme la présidente
Il nous reste 585 amendements à examiner. Ce matin, l’Assemblée a examiné, en moyenne, seize amendements par heure – en deçà de l’objectif visé. À ce rythme, il nous faudrait encore trente-cinq heures et cinquante-trois minutes pour terminer l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
La parole est à M. Philippe Vigier, pour un rappel au règlement.
M. Philippe Vigier
Sur le fondement de l’article 100, relatif au bon déroulement de nos débats.
On peut certes tout essayer, madame la présidente Panot – mais vous vous êtes opposée, hier, à ce que nous discutions de la troisième partie du PLFSS !
M. Emeric Salmon
En quoi est-ce un rappel au règlement ?
M. Philippe Vigier
Comment, dès lors, osez-vous dire à ceux qui nous regardent et nous écoutent que vous voulez aller au bout de la discussion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Est-ce que je peux parler sans être interrompu ? Ce n’est pas parce que je suis un homme que je n’ai pas le droit de parler ! (Applaudissements les bancs du groupe RN, sur quelques bancs du groupe EPR et sur les bancs du groupe UDR. – Vives exclamations et rires sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme la présidente
Voyons, monsieur Vigier !
Mme Élise Leboucher
Ce n’est pas possible de dire des choses pareilles !
Mme Sandrine Rousseau
C’est nul ! Honte à vous ! Arrêtez avec ça !
M. Philippe Vigier
À chaque fois, c’est la même chose ! Je voulais donc simplement vous dire, madame la présidente Panot (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP),…
Je suis désolé, mais elle m’interrompt à chaque fois ! Est-ce que je peux m’exprimer ?
Mme la présidente
Concluez votre propos, monsieur Vigier. Je ne crois pas que les interjections, dans cet hémicycle, vous aient jamais effrayé.
M. Philippe Vigier
À chaque fois que je m’exprime, trois voix essayent de couvrir la mienne ! Ce qui peut être désagréable pour vous peut l’être tout autant pour nous !
Regardez combien d’amendements notre groupe a déposés : vous verrez que nous avions anticipé l’organisation de ce regrettable blocage. Je suis de ceux qui n’ont jamais rechigné à faire des prolongées jusqu’à 5 heures du matin, mais ne prétendez pas que vous voulez aller au bout de l’examen de ce texte quand, hier, vous vouliez que tout s’arrête après l’examen de sa deuxième partie.
M. Maxime Laisney
Parce que nous étions contre la partie recettes !
M. Philippe Vigier
Je vous le dis avec beaucoup de calme : la ficelle est un peu grosse. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Cyrielle Chatelain, pour un rappel au règlement.
Mme Cyrielle Chatelain
Au titre de l’article 49, alinéa 1.
Le groupe Écologiste et social s’est abstenu hier, lors du vote sur la deuxième partie, afin que nous puissions poursuivre nos débats et aller au vote sur l’ensemble. Nous sommes, dès lors, très inquiets de la lenteur qui gagne nos débats. Avant le vote de la deuxième partie, nous avancions à un rythme de vingt-sept amendements par heure, contre seize depuis. Comment, dans ces conditions, réussirions-nous à mettre le texte aux voix avant mercredi à minuit ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales
Amélie de Montchalin a été très claire : tous les amendements votés iront au Sénat. Continuons donc à voter !
Mme Cyrielle Chatelain
Il est indispensable que se tienne une conférence des présidents, afin que nous puissions interroger le gouvernement sur ce point et afin que nous trouvions quelle organisation des débats nous permettra d’atteindre cet objectif commun. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Camille Galliard-Minier, pour un rappel au règlement.
Mme Camille Galliard-Minier
Sur le fondement de l’article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats.
Vous réclamez à cor et à cri, depuis ce matin, que nous avancions, que nous votions, que nous débattions ; vous ne faites pourtant qu’interrompre cette séance avec des rappels au règlement. Je vous invite à y mettre fin, pour que nous puissions effectivement débattre et voter. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. – M. Bernard Chaix applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un rappel au règlement.
Mme Mathilde Panot
Au titre des articles 100 et 49, alinéa 15.
Rétablissons donc les chiffres que vous demandez, monsieur Vigier. Des amendements restant en discussion, le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire en a déposé 72 ; le groupe Socialistes et apparentés, 65 ; le groupe Rassemblement national, 49 ; le bloc central 95 et la droite 165 !
M. Philippe Vigier
Mais nous, Les Démocrates ?
Mme Mathilde Panot
Nous avons voté contre la deuxième partie du texte car nous sommes contre ce budget : nous sommes l’opposition à ce gouvernement et une opposition s’oppose au budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Qu’on ne dise pas non plus que nous interrompons sans cesse le débat afin de le ralentir,…
Mme Véronique Riotton
On voit bien que si !
Mme Mathilde Panot
…puisque nous demandons que de nouvelles séances soient ouvertes – ou qu’on prolonge ce soir, si vous préférez – pour que nous puissions voter sur cette troisième partie et sur l’ensemble du budget de la sécurité sociale.
Je demande donc de nouveau que se tienne une conférence des présidents. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je préside, avec grand bonheur, jusqu’à minuit ce soir.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Excellemment !
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l’autonomie et des personnes handicapées
Pour notre plus grand bonheur également !
Mme la présidente
Je suis prête à présider, si cela devait s’avérer nécessaire, jusqu’à 4 heures ou 5 heures du matin. Toujours est-il que la conférence des présidents, à cette heure, n’a pas décidé que nous siégerons après minuit. En l’état, nous lèverons donc la séance à minuit ; la suite de l’examen du projet de loi de financement la sécurité sociale est par ailleurs inscrite à l’ordre du jour de mercredi prochain.
Je ferai toutefois part à la présidente de l’Assemblée nationale de la demande, formulée par plusieurs groupes, de ce qu’une conférence des présidents soit réunie au plus vite pour organiser au mieux nos débats.
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour un dernier rappel au règlement.
Mme Sandrine Rousseau
Au titre de l’article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats, puisqu’il n’est pas fait mention du sexisme dans le règlement de l’Assemblée nationale.
La première fois que vous avez fait ce numéro, monsieur Vigier, nous ne nous avons pas répondu – mais en voici une deuxième ! De quel genre de discrimination avez-vous été victime, en tant qu’homme blanc de plus de 50 ans ? (« Oh ! » sur les bancs des groupes RN et UDR.) Les femmes ne comptent que pour 34 % de cette assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP) ; elles sont davantage interrompues et leur voix est davantage couverte que celle des hommes : assez de vos pleurnicheries ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR. – M. Philippe Vigier fait signe qu’il demande un rappel au règlement.)
Mme la présidente
Je ne prends plus de rappels au règlement, monsieur Vigier. (Sourires sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Philippe Vigier
Ça vous fait rire ?
Après l’article 21 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l’amendement no 1412.
M. Jean-François Rousset
Il a trait à la question du transport sanitaire. Certains patients préfèrent parfois prendre leur voiture pour aller chez le médecin, sans que cette possibilité n’apparaisse explicitement sur le bon de transport. Je propose donc d’expérimenter le remboursement a posteriori d’un transport sanitaire choisi par le patient – son véhicule personnel ou les transports en commun. Le patient pourrait être remboursé après avoir demandé un bon de transport à cet effet.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales
Vous nous aviez déjà proposé en commission ce dispositif expérimental de prise en charge a posteriori des frais de transport sanitaire pour les patients dont l’état ne justifie pas nécessairement ce transport.
Je vous avais dit en commission, avant que cette dernière ne rejette votre amendement, que je ne comprenais pas comment une telle expérimentation pouvait fonctionner. J’ai beau avoir lu et relu votre amendement – cette nuit ! – mon incompréhension demeure. Quel médecin cochera la case « éventuellement éligible à un remboursement de transport a posteriori » ? Quel patient engagera des frais de transport sanitaire sans savoir s’il pourra être remboursé ? Si je comprends votre intention, je ne vois pas, en revanche, comment votre dispositif pourrait fonctionner. Soit un patient est éligible à la prise en charge du transport, soit il ne l’est pas.
Nous avions évoqué en commission une piste plus opérationnelle, consistant à permettre le versement d’une indemnité kilométrique en cas d’utilisation du véhicule personnel en deçà de la limite actuelle de 150 kilomètres. Il y aurait peut-être là une piste permettant de développer un transport sanitaire moins coûteux. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la santé, des familles, de l’autonomie et des personnes handicapées.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l’autonomie et des personnes handicapées
Je sais, monsieur Rousset, combien vous tenez à modérer les frais de transport par une amélioration de leur prescription. Le paiement a posteriori des frais de transport, toutefois, tel que vous l’envisagez dans l’amendement, entraînerait une diminution de l’accès aux soins, dans les endroits isolés notamment, pour des raisons financières. Il est vrai que les frais occasionnés par les transports connaissent une croissance importante, supérieure à 6 % par an, pour un coût de 6 milliards pour l’assurance maladie.
Nous devons plutôt travailler sur la pertinence des prescriptions, afin d’éviter celles qui ne seraient pas nécessaires. Je vous demande de retirer votre amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Je comprends vos arguments. Reste que c’est un sujet très important, sur lequel nous devons progresser. Le bon de transport est actuellement très mal rédigé. Ce n’est souvent pas le médecin qui le remplit, mais une assistante médicale ou une secrétaire, ce qui est source d’un certain nombre de confusions.
J’accepte de retirer mon amendement si vous vous engagez à faire en sorte que l’on puisse dorénavant rédiger des bons de transport faisant clairement savoir que le transport personnel est possible et remboursé sur la base d’un forfait kilométrique. Certains malades – j’en connais – ont envie de partir par leurs propres moyens et se plaignent de ce qu’on ne leur en a pas laissé la possibilité. Prenez-vous un tel engagement ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Un patient, même si on lui fait un bon de transport, n’est pas obligé de l’utiliser et d’être pris en charge par l’assurance maladie.
Mme Josiane Corneloup
Mais ce n’est pas la question !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je maintiens donc ma demande de retrait.
(L’amendement no 1412 est retiré.)
Article 22
Mme la présidente
La parole est à M. Guillaume Florquin.
M. Guillaume Florquin
Depuis des années, l’hôpital public traverse une crise profonde : manque de moyens, épuisement des personnels, fermeture de lits. Les soignants n’en peuvent plus de ce système qui ne les écoute plus et d’une gestion comptable déconnectée du terrain. Partout, ce sont les mêmes symptômes : services saturés, urgences débordées, administrations toujours plus lourdes. Tel est le contexte dans lequel est inscrit l’article 22, qui vise à simplifier et à harmoniser les règles de financement et de facturation hospitaliers.
Une telle clarification est la bienvenue, car la complexité du système a fini par étouffer les établissements eux-mêmes. Soyons cependant lucides : la racine du problème réside dans le mode de financement actuel, la T2A – la tarification à l’activité.
Ce mécanisme, présenté lors de sa création comme une modernisation, a transformé l’hôpital public, depuis vingt ans, en entreprise soumise à une logique de rentabilité plutôt qu’attaché à sa mission première : soigner. Il a fait exploser la charge administrative, découragé les vocations et conduit à la fermeture de lits jugés non rentables.
Résultat : un hôpital épuisé, suradministré et livré à la logique comptable. Le Rassemblement national défend une refonte complète de la T2A pour mettre fin à cette politique qui a asphyxié les soignants. Nous proposons de redéfinir le mode de financement de l’hôpital public en revenant à une dotation globale afin de garantir la qualité des soins.
Cette réforme s’inscrit dans le projet plus large de Marine Le Pen : débureaucratiser l’hôpital, redonner le pilotage aux médecins et supprimer les agences régionales de santé (ARS), symbole d’un centralisme technocratique inefficace.
Notre objectif est clair : rendre à l’hôpital sa mission de service public, centrée sur la qualité des soins et la dignité des personnels. Fidèle à cette vision, le groupe Rassemblement national votera pour l’article 22, tout en appelant à une réforme bien plus ambitieuse du financement hospitalier. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher.
Mme Élise Leboucher
Il est étonnant que, sur le seul article visant à simplifier et sécuriser le financement des établissements de santé, vous parliez de tout, sauf de la manière d’assurer des dotations suffisantes aux établissements – notamment les établissements publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Vous évoquez des mesures techniques – dématérialisation des échanges, pérennisation du coefficient honoraire ou création de groupements de coopération sanitaire (GCS), par exemple.
Mais j’aborderai un sujet plus simple et qui me tient particulièrement à cœur : la psychiatrie. En cette année de grande cause nationale, comment se fait-il qu’aucun article du PLFSS ne traite du financement de la psychiatrie publique, pourtant en crise ? (Mêmes mouvements.) Elle souffre d’un retard de financement, accumulé au fil des décennies. La Cour des comptes a montré qu’entre 2008 et 2018, le financement des établissements de psychiatrie privés avait augmenté de 46,9 %, contre seulement 12,7 % pour les établissements publics.
La grande cause nationale, dont je rappelle qu’elle représente un investissement de 1,66 euro par personne, devrait au moins permettre de questionner l’effondrement de la psychiatrie publique, et en particulier celui de la pédopsychiatrie – même si la faiblesse des dotations concerne en réalité tous les secteurs.
À cet égard, la création de dispositifs comme la dotation populationnelle ou les missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac) visait à mieux répondre aux besoins de chaque établissement. Pourtant, avec cet article, vous voulez supprimer la consultation des fédérations représentatives des établissements de santé, qui sont pourtant les plus à même d’exprimer leurs besoins.
Nous regrettons que le seul article portant sur la sécurisation du financement des établissements de santé n’évoque pas la privatisation croissante de notre système ni la défense de nos établissements publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Turquois.
M. Nicolas Turquois
Je salue cet article, qui va dans le bon sens. Certes, il ne résout pas tous les problèmes de l’hôpital, mais il reste qu’il faut simplifier les procédures.
On entend régulièrement qu’il faudrait plus de moyens pour l’hôpital – nos collègues viennent de tenir à nouveau ces propos. Or, ces dernières années, nous avons débloqué énormément de moyens supplémentaires (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP) et, pourtant, l’impression demeure que l’hôpital fonctionne de moins en moins bien.
Il faut regarder objectivement ce qui se passe. Nous sommes tous attachés à l’hôpital public, mais constatons que certains hôpitaux fonctionnent mieux que d’autres ; constatons aussi qu’il existe des compétitions entre établissements pour attirer les professionnels de santé dont ils ont besoin, ce qui coûte très cher aux finances publiques. Reconnaissons que certains services dysfonctionnent. C’est seulement lorsque nous oserons aborder ces réalités de manière rationnelle et posée que nous pourrons avancer.
Oui, il y a de la souffrance à l’hôpital ; oui, il y a des manques. Mais soyons lucides : certains établissements fonctionnent bien mieux que d’autres. Pour faire progresser le débat sur l’hôpital, il convient de prendre le temps nécessaire et d’observer la situation sur place. (M. Yannick Monnet s’exclame.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Je ne m’étais pas inscrit sur cet article, mais je voudrais réagir aux précédentes interventions et apporter mon soutien aux propos de mon collègue Turquois. Cet article est bienvenu : tout ce qui contribue à la simplification à l’hôpital est une bonne chose, et nous devons aller dans cette direction. L’organisation hospitalière est devenue de plus en plus lourde, sans que l’on observe une réelle amélioration.
En outre, comment fonctionnent nos hôpitaux ? En interne, il faut se poser la question. Nous ne pouvons plus rester sur le même schéma que dans les années 1950, lorsqu’on a créé les centres hospitaliers universitaires (CHU), puis les hôpitaux.
Pourtant, nous sommes restés figés avec le fonctionnement de cette époque. Des problèmes de fiabilité, d’infections nosocomiales et d’autres difficultés se sont ajoutés, qui ont sédimenté au fil du temps. Ainsi, dans de nombreux hôpitaux, les blocs techniques et les blocs opératoires sont sous-utilisés. Cela empêche nos établissements d’atteindre leur plein rendement. Ce n’est pas un problème de personnes, mais bien de structure et d’organisation. Nous devons revoir le fonctionnement hospitalier.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Le débat sur l’hôpital public est important. J’ai le souvenir – c’est peut-être lié à mon âge – de la mise en place de la T2A et des effets qu’elle a entraînés dans les années qui ont suivi, notamment en matière de répartition des services.
Au Havre, les cliniques privées ont pris ce qui était très rémunérateur : tout n’était pas payé de la même manière et ce qui rapportait de l’argent partait vers le privé, tandis que l’hôpital public conservait les activités les plus mal rémunérées par la T2A, comme la gérontologie. Avec ce système, nous avons créé une distorsion entre public et privé.
Vous affirmez que certains hôpitaux fonctionnent mieux que d’autres. Peut-être, mais, surtout, certains mériteraient davantage de soutien. Quand on analyse la cartographie sanitaire de notre pays, on constate que les besoins de santé bien plus importants dans certains territoires. Or la T2A s’applique de manière uniforme et ne tient pas compte de ces réalités.
Il est donc nécessaire de réformer le financement des hôpitaux en tenant compte de la réalité des territoires et des pathologies. Il faut sortir du modèle de la T2A tel que nous l’avons connu jusqu’à présent. Elle a peut-être eu des effets positifs en mobilisant les énergies, mais elle a aussi produit des effets négatifs considérables, que l’on n’avait peut-être pas imaginés au moment de son institution.
M. Philippe Vigier
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je rappelle que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) hospitalier pour 2026 s’élève à 112 milliards d’euros, en hausse de 2,4 %. Cela représente une augmentation de 2,3 milliards d’euros par rapport à l’année dernière. En outre, une grande partie du milliard supplémentaire d’Ondam annoncé par le premier ministre sera destinée aux établissements de santé.
Par ailleurs, vous avez adopté une réforme du financement des établissements de santé en application de laquelle une partie des crédits relèvent désormais de la dotation populationnelle. Celle-ci est justement destinée à prendre en compte les spécificités des territoires, monsieur Lecoq, ainsi qu’à compenser les effets de la T2A que vous avez décrits.
La transformation n’est pas encore totalement appliquée partout, car elle est techniquement complexe, mais elle est bel et bien engagée.
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 978 et 643, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Hendrik Davi, pour soutenir l’amendement no 978.
M. Hendrik Davi
Les alinéas 5 et 13 de cet article visent à supprimer l’avis des organisations nationales représentatives des établissements de santé concernant le financement de ces derniers. Ce n’est pas possible !
C’est une obsession en Macronie : ne pas tenir compte de l’avis des intéressés. Or c’est le principe même de la démocratie sociale et, dans la vie réelle, ce n’est pas efficace – on ne peut pas avoir un système de santé performant si l’on considère que les énarques et les administrations peuvent remplacer la voix des salariés.
C’est pourquoi nous plaidons pour la suppression de ces alinéas afin que l’avis des représentants des organisations en question demeure obligatoire. J’ose espérer qu’il ne s’agit que d’une erreur d’écriture.
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 643.
M. Yannick Monnet
Il est défendu. J’en profite pour répondre à la ministre : selon la Fédération hospitalière de France (FHF), il manque 2,8 milliards à l’hôpital. Le milliard supplémentaire dont vous avez parlé comblera à peine le milliard immédiatement manquant du fait de l’Ondam que vous prévoyez. Mais le déficit de 2,8 milliards, lui, demeure.
M. Jean-Paul Lecoq
Bref, le compte n’y est pas !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
En l’état du droit, la consultation des fédérations doit être systématique. Mais, en réalité, cela alourdit la procédure : on ne parvient pas toujours à obtenir leur avis à temps, ce qui conduit à notifier plus tardivement les dotations aux établissements, alors qu’ils ont besoin de les connaître le plus tôt possible pour s’organiser. C’est un argument auquel je suis plutôt sensible, d’autant que les fédérations ont été étroitement associées à la mise en œuvre des réformes de financement et qu’elles sont régulièrement en lien avec les pouvoirs publics.
J’ai interrogé ces organisations : si la Fédération de l’hospitalisation privée est plutôt opposée à cette mesure de simplification, la FHF, la Fédération hospitalière de France – que le président de commission connaît bien –, elle, n’y voit pas réellement de problème, dans la mesure où les fédérations sont régulièrement informées.
La simplification est un enjeu important pour les hôpitaux. Il faut parfois accepter un peu moins de procédure pour obtenir un peu plus d’efficacité. Ce qui intéresse les établissements, c’est avant tout de connaître leur dotation le plus tôt possible, et ce mécanisme de consultation ne doit pas les en empêcher.
Je m’en tiendrai donc à l’avis de la commission, qui a rejeté ces amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Certains d’entre vous estiment que l’hôpital manque de moyens. Peut-être n’en a-t-il pas assez, mais sachez qu’en 2017, l’Ondam hospitalier s’élevait à 79 milliards d’euros par an, et qu’aujourd’hui, il atteint 112 milliards par an, soit 33 milliards de plus pour nos hôpitaux.
M. Jean-Paul Lecoq
Qu’en est-il des besoins ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
On ne peut donc pas dire que nous avons fait des économies majeures sur l’hôpital ces dernières années. Certes, en 2026, l’augmentation sera proportionnellement moins forte que les années précédentes, mais le budget est toujours en hausse.
Je suis défavorable aux amendements, pour les mêmes raisons que le rapporteur général.
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Maudet.
M. Damien Maudet
Nous voterons évidemment ces amendements afin que les soignants puissent être consultés et entendus. Je souhaite réagir aux interventions de mes collègues, notamment à la bouillie de M. Turquois, qui estime que certains hôpitaux fonctionnent bien et d’autres moins bien – qu’il faudrait examiner la situation cas par cas.
Ce que vous affirmez est du pain béni pour nous ! (M. Laurent Marcangeli s’exclame.) En réalité, le gouvernement a supprimé 30 000 lits en cinq ans et l’hôpital fait face à un sous-financement chronique : certes, les budgets ont augmenté en volume, mais les besoins progressent de 4 % chaque année, et vous donnez toujours moins que ces 4 %. Vous sous-financez donc l’hôpital !
En outre, 10 % des services ont fermé cet été. Même la Haute Autorité de santé et Samu-Urgences de France nous alertent sur la multiplication des accidents graves liés au manque de personnel ou à l’absence de prise en charge.
Et vous osez dire qu’il faut traiter les hôpitaux au cas par cas ? Non ! Le problème est systémique. Continuez de vous voiler la face si vous le souhaitez ; les soignants, eux, en paient le prix. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Monsieur Maudet, nous ne nous voilons pas la face. Arrêtez de tenir de tels propos. Les fermetures sont liées au manque d’infirmiers et d’infirmières – nous avons ouvert plus de 15 000 postes. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Alors, d’où vient le problème ? Du fait que l’on a appliqué les 35 heures à l’hôpital sans compensation. Petit à petit, depuis cette réforme, le rythme de travail des soignants est devenu intenable.
Nous avons désormais mis des moyens, et augmenté le nombre d’infirmiers et d’infirmières formés. Dans mon département, je me suis battu pour que l’on ouvre davantage de places de formation. Mais il y a toujours beaucoup de postes non pourvus. C’est pour cette raison que des lits sont fermés.
Petit à petit, nous comblerons ce manque. Il faut arrêter de peindre la situation en noir !
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Le sous-financement coûte cher. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Quand on ne met pas les moyens qu’il faut au moment où il le faut, on se retrouve avec des emprunts, un personnel dont les conditions de travail laissent à désirer et un manque d’effectifs, et on est alors obligé de recourir à l’intérim pour faire tourner les services. L’intérim des médecins cardiologues ou anesthésistes a coûté aux hôpitaux un pognon de dingue – comme dirait l’autre – (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – M. Gérard Leseul applaudit également), accélérant la montée du déficit. Pour sortir de la spirale infernale des conséquences financières du sous-financement, il faut mettre les moyens qu’il faut tout de suite et en masse.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Le débat sur l’état de nos hôpitaux pourrait nous occuper tout l’après-midi. Soit on sous-finance les hôpitaux en gardant le même mode d’organisation qu’il y a vingt ans, soit on fait évoluer le mode de financement et l’organisation de nos établissements, avec un transfert des malades vers la ville. C’est ce que nous essayons de faire. Les professionnels s’organisent pour prendre les patients plus vite en sortie d’hôpital ou avant qu’ils soient hospitalisés. Tout le travail que nous menons avec les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) – appelées à devenir les communautés France santé – vise à améliorer l’organisation pour diminuer la charge pesant sur l’hôpital.
M. Philippe Vigier
Exactement !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Nous devons faire évoluer notre hôpital pour l’adapter à l’évolution des maladies et aux changements démographiques.
Par rapport aux pays voisins, nous avons un nombre de lits par habitant très supérieur ;…
M. Philippe Vigier
Oui !
Mme Stéphanie Rist, ministre
…n’en a-t-on pas trop ? On peut se poser la question. Cela ne signifie pas qu’il faut fermer des hôpitaux – le premier ministre a clairement annoncé qu’on ne le ferait pas –, mais ne faut-il pas transformer nos modes d’organisation et de prise en charge des patients ? Je le crois. Les financements ne vont pas pleuvoir sur une population vieillissante ; nous devons urgemment avancer sur ces questions pour que, dans dix ans, chacun puisse toujours être pris en charge dans un hôpital public. (M. Michel Lauzzana applaudit.)
(L’amendement no 978 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 643 tombe.)
Mme la présidente
L’amendement no 2523 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
(L’amendement no 2523, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 644 de Mme Karine Lebon est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’amendement n’a pas été examiné en commission. À titre personnel, avis défavorable.
(L’amendement no 644, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 645 de Mme Karine Lebon est défendu.
(L’amendement no 645, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 2524 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Favorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2524.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 185
Nombre de suffrages exprimés 87
Majorité absolue 44
Pour l’adoption 86
Contre 1
(L’amendement no 2524 est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 2107 de M. Vincent Thiébaut est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Demande de retrait.
(L’amendement no 2107 est retiré.)
Mme la présidente
L’amendement no 2511 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
(L’amendement no 2511, accepté par le gouvernement, est adopté.)
(L’article 22, amendé, est adopté.)
Après l’article 22
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 22.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l’amendement no 2337.
M. Jean-François Rousset
Les praticiens hospitaliers à temps plein peuvent exercer une activité libérale dans les établissements publics de santé. Cette activité est encadrée et donne lieu à perception d’honoraires en sus du tarif du séjour. S’agissant de la radiothérapie, ces honoraires ne sont reversés à l’hôpital qu’à hauteur de 60 % ; or, dans le même temps, l’assurance maladie finance intégralement le séjour à l’établissement pour ces mêmes séances, via les tarifs hospitaliers. Nous sommes donc face à un double financement du temps médical par l’assurance maladie, une première fois au titre du tarif hospitalier, une seconde au titre des honoraires des praticiens. Pour la radiothérapie, le double financement est total car la tarification libérale couvre déjà l’entièreté des charges, y compris le coût d’investissement en matériel. Cela n’est pas souhaitable – ni du point de vue comptable ni du point de vue philosophique.
Par ailleurs – ce n’est pas anodin –, la réforme du financement de la radiothérapie va harmoniser la nomenclature et les tarifs entre les établissements publics et le secteur libéral. C’est le moment de mettre fin à cette anomalie de financement croisé. Le présent amendement déposé par le groupe Ensemble pour la République vise à rendre la double facturation impossible.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Votre amendement est le premier d’une série qui soulève le sujet de l’activité libérale des praticiens hospitaliers. Celle-ci est limitée à 20 % de leur temps de travail. Les praticiens facturent les honoraires directement au patient et perçoivent cette rémunération en plus de leur salaire au sein de l’hôpital. En contrepartie, ils versent une redevance à l’hôpital.
