Deuxième séance du jeudi 13 novembre 2025
- Présidence de Mme Hélène Laporte
- 1. Démission d’un député
- 2. Projet de loi de finances pour 2026
- Première partie (suite)
- Article 45 et débat sur le prélèvement européen
- M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé de l’Europe
- M. Philippe Juvin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères
- M. Bruno Fuchs, président de la commission des affaires étrangères
- Mme Constance Le Grip
- M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes
- Mme Cyrielle Chatelain (EcoS)
- Mme Sabine Thillaye (Dem)
- Mme Isabelle Rauch (HOR)
- M. Michel Castellani (LIOT)
- M. Emmanuel Maurel (GDR)
- M. Maxime Michelet (UDR)
- M. Alexandre Sabatou (RN)
- M. Charles Sitzenstuhl (EPR)
- M. Matthias Tavel (LFI-NFP)
- Mme Marietta Karamanli (SOC)
- Mme Marie-Christine Dalloz (DR)
- M. Benjamin Haddad, ministre délégué
- Article 45 (appelé par priorité)
- Rappel au règlement
- Article 45 (appelé par priorité - suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 9 (suite)
- Rappel au règlement
- Après l’article 9 (suite)
- Amendement no 923
- Article 45 et débat sur le prélèvement européen
- Première partie (suite)
- 3. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Hélène Laporte
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à seize heures.)
1. Démission d’un député
Mme la présidente
La présidente de l’Assemblée nationale a reçu de M. Stéphane Chouin, député de la première circonscription du Loiret, une lettre l’informant qu’il se démettait de son mandat de député à compter d’aujourd’hui.
Acte est donné de cette démission, qui sera notifiée au premier ministre.
2. Projet de loi de finances pour 2026
Première partie (suite)
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2026 (nos 1906, 1996).
Article 45 et débat sur le prélèvement européen
Mme la présidente
Nous en venons, dans les conditions arrêtées par la conférence des présidents, à l’article 45 relatif à l’évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne (no 1996, tome III, annexe 47 ; no 1990, tome IX).
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé de l’Europe.
M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé de l’Europe
Avant de commencer ce débat, permettez-moi d’avoir un premier moment de recueillement pour toutes les victimes des attentats terroristes du 13 novembre 2015. (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.)
Le débat sur le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne est un moment important. Notre contribution fait l’objet d’un débat budgétaire, dans lequel il faut prendre en considération les retours pour les territoires, les agriculteurs, les étudiants ou les entreprises ainsi que l’appartenance au marché intérieur. Cependant elle exprime aussi un choix politique, celui d’une France influente, qui pèse, dont la voix porte sur la scène européenne et internationale, ou d’une France qui se replie et s’affaiblit. Soyons clairs, notre pays bénéficie de son appartenance à l’Union européenne.
En 2026, notre contribution est estimée à 28,8 milliards d’euros, soit 5,7 milliards de plus qu’en 2025. Cette augmentation n’est pas une dérive ; elle s’explique par la hausse des crédits de paiement proposés pour 2026, notamment sous l’effet d’un rattrapage mécanique des paiements au titre de la politique de cohésion. Pour être clairs, nous sommes toujours dans la trajectoire qui avait été votée par les États membres et les parlementaires en 2021 lors de la négociation du cadre financier pluriannuel, le budget sur sept ans de l’Union européenne. Nous assistons en ce moment à un rattrapage des décaissements de la politique de cohésion après que les États membres ont fait le choix, au cours de la première partie du cycle, de se tourner principalement vers les fonds du plan de relance, c’est-à-dire des financements extrabudgétaires.
Cette augmentation s’explique aussi par des facteurs imprévus au moment de la négociation du cadre financier pluriannuel : le soutien à l’Ukraine, le financement de la surcharge d’intérêt liée au plan de relance, ou encore la réponse au défi migratoire. Avec ma collègue Amélie de Montchalin, nous nous sommes battus pour que la Commission européenne maîtrise ses dépenses, ce qui a conduit à une hausse moins importante que ce qui avait été anticipé.
La contribution de la France au budget de l’Union européenne est essentielle à un moment où, plus que jamais, l’Union européenne doit prendre son destin en main face aux menaces extérieures et au risque de décrochage économique par rapport à la Chine ou aux États-Unis. Ce n’est pas un chèque en blanc que nous signons aujourd’hui. Soyons sérieux, l’Europe est un levier d’action, pas un fardeau. Ceux qui prétendent le contraire ne proposent rien d’autre que l’isolement et la pente glissante vers le Frexit.
Mme Constance Le Grip
Absolument !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Mesdames et messieurs les députés, parler du budget européen, c’est d’abord parler de la vie des Français.
Pour la deuxième année consécutive, la France est le premier bénéficiaire du budget de l’Union à hauteur de 16,5 milliards d’euros. Vous le savez, nous restons de loin le premier bénéficiaire de la politique agricole commune (PAC) avec près de 9,5 milliards d’euros de retours par an. Elle garantit le revenu de nos agriculteurs et notre souveraineté alimentaire. Nos régions bénéficient aussi de la politique de cohésion : près de 18 milliards leur sont consacrés entre 2021 et 2027. Cette politique permet par exemple la rénovation thermique des corons verts de Douai ou encore le financement de la maison de santé de Dammarie-les-Lys où je me suis rendu récemment. Quand certains prétendent que l’Europe ne fait rien, je réponds : « Regardez vos territoires ! »
Nous avons également bénéficié du plan de relance à hauteur de 9 milliards en 2024. Il a permis par exemple de financer l’insertion de 430 000 jeunes dans la vie professionnelle, la rénovation énergétique de 40 000 logements, l’agrandissement du centre hospitalier de Dijon ou encore l’électrification d’usines agroalimentaires.
Enfin, nous en parlons peu, mais avec 12,6 milliards d’investissements en 2024, la France était le premier pays bénéficiaire des financements de la Banque européenne d’investissement (BEI). Très concrètement, ces financements ont permis par exemple, la création de plus de 750 emplois dans une gigafactory près de Douai.
Au total, plus de 38 milliards ont été investis sur notre territoire en 2024 en provenance de différentes sources de l’Union européenne. Je tiens à souligner que nos retours sont également en amélioration – nous l’avions annoncé lors des débats l’an dernier – passant de 10 % l’année dernière à 11 % cette année. C’est la preuve que les efforts du gouvernement portent leurs fruits depuis la création de la cellule de mobilisation des fonds européens pour nos territoires, nos universités et nos centres de recherche.
Toutefois, l’apport de l’Europe à la France n’est pas qu’un bilan budgétaire. Ainsi, l’appartenance au marché intérieur triple le commerce bilatéral entre deux États membres, de sorte que 55 % de nos exportations vont vers nos partenaires européens. Nos agriculteurs sont exportateurs en Europe.
Notre contribution sert aussi nos intérêts dans une Europe qui protège et assume sa puissance. Face à la guerre d’agression russe, soutenir l’Ukraine, c’est assurer la sécurité de tous les Européens. Nous renforçons notre défense. La voix de la France porte : regardez la défense européenne, avec le nouvel instrument Safe (Sécurité pour l’action en Europe), doté de 150 milliards d’euros pour réaliser des prêts et apporter un soutien à la coopération industrielle, selon le principe de la préférence européenne que la France a défendu pendant toute la négociation, d’après lequel l’argent du contribuable européen doit servir les intérêts de l’Europe et soutenir l’industrie européenne. La sécurité passe aussi par le contrôle de nos frontières. Frontex et les infrastructures migratoires bénéficient ainsi d’un soutien budgétaire renforcé.
L’indépendance n’est pas le repli, tel est le sens de notre ambition de souveraineté industrielle et technologique. Dans la défense, le numérique, l’agriculture, les semi-conducteurs, la santé, l’énergie : dans tous ces secteurs, la France s’efforce de réduire sa dépendance vis-à-vis de ses partenaires européens.
En juillet dernier, la Commission européenne a présenté sa proposition pour le prochain cadre financier pluriannuel 2028-2034. La définition de ce cadre est l’occasion de débattre de nos priorités et de la relation financière de la France avec l’Union européenne.
Je m’attache personnellement, en tant que ministre responsable de cette négociation au Conseil, à défendre les intérêts de la France : ceux de nos territoires, de nos agriculteurs, de nos entreprises. Nous défendrons également la création de nouvelles ressources propres pour ne pas alourdir nos contributions nationales. Le gouvernement sera au rendez-vous, avec la plus grande exigence. Ma porte est d’ores et déjà ouverte aux propositions de tous les parlementaires.
Dans ce monde conflictuel et dangereux, le choix n’est pas entre plus ou moins d’Europe, mais entre l’Europe puissance et le repli impuissant. Autoriser ce prélèvement, c’est donner à la France les moyens de peser, d’influencer et d’agir pour nos concitoyens. C’est aussi être à la hauteur de la parole de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe HOR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Philippe Juvin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
J’ai trois choses à vous dire concernant la participation de la France au budget de l’Union européenne.
D’abord, je crois que les sociétés civilisées sont des sociétés de contrat, où l’on tient ses engagements. Il y a des écrits tels que les traités internationaux, la Constitution ou des lois, qui établissent que cette contribution est une dépense obligatoire. Le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) prévoit cette participation et nous devons donc obéir à nos engagements. Une France qui n’obéirait pas à ses engagements serait une France qui se renie, tandis que nous sommes la France des gens sérieux, qui remplissent leurs engagements. Même si nous ne sommes pas d’accord avec le contenu de tous ces engagements, nous assumons parce que nous sommes la France.
Ensuite, la vraie question est la suivante : quel serait le coût pour la France de ne pas participer à l’Union européenne ?
Mme Constance Le Grip
Absolument !
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Quel serait le coût pour la France de ne pas assumer sa participation, en particulier au marché intérieur ? Pour les entreprises françaises, vaut-il mieux une France avec ses 68 millions d’habitants, donc avec un marché de 68 millions de clients – disons-le comme cela –, ou une France avec un marché de 450 millions de clients ?
M. Emeric Salmon
C’est de la théologie !
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Ce n’est pas de la théologie, mais la prise en considération de la réalité. La France peut bénéficier d’un marché intérieur de 450 millions de clients pour ses entreprises. Je donnerai un autre exemple : 60 % des exportations françaises sont en direction du marché intérieur de l’Union européenne, parce qu’il n’y a pas de barrières aux frontières entre les États membres.
L’adoption du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne a également pour enjeu de montrer notre adhésion à ce grand marché unique dont nous bénéficions.
Enfin, on peut considérer que cette participation est trop élevée – je sais que plusieurs de nos collègues défendront l’idée que nous payons trop. Mais malheureusement, cette question ne se décide pas ici. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Thierry Tesson
À quoi sert l’Assemblée nationale ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Il se décide à Bruxelles, ainsi qu’au Parlement européen à Strasbourg,…
M. Matthias Tavel
Et à l’Élysée !
M. Philippe Juvin, rapporteur général
…où justement se négociera dans les mois qui viennent le prochain plan pluriannuel de financement pour la période 2028-2034. C’est là que vous devez négocier la participation française par l’intermédiaire des représentants de vos groupes politiques – qui sont tous représentés au Parlement européen. Le prochain plan pluriannuel de financement prévoit une hausse de budget de 62 %, une augmentation des dépenses de l’administration de 83 à 118 milliards, une taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises – bref, des conséquences importantes, que nous devrons endosser ici. C’est à Bruxelles et à Strasbourg que se décidera la future participation de la France à l’Union européenne. Il faut donc défendre nos intérêts à Bruxelles et à Strasbourg et assumer ici les engagements que nous avons pris. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR ainsi que sur quelques bancs des groupes DR et Dem.)
Mme Marie-Christine Dalloz
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
S’il y a bien un domaine où la France a visiblement beaucoup d’influence, c’est dans la perte totale des contrôles des finances publiques au niveau européen. Ainsi, les macronistes ont fait totalement dérailler les dépenses et les impôts et l’Union européenne suit exactement ce mauvais chemin.
J’en donnerai deux exemples. D’abord, malgré une hausse continue de la contribution des pays européens et en particulier de la France, l’Union européenne (UE) a réussi à accumuler près de 500 milliards de crédits non dépensés et même au terme du plan pluriannuel en 2027, il y aura encore près de 300 milliards de crédits non dépensés. À quoi bon donner toujours plus d’argent si c’est pour arriver à une telle gabegie – ou à une non-gabegie, en tout cas à une absence totale de la maîtrise ? (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)
M. Charles Sitzenstuhl
On ne comprend rien à ce que vous racontez !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Ensuite, il faut prendre en considération le coût du fameux plan de relance. Les intérêts du plan de relance étaient évalués à 15 milliards d’euros, mais ce plan a été tellement mal géré que ses intérêts vont exploser de 76 % entre 2021 et 2027. Je vous laisse imaginer ce qui se passerait si une entreprise ou un ménage gérait sa dette de la même façon ! Même la France gère un peu moins mal sa dette et le coût des intérêts qu’elle doit verser que l’Union européenne. C’est là qu’on voit, chers collègues, que dès qu’on parle de l’Union européenne, un certain nombre de groupes ici perdent toute rationalité – comme sur le sujet de l’immigration. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe EPR.)
M. Charles Sitzenstuhl
C’est vous qui nagez en plein délire !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Oui, vous êtes dans l’irrationalité absolue au sujet de l’Union européenne. Que vous soyez fédéralistes, ou souverainistes comme le Rassemblement national, vous devriez être soucieux des crédits publics, de l’argent des contribuables français. Non : si c’est l’Union européenne qui dépense, tout est possible et surtout le n’importe quoi ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Dieynaba Diop
Les 4 millions, vous les avez détournés directement !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Vous perdez aussi toute rationalité quand vous invoquez le fait que nous avons des retours. Je ne sais pas ce que vous ne comprenez pas, notamment vous, monsieur le ministre. La contribution nette de la France, c’est le chiffre obtenu en retranchant tous les retours, y compris la PAC ou le saupoudrage de financements sur différents programmes français : c’est un chiffre négatif, une perte de 9 ou 10 milliards. De même que vous ne pouvez pas invoquer des pertes deux fois, vous ne pouvez pas compter deux fois les mêmes retours – si vous comptez comme ça, je comprends mieux que la France soit dans cet état financier ! Nous proposons donc naturellement que la France obtienne enfin un juste retour. Étant donné la situation des finances publiques de la France, obtenir un juste retour, c’est baisser de manière drastique la contribution de la France à l’Union européenne.
Un mal pour un bien : le seul intérêt du maintien au pouvoir des macronistes a été la révélation de l’un de vos mensonges d’État, à savoir qu’il est bien possible de négocier à la baisse la contribution de la France, sans que cela mène au Frexit.
M. Charles Sitzenstuhl
C’est faux !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
J’alerte ceux qui nous écoutent, les citoyens français : cela fait vingt ans que les fédéralistes mentent ! Pour baisser la contribution de la France, il suffit de baisser les dépenses illégitimes de l’Union européenne, sans que cela conduise au Frexit. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Nous proposerons des amendements pour annuler un certain nombre de programmes.
Il n’y a donc pas à négocier entre l’appartenance de la France à l’Union européenne ou le Frexit : il faut juste que l’Union européenne fasse, si c’est possible, de bonnes dépenses. Un peu de rationalité, mes bien chers frères, mes bien chères sœurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. Charles Sitzenstuhl
C’est indigne d’un rapporteur ! Vous êtes censé parler au nom de la commission, pas en votre nom !
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
L’Union européenne n’est pas intouchable. Elle n’a de légitimité que celle des peuples qui la composent. Elle n’a de financement que celui que ces peuples lui consentent. Les règles de l’Europe et les contributions à son budget ne sont ni indiscutables ni intangibles. Elles doivent soutenir le progrès humain ainsi que la satisfaction des besoins écologiques et sociaux. Dans le cas inverse, l’intérêt supérieur du peuple commande de réagir.
Cela avait été le cas lors du vote sur le traité constitutionnel européen (TCE). L’année 2025 marque les vingt ans de la victoire contre le TCE par le référendum de 2005. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et GDR. – M. le rapporteur spécial Jean-Philippe Tanguy et M. Philippe Brun applaudissent également.) Pourtant, depuis vingt ans, tout se passe comme si cette décision démocratique majeure n’avait pas été prise, et on impose une politique économique rejetée par les peuples.
Vous dites que cette politique est une fatalité et que les règles européennes sont inévitables. Mais dans cette Europe que vous vous échinez à défendre, nombreux sont les passe-droits. Sinon, comment expliquer les 1 545 procédures d’infraction contre des États pour non-respect du droit de l’Union européenne, dont un tiers pour non-respect des règles environnementales et de protection des consommateurs ?
Comment expliquer que la liberté de circulation soit garantie à certains, tandis qu’on enferme les autres aux frontières, dans des prisons qui ne disent pas leur nom ? Comment expliquer que six États, dont l’Allemagne, peuvent sans crainte s’affranchir chaque année de la règle des 6 % d’excédent de balance courante, alors que la France devrait subir une procédure, car elle dépasse les 3 % de déficit public ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Enfin, comment expliquer que l’Allemagne, premier contributeur net, bénéficie d’un rabais de 3,7 milliards d’euros, alors que la France, deuxième contributeur net, ne bénéficie de rien ?
M. Matthias Tavel
Eh oui !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Il n’y a que deux explications : les priorités politiques et les rapports de force politiques, qui n’incluent aucune sortie. Nous sommes donc bien face à une question politique, et non à une hypothétique fatalité du droit.
Ouvrons les yeux : 9 milliards d’euros, c’est le surplus de la contribution française au budget européen. C’est aussi l’équivalent des plus grosses coupes voulues par le gouvernement dans le budget pour 2026. Or vous ne pouvez pas imposer des efforts à la population sans toucher à notre contribution au budget européen.
Minorons donc notre contribution européenne de ces 9 milliards, nous épargnerons ainsi bien des peines à notre population. Ensuite, taxons les ultrariches et les multinationales, qui sont largement protégés par des directives européennes. Nous pourrons ainsi financer les services publics et réparer les dégâts du macronisme. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Ces dégâts sont immenses. Depuis 2017, selon de multiples indicateurs d’Eurostat, la France est le pays européen où les inégalités, la pauvreté et les besoins médicaux non satisfaits augmentent le plus. Le bloc gouvernemental répète que sa politique d’offre n’a pas encore porté ses fruits. J’estime pour ma part qu’elle a malheureusement porté ses fruits, et que ces derniers sont empoisonnés.
En France, les conditions de vie se détériorent gravement, alors que les ultrariches accumulent toujours plus de richesses. Il faut donc arrêter tout cela et réparer les dégâts. Au niveau européen, si c’est pour laisser la présidente de la Commission négocier seule avec Trump des accords léonins contraires à nos intérêts économiques, l’Union européenne n’a pas besoin de tout cet argent.
M. Matthias Tavel
Absolument !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Je vous propose donc d’en récupérer une partie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR. – M. le rapporteur spécial Jean-Philippe Tanguy applaudit aussi.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis de la commission des affaires européennes.
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères
Trois minutes pour rendre un avis sur un prélèvement de près de 29 milliards d’euros au budget de la nation, c’est bien peu. La France donne à l’Union européenne 12 milliards de plus que ce qu’elle reçoit de celle-ci. Ces 29 milliards représentent 24,6 % de hausse par rapport à 2025. Cela interroge, a fortiori dans un budget fait de coupes budgétaires massives, qui aggraveront les conditions de vie de la majorité des habitants de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Ce chiffre n’est pas qu’un montant. C’est aussi un choix politique imposé aux Français contre leur vote de 2005 : celui d’une Europe néolibérale qui réclame toujours plus aux budgets nationaux, lesquels, avec la part de TVA, représentent 88 % de ses ressources.
M. Matthias Tavel
Absolument !
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Chaque année, la facture grimpe mécaniquement, et il faut la valider sans broncher, sous peine d’être taxés d’antieuropéens. Nous ne sommes pas opposés par principe à une contribution nationale au budget européen, au contraire. Mais nous nous demandons à quoi elle sert.
Où va l’argent ? L’exemple de la politique agricole commune est édifiant. Elle est dotée d’un budget de 55 milliards. Mais à qui vont ces milliards ? Aux plus grandes exploitations, puisque les aides sont calculées à l’hectare, et non par types de productions : 80 % des aides vont à 20 % des exploitations.
M. Matthias Tavel
Eh oui !
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
L’agriculture paysanne et biologique, les circuits courts et la polyculture essentielle à notre souveraineté alimentaire sont sacrifiés. Et le pire est à venir, si l’accord UE-Mercosur était imposé, avec la complicité non assumée des gouvernements macronistes successifs. (Mêmes mouvements.)
Ensuite, 48 milliards d’euros vont à une politique dite de cohésion, qui prétend réduire les fractures sociales et territoriales européennes. Mais l’Union européenne néolibérale est un système de compétition entre les territoires et les travailleurs. L’Europe qui demande de l’argent pour la cohésion est la même que celle qui creuse les inégalités. (Mêmes mouvements.)
Et que dire de la politique industrielle et commerciale ? Notre industrie est plombée par l’absurde fonctionnement du marché européen de l’électricité. Dans le secteur numérique, l’Union n’applique même pas les modestes règles qu’elle s’est fixées et abandonne toute ambition, de peur de déplaire aux puissants Gamam étasuniens – Google, Apple, Meta, Amazon et Microsoft.
Sur tout le reste, la présidente de la Commission, avec l’aval des chefs d’État, a capitulé en signant avec Trump un deal prévoyant l’achat aux États-Unis de 750 milliards d’euros de produits énergétiques ainsi que l’investissement de 600 milliards d’euros, alors que l’urgence est de réindustrialiser l’Europe. (Mêmes mouvements.)
M. Maxime Laisney
C’est complètement dingue !
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Enfin, quelle crédibilité a cette Europe aux yeux des peuples du monde, quand elle affiche un tel « deux poids, deux mesures » en matière de droit international ? L’UE a été capable de mettre en place dix-neuf trains de sanctions contre la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine, mais elle est incapable de remettre en question l’accord d’association avec Israël, en plein génocide. (Mêmes mouvements.) Je pourrais, hélas, poursuivre longtemps ce réquisitoire.
L’Union européenne a besoin d’argent ? Qu’elle adopte, comme le propose notre groupe au Parlement européen, une taxe Zucman européenne ! Celle-ci pourrait rapporter 67 milliards. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Sourires sur les bancs des groupes EPR et DR.)
M. Charles Sitzenstuhl
C’est vrai, ce ne serait pas idiot !
M. Patrick Hetzel
Ça faisait longtemps !
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
En Europe comme en France, il est plus que temps que le grand nombre cesse de subventionner, par un système fiscal injuste, un capitalisme de rente. En attendant, j’émets un avis défavorable sur l’article 45 du projet de loi de finances (PLF) en l’état. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Pascal Lecamp et M. Jean-Paul Mattei
Vous êtes censé donner l’avis de la commission !
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Pour des gens qui ont accepté le deal avec Trump, vous êtes gonflés !
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.
M. Bruno Fuchs, président de la commission des affaires étrangères
Trois minutes pour évoquer une enveloppe financière de 28,8 milliards d’euros, c’est effectivement très court, mais vingt interventions de trois minutes, cela fait un débat assez long. Le sujet mérite amplement ce débat, car il a une importance budgétaire, politique et citoyenne : les politiques européennes ont des conséquences sur la vie quotidienne de nos concitoyens.
Notre pays, membre fondateur de l’Union européenne, en est le deuxième contributeur, après l’Allemagne et devant l’Italie. Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union reflète la majeure partie de notre effort national pour le budget communautaire.
Tendanciellement, cette contribution française est en progression depuis vingt ans et sa part s’accroît dans les recettes fiscales de l’État. Son montant net a été multiplié par deux en quarante ans, pour atteindre 8,3 % dans le PLF pour 2026. Nous devons y voir une ambition constante et pérenne de notre pays en faveur de la construction européenne et de la consolidation des acquis de l’Union.
Ne nous y trompons pas : contrairement à ce que voudraient faire croire certains discours faciles, qui relèvent d’un populisme un peu simple, la France a beaucoup plus à gagner avec l’UE qu’elle n’a à dépenser pour son financement.
Mme Constance Le Grip
Tout à fait !
M. Bruno Fuchs, président de la commission des affaires étrangères
C’est un investissement particulièrement rentable, qui a de très nombreuses retombées, lesquelles ne sont malheureusement pas mesurables, pour une grande partie d’entre elles.
M. Alexandre Sabatou
C’est dommage !
M. Bruno Fuchs, président de la commission des affaires étrangères
Je le répète donc : les politiques européennes ont des conséquences importantes sur la vie quotidienne de nos concitoyens.
La hausse attendue de la contribution française s’explique par le remboursement du plan de relance européen, l’extinction des rabais consentis auparavant à certains États membres, qui augmente la part contributive de la France, ainsi que l’augmentation structurelle du budget européen et l’évolution du revenu national brut français.
Certains collègues ont déposé des amendements visant à diminuer substantiellement ce prélèvement sur recettes au profit de l’UE. Leur démarche, sous couvert d’interrogations légitimes sur l’efficacité des sommes engagées pour la vie quotidienne des Français, se heurte à des réalités juridiques et diplomatiques – le rapporteur général du budget l’a rappelé.
Être européen n’empêche pas d’être lucide sur les imperfections de l’Union européenne. Toutefois, de nombreux pays souhaitent rejoindre l’Europe – je pense à l’Ukraine ou au Kosovo, dont j’ai rencontré le premier ministre, il y a une quinzaine de jours – : cela confirme bien l’attractivité de l’Europe.
La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 45 du PLF, sans modification du montant inscrit pour le PSR-UE. J’invite donc notre assemblée à voter en cohérence avec cette position. Il importe d’être vigilant et d’apporter la contribution nécessaire pour rendre cette Europe plus proche et plus puissante. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Constance Le Grip, rapporteure d’information de la commission des affaires européennes.
Mme Constance Le Grip
Alors que je m’exprime à mon tour à la tribune de l’Assemblée nationale, en ce 13 novembre 2025, je tiens également à m’incliner devant la mémoire des victimes des attaques terroristes islamistes qui ont ensanglanté notre pays il y a dix ans. J’ai une pensée émue pour leurs proches et pour tous les blessés. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, LFI-NFP, Dem et GDR. – M. le rapporteur spécial Jean-Philippe Tanguy applaudit aussi.)
J’en arrive à l’exercice démocratique qui nous réunit cet après-midi. La contribution française au budget de l’Union européenne, évaluée dans le projet de loi de finances initial à 28,8 milliards d’euros, connaît cette année une hausse de 5,7 milliards d’euros par rapport à l’année dernière. C’est une progression significative,…
M. Pierre Cordier
Trop significative !
Mme Constance Le Grip
…qu’il convient toutefois de remettre en perspective. Elle résulte essentiellement d’un effet de rattrapage dû à l’accélération des dépenses de la politique de cohésion, alors que nous approchons de la fin de la programmation budgétaire du cadre financier pluriannuel.
Elle résulte également de la montée en puissance de nouvelles politiques européennes, que nous soutenons : la solidarité envers l’Ukraine, la réponse commune au défi migratoire et les investissements dans les technologies d’avenir. Alors que les eurosceptiques et les tenants – assumés ou déguisés – du Frexit se focalisent sur le solde net et disent n’importe quoi sur le montant de la contribution française, je souhaite rappeler quelques chiffres.
Le solde net, c’est-à-dire la différence entre ce que nous versons au budget de l’UE et ce que nous en retirons, est descendu à 7,9 milliards d’euros. Il est plus bas que le solde de l’année dernière. Nous sommes désormais le premier bénéficiaire en volume du budget européen.
Nous avons reçu 16,5 milliards d’euros de retours. C’est près de 10 milliards d’euros pour nos agriculteurs : la France est le premier bénéficiaire de la PAC. C’est 4 milliards d’euros pour nos entreprises et nos régions. C’est 1 milliard d’euros pour les transports et les étudiants qui bénéficient du programme Erasmus. C’est 3,4 milliards d’euros pour la recherche et l’innovation ainsi que pour le financement de notre programme spatial.
En plus de cela, que nous recevons directement du budget de l’Union, la France est le premier bénéficiaire du plan de relance NextGenerationEU, qu’au sortir de la pandémie nous avons instauré ensemble : sont fléchés vers notre pays près de 40 milliards d’euros, dont nous avons déjà consommé quelque 85 % au titre de la rénovation des bâtiments, des biotechnologies, de la formation professionnelle. Enfin, nous sommes également les premiers bénéficiaires, pour un montant de 12,6 milliards l’année dernière, des investissements menés dans le cadre de la BEI et du Fonds européen d’investissement (FEI).
Ce sont ces chiffres, ces faits qu’il faut garder à l’esprit lorsque l’on évoque l’appartenance de la France à l’Union européenne ; mais par-delà le débat budgétaire ou comptable, notre appartenance à ce projet de société, à cet espace de paix, de liberté, de démocratie, fonde en retour notre identité – à nous, pays fondateur de l’Union. C’est bien de cela qu’il s’agit. Je vous invite donc à adopter en l’état l’article 45 du PLF pour 2026. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes.
M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes
Alors que nous débattons depuis plus de trois semaines du budget de la France, nous abordons enfin sa dimension européenne à travers le versement d’une contribution française plus importante que jamais. Plus importante que jamais, car face à la multiplication des menaces, au décrochage de nos économies par rapport à celles des États-Unis et de la Chine, au durcissement des relations commerciales, aux défis géopolitiques, à la guerre sur notre continent, le budget européen constitue plus que jamais un levier de puissance et de souveraineté indispensable. Pourtant, après avoir écouté certains des précédents orateurs, ceux qui suivent la séance de cet après-midi pourraient avoir le sentiment que nous versons notre contribution à une entité abstraite et en quelque sorte dans le vide, que l’argent de la France serait perdu ou dilapidé.
M. Emeric Salmon
Oui !
M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes
Disons-le, à cette tribune, très clairement : rien n’est plus faux. Cette contribution est au contraire la condition de notre influence. Elle garantit un soutien à nos agriculteurs, elle nourrit le développement de notre défense européenne, de notre industrie, de notre innovation, en somme de tout ce qui fait l’indépendance de la France, celle de ses voisins, face aux grands empires désireux d’une seule chose : soumettre notre pays et ses partenaires européens. C’est pourquoi, étant donné l’importance du moment que nous vivons, notre contribution au budget européen doit être défendue avec la plus grande détermination – comme vous l’avez fait, monsieur le ministre –, préservée parce qu’elle nous protège, nous permet de réduire nos dépendances, nous rapporte beaucoup plus que les petits calculs comptables qui nous ont parfois été présentés.
Monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, vous jouez normalement un rôle important dans le débat budgétaire ; or vous avez fait le choix de dénigrer, de remettre en cause la contribution française. Si ce que vous souhaitez se produisait, nous en paierions très concrètement les conséquences. Abaisser artificiellement l’évaluation de notre contribution, loin du montant que nous devrons verser en réalité, serait truquer les grands équilibres du PLF, avec des recettes mensongères. (Murmures sur quelques bancs du groupe RN.) Refuser de la verser cette année serait contrevenir à nos engagements européens et prendre le risque que nos agriculteurs, nos régions, nos entreprises ne puissent percevoir les fonds européens auxquels ils ont droit. (Mêmes mouvements.) Ne plus la verser serait exposer la France et les Français au mieux à des sanctions, au pire à la sortie de l’Union, n’en déplaise à ceux qui prétendent désormais l’inverse. (Mêmes mouvements.) Nous devrions être fiers de contribuer à cette Europe qui nous protège, qui reste notre meilleure alliée dans ce monde brutal et de plus en plus inquiétant. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
Nous en venons aux porte-parole des groupes.
La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.
Mme Cyrielle Chatelain (EcoS)
Nous débattons – puis nous voterons – au sujet de la contribution de la France à l’Union européenne, contribution qui devrait connaître l’an prochain une forte augmentation par rapport à 2025. Alors que nous traversons une crise budgétaire, que le gouvernement a décidé de sacrifier de nombreux postes de dépenses, toute hausse mérite d’être étudiée.
Première question : pourquoi cette hausse ? Pour la bonne raison que les besoins collectifs des Européens, des Français, ont augmenté. Il s’agit tout d’abord de financer la surcharge d’intérêts liée au plan de relance européen post-covid, plan dont auront bénéficié nos entreprises ou encore la transition écologique, la France recevant en tout 40 milliards d’euros. Ensuite, face à l’agression russe, le soutien de l’Union européenne à l’Ukraine doit demeurer ferme et constant.
Mme Constance Le Grip
Tout à fait !
Mme Cyrielle Chatelain
Enfin, il faut bien financer la politique anti-immigration d’une Europe forteresse. L’obsession du Rassemblement national et de ses collègues européens d’extrême droite coûte cher (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN) :…
Un député du groupe RN
Si nous n’étions pas là, qu’est-ce que vous feriez dans la vie ?
Mme Cyrielle Chatelain
…cet argent serait mieux utilisé en vue d’une véritable politique d’accueil, mais voilà, telle est l’une des destinations de la contribution française.
Deuxième question : la France bénéficie-t-elle du soutien de l’Europe ? La réponse est oui : 140 000 étudiants y ont bénéficié d’une bourse Erasmus, 260 000 agriculteurs des aides du premier pilier de la PAC et de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), plus de 1000 projets de recherche ont été soutenus. Ajoutons-y les missions locales, associations d’aide alimentaire ou encore projets d’infrastructures de nos collectivités territoriales financés par des fonds européens.
Dernière question : la France peut-elle se passer de l’Union européenne ? La réponse est non. Alors que les empires se reconstruisent, que les tensions internationales montent, il serait illusoire de penser que nous pourrions assurer seuls notre sécurité. De même, la lutte contre le réchauffement climatique ne saurait être pleinement possible que si la France entraîne l’Europe avec elle ; je regrette d’autant plus que notre pays ait fortement contribué à fragiliser les nouveaux objectifs de l’Union européenne en termes de réduction des émissions.
Que cela soit clair, le fait de voter pour cette contribution de la France à l’Union européenne ne constitue pas une validation de la politique de cette dernière – des régressions environnementales, du repli sur soi, d’une politique libérale, de l’inaction à Gaza, de la signature du traité avec le Mercosur. Ces reculs, nous les dénonçons ; il nous faut aussi reconnaître qu’ils reflètent ce que nous vivons dans nos pays, y compris le nôtre. Pour transformer l’Europe, il faudra d’abord changer l’orientation politique de la France. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Nous voterons en faveur de la contribution parce que nous en avons besoin, parce que nous continuons de nous battre pour une Europe de la paix, une Europe solidaire, une Europe écologique, une Europe qui, face à l’internationale fasciste en construction (Rires et exclamations sur les bancs du groupe RN), sache prendre la tête…
Un député du groupe RN
Avec 5 % des voix aux élections européennes ?
Mme Cyrielle Chatelain
…d’une internationale humaniste. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sabine Thillaye.
Mme Sabine Thillaye (Dem)
Chaque année, le débat concernant le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne constitue l’un des trop rares moments, monsieur le ministre, où les questions européennes sont évoquées dans cet hémicycle. En 2026, cela a été dit et redit, il est prévu que la contribution française augmente ; il a également été rappelé que cette hausse n’est pas une dérive, mais le résultat d’un rattrapage normal – autrement dit, nous payons parce que l’Union européenne agit.
M. Emeric Salmon
Ah bon ?
Mme Sabine Thillaye (Dem)
Nous changeons de monde : une puissance nucléaire a attaqué son voisin européen, le terrorisme – le jour est propice à un tel rappel, hélas – continue de nous menacer, notre sécurité économique est fragilisée par les géants mondiaux,…
M. Matthias Tavel
Faudrait le dire à Thierry Breton !
Mme Sabine Thillaye
…nos chaînes d’approvisionnement peuvent être coupées du jour au lendemain. L’Union n’est pas un luxe, c’est une assurance ; aucune nation européenne ne pourrait affronter seule ces bouleversements. J’entends ceux qui disent que nous payons trop à Bruxelles : ce discours constitue l’arme de ceux qui confondent dépense et investissement. À ceux qui réclament de payer moins, je pose une autre question : payer moins et renoncer à quoi ? Aux aides agricoles qui soutiennent nos territoires, qui garantissent le revenu de 260 000 exploitations ? Aux financements pour nos entreprises innovantes ? À la protection du marché unique, qui fait vivre nos échanges commerciaux ?
Investir ensemble est la seule manière de soutenir durablement notre sécurité, notre compétitivité, notre modèle européen. Il est vrai, cependant, que certains États conservent des rabais hérités d’un autre temps ; peut-être le moment est-il venu de corriger ces injustices, de doter l’Union de ressources propres véritables, afin que son budget repose moins sur les contributions nationales. La vraie question n’est pas combien cela nous coûte, mais : voulons-nous encore décider du monde dans lequel nous vivons ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.)
Si la France veut continuer à peser sur la scène mondiale, elle ne doit pas le faire par seulement 68 millions de citoyens, mais par 450 millions. L’Union n’est pas une dépense, c’est une puissance collective ; c’est dans cette Europe forte, démocratique, unie, que la France reste maîtresse de son destin. Certes, l’Union européenne n’est pas parfaite ;…
M. Emeric Salmon
Ça, c’est le moins que l’on puisse dire !
Mme Sabine Thillaye
…aucune construction humaine ne saurait l’être. Elle n’en oppose pas moins la force du droit à la loi du plus fort. Le groupe Démocrate votera en faveur de ce prélèvement, qui est bien plus qu’une ligne budgétaire : notre meilleure garantie de liberté, de sécurité, de puissance dans un monde de rivalités. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Michel Barnier applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Isabelle Rauch.
Mme Isabelle Rauch (HOR)
L’article du PLF pour 2026 dont nous nous apprêtons à débattre n’est pas une simple disposition budgétaire : il dit quelque chose de la vision que nous avons de l’Europe et de la place que la France veut y tenir.
Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, évalué à 28,8 milliards d’euros, constitue la contribution de notre pays au budget commun. Ce montant, en hausse par rapport à 2025, doit être considéré comme l’expression de l’engagement assumé d’une nation qui croit en la valeur de la coopération européenne. Cette progression s’explique d’abord par le fait que le CFP pour 2021-2027 touche à sa fin, ce qui entraîne comme toujours un pic de paiements visant à solder les programmes engagés. Elle résulte aussi du rattrapage des retards provoqués par la crise du covid-19 dans la mobilisation des fonds européens. Enfin, elle traduit des choix politiques : le plan de relance européen, la solidarité envers l’Ukraine, la réponse commune aux défis migratoires et énergétiques.
En d’autres termes, cette hausse est à la mesure de notre courage, de notre solidarité. Être Européen, ce n’est pas attendre des dividendes ; c’est prendre sa part de responsabilité dans la stabilité, la prospérité et la sécurité du continent. Loin d’un statut de simple payeur, la France reste en outre le deuxième bénéficiaire du budget européen : près de 16 milliards d’euros chaque année, dont 9,5 milliards pour la PAC, 3,5 milliards pour la cohésion, des enveloppes substantielles pour la recherche, l’innovation, l’espace, la jeunesse et la défense. Notre pays bénéficie aussi du plan de relance européen, avec 34 milliards d’euros déjà versés, et capte 20 % des financements du Fonds européen de la défense (FED).
Le budget européen – à peine 1 % du PIB cumulé des États membres – constitue ainsi un levier incomparable pour financer ce qu’aucun État ne pourrait porter seul : la transition énergétique, la sécurité, la recherche, la mobilité des jeunes, l’autonomie industrielle. Dans un monde fracturé, l’Union, forte de ses 450 millions de citoyens, demeure un multiplicateur de puissance et de stabilité. En adoptant l’article 45, nous affirmerons que l’Europe n’est pas une charge supplémentaire, mais un choix souverain et stratégique ; c’est pourquoi le groupe Horizons & indépendants votera avec conviction en faveur de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Michel Castellani.
M. Michel Castellani (LIOT)
Le groupe LIOT souhaite affirmer une nouvelle fois son attachement à la construction européenne, pour une Europe de la responsabilité budgétaire, de la solidarité, de la reconnaissance des peuples et régions. Le débat annuel au sujet du concours financier est important par les questions structurelles qu’il pose, mais aussi en raison des sommes en jeu, la France, on le sait, étant traditionnellement le deuxième contributeur – et le vingt-deuxième bénéficiaire en termes de retour par habitant, tout en figurant dans l’absolu parmi les principaux bénéficiaires de fonds européens, lesquels soutiennent nos entreprises, nos agriculteurs, nos collectivités.
Partout, l’Europe agit sur le terrain, même si elle reste trop souvent invisible. La PAC demeure indispensable, car garantissant souveraineté alimentaire et maintien d’une agriculture vivante sur tout le continent ; elle doit néanmoins être simplifiée et rendue plus équitable, notamment en faveur des petits exploitants, souvent découragés par la complexité des démarches.
De même, la politique de cohésion incarne l’Europe des solidarités, mais son accès reste trop compliqué. Nous devons faire confiance aux régions et leur confier davantage la gestion de ces fonds.
Le plan de relance européen a marqué une étape historique. Pour la première fois, les États membres ont accepté une dette commune. La France a perçu près de 40 milliards d’euros. Cette réussite prouve que l’Europe fonctionne quand elle est simple, lisible et concrète.
Dès 2028, l’Union devra commencer à rembourser ces emprunts. Il faut donc lui donner de nouvelles ressources propres : une part du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, les ressources issues du pilier 1 de l’accord de l’OCDE sur la taxation des multinationales et une ressource temporaire sur l’excédent brut d’exploitation.
Par ailleurs, des chantiers importants sont ouverts. En cette période de tensions, de menaces et de guerre, on ne peut que regretter l’absence d’industrie de défense européenne unifiée. L’Europe nous a protégés des conflits qui ont fait notre malheur des siècles durant – on a tendance à l’oublier.
Il nous faut affirmer une volonté de rattrapage de certains retards technologiques. L’Europe ne pourra résister à la féroce compétition mondiale que par des progrès continus en matière d’innovation et de productivité.
Les écarts de développement au niveau social, à l’intérieur même de l’Union, en font pour l’instant un ensemble disparate. La compétition intérieure par la politique de désescalade sociale et fiscale constitue une entorse à ce que devrait être l’esprit même de l’Union.
En toute hypothèse, il est impératif de s’orienter vers une construction européenne plus ouverte aux réalités citoyennes, aux cultures, aux conditions sociales, et vers une approche moins technocratique que celle que nous connaissions aujourd’hui. J’ai déjà eu l’occasion de l’affirmer à bien des reprises.
Les membres du groupe LIOT sont résolument proeuropéens. Nous croyons en une Europe forte, capable d’agir face aux grands défis de notre époque, en une Europe solidaire, porteuse de cohésion et de solutions pour ses citoyens. C’est dans cet esprit que nous voterons en faveur de ce prélèvement sur recettes. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LIOT, EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Maurel.
M. Emmanuel Maurel (GDR)
En écoutant les collègues, j’en viens à me demander s’il est possible d’exprimer des doutes ou des critiques sur les questions européennes sans être immédiatement et paresseusement renvoyé au populisme, à l’euroscepticisme, à l’europhobie ou à l’extrémisme. Il me semble pourtant que cela devrait être possible.
Celles et ceux qui, comme nous, entretiennent un rapport avec l’Europe qu’on pourrait qualifier de laïque, c’est-à-dire vigilant, lucide et rationnel, sont en droit de poser des questions, y compris au sujet la contribution de la France au budget de l’Union européenne. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR et RN.)
M. Nicolas Sansu
Tout à fait !
M. Emmanuel Maurel
Pourquoi ? Parce que 30 milliards, ce n’est pas une paille ! C’est trois fois le budget de la justice. C’est surtout la seule mission qui augmente à ce point dans le budget de la France que vous nous proposez, madame la ministre. C’est donc normal qu’on pose des questions.
Certes, on nous oppose de nombreux arguments : les rattrapages, la contribution à l’aide à l’Ukraine, la gestion migratoire, les investissements technologiques… Mais pourquoi ce qui est appliqué à la France n’est-il pas appliqué aux autres ? D’autres pays bénéficient continuellement de ce qu’on appelle des rabais ou des réductions forfaitaires. C’est le cas de l’Autriche, de l’Allemagne, du Danemark, des Pays-Bas, de la Suède.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Eh oui !
M. Emmanuel Maurel
Ils ont droit à un rabais ; pas nous. Est-ce que la France négocie mal ? Je le crois.
Ensuite, pourquoi n’aurait-on pas droit au moins à une contrepartie ? Je rappelle que la contribution de la France à l’Union européenne n’est pas soustraite du déficit public. De plus, la politique de resserrement monétaire de la Banque centrale européenne creuse encore davantage le déficit. Cela interroge.
La première des questions, je vous l’ai dit, est de savoir si l’augmentation est légitime. Je ne le crois pas, et je le crois d’autant moins quand je vois que les priorités de la France sont clairement sacrifiées dans les négociations en cours pour le budget européen pour 2028 à 2034. Je pense notamment à la politique agricole commune, pour laquelle une baisse de 100 milliards d’euros est prévue dans les six années à venir. Je pense aussi à la politique commerciale : les agriculteurs et les industriels français devront subir à la fois l’accord avec le Mercosur et l’accord entre M. Trump et Mme von der Leyen. Ce sont quand même des questions que nous sommes en droit de poser.
Avant de conclure, je veux aborder un dernier point. Il y a ici des élus ultramarins. Dans le prochain budget de l’Union européenne, les régions ultrapériphériques (RUP) sont incroyablement sacrifiées,…
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Eh oui !
M. Emmanuel Maurel
…dans un contexte où il faudrait au contraire les soutenir vaillamment.
La France fait sa part, mais elle ne peut pas faire plus que sa part. C’est la raison pour laquelle nous sommes un certain nombre, en tout cas dans notre groupe, à être extrêmement critiques par rapport à la proposition de l’article 45. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – M. le rapporteur spécial Jean-Philippe Tanguy applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Maxime Michelet.
M. Maxime Michelet (UDR)
Le rideau se lève cet après-midi sur le théâtre annuel du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne. Les mêmes acteurs, la même scène, les mêmes dialogues ; chaque année, le petit théâtre européen s’invite à l’Assemblée.
Théâtre parlementaire, d’abord, d’une représentation nationale à laquelle on demande non pas de délibérer mais de consentir, comme au temps des parlements d’Ancien Régime.