Vous appelez à ne plus rembourser aux hôpitaux les séjours de radiothérapie qui correspondent à l’activité libérale d’un praticien hospitalier. Cela signifie concrètement qu’on va enlever de l’argent aux hôpitaux. Vu les déficits auxquels ils sont confrontés, je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Par ailleurs, lorsqu’on voit les difficultés de recrutement dont souffrent les établissements, il n’est pas non plus judicieux de trop verrouiller l’activité libérale à l’hôpital. Si nous allons dans ce sens, les hôpitaux auront encore plus de mal à attirer les professionnels. Sans vouloir vous manquer de respect, il me semble que vous vous trompez de cible dans la mesure où votre amendement conduit à enlever aux hôpitaux à la fois des moyens et des leviers d’attractivité. La vraie bonne idée serait de renforcer le contrôle de l’application des règles.
La commission n’a pas examiné l’amendement ; à titre personnel, j’y suis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Vous proposez qu’on ne puisse pas payer, pour la même séance, à la fois le professionnel libéral qui vient exercer dans l’établissement et l’établissement lui-même. Il y a deux ans, on avait voté la réforme du financement de la radiothérapie, à laquelle je tiens beaucoup ; un des articles du présent budget recule d’ailleurs, pour des raisons techniques, la date d’entrée en vigueur de cette réforme à 2027. L’amendement va dans le même sens, donc j’y serai favorable. Je propose en revanche le retrait des amendements suivants qui étendent le mécanisme d’interdiction de la double facturation au-delà de la radiothérapie.
(L’amendement no 2337 est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 2189 et 1219, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 2189.
Mme Annie Vidal
Il ressemble au précédent. L’assurance maladie rembourse deux fois la même prestation lorsque les patients sont pris en charge dans le secteur libéral au sein d’un établissement public de santé. Cette situation, qui a été dénoncée par la Cour des comptes, recèle quelque 300 millions d’euros d’économies possibles. L’amendement vise à clarifier les facturations des actes réalisés par des praticiens hospitaliers qui exercent en secteur libéral.
M. Jean-Pierre Vigier
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme Katiana Levavasseur, pour soutenir l’amendement no 1219.
Mme Katiana Levavasseur
Il tend à mettre fin à une anomalie signalée par la Cour des comptes. Lorsqu’un praticien hospitalier exerce une activité libérale à l’hôpital, l’assurance maladie peut payer deux fois le temps médical, via les honoraires médicaux d’une part, et via le tarif hospitalier d’autre part. L’amendement vise à clarifier les règles de facturation afin d’assurer une rémunération juste du travail médical et d’éviter tout cumul de financement au détriment de la sécurité sociale. C’est une mesure d’équité, de transparence et de bon sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Les amendements n’ont pas été examinés en commission. Comme pour le précédent amendement, à titre personnel, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Hendrik Davi.
M. Hendrik Davi
Je vous engage à faire attention. Bien sûr, nous sommes contre la double facturation ; mais le cas des orthophonistes montre que tout n’est pas si simple. Certains centres médico-psychologiques (CMP) ne disposent plus d’orthophonistes et envoient leurs patients chez des orthophonistes libéraux ; le même patient se retrouve donc à être suivi, pour la même pathologie, à la fois chez un praticien libéral et en CMP. L’assurance maladie demande par conséquent aux orthophonistes de rembourser les honoraires qu’ils ont perçus. Beaucoup d’autres professions libérales peuvent se retrouver dans la même situation ; il faudrait donc préciser si les amendements proposés tiennent compte de ce risque.
Cet exemple montre que la tarification à l’acte n’est pas la solution, mais crée au contraire des problèmes puisque des patients vont un coup à l’hôpital, un coup chez un praticien de ville. On se retrouve avec des situations folles. Les orthophonistes nous ont alertés : cette situation les met en danger. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal.
Mme Annie Vidal
Ce n’est pas de cela qu’il s’agit. L’amendement que j’ai présenté parle de praticiens hospitaliers qui exercent en secteur libéral. Leur activité fait l’objet d’une double facturation – une pour le praticien et une pour l’établissement. Cela n’a donc rien à voir avec le cas que vous citiez, monsieur Davi.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
La question des orthophonistes et des CMP a déjà été évoquée car la situation inquiète de nombreux professionnels – vous avez raison de vous en faire l’écho, monsieur Davi. Un amendement à venir de M. Sylvain Berrios doit lever la contrainte imposée par l’assurance maladie aux orthophonistes et rétablir le fonctionnement antérieur.
(L’amendement no 2189 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 1219 tombe.)
Mme la présidente
Sur les amendements nos 1078 et 1729, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1078.
Mme Élise Leboucher
Je reviens sur la question du financement de la psychiatrie.
Par le présent amendement, nous demandons un rapport évaluant la mise en œuvre de la réforme du financement de la psychiatrie de 2023 et les inégalités de financement entre les établissements publics et privés de psychiatrie. La psychiatrie publique souffre du retard de financement accumulé durant les dernières décennies. La réforme du financement de 2023 met fin à la dualité de financement entre les deux secteurs ; néanmoins, les modes d’attribution des dotations continuent à favoriser les établissements privés, leurs homologues publics ne pouvant pas répondre aux critères de la même manière.
Nous souhaitons donc évaluer les pistes susceptibles de garantir au secteur de la psychiatrie publique un financement à la hauteur de ses besoins, et assurer une étanchéité des enveloppes entre les secteurs public et privé. C’est une demande directe de la FHF qui nous alerte en permanence sur la nécessité de veiller à l’équité de financement entre les établissements publics et privés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je suis absolument favorable à l’équité, dans tous les domaines.
Il ne serait pas inutile de faire le point sur la réforme du financement de la psychiatrie engagée en 2023. Cependant, sachant qu’elle devait induire des effets redistributifs importants entre établissements publics et privés, et entre régions, une phase de transition avait été prévue jusqu’à la fin de l’année 2025, avant l’application pleine et entière du nouveau modèle.
Or, d’après mes informations – que Mme la ministre pourra infirmer ou confirmer –, la transition est balbutiante car on a surtout cherché à sécuriser les dotations historiques des établissements – et pas seulement ceux du secteur privé. La marche à gravir en 2026 serait donc trop haute pour certains hôpitaux ou certains territoires. J’ai même entendu dire que la phase de transition serait prolongée jusqu’en 2028.
Vous l’avez dit, madame Leboucher, des enjeux de rattrapage assez importants existent entre les régions, ainsi qu’en faveur de la psychiatrie publique. Finalement, si Mme la ministre nous explique où en est la réforme et quelles sont les prochaines étapes de son application, nous pourrons, si vous en êtes d’accord, madame Leboucher, nous passer du rapport que vous réclamez. Votre demande est de toute façon prématurée puisque la réforme n’est pas entièrement entrée en application.
Comme en commission, je vous demande de retirer l’amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je rappelle que ce budget prévoit 65 millions d’euros pour la psychiatrie.
S’agissant de l’avancée de la réforme du financement de la psychiatrie, je vous propose de faire le point rapidement en commission des affaires sociales.
Mme la présidente
La parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Mme Anne Stambach-Terrenoir
Je suis élue en Haute-Garonne, où les trois quarts des lits de psychiatrie appartiennent aux établissements privés. Cependant, ces établissements ne reçoivent pas tout le monde, notamment ceux qui ont de trop graves problèmes d’addiction. Cela contribue grandement à la surcharge de la psychiatrie publique, dont le personnel doit assumer des prises en charge de plus en plus tardives et faire face à des situations de plus en plus difficiles.
Alors que les soignants tiraient la sonnette d’alarme depuis des mois, voire des années, à propos du manque de moyens, il a fallu une succession de drames à Toulouse l’année dernière pour que le ministre de l’époque, M. Valletoux, vienne nous voir, et que l’on demande au secteur privé de faire sa part au lieu de donner davantage de moyens à la psychiatrie publique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Le résultat, c’est qu’il y a trois jours, le personnel soignant du Centre hospitalier Gérard-Marchant, spécialisé en psychiatrie et santé mentale, était à nouveau mobilisé pour demander plus de moyens. (Mêmes mouvements.) Je leur apporte une fois de plus tout mon soutien. Il est donc urgent d’objectiver les inégalités de financement entre public et privé, qu’il faudra mettre en regard avec la charge de travail supportée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1078.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 208
Nombre de suffrages exprimés 175
Majorité absolue 88
Pour l’adoption 60
Contre 115
(L’amendement no 1078 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1729.
Mme Élise Leboucher
Il tend à ce qu’un rapport soit rédigé pour évaluer le nombre de mineurs hospitalisés dans les services de psychiatrie pour adultes. Le nombre de lits en psychiatrie ayant drastiquement diminué ces dernières années, les jeunes de plus de 16 ans sont fréquemment orientés vers le service de psychiatrie adulte. D’après la Cour des comptes, au sein de certains services d’urgence psychiatrique parisiens, 86 % des jeunes entre 15 et 18 ans ont été hospitalisés en service de psychiatrie adulte entre 2019 et 2021. Une autre étude indique que, dans les Hauts-de-France, 94 % de ces services sont amenés à prendre en charge des adolescents.
Cette situation expose ces jeunes à un risque de traumatisme majeur car l’environnement psychiatrique adulte est totalement inadapté aux situations cliniques rencontrées par les enfants et les adolescents, en plus de soulever des questions d’ordre juridique. Les pratiques d’isolement, de soins sans consentement et de contention sont particulièrement préoccupantes lorsqu’elles concernent des mineurs. L’ampleur du phénomène d’hospitalisation des patients mineurs dans les services de psychiatrie adulte reste encore peu connue, et nous manquons de données en la matière. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Demande de retrait, comme pour toute demande de rapport.
M. Hadrien Clouet
C’est un peu court !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’hospitalisation et la prise en charge des mineurs en psychiatrie sont une préoccupation que nous partageons. Les établissements ont reçu, sur l’ensemble du territoire, 175 millions d’euros ces dernières années, pour mener 435 projets concrets leur permettant de s’adapter à la prise en charge des mineurs.
Quant à la réforme du financement de la psychiatrie, dont traite également votre amendement, les fédérations hospitalières privées me disent qu’elle n’est pas adaptée et qu’elle leur nuit, tandis que les fédérations hospitalières publiques soutiennent qu’elle favorise le privé.
M. Hadrien Clouet et Mme Élise Leboucher
Finalement, ça ne marche pas !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Quoi qu’il en soit, comptez sur moi pour examiner le problème.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Nous voulions que vous accordiez votre attention à ce sujet. Les enfants hospitalisés dans des services pour adultes peuvent être agressés par ces derniers. Des récits terrifiants d’agressions sexuelles gravissimes sur des enfants nous sont rapportés dans nos circonscriptions. Parfois, ils sont isolés pour être protégés de ces adultes, au point que certains régressent dans leur maladie, voire perdent l’usage de la parole. Il est grand temps que nous nous en inquiétions. Nous ne sommes pas en mesure d’accueillir tous les enfants ; il faut donc donner des moyens à la pédopsychiatrie mais aussi à tous les services de pédiatrie, ainsi qu’à la psychiatrie pour adultes.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau.
Mme Sandrine Rousseau
Je soutiens cet amendement parce que je voudrais vous convaincre que la psychiatrie pour les mineurs est un problème crucial. Les services hospitaliers ne sont pas prévus pour hospitaliser des jeunes toujours plus nombreux à être atteints de troubles psychiatriques. Notre rapport sur la prise en charge des urgences pédiatriques, rédigé avec Mme Nicole Dubré-Chirat, rappelait que le taux d’hospitalisation pour tentative de suicide ou auto-agression des jeunes filles âgées de 10 à 19 ans avait augmenté de 570 % entre 2007 et 2022. C’est une véritable épidémie !
Il est donc nécessaire d’en savoir davantage, car les adolescents sont placés soit en pédiatrie, où ils déstabilisent l’organisation du service parce qu’ils nécessitent une surveillance accrue, soit dans les services pour adultes, où ils ne sont pas à leur place. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS. – Mme Nicole Dubré-Chirat applaudit également.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1729.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 207
Nombre de suffrages exprimés 204
Majorité absolue 103
Pour l’adoption 98
Contre 106
(L’amendement no 1729 n’est pas adopté.)
Article 23
Mme la présidente
La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.
Mme Nicole Dubré-Chirat
Il est indispensable d’instituer une protection sociale complémentaire pour les agents de la fonction publique hospitalière, en s’alignant sur le principe posé pour les salariés du secteur privé. Cependant, pour cela, un temps de dialogue social avec les organisations syndicales est nécessaire. C’est pourquoi l’article tend à reporter au 1er janvier 2028 la date de sa mise en œuvre. On peut toutefois s’interroger sur la longueur d’un tel délai, tant la mesure est attendue par les soignants de la fonction publique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
Sur les amendements n° 525 et identiques, je suis saisie par les groupes Rassemblement national et La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Anaïs Belouassa-Cherifi.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
L’article 23 prévoit le report au 1er janvier 2028 de l’obligation pour l’employeur de financer une partie de la protection sociale des agents hospitaliers, qui devait initialement s’appliquer au 1er janvier 2026.
Si nous en sommes là, c’est parce qu’à cause de la Macronie et de l’extrême droite, nous avons été incapables, lors du débat sur la deuxième partie, de trouver de nouvelles recettes en supprimant des exonérations de cotisations sociales sur les grandes fortunes et sur les entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale ou les normes sociales et environnementales. Nous sommes donc contraints de faire des économies de pacotille sur les soignants et les agents hospitaliers qui tiennent pourtant les hôpitaux à bout de bras. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Cela s’ajoute au gel des traitements des fonctionnaires. Vous prenez encore et toujours du pouvoir d’achat à ceux qui souffrent, aux précaires et à ceux qui font que l’hôpital public reste debout.
Nous sommes cohérents jusqu’au bout en appelant à supprimer cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj
Dans un monde idéal, nous souhaiterions qu’une grande sécurité sociale couvre l’ensemble des risques, mais comme ce n’est pas le cas, il est nécessaire de prévoir une protection sociale complémentaire. En 2013, le principe de la prise en charge par l’employeur de 50 % des cotisations à une complémentaire santé a été posé. La loi de 2019 sur la transformation de l’action publique a ensuite acté la généralisation de ce principe à l’ensemble des fonctionnaires. Cela s’applique dans la fonction publique d’État, c’est en cours dans la fonction publique territoriale, mais les négociations n’ont pas avancé dans la fonction publique hospitalière.
Il est insupportable de voir que les soignants, de même que tous les professionnels qui travaillent à l’hôpital, seront les derniers à bénéficier d’une mesure dont profitent les salariés du privé depuis 2013 ou 2015, et dont les autres fonctionnaires bénéficient progressivement, ministère par ministère.
Votre prédécesseure, madame Rist, avait constaté l’échec de la négociation, qui retarde considérablement l’application de cette mesure. Cependant, un report de deux ans n’est pas envisageable : on ne peut pas admettre un tel délai.
Il est vrai que techniquement, une application au 1er janvier 2026 n’est pas possible, puisque, faute d’accord, aucun appel d’offres n’a pu être lancé auprès des opérateurs, mutualistes ou autres.
Il faut, par ailleurs, dès que le dispositif sera appliqué, que les budgets hospitaliers bénéficient d’une compensation, à moins d’être plombés par l’obligation de prendre en charge 50 % des cotisations.
L’année qui vient doit donc être mise à profit pour qu’à partir de 2027, l’ensemble des soignants bénéficient comme tous les autres salariés de France d’une protection complémentaire, et ce, sans affecter les budgets des hôpitaux.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l’amendement no 1151.
Mme Sandrine Rousseau
Il vise à supprimer l’article.
Les cordonniers sont vraiment les plus mal chaussés : les derniers fonctionnaires de France à avoir accès à une mutuelle seront ceux qui soignent les autres à l’hôpital ! Il est incroyablement cynique et violent de voir ainsi l’offre de mutuelle refusée à ceux qui se sont dépensés sans compter pendant le covid, qui ont donné de leur temps, qui tiennent à bout de bras un service public en train de s’effondrer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 1668.
Mme Christine Loir
Encore une fois, le gouvernement choisit le report. Mais reporter à 2028 l’application de la couverture complémentaire des agents hospitaliers, c’est retarder la reconnaissance que nous leur devons.
Ces hommes et ces femmes qui ont tenu nos hôpitaux à bout de bras pendant les crises sanitaires attendent pourtant encore d’obtenir un droit déjà accordé à d’autres agents publics.
Cette inégalité flagrante de traitement envoie un message désastreux aux soignants, déjà épuisés. La fonction publique hospitalière est à bout de souffle, et que lui répond l’État ? D’attendre encore !
Ce n’est pas un simple ajustement budgétaire que prévoit l’article 23, mais un renoncement politique. Quand il s’agit de reconnaître nos soignants, le gouvernement freine. Quand il s’agit de serrer les budgets, il fonce.
Nous, nous choisissons la justice et la reconnaissance. Nous demandons la suppression de cet article, comme nous l’avons obtenue en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1807.
Mme Élise Leboucher
Alors que 1,2 million d’agents de la fonction publique hospitalière attendent depuis 2021 la protection sociale complémentaire, l’article 23 tend à reporter de deux ans encore son application.
Les agents, dont près de 75 % sont des femmes, travaillent déjà dans des conditions dégradées par le sous-effectif et par les tensions constantes nées des coupes budgétaires décidées par le gouvernement. Ils sont encore privés du remboursement de leurs soins par leur employeur, alors qu’ils cotisent comme les salariés des autres secteurs. La protection sociale complémentaire devrait donc leur être accordée.
On s’appuie sans hésiter sur le personnel hospitalier, lorsqu’il s’agit de nous soigner, mais dans le même temps, on lui refuse la prise en charge complète de ses propres soins. Qui peut trouver cela acceptable ?
En attendant que le « 100 % sécu » voie le jour pour couvrir l’intégralité des frais de santé, donnons au moins aux agents de la fonction publique hospitalière la protection complémentaire dès 2026.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Sur le fond, je ne peux que partager votre indignation. Ce report est une mauvaise nouvelle pour les agents de la fonction publique hospitalière, qui ne bénéficient toujours pas de la participation de l’employeur au financement de leur complémentaire santé.
Il est légitime que toutes les fonctions publiques soient traitées de la même manière est légitime. C’est une question de justice.
Mais ne nous voilons pas la face : le véritable enjeu de l’application de cette mesure, c’est la compensation pour les établissements du coût de la participation de l’employeur. Elle n’a pas été chiffrée par l’étude d’impact, mais on l’estime à quelques centaines de millions d’euros.
Je ne veux pas faire de démagogie : mon rôle est d’envisager la manière dont s’appliquent les mesures votées par le Parlement. Or la réforme n’a pas été bien préparée, madame la ministre, et elle n’est toujours pas prête. Le contenu de la protection sociale complémentaire n’a pas été déterminé, l’appel d’offres destiné à choisir les prestataires n’a pas été lancé et les contrats n’ont pas été signés.
Mme Sandrine Rousseau
Peu importe !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Une entrée en vigueur en 2026 n’est donc simplement plus possible. Et sachant que la mise en place d’une protection complémentaire a déjà pris un certain temps dans les autres fonctions publiques, alors même que la négociation ne se heurtait pas aux mêmes difficultés, l’échéance de 2027 ne me semble pas plus réaliste.
Selon moi, nous n’avons donc pas d’autre choix – et personnellement, je le regrette – que d’entériner le report de la réforme à 2028. Si nous voulons y arriver, il faudra cependant veiller à ce que le chantier soit ouvert sans délai. J’attends, madame la ministre, que vous preniez des engagements en ce sens.
Ces amendements ont été adoptés en commission. À titre personnel, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
J’en conviens : il n’est pas normal que la fonction publique hospitalière ne bénéficie pas d’une sécurité sociale complémentaire, comme la loi le prévoit. La semaine dernière, j’ai reçu les organisations syndicales et le ministre de la fonction publique David Amiel en a fait autant.
Nous nous sommes engagés à ouvrir les négociations sous peu – la lettre de convocation doit partir demain. Toutefois, nous ne pouvons ignorer la nécessité de reporter le déploiement de la couverture complémentaire.
J’admets cependant que la date du 1er janvier 2028 peut sembler encore trop lointaine. Dans la mesure où David Amiel et moi-même avons entamé les négociations, je soutiendrai plutôt les amendements tendant à fixer au 1er janvier 2027 l’entrée en vigueur de cette mesure. Nous nous engageons à tenir cette échéance – les discussions à cette fin commenceront rapidement –, alors que nous ne savons pas comment faire pour tenir celle du 1er janvier 2026.
Je vous invite donc à repousser les amendements de suppression de l’article, mais à soutenir les amendements identiques nos 647, 1101 et 1280.
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal.
Mme Annie Vidal
Nous sommes tous désolés que la réforme de la protection sociale ne puisse être appliquée le 1er janvier 2026. Mais il serait techniquement impossible de le faire ; c’est pourquoi il ne faut pas supprimer l’article 23. Merci, madame la ministre, d’avoir indiqué que vous mettriez tout en œuvre pour que les agents de la fonction publique hospitalière disposent d’une couverture complémentaire avant le 1er janvier 2028 et, si possible, au début de l’année 2027.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Nous souhaitons tous que les agents des fonctions publiques disposent enfin d’une protection sociale complémentaire. Il était foncièrement injuste que les soignants ne puissent pas en bénéficier.
Madame la ministre, vous vous êtes engagée à tenir l’échéance de 2027 : dont acte.
Mais Jérôme Guedj l’a rappelé : les employeurs doivent payer la moitié des cotisations : il faut donc garantir aux hôpitaux la compensation de la somme correspondante, sans quoi adopter cette réforme reviendrait seulement à se faire plaisir.
Par ailleurs, on a vu comment les mutuelles et les complémentaires pouvaient se comporter : il faudra donc faire attention au contenu des contrats, à l’ampleur de la couverture proposée aux agents de la fonction publique hospitalière et à son coût. Il est essentiel que nous maîtrisions la passation de ces nouveaux marchés, dans l’intérêt des agents.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthieu Bloch.
M. Matthieu Bloch
Où est passée la reconnaissance de nos héros du quotidien, de ceux que nous avons tous encensés pendant la crise du covid ?
M. Christophe Bentz
C’est vrai.
M. Matthieu Bloch
Vous dites que le gouvernement n’est pas prêt, mais depuis combien de temps nos soignants attendent-ils cette disposition de justice ?
L’inégalité du traitement entre les agents des différentes fonctions publiques n’est pas justifiée. Je vous demande d’accélérer les procédures pour qu’enfin, les agents hospitaliers puissent bénéficier de la protection complémentaire qu’ils attendent : c’est la moindre des choses. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN.)
M. Christophe Bentz
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Fournier.
M. Charles Fournier
Vous dites que vous n’êtes pas prêts, mais l’ordonnance qui a fixé au 1er janvier 2026 l’application de la protection sociale complémentaire des agents de la FPH a été publiée en 2021 ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Selon nous, cette couverture n’offre pas la meilleure des solutions, mais elle a le mérite d’engager les employeurs à mieux protéger ces agents, souvent les premiers exposés. Comment pouvez-vous dire que vous n’êtes pas prêts, vous qui gouvernez depuis des années ? C’est un scandale ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Marcangeli.
M. Laurent Marcangeli
Rappelons que les accords devant instaurer une couverture santé complémentaire n’ont pas été signés par la majorité des organisations sociales représentatives dans la fonction publique hospitalière, qui estimaient que les spécificités des métiers de la santé n’avaient pas été prises en compte. Voilà la raison des retards que nous constatons.
Depuis quelques mois – notamment depuis mon passage au ministère de la fonction publique – les discussions ont repris.
Mme Lisa Belluco
Ah, félicitations ! (Sourires.)
M. Laurent Marcangeli
Je vous invite à retirer les amendements tendant à supprimer l’article 23, car nous ne sommes pas en mesure de proposer une protection complémentaire aux agents de la fonction publique hospitalière le 1er janvier prochain.
Les organisations syndicales sont prêtes à se mettre autour de la table et la volonté d’avancer sur le sujet est désormais partagée. Ne votons pas ces amendements ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.
Mme Sandrine Dogor-Such
En repoussant l’échéance, le gouvernement crée une rupture d’égalité entre les trois fonctions publiques : les personnels hospitaliers seront les seuls à ne pas bénéficier d’une participation de leur employeur à la couverture complémentaire de leurs frais de santé, alors qu’ils exercent les métiers les plus exigeants et les plus exposés.
C’est vraiment leur envoyer un mauvais signal ! Depuis trois ans, les hôpitaux ferment des lits faute de personnel, mais vous faites comprendre aux soignants que l’amélioration de leur protection devra attendre.
Le coût de cette couverture, 300 millions d’euros, représente moins de 0,3 % du budget de l’hôpital. Ce report n’est donc même pas une économie, mais il fragilise encore plus la confiance des agents envers l’État employeur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Rodrigo Arenas.
M. Rodrigo Arenas
Les bonnes raisons par lesquelles le gouvernement justifie son inaction sont toujours mauvaises pour ceux que les mesures reportées concernent.
Avec les arguments qu’avance le gouvernement, nous attendrions toujours les réformes de l’instruction gratuite, de l’école obligatoire et de la mixité dans les écoles : il y a en effet toujours des esprits chagrins pour expliquer qu’une réforme n’est pas possible ou qu’on n’y est pas prêt.
Nous ne sommes pas des chefs de service chargés de présenter aux politiques les voies de leur inaction ; nous sommes des députés, censés prescrire ce qu’il faut faire et comment. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Après avoir rencontré les organisations syndicales la semaine dernière, David Amiel et moi-même nous sommes engagés, je le répète, à convoquer les négociations dès la semaine prochaine. Celles-ci s’ouvriront rapidement et dureront trois ou quatre mois.
Je ne doute pas qu’elles aboutissent, pourvu que vous ne votiez pas ces amendements. Je vous propose d’adopter ceux qui tendent à reporter à 2027 la création de la couverture santé. C’est un gage de bonne tenue pour la négociation que nous projetons.
M. Fournier a raison de rappeler que la décision de créer une complémentaire santé dans la fonction publique a été prise en 2013 et que des ordonnances, à ce sujet, ont été prises en 2021.
Les agents de la fonction publique d’État seront couverts dès le 1er janvier 2026. Il n’est pas normal que ceux de la fonction publique hospitalière doivent encore patienter, mais les discussions ont été jusqu’à présent compliquées. Un accord permettant la reprise des négociations a été trouvé : avec David Amiel, je m’engage à les faire aboutir.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 1151, 1668 et 1807.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 250
Nombre de suffrages exprimés 247
Majorité absolue 124
Pour l’adoption 143
Contre 104
(Les amendements identiques nos 1151, 1668 et 1807 sont adoptés ; en conséquence, l’article 23 est supprimé.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN, LFI-NFP, SOC, EcoS et UDR.)
Article 24
Mme la présidente
La parole est à Mme Joëlle Mélin.
Mme Joëlle Mélin
Dans de nombreux domaines de la santé – imagerie, dialyse, radiothérapie ou santé vasculaire –, des groupements plus ou moins financiarisés ont une vision manifestement plus commerciale que médicale de leur activité. Ils cherchent donc à se constituer des rentes.
Ce n’est pas le cas de la majorité des praticiens.
La direction de la recherche des études de l’évaluation et des statistiques (Drees) nous fournit une comparaison entre le nombre moyen d’actes réalisés par les médecins exerçant sur des plateaux techniques lourds, à forte valeur d’innovation, et le nombre moyen d’actes réalisés par les autres médecins. Or cette statistique est inexploitable : elle ne peut servir de base aux discussions conventionnelles pour la médecine de ville et la mesure prévue à l’article 24 n’aiderait en rien la lutte contre les rentes évoquées.
Les plateaux techniques ont certaines particularités. La première est que la gravité de l’état des patients qu’ils reçoivent est très variable. Même si la Haute autorité de santé a émis diverses recommandations, qu’elles concernent des dialysés aux comorbidités plus ou moins importantes ou l’usage du PET-scan dans le traitement et le suivi d’un mélanome, les protocoles de traitement ne peuvent donc être complètement standardisés.
La deuxième particularité est le coût des investissements nécessaires, compte tenu des données de la science moderne et des innovations technologiques.
Ces deux particularités en entraînent une troisième, l’inadéquation des critères de discussion conventionnelle, qui a de fait entraîné un blocage persistant de la négociation des forfaits techniques.
La seule solution trouvée par le gouvernement pour remédier à cette situation consiste en une régulation arbitraire : la fixation unilatérale des forfaits par le directeur de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam). Mais avant de décider une telle régulation, il faudrait, comme dans le cas du modèle économique des officines pharmaceutiques dont nous avons discuté ce matin, revoir au plus tôt les paradigmes de fixation des honoraires dans les secteurs concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Vous connaissez parfaitement les secteurs dont nous parlons, madame la ministre. Les dépenses d’assurance maladie qui leur sont consacrées ont connu une évolution importante. Des rapports ont pointé des rémunérations excessives.
S’il est normal que les actes concernés soient rémunérateurs, à la hauteur des technologies utilisées, nous ne pouvons pas cautionner les dérives toujours plus nombreuses auxquelles nous assistons, lesquelles se traduisent par des fractures territoriales et une inégale répartition entre les secteurs, notamment sur le plan des rémunérations des praticiens. Je l’ai souligné à plusieurs reprises, nous assistons depuis quelques mois à une financiarisation dans certains secteurs.
Nous ne pouvons cependant pas accepter des décisions unilatérales de la part des caisses d’assurance maladie. Cela ne peut pas fonctionner ainsi. Je crois pour ma part au paritarisme : les professionnels et l’assurance maladie doivent réfléchir ensemble à un meilleur encadrement, à une meilleure régulation.
Mme la présidente
La parole est à M. Paul-André Colombani.
M. Paul-André Colombani
L’article 24 m’inquiète au plus haut point, pour plusieurs raisons. Il risque de mettre à mal le dialogue conventionnel, qui est pourtant l’un des piliers de notre système de santé, surtout si l’on envisage – comme le proposent certains dans leurs amendements – de confier au directeur de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) les pleins pouvoirs en cas d’échec des négociations conventionnelles. Rappelons que la convention médicale signée en 2024 avec les organisations syndicales représentatives de la médecine libérale avait eu beaucoup de mal à aboutir. Rappelons aussi que, moins d’un an après, tous les engagements pris envers les kinésithérapeutes, les infirmiers ou les médecins pour revaloriser certains actes, comme les visites à domicile, ne sont toujours pas tenus.
Les radiologues sont quant à eux considérés comme des rentiers. Pour ma part, je les vois plutôt comme des chefs d’entreprise. Ils ont fait douze ou treize ans d’études ; ils ont lourdement investi dans leur territoire, par exemple en y implantant des appareils d’imagerie par résonance magnétique (IRM). Or des baisses de tarifs envisagées pour la radiothérapie, qui n’étaient pas prévues par la convention médicale, mettraient en danger leurs entreprises – donc certainement l’accès aux soins dans les localités concernées. De plus, ces mesures pourraient faire des victimes collatérales : par exemple les cardiologues, dont les tarifs des échographies seraient bloqués ; ou les angiologues, évidemment, puisqu’ils n’ont pas d’autres outils que leur doppler pour travailler.
Mme la présidente
La parole est à Mme Mélanie Thomin.
Mme Mélanie Thomin
La baisse, sur décision de l’assurance maladie, des forfaits techniques rémunérant les équipements lourds, à l’instar des scanners ou des IRM, sera de 13 % d’ici à 2027 dans un territoire comme le mien. Le vote de l’article 24 de ce PLFSS aurait des conséquences concrètes là où la désertification médicale est la plus forte, dans des bassins de vie déjà fragilisés en raison de la rareté des consultations de spécialistes ou des rendez-vous de prévention pour le dépistage des cancers.
L’annonce brutale de la suspension d’un projet d’imagerie médicale à Châteaulin, dans le centre du Finistère, en fournit un exemple concret. La pose de la première pierre était programmée fin 2026, pour une ouverture en 2029. Dans ce bassin de l’agroalimentaire considéré comme une zone blanche – dépourvue de communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) –, où l’accès aux soins est limité, ces nouveaux équipements de radiologie représentaient une bouffée d’air, l’espoir d’un accès à de nouvelles ressources médicales. Dans ces territoires intermédiaires, enclavés, situés loin de l’hôpital public et des cliniques, il n’est pas possible de trahir la promesse incarnée par de ce type de projets ; ils sont indispensables pour coordonner les soins. Dans ma circonscription, les habitants me répètent souvent qu’ils travaillent et cotisent. Nous voulons faire respecter la promesse d’égalité de l’accès aux soins. Cela réclame des moyens humains autant que techniques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Le titre de l’article 24 – « Lutter contre les rentes dans le système de santé » – est prometteur ; il pourrait paraître consensuel, puisqu’il vise à tirer les conséquences de divers rapports, en luttant contre les rentes abusives. J’ai lu à plusieurs reprises son exposé des motifs afin de comprendre les intentions exactes du gouvernement. Si l’objectif de rémunérer les actes au juste prix en luttant contre les abus est louable, il faut rester attentif aux disparités entre les secteurs et entre les actes, et surtout aux différences entre l’hôpital et la ville.
Pour ce qui concerne la radiothérapie, nous avions adopté une réforme du financement du secteur. Elle devait entrer en vigueur au 1er octobre 2025, mais elle n’est toujours pas appliquée. Durant mes auditions préparatoires, plusieurs acteurs m’ont fait part de leur empressement : trop tarder reviendrait selon eux à s’exposer à la financiarisation du secteur ; je ne peux donc que déplorer la lenteur du processus. Cependant, j’ai aussi appris à cette occasion que la réforme n’était pas prête à être appliquée, et qu’elle pourrait même, d’après les tests effectués, pénaliser injustement ceux qui n’abusent pas.
L’article 24 tend à habiliter le directeur général de l’Uncam à baisser arbitrairement les tarifs si aucun avenant conventionnel n’est signé. Cela pose un problème de méthode, du moins si l’on croit aux vertus du dialogue conventionnel, lequel implique, de part et d’autre, confiance et responsabilité. Si des baisses sont justifiées, elles peuvent être utiles ; elles sont même nécessaires. Cependant, cette méthode du rabot sans concertation risque d’augmenter le reste à charge pour certains actes rares, voire de conduire à l’abandon d’actes essentiels. En effet, certains acteurs financiarisés seront peut-être tentés de privilégier les actes rentables ou très rentables, quand d’autres qui le sont moins – et qui ne seraient pas revalorisés entre-temps – pourraient être abandonnés.
Concernant l’évolution des modalités de fixation des tarifs des forfaits techniques en imagerie médicale, là encore, tout dépend des actes concernés. Parce qu’un scanner n’est pas aussi rentable qu’une IRM, beaucoup de structures hospitalières intégrées à des groupements de coopération sanitaire (GCS) ou à des groupements d’intérêt économique (GIE) pourraient en pâtir. En Lorraine, une large majorité des autorisations d’exploitation des équipements lourds sont en effet accordées à des établissements hospitaliers, lesquels sont intégrés au sein de GCS ou de GIE – puisque c’est la forme désormais privilégiée par les ARS. Modifier les forfaits techniques applicables à ces groupements n’affecterait donc pas uniquement les praticiens libéraux, mais aussi les hôpitaux qui y sont majoritairement inclus.
En fait, il faudrait plutôt revoir la réforme des autorisations, car elle produit parfois une logique inflationniste. C’est pourquoi je regrette vivement que soient jugées irrecevables toutes les dispositions cherchant à mieux associer les représentants des professionnels de santé, ceux des établissements et ceux des groupements d’intérêt public ou privé, à l’élaboration des forfaits techniques.
Il conviendrait par ailleurs, madame la ministre, de solliciter un avis renforcé de la commission des équipements matériels lourds d’imagerie médicale ; en cas d’avis négatif de cette dernière, une approbation ministérielle explicite de la décision de faire évoluer ces forfaits techniques serait bienvenue. Sinon, je crains fortement – et je rejoins en cela plusieurs collègues – que ne prévale une logique purement comptable – on dénonce assez régulièrement la logique du rabot appliqué sans discernement ! –, alors que ces forfaits revêtent un enjeu essentiel, celui de l’allocation des ressources tant en ville qu’à l’hôpital, et qu’ils induisent en outre de belles coopérations dans nos territoires. Je le constate en Lorraine : au sein de partenariats public privé gagnant-gagnant, des praticiens libéraux jouent le jeu de la permanence des soins en travaillant la nuit et le week-end à l’hôpital.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Exactement !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Ceux des acteurs qui jouent pleinement le jeu et développent des pratiques vertueuses méritent d’être écoutés et considérés plutôt que pénalisés. Bref, oui à la lutte contre les rentes abusives, oui à la lutte contre la financiarisation qui risque d’affecter ces secteurs, mais pas comme cela, d’autant que la rentabilité est très variable selon les secteurs, selon les actes et selon les territoires.
Ce sujet me rappelle un peu le débat sur le secteur des taxis…
Mme Josiane Corneloup
Ah oui !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
La situation est très différente, mais en donnant sans discernement tout pouvoir à l’assurance maladie sans tenir compte des différences entre les territoires, nous risquons d’aller contre l’intérêt des patients. Tâchons d’éviter de faire intervenir des baisses tarifaires partout de la même manière, sans distinctions.
Pour résumer, le système actuel mérite évidemment d’être corrigé mais, pour que son application soit juste et efficiente, l’article 24 doit être structurellement amendé.
M. Cyrille Isaac-Sibille et M. Philippe Vigier
Très bien, monsieur le rapporteur général !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’article 24 entend remédier à la financiarisation de notre système de santé, dont nous débattons depuis plusieurs années. Il s’agit tout d’abord d’analyser le niveau de rentabilité de chaque acteur, secteur par secteur. Il n’est pas question de stigmatiser des professionnels ou des spécialités, mais bien d’examiner la situation au cas par cas, en fonction d’un ratio entre l’excédent brut d’exploitation (EBE) et le chiffre d’affaires (CA). Cette analyse fait apparaître des niveaux élevés de rentabilité opérationnelle : 16 % dans les secteurs de la radiologie et de la dialyse, 24 % dans celui de la biologie, 27 % dans celui de la radiothérapie. Si l’assurance maladie constate des niveaux de rentabilité excessifs, il est prévu que se tiennent des négociations conventionnelles afin de faire baisser les tarifs, et qu’elle puisse en effet, en cas d’échec de ces négociations, procéder de manière unilatérale.
Il est vrai que les appareils d’imagerie coûtent très cher. Seulement lorsque des appareils dont l’amortissement est calculé sur cinq ans par l’assurance maladie sont en fait amortis en trois ans, il y a lieu de s’interroger sur cette différence, dans l’optique de mieux maîtriser les financements et de lutter contre tout ce qui pourrait favoriser la financiarisation. Encore une fois, il ne s’agit pas de stigmatiser qui que ce soit, mais bien de procéder à une analyse détaillée. Je serai donc défavorable aux amendements de suppression de l’article.
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 482 et 1135, tendant à supprimer l’article 24.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 482.
Mme Josiane Corneloup
L’article 24 introduit un dispositif unilatéral de modulation des tarifs médicaux, puisqu’il autoriserait l’assurance maladie à réduire, seule, les tarifs des actes jugés excessifs de certaines spécialités. Il s’agit selon moi d’une rupture majeure avec le principe de négociation conventionnelle qui sous-tend notre système de santé libéral. Je crains que le fait d’imposer arbitrairement de telles baisses de tarifs, sans concertation ni étude d’impact, ne conduise à une désaffection pour certaines spécialités, n’accroisse les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins et ne freine l’innovation. Nous sommes encore une fois confrontés à une logique purement comptable. Par cet amendement, nous proposons donc de supprimer l’article, afin de préserver la stabilité du cadre conventionnel, de restaurer la confiance indispensable entre les partenaires et de replacer la concertation au cœur de la régulation du système de santé.
Mme la présidente
L’amendement identique no 1135 de Mme Christelle D’Intorni est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je vous ai bien écoutée, madame la ministre. Il y a parfois des abus, j’en conviens, et à cet égard, le taux de rentabilité opérationnelle peut constituer un critère pertinent si l’on prend en compte les moyennes. Seulement la rentabilité varie aussi selon les actes et les acteurs – le forfait technique comprend d’ailleurs une part de charges variables et une part de charges fixes. En outre, il faut aussi se préoccuper du volume, en particulier dans les territoires peu denses, où certains équipements, bien que précieux sur le plan de l’accès aux soins, ne sont pas utilisés tout le temps.
Je plaide pour une méthode qui laisse plus de place à la concertation. Les négociations conventionnelles réunissent les acteurs de la ville ; or les forfaits techniques ne concernent pas ces seuls acteurs : ils concernent aussi des groupements de coopération sanitaire et des groupements d’intérêt économique au sein desquels les hôpitaux, qui ne participent pas aux négociations conventionnelles, sont majoritaires !
Finalement, un risque se présente. Madame la ministre, vous affirmez que le taux de rentabilité est de 15 % pour un GIE ou un GCS. J’ai sollicité les GIE et les GCS de Lorraine pilotés par les hôpitaux publics : effectivement, ils atteignent parfois le taux de rentabilité que vous évoquez, mais c’est ce qui leur permet de procéder à des investissements dans de nouveaux matériels !
Que des règles soient fixées pour éviter les abus que vous mentionnez, j’y souscris volontiers : modifions les règles ! Cependant, la responsabilité doit être partagée. Plutôt que de confier l’arme nucléaire à l’assurance maladie, invitons les représentants des différents secteurs à se montrer responsables et à faire des propositions pour corriger ce qui doit l’être.
Il existe des actes redondants ou inutiles. Dans le cas d’un cancer du poumon, peut-on cesser de faire des radios pulmonaires qui ne dévoilent rien à un stade précoce de la maladie alors que les scanners… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
Quel est donc votre avis, monsieur le rapporteur ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Ces amendements ont été rejetés par la commission. À titre personnel, sagesse.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’article fait suite à de nombreux rapports parlementaires sur la financiarisation de la santé. Monsieur le rapporteur général, évidemment que les acteurs seront consultés. En effet, il faudra définir les tarifs acte par acte, et même machine par machine, y compris selon leur taille et leur âge. C’est bien de cette façon que nous procéderons : définir acteur par acteur, secteur par secteur, ce qu’est une rentabilité abusive.
Nous ne mettons pas sur le même plan les différentes professions et structures. Il s’agit de faire preuve de responsabilité et de trouver un équilibre entre certains secteurs surfinancés par l’assurance maladie et d’autres secteurs sous-financés. On ne peut à longueur d’année en appeler à la lutte contre la financiarisation de la santé et vouloir supprimer cet article. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Nous sommes tous d’accord pour lutter contre la financiarisation de la santé. Le problème de l’article, madame la ministre, est qu’il revient à taper sur tout le monde. Or, si l’assurance maladie baisse le tarif pour l’ensemble des radiologues, ceux qui s’en sortiront le mieux seront les groupes financiers. Les radiologues de quartier et les GIE qui travaillent avec les hôpitaux publics, eux, subiront la mesure de plein fouet. La lutte contre la financiarisation requiert des mesures plus spécifiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj
Madame la ministre, vous avez fait référence aux nombreux rapports parlementaires sur le sujet. Rendons cependant à César ce qui est à César en saluant le travail conduit depuis deux ans par l’assurance maladie dans le cadre de son rapport « Charges et produits pour 2026 ». Ce dernier documente de façon détaillée le niveau « anormalement élevé » de la rentabilité de certains secteurs tels que la dialyse, l’anatomopathologie, la radiothérapie, la radiologie, la médecine nucléaire, entre autres. Ce rapport identifie précisément les rentes de situation que nous voulons tous éliminer.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Voilà !
M. Jérôme Guedj
Il mentionne également « l’optimisation financière » qu’opèrent certains acteurs du monde de la santé « au détriment de l’accès, de la pertinence et de la qualité des soins ». (MM. Dominique Potier et Philippe Vigier applaudissent.)
M. Cyrille Isaac-Sibille
Exactement !
M. Jérôme Guedj
Cette optimisation financière consiste en une « focalisation sur les actes les plus rentables, sélection de patients, réduction de la qualité des soins ou de la qualité du matériel utilisé, développement de l’offre de soins dans des zones attractives, en encore optimisation de la facturation pouvant aller jusqu’à l’adoption de pratiques frauduleuses. (MM. Dominique Potier et Philippe Vigier ainsi que Mme Nicole Dubré-Chirat applaudissent.)
Nous pouvons nous rejoindre, M. Isaac-Sibille, en luttant contre toutes ces pratiques avec le discernement nécessaire – qui implique, pour reprendre votre formule, de ne pas taper de la même façon sur tout le monde. Cependant, notre objectif reste clair : la santé ne peut pas être un secteur financiarisé dans lequel des fonds de pension viennent se gaver au détriment de l’assurance maladie ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, EPR et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe DR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Craignant que mon amendement no 784 ne puisse être examiné, je voudrais illustrer le problème et avancer certains éléments à prendre en compte pour affiner le diagnostic. Cet amendement a été voté à l’unanimité en commission. Il se fonde sur le rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale publié en octobre 2022, qui soulignait la bonne maîtrise des dépenses en radiothérapie par le secteur privé non lucratif organisé autour des centres de lutte contre le cancer. Malheureusement, ce secteur serait touché par le présent article alors que, toujours selon la Cour, les dépenses qui en relèvent n’ont augmenté que de 14 % entre 2013 et 2023, contre une hausse de 159 % dans le secteur libéral. Soyons donc précis dans la désignation de ceux qui méritent d’être prélevés pour des dépassements indus.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
L’article 24 n’entend stigmatiser personne, simplement rendre les dépenses d’assurance maladie plus efficientes. Madame Mélin, vous êtes la première à dénoncer la financiarisation de la santé.
Mme Joëlle Mélin
C’est vrai !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
C’est pourquoi j’espère que vous défendrez cet article. Avec lui, nous pourrons enfin passer aux travaux pratiques et, moyennant certains amendements à discuter, permettre au gouvernement de débusquer ceux qui profitent d’effets d’aubaine – je n’irai pas jusqu’à les qualifier, comme certains, de rentiers – apparus avec le temps du fait d’un manque de pilotage du système. À l’occasion de l’examen de cet article, nous verrons qui entend réellement lutter contre la financiarisation de la santé et qui soutient le laisser-aller. Je suis favorable à cet article.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 482 et 1135.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 200
Nombre de suffrages exprimés 159
Majorité absolue 80
Pour l’adoption 25
Contre 134
(Les amendements identiques nos 482 et 1135 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2526.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il s’agit de préciser la façon d’apprécier la rentabilité entre différents secteurs, actes, prestations et produits en ajoutant la mention « comparables en termes d’activité et d’investissement ».
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement no 2670.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Le sous-amendement vise à préciser l’amendement de M. Bazin. Je serai favorable à ce dernier à condition qu’il soit ainsi modifié.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
La commission a adopté cet amendement. À titre personnel, je suis favorable au sous-amendement et favorable à l’amendement uniquement s’il est ainsi sous-amendé.
(Le sous-amendement no 2670 est adopté.)
(L’amendement no 2526, sous-amendé, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l’amendement no 739.
Mme Sandrine Rousseau
Il vise à rendre l’adaptation des tarifs plus rapide quand une rente anormale est observée. Pour cela, il tend à ce que ce ne soit pas le gouvernement qui y procède – avec toute la rigidité qu’on peut imaginer de la part du ministère de la santé face à des tarifs qui peuvent évoluer prestement –, mais l’Union nationale des caisses d’assurance maladie qui, elle, se trouve au plus près des données et pourra agir avec célérité.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
La commission a rejeté cet amendement. Je suis très attaché à la négociation conventionnelle. Avis défavorable à titre personnel.
(L’amendement no 739, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2527.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il vise à supprimer la possibilité pour l’Uncam de décider seule, unilatéralement, des baisses de tarifs. Nous avons pu constater l’année dernière dans le cas des transports sanitaires que la généralisation de cette possibilité conférée à l’Uncam porte atteinte au lien de confiance tissé avec les acteurs concernés. Oui à un dialogue exigeant, non à la technique du rabot systématique !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
La procédure est la suivante : des discussions ont d’abord lieu avec les professionnels. Si, et seulement si, ces négociations n’aboutissent pas – comme ce fut le cas pour la radiologie –, alors le directeur de l’Uncam peut décider une baisse des tarifs.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Pour tout le monde !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Monsieur le rapporteur général, si vous supprimez cette possibilité, qui aura intérêt à agir ? Le financement de la sécurité sociale exige de laisser au directeur de l’Uncam – qui est aussi celui de la Cnam – ce dernier recours. Dans le cas de la radiologie, le directeur de l’Uncam avait envisagé une baisse par paliers pour que la négociation puisse reprendre à tout moment. Nous avons évidemment tout intérêt à demeurer dans le cadre de négociations conventionnelles. Cependant, si celles-ci n’aboutissent pas, le directeur de l’Uncam doit pouvoir reprendre la main.
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Croizier.
M. Laurent Croizier
La qualité du dialogue conditionne l’adhésion des professionnels aux objectifs de régulation des dépenses de santé. Pour que les négociations avec la Cnam puissent aboutir à un accord, la confiance doit être de mise, construite par le dialogue, la transparence et le respect. La confiance ne se construit pas par des décisions unilatérales.
L’amendement no 1273 que je défendrai peut-être tout à l’heure s’inscrit dans cette logique de démocratie sanitaire et de qualité du dialogue social. Les décisions tarifaires du directeur de l’Uncam, a fortiori lorsqu’elles sont prises après l’échec des négociations, doivent faire l’objet d’une motivation circonstanciée. Si l’amendement de M. Bazin n’est pas adopté, j’aurai l’occasion de demander que la décision soit ainsi motivée.
Mme la présidente
La parole est à M. Hendrik Davi.
M. Hendrik Davi
Il y a un instant, vous ne souhaitiez pas recueillir l’avis des syndicats et des salariés. En revanche, dès qu’il s’agit d’acteurs privés, vous plaidez immédiatement le dialogue. C’est toujours la même chose avec vous, ce n’est pas possible !
Nous sommes défavorables à cet amendement. Si vous dites d’emblée à des acteurs qui sont en position dominante que rien ne sera décidé sans leur accord, il est évident qu’ils ne seront jamais satisfaits et qu’ils finiront par augmenter leurs tarifs. C’est pourquoi la caisse primaire d’assurance maladie doit pouvoir, au terme des négociations et en absence d’accord, prendre une décision unilatérale. Sinon, les acteurs privés ne renonceront jamais à leur marge de 20 à 30 %, c’est évident ! (Mme Cyrielle Chatelain applaudit.)
(L’amendement no 2527 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur l’amendement no 984, par le groupe Écologiste et social ; sur l’amendement no 784, par le groupe Ensemble pour la République.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 2528 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
(L’amendement no 2528, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Croizier, pour soutenir l’amendement no 1273.
M. Laurent Croizier
Je ne vais pas reprendre l’argumentaire que je viens d’exposer à l’instant. Cet amendement vise simplement à introduire l’exigence de motivation dans les décisions prises malheureusement de manière unilatérale par le directeur général de l’Uncam, afin de renforcer la transparence, le devoir de responsabilité et la culture du respect mutuel.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cet amendement n’a pas été examiné en commission. En cohérence avec mes propos relatifs à l’article 24, j’exprime un avis de sagesse.
(L’amendement no 1273, repoussé par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2529.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il vise à préciser que le décret d’application déterminera également la périodicité des analyses de rentabilité. Il importe en effet de fixer la périodicité adéquate, pour éviter la fâcheuse tendance qui consiste à dimensionner nos politiques publiques en fonction de données erronées ou obsolètes.
Rien ne serait pire que de procéder à une régulation tarifaire qui se fonderait sur des analyses périmées. C’est le sens de mon amendement, que la commission a adopté.
(L’amendement no 2529, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 2530 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
(L’amendement no 2530, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Hendrik Davi, pour soutenir l’amendement no 984.
M. Hendrik Davi
La concentration croissante du secteur médical a favorisé l’émergence de grands groupes privés et financiarisés dans différents domaines, tels que la biologie médicale, la radiologie et la gestion d’établissements hospitaliers privés. Comme le souligne le rapport « Charges et profits » de la Cnam, leurs taux de profit, qui ont parfois doublé depuis quatre ou cinq ans, sont compris entre 15 et 25 %.
Notre santé, comme l’accueil des jeunes ou celui des personnes âgées, n’est pas une marchandise. Ces acteurs devenant systémiques, leur défaillance pourrait désorganiser l’offre de soins. L’article 24 vise à éviter des rentes qui seraient la conséquence de ces situations de position dominante.
Nous proposons de rendre publiques ces évaluations prévues par l’article, pour répondre à trois objectifs : documenter le débat public ; mesurer la financiarisation et la concentration du secteur ; anticiper les risques de défaillance, donc les risques pour la continuité des soins. Si ma mémoire est bonne, cet amendement a été adopté par la commission.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 652, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Vous souhaitez que les évaluations de rentabilité soient rendues publiques. Comme votre mémoire est excellente, vous vous rappelez aussi mon avis favorable en commission. (M. Philippe Vigier applaudit.) En effet, à défaut d’une telle publicité, ces évaluations seraient immanquablement contestées par les acteurs du secteur. Je confirme : avis favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Avis favorable pour rendre transparentes les évaluations sous forme de données agrégées – la communication des données individuelles est interdite, conformément au secret des affaires. Il s’agit d’un effort de transparence.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Je suis très favorable à l’amendement de M. Davi. La financiarisation, en cours dans tous les domaines de la santé, se fait au détriment des professionnels.
Mme Danielle Brulebois
Complètement !
M. Philippe Vigier
La cause de cette financiarisation est structurelle. Il faut en finir avec ces fameuses actions de préférence, qui permettent à certains de contrôler l’ensemble du système de santé, tout en ne détenant que 10 % ou 15 % du capital. Ce n’est plus tolérable.
Vous m’expliquerez pourquoi l’ouverture d’un centre d’IRM s’accompagne souvent de celle de deux autres ; pourquoi le forfait technique et le forfait médical ne sont pas les mêmes à Paris et en province ; et pourquoi les tarifs varient selon que la machine fonctionne à 47 % ou à 55 % de sa capacité.
C’est tout cela que nous avons la responsabilité de faire évoluer, en lien étroit avec les professionnels. (M. Laurent Croizier et Mme Sophie Mette applaudissent.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 984.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 222
Nombre de suffrages exprimés 213
Majorité absolue 107
Pour l’adoption 208
Contre 5
(L’amendement no 984 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs du groupe SOC. – M. Philippe Vigier applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 652.
M. Elie Califer
Nous proposons l’introduction d’un coefficient territorial reflétant les disparités et les retards structurels des différents territoires, afin que les baisses tarifaires décidées au niveau national ne pénalisent pas l’offre de soins dans les territoires d’outre-mer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il s’agit d’un sujet technique. Le coefficient territorial vise à apprécier le niveau de rentabilité des activités de soin en outre-mer, en tenant compte des spécificités qui caractérisent ces territoires.
Un collègue du groupe de la Gauche démocrate et républicaine m’a également sensibilisé aux risques de financiarisation du secteur en outre-mer, s’agissant notamment de l’imagerie. J’espère que notre assemblée pourra inscrire à son ordre du jour un texte visant à lutter contre la financiarisation.
En raison des charges plus élevées en outre-mer, les tarifs des produits, des actes et des prestations font l’objet d’une majoration, selon un coefficient dont on peut se demander s’il est suffisant. Cependant, ce n’est pas l’objet de votre amendement. C’est pourquoi, même si celui-ci a été adopté en commission et que votre proposition me paraît intéressante, je m’en tiendrai à un avis de sagesse.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Pour les mêmes raisons, demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Le rapporteur a raison. Je pense que l’amendement de notre collègue va desservir son territoire.