Théâtre politique, ensuite, d’une contribution nette que d’aucuns sur ces bancs nous présentent comme la seule et unique mesure de notre engagement européen.
Théâtre démagogique, enfin, où se répète à l’infini l’accusation insensée selon laquelle diminuer notre contribution nette reviendrait à sortir de l’Europe. L’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, l’Autriche et la Suède ont demandé et obtenu des rabais ; ils ne sont pas sortis de l’Union.
En 2026, la contribution de la France au budget de l’Europe s’élèvera donc à 28,8 milliards d’euros, en hausse de 5,7 milliards.
Contributeur net, notre pays donnera de nouveau beaucoup plus qu’il ne perçoit, une tendance promise à se poursuivre, alors que la France a d’ores et déjà donné 150 milliards de plus que ce qu’elle a perçu durant le quart de siècle écoulé.
Le concert unanime des européistes acharnés nous dira, une fois encore, que réduire notre contribution reviendrait à condamner tous les secteurs supposément soutenus par l’argent européen.
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
C’est le cas !
M. Maxime Michelet
C’est un argument malhonnête. La France étant contributrice nette, l’argent européen n’est jamais que l’argent français distribué par l’Europe.
Puisque vous évoquez toujours les gains incalculables et insoupçonnés des politiques européennes, pourquoi ne pas mesurer également les pertes que ces politiques ont infligées à notre économie, à notre industrie ou à notre agriculture ? Pourquoi la France serait-elle condamnée à financer des politiques qui nuisent à ses propres intérêts ?
Je connais votre réponse : nous sommes tenus par les traités auxquels nous avons consenti.
Mme Marie-Christine Dalloz
Eh oui, c’est comme ça que ça marche !
M. Jean-Yves Bony
Il faut tenir ses engagements !
M. Maxime Michelet
Mais qui a consenti aux traités ? L’Europe de Mme von der Leyen, c’est l’Europe de Lisbonne, une Europe à laquelle le peuple français avait souverainement dit non en 2005 et à laquelle on a finalement dit oui, en son nom mais malgré lui.
Les européistes pariaient sur l’oubli ; selon eux, le peuple s’était trompé, il finirait par l’admettre et la trahison s’effacerait. Vingt ans plus tard, la trahison de 2005 n’est ni effacée ni oubliée. Au contraire, les trahisons des intérêts français s’accumulent.
Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le peuple français a d’ailleurs été consulté par trois fois sur les questions européennes : en 2014, en 2019 et en 2024. Par trois fois, il a réitéré le non de 2005, ce non à l’Europe des technocrates, en plaçant les listes de nos amis et alliés du Rassemblement national en tête de chaque élection européenne. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN.)
C’est donc dans la fidélité au choix souverain réitéré du peuple français que l’Union des droites pour la République votera en faveur de la baisse de la part excédentaire de notre contribution au budget de l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Sabatou.
M. Alexandre Sabatou (RN)
Comme la dette macroniste, la contribution française à l’Union européenne enfle chaque année un peu plus.
Rapporteur à l’époque, je déplorais les 22,3 milliards d’euros prélevés sur notre budget en 2024. Mais aujourd’hui, c’est pire : 28,8 milliards prévus en 2026 et 31,2 milliards en 2027. Le projet du nouveau cadre financier pluriannuel n’a visiblement pas prévu d’inverser la tendance, puisqu’il prévoit au contraire de porter la contribution française à 37 milliards.
Alors qu’on demande aux Français de faire des efforts – gel des pensions de retraite, gel du barème de l’impôt sur le revenu –, on verse sans compter dans le puits sans fond de Bruxelles. Mais où va tout cet argent ?
M. Erwan Balanant
Aux territoires ! Aux PME du pays !
M. Alexandre Sabatou
Un grand projet de parc nucléaire est-il prévu pour ne plus dépendre du gaz russe ? Une stratégie industrielle commune est-elle prévue pour produire des semi-conducteurs européens et devenir une véritable puissance de l’intelligence artificielle ? Non. Cet argent sert à augmenter les salaires déjà mirobolants des fonctionnaires de Bruxelles.
Depuis 2022, leurs rémunérations ont augmenté de 26 %, quand nos fonctionnaires nationaux n’ont vu la valeur du point d’indice augmenter que de 5 % sur la même période. C’est cinq fois moins que leurs homologues européens.
Rien ne justifie que les fonctionnaires européens soient mieux rémunérés et mieux indexés que nos agents publics. L’Europe n’a pas vocation à être le paradis fiscal de sa propre administration.
Il existe bien d’autres pistes d’économies sur le budget européen : 16,3 milliards d’euros sur la diplomatie, qui n’est pas une compétence européenne ; 1,5 milliard sur la défense, qui n’est pas une compétence européenne…
M. Charles Sitzenstuhl
C’est faux, c’est dans les traités ! Vous racontez n’importe quoi !
M. Alexandre Sabatou
… ; 15,8 milliards sur le pacte vert, dont le montant total vient d’ailleurs d’être revu à la baisse grâce à une majorité de patriotes sincères au Parlement européen ; 1,5 milliard pour payer le rabais des voisins.
Nous pourrions ainsi réaliser jusqu’à 88 milliards d’économies sur le budget de l’UE, soit potentiellement 16 milliards pour la part française.
Abordons ce tabou, chers collègues. Baissons la contribution française à l’Union européenne.
Que d’éloges sont faits à propos des pays du nord de l’Europe et de leur sérieux budgétaire. Devinez quoi ? Ils bénéficient tous d’un rabais ! Assez d’angélisme. Après avoir payé leur rabais pendant des années, réclamons enfin le nôtre pour soulager les Français qui travaillent !
Nous demandons, au Rassemblement national, une baisse de 8,7 milliards sur le PSR-UE pour retrouver un niveau de contribution nette française plus raisonnable.
Comme l’a dit le rapporteur, Mme la ministre a réussi à obtenir une réduction de 1,6 milliard d’euros cet été ; c’est donc bien possible. Le demander ne fait pas de nous des frexiters. Cessez vos caricatures, cessez votre angélisme, et ayons enfin ce débat ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl (EPR)
Le groupe Ensemble pour la République soutiendra bien sûr l’article 45 relatif au prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne et appelle tous les proeuropéens de droite, de gauche et du centre à le voter.
L’Union européenne est une chance et une protection pour la France. La construction européenne est une histoire française. N’en déplaise aux antieuropéens de cet hémicycle, c’est désormais un chapitre majeur de l’histoire de France.
Qui peut croire que la France seule, repliée sur son territoire national, serait plus forte au XXIe siècle ? Qui peut croire que nous serions plus forts face aux États-Unis, à la Chine ou à la Russie sans nos partenaires européens ?
Je note la faiblesse des arguments des rapporteurs du RN et de la France insoumise, qui nous ont une fois de plus accablés de leurs fantasmes délirants, de leur rhétorique frisant le complotisme, arguant que l’Union européenne prendrait l’argent des Français ou cacherait des choses à nos concitoyens.
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Soyez précis, soyez concret !
M. Charles Sitzenstuhl
Tout cela est faux. Ce sont des foutaises, un tissu de mensonges.
Mais il ne faut pas être surpris, chers collègues. Ces propos viennent de ceux qui, notamment au RN, soutenaient Vladimir Poutine il y a quelques années encore.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Oh là là… Tu ne te fatigues pas !
M. Charles Sitzenstuhl
Ils se sont trompés sur tout. Eh oui, monsieur Tanguy, vous vous êtes trompés sur tout : sur le marché unique, sur l’élargissement, sur l’euro.
La vérité, c’est que ceux qui veulent réduire la contribution française à l’Union européenne par la voie d’amendements sont des frexiters cachés, des frexiters en puissance.
C’est la voie funeste empruntée par les États-Unis…
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Ah oui, les États-Unis ont fait le Brexit, c’est bien connu !
M. Charles Sitzenstuhl
…– je voulais dire le Royaume-Uni, pardon –, depuis Margaret Thatcher jusqu’au référendum idiot demandé par M. Cameron avec le résultat qu’on connaît : le Brexit.
Les antieuropéens jouent contre les intérêts de la France. Réduire la contribution française, c’est nous affaiblir à Bruxelles, à Strasbourg et à Luxembourg. C’est priver nos agriculteurs des aides précieuses de la politique agricole commune. (Mme Marine Le Pen s’exclame.) C’est empêcher des dizaines de milliers d’étudiants français de participer au programme Erasmus. C’est baisser les fonds pour la recherche qui bénéficient à tant de laboratoires et d’entreprises.
C’est aussi affaiblir la place du Parlement européen – vous y avez siégé, madame Le Pen – à Strasbourg – étant député alsacien, je tiens à le rappeler. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
L’Union européenne rapporte bien plus à la France que ce que montrent les simples calculs comptables : un marché unique de 450 millions de personnes, une monnaie unique – l’euro –, qui est stable et nous protège pendant les crises, une liberté de circulation entre vingt-sept États – un projet jamais vu dans l’histoire de l’humanité –, une protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Ce sera demain, je l’espère – j’en suis persuadé – une union de défense qui nous protégera face aux dangers du monde.
Il faut voter cette contribution. Le groupe EPR, présidé par Gabriel Attal, la votera sans états d’âme et avec conviction. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel.
M. Matthias Tavel (LFI-NFP)
Il y a vingt ans, le 29 mai 2005, le peuple français votait massivement contre le traité constitutionnel européen, avant de voir son vote piétiné par Nicolas Sarkozy. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR.) Il y a treize ans, le traité budgétaire européen n’était pas renégocié, contrairement aux promesses de François Hollande. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Les Français continuent de payer la facture toujours plus élevée d’une Union européenne qui se fait sans eux et souvent contre eux. Le groupe La France insoumise n’est pas opposé par principe à une juste contribution dans un projet de communauté européenne, mais encore faut-il que la France soit entendue et respectée, et que cette communauté serve le progrès social, l’investissement écologique et la coopération plutôt que la concurrence. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR.)
Aujourd’hui, l’usage de notre contribution n’est pas à la hauteur des urgences sociales, écologiques, industrielles, agricoles, et l’attitude de la Commission européenne contre notre pays est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Elle nourrit les nationalismes, car le musée des horreurs européen est aussi garni que le budget de M. Lecornu !
La liste est interminable : accords de libre-échange à gogo comme avec le Mercosur, soumission commerciale et militaire à Donald Trump et aux États-Unis, privatisation des services publics comme l’énergie, le train, la poste, les barrages hydroélectriques, explosion des prix de l’électricité à cause du marché européen, délocalisation et dumping social à tous les étages, que l’UE veut encore aggraver avec la création d’un vingt-huitième État fictif pour tirer tout le monde vers le bas (Mêmes mouvements), complaisance avec les paradis fiscaux au sein même de l’Union européenne, menaces de la Commission sur les retraites des Français et appels à toujours plus de coupes budgétaires, absence de sanctions contre la guerre génocidaire à Gaza, et cetera, et cetera, et cetera. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Chers collègues, nous devons aussi nous poser cette question : quand les intérêts des Français sont-ils défendus par nos propres compatriotes qui en ont la charge ?
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Eh oui !
M. Matthias Tavel
Comme toujours, M. Macron préfère s’aligner sur Mme von der Leyen pour servir le capital plutôt que le travail. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et GDR.) Et quand il faut choisir entre son pays et l’Union européenne – cela arrive parfois –, Mme von der Leyen fait le choix de l’Allemagne, tandis que les Français à Bruxelles, comme M. Séjourné, ou à Francfort, comme Mme Lagarde, jouent systématiquement l’Union européenne contre la France.
La contribution de la France au budget européen pour l’année prochaine est évaluée à près de 29 milliards d’euros. Elle augmente de 5,7 milliards – autant que ce que vous voulez prendre aux Français avec l’année blanche sur les retraites, les minima sociaux et le point d’indice des fonctionnaires. (Mêmes mouvements.)
La France est le deuxième pays qui contribue le plus à l’Union européenne : près de 12 milliards l’année prochaine. Elle est le dindon d’une mauvaise farce euro-libérale. Vous nous présentez cette contribution comme un investissement. Pourtant, dans n’importe quelle entreprise, quand un investissement coûte aussi cher et rapporte aussi peu, cela conduit à tout le moins à s’interroger et à le remettre en cause ! Nous proposons de conditionner cette contribution ; à défaut, nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe GDR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marietta Karamanli.
Mme Marietta Karamanli (SOC)
La contribution de notre pays au financement du budget européen se traduit par un prélèvement sur recettes évalué à 28,8 milliards d’euros pour 2026, soit une hausse de 25 % par rapport à 2025. Cette hausse s’explique par la montée en puissance du cadre financier pluriannuel 2021-2027, par l’absence d’accord sur de nouvelles ressources propres pour financer le plan de relance européen NextGenerationEU et par la fin des rabais ou réductions temporaires.
Chers collègues, il convient d’éviter une simple lecture comptable du solde net et de valoriser les bénéfices stratégiques et économiques de l’appartenance à l’UE. La hausse du prélèvement est soutenue ; l’ensemble des collègues du groupe Socialistes et apparentés la jugent nécessaire.
Mme Constance Le Grip
Très bien !
Mme Marietta Karamanli
Cela dit, je souhaite insister sur deux points. D’abord, nous devons être attentifs à la transparence et à l’efficacité de la dépense européenne. La commission des affaires européennes a eu l’occasion d’évoquer au cours de ses récents travaux plusieurs des politiques et programmes européens – je pense au programme de recherche et d’innovation Horizon Europe ou à la politique de cohésion. Quant à l’efficacité, les retards de décaissement du plan de relance européen et la lenteur de certains programmes doivent être notés.
Madame la ministre, monsieur le ministre, le gouvernement français doit s’assurer d’une amélioration des taux de retour des fonds européens par la simplification administrative et un meilleur accompagnement des porteurs de projets. Cette approche gagnerait également à inclure une vision de moyen terme. En effet, il faut avoir à l’esprit la période post-2028 – le remboursement du plan NextGenerationEU débutera à ce moment-là. Nos observations recoupent celles des collègues d’autres groupes, mais ne justifient ni abstention ni rejet.
Ensuite, si la capacité française à mobiliser les fonds européens doit être renforcée, elle suppose aussi une forte capacité de l’Union européenne à mobiliser de nouvelles ressources propres. Nous devons aborder le sujet hautement sensible des hypothèses et des scénarios de la création de nouvelles ressources propres européennes, comme la taxe carbone aux frontières et la taxe due par les entreprises du numérique.
La taxation des très grandes fortunes et entreprises au niveau européen ne peut plus être retardée. Aucune grande entreprise, aucune personne très riche au monde ne devrait échapper à une contribution minimale capable de financer une partie de la transition énergétique. Les études montrent que l’on a un problème de régressivité de l’impôt au sommet de la distribution des revenus.
Le groupe des députés Socialistes et apparentés soutient le prélèvement européen et réaffirme la nécessité de concilier rigueur par la transparence et volonté par la justice fiscale, en vue de rendre les financements plus pérennes, mais aussi plus justes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR)
Le financement de la France au profit de l’Union européenne mérite une attention particulière. Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit, dans son article 45, le prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne. Cette contribution s’insère dans le cadre financier pluriannuel, qui définit les plafonds annuels de dépenses. Ainsi, le montant de la contribution de la France au budget de l’Union européenne enregistre une augmentation de 5,7 milliards d’euros par rapport à celui voté en loi de finances initiale pour l’année 2025, pour atteindre 28,8 milliards en 2026.
Cette hausse s’explique d’abord par un cycle classique d’augmentation du niveau des paiements sur la fin du cadre financier pluriannuel – nous arrivons à la fin de la programmation 2021-2027 –, ensuite par l’adoption de mesures nouvelles, qui n’avaient pas pu être pleinement anticipées au moment des négociations initiales et qui avaient été entérinées lors de la révision du cadre financier de février 2024 – le plan de relance européen et la continuité du soutien à l’Ukraine, notamment.
Compte tenu d’un contexte économique et géopolitique instable, l’Union européenne doit se doter d’une capacité budgétaire, ce qui implique un relèvement du plafond de ses ressources propres à la hauteur des enjeux auxquels elle doit répondre. La Droite républicaine soutient le projet européen pour mener des politiques publiques fortes et ambitieuses et maintenir la stabilité politique, sanitaire et alimentaire sur notre continent.
La France reste le second contributeur de l’Union et bénéficie à ce titre d’un retour de recettes issues du CFP qui atteint en moyenne 16,4 milliards par an, ce qui est l’enveloppe la plus importante – nous sommes juste devant la Pologne.
Cependant, ce soutien ne nous exonère pas de critiques. L’Europe doit aujourd’hui évoluer dans plusieurs domaines : la multiplicité des réglementations qui asphyxient notre économie, la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles qui sont un frein à notre compétitivité, et un durcissement des règles en matière migratoire – la liste n’est bien sûr pas exhaustive.
Par ailleurs, l’Union européenne doit se montrer plus forte et plus protectrice face aux surtaxes douanières américaines. Quant au Mercosur, les agriculteurs français, confrontés à des difficultés économiques et sanitaires sans précédent, attendent encore des engagements clairs et fermes avant que ne soit engagé le processus de ratification. Enfin, la Droite républicaine reste résolument opposée à l’intégration de nouveaux États membres pour des raisons budgétaires évidentes.
M. Pierre Cordier
Avec Macron qui change d’avis tous les trois jours !
Mme Marie-Christine Dalloz
Nos esprits sont européens, mais notre soutien est plus exigeant que jamais. Nous voterons l’ensemble de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Je dois regarder les notes que j’ai prises, car j’avoue avoir un peu de mal à distinguer les arguments du Rassemblement national et ceux de la France insoumise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Monsieur le rapporteur spécial Tanguy, vous avez utilisé le terme « mensonge d’État ». Vous y allez un peu fort : ce n’est pas parce que vous n’avez rien compris que c’est un mensonge d’État ! (« Ah » sur les bancs du groupe RN.)
Selon vous, 500 milliards d’euros de fonds n’ont pas été décaissés par l’Union européenne. Soyons clairs : les fonds du plan de relance ou les fonds du budget européen qui n’auraient pas été décaissés donnent lieu à une compensation, soit sous la forme d’un remboursement moins important de la part des États membres – c’est le cas du plan de relance NextGenerationEU, le plan de relance covid –, soit par le fait que la Commission européenne n’appelle pas les fonds lors du prélèvement sur recettes.
C’est précisément pour cela que nous avons un ressaut cette année : c’est le retard de décaissement sur les fonds de cohésion qui explique l’augmentation. Cependant, au cours des années précédentes, le non-décaissement des fonds de cohésion a donné lieu à un prélèvement sur recettes moins important – de plusieurs milliards.
Ensuite, vous avez évoqué le rabais. Soyons clairs, la négociation menée par la ministre de l’action et des comptes publics et moi-même pour réduire la hausse des dépenses de la Commission européenne a en effet entraîné une hausse du prélèvement sur recettes moins importante que prévu cette année. Toutefois, il s’agit d’une négociation collective, pas d’un rabais bilatéral entre la France et l’Union européenne.
Vous demandez un rabais : ce sont des choses qui se négocient au moment du cadre financier pluriannuel, pas d’année en année. La négociation que nous avons menée cette année visait à faire en sorte que la Commission européenne maîtrise ses augmentations de dépenses, pour que les vingt-sept États membres – les vingt-sept – puissent voir leurs prélèvements sur recettes contenus. C’est ce que nous avons obtenu, pas par des foucades, pas par des coups de menton, mais par la négociation – la diplomatie – avec nos partenaires européens.
Monsieur le président Coquerel, vous avez mentionné vous aussi les rabais. Je ne peux pas vous laisser dire que l’Allemagne bénéficierait de rabais et que la France ne bénéficierait de rien. Nous sommes le premier bénéficiaire du budget européen, du plan de relance et des investissements de la Banque européenne d’investissement sur notre territoire, et le premier bénéficiaire de la PAC. Tous ces fonds vont à nos agriculteurs, nos entreprises, nos chercheurs, nos étudiants – dans le cadre du programme Erasmus – et nos régions, qui bénéficient de la politique de cohésion.
L’Allemagne paie 38 milliards d’euros de prélèvement sur recettes – contre 28,8 milliards pour la France – et présente un solde net – après rabais – de 19 milliards. Je le répète, la France est le premier bénéficiaire. Vous pouvez parler de rabais : vous êtes dans la continuité de vos illustres prédécesseurs, Margaret Thatcher et Boris Johnson, sur ce sujet,…
M. Jean-Philippe Tanguy
Merci !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
…monsieur Coquerel. C’est la pente glissante vers le Frexit – la sortie de l’Union européenne, il faut le dire clairement.
M. Nicolas Sansu
Caricature !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Monsieur le député Maurel, il est bien sûr possible de questionner la politique européenne et nous le faisons quotidiennement. Prenons l’exemple du cadre financier pluriannuel. Nous avons été extrêmement clairs, avec ma collègue Annie Genevard et le premier ministre, pour dire que la copie présentée par la Commission européenne sur la politique agricole commune était inacceptable.
M. Maxime Laisney
Ils doivent avoir très peur !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Nous allons donc nous battre pour préserver ce qui fait la spécificité de la PAC et les montants qui y sont associés.
Autre exemple : nous nous battons pour demander des clauses de sauvegarde face à la concurrence déloyale de la Chine sur l’acier et des mesures tarifaires face à ses surcapacités de production de véhicules électriques. Après ce débat dans l’hémicycle, je vais échanger avec des partenaires européens, qui ne sont pas membres de l’Union européenne, qui nous demandent de les inclure dans les clauses de sauvegarde afin de pouvoir bénéficier des mesures de protection du marché intérieur européen.
M. Arnaud Le Gall, rapporteur pour avis
Que faites-vous sur les Gafam ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
De même, dans le domaine de la défense, nous avons exigé le respect du principe de préférence européenne. C’est parce que la voix de la France porte et que nous sommes influents que nous avons pu imposer l’idée que l’argent du contribuable européen puisse soutenir l’autonomie de l’industrie de défense européenne et française et réduire ainsi la dépendance vis-à-vis des États-Unis.
Madame la députée Karamanli, je vous remercie d’avoir abordé la question des ressources propres, car elle est absolument fondamentale. Elle sera au cœur du prochain débat sur le cadre financier pluriannuel. L’Union européenne a besoin de ressources propres, car son financement ne peut reposer uniquement sur les contributions nationales.
M. Matthias Tavel
Et la taxe Zucman ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Vous avez mentionné la taxe carbone aux frontières, on pourrait aussi parler de la taxe sur les grandes entreprises du numérique. C’est une priorité pour la France.
Madame la députée Dalloz, vous avez évoqué d’autres priorités qui nous sont chères et qui doivent être au cœur des débats européens. Je pense par exemple à la réduction de la bureaucratie. Nous y travaillons en ce moment avec nos partenaires européens à travers la directive omnibus sur la simplification. Je pense aussi au renforcement de nos outils de contrôle aux frontières et de lutte contre l’immigration irrégulière ou encore à la protection commerciale de l’Union européenne face à la concurrence déloyale des États-Unis et de la Chine.