En revanche, j’appelle votre attention sur les progrès de la téléimagerie : de nombreuses images sont désormais interprétées à des milliers de kilomètres. Cet acte est facturé à un tarif plus élevé, et il importe d’en tenir compte dans le calcul du coefficient territorial. Au cours de la navette parlementaire, il conviendra donc de trouver une solution adaptée aux territoires que vous défendez.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 652.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 229
Nombre de suffrages exprimés 217
Majorité absolue 109
Pour l’adoption 201
Contre 16
(L’amendement no 652 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana, pour soutenir l’amendement no 784.
M. Michel Lauzzana
Je propose d’insérer les mots « réalisés en ville » après le mot « radiothérapie », à la première phrase de l’alinéa 17, afin de protéger le secteur hospitalier, notamment le secteur privé non lucratif et les centres de lutte contre le cancer. Entre 2013 et 2023, les dépenses dans ce secteur n’ont progressé que de 14 %, contre 159 % dans le secteur libéral. Il serait donc injuste de traiter de la même manière les secteurs hospitalier et de ville. Cet amendement a été adopté à l’unanimité par la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Ne vous inquiétez pas, monsieur Lauzzana, je précise toujours le sort que la commission a réservé aux différents amendements. Vous proposez que les économies de 100 millions d’euros attendues dans le domaine de la radiothérapie soient réalisées en ville. Comme je l’ai dit en commission, il ressort de la lecture de l’alinéa 17 de l’article 24 qu’il ne pourra en être qu’ainsi.
En effet, c’est l’assurance maladie qui procède aux baisses de tarifs en radiothérapie. Toutefois, sa compétence se limite exclusivement à la médecine de ville, dans le cadre conventionnel, conformément aux dispositions du code de la sécurité sociale. Par conséquent, elle n’a aucune compétence en matière de tarification hospitalière, celle-ci reposant sur les groupements homogènes de séjour, dont les tarifs sont fixés par arrêté de la ministre de la santé.
Nous n’avons donc aucune inquiétude à nous faire sur le champ d’application de cette mesure. Cet amendement a été adopté en commission. Je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’examen de cet amendement me permet de revenir sur la réforme du financement de la radiothérapie, que beaucoup d’entre nous avaient soutenue il y a plusieurs années, mais qui tarde à se déployer à mon goût. Elle vise à instaurer une convergence des tarifs entre les établissements publics et privés, selon un système de forfaitisation. Votre amendement me semble donc sans objet, puisque nous allons déjà vers une harmonisation de la rémunération entre les deux secteurs. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Madame le ministre, vous me dites que le secteur privé non lucratif n’est pas concerné par la baisse des tarifs de radiologie. Ai-je bien compris ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Non, j’ai dû mal m’exprimer. Nous allons vers la convergence du mode de rémunération des secteurs public, privé lucratif et privé non lucratif, dans le cadre d’une forfaitisation. Les établissements non lucratifs ne sont donc pas perdants.
(L’amendement no 784 est retiré.)
Mme la présidente
L’amendement no 2531 de M. le rapporteur général est rédactionnel.
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Avis favorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2531.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 223
Nombre de suffrages exprimés 180
Majorité absolue 91
Pour l’adoption 111
Contre 69
(L’amendement no 2531 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l’amendement no 741.
Mme Sandrine Rousseau
L’article 24 dispose que le gouvernement demande à l’Union nationale des caisses d’assurance maladie de négocier la baisse des tarifs dans les cas où est constaté un taux de rentabilité particulièrement élevé. Cet amendement vise simplement à accélérer la procédure, en se fondant sur le rapport « Charges et produits » qui permet d’identifier de manière très précise où sont les rentes. Il est donc urgent d’agir dès maintenant.
M. Dominique Potier
Bravo !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Votre amendement a été rejeté par la commission. J’y suis également défavorable à titre personnel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Vous connaissez mon engagement sur ce sujet, mais je pense que vous voulez aller trop vite. Lorsque les tarifs sont revus à la baisse – cela a été le cas tout récemment, par exemple, pour la biologie –, il faut d’abord réactualiser les taux de rentabilité. On ne peut pas, d’un côté, affirmer qu’il faut raisonner acteur par acteur et secteur par secteur, et, de l’autre, précipiter la baisse des tarifs.
Si, après réactualisation, une rentabilité excessive est constatée, il sera temps d’entamer les négociations. Mais ne brûlons pas les étapes : aller trop vite, ce serait donner des arguments aux partisans du statu quo. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.
Mme Sandrine Dogor-Such
Pour le coup, madame Rousseau – ne vous en déplaise –, nous voterons en faveur de votre amendement. L’article 24 est une étape nécessaire pour rompre avec les rentes du système de santé. Depuis trop longtemps, des différences tarifaires injustifiées entretiennent des situations privilégiées : les mêmes actes sont mieux rémunérés dans certains lieux que dans d’autres ; certains secteurs sont sanctuarisés pendant que l’hôpital et les soins de premier secours peinent à survivre.
Harmoniser, c’est rétablir la justice et la transparence, c’est mettre de nouveau le financement au service du soin et non de la rente. Madame la ministre, il faudra accompagner les établissements dans cette harmonisation, dialoguer avec les professionnels et assurer une visibilité financière pour éviter toute fragilisation. Il faut un système de santé équitable, lisible et cohérent, où chaque euro public serve la santé des Français et non les intérêts de la structure. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je me suis exprimé brièvement pour ne pas ralentir les débats, mais il me paraît nécessaire de revenir un instant sur l’enjeu de l’amendement no 741. L’article 24 prévoit 100 millions d’euros d’économies dans le champ de la radiothérapie, cependant vous l’incluez dans l’amendement no 741 avec d’autres spécialités avec l’objectif de réaliser 100 millions d’économies. Ces deux dispositions se cumulent-elles ? En outre, l’amendement no 741 inclut la radiologie et la biologie, pour lesquelles des baisses de tarif ont été décidées récemment – des objectifs d’économies pour ces deux secteurs ont en effet été votés en février 2025. Doit-on considérer que l’amendement vise à réaliser des économies supplémentaires ? Surtout, nous n’avons pas d’étude d’impact sur ces baisses de tarif, qui peuvent avoir des conséquences importantes dans certains territoires où il ne faudrait pas altérer la situation actuelle. Je suis très défavorable à ces coups de rabot arbitraires.
Je rappelle que l’amendement no 741 a été rejeté lors de son examen en commission et qu’à titre personnel j’y suis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’amendement no 741 revient à doubler ou à quadrupler la diminution des tarifs que nous proposons, mais on ne peut pas aller aussi vite. Il y a eu sur la radiologie des négociations qui n’ont pas abouti et à l’issue desquelles le directeur de l’assurance maladie a décidé de baisser les tarifs ; par l’amendement no 741, vous proposez de les baisser encore. Cependant, nous ne pouvons pas procéder ainsi, sinon nous ne pourrons plus jamais conduire de négociations conventionnelles. Il faut revoir régulièrement, selon une périodicité définie, la rentabilité – c’est ce que vous avez voté en adoptant un amendement précédent. Il faut donc regarder régulièrement si, par rapport aux tarifs, la rentabilité est excessive et, le cas échéant, prendre des décisions plus ou moins unilatérales si les négociations n’aboutissent pas, mais on ne peut pas baisser à nouveau les tarifs alors qu’on vient de le faire.
Je rappelle que l’avis du gouvernement est défavorable.
(L’amendement no 741 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS. – M. Romain Eskenazi applaudit également.)
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 921 et 2532, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
(L’article 24, amendé, est adopté.)
Mme la présidente
À 17 heures, nous avons examiné vingt-trois amendements à l’heure depuis le début de la séance. Cependant, ce chiffre ne donne pas une indication fiable du rythme auquel nous avançons, car il tient uniquement au fait que nous avons supprimé un article et donc les amendements qui s’y rattachent.
Après l’article 24
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Runel, pour soutenir l’amendement no 651.
Mme Sandrine Runel
Madame la ministre, cet amendement risque de ne pas vous plaire, car nous vous proposons d’aller très vite. Dans son rapport « Charges et produits » de juin 2025, l’assurance maladie a mis en évidence la question cruciale des rentabilités excessives dans plusieurs secteurs de l’offre de soins, dont la liste ne vous étonnera pas : la biologie médicale, la radiologie, la dialyse, la médecine nucléaire ou encore la radiothérapie.
En 2024, ces activités financées par des fonds publics ont coûté 13 milliards d’euros de dépenses pour l’assurance maladie. Or elles affichent des taux de rentabilité sans commune mesure avec le reste de l’économie. En effet, je ne connais que peu de secteurs qui font autant de bénéfices – 23 % pour la biologie, 27 % pour la radiothérapie, 16 % pour la radiologie. Dans un contexte budgétaire tendu, il nous semble important que chaque euro dépensé le soit utilement.
Nous proposons donc de donner à Mme la ministre le pouvoir de réduire d’autorité le tarif des actes dans les secteurs présentant une rentabilité excessive. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour un rappel au règlement.
Mme Sandrine Rousseau
Merci, madame la présidente, de nous avoir indiqué que nous avancions au rythme de 23 amendements à l’heure alors qu’il nous en reste un peu plus de 500 à examiner. Je demande donc à nouveau au nom de mon groupe une séance prolongée ce soir et l’ouverture de séances demain pour que nous ayons l’immense bonheur et honneur de voter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Après l’article 24 (suite)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 651 ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Madame Runel, vous connaissez le problème posé par les moyennes : la rentabilité moyenne de la radiologie s’élève certes à 16 %, mais, en y regardant de plus près, elle n’est que de 2 % pour les petits cabinets dans les territoires ruraux. Nous devons donc faire preuve de prudence avec les moyennes, car la réalité qu’elles recouvrent varie en fonction des territoires.
L’amendement no 651 tend à supprimer toute négociation conventionnelle. Vous proposez une révision automatique des tarifs à la baisse lorsque les actes sont surévalués, mais vous ne prévoyez rien de tel pour les actes sous-évalués, qui sont pourtant nombreux. Or de nombreuses structures trouvent leur équilibre dans une forme de compensation entre actes surévalués et actes sous-évalués ; sans un tel équilibre, nous n’aurons à l’avenir que des acteurs financiarisés qui ne proposeront que les actes qui ne sont pas sous-évalués, ce qui peut se retourner contre l’intérêt des patients.
Je présenterai après l’article 26, madame Runel, un amendement visant à instaurer une procédure de révision de la nomenclature dès lors que les conditions de production et de réalisation d’un acte ont évolué, assortie de la négociation d’un avenant annuel pour retranscrire ces évolutions dans les tarifs. Je vous engage à voter en faveur de ce dispositif, plus équilibré que l’amendement no 651.
À titre personnel, je donne donc un avis défavorable à l’amendement no 651, qui a été rejeté en commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je comprends votre intention. Cependant, comme l’a souligné le rapporteur général, vous vous appuyez sur des moyennes, et nous devons être attentifs aux conséquences que pourraient avoir les baisses de tarifs généralisées que vous proposez. Certains professionnels exercent en effet dans un cabinet de taille modérée et ne réalisent pas ce qu’on pourrait appeler une rente excessive. C’est pour cela que j’ai insisté lourdement, lors de l’examen de l’amendement précédent – de façon malheureusement plutôt inefficace, puisque l’amendement no 741 de Mme Rousseau a été adopté –, sur le fait que la très grande majorité des professionnels sur le terrain sont engagés et ne font pas des rentes excessives, abusives. Nous devons parvenir à cibler la petite partie supérieure de la courbe, or l’amendement no 651 ne procède pas à un tel ciblage. Nous avons besoin, acteur par acteur, je le redis, de cibler les abus excessifs. En aucun cas, nous ne devons viser l’ensemble d’une spécialité ou d’un secteur.
Je vous demande de retirer l’amendement no 651, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
J’entends ce que dit Mme Runel. Nous partageons la finalité de l’amendement no 651, mais nous sommes en désaccord sur le chemin à suivre. Je reviens sur ce que j’ai dit à Mme la ministre au sujet de la financiarisation : de nombreux montages financiers sont possibles. J’alerte nos collègues au sujet du fait que les groupes étrangers sont en train d’arriver : en radiologie, en biologie ou en pharmacie, ils sont déjà là, car nous n’avons pas su protéger ces secteurs. Comme vous le savez, madame la ministre, on a vu se multiplier les ouvertures de laboratoires boîtes aux lettres ; nous pourrions empêcher l’ouverture de sites dont on sait très bien que la qualité est loin d’être parfaite, alors que c’est la seule profession qui est accréditée en médecine. En radiologie, la télémédecine se développe de plus en plus à l’étranger, à des milliers de kilomètres. Nous devons mettre les professionnels dans la boucle pour encadrer les pratiques. Quand il y a 30 ou 50 % de téléradiologie, le contact avec les patients se perd, alors que c’est là un des fondements de la médecine.
M. François Hollande
Ah ça, c’est sûr !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 651.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 222
Nombre de suffrages exprimés 164
Majorité absolue 83
Pour l’adoption 97
Contre 67
(L’amendement no 651 est adopté ; en conséquence, l’article est ainsi rédigé.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Sur l’amendement no 1086, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue pour une durée de dix minutes.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
Article 25
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 921 et 2532, tendant à supprimer l’article 25.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 921.
Mme Josiane Corneloup
Il propose de supprimer l’article 25, qui donnerait à la Cnam le pouvoir de diminuer unilatéralement les tarifs applicables aux soins dentaires. Cet article est de même nature que l’article 24, qui contourne le cadre de la négociation conventionnelle entre la Cnam et les chirurgiens-dentistes. Nous sommes attachés à ce cadre.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2532.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’article 25 donne à la Cnam la possibilité de baisser unilatéralement les tarifs dans le domaine des soins dentaires, comme cela a été voté, l’an dernier, pour d’autres secteurs comme les transports sanitaires.
Cet article a été adopté en commission. Néanmoins, il mérite d’être examiné avec prudence, car cette régulation unilatérale, qui porte atteinte au principe de la négociation conventionnelle, ne se justifie que lorsque les leviers existants sont insuffisants.
En l’espèce, ce n’est pas le cas. Le protocole d’accord négocié en 2023 a déjà permis de renforcer la prévention et les soins conservateurs. En 2024, les dépenses de prothèses se sont nettement ralenties. Par ailleurs, des dispositifs existent pour réguler les nouveaux centres de santé. C’est un combat que j’avais mené avec Fadila Khattabi il y a quelque temps.
Lors de son audition préparatoire à l’examen de ce budget, le directeur général de la Cnam, M. Thomas Fatome, a confirmé qu’il ne ressentait pas le besoin de mobiliser ce levier supplémentaire. L’utilité de celui-ci n’ayant été étayée ni par les auditions, ni par l’étude d’impact, ni par mes propres analyses, je propose de supprimer l’article 25. Les entorses au fonctionnement conventionnel doivent se limiter aux cas de stricte nécessité.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
La commission a donné un avis défavorable. À titre personnel, j’y suis favorable.
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour un rappel au règlement.
Mme Ségolène Amiot
Sur le fondement des articles 50 et suivants de notre règlement. Je souhaiterais savoir où nous allons réellement. Nous avons calculé qu’au rythme actuel de nos débats, il faudrait prolonger la séance de plus de dix heures après minuit pour finir le texte. Ce serait une mesure extrême, tant pour nous que pour les services.
Nous avons fait l’effort de retirer des amendements pour accélérer les débats. Je sais que plusieurs groupes, sur les bancs de la gauche, ont fait de même. Serait-il possible de prévoir une séance demain ? Comme chacun le sait, mardi vont avoir lieu des commémorations dans toutes nos communes. Nous devons savoir comment nous organiser.
Mme la présidente
Au rythme où nous allons, il reste vingt-six heures potentielles de débat. Lors de la dernière conférence des présidents, nous avons décidé d’ouvrir les séances du dimanche pour ne pas ouvrir celles de lundi, afin que les députés puissent être présents aux commémorations du 11 novembre dans leurs circonscriptions. Il n’est donc pas opportun de revenir sur cette décision. La séance de ce soir sera levée à minuit, comme convenu. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Article 25 (suite)
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement sur les amendements identiques nos 921 et 2532 ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Avis défavorable. La question n’est pas d’empêcher la tenue de négociations conventionnelles, mais de trouver un levier pour faire aboutir ces dernières, car l’expérience récente montre qu’elles peuvent stagner pendant plusieurs mois.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 921 et 2532.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 155
Nombre de suffrages exprimés 151
Majorité absolue 76
Pour l’adoption 16
Contre 135
(Les amendements identiques nos 921 et 2532 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 1086.
Mme Ségolène Amiot
Il est défendu : cela devrait vous montrer que nous sommes déterminés à aller jusqu’au bout de ce texte.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Vous voulez demander au gouvernement un rapport sur les effets de la hausse du ticket modérateur sur les soins dentaires. Cet amendement a été rejeté par la commission. À titre personnel, j’y suis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1086.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 167
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 65
Contre 41
(L’amendement no 1086 est adopté.)
(L’article 25, amendé, est adopté.)
Après l’article 25
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements portant article additionnel après l’article 25.
L’amendement no 1084 de Mme Élise Leboucher est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cet amendement a été rejeté par la commission. À titre personnel, j’y suis défavorable.
(L’amendement no 1084, repoussé par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 1085 de M. Damien Maudet est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cet amendement a été rejeté par la commission. À titre personnel, j’y suis défavorable.
(L’amendement no 1085, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Article 26
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Ciotti. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Antoine Léaument
Que nous vaut l’honneur de votre présence, monsieur Ciotti ?
M. Éric Ciotti
Conformément à l’accord entre les partis macronistes et le Parti socialiste, cet article vise à taxer une fois de plus les médecins libéraux. C’est l’objet de la folie budgétaire que vous nous proposez ici : 200 millions d’euros net pour boucher un déficit de 23 milliards d’euros.
Les chiffres sont pourtant accablants : plus de 50 % des spécialistes se trouvent en secteur 2 et trois quarts des jeunes médecins commencent d’emblée dans ce secteur. Derrière ces chiffres se trouve une réalité brutale : ces médecins ne sont pas des rentiers, mais des praticiens écrasés par des charges démesurées. Et vous voulez les asphyxier davantage !
Les effets de cette mesure seront simples : les dépassements augmenteront et des cabinets fermeront. Toutes les études confirment que les taxes que vous avez votées par le passé n’ont jamais réduit les écarts : il manque déjà 20 % de spécialistes dans nos campagnes. La surcotisation les poussera à fermer leurs cabinets secondaires, à se replier sur Paris ou à fuir vers la médecine esthétique.
Ce seront des mois d’attente pour un rendez-vous, des renoncements aux soins, des urgences encore plus saturées ! Créé en 1980, le secteur 2 n’est pas un privilège mais le dernier pilier de la liberté médicale, à laquelle nous sommes particulièrement attachés, car sur elle reposent la qualité des soins et notre système même de santé ; détruire cette liberté, c’est détruire ce système, condamner des millions de Français à une médecine au rabais. Nous refusons cette logique confiscatoire : nous rejetterons l’article 26. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Thierry Frappé.
M. Thierry Frappé
En soumettant les revenus issus d’une activité non conventionnée à une surcotisation dont le montant reste à évaluer, l’article vise à renforcer l’incitation des professionnels de santé à exercer une activité conventionnée. Alors que le tarif de certains actes courants n’a pas été revalorisé depuis vingt ans, cette mesure, sous couvert d’équité entre professionnels, constitue une forme de coercition économique à l’encontre de ceux qui ont opté pour un exercice libre, rompant l’équilibre historique entre liberté d’installation et solidarité conventionnelle.
En faisant dépendre de l’adhésion au cadre fixé par l’assurance maladie le niveau des cotisations, le gouvernement franchit une ligne dangereuse, celle d’un conventionnement contraint, de l’indépendance professionnelle devenue variable d’ajustement budgétaire. Cette disposition, dont le détail est renvoyé à des décrets, conférerait à l’exécutif un pouvoir excessif : fixer et moduler sans contrôle parlementaire le taux de la surcotisation. Dans un contexte de tension croissante en matière d’accès aux soins, notamment en zone sous-dotée, cela risque de décourager l’installation de nouveaux praticiens, aggravant la pénurie.
Nous refusons cette approche punitive, qui confond incitation et sanction ; soutenir les professionnels de santé, c’est leur donner les moyens d’exercer librement dans des conditions dignes, et non utiliser la fiscalité pour les contraindre. En l’état actuel de cet article, le groupe Rassemblement national votera donc contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN ainsi que sur quelques bancs du groupe UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Le dépassement d’honoraires, sujet difficile, mérite une véritable réflexion. Yannick Monnet et moi y avons travaillé cet été : je vous suggère de lire notre rapport, il est accessible en ligne.
L’article 26 tend à surtaxer les médecins qui pratiquent des dépassements inconsidérés. Nous savons – c’est l’une des raisons qui ont donné lieu à ce rapport – que si nous le faisons, ces professionnels augmenteront encore leurs tarifs, les mutuelles en feront autant, et ce sont les usagers qui seront pénalisés. Notre travail a mis en évidence tout ce qui a déjà été dit concernant les dépassements : difficultés d’accès aux soins, propension de certains spécialistes – pas tous – à modifier leur activité en fonction des revenus estimés, etc. Il convient de rappeler aussi que 99 % des médecins généralistes ne pratiquent pas de dépassements d’honoraires, mais que cela leur pose un problème : leurs patients reviennent parfois leur reprocher de les avoir adressés à un spécialiste qui, lui, ne s’abstient pas.
Pour sortir de cette situation, nous avons formulé dix propositions, certaines relevant du domaine législatif, d’autres du domaine réglementaire, d’autres encore de la convention. À en croire les retours, les gens sont prêts à discuter, avancer. On ne peut y aller brutalement, mais il faut y aller : il y va de la survie de notre système de santé, de la réputation des médecins, dont tous ne sont pas hostiles à une révision de leurs honoraires. La nomenclature n’a pas été revue depuis 2005 : en tant que chirurgien digestif, je faisais partie des experts – nous étions deux. Elle mérite de l’être de nouveau ; nous souhaitons d’ailleurs que sa révision ait lieu de façon régulière, chaque fois qu’un acte doit être intégré ou éliminé.
Mme la présidente
Merci, monsieur Rousset.
M. Jean-François Rousset
Réfléchissez bien au travail que nous devons faire dans l’intérêt de tous. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Maudet.
M. Damien Maudet
Le sujet est extrêmement important ; peut-être est-ce cela qui nous vaut la présence d’Éric Ciotti, que nous n’avions pas vu depuis le début de l’examen du texte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Dieynaba Diop
Il ne pouvait pas sortir : il était retranché dans son bureau !
M. Damien Maudet
Un certain nombre de Français sont étouffés par les dépassements d’honoraires. L’année dernière, lors de l’examen de la future loi du 5 février 2025 visant à améliorer la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein, nous étions nombreux à proposer que ces dépassements soient pris en charge et à terme résorbés. Dans ce cadre, nous avions eu accès au témoignage d’une patiente à qui les soins – il lui avait fallu se rendre dans une clinique – avaient coûté 14 000 euros, dont 5 000 de sa poche ; 80 % des femmes atteintes d’un cancer du sein sont confrontées à ces dépassements, qui toutes pathologies confondues ont atteint en 2024 un total de 4 milliards d’euros – total en augmentation, depuis 2019, de 5 % par an hors inflation, c’est-à-dire sans compter la hausse destinée à compenser l’inflation.
Désormais, pour les ménages, les dépassements d’honoraires représentent 14 % du reste à charge. Alors que les frais de santé sont de plus en plus élevés, qu’un Français sur trois dit renoncer à des soins faute de moyens, il est impossible de ne rien faire ; même parmi les médecins, certains proposent de réguler les dépassements. Il convient de les écouter, que tout le monde fasse un effort sur ce point, afin que tous puissent se soigner et que nous n’aboutissions pas à une médecine à deux vitesses selon que les patients auront ou non les moyens de payer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj
Nous nous félicitons évidemment de cet article : il prend pour cible l’un des maux qui frappent notre système d’assurance maladie. Historiquement, monsieur Ciotti, les dépassements d’honoraires étaient prévus ; nous n’en parlerions pas si le principe fondateur en vertu duquel « les honoraires du médecin doivent être déterminés avec tact et mesure » continuait d’être respecté. Or, dans certaines spécialités, les dépassements représentent jusqu’au tiers des revenus des praticiens !
Vous objecterez qu’il s’agit de remédier à l’inadéquation tarifaire, c’est-à-dire à l’insuffisance de la rémunération prévue. Lisez les passionnants rapports du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) : il existe une corrélation entre les dépassements et l’âge du praticien, la présence dans le territoire concerné d’un nombre suffisant de médecins conventionnés en secteur 1, le niveau de vie au sein de ce même territoire. Bref, ils sont devenus une variable d’ajustement bien éloignée de la pratique médicale ! La moitié des patients qui subissent une prothèse de hanche supporte en moyenne 700 euros de dépassements, et cette somme va jusqu’à 1 000 euros.
Mme la présidente
Merci, cher collègue.
M. Jérôme Guedj
Vous fragilisez le beau principe de l’universalité de l’accès aux soins quand seuls 40 % de ces dépassements sont couverts par les complémentaires santé. C’est pourquoi cette modeste incitation à les limiter va dans la bonne direction. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Les dépassements d’honoraires posent effectivement problème ; seulement, les responsables, ce sont nous, politiques (MM. Antoine Léaument et Louis Boyard font des signes de dénégation) – nous depuis vingt ans, trente ans, comme cela a été dit.
M. Antoine Léaument
C’est vous, pas nous !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Le problème majeur réside dans la nomenclature, où à chaque acte est assigné un prix. Elle n’a pas été révisée depuis vingt ans, et si le tarif va du simple au décuple en fonction de la spécialité, c’est encore à elle que nous le devons. Pour une amygdalectomie, cotée 87 euros, vous payez 40 euros votre aide opératoire, généralement un étudiant en médecine ; restent 47 euros bruts, soit 20 euros déduction faite de vos charges. Trouvez-vous normal qu’en contrepartie d’une heure de son temps, et de la responsabilité de la vie d’un enfant placée entre ses mains, un chirurgien ne perçoive que 20 euros ?
M. Antoine Léaument
Oui !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Tout cela, je le répète, parce que la nomenclature n’a pas été révisée !
Bien évidemment, les dépassements d’honoraires sans tact ni mesure devraient être supprimés ; mais avant toute chose, il importe que le Haut Conseil des nomenclatures, installé en 2021, accélère la cotation des actes. Une fois que cela sera fait, nous pourrons sanctionner les abus. Par conséquent, tel qu’il est rédigé, je suis contre cet article du texte.
Mme la présidente
La parole est à Mme Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Je veux bien que nous parlions de tact et de mesure à condition de définir juridiquement ce que cela signifie.
M. Jérôme Guedj
On ne le sait pas !
M. Yannick Monnet
Juridiquement, ces notions n’ont aucune valeur. Reste un point d’accord avec le collègue Isaac-Sibille : tout cela est un peu la faute des politiques – à ceci près que vous continuez de commettre les mêmes erreurs. Les dépassements d’honoraires ont été autorisés en 1980 par Raymond Barre : il y avait à l’époque un problème de tarifs, et comme on refusait de doter la sécurité sociale de moyens suffisants, on a accepté que les médecins, afin de mieux se payer, recourent à cette pratique.
M. Cyrille Isaac-Sibille
C’est pour cela que je dis que nous sommes responsables !
M. Yannick Monnet
Le problème, c’est que, je le répète, lors de l’examen de la partie du PLFSS consacrée aux recettes, vous continuez de recourir à ce procédé ! À ne pas doter la sécurité sociale, on ne peut rémunérer les médecins correctement.
Je suis contre cette surcotisation car, de même que la taxation des complémentaires, elle retombera forcément sur les patients, ce que nous ne pouvons accepter. En 2024, les dépassements supportés par les patients se sont élevés à 4,5 milliards d’euros ; la mesure prévue risque d’alourdir encore cette charge. Jean-François Rousset et moi avons effectivement rédigé un très bon rapport,…
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
C’est vrai !
M. Yannick Monnet
…dans le cadre duquel nous proposons notamment que soient revues la nomenclature tarifaire ou l’option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) – avec un plafonnement à 100 %, ce qui est déjà le cas, mais aussi l’obligation pour tous les nouveaux spécialistes d’exercer 50 % de leur activité en secteur 1 et de renoncer à toute inscription hors Optam en secteur 2. Il n’est pas envisageable que des médecins qui pratiquent des dépassements d’honoraires dès leur installation le fassent en dehors d’un contrat avec la Cnam : c’est tout de même la solidarité nationale qui finance.
Nous suggérions également de relever le seuil de la complémentaire santé solidaire (C2S), aujourd’hui inférieur au seuil de pauvreté, ainsi que de renforcer les contrôles, les rendre annuels et individualisés : nous avons constaté lors des auditions l’existence de pratiques particulières, notamment le fait que l’interdiction d’appliquer des dépassements d’honoraires aux patients relevant de la C2S n’est pas toujours respectée. J’espère que le gouvernement prendra en compte toutes ces préconisations contenues dans notre rapport : au sein du PLFSS, pour l’instant, le compte n’y est pas. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 483, 783, 948, 1756 et 2533, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’objectif affiché de l’article 26 – inciter au conventionnement et réduire les dépassements d’honoraires – suscite évidemment l’adhésion d’une majorité d’entre nous, car nous ne pouvons qu’être soucieux du reste à charge.
M. Philippe Vigier
Très bien !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Néanmoins, plus je l’étudie, plus je suis convaincu que la méthode n’est pas la bonne, voire pourrait se révéler contre-productive pour les patients. Dans sa rédaction actuelle, il risque de pénaliser les médecins conventionnés, ceux qui jouent le jeu de la modération tarifaire, en ciblant indistinctement l’ensemble des praticiens en secteur 2 – quelle que soit l’ampleur des dépassements qu’ils pratiquent, qu’ils adhèrent ou non à l’Optam, qu’ils contribuent ou non à la permanence des soins, et qu’ils exercent ou non une spécialité mal rémunérée faute de réévaluation des tarifs de la sécurité sociale. Pendant ce temps, leurs confrères qui ne jouent pas le jeu du conventionnement ne seront pas concernés par cette nouvelle cotisation, alors qu’ils jouissent des mêmes remboursements de leurs prescriptions, sans avoir pris envers l’assurance maladie aucun engagement de pertinence ou d’efficience.
Ce n’est pas juste, madame la ministre. J’ai bien peur que cet article 26, si nous le laissons en l’état, n’ait d’autre résultat que de décourager les médecins d’adhérer à l’Optam, voire de les inciter à se déconventionner, si bien que les patients verront augmenter leur reste à charge. À ce problème de méthode s’ajoute une étude d’impact du gouvernement très insuffisante. Les abus existent, mais ils varient fortement selon les spécialités et les actes ; des hausses de dépassements d’honoraires ont été constatées, mais souvent accompagnées d’une hausse des charges des praticiens – soyons justes, peut-être auraient-elles pu être évitées si, ces dernières décennies, les tarifs avaient été revalorisés correctement.
Au cœur du débat se trouvent le reste à charge pour les patients, et l’équilibre économique pour l’assurance maladie. Personne ne veut évoquer l’éléphant au milieu de la pièce,…
M. Louis Boyard
François Hollande ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
…l’acteur essentiel qui manque à cette réflexion : les complémentaires santé, lesquelles prennent en charge les dépassements de manière très variable. En l’état, cet article me met mal à l’aise ; son objectif, je le répète, est juste, mais les moyens inadaptés, le dispositif n’opérant pas de discrimination. Taxer davantage n’incitera qu’à l’ajustement des honoraires, si bien qu’en dernier lieu ce sont les patients qui paieront.
Madame la ministre, je vous invite à revoir l’article 26. Sinon, on risque une sortie massive de l’option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam), une baisse des tarifs maîtrisés et, pour certains peut-être, des déconventionnements. Cela va augmenter les restes à charge pour les patients.
Je suis favorable à la lutte contre les dépassements abusifs, mais pas de cette manière.
Pour compléter ce qui a été imaginé dans le rapport de nos collègues, je pense même qu’il faudrait faciliter le retour au conventionnement. Aujourd’hui, le délai pour permettre un nouveau conventionnement me paraît dissuasif. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour un rappel au règlement.
Mme Sandrine Rousseau
Sur le fondement de l’article 91 du règlement. Pour faire avancer les débats et pour que nous ayons l’immense honneur de voter contre ce PLFSS, nous avons retiré un quart de nos amendements. J’invite tous les groupes à faire de même.
Article 26 (suite)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 483, 783, 948, 1756 et 2533.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 483.
Mme Josiane Corneloup
Encore une fois, c’est la voie simpliste de la taxation qui est choisie. Je considère qu’avant de sanctionner, il est préférable d’analyser les causes réelles de la progression des dépassements d’honoraires des professionnels de santé afin d’apporter une réponse adaptée et équitable à la question de l’accès aux soins.
Cela a été évoqué, cette disposition risque d’entraîner une hausse des tarifs et du reste à charge pour les patients. Nous sommes encore dans une approche punitive qui aggravera la pénurie.
Pour de nombreux praticiens, les compléments d’honoraires constituent un élément essentiel de l’équilibre économique de leur activité. Ils permettent d’assurer la prise en charge des patients qui relèvent de la C2S, de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) ou de l’aide médicale d’État (AME), qui représentent une part importante de l’activité des médecins exerçant en secteur 2. Mon amendement vise donc à supprimer cet article 26.
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Daubié, pour soutenir l’amendement no 783.
M. Romain Daubié
En ce dimanche après-midi, je ne suis pas là pour défendre les médecins, mais plutôt les patients et les malades. Je souhaite défendre leur liberté de se soigner et de choisir par qui et où ils sont soignés.
Cet amendement de suppression vise à maintenir la pratique des compléments d’honoraires. Elle est indispensable dans la mesure où certains tarifs n’ont pas été augmentés depuis 1999. Mes chers collègues, quel que soit votre bord politique, qui accepterait qu’un salarié, qu’un agent de la fonction publique, qu’un retraité n’ait pas vu son salaire, sa rémunération, sa retraite augmenter depuis 1999 ? Personne.
Mme Danielle Simonnet
Et le gel du point d’indice des fonctionnaires, c’est quoi ?
M. Romain Daubié
Madame la ministre, je vous invite également à relire le rapport de la Drees qui explique que ces compléments d’honoraires sont indispensables.
M. Antoine Léaument
Ce n’est pas vrai !
Mme Christine Pirès Beaune
Sortez les mouchoirs !
M. Romain Daubié
Ils sont indispensables pour financer les équipements technologiques et notamment les nouvelles machines, pour financer les primes d’assurance qui ne cessent d’augmenter et pour payer décemment les aides opératoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 948.
M. Paul-André Colombani
Cet amendement vise à supprimer l’article 26 du PLFSS, qui prévoit la création d’une surcotisation sur les revenus issus des activités non conventionnées des professionnels de santé. Cette mesure n’est pas adaptée à la situation économique et structurelle de la médecine libérale et ne tient pas compte de la diversité des pratiques et des réalités de terrain.
À défaut de revoir la nomenclature qui date de 2005, la mesure ne fonctionnera pas. Si on reprend l’exemple de la prothèse de hanche, posée aujourd’hui dans tous les blocs de France, elle n’est plus payée au laboratoire au tarif de 2005. De même, les aides opératoires ne sont plus rémunérés au salaire de 2005. Une grande partie des dépassements d’honoraires sont donc malheureusement provoqués par le blocage de cette nomenclature.
Le rapport de nos collègues Rousset et Monnet est très intéressant, et je pense qu’il faut s’appuyer sur leurs recommandations pour traiter le problème plutôt que sur les dispositions proposées dans cet article 26. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
L’amendement no 1756 est-il défendu ?
(L’amendement no 1756 est retiré.)
Mme la présidente
L’amendement no 2533 de M. Thibault Bazin est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Ces amendements ont été rejetés par la commission. Avis favorable à titre personnel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
En France, on compte 25 000 médecins spécialistes exerçant en secteur 2. On en a besoin.
Près d’un spécialiste sur dix s’installe en secteur 2. Plus de la moitié des médecins spécialistes pratiquent des dépassements d’honoraires, et la moitié de ces derniers le font de manière limitée à travers l’Optam, qui permet de conventionner pour éviter des dépassements trop importants. Cela dit, je suis extrêmement attentive à la hausse des dépassements constatée ces dernières années – 4,5 milliards d’euros en 2024.
On ne peut que déplorer que les dérives de certains professionnels aient un impact majeur sur le reste à charge des Français. Ces dérives ont conduit le gouvernement à proposer une taxation des dépassements, mais mon intention n’est pas de pénaliser le secteur 2. Je souhaite que nous puissions, en concertation avec les médecins et les organismes complémentaires, remettre à plat l’ensemble du système.
Une nouvelle nomenclature des actes sera enfin proposée à la fin de l’année – il faudra d’ailleurs réformer le système afin que la révision de la nomenclature ne prenne plus autant d’années.
Il faut aussi pouvoir s’accorder sur les conditions d’accès au secteur 2, définir un nouveau contrat de maîtrise des honoraires et repenser l’engagement des organismes complémentaires. Tous ces sujets sont liés, comme cela a été dit dans le rapport des députés Rousset et Monnet.
Je propose que des discussions soient ouvertes dans les prochaines semaines sous la responsabilité de la Caisse nationale d’assurance maladie avec les médecins, avec les associations de patients, avec les organismes complémentaires et, bien sûr, avec mon ministère. Je ne souhaite pas passer en force sur ce sujet. Mettons-nous donc autour de la table pour avancer.
J’entends les débats, j’entends les professionnels, et je ne souhaite pas supprimer cet article : faisons plutôt en sorte qu’il puisse évoluer dans le cadre la navette parlementaire. Je vous demande donc de retirer votre amendement, sans quoi j’y serai défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthieu Bloch.
M. Matthieu Bloch
L’article 26 part d’un constat que nous partageons tous : la progression des dépassements d’honoraires et la difficulté d’accès aux soins. Mais la réponse retenue, celle de surtaxer les revenus issus d’activités non conventionnées, est une réponse simpliste qui ne traite en rien les véritables causes de la situation.
Cette simplification, reconnaissons-le, est le fruit d’une étrange coalition. C’est l’alliance des adeptes du Mozart de la finance – auteur du requiem de nos finances publiques – et des Salvador Dalí de l’impressionnisme fiscal…
Mme Dieynaba Diop
Elles sont belles, les métaphores !
M. Jérôme Guedj
C’est ChatGPT qui les a trouvées ?
M. Matthieu Bloch
… assis à gauche de cet hémicycle, où l’on peint l’impôt comme solution à tout (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN),…
…même lorsque le problème relève d’abord de la défaillance des tarifs et des conditions d’exercice.
Pourtant, les études, notamment celles de la Drees, démontrent une forte disparité des pratiques.
Pour beaucoup, les dépassements d’honoraires pallient la sous-évaluation persistante des actes médicaux dont les tarifs n’ont pas été revalorisés depuis 1999, alors même que les charges et le coût de la vie augmentent sans relâche. Mais face à cela, on propose encore de taxer ! Évidemment, nous soutiendrons ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Daubié.
M. Romain Daubié
Les complémentaires santé et les mutuelles sont un sujet important dans ce débat. Je suis gêné de voir que chaque année, ces opérateurs augmentent les cotisations et réduisent les remboursements. Ils font de la publicité sur le remboursement des consultations de naturopathie alors qu’ils laissent de côté, sans remboursement, de vrais médecins qui ont fait plus de dix ans d’études.
M. Philippe Vigier
Très bien !
M. Romain Daubié
Je suis gêné également de voir les investissements de ces acteurs dans les vignobles, le naming dans les stades, le sponsoring, les 3,5 milliards annuels de publicité et les milliards d’euros de réserves – notamment 25 milliards hors assurance paramétrique. Il faut vraiment agir pour réguler ces pratiques.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 1786, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandrine Runel.
Mme Sandrine Runel
Je veux simplement rappeler quelques chiffres. Aujourd’hui, 6 millions de personnes en France renoncent à des soins, faute de moyens financiers suffisants, et 3 millions de Français n’ont pas de complémentaire santé.
Cet article propose justement de faire en sorte qu’il n’y ait pas de dépassements d’honoraires, ou qu’il y en ait le moins possible. Et vous, la droite, qu’est-ce que vous voulez faire ? Le supprimer.
Vous voulez faire en sorte que les médecins aient toute liberté pour augmenter leurs tarifs au risque d’empêcher les Français les plus modestes, les retraités, les demandeurs d’emploi, les jeunes, de se soigner.
M. Éric Ciotti
S’il n’y a plus de médecins, vous les soignez comment ?
Mme Sandrine Runel
Pour une fois qu’un article de ce PLFSS va dans le bon sens, gardons-le et améliorons-le ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Joëlle Mélin.
Mme Joëlle Mélin
En mai 1980, sous Raymond Barre, la convention médicale relative à la maîtrise médicalisée des soins de santé pose pour principe que la revalorisation des honoraires et des prescriptions se fera désormais en fonction des recettes de l’assurance maladie. La messe était dite. À partir de là, le système de santé français a dû vivre au rabais, à l’économie et à toujours moins de moyens – et, les honoraires libres ayant été normalisés, tout le monde s’est engouffré dans cette pratique.
Oui, certains médecins se permettent des dépassements en s’affranchissant de l’injonction à le faire avec tact et mesure – reconnaissons au passage que cette définition est floue –, mais beaucoup ont accepté l’Optam. Si nombre de malades renoncent aux soins à cause des frais complémentaires, certains médecins renoncent aussi à soigner. Il y a urgence à reposer la question dans le bon sens ; en tout cas, cet article ne la résoudra pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Je tiens à remercier Mme la ministre pour son engagement à ouvrir la discussion avec tous les partenaires – praticiens, syndicats, représentants des mutuelles – et en s’appuyant sur les différents rapports. C’est une question importante, à laquelle nous devons apporter une vraie réponse si nous voulons éviter d’avoir à y revenir tous les cinq ans.
Cet article est l’un des moyens que nous avons identifiés comme ceux allant dans le sens de l’augmentation des tarifs, notamment des mutuelles. Je pense donc qu’il faut le supprimer, tout en s’engageant rapidement dans une démarche de réflexion globale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
C’est là un sujet très important qu’il faut traiter de manière dépassionnée. Pour ma part, je ne crois pas que la cotisation proposée réglera la question, bien au contraire.
M. Philippe Vigier
Eh oui !
M. Yannick Monnet
Je pense même que ça aura un effet inverse.
Ces 4,5 milliards sont pris dans la poche des patients, je l’ai dit tout à l’heure, mais ce sont aussi 4,5 milliards de revenus qu’on ne peut pas supprimer comme ça, quoi qu’on en pense.
Créer une cotisation en faisant croire qu’on va pousser les professionnels à baisser leurs tarifs est illusoire. C’est comme les complémentaires : ça ne fonctionne pas comme ça.
M. Philippe Vigier
Très bien !
M. Yannick Monnet
De plus, il me semble inconcevable qu’une profession médicale ne contractualise pas avec la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). J’ai toujours considéré que ces professions devaient être assimilées aux fonctionnaires, puisqu’elles vivent du fait de la solidarité nationale.
M. Hervé de Lépinau
Non !
M. Yannick Monnet
Donc, travaillons à cette contractualisation à travers la réforme de l’Optam, mais n’agissons pas à travers une taxe. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Marcangeli.
M. Laurent Marcangeli
Avec mes collègues du groupe Horizons & indépendants, nous avons été très intéressés par ce qui vient d’être dit, notamment par les conclusions du rapport de nos collègues et par les praticiens qui se sont exprimés à l’occasion de ce débat.
Au départ, cet article traite d’un vrai sujet, mais la réponse apportée par le gouvernement n’est peut-être pas la bonne. C’est la raison pour laquelle nous voterons pour ces amendements de suppression. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 483, 783, 948 et 2533.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 234
Nombre de suffrages exprimés 229
Majorité absolue 115
Pour l’adoption 133
Contre 96
(Les amendements identiques nos 483, 783, 948 et 2533 sont adoptés ; en conséquence, l’article 26 est supprimé et les amendements nos 1786, 736, 103 et 737 tombent.)
Après l’article 26
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 1114 et 2329, portant article additionnel après l’article 26, et pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1114.
M. Yannick Monnet
Le présent amendement reprend l’une des préconisations de la mission parlementaire sur les dépassements d’honoraires. Je suis convaincu qu’il faut contractualiser avec les professionnels de santé en cas d’intervention de l’assurance maladie.
Par cet amendement, nous souhaitons mettre fin au remboursement des prescriptions des médecins établis en secteur 3. Cela paraît tout à fait logique : le principe de la liberté d’installation s’applique. Pour ceux qui veulent s’installer en secteur 3, c’est leur choix, mais la sécurité sociale n’a pas à rembourser leurs prescriptions. Si nous resserrons les règles qui s’appliquent au secteur 2 tout en maintenant pour le secteur 3 le remboursement des prescriptions, tous les médecins risquent de partir en secteur 3 et plus personne n’aura accès à rien. L’amendement prévoit donc que les prescriptions établies par un professionnel de santé établi en secteur 3 ne seront plus remboursées.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l’amendement no 2329, qui fait l’objet d’un sous-amendement no 2681.
M. Jean-François Rousset
Cet amendement du groupe Ensemble pour la République reprend une proposition du rapport de Yannick Monnet et moi-même sur les dépassements d’honoraires. Actuellement, 800 praticiens exercent en secteur 3, c’est-à-dire qu’ils pratiquent des honoraires libres en dehors de toute convention avec l’assurance maladie. Les consultations de ces médecins ne sont quasiment pas remboursées, mais leurs prescriptions le sont.
Il est donc proposé de mettre fin au remboursement des prescriptions des médecins établis en secteur 3. En effet, il serait cohérent que l’assurance maladie ne rembourse que les actes et les prestations réalisés dans le cadre d’une relation conventionnelle entre le praticien et elle. Conformément à la demande du rapporteur général en commission des affaires sociales, j’ai revu l’écriture de l’amendement sur la base de sa proposition.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 2681 à l’amendement no 2329 et donner l’avis de la commission.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je rejoins totalement Yannick Monnet : le sort que nous réservons aux médecins conventionnés par rapport aux médecins qui ne le sont pas est injuste. Les premiers doivent rendre des comptes à l’assurance maladie et respecter des critères de pertinence et de qualité pour établir leurs prescriptions. Les pratiques des seconds, qui sont relativement peu nombreux – si nous avions maintenu l’article 26, il y en aurait eu beaucoup plus –, posent problème.
De nombreux patients m’ont interpellé : dans certains territoires atteints par la désertification médicale, ils sont otages de praticiens qui ont choisi de se déconventionner. Certains m’ont rapporté que le tarif d’une consultation chez le médecin généraliste pouvait atteindre 50, voire 80 euros, pratiquement non remboursés par l’assurance maladie. Alors que la sécurité sociale va fêter ses 80 ans, sa philosophie initiale n’est plus respectée.
Les deux amendements sont quasi identiques. En commission, j’avais fait observer à M. Rousset qu’il ne prenait pas en compte les produits de santé, ce à quoi il a remédié en modifiant la rédaction de son amendement. J’invite notre collègue Yannick Monnet à retirer son amendement au profit de celui de M. Rousset, qui est plus complet eu égard à l’objectif visé.
Par ailleurs, j’ai déposé un sous-amendement. En travaillant la question ces derniers jours, je me suis rendu compte que l’amendement no 2329 aboutirait à exclure du champ du remboursement les prescriptions effectuées à titre gracieux pour eux-mêmes ou pour leurs proches par les médecins non conventionnés – sont ici visés non pas les médecins qui ont choisi de se déconventionner, mais les médecins retraités, qui ne sont plus conventionnés mais continuent à bénéficier du remboursement de leurs prescriptions.
Madame la ministre, j’avais déposé un autre sous-amendement, jugé irrecevable, qui visait à faire revenir les médecins non conventionnés vers la convention au plus vite, afin de ne pas pénaliser les patients qui sont otages de ces médecins.
M. Hervé de Lépinau
Il faut des médecins pour cela !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il faut que les médecins qui se sont déconventionnés puissent revenir. Actuellement, un délai préalable de deux ans est imposé à ceux qui sont établis en secteur 3. Je suis favorable à la suppression de ce délai. Si nous voulons que le maximum de médecins soient conventionnés avec l’assurance maladie, nous devons leur faciliter ce retour à la maison, si j’ose dire.
M. Philippe Vigier
Très bien !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Sur l’amendement no 2329 – sous-amendé et adopté en commission –, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée, sous réserve de l’adoption du sous-amendement no 2681.
M. Yannick Monnet
Mon amendement est identique au no 2329 !
Mme la présidente
Non, ils ne sont pas tout à fait identiques, monsieur Monnet.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Dans ce cas, j’invite M. Monnet à retirer son amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
C’est un débat compliqué. Ce que j’aimerais pour ma part, c’est que les médecins déconventionnés aient envie de revenir se conventionner avec l’assurance maladie. Rappelons que 50 % des médecins déconventionnés ont fait ce choix parce qu’ils ont un exercice particulier et les 50 % restants parce qu’ils jugent que l’assurance maladie est trop rigide et que les contraintes sont trop nombreuses – nous devrions peut-être travailler sur ces contraintes. Il nous faut développer des incitations au retour vers le conventionnement, parce que c’est mieux pour les patients.
S’agissant de l’amendement no 1114 de M. Monnet, ce sera une demande de retrait ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. S’agissant de l’amendement no 2329 de M. Rousset sous-amendé par M. Bazin, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Vous avez raison, madame la présidente, les deux amendements ne sont pas tout à fait identiques. Si celui de notre collègue Rousset fait consensus, je veux bien retirer le mien et nous voterons celui de M. Rousset sous-amendé par M. Bazin.
(L’amendement no 1114 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Hervé de Lépinau.
M. Hervé de Lépinau
Il aurait été intéressant d’inclure une carte dans l’exposé sommaire pour voir où se situent les médecins en secteur 3. Si ces derniers se trouvent dans les déserts médicaux, il existe une solution très simple pour les faire revenir dans la convention : pratiquer des zones de franchise fiscale. Les médecins travaillent énormément. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Antoine Léaument
Ben voyons !
M. Hervé de Lépinau
Toi, tu ne sais pas ce que c’est que travailler ! (« Oh » sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Souvenez-vous des médecins de famille qui travaillaient de 7 heures à 20 heures. Quand on bosse énormément, il est normal que l’on veuille en avoir un peu plus dans la poche : c’est humain.
Mme Sandrine Runel
C’est vous qui ne travaillez pas ! Par contre, vous prenez l’argent !
Un député du groupe SOC
Rendez l’argent !
M. Hervé de Lépinau
C’est humain. Tant que les rémunérations pratiquées dans les déserts médicaux seront insuffisantes, vous ne restaurerez pas l’attractivité. Et si les médecins établis en secteur 3 sont localisés principalement dans les métropoles et dans les zones urbaines, ma foi, les patients ont la possibilité de choisir leur médecin. C’est la raison pour laquelle nous opposerons à ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj
Je trouve nos débats de grande qualité. Je le dis à mon ami Yannick Monnet, parce que parfois nous débattons à front renversé. Tout à l’heure, il nous a interpellés en disant que la disposition relative au dépassement d’honoraires n’était pas la bonne et qu’elle n’était pas bien ciselée. Là, il nous fait une proposition dont je partage totalement la finalité ; toutefois, je veux aussi partager avec vous mes interrogations.
Il n’est pas anodin de priver les patients d’un remboursement sur les prescriptions faisant suite à une consultation médicale. Je veux que nous soyons au clair sur les conséquences de cette mesure du point de vue de l’accès à des prescriptions de radiologie et de consultations des spécialistes. Même si je partage totalement la philosophie de cet amendement et le signal qu’il constitue, j’estime que nous devons nous montrer attentifs, parce qu’il y va de l’accès aux soins dans certains territoires : parfois, il y a des médecins en secteur 3 et pas grand-chose d’autre et parfois, c’est le patient qui, pour des raisons qui lui sont propres – c’est le colloque singulier –, décide d’aller consulter un médecin en secteur 3.
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Alexis Corbière, pour un rappel au règlement.
M. Alexis Corbière
Il a trait à la qualité de nos débats et au respect que nous nous devons les uns aux autres. Il se fonde sur l’article 70, relatif notamment aux mises en causes personnelles. Je ne sais pas à qui le collègue du RN s’est adressé, mais il lui a dit : « Toi, tu ne sais pas ce que c’est que travailler. »
M. Alexandre Dufosset
C’est la valeur travail !
M. Alexis Corbière
Dans le climat antiparlementaire qui prévaut à l’heure actuelle, j’invite chacun à proscrire ce type de propos, ce qui ne nous empêche pas d’avoir des échanges très vifs. Enfin, quand on est membre d’un parti présidé par un homme qui n’a jamais exercé une forme d’activité professionnelle… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. – Les députés des groupes EcoS et SOC applaudissent ce dernier.)
M. Frédéric Weber
Allez chez Hanouna !
Après l’article 26 (suite)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Monsieur de Lépineau, vous vous êtes interrogé sur le lien entre la répartition des médecins établis en secteur 3 et l’accès aux soins. C’est simple : les deux ne sont pas corrélés.
M. Jérôme Guedj
Voilà !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Nous disposons d’une carte. Je peux également vous communiquer des chiffres : seules 17 500 personnes, réparties dans quinze communes, vivent dans une commune où exerce uniquement un professionnel de secteur 3. Il n’existe donc pas de lien entre accès aux soins et secteur 3.
D’un côté, on peut considérer qu’en l’absence de problème d’accès aux soins, si on dérembourse, les malades consulteront moins les professionnels en secteur 3, ce qui incitera ces derniers à revenir dans un conventionnement. Nous devons travailler sur les éléments de rigidité et sur ce qui, dans la discussion avec l’assurance maladie, peut conduire certains médecins à sortir du conventionnement. Dans ce cas-là, nous serions favorables au déremboursement des prescriptions. D’un autre côté, si un tabacologue en secteur 3 prescrit des substituts nicotiniques à un patient qui souhaite arrêter de fumer, faut-il les dérembourser ? Les choses sont plus compliquées dans ce cas.
Nous devons tout faire pour inciter le secteur 3 à revenir. Ce n’est pas un sujet d’accès aux soins. Ces arguments vont plutôt dans le sens du déremboursement des prescriptions. Toutefois, je maintiens mon avis de sagesse.
(Le sous-amendement no 2681 est adopté.)
(L’amendement no 2329, sous-amendé, est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois demandes de scrutin public : sur les amendements nos 1115 et identique, par le groupe Ensemble pour la République ; sur l’amendement no 2093, par le groupe Droite républicaine ; et sur l’amendement n° 1179, par le groupe Socialistes et apparentés.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1115 et 2328.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1115.
M. Yannick Monnet
Je vais laisser notre collègue Rousset défendre son amendement identique. Vous pouvez considérer le mien comme défendu, madame la présidente.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l’amendement no 2328.
M. Jean-François Rousset
La nomenclature des actes médicaux, créée en 2005, n’a jamais été révisée en profondeur. Par conséquent, elle ne correspond plus à la réalité des pratiques – cela a été souligné. Certains actes sont obsolètes, d’autres ne sont pas reconnus. Ces tarifs figés depuis vingt ans expliquent une partie des dépassements d’honoraires – les médecins que nous avons auditionnés parlaient quant à eux de compléments d’honoraires.
Une révision globale de la nomenclature a été engagée, mais son intégration dans la convention médicale risque de prendre plusieurs années – plusieurs mois dans le meilleur des cas. L’obsolescence de la nomenclature fragilise notre système de santé.