Ces ambitions sont portées par la France dans le débat européen, mais elles ne pourront l’être en s’isolant ou par la menace et le chantage. Elles le seront par la diplomatie, en construisant des coalitions et en exprimant une voix forte et ambitieuse pour l’Europe. C’est ce que nous faisons. (M. Erwan Balanant et Mme Constance Le Grip applaudissent.)
Mme la présidente
Le débat est clos.
Article 45 (appelé par priorité)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 1067 rectifié, 805, 598, 1065 rectifié, 804, 803, 2015 et 733, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Matthias Tavel, pour soutenir l’amendement no 1067 rectifié.
M. Matthias Tavel
Monsieur le ministre, ce que vous venez de dire est faux. La France n’est pas le premier bénéficiaire du plan de relance européen et même en l’intégrant, nous resterons contributeurs net à l’Union européenne avec un solde de 11,21 milliards l’année prochaine. Par cet amendement, nous proposons donc de réduire la contribution de la France de cette même somme, afin de la ramener de 28 à 17 milliards et ainsi donner autant que nous recevons.
M. Erwan Balanant
Et les subventions de l’Union européenne aux Chantiers de l’Atlantique ?
M. Matthias Tavel
Vous noterez que nous n’avons déposé aucun amendement de suppression de la contribution de la France. Nous souhaitons simplement avoir une discussion sur l’utilisation qui est faite de l’argent des Français. Nous ne sommes pas d’accord pour qu’il serve à financer des projets et des politiques contraires à nos intérêts.
M. Charles Sitzenstuhl
Des exemples !
M. Matthias Tavel
Les exemples où l’argent donné par la France joue contre elle ne manquent pas : la signature de l’accord avec le Mercosur, la politique de la Banque centrale européenne ou la politique de libre échange intégral pour l’industrie… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Les députés du groupe LFI-NFP applaudissent ce dernier.)
Mme la présidente
Je vous rappelle que les orateurs disposent d’une minute pour présenter leurs amendements.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 805.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Il propose de diminuer le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne afin de le remettre dans la moyenne du précédent cadre financier pluriannuel. Je ne crois pas que, entre 2014 et 2020, notamment sous le quinquennat de François Hollande, la France ait été frexiteuse ou sur le chemin du Frexit. Certains peuvent le regretter, mais nous étions alors totalement sur un chemin d’intégration européenne.
Monsieur le ministre, vous avez confirmé ce que j’ai dit à la tribune, de même que le président Coquerel et le collègue Maurel : vous êtes incapable de parler rationnellement de la contribution à l’Union européenne. Vous faites des approximations en permanence et vous accusez les autres de vos propres turpitudes. Ça ne marche pas, ça ne marche plus ! C’est dommage que nous ne soyons plus en campagne pour les élections européennes, car la dernière fois que vous avez dit ça, le Rassemblement national a fait deux fois plus de voix que vous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
La parole est à M. Emmanuel Maurel, pour soutenir l’amendement no 598.
M. Emmanuel Maurel
Il propose une année blanche pour la contribution de la France. Je sais qu’il y a beaucoup de partisans de l’année blanche ici, car le contexte budgétaire est très dur et 5,7 milliards, ça ne se trouve pas facilement.
Monsieur le ministre, vous avez dit un certain nombre de choses fausses. Je rappelle que la part de la France dans le total des contributions nationales est de 18 %, quand sa part dans le PIB européen est de 16 %. Pour l’Allemagne, ces pourcentages sont respectivement de 22 % et 24,5 %. Comparée à l’Allemagne, la France verse donc plus et reçoit moins. Voilà la vérité !
Les investissements de la Banque européenne d’investissement n’ont rien à voir avec le budget de l’Union européenne, puisque nous parlons d’une banque, qui agit en tant que telle. Ses trois souscripteurs principaux sont d’ailleurs la France, l’Italie et l’Allemagne, à hauteur de 16 % chacun.
Ne faites pas comme M. Sitzenstuhl, qui assimile toute critique vis-à-vis de l’Union européenne au complotisme ou à l’euroscepticisme. Ce n’est pas un débat très sérieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune, pour soutenir l’amendement no 1065 rectifié.
Mme Claire Lejeune
Vous pouvez répéter autant de fois que vous le voulez que l’Union européenne apporte automatiquement la paix et la prospérité, cela n’en fait pas pour autant une réalité. L’Union européenne s’est construite par le néolibéralisme. Elle se fonde donc sur l’austérité et, au nom de ce principe, elle bafoue la démocratie des peuples européens. Cette histoire débute dès la construction de l’Union européenne et se poursuit par le vote bafoué des Françaises et des Français en 2005. Elle se perpétue aujourd’hui avec les coups de force du bloc central pour se maintenir au pouvoir au nom d’une pseudo-responsabilité budgétaire, malgré le verdict des urnes.
Non, les peuples européens n’ont pas à subir l’austérité ! Surtout pas quand Ursula von der Leyen se donne le droit d’aller sceller un accord avec Trump promettant 750 milliards d’achats de produits énergétiques, de gaz et de pétrole de schiste et 600 milliards d’investissements et d’achat d’armements.
Cet amendement propose de minorer la contribution de la France à proportion de l’austérité imposée aux Français avec ce PLF. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Emmanuel Maurel applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 804.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Cet amendement de repli propose de diminuer le prélèvement sur recettes au bénéfice de l’Union européenne de 3,4 milliards, ce qui correspond au montant des droits de douane qui devraient revenir à la France. La Commission européenne subtilise cette somme en en faisant une ressource propre alors que c’est un impôt payé par les Français et reversé comme un tribut à la Commission en tant que ressource propre fondée sur le plastique.
L’Union européenne s’est construite sur un libre-échange intégral, et tous ceux qui veulent protéger leur marché et qui s’opposent à ce merveilleux monde ouvert sont taxés de ringards. Je propose à la Commission d’être cohérente avec elle-même et de nous rendre ces épouvantables droits de douane. Il est hors de question d’admettre qu’une taxe payée par les entreprises françaises a vocation à constituer une ressource propre de l’Union européenne. La taxe plastique est une ressource française qui doit rester aux Français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 803.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Cet autre amendement de repli propose une diminution du prélèvement pour un montant équivalent à ce que nous payons pour le rabais des autres pays.
Monsieur le ministre, vous avez fait une erreur en confondant la négociation menée par Mme la ministre avec le rabais. Ce sont deux choses différentes. Cette négociation vise un retour en arrière sur certains calculs du prélèvement sur recettes, ce qui n’a rien à voir avec le rabais que nous réclamons. Dans le cadre des auditions que j’ai menées de membres de votre ministère et de celui de Mme de Montchalin, j’ai constaté que, malgré la position officielle de votre gouvernement – que nous contestons –, jamais la France n’a demandé de rabais dans le cadre des négociations.
Tous les pays contributeurs ont obtenu un rabais, à l’exception de l’Italie, qui a obtenu en échange un plan de relance considérable – sans commune mesure avec ce que la France a obtenu –, et de l’Irlande, qui, en tant que paradis fiscal au sein de l’Union, le premier du genre, nous prend tellement d’argent chaque année que c’est comme si elle recevait un rabais caché. Votre position officielle est de laisser faire l’Irlande et même de la remercier de nous piller ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Feld, pour soutenir l’amendement no 2015.
Mme Mathilde Feld
S’inscrivant dans la droite ligne de ce que viennent de défendre mes collègues de la France insoumise, cet amendement de repli propose de réduire la contribution de la France de 1,4 milliard, ce qui correspond à la prise en charge par la France des rabais consentis aux autres pays membres.
Cela fait déjà plusieurs années que les pays contributeurs ont obtenu une réduction de leur contribution. Ces rabais bénéficient à des pays riches, dont le PIB par habitant est supérieur à celui de la France : l’Allemagne, l’Autriche, la Suède, les Pays-Bas, le Danemark. Non seulement la France ne bénéficie d’aucune réduction, mais elle est obligée de combler plus d’un quart du manque à gagner occasionné par ces rabais.
Nous demandons donc de fixer la contribution de la France à la hauteur de ce qu’elle doit payer pour elle, pas pour financer les privilèges de ses riches voisins. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 733.
M. Charles Sitzenstuhl
Il propose symboliquement d’augmenter la contribution française au budget de l’Union européenne. Comme je l’ai fait en commission des finances, je ne veux pas que seules les voix antieuropéennes puissent s’exprimer.
À l’avenir, il faudra augmenter la contribution de la France pour financer l’augmentation des budgets de l’Union européenne. Nous faisons en effet face collectivement à de nouveaux défis qui demandent des moyens supplémentaires (Exclamations sur les bancs du groupe RN) : transition écologique, nécessité de se réarmer pour se protéger davantage, aide à nos entreprises et à nos laboratoires pour être plus performants, notamment dans le domaine de l’intelligence artificielle. Ceux qui nous expliquent qu’on pourra faire mieux avec moins ne disent pas la vérité.
L’Union européenne aura besoin de davantage de moyens pour protéger les États membres et pour protéger la nation française. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Tous ces amendements proposent une diminution de la participation française, sauf celui de M. Sitzenstuhl qui propose, symboliquement, de l’augmenter de 1 euro – faisant ainsi, comme les autres orateurs, une déclaration politique.
Nous pouvons analyser autant que nous le voulons l’efficacité ou la légitimité de l’Union européenne. Il n’y a pas, dans ce débat, les bons et les mauvais, les méchants et les gentils. Nous pouvons tous avoir un avis différent.
Mais, dans le strict cadre budgétaire, je rappelle que l’article dont nous discutons est prévu par la Lolf – loi organique relative aux lois de finances, et qu’il se fonde sur une prévision tenant compte du dernier état budgétaire de l’Union européenne. Après le vote prévu dans quelques jours au Parlement européen à Strasbourg, il est possible que le chiffre qui vous a été donné varie. Si c’est le cas, le gouvernement sera sans doute amené à déposer un amendement dans le cadre de la discussion budgétaire au Sénat.
J’ajoute qu’il n’est pas possible de décider unilatéralement du montant du PSR-UE. En effet, lors du dernier Conseil européen, les États membres se sont mis d’accord, à l’unanimité, sur un montant et une répartition. Comme chaque année, ces chiffres sont validés par un vote du Parlement européen. Nous devons tenir cet engagement en dépit de la diversité des positions politiques – toutes légitimes – qui se sont exprimées, faute de quoi le budget ne serait pas sincère.
Chacun y est allé de son refrain pour ou contre l’Union européenne. Je considère pour ma part qu’elle est un véhicule de puissance, sans lequel la France ne peut pas peser sur les affaires du monde. Les vraies questions que nous devons nous poser sont les suivantes : comment peser sur les décisions de l’Union européenne, et quel niveau de dépense est acceptable ? Nous devrons y répondre lors des prochaines discussions sur le cadre financier pluriannuel.
Avis défavorable à tous les amendements.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’action et des comptes publics, pour donner l’avis du gouvernement.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de l’action et des comptes publics
Je souhaite apporter quelques éléments factuels au débat, pour ne pas laisser croire que nous pouvons décider seuls, ici et maintenant, du niveau d’une contribution qui constitue un engagement international.
M. Arnaud Le Gall
Il y a bien des engagements internationaux que vous ne respectez pas !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Premièrement, 28,7 milliards, c’est moins que 1 % de notre PIB. Le budget à long terme de l’UE pour la période 2021-2027 a été construit de telle manière que chaque État membre consacre 1 % de son PIB au bénéfice du budget européen, qui représente lui-même 1 % du PIB européen. En 2026, la France ne contribuera pas à hauteur de 1 % de son PIB – cela représenterait 30 milliards, donc davantage que les 28,7 milliards prévus.
Deuxième point : aucun gouvernement européen, aussi eurosceptique soit-il, n’a jamais fait voter un rabais unilatéral dans son Parlement.
M. Nicolas Sansu
On l’a fait l’an dernier !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Depuis 1957, aucun État membre n’a décidé seul de ne verser qu’une partie de la contribution qui lui était demandée. La raison en est simple : une telle décision serait condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et entraînerait une sanction plus coûteuse que le prélèvement sur recettes de l’Union européenne soumis à votre vote. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)
M. Nicolas Sansu
Il ne faut pas le mettre au vote !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Troisième point : l’un des amendements de M. Tanguy vise à ramener le prélèvement au niveau qui était le sien lors de la période précédente. J’ai fait un petit calcul. Entre 2015 – qui correspond, à un an près, au début de la période précédente du prélèvement sur recettes de l’Union européenne, soit le budget 2014-2021 – et 2025, le PIB de la France a augmenté de 36 % en valeur. Parallèlement, le PSR-UE a augmenté de 25 %.
Si je suis votre raisonnement, monsieur Tanguy, il faudrait plutôt augmenter le PSR-UE pour maintenir constante sa proportion par rapport à notre PIB. Soit votre calcul est faux, soit votre raisonnement n’est pas rigoureux.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Mais si, vous allez voir !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Quatrième point : vous avez beaucoup évoqué la négociation menée par le ministre Haddad et moi-même. Il ne s’agissait pas d’une négociation bilatérale du gouvernement français avec la Commission, mais d’une négociation qui se déroulait dans le cadre de la révision annuelle du budget et de la révision à mi-parcours de la politique de cohésion.
À cette occasion, nous avons demandé et obtenu de la part de nos vingt-six partenaires européens de revenir aux paramètres de calcul qui prévalaient avant la crise du covid, afin que la Commission ne nous demande que le juste besoin des dépenses prévues et qu’elle ne constitue pas une réserve de précaution sur nos prélèvements.
Cette négociation a permis de faire baisser la contribution française de 1,6 milliard, répartie de la manière suivante : 500 millions d’euros au titre de la révision du niveau de dépenses de l’UE ; 1,1 milliard au titre des corrections techniques et ajustements dont je viens de parler, et de la révision des clés de répartition.
Ce n’est donc pas un rabais que nous avons demandé, mais un juste retour. Et je peux vous assurer que nous avons bénéficié de nombreux soutiens dans cette négociation : tous les pays de l’Union européenne ont profité de notre initiative, puisque tous ont vu leur contribution révisée à la baisse et calculée sur de nouvelles bases.
Dernier élément : adopter les amendements qui proposent une baisse de notre contribution mettrait la France en situation de très grave infraction à l’égard des institutions communautaires,…
M. Nicolas Sansu
Oh là là !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
…à un moment où la France a pris le leadership de deux négociations en phase avec les priorités politiques que vous défendez souvent. La première touche à la préférence européenne, pour soumettre à ce principe les dispositifs relatifs notamment à la commande publique, à la révision du droit et au soutien à la politique industrielle. Ce sujet, tabou il y a quelques années, progresse désormais.
M. Dominique Potier
Il y a du boulot ! Ça fait dix ans qu’on le demande !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
La deuxième négociation, que nous menons avec beaucoup d’énergie, concerne le prochain budget et vise notamment à préserver les intérêts des agriculteurs.
Pour conclure, je tiens à rappeler devant vous que la France touche chaque année plus de 9 milliards d’euros au titre de la PAC, soit 3 milliards de plus que le second pays bénéficiaire, qui est l’Espagne.
Mme Marine Le Pen
Heureusement !
M. Matthias Tavel
C’est notre argent !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Pourtant, certains nous disent que l’Europe ne fait rien de bien et qu’il faut tout réviser.
M. Antoine Léaument
C’est notre argent !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Certes, c’est notre argent, monsieur Léaument, mais nous avons bien négocié et cet argent va utilement dans les cours de ferme françaises.
Mesdames et messieurs les députés, les Européens qui siègent sur vos bancs ont bien compris que personne ne décide d’un rabais de son propre chef, et qu’une telle décision nous coûterait plus cher au bout du compte. Avis défavorable à toute la série d’amendements. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Souffrez qu’un souverainiste s’exprime encore quelques minutes depuis les bancs des commissions – c’est assez rare, vous en conviendrez. (Exclamations sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.) Je sais que c’est difficile pour vous : pour la première fois, un grand groupe souverainiste siège à l’Assemblée nationale, grâce à Marine Le Pen et aux Françaises et Français qui nous font confiance. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) J’avoue éprouver un plaisir coupable à en profiter encore un peu. (Sourires.)
Madame la ministre, vous me reprochez de ne pas avoir compris, mais c’est vous qui commettez une erreur. Quand je propose de ramener la contribution au niveau du précédent cadre pluriannuel, c’est évidemment en valeur nette, corrigée de l’inflation. Certes, le PIB de la France a augmenté de 30 % en valeur, mais c’est bien le rapport entre la valeur brute et la valeur nette qu’il faut rétablir. Quand la mer monte, le bateau monte avec la marée – enfin, le vôtre coule ! (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Le nôtre, lui, flotte encore !
Je suis désolé de rappeler ces évidences. De même, monsieur le ministre, vous affirmez que les restes à liquider finiront bien par être liquidés – mais c’est leur accumulation qui pose problème, et ils donneront lieu à des dégagements d’office. Je me permets de vous indiquer le terme qu’il convient d’employer, même si vous pensez m’être supérieur sur le plan technique – ne vous inquiétez pas, je vous apporte mon aide gratuitement, c’est l’État qui paie ! (Rires sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Les restes à liquider s’accumulent : à la fin de ce cadre pluriannuel, ils atteindront près de 400 milliards d’euros, contre 180 milliards à la fin de l’avant-dernier. C’est le signe d’une mauvaise gestion. Vous défendez l’Union européenne sans rationalité, incapables de reconnaître qu’elle prélève plus qu’elle ne dépense. Vous exigez toujours plus de contributions, tout en échouant à exécuter vos propres programmes fédéralistes : c’est le comble !
M. Frédéric Petit
Vous prenez les choses à l’envers, ce n’est pas comme cela que ça marche !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Vous êtes fédéraliste (Exclamations sur les bancs des groupes EPR et Dem) – et ce n’est pas une insulte : si je voulais vous insulter, j’emploierais d’autres mots. (Sourires.) Toujours plus de programmes, toujours plus de compétences pour l’Union européenne, et toujours la même incapacité à dépenser les crédits votés : c’est surréaliste. Et, pire encore, vous refusez tout débat rationnel sur ces dysfonctionnements. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
M. François Cormier-Bouligeon
Ce n’est pas comme ça qu’on parle à un ministre, c’est un voyou !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
S’agissant des rabais, parlons chiffres : les Pays-Bas bénéficient d’un rabais de 25 % sur leur contribution théorique, la Suède de 30 % ! Je vois que vous acquiescez.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Non !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Ce sont les chiffres du rapport adopté notamment par les macronistes, il est donc difficile de les nier. Nous reprochons à vos prédécesseurs, ainsi qu’à vous-même – puisque vous avez participé à la négociation du précédent cadre pluriannuel –, d’avoir renoncé à défendre un rabais pour la France.
L’Allemagne a obtenu 7 %, l’Autriche 14 %, le Danemark 9 %, les Pays-Bas 27 %, la Suède 31 %, pour un rabais moyen de 12,3 %. Et la France : rien ! Pire : vous avez accepté qu’elle verse 1,5 milliard supplémentaire pour financer les rabais des autres. Nous ne sommes pas d’accord ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
En quoi payer pour les autres serait-il fédéraliste, ou favorable à la construction de l’Union européenne ? En réalité, parce que la France est en déficit depuis cinquante ans, le seul moyen pour vous d’exister dans les négociations, c’est de payer toujours davantage. Votre seul ressort d’influence ne repose plus que sur l’argent que vous n’avez pas. Voilà votre grande stratégie. Nous ne l’acceptons pas, non seulement parce que nous sommes souverainistes, mais parce que c’est une politique de mauvaise gestion. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme Constance Le Grip
C’est complètement faux !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
La contribution de la France est financée par l’emprunt, donc par la dette. Voilà ce qui ne fonctionne pas, madame la ministre ! Et cela n’a rien à voir avec le Frexit ! Je sais bien qu’à vos yeux, je ne devrais pas être rapporteur spécial de ce budget. (Protestations sur les bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme Constance Le Grip
C’est insupportable !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Quand je critique la gestion de l’Union européenne, je sortirais scandaleusement de mon cadre. Quand la collègue Le Grip, fédéraliste, insulte le Rassemblement national, tout va bien. Quand tous les macronistes dérapent, c’est la même chose ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe EPR et Dem. – Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Vous ne supportez pas qu’une autre perspective que la vôtre s’exprime sur l’Europe. Vous ne le supportez tellement pas que tout désaccord devient, à vos yeux, un appel au Frexit – qu’il vienne du collègue Maurel, du président Coquerel, du Rassemblement national ou de nos amis de l’UDR. Non, entre la soumission à Bruxelles et le Frexit, il existe un autre chemin, que nous défendons, ne vous en déplaise ! (Mêmes mouvements.)
Je suis pleinement dans mon rôle de rapporteur spécial et c’est à ce titre que j’émets, à titre personnel, un avis de sagesse sur l’ensemble des amendements de la discussion commune – y compris celui de M. Sitzenstuhl, car, après tout, s’il s’agit de ruiner la France, nous ne sommes plus à 1 euro près ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
Je rappelle que la commission est représentée par le président, le rapporteur général et le rapporteur spécial, et que trois ministres sont également présents. Il est d’usage que chacun puisse s’exprimer, s’il le désire.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Gérard Leseul
Une parole calme, c’est bien !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Monsieur le ministre, nous vous avons écouté. Vous ne m’en voudrez pas de rappeler que vos prédécesseurs, avec les mêmes arguments – souvent caricaturaux, simplistes et manichéens – ont perdu le référendum sur le traité constitutionnel, sans jamais comprendre pourquoi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ils n’ont pas compris pourquoi 55 % des Français avaient voté non, lors d’un scrutin référendaire dont la participation – de 70 % – fut la plus élevée depuis les années 1970.
Vous affirmez que la France est le premier bénéficiaire du budget européen. C’est vrai en valeur absolue ; mais vous savez que c’est faux en valeur relative. Si l’on rapporte les crédits perçus au nombre d’habitants, la France tombe à la treizième place, derrière des pays qui n’ont manifestement pas besoin d’aide – le Luxembourg, les Pays-Bas, pour ne citer qu’eux.
M. Antoine Léaument
Ah !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Il faut aussi examiner la nature des financements. Pour les fonds de cohésion, essentiels à l’aménagement du territoire, à la solidarité et à la cohésion sociale, la France n’est qu’en septième position en valeur absolue, encore derrière l’Allemagne, et vingt-deuxième en valeur relative. Pour les aides post-covid du programme NextGeneration, notre pays est quatrième en valeur absolue, mais onzième en valeur relative. On peut donc faire dire aux chiffres ce que l’on veut.
J’ai beaucoup de respect pour vous, M. Sitzenstuhl, mais vos propos illustrent les causes des difficultés françaises dans les négociations européennes. À vous entendre, un pays serait soit isolé, soit contraint d’accepter ce qu’on lui impose. Je ne le crois pas : un autre chemin existe.
M. Charles Sitzenstuhl
Non !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
L’Union européenne n’est pas le pays des Bisounours. Des nations continuent à exister et à défendre leurs intérêts. Pour ma part, je ne suis pas décliniste : il n’y a pas d’Europe sans la France, pour dire les choses simplement. Si nous abordions les négociations avec cet état d’esprit, peut-être obtiendrions-nous des résultats comparables à ceux de l’Allemagne, bien supérieurs aux nôtres. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Lors de la création de l’euro, l’Allemagne a imposé un euro fort, calqué sur le mark, au détriment de la plupart des économies européennes, à commencer par la nôtre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Chaque année, on s’indigne de voir le déficit budgétaire de la France dépasser les 3 % du PIB – une règle fixée jadis par l’Allemagne, qui change aujourd’hui de doctrine – mais on passe sous silence les 6 % d’excédent de la balance commerciale allemande. Le grand marché libre et ouvert a essentiellement profité aux Allemands, dont l’économie repose sur le commerce extérieur, non sur la consommation intérieure. (Mêmes mouvements.)