Cette mesure, soutenue par le groupe Ensemble pour la République et par Yannick Monnet, s’appuie sur le rapport que ce dernier et moi-même avons écrit. L’amendement, adopté en commission des affaires sociales, ne remet pas en question la négociation conventionnelle actuelle ; elle la sécurise. Il prévoit qu’en cas d’échec des négociations à l’issue d’un délai de six mois après la fin des travaux techniques, les nouveaux tarifs puissent être fixés par voie réglementaire. Cet amendement de bon sens vise à mettre la pression sur un processus dont on ne voit pas la fin et à garantir l’évolution de la nomenclature.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je rejoins nos deux collègues sur le fait que nous devons vraiment avancer en matière de nomenclature. Nous avions eu le débat l’an dernier sur le fameux Haut conseil des nomenclatures, qui avait promis, me semble-t-il, que ses travaux aboutiraient cette année ; a priori, ça ne sera pas le cas. Toutefois, le délai de six mois prévu par votre amendement soulève des interrogations. J’en rêverais, sincèrement, mais je crains que ce ne soit un peu rigide.
Par ailleurs, j’ai déposé un amendement que nous examinerons un peu plus tard, mais je n’ai pas la prétention de croire qu’il serait meilleur que le vôtre. Il vise à renvoyer au règlement pour préciser la procédure accélérée en la simplifiant et pour garantir une transcription rapide des nouveaux actes hiérarchisés dans les tarifs en imposant la négociation systématique d’un avenant annuel à la convention. Il prévoit une périodicité dans la révision de la nomenclature, alors que le vôtre prévoit un délai de six mois.
L’amendement de M. Rousset avait été adopté en commission. À titre personnel, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Monsieur le rapporteur général, si je suis d’accord avec vous sur le fait que la nomenclature doit être renouvelée régulièrement, il y a une chose qui me gêne dans ces amendements identiques, c’est qu’ils ne mettent pas en haut de pile la négociation conventionnelle. Je ne peux donc pas y être favorable. Nous devons faire confiance à la négociation conventionnelle. Il s’agit de la fixation des prix.
On ne peut pas en même temps vouloir inciter les médecins déconventionnés à revenir dans le cadre conventionnel et, comme ces amendements le proposent, ne pas prendre la négociation conventionnelle en considération. Les tarifs doivent être décidés lors de la négociation conventionnelle entre la Cnam et les professionnels et la révision de la nomenclature doit se faire au fil de l’eau. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Cyrille Isaac-Sibille
J’ai récemment échangé avec le Haut Conseil des nomenclatures dans le cadre de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la Mecss. Ils ont presque fini le travail : pour chaque acte, la technicité et le temps passé ont été déterminés. Il reste à fixer le tarif. Il faut donc leur faire confiance ; on peut espérer qu’ils finaliseront leur travail dans les prochains mois. Le délai de six mois me paraît un peu court, mais pourquoi pas. J’ajoute que le Haut Conseil sera auditionné par la Mecss dans les semaines à venir.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 1115 et 2328.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 219
Nombre de suffrages exprimés 217
Majorité absolue 109
Pour l’adoption 210
Contre 7
(Les amendements identiques nos 1115 et 2328 sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1816, par le groupe Ensemble pour la République ; sur l’amendement no 1624, par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1816 et 2537.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l’amendement no 1816.
M. Jean-François Rousset
La classification commune des actes médicaux (CCAM), qui constitue le socle de la tarification de notre système de santé, n’a pas été réévaluée depuis 2005. Depuis, les techniques médicales ont profondément évolué et de nouveaux actes sont apparus alors que d’autres sont devenus obsolètes, mais la CCAM est restée figée. Ce décalage entre la tarification et la réalité médicale et économique pèse lourd sur les professionnels et alimente des pratiques de dépassements d’honoraires, parfois par nécessité pour compenser une nomenclature devenue obsolète. Une révision est en cours, avec un horizon fixé à 2027. Ce chantier est long et complexe car il porte sur près de 13 000 actes.
Cet amendement, issu de notre rapport écrit avec Yannick Monnet et d’autres collègues à la demande du gouvernement, propose d’introduire une souplesse nouvelle dans le dispositif permettant des révisions ciblées et régulières de certains actes, ainsi que la suppression de ceux qui ne sont plus pratiqués. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2537 et pour donner l’avis de la commission.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Le travail de révision de la nomenclature a été lancé il y a cinq ans. Il devait aboutir en 2025, puis en 2026. Madame la ministre, j’aimerais savoir s’il ne va pas finalement être reporté aux calendes grecques ! Ce qui est certain, c’est que lorsqu’il sera achevé, la liste sera déjà partiellement obsolète. On ne peut pas continuer comme ça !
Une procédure plus souple et plus rapide est nécessaire lorsqu’il apparaît que la tarification d’un acte est manifestement inadaptée ou que l’acte devrait être radié. Nos amendements proposent donc, pour garantir la transcription rapide des nouveaux actes hiérarchisés dans les tarifs, d’imposer la négociation systématique d’un avenant annuel à la convention.
Avis évidemment favorable sur ces amendements identiques qui n’ont pas été examinés par la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je regrette vraiment l’adoption des amendements précédents, qui ne mettent pas les négociations conventionnelles en avant !
Je partage l’objectif de ces amendements, mais je crois savoir que la révision de la nomenclature sera finalisée avant la fin de l’année. Je rappelle qu’il revient au Haut Conseil des nomenclatures de la conduire, sous la responsabilité de la Caisse nationale d’assurance maladie. Cette révision doit se faire au fil de l’eau, mais dans le cadre des négociations conventionnelles, ce que ne prévoient pas vos amendements. En cohérence avec mon avis sur les amendements précédents, je vous demande de retirer ces deux amendements ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Nos amendements laissent une place aux négociations conventionnelles, madame la ministre !
M. Hadrien Clouet
C’est intéressant !
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Ce débat est essentiel, les dépassements d’honoraires augmentant de façon assez incontrôlée. Toutefois, le moyen par lequel vous souhaitez les contrôler ne me paraît pas le meilleur.
L’obsolescence de la nomenclature est un prétexte – j’insiste sur ce mot – utilisé par les professionnels de santé pour justifier les dépassements d’honoraires. Il faut donc faire les choses dans l’ordre : d’abord mettre à jour la nomenclature et, ensuite, faire en sorte d’éviter la disparité des dépassements d’honoraires. Selon les cabinets médicaux, les dépassements d’honoraires varient de un à cinq pour le même acte. Les dépassements continueront d’exister, mais il faut les encadrer et retirer tout prétexte pour les justifier. Il est donc nécessaire d’actualiser la nomenclature et de la réviser chaque année.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 1816 et 2537.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 222
Nombre de suffrages exprimés 222
Majorité absolue 112
Pour l’adoption 220
Contre 2
(Les amendements identiques nos 1816 et 2537 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 1624.
Mme Ségolène Amiot
Il propose d’interdire les dépassements d’honoraires pour les consultations médicales relatives à la santé sexuelle.
Rappelons quelques faits. Une grossesse sur trois n’est pas prévue. Au cours des cinq dernières années, 34,7 % des grossesses n’étaient pas désirées et ce nombre est en augmentation. La couverture vaccinale contre le papillomavirus, qui peut causer le cancer du col de l’utérus, et l’hépatite B est insuffisante. Le nombre de victimes qui osent parler de leur agression sexuelle est en augmentation. Les retards de diagnostic sur le SOPK – syndrome des ovaires polykystiques –, sur l’endométriose et sur l’infertilité sont faramineux et peuvent avoir de graves conséquences sur la vie des patientes. Enfin, UFC-Que choisir alerte sur les dépassements d’honoraires des gynécologues : 71 % d’entre eux les pratiqueraient, ce qui constitue encore un obstacle à l’accès à la santé sexuelle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je ne peux que partager votre volonté d’améliorer l’accessibilité des consultations relatives à la santé sexuelle, mais je ne suis pas sûr que votre proposition soit le meilleur moyen d’y parvenir.
Mme Élise Leboucher
On avance !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
La gynécologie est en effet une spécialité confrontée à un problème de réévaluation des actes par l’assurance maladie. Je préférerais que l’assurance maladie cote mieux ces actes. Sinon, nous risquons de voir disparaître ces consultations dans les territoires, ce qui est contraire à votre intention. Je demande le retrait de cet amendement, qui n’a pas été examiné en commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je rappelle que de nombreux actes concernant la santé sexuelle, comme la consultation VIH, sont pris en charge à 100 %. Le risque de l’interdiction des dépassements d’honoraires est de diminuer, voire de bloquer, l’accès aux consultations de santé sexuelle, d’autant que l’article 26 ayant été supprimé, il n’y a plus de régulation des dépassements d’honoraires. Demande de retrait.
(L’amendement no 1624 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de l’amendement no 2093 de M. Philippe Juvin.
(L’amendement no 2093 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement no 1577.
M. Hadrien Clouet
Il vise à juguler le phénomène désastreux des dépassements d’honoraires dans le cadre des actes de prévention du cancer. Pour plusieurs types de cancer, dont le cancer du sein, les restes à charge peuvent être importants, parfois de plusieurs milliers d’euros, pas seulement pour les actes de traitement, mais aussi pour ceux de dépistage. L’échographie, la coloscopie et la mammographie peuvent donner lieu à des dépassements exorbitants, ce qui prive un grand nombre de personnes de la possibilité de recourir à la prévention et donc de bénéficier d’une prise en charge suffisamment précoce pour augmenter les chances de guérison. Nous proposons donc d’interdire les dépassements d’honoraires pour ce type d’actes.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Ma position est la même que sur l’amendement précédent. Je vous rejoins sur la philosophie de l’amendement – les actes de prévention ne doivent s’accompagner d’aucun reste à charge pour le patient –, mais il ne faut pas se cacher la réalité : certains actes de prévention n’ont pas été revalorisés, ce qui incite les praticiens à dépasser les honoraires fixés par l’assurance maladie. Madame la ministre, si nous voulons être au rendez-vous de la prévention, ces actes doivent être justement cotés. Ils ne l’ont pas été depuis un certain temps. Nous venons d’en parler au sujet des gynécologues.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Conformément à notre volonté d’interdire les dépassements d’honoraires pour les actes de prévention, nous soutiendrons cet amendement. J’entends vos arguments, monsieur le rapporteur général, mais il y a urgence à inciter à la prévention, notamment au dépistage.
Mme Alma Dufour
Mais oui !
(L’amendement no 1577 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1104.
Mme Élise Leboucher
Il propose de conditionner l’ouverture de nouvelles cliniques privées à la garantie d’un reste à charge zéro.
Les dépassements d’honoraires ont considérablement augmenté ces dernières années dans les cliniques privées. Selon un rapport du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie de 2025, les dépassements d’honoraires des médecins spécialistes représentent 4,3 milliards en 2024, soit une augmentation moyenne de plus 5 % par an depuis 2019, hors inflation. Toujours selon le HCAAM, dans une clinique privée, 80 % à 90 % des patients sont confrontés à des dépassements d’honoraires. Or plus d’un tiers des Français ont déjà renoncé à des soins ou à des équipements médicaux au cours des quatre dernières années.
Les dépassements d’honoraires participent à la création d’un système de santé à deux vitesses, dans lequel les plus riches peuvent accéder à des soins de qualité rapidement et les plus précaires subissent de plein fouet les coûts budgétaires de la santé publique. Il est plus que temps de stopper le développement des centres de santé privés lucratifs. La santé ne doit pas être une manne pour des acteurs financiers qui cherchent à dégager des bénéfices toujours plus gros sur le dos des patients.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Les praticiens exerçant en clinique privée ne pratiquent pas systématiquement des dépassements d’honoraires.
Mme Farida Amrani
Beaucoup le font !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Dans mon territoire, par exemple, il existe une clinique privée dans laquelle les spécialistes sont soucieux du reste à charge et sont conventionnés en secteur 1. Les dépassements d’honoraires sont une réalité dans les cliniques privées, mais ce secteur est divers et chacun fait ses choix. J’ajoute que, dans certains territoires, le seul établissement de santé est privé et il accueille tous les patients sans reste à charge. Il ne faut donc pas généraliser, même si des abus existent. Avis défavorable. Cet amendement a été rejeté par la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Même avis.
(L’amendement no 1104 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Runel, pour soutenir l’amendement no 1179.
Mme Sandrine Runel
Les dépassements d’honoraires sont en forte hausse et représentaient 4,5 milliards en 2024. Pour certains ménages, ils constituent une barrière financière forte à l’accès aux soins, soit une inégalité terrible ! Tout le monde n’a pas les moyens de se payer une mutuelle complémentaire suffisamment protectrice pour consulter des spécialistes comme les dermatologues ou les cardiologues. Monsieur le rapporteur général, peut-être les médecins ne pratiquent-ils pas des dépassements dans votre territoire, mais la majorité le font.
La rédaction actuelle de l’article 26 applique la cotisation aux dépassements d’honoraires de manière indifférenciée aux professionnels du secteur 2 adhérents à l’Optam et à ceux hors Optam. C’est toute la difficulté.
Pour prévenir un tel biais, le présent amendement propose de rajouter une surcotisation sur les dépassements d’honoraires facturés par les professionnels du secteur 2 n’adhérant pas à l’Optam.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cette approche me semble moins mauvaise que celle que proposait l’article 26 – avant sa suppression – en ce qu’elle fait bien la différence entre ceux qui jouent le jeu des tarifs maîtrisés et ceux qui ne le jouent pas. Cette surcotisation – qui n’est qu’une forme de taxation –…
Mme Sandrine Runel
Ah, les taxes, les taxes !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
…risque toutefois de conduire à des dépassements d’honoraires pour la compenser, au détriment des patients.
La commission n’a pas examiné cet amendement. Par cohérence avec la position qui était la mienne sur l’article 26, j’y suis défavorable à titre personnel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1179.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 218
Nombre de suffrages exprimés 214
Majorité absolue 108
Pour l’adoption 86
Contre 128
(L’amendement no 1179 n’est pas adopté.)
Article 27
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Je soutiens l’article 27 qui vise, au moyen d’une incitation financière, à renforcer l’incitation des hôpitaux à l’efficience et à la pertinence – efficience de la dépense, pour que chaque euro dépensé soit un euro bien utilisé, et pertinence des soins.
La médecine accorde beaucoup d’importance à la recherche continue de la pertinence des soins. J’ai moi-même travaillé sur la désescalade thérapeutique – moins de traitements, des économies, moins de séquelles et moins d’effets indésirables –, sur laquelle j’ai défendu un amendement.
Les hôpitaux, bien évidemment, connaissent aussi des contraintes externes qu’ils ne peuvent pas gérer – ou difficilement. Le statut de la fonction publique contraint les jeunes, en attente d’une plus grande mobilité. Il faudrait également aller plus loin sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT) et leur donner le pilote qui leur manque actuellement, comme je l’ai aussi proposé dans un autre amendement.
M. Sylvain Maillard
C’est très important !
M. Michel Lauzzana
Des hôpitaux parviennent néanmoins à jouer sur des marges internes, en s’engageant dans des évolutions en matière de management, par exemple. L’hôpital a trois piliers hiérarchiques – le pilier administratif, le pilier médical et le pilier paramédical – qui se regardent en chiens de faïence : autant d’acteurs que nous devons responsabiliser et pousser à évoluer, grâce aux incitations financières.
J’approuve donc cet article, mais je soutiendrai l’amendement no 2334 de Mme Vidal, qui repousse l’idée de pénalités afin de laisser le temps aux hôpitaux de s’adapter à leurs nouvelles contraintes.
Mme la présidente
La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme Clémentine Autain
Vous êtes en train de transformer l’hôpital en entreprise avec des normes de gestion issues du privé ! Pourtant, ce qui garantit l’universalité, l’égalité et la qualité des soins, c’est le service public. Un hôpital ou un centre de santé n’a pas vocation à être rentable, ni à chercher en permanence à faire des économies ;…
M. Frédéric Petit
C’est d’efficacité que nous parlons !
Mme Clémentine Autain
…sa vocation est de répondre aux besoins de la population – de toute la population.
Notre système est confronté à un manque de moyens et je regrette, à ce titre, que la partie recettes du budget de la sécurité sociale ait été amputée de 80 milliards d’euros du fait de l’explosion des exonérations de cotisations sociales.
Notre système souffre d’un autre genre de mal qui touche tous les services publics : la critérisation et le reporting – une bureaucratisation infernale qui, à l’hôpital, prend la forme de la tarification à l’acte. C’est par elle que le loup de la rentabilité est entré dans la bergerie du service public !
L’article 27 propose de moduler les dotations des établissements de santé en fonction d’indicateurs de pertinence, de qualité de soins et de prescription. Des hôpitaux et des centres de santé qui soignent correctement : tout le monde partage cet objectif. Votre approche, toutefois, est une approche comptable, voire punitive. Ces critères de financement ni visent à rien d’autre, en réalité, qu’à raboter les budgets de notre système de santé.
Ce seront aussi de nouveaux dossiers à traiter, quand les personnels prennent déjà de plus en plus de temps à remplir des fiches, au détriment du temps consacré à l’exercice de leur métier : telle est l’absurdité de ce système.
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Cet article est essentiel. Quel est notre objectif, madame Autain ? Que nos concitoyens se portent mieux. Il faut donc trouver comment mieux favoriser les hôpitaux et les établissements de santé – publics ou privés – dont les bénéfices sur la santé de la population sont les plus importants.
Toute la question, madame la ministre, est alors celle des critères d’évaluation. La santé de la population en est un : si la santé de la population s’améliore, il faut récompenser les personnels. Il n’y a aucune honte à cela, quand les gens vont mieux, quand il y a moins de diabètes, moins de pathologies et moins de réhospitalisations. Madame Autain, vous ne voyez que les côtés négatifs de ces incitations ; pour ma part, j’en vois les côtés positifs. Pourriez-vous cependant, madame la ministre, nous en dire plus sur les indicateurs qui seront utilisés ?
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj
Nous avons abordé la partie consacrée aux dépenses de ce PLFSS avec la volonté de nous assurer que chaque euro dépensé par l’assurance maladie permettait d’améliorer l’accès aux soins, ainsi que la qualité et la pertinence des soins. Nous savons tous qu’il existe, du côté de l’efficience, une marge de progression.
M. Michel Lauzzana
Ah !
M. Jérôme Guedj
Nous n’avons jamais été opposés à la recherche d’économies dans les dépenses de l’assurance maladie, mais avec une ligne rouge infranchissable.
Un député du groupe LFI-NFP
On les connaît vos lignes rouges !
M. Jérôme Guedj
Cette ligne rouge est de ne pas pénaliser les assurés sociaux, qu’il s’agisse de leur reste à charge – raison pour laquelle nous sommes opposés aux franchises médicales – ou de toute forme de pénalisation s’agissant du niveau de prestation.
Comme il est possible de réaliser des gains d’efficience à l’hôpital, la philosophie de cet article 27 nous intéresse tant qu’il ne verse pas dans les excès de « l’hôpital entreprise » ou de la rentabilité à tout prix. Ainsi, nous sommes toujours opposés aux abus de la tarification à l’activité, qui n’inclut d’ailleurs pas la dimension de l’efficience.
Les acteurs de l’hôpital public eux-mêmes revendiquent un souci de l’efficience.
Mme Annie Vidal
Eh oui !
M. Jérôme Guedj
La Fédération hospitalière de France, sollicitée à propos de cette mesure, indique soutenir ce type de dispositif d’incitation collective à la pertinence sur la base d’objectifs partagés et d’un mécanisme individuel pour les établissements dont les pratiques présentent les écarts les plus importants. Ceux-là, indique-t-elle, contribuent directement à une meilleure prise en charge des patients.
Ainsi les acteurs hospitaliers eux-mêmes, attachés à la défense du service public, reconnaissent-ils qu’il y existe des disparités de fonctionnement. Quand on aime le service public, on n’est pas conservateur s’agissant de son mode de fonctionnement ; quand on aime le service public, on cherche à améliorer son efficacité, son efficience, sa pertinence et sa justesse. Chaque euro dépensé utilement dans le service public préserve la sécurité sociale dans son ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – MM. Cyrille Isaac-Sibille et Jean-François Rousset applaudissent également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Je trouve quant à moi très curieux de distinguer les hôpitaux entre eux. Dans tous les hôpitaux de France, le personnel souffre. Un système de sanction pénalisant les hôpitaux qui ne seraient prétendument pas vertueux dans leur gestion se répercutera sur le personnel. Plutôt que de tenter de faire croire que l’hôpital public souffre d’un problème de gestion, il vaudrait mieux regarder la réalité en face : avec la tarification à l’activité, nous l’avons abandonné. Si les hôpitaux sont aujourd’hui en difficulté, c’est du fait de cette tarification.
J’ai déposé une proposition de loi, l’an dernier, tendant à instaurer une tarification pluriannuelle – on n’en a pas voulu. Les hôpitaux souffrent du manque de lisibilité de leur budget et d’un manque de moyens – 2,8 milliards de déficit pour l’hôpital public. N’essayons pas de nous dédouaner de nos responsabilités politiques vis-à-vis de l’hôpital public en cherchant à faire croire que tout n’est qu’un problème de gestion.
Je n’ai aucune difficulté à envisager les questions de gestion, mais je vois bien que les personnels, qui font tenir debout l’hôpital public, sont en grande souffrance. Nous devons les soutenir !
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 979, 1107 et 1144, tendant à supprimer l’article 27.
La parole est à Mme Clémentine Autain, pour soutenir l’amendement no 979.
Mme Clémentine Autain
Introduire ce nouveau système de modulation conduira nécessairement à un accroissement des inégalités entre les territoires et les établissements. Les établissements qui ont le plus de moyens sont souvent ceux qui ont la meilleure offre de soins : les bonifier, c’est nourrir un cercle vicieux qui creusera les écarts. Vous me faites penser à Diafoirus, le médecin de Molière dont les remèdes aggravent le mal. Cette logique conduira à creuser le fossé entre le privé et le public et empêchera le service public de relever le défi de l’augmentation des besoins.
Si j’évoquais tout à l’heure une approche punitive, c’est que votre dispositif peut conduire à supprimer jusqu’à 2 % du financement d’un établissement. C’est dire la gravité de cet article !
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1107.
Mme Élise Leboucher
Sous couvert d’incitation financière, l’article 27 instaure une logique particulièrement perverse pour notre système de soins. Des établissements qui choisiraient de ne pas répondre à certains besoins bénéficieraient ainsi de moyens supplémentaires au titre des économies qu’ils permettraient du même coup à l’assurance maladie de réaliser. Les établissements qui, eux, refuseraient votre logique, se verraient pénalisés financièrement.
Derrière l’affichage de l’efficience et de la pertinence, nous voyons une gestion du système de santé par la pénurie. L’idée qui sous-tend cet article est que les médecins sont des surprescripteurs multirécidivistes et que les assurés sociaux sont des surconsommateurs irrationnels.
Cette mesure est dangereuse, en particulier pour les hôpitaux publics déjà gravement sous-financés. Nous proposons de supprimer l’article, qui constitue une nouvelle attaque frontale contre l’hôpital public et donc contre les patients et les personnels qui y travaillent. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
L’amendement no 1144 de M. Yannick Monnet est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Je vous ai tous écoutés avec attention. Je ne crois pas que l’efficience et la pertinence des soins soient contradictoires avec leur qualité et leur humanité – au contraire. Je ne nie pas les problèmes budgétaires structurels que rencontre le système hospitalier pour répondre aux besoins. La question des moyens est fondamentale. Travailler à la pertinence des soins, cependant, c’est éviter la iatrogénie médicamenteuse, les examens inutiles ou redondants, qui n’ont rien d’agréable pour le patient, et privilégier les soins les moins invasifs et les prises en charge les plus légères. Comprise ainsi – pas dans la logique d’un rabot financier –, la pertinence est véritablement un bon objectif pour les hôpitaux – et le chantier n’est pas moins considérable en médecine de ville. Je suis donc favorable à ce que nous valorisions la pertinence, comme le propose l’article 27.
Jérôme Guedj l’a dit tout à l’heure : lors de leur audition dans le cadre de la préparation du budget de la sécurité sociale, les fédérations hospitalières m’ont toutes dit qu’elles voyaient cet article d’un très bon œil. Elles estiment que c’est une démarche positive, susceptible d’apporter des moyens complémentaires – je dis bien complémentaires – aux hôpitaux.
M. Michel Lauzzana
Exactement !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cela étant, madame la ministre, je crains aussi que les dispositifs de financement de la pertinence et de la qualité ne se transforment en usines à gaz, comme cela a déjà été le cas avec l’Ifaq – l’incitation financière à l’amélioration de la qualité. Nous devrons être vigilants, lors de leur mise en œuvre, à ne pas trop les alourdir. La commission a rejeté ces amendements de suppression ; je leur donne également, à titre personnel, un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je ne suis pas du tout favorable à ces amendements de suppression. Depuis que nous avons commencé à examiner la partie recettes du PLFSS, nous avons établi que, dans ces efforts nécessairement partagés, chaque euro de l’assurance maladie devait être dépensé à bon escient. Parce qu’il s’agit de l’hôpital public, nous n’aurions pas le droit de nous en inquiéter ?
Les fédérations hospitalières sont favorables à ce mécanisme, d’autant plus qu’elles vont récupérer la moitié des gains liés à l’efficience. Ce n’est pas rien : c’est aussi un moyen de mieux financer l’hôpital. Je rappelle que ce budget prévoit une augmentation de 2,3 milliards d’euros pour l’hôpital public.
Ces dernières années, nous avons demandé aux professionnels de ville de maîtriser leurs dépenses et d’améliorer leurs prescriptions. Pourquoi ne pourrions-nous pas appliquer la même logique à l’hôpital ? Le dispositif permettra, par exemple, d’examiner les prescriptions qui sortent de l’hôpital et de les améliorer, que ce soit du point de vue de la quantité, de la qualité ou de la pertinence. Ce n’est pas honteux : il s’agit simplement de dépenser correctement chaque euro de l’assurance maladie. Avis très défavorable.
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 979, 1107 et 1144, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Annie Vidal.
Mme Annie Vidal
Nous soutenons cet article car l’incitation à la pertinence est un bon moyen de réduire les dépenses sans affecter la prise en charge des patients. Des indicateurs existent déjà ; ce ne sont ni des indicateurs financiers, ni des indicateurs de gestion, comme dans une entreprise. Ce sont par exemple ceux de la Fédération des médecins de France, qui concernent la lutte contre l’antibiorésistance – on sait que les antibiotiques sont encore trop souvent prescrits, avec un taux de surprescription estimé entre 20 % et 30 %.
Ces indicateurs concernent aussi les personnes âgées qui entrent en Ehpad : elles arrivent souvent avec des ordonnances comprenant vingt-cinq molécules ! Or tous les pharmaciens le disent : au-delà de six ou sept molécules, on ne maîtrise plus les interactions. Autre exemple : les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP), largement surprescrits. L’incitation à la pertinence est donc bien un moyen de dépenser moins tout en soignant aussi bien. C’est pourquoi il ne faut pas supprimer cet article.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Lorsqu’il évoquait le budget de son ministère, très affecté par les coupes budgétaires, un récent ministre des affaires étrangères parlait d’« un budget à l’os, sans gras ni muscle ». N’avez-vous pas, vous aussi, l’impression que l’hôpital public est aujourd’hui à l’os ? Depuis trente ou quarante ans, il subit des économies, des réorganisations et des transformations de ses services. Et la variable d’ajustement, ce sont trop souvent les conditions de travail des personnels hospitaliers. Cela ne peut plus durer !
On vous dit qu’il manque de l’argent : commencez par donner à l’hôpital public les moyens financiers nécessaires ! Ensuite, lorsque vous aurez remis les compteurs à zéro, vous pourrez, si vous le souhaitez, l’organiser différemment, dans l’intérêt du patient. Je partage votre objectif mais pour l’instant, je le répète, ceux qui souffrent, et qui souffrent énormément, ce sont les personnels, à cause de toutes les optimisations, réorganisations et autres mots en -tion ! (M. Yannick Monnet et Mme Danielle Simonnet applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je ne suis pas d’accord. C’est justement parce que nous pensons aux professionnels de ces établissements que nous devons utiliser les euros de la sécurité sociale à bon escient. Quand les ordonnances qui sortent de l’hôpital sont préremplies, quand on coche des cases parce qu’on est pressé, sans forcément se demander si c’est utile, cela génère des dépenses pour l’assurance maladie que nous ne pouvons pas réinvestir dans l’hôpital public.