M. Charles Sitzenstuhl
Mais parce qu’ils ont fait les réformes il y a vingt ans !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Enfin, ce qui a été dit sur Mme von der Leyen est exact, que vous le vouliez ou non : elle a négocié avec M. Trump un accord dans l’intérêt de l’Allemagne, pas de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe RN. – M. le rapporteur spécial applaudit également.) Ce n’est pas un gros mot de dire ça, c’est un fait ! Si nous refusons de négocier de peur d’être perçus comme antieuropéens, il ne faut pas s’étonner que la situation demeure inchangée depuis des années.
C’est précisément la raison pour laquelle nous débattons aujourd’hui de la contribution française. Défendre nos intérêts ne conduit pas à sortir de l’Union européenne ; au contraire, c’est ainsi que nous pourrons renforcer l’adhésion des Français à l’Europe, en montrant que la France sait défendre ses intérêts tout en préservant les mécanismes de solidarité à l’égard des pays européens qui en ont réellement besoin – ce qui n’est pas le cas de l’Allemagne, puissance économique dominante.
S’agissant enfin des contributions, ce qui a été dit est exact : les autres États membres ont négocié des rabais. Nous, non. (Signes de dénégation sur quelques bancs des groupes EPR et Dem. – Mme Sabine Thillaye s’exclame.) Bien sûr que si ! Tous ont négocié, sauf nous ! Il est difficile d’aller demander des efforts aux Français – sur les franchises médicales, les pensions de retraite, les budgets ministériels –, tout en présentant un budget européen sur lequel nous ne pourrions obtenir aucune concession et dont nous devrions accepter l’augmentation sans discussion. (M. Matthias Tavel applaudit)
Cette attitude est incompréhensible pour nos Français et alimente l’euroscepticisme, ce que je regrette. Débattre de ce budget n’est pas un sacrilège.
M. Nicolas Sansu
Ce n’est pas une religion, l’Europe !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Pour terminer, je répondrai à Mme la ministre, qui a souligné que jamais un parlement national n’était revenu sur la contribution consentie par son pays à l’Europe. C’est un problème ! C’est ici que doit se décider le budget de la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN, LFI-NFP et GDR.) Il serait beaucoup plus sain que nous puissions en débattre plutôt qu’on nous impose une contribution préétablie.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Puisque M. Tanguy m’y invite, je vais faire part aux députés de ce qui s’est passé dans la nuit du 20 au 21 février 2020 dans le bâtiment Europa, où se tenait une réunion du Conseil européen dédiée au budget de l’Union. Nous avons progressé, de sorte qu’en juillet 2020, le budget proposé a été unanimement soutenu par les vingt-sept chefs d’État ou de gouvernement de l’Union européenne. Ces réunions ne sont ordinairement pas racontées, mais il apparaît qu’un tel récit éclairerait la représentation nationale quant au montant des contributions nationales au budget européen. Pendant cette nuit – on ne dort généralement pas beaucoup pendant les nuits de Conseil européen –,…
M. Erwan Balanant
Ici non plus !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
…vers trois ou quatre heures du matin, les experts du secrétariat général des affaires européennes (SGAE) qui nous accompagnaient, munis de leur calculette, sont parvenus à deux résultats. Premièrement, la France perçoit chaque année environ 3 milliards de plus que l’Espagne au titre de la PAC. Au fond, notre rabais, c’est la PAC ; le montant de PAC touché par la France est beaucoup plus élevé que pour les autres pays européens. (Mme Danielle Brulebois applaudit. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)
M. Emeric Salmon
Allez tenir ce discours à nos agriculteurs !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Deuxièmement, la France est contributrice net : elle verse 0,27 % de son PIB de plus qu’elle ne reçoit. Pour l’Allemagne et les Pays-Bas, également contributeurs net, ce chiffre s’élève respectivement à 0,42 % et à 0,44 % de leur PIB.
M. Manuel Bompard
Quels intérêts défendez-vous ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Même compte tenu des rabais, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark ou les autres pays dits contributeurs net versent une plus grande part de leur revenu national brut que la France.
M. Paul Midy
Et voilà ! Il faut savoir calculer !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
La France tire de la PAC un bénéfice supérieur de 2 à 3 milliards à celui qu’en tire le second bénéficiaire ; c’est un soutien financier majeur. (M. Antoine Léaument s’exclame longuement.) Dans la nuit du 20 au 21 février 2020, vers trois heures du matin, le président de la République a demandé que lui soient communiqués deux paramètres, le bénéfice de la PAC pour la France et la contribution net de la France rapportée à son revenu national, pour s’assurer que notre contribution resterait inférieure à celle des autres pays contributeurs net, malgré les rabais dont ceux-ci allaient bénéficier.
Ce que j’ai défendu, pour le président de la République et pour la France, pendant toute la négociation, c’est la fin des rabais. Nous n’avons pas demandé de rabais pour la France ; nous avons demandé que les rabais des autres pays soient supprimés.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Cela n’a pas marché !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
C’est la position que nous défendons de nouveau actuellement ; Benjamin Haddad pourra vous le confirmer. Telle est la position française : nous ne voulons plus de rabais, pour que toutes les contributions nationales soient homogènes et lisibles. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.) Cela me semble une meilleure politique que de vouloir revenir ici unilatéralement, un 13 novembre, sur une contribution fixée par un traité que vous, députés, avez voté en 2021. (Signes de dénégation sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Antoine Léaument
Non, nous n’étions pas encore là !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
En 2021, la représentation nationale française, après avoir débattu, s’est prononcée majoritairement en faveur du budget européen pour les années 2021 à 2027. Ce vote démocratique nous engage pour sept ans. C’est le cadre dans lequel nous travaillons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Erwan Balanant.
M. Erwan Balanant
J’aimerais recentrer le débat sur nos territoires. Nous avons entendu les LFIstes et le Rassemblement national plaider pour que la France donne moins à l’Europe.
M. Christophe Bentz
Bien vu !
M. Erwan Balanant
Mme la ministre vient de démontrer que la France était celle qui bénéficiait le plus du budget européen. Monsieur Tavel, à qui, dans votre territoire, voulez-vous enlever les fonds européens ? Aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), qui bénéficient du Fonds social européen (FSE+) ? (Protestations et « C’est notre argent ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.) À la gare de Saint-Nazaire, subventionnée par le Fonds européen de développement régional (Feder) ?
Un député du groupe RN
Qu’est-ce qu’il est nul !
M. Erwan Balanant
Doit-on enlever les fonds européens à tout le complexe industriel de Saint-Nazaire, qui a reçu du FTJ – le fonds pour une transition juste – des millions d’euros pour décarboner son activité ? La question que je vous pose est simple : puisque vous voulez donner moins à l’Europe, à quels acteurs de vos territoires voulez-vous retirer l’argent européen ?
Mme la présidente
La parole est à M. Pieyre-Alexandre Anglade.
M. Pieyre-Alexandre Anglade
En écoutant les propos du président Coquerel et du rapporteur spécial Tanguy, j’ai l’impression qu’il se forme sous nos yeux une alliance des nationalistes allant du Rassemblement national à La France insoumise (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN)…
M. Emmanuel Maurel
Arrêtez !
M. Pieyre-Alexandre Anglade
…qui vise uniquement à diminuer la contribution de la France au budget européen, c’est-à-dire à isoler notre pays, alors que nous avons plus que jamais besoin d’une France forte au sein d’une Europe puissance. (M. Paul Midy applaudit.) Je trouve cette alliance honteuse – en tout cas, peu courageuse –, car elle ne mentionne pas les conséquences de ce qu’elle propose. Si nous votions les amendements déposés par les députés du Rassemblement national ou de La France insoumise, nous exposerions au mieux notre pays à des sanctions – l’argent des fonds européens ne serait pas versé à temps à nos agriculteurs, à nos régions, à nos entreprises – ; au pire, nous engagerions la France sur la voie d’une sortie progressive de l’Union européenne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Il n’existe aucun club auquel on puisse appartenir sans payer sa cotisation. Ce que vous promettez, c’est un Frexit dissimulé. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Il appelle cela une cotisation !
Mme la présidente
La parole est à M. Benoît Biteau.
M. Benoît Biteau
Au-delà de la volonté de construire la paix sur le continent, une des valeurs fondamentales qui a présidé à la création de l’Union européenne est la solidarité. Or il n’y aura pas de solidarité tant que nous soutiendrons des logiques telles que celle de Frontex. Nous ne créerons pas de solidarité si nous ne contribuons pas suffisamment au budget de l’Union européenne. Nous ne ferons pas preuve de solidarité envers les agriculteurs si nous n’alimentons pas les caisses de la politique agricole commune.
Le principe thatchérien « I want my money back », « je veux récupérer mon argent », menace la solidarité. Tant que nous penserons comme cela, nous n’y arriverons pas ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)
M. Erwan Balanant
Il a raison !
M. Benoît Biteau
Si nous voulons réduire la contribution des États membres à l’Union européenne, nous devrons nous atteler à la question des ressources propres. Ayant été député européen, je constate pourtant que ceux qui, aujourd’hui, refusent de contribuer au budget de l’Union sont les mêmes qui, au Parlement européen, défendent une ligne ultralibérale et refusent d’établir des ressources propres. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et SOC. – M. Erwan Balanant applaudit également.) Vous finirez écartelés entre votre logique ultralibérale et votre refus de la solidarité. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
En écoutant ces différentes interventions, on en vient à se demander quelle est la nature juridique de l’Union européenne. Ce n’est pas une coopérative mais une entité très spécifique, démocratique,…
M. Jean-François Coulomme
Démocratique, la Commission européenne ?
M. Charles de Courson
…, dotée d’un Parlement européen élu, d’un exécutif dyarchique et d’un organe judiciaire, la Cour de justice de l’Union européenne. Certains orateurs donnent l’impression que l’Union européenne a été imposée à la France (« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP), mais pas du tout ! C’est nous, chers collègues, qui l’avons voulue. (« Non ! » sur les mêmes bancs. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.) C’est en tout cas la majorité d’entre nous ; nous sommes en démocratie.
Par ailleurs, la contribution de 28,8 milliards représente un peu moins de 1 % du PIB, quand l’ensemble des dépenses publiques s’élève à presque 57 % du PIB. Il faut rappeler les chiffres ! Votons donc cette contribution. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LIOT, EPR, SOC et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel.
M. Matthias Tavel
Monsieur Balanant, vous n’avez toujours pas compris…
M. Erwan Balanant
Je ne comprends pas grand-chose !
M. Matthias Tavel
…que la France était contributrice net ; que, par conséquent, l’argent dépensé à Saint-Nazaire, même s’il est décoré d’un petit drapeau européen, était français, et qu’il nous en revenait moins que ce que nous envoyons à Bruxelles. (M. Aurélien Le Coq applaudit.)
Monsieur de Courson, je suis content de vous entendre dire que 30 milliards d’euros ne sont pas grand-chose. Nous saurons vous le rappeler quand nous instaurerons la retraite à 60 ans, car la dépense encourue est du même ordre ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Nous sommes en plein dans la caricature qu’on nous impose depuis 2005. Pour vous, l’Union européenne est une vache sacrée et quiconque ose la critiquer est coupable de blasphème. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Erwan Balanant
Non !
M. Matthias Tavel
Nous en sommes désolés, mais l’Union européenne n’est pas sacrée et le vote démocratique de 2005 s’impose à elle. Quant au vote du Parlement français sur le budget de la France, il s’impose au gouvernement – ce n’est pas l’ère du 49.3 – et au président de la République, qui recevront ainsi mandat de renégocier ce que vous n’avez pas été en mesure d’obtenir. Si vous n’en êtes pas capables, laissez-nous la place, nous le ferons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marine Le Pen.
Mme Marine Le Pen
Merci, monsieur Balanant : vous me permettez de rappeler une nouvelle fois la différence entre la contribution et la contribution net.
M. Erwan Balanant
Je la connais, merci ! Les députés du Rassemblement national ne sont pas les seuls à avoir un cerveau !
Mme Marine Le Pen
La contribution net correspond à l’argent que nous versons et que nous ne revoyons pas.
M. Pierre Cazeneuve
Comme les 4 millions d’argent européen que vous avez pris ?
Mme Marine Le Pen
Inutile de rechercher à qui retirer des fonds européens. On ne retirera rien à personne, puisque nous parlons de contribution net. Dans un tel débat, il est toujours bon de rappeler que la contribution, c’est notre argent. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Dieynaba Diop
Idem pour le majordome ?
Mme Marine Le Pen
Monsieur de Courson, avec tout le respect que j’ai pour vous, ne faites pas semblant d’oublier la forfaiture du référendum de 2005. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. François Cormier-Bouligeon
Rendez l’argent européen !
Mme Marine Le Pen
Madame la ministre, vous nous expliquez très calmement, devant les millions de Français qui, je l’espère, nous regardent, que ce débat et le vote qui s’ensuivra ne servent strictement à rien : nous sommes là pour amuser la galerie, puisque tout cela a déjà été décidé et que nous n’avons pas notre mot à dire. Notre avis est exactement contraire. Le peuple français a son mot à dire ; il a d’ailleurs dit ce qu’il en pensait en 2005, et on a violé sa volonté. Nous ne la laisserons pas violer une nouvelle fois. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Mme Béatrice Roullaud se lève pour applaudir. – M. le rapporteur spécial applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Maurel.
M. Emmanuel Maurel
Madame la ministre, si nous n’avons pas le droit de voter contre, pourquoi soumettre l’article au vote ? (« Eh oui ! » sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP.) Si nous avons le droit d’exprimer des doutes ou des critiques, de déposer des amendements, souffrez que nous votions et que nous puissions ne pas être d’accord avec vous.
Par ailleurs, cela fait des semaines que vous déclarez qu’il faut faire des sacrifices, qu’il faut une année blanche, qu’il faut baisser les prestations sociales, qu’il faut geler des retraites. Malgré tout cela, vous expliquez qu’il y a un budget qui doit augmenter de 25 % : la contribution française à l’Union européenne. (M. Nicolas Meizonnet applaudit.) Il est normal que les Français se posent des questions, il est normal que nous proposions d’amender l’article, de faire un petit effort.
Enfin, monsieur Haddad, vous avez parlé de l’influence de la France au sein de l’Union européenne. Pour avoir été longtemps parlementaire européen, je peux vous dire que j’ai souffert à maintes reprises de constater que cette influence était bien moindre que vous ne le dites. Je souffre de voir tous nos principes bafoués quand Mme von der Leyen signe un projet d’accord avec M. Trump ou quand nous devons avaler le Mercosur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Voilà la réalité ! Il est donc normal que nous posions des questions… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Brun.
M. Philippe Brun
Oui, l’Union européenne peut et doit être critiquée. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Mme Laure Lavalette et M. Nicolas Meizonnet
Merci !
M. Philippe Brun
Oui, nous trouvons étonnante l’augmentation importante de la contribution française à l’Union européenne.
M. Manuel Bompard
Oui, mais ?
M. Philippe Brun
Madame la ministre des comptes publics, dans le cadre de ce projet de loi, quel autre budget prévoyez-vous d’augmenter de 25 % ?
Cela est d’autant plus étonnant que, dans le même temps, l’Union, par l’intermédiaire de la Commission européenne, nous demande de raboter notre système social, nos services publics et de réduire notre déficit.
M. Antoine Léaument
Il va y avoir un mais !
M. Philippe Brun
Mais nous sommes devant le fait accompli (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP), puisque le cadre financier pluriannuel a déjà été négocié par le gouvernement. Nous vous demandons instamment, madame et monsieur les ministres, de vous faire les interprètes du Parlement français auprès de l’Union européenne, de lui dire que ce chèque est trop onéreux, que les rabais consentis aux autres pays ne sont pas justifiés. Nous nous opposerons à ces amendements (« Ah ! » et exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP), car nous ne faisons pas partie des tartuffes… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Isabelle Rauch.
Mme Isabelle Rauch
Si j’ai bien compris, il me revient de conclure cette discussion avant la mise aux voix. Députée de la Moselle comme Robert Schuman, je ne pouvais pas ne pas prendre la parole.
Nous avons besoin de l’Europe, elle nous protège depuis très longtemps. Soyons fiers et heureux d’honorer cette contribution. Sur la terre d’où je viens, dans la tradition dont je suis issue, nous vivons l’Europe au quotidien. Je sais exactement, comme d’ailleurs tous ceux qui vivent dans cette circonscription, ce que nous lui devons.
Quand j’entends que nous pourrions réduire notre contribution, voire presque sortir de l’Europe, cela me fait mal. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN). Mesdames et messieurs les députés, je vous ai écoutés avec patience !
Je souhaite que le montant de notre contribution reste au niveau qui est le sien actuellement. Nous en avons besoin. Le marché intérieur européen représente 450 millions de personnes, nous ne pouvons pas nous en priver. Les entreprises en ont besoin et il est indispensable pour assurer notre souveraineté.
M. Alexandre Sabatou
Ça n’a rien à voir !
Mme Isabelle Rauch
Je suis donc fermement opposée à ces amendements et je voterai pour l’article 45. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
(Les amendements nos 1067 rectifié et 805, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 598.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue 168
Pour l’adoption 147
Contre 188
(L’amendement no 598 n’est pas adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
(Les amendements nos 1065 rectifié, 804, 803, 2015 et 733, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je vous informe que je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements nos 1045, 1051 et 1055, par les groupes Ensemble pour la République, La France insoumise-Nouveau Front populaire et Rassemblement national ; sur les sous-amendements nos 3961, 3963 et 3964, par les groupes Ensemble pour la République et Rassemblement national ; sur les amendements nos 1047 et 1046, par les groupes Ensemble pour la République et La France insoumise-Nouveau Front populaire ; sur l’amendement no 1064, par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire ; sur le sous-amendement no 3967, par le groupe Rassemblement national ; et sur l’article 45, par le groupe Ensemble pour la République.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour soutenir l’amendement no 1045, qui fait l’objet d’un sous-amendement, no 3961.
M. Aurélien Le Coq
Qui décide du budget de la France ? La représentation nationale doit se poser la question car, tout à l’heure, Mme la ministre a tenu des propos qui laissaient entendre que la contribution de la France à l’Union européenne n’était, au fond, pas vraiment soumise au débat des parlementaires, parce que M. Macron a pris des engagements et que notre pays doit les tenir.
Avec cet amendement, nous voulons rappeler la souveraineté pleine et entière de la représentation nationale. Il prévoit en effet de conditionner 10 % du versement de la contribution à l’Union européenne à la non-application des règles budgétaires imposées par Bruxelles, autrement dit celles qui nous contraignent à maintenir le déficit au-dessous de 3 % du PIB et la dette publique au-dessous de 60 % du PIB. Car ces règles sont particulièrement hypocrites. Lorsque Ursula von der Leyen décide que l’Europe doit mobiliser 800 milliards supplémentaires pour la défense et que ce même secteur connaît dans notre pays une hausse budgétaire de 6 milliards, nous voyons bien qu’il est possible de sortir du carcan des règles européennes ! (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial, pour soutenir le sous-amendement no 3961.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Il vise à aligner l’amendement des Insoumis sur la proposition qu’ils avaient eux-mêmes formulée dans leur amendement no 1067 rectifié, que nous avons examiné tout à l’heure. Nous voulons ainsi leur rendre un petit service – nous assistons, pour une fois, à une convergence des luttes ! (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
M. Erwan Balanant
La stratégie du fer à cheval !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Je précise que cette défense vaut également pour mes deux sous-amendements à venir, les nos 3963 et 3964, car leur objet est le même.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Je cite l’article 55 de la Constitution : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés […] ont […] une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. » (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.)
M. Erwan Balanant
Ça, au RN, ils veulent le supprimer !
M. Philippe Juvin, rapporteur général
La Constitution française prévoit que les traités régulièrement ratifiés, par exemple celui de Maastricht, sont supérieurs à la loi. Par conséquent, vous ne pouvez pas dire que la loi n’est pas respectée. Avis défavorable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Vous admettrez donc, monsieur le rapporteur général, que l’Union européenne a un drôle de fonctionnement. Ces dernières années, une institution a désobéi aux traités. Je veux parler de la Banque centrale européenne (BCE) qui, au moment de la crise du covid, a décidé, avec raison, de prêter de l’argent directement aux États, ce qui est strictement interdit par les traités européens. Il y a là une gageure. Les États et les parlements ne peuvent en aucun cas désobéir à des traités européens alors même qu’une institution comme la Banque centrale européenne, indépendante des pouvoirs politiques, en a le droit !
Ce paradoxe témoigne de la faiblesse de la construction de l’Union européenne. Celle-ci s’est bâtie au-dessus des peuples. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Car je vous rappelle que le traité constitutionnel européen a été rejeté par le peuple français ! (Mêmes mouvements.) Les traités qui régissent l’Europe ont été imposés au peuple français, qui est pourtant souverain. C’est pourquoi le système ne peut pas fonctionner. Nous devons être capables de prendre des décisions en matière de budget, quitte à désobéir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Il est certain que les règles européennes – un déficit au-dessous de 3 % du PIB, une dette inférieure à 60 % du PIB – ne correspondent à rien d’un point de vue économique, ni d’ailleurs du point de vue d’aucune autre discipline. Nous le savons aujourd’hui : il s’agit là d’une des multiples arnaques qui ont entouré la construction européenne. C’est avéré, c’est un fait historique, il y a même quasiment prescription. Cette règle a été inventée par François Mitterrand, un soir, sur un coin de table, avec un de ses économistes, alors qu’ils cherchaient un chiffre magique.
Au passage, il est fascinant de constater que lorsque la science économique se met au service d’une certaine oligarchie, elle arrive toujours à un chiffre rond ! Pourtant, scientifiquement, ça n’existe pas. Donc quand on nous sort un chiffre rond, c’est qu’il y a une petite entourloupe derrière. Une socialiste avait dit : « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup ». On pourrait ajouter que quand c’est trop précis, il y a aussi un vrai problème !
Puisque ces chiffres ne correspondent à aucune rationalité économique, le Rassemblement national n’a aucune raison de s’opposer à la remise en cause de telles règles. S’il faut réduire le déficit public et l’endettement, ce n’est pas pour faire plaisir à la Commission européenne, mais tout simplement parce que nous devons agir dans l’intérêt des Françaises et des Français.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Ah ! Voilà !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
J’ai l’intuition que les députés du bloc central voteront contre cet amendement en nous faisant la leçon sur la nécessité de bien tenir les comptes. Or je rappelle que ceux qui ont inventé cette règle ne l’ont jamais respectée. Il est tout de même incroyable que les mêmes veuillent graver cette règle dans le marbre alors qu’il s’agit d’une promesse en l’air – comme toutes celles qu’ils ont faites aux Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Défavorable. Le rapporteur général l’a dit très clairement : il s’agit d’un engagement international de la France pris dans le cadre des traités européens. Ce sont les États membres qui débattront du cadre financier pluriannuel. Leurs décisions seront d’ailleurs ratifiées par les parlements nationaux, comme ce fut le cas en 2021 s’agissant du cadre financier pluriannuel qui a fixé le montant dont il est question dans l’article 45. Plusieurs amendements à l’article visent à abaisser ce montant. Or ce n’est pas possible car notre pays, qui contreviendrait alors à la règle, s’exposerait à des sanctions, en l’occurrence des retenues sur les fonds que perçoivent nos agriculteurs, nos entreprises, nos universités, nos centres de recherche ou encore nos territoires.
Mme Marie-Christine Dalloz
Eh oui, cela pénaliserait tout le monde !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
L’adoption d’un de ces amendements aurait donc un impact très concret dans toutes nos circonscriptions.
J’en viens aux priorités de fond de la politique européenne, par exemple le pacte de stabilité et de croissance, et donc aux règles relatives à la dette et au déficit – qui sont aussi utiles si nous voulons assurer notre souveraineté. Sachez que nous avons obtenu de la flexibilité et des modifications de ce cadre.
M. Matthias Tavel
Mais arrêtez ! Vous n’y croyez pas vous-même !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Vous avez mentionné la politique de la défense, monsieur Le Coq. Or nous avons justement exclu les dépenses de défense du calcul lié à la procédure de déficit excessif afin d’accélérer le réarmement de l’Europe face à la menace de la Russie sur notre continent et de réduire notre dépendance – aux États-Unis notamment.
Nous mettons aussi en avant le principe de la préférence européenne pour soutenir notre industrie de défense. La France fait donc entendre sa voix et exerce son influence dans tous les domaines industriels.
En défendant cette contribution, nous prenons en considération l’intérêt de notre pays, de nos territoires, de nos entreprises et de nos agriculteurs.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Le chiffre de 3 % de déficit n’a pas été déterminé au doigt mouillé. D’ailleurs, savez-vous quel niveau de déficit, en 2026, nous permettrait de stabiliser notre dette ? Réponse : 2,8 % ! Si on arrondit ce résultat, on obtient 3 % – ça tombe bien ! Par conséquent, nous pouvons affirmer que si le déficit se situe au-dessous de 3 % en 2026, notre dette sera stabilisée, ce qui serait positif non pas pour Bruxelles ou pour Mme von der Leyen, mais bien pour les Français !
Si nous nous imposons des règles de gestion financière – en matière de déficit et de dette –, c’est parce que nous ne pouvons nous satisfaire d’une charge des intérêts de la dette qui atteindra 74 milliards en 2026, si l’on prend en compte toutes les administrations publiques.
M. Nicolas Meizonnet
Quel beau bilan !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Depuis le début de l’examen du PLF il y a deux semaines, nous discutons de recettes et d’économies. Nous ne nous livrons pas à un exercice théorique ou à une conférence de macro-économie. Nous sommes là pour remettre le pays sur une trajectoire acceptable afin que dans deux, trois ou quatre ans – donc au lendemain de l’élection présidentielle –, lorsque des députés et des ministres viendront ici même présenter aux Français leur vision, ils ne se retrouvent pas condamnés à payer 70, 80, 90, voire 100 milliards de charge d’intérêts de la dette. Monsieur Tanguy, encore une fois, nous agissons donc pour les Français – comme vous l’avez recommandé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.) Au demeurant, il est plutôt sain de travailler dans un cadre commun avec nos voisins allemands, italiens et espagnols, et donc d’éviter la concurrence déloyale et le dumping fiscal et économique.
M. Matthias Tavel
Ce n’est pas du dumping !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Je suis défavorable à ces amendements qui laissent entendre que les objectifs budgétaires visent à nous sanctionner. Ils nous incitent en réalité à bien gérer notre pays et à veiller à notre souveraineté grâce à des décisions prises au Parlement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme Marine Le Pen
Ça n’a pas bien marché !
Mme la présidente
J’ai décidé, en concertation avec M. le président de la commission des finances, de donner la parole, dans cette discussion, à deux orateurs contre et à deux orateurs pour.
La parole est à M. Frédéric Petit.
M. Frédéric Petit
Alors que nous sommes appelés à voter l’article 45 – nous ne nous prononçons pas sur le montant du prélèvement sur recettes au profit de l’Union, mais pour ou contre cette contribution –, nous devons réfléchir aux conséquences de notre vote – depuis quinze jours, nombre de collègues votent sans s’en préoccuper.
Je veux parler au nom des plus de 1 million de Français qui vivent dans un autre pays de l’Union européenne. Il y a trente ans, les inégalités entre les pays européens étaient très fortes. Je me suis rendu en Pologne en 1986 et je ne vous raconterai pas ce que j’ai observé alors dans ce pays. Aujourd’hui, dans le cadre de l’Union européenne, les inégalités se sont considérablement réduites.
M. Matthias Tavel
Avec les délocalisations !
M. Frédéric Petit
Je ne vous parle pas de délocalisations, mais de personnes – et, parmi eux, des amis – qui se sont réveillées et qui ont travaillé, qui ont produit dans leur pays !
Il est beaucoup question d’argent dans notre discussion, mais, comme l’a dit M. le ministre, il ne faut pas oublier les enjeux politiques. Nous sommes des citoyens, nous avons d’ailleurs parlé tout à l’heure de solidarité. Nous nous livrons à de petits débats idéologiques franco-français alors que l’heure est grave pour l’Europe.
Mme la présidente
La parole est à Mme Constance Le Grip.
Mme Constance Le Grip
Nous voterons bien évidemment contre le sous-amendement et l’amendement.
Je souhaite évoquer quelques éléments factuels en réponse à M. le président de la commission des finances et à M. le rapporteur spécial de la commission des finances. Le rapporteur général a fort excellemment cité l’article 55 de notre Constitution, je n’y reviendrai donc pas. Je rappelle cependant qu’un certain de nombre de traités qui gouvernent nos règles budgétaires et économiques, qui sont aussi celles de nos partenaires – le traité de Lisbonne ou encore le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire –, ont été ratifiés par le Parlement français, dans le respect plein et entier de la Constitution.
Depuis quand la ratification d’un traité par le Parlement ne serait-elle pas valide, légitime, constitutionnelle ? Depuis quand violerait-elle la souveraineté populaire ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Depuis quand la Constitution ne pourrait-elle pas s’appliquer ?
Je dirai enfin que la décision sur les ressources propres à laquelle Charles de Courson a fait allusion est la voie par laquelle le Parlement français a souverainement voté, en février 2021, en faveur du cadre financier pluriannuel et de ses implications concrètes, année après année, sur la contribution française. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Le Gall.
M. Arnaud Le Gall
Voilà plusieurs fois que les ministres et le rapporteur général invoquent le droit international pour justifier l’obligation qui nous est supposément faite d’accepter l’explosion des montants versés par la France à l’Union européenne.
Mme Marie-Christine Dalloz
Pas le droit international, les traités internationaux !
M. Arnaud Le Gall
Or, comme l’a rappelé le président de la commission, ces traités ont été rejetés par le peuple français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Votre famille politique a piétiné leur vote et les a obligés à accepter ces traités par la voie parlementaire.
M. Philippe Juvin, rapporteur général
C’est la Constitution !
Un député du groupe LFI-NFP
C’est une honte !
M. Arnaud Le Gall
Nous ne l’oublierons jamais et les Français ne l’ont pas oublié ! Dès lors, quand vous leur dites que vous allez négocier, les Français ne vous font pas confiance, et ils ont raison !
Je prendrai deux exemples. D’abord, le Mercosur. Ici, vous faites mine de vous y opposer, mais on sait très bien que vous vous êtes aplatis à Bruxelles ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – M. François Cormier-Bouligeon s’exclame.) Vous n’avez rien fait pour vous opposer à la Commission européenne et les sorties du président de la République la semaine dernière, en marge de la COP30, confirment cette attitude.
Deuxième exemple : le deal entre Trump et von der Leyen. Pendant l’été, vous nous disiez qu’il s’agissait d’un mauvais accord et l’autre jour, alors que le collègue Maurel avait déposé une proposition de résolution européenne contre lui, vous l’avez rejetée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Un dernier mot : le droit international, quand il s’agit de Gaza, vous le piétinez… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. – Plusieurs députés du groupe LFI-NFP applaudissent ce dernier.)
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 3961.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 304
Nombre de suffrages exprimés 295
Majorité absolue 148
Pour l’adoption 112
Contre 183
(Le sous-amendement no 3961 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1045.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 320
Majorité absolue 161
Pour l’adoption 139
Contre 181
(L’amendement no 1045 n’est pas adopté.)
(Mme Agnès Pannier-Runacher applaudit.)
M. Emeric Salmon
Ils sont où, les Insoumis ?
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel, pour soutenir l’amendement no 1047.
M. Matthias Tavel
Il s’agit d’un amendement de bon sens qui prévoit, pour le calcul de la contribution à l’Union européenne, de tenir compte de la politique de la Banque centrale européenne. Si la politique de la BCE nous aidait à réduire le poids de la dette, notamment les taux d’intérêt, alors nous pourrions consentir un effort. Mais quand elle pratique une politique monétaire restrictive, comme actuellement, qui contribue à ce que les taux d’intérêt sur notre dette s’envolent, plutôt que de la protéger contre les attaques spéculatives, alors nous ne pouvons pas nous voir infliger la double peine. (Mme Constance Le Grip et M. Charles Sitzenstuhl s’exclament.)
Nous proposons donc de conditionner une partie du versement de notre contribution à l’Union européenne au fait que les institutions européennes agissent dans l’intérêt de la France et du peuple français, et non contre eux. C’est d’ailleurs le sens de tous les amendements que nous avons déposés, du no 1045 au no 1064, qui prévoient de conditionner le versement de 10 % de la contribution française à l’obtention de résultats politiques concrets et de sortir ainsi du bavardage du gouvernement ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Le sous-amendement no 3963 de M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial, est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement et l’amendement ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Monsieur Le Coq, honnêtement, ce que vous dites n’est pas sérieux. Je cite votre amendement no 1047 : « En l’absence d’annulation des titres de dettes françaises détenus par la Banque centrale européenne dans son bilan, [l]e prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est minoré de 10 %. » En pratique, vous dites donc à la BCE : « Continuez à acheter de la dette française. Mais attention ! Vous devez annuler cette dette, sinon nous paierons moins ! » À votre avis, que fera la BCE si vous jouez ainsi à lancer des ultimatums ? Elle arrêtera d’acheter de la dette française ! Nous faisons en quelque sorte partie d’une copropriété caractérisée par un certain rapport de force. Nous devons préserver ce rapport de force et respecter les règles.
J’ajoute que si la BCE n’existait pas, voilà probablement des mois que nous aurions dévalué notre monnaie nationale des dizaines de fois. Tel est le sujet ! Nous avons un bouclier, la BCE, qui nous protège et nous permet de continuer à être ce que nous sommes. S’il vous plaît, ne le fragilisez pas ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Avis défavorable sur le sous-amendement et l’amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Il est toujours étonnant de voir ce que les uns et les autres voudraient que la BCE fasse pour nous, voire contre nous, puisque, si nous annulions une partie de notre dette, nous assumerions un défaut, déciderions que cette dette n’existe plus et estimerions que nos engagements n’ont plus à être tenus.
Un autre parti politique que La France insoumise a parlé de la BCE : j’ai entendu M. Bardella annoncer il y a quelques jours que la solution à nos déficits publics était que la BCE achète de la dette française en échange d’un plan d’économies massif sur cinq ans.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Eh oui, excellent !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Je dis aux amis de M. Bardella que cette solution a un nom : la troïka. C’est précisément celle qui a été appliquée à la Grèce, au Portugal, à l’Irlande et à l’Espagne : des rachats de dettes ont eu lieu, qui ont effectivement été conditionnés à des plans de réduction des déficits sur cinq ans. Le problème, c’est que cela s’est fait au prix d’une perte totale de souveraineté et je suis très étonnée qu’un parti prétendument souverainiste cautionne un tel projet ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.) Le plan d’économies, ce ne sont pas les Grecs, les Espagnols, les Italiens ou les Irlandais qui l’ont décidé ; c’est la troïka – à savoir le Fonds monétaire international (FMI), la Commission européenne et la BCE – qui a déterminé ce que ces pays devaient faire en échange du rachat de leurs dettes.
On entend beaucoup parler de la BCE comme d’une solution à tous nos problèmes. On oublie simplement que, quand elle intervient, c’est elle qui décide. Si elle le fait, c’est donc elle qui décidera, et non vous, députés, parce que nous connaîtrons alors une crise économique majeure et nous serons sous pression. Notre responsabilité n’est pas d’envisager que les uns et les autres puissent annuler la dette, que nous puissions nous abstenir de financer nos obligations et qu’il y ait des solutions indolores et magiques à appliquer face à une situation qu’il appartient à notre génération, à notre gouvernement et au Parlement de résoudre.
Avis défavorable sur le sous-amendement et l’amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
La commission n’a pas étudié cet amendement. À titre personnel, je m’abstiendrai.
On ne parle pas souvent dans cet hémicycle de la BCE ou de la politique monétaire et c’est dommage. Seul le Rassemblement national essaie désespérément de le faire régulièrement car la politique monétaire a d’importantes conséquences sur nos taux d’intérêt souverains, notre économie, le financement de l’immobilier, celui des entreprises, bref sur tout ! Pourtant, nous ne pouvons jamais en parler. Seulement, voyez-vous, nous sommes souverainistes et nous nous efforçons donc d’aborder le sujet même quand cette politique est, malheureusement, confiée à une institution non démocratique.
Je saisis l’occasion qui m’est donnée de m’exprimer pour parler un peu de doctrine. On entend souvent dire, dans des médias très complaisants à l’égard du pouvoir, que le Rassemblement national aurait changé de position au sujet de l’euro, car nous aurions eu tort. Ce n’est pas vrai : nous n’avons pas du tout changé de position sur l’euro parce que nous avons eu tort… (« Ah ! » et sourires sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.) Eh oui, je savais que cela vous ferait réagir, mais j’aime vous donner ces petits plaisirs : il est l’heure du thé et voici votre petit goûter, de petits biscuits qui vous ouvriront l’appétit en attendant la suite ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe EPR. – M. Charles Sitzenstuhl brandit le règlement de l’Assemblée.)
Nous n’avons pas changé de position au sujet de l’euro : c’est l’euro qui a changé ! Pendant près de vingt ans, du fait des traités, monsieur le rapporteur général, il était impossible que la banque centrale rachète des titres souverains et intervienne sur le marché secondaire, et il était tout aussi impossible de rompre avec la politique de l’euro fort, qui est en réalité une politique de l’euro faible, puisqu’elle rend la monnaie trop chère pour que nous exportions.
Soudainement, quand l’euro a failli s’effondrer, tous vos traités, toutes vos règles, toute votre orthodoxie, tous vos mensonges sont partis à la poubelle ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.) Tout a changé puisque, pour sauver l’euro, il fallait bien tout lui sacrifier ! Nous avons donc embrassé le fait que vous ayez donné raison à Philippe Séguin, lorsqu’il s’exprimait ici, et à Marine Le Pen, lorsqu’elle s’opposait à Emmanuel Macron : il fallait changer les règles de l’euro pour sauver l’euro de lui-même ! Vous avez autorisé les banques centrales à racheter les dettes souveraines sur le marché secondaire, vous avez rompu avec la politique de l’euro fort et vous avez donc, en fait, répondu à nos aspirations les plus profondes : corriger les deux plus gros défauts de l’euro !
Ce faisant, vous l’avez mal fait, comme tout ce que vous faites : vous avez utilisé tout cet argent pour payer les baisses d’impôt de votre clientèle électorale et pour vous endetter ! (Protestations sur quelques bancs du groupe EPR.) Vous n’avez jamais diminué les dépenses ni investi dans l’avenir.
Il faut utiliser la BCE non pour satisfaire vos clientèles électorales, mais pour opérer les grandes transitions : rénovation des bâtiments, réindustrialisation de la France ou encore modernisation de l’agriculture. Grâce aux changements que vous avez décidés pour l’euro, nous allons faire tant de belles choses ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour un rappel au règlement.
M. Charles Sitzenstuhl
Il se fonde sur l’article 70, alinéa 2 : peut faire l’objet de peines disciplinaires tout membre de l’Assemblée « qui se livre à des manifestations troublant l’ordre ou qui provoque une scène tumultueuse ». (Sourires sur quelques bancs du groupe RN.)
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Tu n’aimes pas les biscuits ?
M. Charles Sitzenstuhl
Je parle de M. Tanguy, qui siège comme rapporteur spécial de la commission des finances et doit donc la représenter. Or depuis le début de l’examen de ce texte, il sort de son rôle et ne respecte pas la fonction qu’il occupe. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, SOC, EcoS et Dem. – Protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Tanguy doit respecter la fonction qui lui est dévolue au nom de l’ensemble des membres de la commission des finances et cesser de provoquer et d’invectiver les députés de cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, SOC, EcoS et Dem.)
Article 45 (appelé par priorité - suite)
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
L’amendement que nous examinons a surtout pour objet de mettre en exergue un élément de notre débat sur la dette : à la suite de la crise sanitaire et des décisions de la BCE, un prêt direct a été consenti aux États et la BCE détient désormais 20 % à 25 % de dette publique française. En réalité, la BCE, c’est physiquement la Banque de France. Je pense qu’il aurait été cohérent d’annuler cette dette de 20 % à 25 % qui nous oblige à payer des intérêt. Ce faisant, nous n’aurions fait défaut qu’à nous-mêmes, non aux marchés, et nous aurions perdu les intérêts que nous en retirons en économisant ceux que nous payons. Surtout, il aurait alors été plus difficile de cautionner des politiques de coupes budgétaires.
La crise sanitaire était une situation exceptionnelle et je vous rappelle que, dans l’histoire, des dettes exceptionnelles suscitées par de telles situations ont fait l’objet d’annulations. Je pense par exemple à la dette contractée par l’Allemagne après la guerre de 1939-1945, qui a été annulée au bout d’un moment. La question de l’annulation de la dette ne devrait pas être considérée comme iconoclaste. Nous devons la poser pour le bien de nos économies. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Petit.
M. Frédéric Petit
Je ressens la gravité du sujet dont nous discutons et, par contraste, notre débat, entre amendements puérils et bac à sable idéologique, est frustrant. (Protestations sur les bancs du groupe RN et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)
M. Emeric Salmon
C’est pas des insultes, ça ?
Mme la présidente
Les propos doivent être respectueux de toutes parts ! Poursuivez, monsieur Petit.
M. Frédéric Petit
Je dis ce que je pense. Je voudrais revenir à un point précis : le référendum de 2005 a rejeté une Constitution qui aurait remplacé les traités.
M. Bérenger Cernon
Vous ne l’avez même pas lue !
M. Frédéric Petit
Parmi ceux qui ont fait campagne pour le non, certains étaient pro-européens. Environ 20 % de l’électorat voulait que le projet européen se poursuive sur le fondement des traités, mais pas d’une Constitution. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP.) Il est donc logique que nous en soyons restés aux traités. Voilà ce que nous enseigne l’histoire.
Mme la présidente
La parole est à M. Daniel Labaronne.
M. Daniel Labaronne
Monsieur le président de la commission des finances, quand la BCE a-t-elle dérogé aux traités européens ?
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Ah ben ça alors !
M. Daniel Labaronne
Certainement pas en 2012, quand il s’est agi de sauver l’euro et qu’elle est intervenue en achetant des titres souverains, ni après la crise du covid, quand elle a fait de même !
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Incroyable d’entendre ça !
M. Daniel Labaronne
La meilleure preuve, c’est qu’à aucun moment la Cour de justice de l’Union européenne n’a estimé que celle-ci avait dépassé le cadre de ses prérogatives institutionnelles et invalidé ses décisions. Par conséquent, quand vous affirmez que la BCE s’est permis d’agir en dehors des traités, c’est factuellement faux. (Mme Sandra Marsaud applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Manuel Bompard.
M. Manuel Bompard
Tout d’abord, concernant la dette, notamment celle contractée pendant le covid, je pense qu’on peut avoir un débat respectueux et sérieux sans s’envoyer au visage des arguments dignes du bac à sable et j’assume de défendre l’idée que la Banque centrale européenne aurait pu en mettre une partie au frigo pour la laisser fondre avec l’inflation ! Ce débat a existé à l’époque parmi les économistes, certains pensant que c’était une idée intéressante. (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.) Si on l’avait fait, vous ne diriez pas aujourd’hui que le déficit est tellement important qu’il va falloir faire les poches aux Françaises et aux Français pour rembourser les effets de la politique qui a été menée depuis des années et des années. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.) Vous avez le droit de défendre cette politique, mais on peut avoir un débat respectueux sur le sujet !
Deuxièmement, à chaque fois qu’on vous fait des propositions sur l’Union européenne, vous nous dites : « C’est impossible, mais faites-nous confiance, on va négocier. »
Mme la présidente
Veuillez conclure, monsieur Bompard.
M. Manuel Bompard
Je termine en rappelant que Mme la ministre avait dit l’année dernière qu’elle s’était battue pour qu’il n’y ait plus de rabais… Et il y en a toujours ! Peut-être faudrait-il enfin changer de méthode parce que sinon, l’année prochaine… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. – De nombreux députés du groupe LFI-NFP applaudissent ce dernier.)
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 3963.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 292
Nombre de suffrages exprimés 281
Majorité absolue 141
Pour l’adoption 101
Contre 180
(Le sous-amendement no 3963 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1047.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 326
Nombre de suffrages exprimés 223
Majorité absolue 112
Pour l’adoption 43
Contre 180
(L’amendement no 1047 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Maudet, pour soutenir l’amendement no 1046, qui fait l’objet du sous-amendement no 3964.
M. Damien Maudet
Emmanuel Macron disait pendant la crise du covid que déléguer nos prérogatives en matière d’alimentation était une folie et aujourd’hui il est prêt à laisser passer l’importation de centaines de milliers de denrées alimentaires depuis l’autre bout du monde. Il faut réduire notre participation financière à l’Union européenne si celle-ci cherche à réduire notre souveraineté alimentaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Quand nous nous sommes rendus sur les points de blocage tenus par des agriculteurs, le premier point qui revenait, c’était la concurrence déloyale via le libre-échange. Ils ont raison : chez moi, en dix ans, on a perdu un quart de nos fermes bovines. Et la Commission européenne s’apprête à signer un traité de libre-échange avec le Mercosur qui va conduire à importer des centaines de milliers de denrées que l’on produit déjà chez nous ! C’est dangereux pour les éleveurs, que ce soit chez moi à Nedde ou à Saint-Léonard-de-Noblat, où ils vont être mis en concurrence avec des fermes 15 000 fois plus grandes.