M. Jean-Paul Lecoq
Et pour quelle raison est-on pressé ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Il n’est donc pas honteux de se demander si toutes les dépenses issues des prescriptions qui sortent de l’hôpital sont utiles, ou pertinentes.
Mme Danielle Simonnet
Quand on ferme un service, on ne se pose pas la question de savoir si c’est pertinent !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Nous allons mener ce travail avec les établissements et les fédérations hospitalières, qui l’approuvent. C’est précisément parce que nous pensons aux professionnels qui travaillent à l’hôpital que nous devons veiller à ce que l’argent de l’assurance maladie soit dépensé le plus efficacement possible.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques de suppression nos 979, 1107 et 1144.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 186
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l’adoption 56
Contre 75
(Les amendements identiques de suppression nos 979, 1107 et 1144 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
L’amendement no 2538 rectifié de M. le rapporteur général est un amendement de coordination juridique.
(L’amendement no 2538 rectifié, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 2191 rectifié.
Mme Annie Vidal
Cet amendement vise à préciser que les actions de pharmacie clinique contribuent au dispositif d’incitation à l’efficience, à la pertinence et à la qualité des soins. La pharmacie clinique joue un rôle essentiel : elle génère des économies estimées à 1 milliard d’euros par an sur les prescriptions hospitalières exécutées en ville. Il serait donc pertinent de l’intégrer dans le dispositif.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Madame Vidal, je suis sensible au sujet que vous évoquez : les enjeux liés à la pharmacie clinique sont très importants. Néanmoins, si nous commençons à égrener les indicateurs dans la loi, je crains que nous n’alourdissions les dispositifs, qui risqueraient de devenir des usines à gaz sans cohérence d’ensemble. Cet amendement n’a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j’y suis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
C’est par la voie réglementaire que nous préciserons ces indicateurs. Je vous rejoins sur l’intérêt de la pharmacie clinique, mais comme nous voulons associer l’ensemble des acteurs à la définition des indicateurs, je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal.
Mme Annie Vidal
J’entends ces arguments, mais j’insiste sur l’importance de la valorisation de la pharmacie clinique.
(L’amendement no 2191 rectifié est retiré.)
Mme la présidente
Les amendements nos 2540, 2541, 2542, 2543, 2547 rectifié, 2545, 2548 et 2550 de M. le rapporteur général sont rédactionnels.
(Les amendements nos 2540, 2541, 2542, 2543, 2547 rectifié, 2545, 2548 et 2550, acceptés par le gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Mme la présidente
Les amendements nos 1116 de Mme Ségolène Amiot et 837 de Mme Marie Pochon sont défendus.
(Les amendements nos 1116 et 837, repoussés par la commission et le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 2334.
Mme Annie Vidal
Cet amendement propose de décaler l’entrée en vigueur des pénalités financières applicables aux établissements de santé. Je suis convaincue que ce type de financement, fondé sur l’incitation à la performance, est tout à fait vertueux, car il valorise les bonnes pratiques. Toutefois, les établissements n’ont pas tous le même niveau de maturité face à une telle approche. C’est pourquoi il faudrait leur accorder un délai pour intégrer ces nouvelles pratiques avant de leur appliquer la pénalité. Il leur permettrait de s’adapter progressivement au nouveau dispositif.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Vous proposez de reporter l’entrée en application des pénalités financières prévues dans le cadre du dispositif d’intéressement à la pertinence et du dispositif de mise sous surveillance au 1er janvier 2028. Je partage votre scepticisme quant à notre capacité à mettre en œuvre ce dispositif dès 2026 compte tenu de la nécessité d’adopter les textes réglementaires, de s’accorder sur les indicateurs et de définir les modalités de recueil et d’analyse. Cependant, le 1er janvier 2028 me paraît une échéance trop lointaine au regard de l’importance des impératifs de pertinence. J’aurais préféré que vous reteniez une date intermédiaire. Cet amendement n’a pas été examiné par la commission. Demande de retrait.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Même avis.
M. Jean-Paul Lecoq
Mais c’est bien, 2028 ! Ça nous permettra d’abroger la disposition !
Mme la présidente
Il est maintenu, madame Vidal ?
Mme Annie Vidal
Oui, madame la présidente.
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Il me paraît utile de repousser la date d’application de la disposition pour certains hôpitaux afin de tenir compte de leurs difficultés et de permettre à chacun d’évoluer.
S’agissant des indicateurs, je voudrais insister sur un point. Depuis longtemps, nous évoquons le lien ville-hôpital, mais ce lien est encore très ténu dans de nombreux territoires. Beaucoup d’hôpitaux ne font pas l’effort nécessaire pour se rapprocher de la médecine de ville et cette dernière est fortement pénalisée par ce manque de coopération. À l’avenir, ce lien mériterait de devenir un indicateur majeur.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre
Madame Vidal, avant ce dispositif, il existait des contrats d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins (Caqes), signés avec les caisses d’assurance maladie locales, soit une forme de contractualisation destinée à améliorer les prescriptions. Avec la crise du covid, la contractualisation s’est arrêtée. En réalité, nous ne faisons que réintroduire un dispositif qui existait déjà, dans sa philosophie, au sein des établissements. Et cette fois, ils pourront récupérer les gains d’efficience qu’ils vont obtenir. C’est pourquoi je ne suis pas favorable à un recul de la date d’entrée en vigueur des pénalités financières, même si je reconnais que le déploiement de tels indicateurs peut être long. Reste que nous devons envoyer un signal clair : les établissements attendent cela et les équipes qui travaillent déjà sur la pertinence au sein des hôpitaux veulent récupérer concrètement les gains d’efficience.
(L’amendement no 2334 est adopté.)
(L’article 27, amendé, est adopté.)
Après l’article 27
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Eskenazi, pour soutenir l’amendement no 655.
M. Romain Eskenazi
Depuis la crise sanitaire, le recours à l’intérim, notamment paramédical, a largement plombé le budget des hôpitaux. Dans le GHT où je travaillais, chaque établissement dépensait 500 millions d’euros avant le covid pour l’intérim, contre 2 milliards depuis le covid.
Les jeunes professionnels s’inscrivent souvent dans des agences d’intérim. On peut le comprendre à titre individuel, compte tenu des difficultés liées aux conditions de travail et à la rémunération. Toutefois, il est indispensable que le législateur limite le recours à l’intérim. La dernière réforme l’encadre strictement, mais elle impose de justifier d’un « écart significatif » de rémunération entre l’emploi permanent et l’intérim. Ce concept est trop flou. Il faut le supprimer, limiter réellement le recours à l’intérim et préserver ainsi le budget des hôpitaux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Vous souhaitez revenir sur le dispositif d’encadrement des dépenses liées à l’embauche des professionnels médicaux et paramédicaux en intérim, que nous avons justement complété dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2025, en février dernier. La disposition que vous proposez vise à organiser un encadrement des dépenses d’intérim pour toutes les catégories de professionnels employés dans les établissements sanitaires et médico-sociaux même lorsque aucune dérive n’a été constatée. Cela me semble un peu lourd. Les plafonds de rémunération adoptés par l’arrêté du 5 septembre 2025 – vous le voyez, c’est très récent – couvrent déjà les professions les plus problématiques au regard de cette pratique. Avis défavorable à titre personnel. Cet amendement a été rejeté par la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Vous connaissez mon attachement à ce sujet. L’intérim a, bien sûr, un intérêt dans le secteur de la santé, comme dans tous les autres secteurs, notamment pour assurer des remplacements ponctuels, mais ces dernières années l’intérim médical et paramédical a dérivé vers une pratique devenue presque courante, avec une rémunération régulière, loin de son sens originel. (M. Romain Eskenazi acquiesce.) C’est pour cette raison que nous avons soutenu et voté ensemble des lois visant à limiter ce recours et à instaurer des plafonds.
Entre la multiplication des types de contrat et le recours à l’intérim, on peut trouver, dans un service, cinq médecins qui effectuent la même tâche mais qui sont rémunérés de cinq façons différentes – une situation compliquée à gérer pour le responsable. La convergence des modalités de rémunération des professionnels est une vraie nécessité. Les organisations syndicales sont d’ailleurs prêtes à entamer les travaux sur ce sujet car ce n’est confortable pour personne lorsque votre voisin de service, qui fait la même chose que vous, est payé deux fois plus, voire davantage – ou deux fois moins, selon le côté où l’on se place.
Vous connaissez mon engagement sur ce point. Lancer ces travaux permettra également de promouvoir le décloisonnement et la convergence des rémunérations entre la ville et l’hôpital – condition d’un vrai virage ambulatoire. Ce serait une réforme structurelle, qu’il faut préparer avec les professionnels et les organisations syndicales.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Jocelyn Dessigny.
M. Jocelyn Dessigny
Nous sommes tous d’accord – Mme la ministre vient encore de le rappeler : l’intérim des médecins représente un véritable problème. Tous nos hôpitaux sont en déficit ; ils n’arrivent plus à payer les charges ni à faire des travaux. L’hôpital de Château-Thierry, dans ma circonscription, présente chaque année des chiffres plus hallucinants de déficit. Il faut donc faire quelque chose. L’amendement va dans le bon sens et nous le soutiendrons car il faut sortir de ce système dans lequel des médecins sont payés deux ou trois fois plus que d’autres pour le même travail. Cela crée des tensions au sein des équipes et des difficultés financières pour les établissements. Il faut agir rapidement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Lauzzana.
M. Michel Lauzzana
Je suis convaincu que la rémunération n’est pas le seul critère à prendre en compte. La jeune génération n’a pas envie ou du moins hésite à s’engager dans une carrière hospitalière qui offre peu de possibilités d’évolution : les infirmières, par exemple, peuvent entrer à l’hôpital dans leur vingtaine et ressortir avec le même statut et une rémunération tout juste un peu supérieure. Il faut travailler sur la mobilité, prévoir des avancements et organiser des passerelles. La réflexion a commencé, mais elle doit désormais aboutir. La rémunération seule ne saurait constituer un moteur pour les jeunes ; parmi les motivations les plus importantes, on trouve la qualité de vie et la possibilité, dans le cours de la carrière, de satisfaire ses aspirations. On n’entre plus dans une entreprise ou un établissement de santé pour y rester toute sa vie ; on a envie de multiplier les expériences.
Mme la présidente
La parole est à M. François Gernigon.
M. François Gernigon
Pour abonder dans le sens de mes collègues, je pense que ce n’est pas uniquement la rémunération, mais également l’organisation d’un service, qui entre en ligne de compte. Sur sept jeunes filles qui exercent en tant qu’infirmières en pratique avancée (IPA) dans un service, deux peuvent être en CDI et cinq en intérim, ce qui pose un problème de coordination des équipes : les infirmières en intérim changent régulièrement et cela peut affecter l’efficience du travail collectif.
Il faut également se demander ce qu’est l’intérim : un CDD relève-t-il de l’intérim ? Est-il normal que lorsqu’on propose à un professionnel un CDI, il choisisse un CDD ? Ces tendances reflètent l’évolution de la société et il ne faut pas éluder ces questions.
(L’amendement no 655 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
L’amendement no 2094 de M. Philippe Juvin est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’amendement n’a pas été examiné en commission. À titre personnel, avis défavorable.
(L’amendement no 2094, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 1121 de M. Hadrien Clouet est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’amendement a été rejeté en commission. À titre personnel, j’y suis également défavorable.
(L’amendement no 1121, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 1806 de Mme Ségolène Amiot est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
L’amendement a été adopté par la commission, mais j’y suis défavorable à titre personnel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1806.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 176
Nombre de suffrages exprimés 123
Majorité absolue 62
Pour l’adoption 73
Contre 50
(L’amendement no 1806 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour soutenir l’amendement no 1271 rectifié.
M. Belkhir Belhaddad
Je veux évoquer un point rarement abordé : la situation des zones frontalières, souvent confrontées à des difficultés particulières du fait de la concurrence avec des pays dans lesquels les personnels de santé se voient offrir des rémunérations substantiellement supérieures. Ainsi, en Moselle, le rapport entre les salaires locaux et ceux des pays limitrophes peut être, selon la profession, de un à trois, voire de un à quatre. Cette difficulté est accrue dans le contexte de crise de l’attractivité de certaines professions médicales et paramédicales. Dans le Jura, l’Ain, la Moselle ou le Doubs, les établissements hospitaliers ont du mal à recruter et à fidéliser leur personnel, ce problème allant jusqu’à menacer la pérennité de certaines activités.
Le présent amendement propose de réserver l’application des coefficients géographiques aux zones frontalières.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Cher collègue lorrain – nous sommes voisins de département –, je mesure ce que la proximité du Luxembourg représente pour le territoire. Cependant, priver toutes les régions d’outre-mer des coefficients tarifaires me semble exagéré lorsqu’on connaît leur situation. Réserver ce mécanisme aux zones frontalières ne me paraît donc pas opportun.
Par ailleurs, nous avons déjà précisé, à l’article 72 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, que la concurrence frontalière fait partie des critères pouvant justifier l’application d’un coefficient géographique. Il faut maintenant que cette disposition trouve sa déclinaison concrète ; la ministre pourra nous dire ce qu’il en est.
Le présent amendement n’a pas été examiné par la commission. À titre personnel j’en propose le retrait, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
Vous mettez le doigt sur un sujet complexe et important pour nos concitoyens qui vivent dans les zones frontalières – dans les régions de l’Est, du côté de la Suisse ou vers l’Espagne. Le problème concerne tant les médecins que les autres professionnels de santé, tels les psychologues, rendant difficile l’accès aux soins dans ces zones ; votre région est de ce point de vue dans une situation particulièrement critique. Cependant, les différences de salaire sont telles que votre amendement, je crains, ne réglerait en rien la difficulté. Nous devons travailler sur la question de la concurrence frontalière dans le cadre des coopérations avec les pays en question. Demande de retrait ou avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Belkhir Belhaddad.
M. Belkhir Belhaddad
Je vais maintenir l’amendement, qui me permet de mettre la question en débat. Par rapport à la disposition votée l’année dernière, il s’agit de préciser les zones frontalières dans lesquelles s’appliquent les coefficients géographiques. J’accepte volontiers la proposition de Mme la ministre de travailler, avec d’autres parlementaires, sur le sujet.
(L’amendement no 1271 rectifié n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1122.
Mme Élise Leboucher
Les chiffres sont édifiants : à mesure que les lits ont fermé, que les effectifs ont fondu, que la formation a disparu, l’isolement et la contention ont pris de la place dans les établissements psychiatriques. Ces pratiques, inacceptables du point de vue des libertés publiques et du respect de la dignité humaine, doivent nous alerter. En 2022, 76 000 patients ont été hospitalisés sans leur consentement ; plus d’un tiers ont été placés à l’isolement et 8 000 ont fait l’objet d’une contention mécanique – ils sont restés attachés durant des heures. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a créé un registre et institué l’obligation, pour les établissements, de produire un rapport annuel incluant une évaluation des pratiques de coercition. Cependant, les transmissions restent rares et on a du mal à accéder aux informations.
C’est pourquoi je demande un rapport sur le sujet. Nous devons être éclairés sur l’étendue de l’application des mesures coercitives aux personnes malades et mieux en connaître les modalités. Il s’agit de faire respecter l’obligation d’information inscrite dans la loi : chaque année, un rapport doit être rédigé et transmis à la commission départementale des soins psychiatriques sans consentement (CDSP).
Mme la présidente
Sur les amendements nos 1122 et 2270, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 1122 ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Madame Leboucher, votre demande de rapport ne me paraît a priori pas illégitime, mais je ne connais pas assez le sujet pour vous répondre.
Mme Élise Leboucher
Faites-nous confiance !
M. Rodrigo Arenas
Justement, vous deviendriez un expert !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il me semble au demeurant assez éloigné du financement de la sécurité sociale. L’amendement a été rejeté en commission. À titre personnel, je vous demande de le retirer, sinon j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
L’amendement me semble satisfait par la loi du 22 janvier 2022 qui introduit un contrôle systématique des mesures d’isolement et de contention par le juge judiciaire, conformément aux exigences constitutionnelles. Le code de la santé publique prévoit par ailleurs que le registre recensant les mesures d’isolement et de contention dans chaque établissement de psychiatrie doit être présenté à la CDSP, sur sa demande. Il précise également que les personnels des établissements de santé sont tenus de répondre à toutes les demandes d’information formulées par cette commission. Je vous demande donc de retirer l’amendement.
Mme Ségolène Amiot
Ces dispositions ne sont pas appliquées !
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher.
Mme Élise Leboucher
Monsieur le rapporteur général, vous dites que l’amendement n’a pas grand-chose à voir avec le PLFSS, mais c’est justement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 qu’on a introduit l’obligation de produire ce rapport.
Madame la ministre, si je formule cette demande, c’est parce que les établissements ne font pas tous l’effort de transmettre leur rapport à la CDSP. Il faut donc mener une évaluation pour comprendre où ça coince !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1122.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 187
Nombre de suffrages exprimés 162
Majorité absolue 82
Pour l’adoption 52
Contre 110
(L’amendement no 1122 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Murielle Lepvraud, pour soutenir l’amendement no 2270.
Mme Murielle Lepvraud
Il propose de réaliser un rapport d’évaluation pour mesurer les conséquences financières et sociales du recours à l’intérim dans les maternités publiques et privées, comparer les coûts entre établissements sous tension et établissements stables, identifier les leviers d’action pour limiter la dépendance à l’intérim et caractériser les méthodes de contournement de la loi qui porte votre nom, madame la ministre.
La loi Rist du 19 mai 2023, qui encadre les rémunérations de l’intérim médical, est pertinente, mais elle a été appliquée sans modification des conditions de travail à l’hôpital – je pense aux effectifs, aux salaires et au temps de travail. De nombreux professionnels médicaux et paramédicaux privilégient l’intérim ou les contrats courts plutôt qu’un poste fixe à l’hôpital, ce qui a des répercussions sur la stabilité des équipes et donc sur la qualité des soins. Les sages-femmes, par exemple, préfèrent s’installer en libéral plutôt qu’intégrer le milieu hospitalier, et pas seulement dans les petites maternités. C’est le cas à Argenteuil, où la maternité de niveau 3 dans laquelle je me suis rendue il y a quinze jours peine à recruter.
Cet amendement, qui demande un rapport, est avant tout un appel à rendre l’hôpital public plus attractif, pour que devenir professionnel en milieu hospitalier redevienne un véritable projet de carrière. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Vous demandez au gouvernement un rapport sur un article, adopté en février 2025, qui a prévu un dispositif de plafonnement des dépenses d’intérim pour les personnels médicaux. Nous en avons déjà parlé avec notre collègue Eskenazi. En vérité, vous souhaitez plus largement un rapport sur l’impact du recours à l’intérim dans les maternités. Je reconnais que l’intérim est un problème, mais les établissements n’ont parfois pas le choix : ils doivent assurer la permanence des soins, sans toujours parvenir à recruter.
Mme Alma Dufour
Vous nous prenez pour des imbéciles !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Mais non, je ne vous prends pas du tout pour des imbéciles, j’essaie de vous répondre ! Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
C’est un sujet important. Le Parlement a attribué aux sages-femmes des compétences supplémentaires en ville, ce qui leur permet d’exercer une activité libérale utile à nos concitoyens. Cependant, leur activité est devenue presque entièrement libérale. On ne peut pas leur en vouloir puisque l’évolution de leurs compétences rend intéressant l’exercice de leur métier en libéral. La question est de savoir comment on suscite leur intérêt à faire des gardes dans les établissements de santé. Elles font partie de ces professionnels qui sont les moins enclins à travailler la nuit et les week-ends.
Mme Alma Dufour
On tourne en rond !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Nous devons travailler avec les sages-femmes pour trouver une manière de leur redonner envie de faire des gardes. L’intérêt financier existe, mais ce n’est pas le seul. Il faut réfléchir à la manière de faciliter l’exercice mixte en ville et à l’hôpital, car il reste souvent compliqué.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Tout à fait !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Je vous rejoins donc sur les difficultés que vous pointez, mais je ne pense pas que votre demande de rapport puisse améliorer la situation.
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Simonnet.
Mme Danielle Simonnet
Madame la ministre, chers collègues, il faut appuyer cette demande de rapport, d’autant que la question ne se limite pas, hélas, aux maternités. Pour enrayer la dépendance à l’intérim, il faut mener une politique de rémunération attractive à l’hôpital public. À l’hôpital Tenon, dans ma circonscription, le centre d’interruption volontaire de grossesse (CIVG), choisi comme variable d’ajustement, est resté fermé pendant tout le mois d’octobre parce qu’il n’y avait plus d’infirmières au bloc opératoire. À force de ne pas valoriser les postes d’infirmière, les intérimaires étaient en position de force pour demander une hausse de leur rémunération. Quand l’hôpital a décidé de baisser la rémunération des intérimaires, ces derniers ont préféré aller travailler ailleurs. Ce rapport permettra de mettre en exergue la nécessité d’une hausse des rémunérations pour rendre attractifs les postes à l’hôpital.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Certains services de maternité sont désorganisés par la présence d’intérimaires qui ne connaissent pas forcément le fonctionnement du service. En France, on observe une hausse de la mortalité infantile et ce rapport pourrait montrer que tout cela a un lien. Lorsque les praticiens savent que, sans médecins gynécologues obstétriciens, le service ferme, ils peuvent exercer un chantage à la rémunération ou à la prime qui vient encore grever les finances des hôpitaux. Les patientes et les enfants à naître sont pris en otage, mais aussi la sécurité sociale et les hôpitaux.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2270.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 192
Nombre de suffrages exprimés 164
Majorité absolue 83
Pour l’adoption 47
Contre 117
(L’amendement no 2270 n’est pas adopté.)
Article 28
Mme la présidente
La parole est à Mme Angélique Ranc.
Mme Angélique Ranc
Le Rassemblement national défend une gestion juste et rigoureuse de notre sécurité sociale : juste pour préserver ceux qui en ont véritablement besoin et rigoureuse pour en garantir la pérennité. À ce titre, nous considérons que l’article 28 du PLFSS pour 2026 va dans le bon sens. Il est en effet surprenant qu’aucune durée maximale d’arrêt maladie ne soit déjà prévue par la loi alors que la Haute Autorité de santé (HAS) en a formulé la recommandation. Dans le même temps, les dépenses liées à l’indemnisation des arrêts maladie des salariés du privé et des agents publics ne cessent de croître.
Je souhaite toutefois appeler votre attention sur plusieurs points de vigilance. Limiter la durée des arrêts maladie ne saurait suffire : il faut s’interroger aussi sur les causes de leur augmentation. En effet, beaucoup de ces arrêts traduisent une souffrance réelle, des conditions de travail dégradées, un stress professionnel, une perte de sens ou un climat économique anxiogène. Plutôt que d’en traiter uniquement les conséquences, il faut donc en prévenir les causes.
Ensuite, la lutte contre la fraude aux arrêts maladie et aux indemnités doit s’intensifier. La fermeté doit s’exercer d’abord contre les fraudeurs, non contre les assurés de bonne foi. C’est une exigence d’équité et de justice sociale.
Enfin, il convient de veiller aux effets indirects de cette mesure. En limitant la durée des arrêts, nous risquons de voir augmenter les demandes de renouvellement. Or, dans un désert médical, notamment en zone rurale, obtenir un rendez-vous relève déjà du parcours du combattant. Cette mesure pourrait encore accentuer les tensions sur la médecine de proximité.
En somme, cet article va dans le bon sens, mais il exige une mise en œuvre prudente, respectueuse à la fois de la viabilité de notre système et de la dignité de ceux qui travaillent. Le Rassemblement national le soutiendra donc tout en appelant à la vigilance. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Le sujet est difficile, les arrêts de travail ayant une incidence économique et médicale. Il est question, dans cet article, de limiter leur durée à quinze jours pour ceux prescrits par un médecin de ville et à un mois pour ceux prescrits à la sortie de l’hôpital. Il n’est pas question de porter atteinte à la liberté des médecins de prescrire des arrêts de travail, ou de suspecter tous les patients qui en bénéficient d’en abuser, mais de préciser les choses.
Une partie des arrêts de travail sont liés à des pathologies ou à des accidents, une fracture de la jambe par exemple, et dans ce cas la durée est encadrée par les recommandations de l’HAS. En revanche, certains arrêts sont liés à des dépressions légères, à des troubles musculo-squelettiques (TMS) ou à des problèmes digestifs récurrents, et méritent d’être reconsidérés par le médecin traitant. En effet, un arrêt maladie trop long isole parfois les malades et aggrave leur pathologie. Le médecin traitant peut alors prescrire une reprise partielle du travail ou orienter le patient vers des activités.
La question de la prescription des arrêts de travail soulève aussi des enjeux du point de vue de la relation juridique à l’employeur. J’appelle l’Assemblée à examiner les amendements à l’article 28 et donc à ne pas le supprimer.
Mme la présidente
La parole est à Mme Anaïs Belouassa-Cherifi.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Cet article 28 franchit un nouveau cap dans la mesquinerie et dans l’absurde. En réalité, on peut vous reconnaître une chose, les macronistes, c’est votre constance à détruire le droit du travail. (M. Gabriel Attal fait un signe de dénégation.) Vous essayez de réduire à quinze jours les arrêts de travail. C’est délétère et économiquement absurde, d’autant que cela vient s’ajouter au décret pris par François Bayrou, avant de partir, pour baisser les indemnités journalières.
Vous vous attaquez également à la santé des femmes en voulant supprimer la visite médicale après le congé de maternité, alors qu’une femme sur cinq souffre de dépression post-partum ! Nous refusons que vous vous en preniez aux malades, aux femmes, aux travailleurs. C’est pourquoi nous souhaitons supprimer cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Pierre Pribetich applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Runel.
Mme Sandrine Runel
Non, ce n’est pas toujours la faute des assurés ! La hausse des dépenses liées aux indemnités journalières ne s’explique pas par des abus ! Il suffit de regarder l’état des travailleuses et des travailleurs de notre pays pour en comprendre la cause, mais il semble que vous ayez des difficultés à le faire. La hausse des arrêts de travail est le symptôme d’une souffrance réelle des travailleurs, et d’une montée du stress professionnel et des cas de dépression. Limiter la durée des arrêts de travail, c’est s’immiscer dans une consultation entre le patient et le médecin en imposant au premier la durée de convalescence et en expliquant au second comment faire son métier.
Par ailleurs, comment cette réforme pourra-t-elle se concrétiser dans les zones sous-dotées ? Une personne malade retournera au travail faute d’avoir pu obtenir un nouveau rendez-vous chez un médecin pour prolonger son arrêt maladie. Je n’ose même pas imaginer les conséquences que cela pourrait avoir !
Plutôt que de stigmatiser toujours davantage les personnes en souffrance, nous prônons une politique de prévention – un mot qui ne semble pas appartenir à votre vocabulaire – et une politique ambitieuse de santé au travail, menée en concertation avec les employeurs, dans le cadre d’un véritable dialogue social. Une telle approche permettrait de baisser les demandes d’arrêts et d’en réduire la durée, mais pour de bonnes raisons. Du fait de l’absence de plan de prévention en matière de santé mentale et de santé au travail, et pour toutes les autres raisons évoquées, nous demandons la suppression de l’article. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Simonnet.
Mme Danielle Simonnet
Cet article est à lui seul un petit musée des horreurs ! Il instaure une véritable défiance à l’égard des patients comme des médecins. Il vise à encadrer plus strictement les arrêts de travail et les indemnités journalières en introduisant une durée maximale d’arrêt maladie : quinze jours pour un arrêt prescrit en ville, trente jours à l’hôpital, avec une dérogation possible si le praticien le justifie expressément.