C’est dangereux aussi pour notre santé, avec l’arrivée de cinquante et une molécules autorisées au Brésil alors qu’elles sont interdites dans l’Union européenne. Dangereux pour l’environnement, puisque 1 kilo de bœuf produit au Brésil pollue quatre fois plus que 1 kilo de bœuf produit en France. Dangereux pour notre démocratie, si on outrepasse l’opposition du Parlement français au Mercosur. Vous disposez, avec cet amendement, d’un vrai instrument pour agir contre ce traité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Le sous-amendement no 3964 de M. le rapporteur spécial est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Cette fois-ci, vous souhaitez inscrire dans la loi que quand nous ne sommes pas satisfaits d’un accord – qui relève en l’occurrence, je le rappelle tout de même, de la compétence exclusive de l’Union européenne –, une manière de s’en sortir serait d’imposer aux autres États membres un rabais sur notre contribution financière. On peut voter la faculté de le décider unilatéralement, bien entendu, mais cela ne marchera évidemment pas. L’Union européenne, ce n’est pas une cour d’enfants sages et gentils : c’est un rapport de force entre États, parce que les relations entre États sont toujours des rapports de force, y compris au sein de l’Union européenne. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Danièle Obono
Et alors ? Quand est-ce que vous l’exercez ce rapport de force ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Si vous voulez ne pas avoir à subir un tel accord international, il faut peser en Europe, c’est-à-dire réunir à vos côtés quatre États membres représentant 35 % de la population pour s’opposer à une décision prise à la majorité qualifiée. La vraie réponse à un accord international qui ne vous convient pas, c’est de faire en sorte que la France soit forte au Conseil et au Parlement européen ! Affirmer que l’on pourrait y parvenir en réduisant notre participation financière, cela ne marche pas, c’est juste des histoires. Avis défavorable.
M. Manuel Bompard
Vous ne voulez pas le mener ce rapport de force !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
La ministre des comptes publics l’a dit clairement tout à l’heure : quand d’autres ont négocié des rabais lors des débats sur le cadre financier pluriannuel, nous, nous nous sommes battus pour la PAC, pour les revenus des agriculteurs, pour les aides à l’investissement et pour les aides à l’installation, afin d’assurer le renouvellement des générations.
M. Alexandre Sabatou
Arrêtez !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Je ne peux pas laisser dire que le France n’est pas en train de se battre pour protéger nos agriculteurs dans le cadre des négociations avec le Mercosur. Le rapporteur général l’a très bien dit : ce n’est pas en s’isolant sur un strapontin au sein du Conseil européen, ni a fortiori en se mettant en infraction,…
M. Manuel Bompard
On n’a pas le choix !
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
…qu’on va réussir à mobiliser nos partenaires pour entrer dans un rapport de force avec la Commission européenne. Ce n’est pas ainsi que nous avons obtenu une clause de sauvegarde permettant de freiner les importations excessives qui déstabilisent nos filières ! Pour pouvoir nous battre sur les clauses miroirs, sur les pesticides et sur l’alimentation animale, il faudra bien disposer de forces de contrôle – dont le financement suppose des fonds européens – qui iront vérifier comment cela se passe dans les pays exportateurs, mais aussi dans les pays importateurs de l’Union. Cela relève de la diplomatie que nous mettons en œuvre !
Voilà le rapport de force que nous menons aujourd’hui pour défendre nos agriculteurs. Et se mettre en infraction, ce serait de l’argent en moins pour eux, pour leurs investissements et pour les accompagner dans le renouvellement des générations. Voilà très concrètement l’impact qu’aurait l’adoption de cet amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
Cet amendement n’a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, j’y suis favorable, ne vous en déplaise. Et je reste parfaitement dans mon rôle ! La vraie question serait de savoir pourquoi, dès que j’essaie d’ouvrir la bouche en tant que rapporteur spécial, il m’est très difficile de pouvoir m’exprimer – il semble que l’instant présent soit une exception ! (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et SOC.) Quand des rapporteurs pour avis donnent la ligne des partis de gauche, celle des partis centraux ou bien encore celle de DR, les députés du Rassemblement national ne protestent pas. Mais évidemment, comme mes paroles vous déplaisent, vous inventez des règles pour les empêcher. Cela ne me dérange pas, et je continuerai à m’exprimer ! Je considère, en bon souverainiste, que la main qui donne est supérieure à la main qui reçoit : la France donne, donc la main qui reçoit n’a qu’à obéir. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Benoît Biteau.
M. Benoît Biteau
Dans cet hémicycle, il y a eu une unanimité contre l’accord de libre-échange avec le Mercosur, c’est incontestable, mais si on veut vraiment être efficace pour lutter contre cet accord, il faut contribuer financièrement à l’échelon européen à partir de logiques de solidarité. Et à l’échelon de l’Union européenne, la solidarité est nécessaire pour lutter contre le dérèglement climatique et contre l’effondrement de la biodiversité. C’est en luttant sur ces deux fronts que nous pourrons préserver notre souveraineté alimentaire. Si nous sommes capables de la maintenir, nous serons plus forts face aux pays du Mercosur pour réclamer une exception agriculturelle dans les accords de libre-échange. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et LFI-NFP. – M. Emmanuel Maurel applaudit également.) Mais on ne pourra pas le faire en dehors de l’Union européenne : nous devons nous engager dans des solidarités pour éviter de mettre les paysans en concurrence au sein de l’Union et en dehors. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Est-il sérieux de préconiser l’annulation de la part de la dette de l’État français détenue par la Banque centrale européenne, ladite dette s’élevant au total à 2 700 milliards ? La BCE en détient 20 % à 25 %, c’est-à-dire entre 500 milliards et 600 milliards. L’amendement propose de minorer de 10 % la contribution de la France au budget européen, le sous-amendement proposant même 33 %. Mais annuler les titres de la dette française dans le bilan de la Banque centrale européenne signifierait la faillite de celle-ci, à charge pour elle de demander aux États membres de la recapitaliser – États membres dont nous faisons partie… Les autres États pourraient eux aussi demander l’annulation de leur part de dette détenue par la Banque centrale européenne. Cet amendement et son sous-amendement ne tiennent pas. Je m’étonne, mes chers collègues, que vous puissiez semer de telles illusions !
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Sabatou.
M. Alexandre Sabatou
Je note, non sans plaisir, que pendant trois ans, le Rassemblement national était le seul à parler de ce tabou que constitue le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et GDR),…
M. Nicolas Sansu
Ce n’est pas vrai ! Menteur !
M. Alexandre Sabatou
…et que depuis notre bon sens a infusé dans l’hémicycle.
Chers collègues européistes, j’ai une question : mais où sont les bienfaits de l’Union européenne ? Sont-ils devant nous dans l’hémicycle ? Depuis deux heures que nous discutons de l’article 45, vous avez été incapables de nous donner de bonnes raisons de ne pas baisser la contribution de la France au budget européen. Vous parlez de la PAC, mais depuis quand vous souciez-vous des agriculteurs ? Vous avez travaillé main dans la main avec la Commission européenne pour faire avancer le Mercosur. Et maintenant, vous faites semblant de vous racheter une virginité en vous opposant au dernier moment à cet accord qui va signer la mort de tous nos agriculteurs. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe RN.)
Monsieur le ministre, vous expliquez que la France veut mettre fin au système des rabais, mais vous avez échoué ! Dans le cadre d’un budget marqué par la crise financière et le surendettement, après sept années de gestion catastrophique, il serait temps que nos voisins nous donnent un coup de main par solidarité européenne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Le Gall, puis nous passerons à la mise aux voix.
M. Arnaud Le Gall
Monsieur le ministre, vous dites qu’il faut un rapport de force au sein de l’Union européenne, notamment s’agissant du Mercosur. Mais vous n’avez rien fait ! Depuis trois ans, vous nous enfumez ! (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) On sait très bien pourquoi vous avez depuis longtemps, dans cette bataille, choisi l’industrie des services au détriment de l’agriculture : les services vont être bénéficiaires de l’accord et l’agriculture sera sacrifiée. Vous êtes dans la roue de l’Allemagne, en l’occurrence. En 2023, lors du débat sur le Mercosur qui s’est déroulé ici même, vous nous avez vendu les prétendues clauses miroirs et nous avions déjà dit, à l’époque, qu’elles ne valaient rien. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) On ne peut pas, par exemple, vérifier si un bovin brésilien s’est vu administrer des hormones de croissance. Et de toute façon, il n’y a plus de services de douane dignes de ce nom à l’entrée de l’Europe.
Je rappelle aussi qu’à l’époque, quand nous avons demandé au gouvernement de refuser le découplage de l’accord, pour que les parlements nationaux soient saisis, c’est le seul point sur lequel le ministre a refusé de s’engager.
Mme la présidente
Merci de conclure, cher collègue !
M. Arnaud Le Gall
Et voilà qu’à présent vous essayez de nous vendre des clauses de sauvegarde qui sont encore plus cosmétiques que les clauses miroirs ! (Mêmes mouvements.) Vous savez très bien qu’elles n’auront aucune chance d’empêcher l’éradication… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. – Plusieurs députés du groupe LFI-NFP applaudissent ce dernier.)
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 3964.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 279
Nombre de suffrages exprimés 277
Majorité absolue 139
Pour l’adoption 101
Contre 176
(Le sous-amendement no 3964 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1046.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue 158
Pour l’adoption 144
Contre 170
(L’amendement no 1046 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Gabrielle Cathala, pour soutenir l’amendement no 1051.
Mme Gabrielle Cathala
Comme tous les amendements notre groupe, il s’agit d’un amendement de bon sens. L’objectif ici est de réduire de 10 % notre contribution à l’Union européenne tant qu’aucune sanction ne sera prononcée à l’encontre d’Israël et de son gouvernement (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs du groupe RN) et tant que l’accord d’association entre l’UE et Israël ne sera pas suspendu.
L’Union européenne se cache derrière la prétendue réussite du plan Trump, qui est un plan colonial. Et je rappelle à tout le monde ici que depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, en moyenne huit Palestiniens sont assassinés chaque jour par Israël – encore deux enfants ont été tués à balles réelles cet après-midi en Cisjordanie. Tout ce qui avait été annoncé par Mme van der Leyen, c’est-à-dire la possibilité de geler certaines aides destinées à la société civile israélienne, la suspension partielle de l’accord d’association ou encore des sanctions à l’encontre de deux ministres israéliens d’extrême droite, n’a pas été suivi d’effet. Ces sanctions ne sont jamais entrées en vigueur !
On voit ici la grande différence avec la manière dont est traitée la Russie : elle commet elle aussi des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité et a fait l’objet de dix-neuf trains de sanctions à ce jour, contre zéro à l’encontre d’Israël. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Une députée du groupe RN
Et pas un mot du Hamas !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
À ma connaissance, et à la différence de ce que ses auteurs écrivent faussement dans l’exposé sommaire de l’amendement, l’État d’Israël n’a pas été condamné pour génocide. Vous utilisez ce débat sur le financement de l’Union européenne à des fins militantes. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Caroline Yadan.
Mme Caroline Yadan
Encore une fois, la meute LFI s’acharne à déposer des amendements insensés nés de sa haine obsessionnelle et pathologique d’Israël. Quel degré de monomanie faut-il pour vouloir réduire de 10 % la contribution française à l’Union européenne si celle-ci ne rompt pas l’accord qui l’unit depuis plus de vingt-cinq ans à Israël ? Cet accord est pourtant essentiel. Il ouvre à la France l’accès à l’une des puissances d’innovation les plus dynamiques du monde, notamment en matière scientifique et médicale. C’est grâce à cette coopération, par exemple, que le projet du professeur Haick sur la détection non invasive des cancers a pu impliquer six pays européens ! Mais LFI se moque de l’intérêt national. Elle préfère lécher les bottes des mollahs, faire l’apologie du terrorisme, reprendre les rhétoriques antisémites millénaires et nier les massacres ciblés de milliers de Palestiniens par le Hamas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) « One by one », dit votre Lady Gaza sur les réseaux sociaux. Le sort des Palestiniens ne vous intéresse que pour déverser votre lie contre le seul État juif, suivant l’agenda mortifère des islamistes dont vous convoitez les suffrages.
Mme Alma Dufour
Raciste !
M. Erwan Balanant
Ce n’est pas la peine d’utiliser un tel mot !
Mme Caroline Yadan
Votre amendement n’a aucun sens budgétaire.
Mme la présidente
Veuillez conclure, madame Yadan !
Mme Caroline Yadan
Il transforme une corruption morale en éthique politique. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il n’est qu’une provocation de plus… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Quelques députés du groupe EPR applaudissent cette dernière.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Gabrielle Cathala.
Mme Gabrielle Cathala
Ce que nous venons d’entendre de la part de Mme Yadan illustre bien ses traditionnelles prises de parole racistes (« Et vous, alors ? » sur les bancs du groupe RN) et pathétiques dès qu’il s’agit du peuple palestinien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Les engagements internationaux de la France l’obligent à respecter la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948, le statut de Rome établissant la Cour pénale internationale (CPI) (Mêmes mouvements) et la commission d’enquête internationale indépendante du Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU, qui a établi que quatre des cinq critères d’un génocide étaient réunis.
Mais elle pratique une politique du deux poids deux mesures permanente, comme lorsque M. Macron lui-même répond à M. Meyer Habib pour lui indiquer que le salon Milipol pourra accueillir dans quelques jours trente-huit exposants israéliens en dépit de tous les engagements pris par notre pays (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP), comme lorsqu’un colloque est interdit par le ministre de l’enseignement supérieur tandis qu’un autre, au Sénat, est organisé par Elnet et financé par le gouvernement de M. Netanyahou… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Les députés du groupe LFI-NFP applaudissent cette dernière.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1051.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 304
Nombre de suffrages exprimés 304
Majorité absolue 153
Pour l’adoption 34
Contre 270
(L’amendement no 1051 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel, pour soutenir l’amendement no 1055.
M. Matthias Tavel
Il vise lui aussi à mettre la contribution de la France en adéquation avec ses engagements internationaux et avec le respect de la dignité humaine, valeur sans cesse mise avant par les défenseurs de l’Union européenne. Il s’agit une nouvelle fois d’utiliser les milliards d’euros que la France verse chaque année à l’Union européenne sans être payée en retour comme un élément de négociation pour obtenir des modifications dans la politique menée par l’UE.
En l’espèce, il est question du sauvetage, dans la Méditerranée ou dans la Manche, des personnes qui y risquent leur vie. Souvent, même, elles la perdent, ce qui est inacceptable et honteux, y compris pour les gens de mer, quelles que soient leurs opinions politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Venir en aide à ceux qui risquent la noyade et la mort et tenter de les sauver est un devoir moral. Tant que l’Union européenne ne respecte pas cette exigence minimale d’humanité, il serait normal que la France réduise son versement et conserve les moyens financiers d’organiser elle-même ces sauvetages. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Vous souhaitez la suppression de Frontex ou, qu’à défaut, la participation française au financement de l’Union européenne baisse de 10 %. Dans l’UE, les choses ne fonctionnent pas comme cela. Ce n’est pas en disant à nos partenaires qu’on va leur casser la figure s’ils ne font pas ce qu’on veut qu’on obtient la décision que l’on souhaite. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) C’est souvent la vision française mais, en réalité, la collégialité prime.
Sur le fond, vous voulez la suppression pure et simple de Frontex, une agence qui surveille les frontières de l’Union européenne, une mission dont nous avons évidemment besoin qu’elle soit remplie. Avis défavorable.
M. Nicolas Sansu
D’habitude, M. Juvin demande qu’on supprime des agences !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Défavorable, pour les mêmes raisons que celles avancées par M. le rapporteur général.
Mme la présidente
La parole est à M. Bruno Fuchs.
M. Bruno Fuchs
Il faut arrêter de dire que l’Union européenne ne sert à rien et de vouloir diminuer ses recettes ! Même si l’action de l’UE doit être plus efficace, j’invite tous ceux qui, malgré la démonstration apportée depuis des heures, n’ont pas encore compris les bénéfices qu’elle apporte à notre pays à faire un petit tour au Royaume-Uni. (M. Alexandre Sabatou proteste.) Le bilan du Brexit, c’est 3 000 euros de PIB par habitant en moins, 210 livres en plus en deux ans sur la facture alimentaire des ménages, une hausse du coût de la vie une fois et demie plus élevée pour les 10 % les plus pauvres que pour les plus riches, 36 milliards de baisse des recettes fiscales, une rétractation de l’économie de 140 milliards de livres et 1,8 million d’emplois non créés. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Philippe Ballard
Et quel est le bilan de Macron ?
M. Bruno Fuchs
Si vous n’avez pas compris l’aspect positif de l’UE, allez au Royaume-Uni voir les effets du Brexit, de la souveraineté et de l’incapacité à maintenir des relations multilatérales avec le reste de l’Europe ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Danièle Obono.
Mme Danièle Obono
Le rapporteur général n’a visiblement pas lu l’intégralité de notre amendement ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Nous voulons modifier les missions premières de Frontex pour la réorienter vers le sauvetage. En effet, Frontex, l’une des agences de l’Union européenne dotées du plus gros budget, est sous le coup d’enquêtes pour des malversations et surtout des exactions. Les violations des droits humains auxquelles elle se livre, prouvées par des ONG, rendent inacceptable le fait que des agents et de l’argent français participent à son action, c’est-à-dire contribuent à aider les passeurs et les seigneurs de la guerre libyens qui arrêtent les migrants, les réduisent en esclavage et les torturent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il est honteux qu’à travers Frontex, l’Union européenne ait soutenu les Forces de soutien rapide (FSR) au Soudan, les FSR dont nous avons parlé la semaine dernière lors des questions au gouvernement. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Les députés du groupe LFI-NFP applaudissent cette dernière.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1055.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 300
Nombre de suffrages exprimés 299
Majorité absolue 150
Pour l’adoption 37
Contre 262
(L’amendement no 1055 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Feld, pour soutenir l’amendement no 1064, qui fait l’objet du sous-amendement no 3967.
Mme Mathilde Feld
Il vise à minorer de 10 % le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne tant que n’aura pas été mise en place une PAC tournée vers l’agriculture paysanne et biologique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Nous refusons que l’argent des Français soit mis au service de très grandes exploitations et de la concentration des terres agricoles par des groupes agro-industriels et financiers pratiquant une agriculture intensive qui détruit les sols et est néfaste à la santé des travailleurs agricoles comme à celle des consommateurs.
Les fermes les plus favorisées, 20 % de l’ensemble des exploitations, concentrent 80 % des subventions. Pendant ce temps, en France, plus d’un quart des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté. Cette précarité provoque un désastre social sans précédent. Tous les deux jours, un agriculteur se suicide. À l’inverse de ce qui est fait, nous pourrions décider de garantir des prix rémunérateurs aux agriculteurs et d’encadrer les marges de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution. La France a perdu 100 000 fermes en dix ans, notamment à cause des difficultés d’installation liées à la concentration croissante des terres dans les mains de grands groupes. Il faut inverser la tendance en renforçant les aides à l’installation de jeunes ou nouveaux agriculteurs et en favorisant les projets agroécologiques. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Les députés du groupe LFI-NFP applaudissent cette dernière.)
Mme la présidente
Le sous-amendement no 3967 de M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial, est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Défavorable sur les deux.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Cet amendement est totalement contre-productif.
M. Jean-Claude Raux
Pour quelle agriculture ?
M. Benjamin Haddad, ministre délégué
Avec 9,5 milliards d’euros reçus par ses agriculteurs chaque année, la France est le premier bénéficiaire de la PAC. Si demain nous annonçons aux autres États membres et à la Commission que nous arrêtons de payer, leur réaction immédiate sera de donner moins de moyens à la PAC, donc aux agriculteurs français. C’est la France qui porte l’ambition de la souveraineté alimentaire et qui se bat dans les négociations du cadre financier pluriannuel, pour maintenir les montants et les spécificités d’une PAC structurée en deux piliers. Menacer de réduire la contribution de la France revient à nous menacer nous-mêmes.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Philippe Tanguy, rapporteur spécial
La commission ne s’est pas exprimée à propos de cet amendement, sur lequel je m’abstiendrai, car je le trouve imprécis.
Je profite de cette dernière prise de parole de l’après-midi pour répondre à deux arguments développés sur l’article 45. Le groupe DR a déclaré ne pas vouloir d’élargissement de l’Union européenne. Or les crédits que nous sommes appelés à voter vont financer une hausse de 20 % des dépenses liées à un tel élargissement. Sans que je fasse plus de commentaires, chacun tirera les conséquences de cette remarque.
Le groupe écologiste a indiqué ne pas souhaiter de renforcement des contrôles aux frontières. Or les crédits alloués aux opérations de contrôle en Méditerranée vont augmenter de 694 %. Pour ne déplaire à personne, je ne tirerai de ce chiffre aucune conclusion et je laisserai à chacun le soin de mettre en regard les propos tenus lors de la discussion générale et l’utilisation prévue des sommes sur lesquelles nous sommes appelés à nous prononcer.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue à la demande du groupe DR. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) La suspension est de droit.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures dix.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
La commission et le gouvernement ont donné leurs avis sur l’amendement no 1064 et sur le sous-amendement no 3967.
Plusieurs orateurs souhaitent encore s’exprimer. Je donnerai la parole à certains d’entre eux, mais non à tous, car il nous faut procéder aux scrutins. (Exclamations sur plusieurs bancs.) Je le fais en accord avec M. le président Coquerel.
La parole est à Mme Danielle Brulebois.
Mme Danielle Brulebois
Ce qui ressort de ce que nous avons entendu cet après-midi, c’est, hélas, que tous ces amendements et ces sous-amendements sont très anti-européens. Des propos comme ceux de Mme Lejeune sont graves. Elle voudrait faire croire que l’Union européenne ne serait qu’une alliance néolibérale au service du capitalisme alors que mardi dernier, le 11 novembre, nous étions tous recueillis devant le monument aux morts. Reconnaissez au moins, chers collègues de gauche, que l’idée de Jean Monnet et de Robert Schumann de rendre impossible la guerre entre les États membres, en liant leurs industries les unes aux autres, était géniale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.) Et il faut reconnaître qu’ils ont réussi ! Plutôt que de mettre en concurrence les nations et de les opposer, travaillez donc à l’amitié entre les peuples. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
M. Pierre Cazeneuve
Très bien, Danielle !
Mme Danielle Brulebois
Comme d’autres visionnaires avant lui, Victor Hugo disait la nécessité d’une Europe unie.
M. Alexis Corbière
Victor Hugo, allons-y !
Mme Danielle Brulebois
Chers collègues de gauche, travaillez donc à l’union, à la solidarité, à l’amitié entre les peuples ! Quelle image donnez-vous à notre jeunesse, qui s’investit dans le programme Erasmus, qui veut la construire, cette Europe, unie et forte, solidaire et fraternelle ! (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pascal Lecamp.
M. Pascal Lecamp
Je ne prends pas souvent la parole, mais, en Européen convaincu, je tenais à dire que les quatre ou cinq amendements que nous venons d’examiner n’avaient absolument aucun sens. Je me demande même pourquoi ils n’ont pas été déclarés irrecevables, ne serait-ce que pour gagner un peu de temps et espérer voir le bout de cette discussion budgétaire. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Je m’en tiendrai au dernier, qui concerne l’agriculture. Face au constat que vous faites, mieux vaut, me semble-t-il, travailler avec nos députés européens à construire la prochaine PAC, pour la période 2028-2034,…
Un député du groupe RN
Ça ne sert à rien !
M. Pascal Lecamp
…en vue d’y intégrer la promotion d’une alimentation saine et de la production biologique – voilà qui répondrait aux attentes de la nation –, plutôt que de déposer des amendements qui ne servent à rien.
Nous sommes quelques-uns à avoir déposé des amendements à l’article 10 afin de soutenir la filière bio et d’avancer vers une alimentation meilleure aux côtés de nos agriculteurs. Je vous invite à voter en faveur de ces amendements intelligents, de nature à faire progresser les choses. (Mme Maud Petit applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel.
M. Matthias Tavel
Monsieur le ministre, collègues macronistes, je veux vous remercier sincèrement d’avoir fait une démonstration. Vingt ans après 2005, le disque rayé est toujours le même : il faudrait approuver l’Union européenne, quoi qu’elle dise, quoi qu’elle fasse, comme s’il s’agissait pour vous d’une vérité révélée, dont la remise en cause constituerait une sorte d’insupportable blasphème. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Eh bien, souffrez ce rappel : le peuple français a déjà dit non. En 2005, il n’a pas seulement rejeté un traité constitutionnel, mais tous les traités que ce texte reprenait. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Et quand, de notre proposition de conditionner le versement de la contribution française, on vous entend dire « ce n’est pas comme ça qu’on fait ! », le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas en faisant comme vous faites que l’on va y arriver. Car tout ce que vous faites, c’est servir de paillasson à Mme von der Leyen ! Encore une fois, si vous ne savez pas faire, partez ! Nous le ferons à votre place. (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 3967.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 284
Nombre de suffrages exprimés 277
Majorité absolue 139
Pour l’adoption 99
Contre 178
(Le sous-amendement no 3967 n’est pas adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1064.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 325
Nombre de suffrages exprimés 325
Majorité absolue 163
Pour l’adoption 46
Contre 279
(L’amendement no 1064 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 45.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 334
Nombre de suffrages exprimés 333
Majorité absolue 167
Pour l’adoption 178
Contre 155
(L’article 45 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR et sur quelques bancs du groupe SOC. – Mme Élisabeth de Maistre et M. le président de la commission des finances, applaudissent également.)
Après l’article 9 (suite)
Mme la présidente
Nous reprenons l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 9. Ce matin, l’Assemblée s’est arrêtée à l’amendement no 1698.
La parole est à M. Pierrick Courbon, pour le soutenir.
M. Pierrick Courbon
Il vise à garantir aux fédérations d’associations d’intérêt général, les fameuses têtes de réseau, la possibilité de recourir au mécénat et au mécénat de compétences comme l’ensemble des autres associations. Ces structures de mutualisation et de support jouent un rôle majeur pour permettre aux associations qu’elles fédèrent de mener à bien l’exécution de leurs missions. Le soutien aux têtes de réseau s’avère d’autant plus nécessaire dans la période actuelle, où nos associations rencontrent d’importantes difficultés ; nous proposons donc de clarifier le code général des impôts en ce sens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Les fédérations d’associations peuvent déjà bénéficier de l’agrément fiscal permettant de recevoir des dons défiscalisés dès lors qu’elles sont reconnues d’utilité publique. Votre amendement est donc satisfait : demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Après avoir abordé les grandes questions européennes, nous changeons d’horizon : nous revenons au débat de ce matin. Vous proposez que la réduction d’impôt ne soit plus conditionnée à la réalisation de missions d’intérêt général. J’ai déjà décrit le cadre existant : pour se constituer en association, il faut se rendre en préfecture et y déposer ses statuts ; si l’objet social le permet, on peut demander à la direction générale des finances publiques (DGFIP) le droit de faire bénéficier ses donateurs d’une réduction d’impôt. Dans le cas où l’administration fiscale donne une réponse positive, le caractère d’intérêt général de l’association est reconnu et c’est ce motif qui fonde juridiquement le droit à la réduction d’impôt.
Le dispositif que vous proposez irait bien au-delà. Il serait en outre très difficile à contrôler puisque l’administration fiscale et l’organisme fédératif ou coordinateur ne seraient pas en mesure de vérifier que tous les organismes membres du regroupement sont bien éligibles au mécénat. La mesure me paraît donc très complexe à appliquer, en plus de ne pas être conforme à l’esprit de cette réduction d’impôt. Je comprends pourquoi vous la proposez, mais je ne pense pas qu’elle soit ni applicable ni franchement novatrice. Retrait ou défavorable.
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1698, par les groupes Ensemble pour la République et Socialistes et apparentés ; sur les amendements nos 1211 et 280, par les groupes Ensemble pour la République et Union des droites pour la République.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierrick Courbon.
M. Pierrick Courbon
Non, madame la ministre, il ne s’agit pas d’élargir la possibilité de recourir au mécénat aux associations qui ne seraient pas reconnues d’intérêt général ! Ce n’est pas du tout le sens de notre amendement, qui s’attache simplement à clarifier la loi. Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le rapporteur général – je note d’ailleurs une incohérence entre votre avis, selon lequel l’amendement serait satisfait, et celui de la ministre, qui dit qu’il va beaucoup trop loin –, dans les faits, en fonction des territoires et de l’identité du demandeur, l’administration fiscale n’apprécie pas de la même manière les demandes d’éligibilité au mécénat et au mécénat de compétences émanant des têtes de réseau, c’est-à-dire des associations qui fédèrent d’autres associations.
Si nous proposons de clarifier ainsi le code général des impôts, c’est précisément pour garantir une égalité de traitement entre toutes les têtes de réseau sur l’ensemble du territoire. Il ne s’agit aucunement d’aller plus loin : nous voulons simplement nous assurer que l’ensemble des structures fédératrices d’associations, où qu’elles soient, puissent bénéficier du même traitement par l’administration fiscale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Si une fédération est une association d’intérêt général, alors elle peut bénéficier du dispositif ; si elle est un groupement d’associations elles-mêmes d’intérêt général, alors ce sont les associations qui la composent qui peuvent en bénéficier. En ce sens, l’amendement est satisfait. Le droit est clair ; s’il existe des situations qui ne le sont pas, signalez-les moi ! Je dis juste qu’une fédération qui n’est pas d’intérêt général ne peut pas prétendre à une réduction d’impôt sur les dons qu’elle reçoit. C’est sur ce point que je vous ai répondu.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1698.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 248
Nombre de suffrages exprimés 247
Majorité absolue 124
Pour l’adoption 99
Contre 148
(L’amendement no 1698 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 1211 et 280, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 1211.
M. Alexandre Allegret-Pilot
Il vise à exclure du bénéfice de la solidarité nationale les associations qui facilitent la venue et le maintien sur le territoire de personnes en situation irrégulière.
Mme Sophie Taillé-Polian
C’est de la solidarité ! On sauve des vies !
M. Alexandre Allegret-Pilot
Deux cas de figure existent. Le premier concerne les associations qui font venir des étrangers en situation irrégulière sur le territoire : c’est illégal. Vous allez me dire que le préfet ou le ministère de l’intérieur dissoudra une association qui se rendrait coupable de tels agissements, mais c’est rarement le cas. Nous voulons donc donner à la DGFIP un outil pour qu’elle s’assure de la conformité des dons.
Le deuxième cas de figure est celui d’associations qui facilitent le maintien sur le territoire de personnes en situation irrégulière ; c’est légal, certes, d’après la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais il y a là un problème de cohérence. Le contribuable ne peut pas financer d’une part la lutte contre la présence de personnes en situation irrégulière et d’autre part leur maintien ou la facilitation de leur maintien sur le territoire. Dans une voiture, on ne peut pas freiner et accélérer en même temps ! Le « en même temps » est ici vraiment à son paroxysme. Il s’agit donc d’un amendement de cohérence et d’efficacité, que je vous invite à soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Dufosset, pour soutenir l’amendement no 280.
M. Alexandre Dufosset
Je vais défendre l’amendement de mon collègue Chenu et en profiter pour soutenir les deux suivants, nos 282 et 281, car ils résultent de la même philosophie.
Mme Sabrina Sebaihi
Et quelle philosophie !
M. Maxime Laisney
C’est un bien grand mot !
M. Alexandre Dufosset
Ils visent uniquement les associations, fondations et organismes qui, directement ou indirectement, faciliteraient l’entrée ou le séjour irrégulier d’étrangers, en violation de la loi. Pour ce faire, ils complètent l’article 200 du code général des impôts en les privant de la réduction d’impôt prévue. Il ne s’agit en aucun cas de remettre en cause les subventions ou les réductions d’impôt dont bénéficient les nombreuses associations qui agissent pour l’intérêt général ; le groupe Rassemblement national considère simplement que la solidarité nationale doit être réservée aux associations qui respectent la loi, pas à celles qui la contournent. C’est une mesure de bon sens, de responsabilité et de respect envers les associations exemplaires comme envers les contribuables. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Sur les deux amendements en discussion commune – et pas les suivants –, l’avis est défavorable. Nous en avons déjà longuement parlé : la réduction d’impôt n’est possible que pour des associations qui sont reconnues d’utilité publique. Des critères existent !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Nous avons déjà exposé ce matin ce qui caractérise une association d’intérêt général. Je rappelle que le but humanitaire, le but social et l’assistance aux personnes vulnérables sont des motifs qui fondent la reconnaissance d’intérêt général d’une association par notre droit. Par ailleurs, je vous rappelle que le 6 juillet 2018, le Conseil constitutionnel a instauré un « principe de fraternité » (M. Erwan Balanant applaudit)…
Mme Sabrina Sebaihi
Vous devriez le savoir, c’est au fronton de toutes les mairies !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
…dont « il découle […] la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national ». Ce dont vous parlez est donc une question de droit public, civil ou pénal – et non, je vous l’ai dit, de droit fiscal. Des associations sont interdites si elles mènent des actions illégales ; elles sont alors dissoutes…
Mme Ayda Hadizadeh
Voilà !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
…et la DGFIP demande évidemment le remboursement des sommes obtenues sous forme de dons.
Mme Ayda Hadizadeh
Eh oui !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Par ailleurs, si des associations ont commis des actes illégaux, la justice les contraint à payer des formes de dommages et intérêts. Vous voyez bien que ce n’est pas aux agents de la DGFIP de déterminer dans le détail si telle ou telle action humanitaire est contraire à nos principes ! C’est au droit civil ou pénal de le faire.
M. Erwan Balanant
C’est clair !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
En Conseil des ministres, il arrive très régulièrement que des actions radicales, extrémistes ou illégales amènent à la dissolution d’associations. Ce type de décision passe ensuite devant le tribunal administratif et vous comprenez bien que ce ne sont pas les agents de la DGFIP qui vont changer le droit. Avis défavorable.
Mme Ayda Hadizadeh
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Il me semble que la réponse à de tels amendements ne peut pas être technique, madame la ministre. Nous avons commémoré très récemment le 11 novembre 1918. Jusqu’en 2008, tous nos chefs d’État se sont succédé pour saluer le dernier Poilu survivant de la guerre de 1914-1918, Lazare Ponticelli. C’était un Italien pauvre entré clandestinement en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR. – MM. Erwan Balanant et Stéphane Buchou applaudissent également.) Il a vécu pendant des années de manière clandestine sur notre territoire et appartiendrait aujourd’hui à la catégorie de ceux que vous appelez les étrangers en situation irrégulière, situation que vous voulez transformer en délit. Et voilà que vous remettez en question un autre principe de notre République, le troisième terme de notre devise, Fraternité.
M. Alexandre Allegret-Pilot
Ça n’a rien à voir !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Les étrangers en situation irrégulière qui sont en France, ce sont des frères et sœurs d’humanité (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR et sur quelques bancs du groupe SOC), quoi que vous en pensiez ! Penser qu’il faudrait pénaliser, d’une manière ou d’une autre, les associations qui font très souvent le travail que l’État ne fait plus…
M. Sébastien Peytavie
Exactement !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
…en venant en aide à des gens qui se retrouvent dans la rue, cela révèle tout simplement qui vous êtes, c’est-à-dire les tenants d’idées qui sont contraires à notre devise républicaine. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. – Les députés des groupes SOC, EcoS et GDR applaudissent également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Alexis Corbière.
M. Alexis Corbière
J’approuve totalement ce que vient de dire le président Coquerel. Il y aurait beaucoup d’arguments à opposer à la série d’amendements qui sont ici proposés par les collègues d’extrême droite, mais je veux en invoquer un en particulier. La République est laïque mais, en France, il y a des croyants. La liberté de conscience entraîne la liberté de culte. Or les grands courants spirituels du pays, les plus anciens comme les plus récents, notamment les grandes religions du Livre,…
Mme Hanane Mansouri
Quel rapport ?
M. Alexis Corbière
…respectent tous le principe selon lequel il faut aimer son prochain et l’accueillir quelle que soit sa situation. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) Oui, c’est la vérité, à tel point que le pape, par exemple, a demandé aux catholiques de notre pays d’accueillir les migrants !
M. Hervé de Lépinau
L’abbé Corbière ! On est à la messe !
M. Nicolas Meizonnet
Amen !
M. Alexis Corbière
Dans la mesure où les associations cultuelles bénéficient d’un abattement de près de 66 %, avez-vous mesuré les conséquences de ce que vous proposez ? Êtes-vous favorables à ce que quiconque viendrait à financer une association cultuelle française se voie interdire le bénéfice du dispositif, pour la seule raison que celle-ci demande que les migrants soient accueillis ? C’est absurde, évidemment antirépublicain et même contraire à ce que souhaitent tous les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs des groupes SOC et GDR.)
M. Dominique Potier
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. Pierrick Courbon.
M. Pierrick Courbon
Sous prétexte d’investir le champ fiscal, vous voulez porter atteinte aux libertés associatives, ce qui est parfaitement inacceptable. Que vous ne partagiez pas les objectifs de ces associations, c’est votre droit le plus strict. Toutefois, dès lors que ces associations sont reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général, il ne nous revient pas d’apprécier au cas par cas leur action, ni de porter un jugement de valeur sur leur objet, ainsi que l’a indiqué Mme la ministre ; ce serait mettre le doigt dans un engrenage. Je vous invite donc, chers collègues, à rejeter ces amendements et les suivants.
Mon amendement no 1551, que nous examinerons ultérieurement, vise à inscrire une garantie dans le code général des impôts : ainsi, les associations reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général ne pourraient faire l’objet d’aucune attaque dans le champ fiscal, quelle qu’en soit la forme, de nature à restreindre les libertés associatives. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS. – M. Manuel Bompard applaudit également.)
Mme la présidente
J’ai donné la parole à deux orateurs opposés aux amendements ; nous allons maintenant entendre deux orateurs qui les soutiennent.
La parole est à M. Marc de Fleurian.
M. Marc de Fleurian
M. le président Coquerel a évoqué le cas de Lazare Ponticelli, le dernier Poilu, qui nous a quittés il y a quelques années. Il n’était pas un soldat comme les autres ; il était arrivé en France dans le cadre de la Légion étrangère.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
N’importe quoi ! Cela n’a rien à voir !
M. Marc de Fleurian
Cela a tout à voir, monsieur le président Coquerel : le légionnaire devient Français par la sueur et le sang versés. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) C’est d’ailleurs ce qui est écrit sur les murs des casernes de la Légion étrangère : « Qui sait si l’inconnu qui dort sous l’arche immense / Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé / N’est pas cet étranger devenu fils de France / Non par le sang reçu mais par le sang versé ? » (Mêmes mouvements.)
Pour les clandestins qui arrivent en France de manière irrégulière, il existe plusieurs points de recrutement de la Légion étrangère, notamment à Lille, à Strasbourg, à Marseille, à Paris et à Perpignan. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ils sont les bienvenus. S’ils veulent mêler leur sang à celui des Français, ils peuvent s’engager, servir et appliquer le principe que nous défendons : la nationalité française s’hérite ou se mérite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Hanane Mansouri.
Mme Hanane Mansouri
Madame la ministre, comment votre gouvernement peut-il prétendre mener une guerre contre l’immigration illégale alors même qu’on utilise l’argent du contribuable, l’argent des Français, pour soutenir des associations qui encouragent des pratiques purement illégales sur notre territoire ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Monsieur le président Coquerel, vous nous avez fait une grande tirade sur l’humanisme, mais où est l’humanité lorsqu’on soutient des associations qui incitent des personnes, certes peut-être dans la difficulté, à venir en France dans des conditions atroces ? Où est l’humanité lorsqu’on incite des personnes à entreprendre des traversées dangereuses, sachant que des milliers de personnes meurent en mer Méditerranée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Où est l’humanité des associations soutenant les passeurs qui commettent des viols ? Où est donc l’humanité dans ces cas-là ? J’attends les réponses de MM. Coquerel et Corbière !
Mme Julie Ozenne
C’est faux ! Les associations ne soutiennent pas les passeurs !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Ce que vous venez de dire, madame Mansouri, est très grave. (« Oui ! » sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme Julie Ozenne
Et totalement faux !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Les associations qui aident des personnes le font au nom du droit humanitaire, qui est protégé par la notion d’intérêt général et par le code civil. Oui, la loi permet à ces associations de porter assistance sur notre sol à des personnes modestes dans la difficulté, quelle que soit leur condition. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Aucune association ou organisme d’intérêt général n’organise les flux ou les passages illégaux de migrants. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) Celles qui le font relèvent de la criminalité organisée. Nous les combattons, les poursuivons, les sanctionnons. Telle est la mission de l’Office central de lutte contre le crime organisé. En ma qualité de ministre de l’action et des comptes publics, j’exerce moi-même la tutelle sur deux services de renseignement : Tracfin et la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières.
Il y a une grande confusion dans vos propos. Il convient de distinguer le principe d’humanité, qui correspond à l’intérêt général, et l’illégalité, qui est combattue. Vos propos dépassent largement le cadre de notre droit et de nos valeurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Quand on convoque l’histoire, encore faut-il en avoir connaissance ! Lazare Ponticelli est arrivé en France à 9 ans. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.) Il a travaillé comme ramoneur. Lors de la première guerre mondiale, il s’est engagé dans les régiments garibaldiens, constitués de volontaires italiens qui avaient choisi de combattre aux côtés de la République française ! (Les députés des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR se lèvent et applaudissent.) Ce que vous dites est faux et mensonger ! Révisez vos cours d’histoire !
M. Emeric Salmon
Cela reste un régiment de la Légion étrangère !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1211.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 257
Nombre de suffrages exprimés 255
Majorité absolue 128
Pour l’adoption 85
Contre 170
(L’amendement no 1211 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 280.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 255
Nombre de suffrages exprimés 251
Majorité absolue 126
Pour l’adoption 88
Contre 163
(L’amendement no 280 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur les amendements nos 282 et 281, je suis saisie par les groupes Ensemble pour la République et La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 282 de M. Sébastien Chenu a été défendu précédemment par M. Dufosset.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
La commission a rejeté cet amendement, dont la portée est très large : il vise « les œuvres ou organismes d’intérêt général ayant été condamnés », mais condamnés à quoi ? D’autre part, l’article 1378 octies du code général des impôts prévoit déjà une liste de condamnations pénales qui justifient le retrait automatique de l’agrément fiscal aux associations qui en ont fait l’objet.
Mme Sophie Taillé-Polian
C’est notamment le cas du RN ! Il faut lui retirer ses avantages fiscaux, puisqu’il a été condamné !
M. Philippe Juvin, rapporteur général
Mon avis est défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Je pose à mon tour la question : des associations condamnées à quoi ? L’amendement est étrange, car il existe des condamnations de toute sorte. Il existe déjà une longue liste de condamnations pénales ou civiles qui amènent la DGFIP à suspendre la réduction d’impôt, voire, lorsque la décision judiciaire le requiert, à demander aux associations de rembourser les sommes perçues. Certaines condamnations obligent même les associations à payer des dommages et intérêts.
On peut être condamné à bien des choses qui ne justifient ni la dissolution de l’association, ni l’arrêt de son action. Dans de très nombreux cas, notre droit permet à une entreprise ou un particulier condamné de poursuivre son action.
Je ne sais pas ce que recouvre, dans votre amendement, le terme « condamnés ». Si vous souhaitez étendre la liste des condamnations qui débouchent sur la suspension ou l’arrêt de l’avantage fiscal, c’est une autre question, dont nous pouvons débattre, même si cela relève du droit pénal ou civil plutôt que du droit fiscal.
Je demande le retrait de l’amendement, sans quoi mon avis sera défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Le Coq.
M. Aurélien Le Coq
Je suis étonné que M. Chenu n’ait pas eu le courage de défendre son amendement. (« Oh ! » sur les bancs du groupe RN.) Il vise des associations qui auraient été condamnées par la justice. Or je crois que siègent dans cet hémicycle des députés qui sont membres d’une association condamnée par la justice. Cette association s’appelle le Rassemblement national ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) En mars de cette année, il a été condamné par la justice pour des détournements de fonds publics au Parlement européen. (Mme Hanane Mansouri s’exclame.)
Plutôt que de pourchasser des associations qui ont fait de la solidarité et de la fraternité leur objet, qui défendent les plus pauvres, celles et ceux qui sont en difficulté, vous feriez mieux de balayer devant votre porte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il y a dans notre pays une justice (Mme Marine Le Pen s’exclame) qui prononce des condamnations pénales, en droit, après avoir instruit à charge et à décharge, et entendu la défense. C’est dans ce cadre-là que vous avez été condamnés. Laissez tranquilles celles et ceux qui évitent à des gens de mourir en mer Méditerranée ou dans les rues de nos villes, qui permettent simplement à des gens de recourir au droit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 282.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 258
Nombre de suffrages exprimés 251
Majorité absolue 126
Pour l’adoption 86
Contre 165
(L’amendement no 282 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 281 de M. Sébastien Chenu a également été défendu par M. Dufosset.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Juvin, rapporteur général
La commission a rejeté cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Je constate que le groupe Rassemblement national n’ose même plus défendre ses amendements ! J’espère que c’est parce que vous en avez honte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Ces amendements illustrent parfaitement ce que vous êtes : des ennemis résolus de la liberté, de la fraternité et de l’égalité ! Des ennemis de la liberté, parce que vous bafouez la liberté d’association, pourtant protégée par la Constitution. Des ennemis de la fraternité, parce que vous vous en prenez à des associations comme le Secours populaire ou Les Restos du cœur, qui distribuent de l’aide alimentaire sans demander à chacun ses papiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe SOC.) Ces associations font notre fierté ! Des ennemis de l’égalité, enfin, parce que vous jetez une fois de plus en pâture les immigrés de notre pays, alors que vous savez très bien que ce sont nos institutions – en particulier les préfectures, du fait du manque de moyens et de personnel, du fait de leurs dysfonctionnements – qui créent massivement des sans-papiers. Honte à vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Martine Froger applaudit également.)
Mme la présidente
Nous avons entendu un orateur contre ; je donne la parole à un orateur pour.
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Madame Lejeune, non seulement nous n’avons pas honte, mais ce n’est qu’une partie du programme ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Ces amendements visent à empêcher de telles associations de bénéficier de la défiscalisation, mais nous comptons aussi, dans la deuxième partie du projet de loi de finances, défendre des amendements qui leur couperaient les subventions. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Madame la ministre, vous dites que ces associations n’incitent pas à l’entrée et au séjour irréguliers. C’est complètement faux !
Mme Ayda Hadizadeh
Alors, recourez à l’article 40 du code de procédure pénale !
M. Matthias Renault
Des associations comme SOS Méditerranée font le taxi. (« Ces propos sont une honte ! » et autres exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Elles vont, de manière proactive, récupérer des clandestins dans la zone de recherche et de sauvetage (SAR) et les amènent en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
D’autre part, il existe toute une série d’associations qui