Les arrêts de travail augmentent, mais, pour vous, c’est la preuve d’une fraude. En réalité, cette hausse s’explique avant tout par le vieillissement de la population active, par la dégradation des conditions de travail, par un environnement professionnel souvent toxique et surtout par l’augmentation des accidents du travail. Au lieu de vous attaquer aux causes, vous vous en tenez à la seule logique comptable et vous préférez limiter les dépenses de la sécurité sociale. C’est une honte !
L’article 28 s’attaque à des travailleurs malades du travail. Il prévoit en effet de limiter dans le temps l’indemnisation des arrêts consécutifs à un accident du travail ou à un accident professionnel en instaurant une durée – quatre ans – à l’issue de laquelle l’incapacité serait réputée permanente. Il s’agit, une fois encore, de faire des économies sur le dos de celles et ceux qui souffrent du travail !
L’article tend à supprimer l’obligation de visite médicale après un congé maternité alors qu’elle est essentielle pour protéger la santé des jeunes mères au moment de leur retour au travail. La suppression de cette mesure marquerait un recul majeur pour la santé de femmes qui traversent une période souvent marquée par la fatigue, les complications physiques ou psychologues et le besoin d’accompagnement.
Pour toutes ces raisons, il faut s’opposer à l’article 28 qui affaiblit le droit des assurés, fragilise les soignants et traduit une conception purement comptable de la santé, au mépris des droits des travailleurs et des femmes ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Les arrêts de travail et les indemnités journalières de celles et ceux qui, dans leurs parcours professionnels, subissent des accidents toujours trop nombreux constituent un sujet important.
En premier lieu, il est nécessaire de toujours rechercher une manière d’améliorer les conditions de travail pour éviter les accidents. Toutefois, un fait s’impose à nous : au cours des cinq dernières années, le nombre d’arrêts maladie a crû deux fois plus vite que lors des cinq années précédentes. Faut-il en conclure que les conditions de travail se sont dégradées ? Je ne le crois pas, mais il faut se pencher sérieusement sur la question.
Dans l’Eure-et-Loir, où j’ai été élu, les services de la médecine du travail sont tous concentrés dans la ville préfecture. Or, après certains arrêts maladie, les salariés doivent effectuer une visite médicale de reprise du travail dans les huit jours qui suivent leur retour effectif au travail : faute de rendez-vous possible, cette visite a rarement lieu dans les délais impartis. Il en va de même des visites médicales de reprise consécutives à un congé maternité.
En tant que soignant, nous devons apporter tout l’accompagnement, toute l’attention, tous les soins nécessaires à un patient. Il est faux d’affirmer que les arrêts maladie seront désormais limités à quinze jours : ils pourront l’être en première intention, mais pourront être renouvelés – la HAS a publié plusieurs préconisations à ce sujet. Il importe surtout que le parcours de soins ne soit pas bloqué par des obstacles anormaux.
Interrogeons-nous sur la hausse de 40 % de la sinistralité et sur celle du taux de recours. Chaque euro dépensé doit être un euro utile, avez-vous souhaité les uns et les autres. Ce n’est pas toujours le cas, c’est une évidence !
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
L’article 28 est inadmissible et nous avons déposé un amendement tendant à le supprimer, car les mesures qu’il contient contribueront à fragiliser les travailleurs et leur santé. Depuis 2018, la logique est toujours la même : porter le soupçon sur les malades et leurs soignants en prétendant que les arrêts de travail sont des arrêts de complaisance. Ceux qui veulent sanctionner les malades ne posent jamais la bonne question : quelles sont les raisons de l’augmentation des arrêts et de notre triste record en matière de maladies professionnelles et d’accidents du travail ? Chaque jour, trois accidents du travail mortels ont lieu !
Autres questions que nous devons nous poser : comment déployer des politiques de prévention efficaces au travail ? Quelles mesures adopter afin que les entreprises et les administrations respectent leurs obligations en matière de prévention des risques professionnels ? Comment réduire les inégalités en matière de santé ?
Les restrictions apportées par cet article traduisent une logique complètement absurde. Sans parler du fait qu’ils sont peut-être encore contagieux, ceux qui retournent au travail sans être totalement rétablis aggravent leur propre état, sont moins productifs et, en définitive, retournent consulter un médecin.
L’encadrement de la durée des arrêts de travail prescrits par les professionnels de santé aura pour conséquence d’augmenter le nombre de consultations médicales : c’est établi dans l’annexe 9 du PLFSS. Au-delà du préjudice pour la santé des travailleurs, la mesure n’est même pas opportune d’un point de vue économique.
Le gouvernement veut rendre optionnelle la visite médicale de reprise du travail après un congé maternité alors même que l’on sait à quel point les mères sont fragiles à leur retour au travail. Il s’agit encore une fois de contourner le problème au détriment des travailleuses : cette mesure vise, selon la même annexe, à pallier l’insuffisance du nombre de médecins chargés d’organiser cette visite.
Mme la présidente
Je suis saisie de six amendements identiques, nos 264, 676, 1372, 1382, 1391 et 1414, tendant à supprimer l’article 28.
La parole est à M. Stéphane Mazars, pour soutenir l’amendement no 264.
M. Stéphane Mazars
Si j’ai déposé un amendement de suppression, c’est que j’ai du mal à me retrouver dans cet article complexe qui contient de nombreux dispositifs. Que deviendra le médecin du travail et quelle sera sa place si l’article 28 est adopté ? Ce professionnel joue un rôle très important puisqu’il fait le lien entre les règles du droit de la sécurité sociale et celles du droit du travail. En cas de maladie ou d’arrêt de travail, parfois en raison de l’exercice de la profession, son intervention est décisive : il doit déclarer apte ou inapte une personne à reprendre son emploi ; il lui revient aussi de préciser les conditions de l’aptitude. Je ne vois pas comment on peut se passer d’un médecin du travail, à moins que le médecin traitant assume son rôle à l’avenir.
Mme la présidente
La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 676.
Mme Océane Godard
Les arrêts de travail sont aussi la conséquence d’une crise du management et d’un marché de l’emploi extrêmement rude pour les gens qui vont de contrat court en contrat court. Nous refusons de donner au gouvernement la possibilité de limiter par décret la durée des arrêts de travail indemnisés et de supprimer la visite de reprise après un congé maternité. Ces mesures sont tout simplement inacceptables ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
L’amendement no 1372 de M. Yannick Monnet est défendu.
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l’amendement no 1382.
M. Paul-André Colombani
Il tend également à supprimer l’article 28, qui prévoit de restreindre la durée des arrêts de travail pour maladie, de limiter l’indemnisation des arrêts de travail induits par un accident de travail ou une maladie professionnelle, et de supprimer l’obligation de visite médicale de reprise après un congé maternité.
En encadrant la durée des arrêts de travail prescrits par les professionnels de santé – médecins, sages-femmes et chirurgiens-dentistes –, cet article introduit une logique de suspicion à l’égard des soignants et des assurés. La limitation des arrêts à quinze jours en ville et à trente jours à l’hôpital, ainsi que la limitation des prolongations à deux mois, rigidifient excessivement la prise en charge médicale et portent atteinte à la liberté de prescription des praticiens, alors que ce sont eux qui connaissent le mieux la situation de leur patient.
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l’amendement no 1391.
Mme Élise Leboucher
L’article 28 est un fourre-tout où s’accumulent les régressions du droit des travailleurs. La limitation des arrêts de travail à quinze jours est tout simplement aberrante : les médecins prescrivent des arrêts en fonction de justifications médicales et non comptables ! À peine 10 % des arrêts de travail dépassent quinze jours et l’on voudrait nous faire croire qu’ils sont le problème le plus important de la sécu ?
Le gouvernement cible ensuite les personnes arrêtées pour incapacité temporaire : celles et ceux dont la santé est trop fragile pour leur permettre de travailler et qui ne parviendront pas à faire reconnaître une incapacité permanente seront donc laissés sans ressources. Dans le même temps, le gouvernement ménage largement les employeurs et cautionne les pratiques maltraitantes.
Que dire de la suppression de la visite médicale obligatoire après un congé maternité ? Non content de faire des économies sur le dos des malades, le gouvernement vise à présent les femmes qui ont des enfants ! Une belle mesure à porter au crédit de celui qui demande un réarmement démographique… Et rien sur la prévention ou la santé physique et mentale des travailleurs. Rien sur les conditions de travail !
Vous l’aurez compris, cet article n’est ni amendé ni amendable et nous vous proposons tout simplement de le supprimer. Rétablissez plutôt les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) !
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l’amendement no 1414.
Mme Sandrine Rousseau
L’article 28 part du principe que les gens abuseraient des arrêts de travail, surtout des arrêts longs, et qu’il faudrait davantage les contrôler. Ces arrêts longs sont principalement causés par des troubles musculo-squelettiques et des dépressions. L’augmentation de la durée du travail aggrave les TMS. Les travaux difficiles, qui n’offrent pas de voie de progression professionnelle à ceux qui les effectuent, finissent par générer les lésions qui justifient des arrêts de travail. En outre, le malaise et le mal-être au travail sont réels. Affronter ce problème en recherchant seulement le contrôle des arrêts de travail, c’est se prévaloir d’une vision très réductrice de la souffrance au travail de nombreuses personnes.
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 264, 676, 1372, 1382, 1391 et 1414, je suis saisie par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire, Socialistes et apparentés et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires de demandes de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Thibault Bazin, rapporteur général
J’ai déjà évoqué les conséquences des travaux du comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie. Les kinés, qui attendaient une revalorisation de leurs actes de 1,50 euro, en ont été privés parce que l’enveloppe dédiée aux soins de ville avait été dépassée d’un montant trop important. Mais les kinés n’y étaient pour rien ! J’ai aussi évoqué plus tôt dans la semaine les conséquences de ces travaux sur les officines. Les indemnités journalières versées pendant un arrêt de travail ont-elles substantiellement augmenté ? Oui. Faut-il considérer comme justes certaines explications données à l’évolution de la santé au travail ? Oui, aussi.
Vous connaissez mon goût pour la nuance. Je préférerais qu’on ajuste l’article plutôt qu’il soit supprimé. L’article 28 ne limite pas le droit de prescrire ou la possibilité de se voir prescrire un arrêt de travail pour maladie, accident du travail ou maladie professionnelle. En revanche, il tend à limiter la durée de l’arrêt de travail prescrit en première intention, sans l’interdire. Les arrêts pourront être prolongés et il sera facile aux médecins de contourner cette limite : il leur suffira d’indiquer que l’état du patient le justifie. Les limites fixées – quinze jours pour un arrêt prescrit par un médecin de ville, un mois pour un arrêt prescrit à l’hôpital, deux mois pour la prolongation, renouvelable autant que nécessaire – peuvent être discutées, sauf si vous supprimez l’article.
Je retiens des propos de Jean-Paul Lecoq que ces mesures occasionneraient des dépenses supplémentaires. C’est vrai, les consultations seront plus nombreuses et représenteront 30 millions d’euros supplémentaires. Peut-être est-ce le prix d’un meilleur accompagnement des patients qui se sont vus prescrire un arrêt de travail.
Enfin, le III de l’article 28 me semble être un cavalier législatif. Il faudra le supprimer, à moins de prendre le risque d’une censure du Conseil constitutionnel, qui prendra son stylo rouge vite fait bien fait, car la médecine du travail est intégralement à la charge des employeurs et totalement externe à la branche maladie des régimes obligatoires de base.
M. Jean-Paul Lecoq et M. Yannick Monnet
Ah, un stylo rouge !
M. Thibault Bazin, rapporteur général
En théorie, la visite de reprise après un arrêt maternité est obligatoire. Si en pratique elle n’est pas effectuée parce qu’il est difficile d’obtenir un rendez-vous, je ne crois pas que cela empêche la terre de tourner ni même de reprendre le travail. Mais moi, je n’ai pas de stylo rouge, seulement un stylo bleu (Sourires) – sans doute parce que ma sensibilité politique me porte de l’autre côté !
Ces amendements de suppression ont été rejetés par la commission et, à titre personnel, j’y suis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre
On ne peut pas détourner le regard des dépenses engendrées par les indemnités journalières, d’autant qu’on débat du budget de la sécurité sociale. Le coût des arrêts maladie – 11 milliards d’euros par an – progresse depuis 6 % par an depuis 2019.
L’article 28 ne tend pas à lutter contre d’éventuels abus, mais à améliorer la pertinence des prescriptions. En 2022, 40 000 patients étaient arrêtés depuis plus deux ans : c’est beaucoup !
Alors que la HAS recommande un arrêt de quatorze jours en cas de trouble anxieux mineur, 3 000 médecins ont prescrit des arrêts de plus de quarante-huit jours. Il faut débattre de ce constat !
Vous dénoncez une entrave à la liberté de prescription des médecins, mais ceux-ci conserveront la possibilité de ne pas respecter la limitation des arrêts de travail lorsque la situation du patient l’exigera.
Vous dites que cette limitation est contraire aux recommandations de la Haute Autorité de santé. Concernant la sciatique – sujet que je connais bien –, une pathologie fréquente chez des travailleurs jeunes, la durée recommandée de la prescription est dépassée dans 13 % des cas alors qu’on sait qu’il est préconisé de reprendre au plus vite une activité pour en guérir.
Mme Ségolène Amiot
Que faites-vous des travailleurs sédentaires ?
Mme Dieynaba Diop
Il y a des métiers où l’on est assis toute la journée !
Mme Stéphanie Rist, ministre
Vous dites ensuite que les mesures envisagées occasionneront des consultations non nécessaires qui surchargeront des médecins déjà débordés : oui, nous l’assumons, car cela permettra un suivi, donc in fine une meilleure prise en charge.
Vous avancez également que les patients ayant des difficultés d’accès aux soins ne pourront pas faire prolonger leur arrêt à temps. Or sur 10,5 millions d’arrêts prescrits en ville chaque année, 900 000 le sont pour une durée supérieure à quinze jours ; et sur 4,5 millions d’arrêts prescrits à l’hôpital, 300 000 le sont pour une durée supérieure à un mois. J’ajoute que, s’agissant des arrêts plus courts, une fois le plafond de la première prescription atteint – quinze jours en ville, un mois à l’hôpital –, les arrêts pourront être renouvelés par tranche de deux mois : cela me paraît laisser suffisamment de temps aux patients pour trouver un rendez-vous médical, d’autant que vous avez voté la mise en place du réseau France Santé en adoptant l’amendement no 2568 du gouvernement. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Enfin, vous soutenez que les patients ayant besoin d’arrêts longs vont être forcés de reprendre le travail alors que leur santé ne le leur permet pas : là encore, je le répète, il n’est pas question de contraindre la reprise du travail si l’état de santé l’en empêche.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à vos amendements de suppression.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du travail et des solidarités.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre du travail et des solidarités
Vous avez, pour vous répondre, une ministre qui est médecin et un ministre qui vient de l’entreprise et qui s’intéresse au travail…
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Et à la santé !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre
…et à la santé ! Mme la ministre a répondu en tant que médecin ; je répondrai sur le plan du travail et de la santé au travail.
Je partage nombre des remarques qui ont été formulées. Elles concernent l’amont, la prévention : je conviens qu’il faut travailler sur ce sujet et se demander comment faire en sorte que les salariés soient plus à l’aise au travail, dans leurs entreprises, comment préserver leur santé, comment avoir un management de qualité, ainsi que des relations professionnelles les plus harmonieuses possibles. Tout ce qui relève des conditions de travail, de l’organisation et du rythme du travail, est fondamental. C’est tellement important que j’ai proposé aux partenaires sociaux d’y travailler dans le cadre de la conférence sur le travail que nous avons lancée mardi dernier : avant de parler des retraites, nous y parlerons beaucoup du travail. Voilà trop longtemps que ce sujet n’a pas été abordé dans le pays. Or les mieux placés pour ce faire me semblent être les partenaires sociaux – les organisations syndicales ou patronales. Nous avons créé le cadre de ce débat. Il permettra de répondre à bien des questions fondamentales que vous avez posées.
M. Thibault Bazin, rapporteur général
Il a raison !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Je partage cet avis !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre
Vous avez également évoqué la fraude, mais elle n’est pas concernée par l’article 28. Ce dernier vise à améliorer les choses en recherchant une meilleure efficacité et en assumant un côté gestionnaire, car il y a beaucoup d’argent en jeu. Si nous pouvons être autant, sinon plus, efficaces avec moins d’argent, il faut le faire, c’est même notre devoir – c’était le sens de l’intervention de la ministre de la santé. Y a-t-il de la fraude en matière d’arrêts de travail ? Je n’en sais rien ; peut-être, là comme ailleurs. Je sais en revanche qu’un projet de loi sur la fraude fiscale et sociale vous sera bientôt présenté ; nous le défendrons, la ministre de la santé et moi-même. D’après les évaluations, 13 milliards d’euros seraient perdus chaque année à cause de la fraude : c’est beaucoup d’argent à recouvrer.
Mme Ségolène Amiot
70 % des fraudes sont le fait des professionnels de santé !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre
Nous vous présenterons des dispositifs pour être plus efficaces dans la lutte contre ce fléau, car les euros sur lesquels on triche sont des euros que l’on prend aux Français ainsi qu’à la sécurité sociale.
Vous avez aussi abordé la santé des jeunes et des femmes. Là encore, nous y travaillons, comme vous l’avez demandé : nous présenterons bientôt un plan santé, dont le cinquième axe comportera des actions complémentaires en la matière.
Je veux aussi rendre hommage aux hommes et aux femmes qui travaillent dans les services de prévention et de santé au travail (SPST).
Mme Ségolène Amiot
Dont vous avez réduit les budgets !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre
Ils font un travail remarquable, il faut le souligner.
M. Philippe Vigier
Très bien !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre
Quant aux médecins du travail, ils exercent une médecine clé pour nous aider à mieux protéger la santé dans les entreprises. Ils sont entièrement associés à l’effort que nous déployons.
Puisque Mme la ministre de la santé s’est concentrée sur les arrêts de travail, j’aborderai une autre disposition de l’article 28 : la suppression de l’obligation de visite d’un médecin du travail pour les femmes de retour au travail après un congé maternité. Comprenez bien que nous proposons de la rendre facultative. Néanmoins, l’amendement no 2331 constitue sur ce sujet un amendement de repli qui pourrait rencontrer l’intérêt du gouvernement. J’espère que nous aurons l’occasion de l’examiner.
Au total, je suis bien évidemment défavorable aux amendements de suppression de l’article.
Mme la présidente
La parole est à Mme Camille Galliard-Minier.
Mme Camille Galliard-Minier
Si l’article 28 avait eu pour objectif de stigmatiser les personnes en arrêt de travail, de les fragiliser ou de manifester une défiance à leur encontre, nous aurions évidemment voté sa suppression ; mais ce n’est pas le cas. Lorsque l’on s’intéresse à la lettre même des dispositions envisagées, on voit bien que les prescriptions ne seront pas limitées, qu’il s’agisse des modalités de leur délivrance ou de leur durée, puisqu’elles pourront être renouvelées dans les mêmes conditions. Seules les durées des primo-prescriptions et des prolongations le seront, de sorte que les personnes arrêtées puissent voir plus régulièrement leur médecin, qu’elles bénéficient d’un meilleur suivi et qu’elles évitent ainsi de s’isoler. Pour toutes ces raisons, nous nous opposerons aux amendements de suppression.
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Turquois.
M. Nicolas Turquois
Monsieur Lecoq, vous avez raison : l’article s’oppose à l’esprit originel de la protection sociale liée aux maladies et aux accidents du travail, selon lequel, lorsqu’on tombe malade ou lorsqu’on se blesse au travail, on doit bénéficier d’un vrai temps pour se rétablir. La situation a cependant évolué, et cet esprit originel a été remis en cause. Nous devons donc l’interroger, de la manière la plus rationnelle possible : il est certain qu’il y a du mal-être et des problèmes de sécurité au travail, mais il y a aussi parfois des comportements difficiles à gérer, des salariés qui usent de substances addictives, ce qui complique la tâche des employeurs, notamment dans les PME ; on constate également que les arrêts longs se multiplient, alors qu’ils étaient plus courts auparavant. Il faut aborder ce sujet de manière transparente si nous voulons préserver le modèle de prise en charge des accidents de travail. Le groupe Démocrates s’opposera donc à la suppression de l’article.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Le gouvernement Lecornu semble penser qu’il sait mieux que votre médecin ce dont vous avez besoin ! Pourtant ce sont bien les cotisations patronales qui abondent la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) – modulées en fonction du niveau de sinistralité de l’entreprise, du nombre d’accidents ou de maladies constatés. Autrement dit, les coûts ne pèsent pas sur les travailleurs et les travailleuses.
En revanche, la disposition visant à supprimer la visite de reprise après un accouchement est une ineptie totale. Cela me met vraiment en colère quand on sait que la dépression post-partum est la première cause de mortalité postnatale. Cette visite médicale sauve des vies ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Plusieurs députées du groupe SOC applaudissent également.)
Enfin, monsieur le ministre du travail, puisque vous étiez employeur, vous vous doutez bien qu’en obligeant les salariés à renouveler leur arrêt de travail tous les quinze jours (« Non ! C’est deux mois pour les prolongations ! » sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem), vous priverez les employeurs de la prévisibilité nécessaire pour organiser leur remplacement.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Après vous avoir écoutés avec beaucoup d’attention, madame la ministre, monsieur le ministre, je me suis demandé si je vivais dans le même pays que vous ! Au Havre, où je vis, beaucoup de gens pratiquent l’automédication parce qu’ils ne parviennent pas à obtenir un rendez-vous chez le médecin ; d’autres payent 11 euros l’aller-retour pour traverser la Seine et aller voir un médecin « de l’autre côté de l’eau », comme on dit, parce que chez nous, de ce côté-ci de l’estuaire, ce n’est pas possible. Et vous voudriez qu’on reprenne un rendez-vous de suivi ? Alors que c’est déjà du sport d’en avoir un premier ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC, et EcoS.)
Je ne sais pas où vous vivez mais moi, là où je vis, la question se pose. On est même obligé de trouver des vieux médecins à la retraite pour renouveler les ordonnances de ceux qui ont des affections de longue durée (ALD) ; des médecins retraités qui n’accueillent que ces patients-là ! Vous voyez dans quel pays je vis ? C’est pourquoi nous voterons la suppression de l’article. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Paul-André Colombani.
M. Paul-André Colombani
Sortons de la logique comptable. Nous en parlions tout à l’heure, à propos des maladies chroniques, qui explosent. Quand on raisonne de façon comptable, on limite la prise en charge des ALD ; ici, c’est la même chose. Le contrôle des arrêts de travail n’est certainement pas un tabou pour les professionnels de santé et les services médicaux de l’assurance maladie ; ils n’ont simplement plus les moyens de les effectuer ! Les assurés de la Mutualité sociale agricole (MSA) arrivent encore à croiser un médecin, mais au régime général c’est quasiment impossible. La plupart du temps, le contrôle est purement administratif ; c’est au mieux après un coup de téléphone que les droits des assurés sont bloqués, sans enquête contradictoire. J’ai entendu les ministres prendre des engagements, mais avant de se demander comment mieux bloquer les arrêts de travail, tâchons d’abord d’imaginer des mesures pour améliorer la qualité de vie professionnelle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Rousseau.
Mme Sandrine Rousseau
Il faut absolument supprimer cet article. Je sais que vous n’aimez pas ça, mais je vais tout de même vous raconter l’histoire de cette femme de ménage qui nettoie l’Assemblée nationale pendant que nous dormons. La dernière fois que je la croise, je vois qu’elle a coupé ses cheveux ; je lui fais alors la remarque, en la complimentant pour sa nouvelle coupe. « Vous savez », me répond-elle, « je ne les ai pas coupés pour faire joli, c’est juste que je n’arrive plus à lever les bras pour m’attacher les cheveux. » Les arrêts longs de travail, c’est cela ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.) Ils touchent ceux qui n’arrivent plus à lever les bras suffisamment haut pour simplement s’attacher les cheveux ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
M. Benjamin Lucas-Lundy
Et ça les fait marrer !
Mme Sandrine Rousseau
Il y a des choses bien moches dans ce PLFSS, mais cet article l’est particulièrement. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 264, 676, 1372, 1382, 1391 et 1414.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 214
Nombre de suffrages exprimés 211
Majorité absolue 106
Pour l’adoption 98
Contre 113
(Les amendements identiques nos 264, 676, 1372, 1382, 1391 et 1414 ne sont pas adoptés.)
(« Vous n’aimez pas les travailleurs ! » et exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme Ségolène Amiot
Honteux !
Mme Alma Dufour
C’est comme cela que vous soutenez la France qui travaille chez EPR et au RN ?
M. Pascal Jenft
Vous aviez besoin de nous pour le scrutin, peut-être ?
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 1387, 1408 et 1392, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1387 et 1408 sont identiques.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1387.
M. Yannick Monnet
Il s’agit d’un amendement de repli. Madame la ministre, monsieur le ministre, une autre solution était possible : celle de la bienveillance. Il suffisait de constater l’augmentation des arrêts de travail et le coût supplémentaire induit pour la sécurité sociale, de voter en faveur des amendements de la gauche pour augmenter les recettes afin d’y faire face, puis d’examiner l’origine de cette augmentation. Est-elle liée à de mauvaises conditions de travail ? Y a-t-il des abus ? Vous avez préféré ne même pas vous poser la question. Vous auriez pu faire le choix de la bienveillance et de l’intelligence, mais vous l’avez refusé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l’amendement no 1408.
M. Alexis Corbière
Monsieur le ministre du travail, vous êtes intervenu durant plusieurs minutes pour égrener les sujets dont vous étiez prêt à discuter. Nous n’avons d’ailleurs pas bien compris ce que vous alliez faire d’autre à part en parler : ma bonne dame, mon bon monsieur, point d’inquiétude, nous allons réunir les syndicats pour parler de la souffrance au travail !
En attendant, vous êtes favorable à ce que le régime des arrêts de travail soit d’ores et déjà remis en cause. Votre méthode est radicalement antisociale. Alors que les discussions que vous appelez de vos vœux auraient très bien pu aboutir à la conclusion qu’aucune modification ne doit être apportée à ce régime, vous partez du présupposé qu’il faut le réformer.
Voyez-vous, du point de vue des parlementaires, votre démarche n’est pas sincère : vous nous avez fait perdre du temps – je me permets de vous le dire avec respect.
M. Rodrigo Arenas
Il n’y a pas que la démarche qui est insincère, le gouvernement lui-même est insincère !
M. Alexis Corbière
Vous avez eu de grandes responsabilités, vous avez dirigé la SNCF : vous savez donc très bien que ce dont ont témoigné les collègues, c’est la réalité.
De deux choses l’une : soit vous allez à l’essentiel et vous reconnaissez que cet article est uniquement motivé par des raisons comptables et que c’est perdre du temps d’en débattre avec vous ; soit vous remettez en cause l’honnêteté du médecin et celle du travailleur, ce qui est suffisamment méprisant pour justifier notre colère. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. – Mme Dieynaba Diop applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 1392.
Mme Ségolène Amiot
Il vise à supprimer la limitation de la durée des arrêts de travail pour incapacité. La limitation prévue empêchera la consolidation – c’est-à-dire la stabilisation de l’état de santé ou la guérison –, qui réclame du temps. Durant ce temps de consolidation, le corps continue parfois de se battre contre la maladie ; si bien qu’en être privé, c’est se trouver dans l’impossibilité de faire reconnaître une maladie professionnelle. Franchement, arrêtez le massacre, cessez de vous en prendre aux travailleurs et aux travailleuses – lâchez-leur la grappe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Dieynaba Diop applaudit aussi. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
M. Hervé de Lépinau
C’est un propos sexiste !
Mme la présidente
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance. Nous reprendrons avec l’avis du rapporteur général sur ces trois amendements.
2. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra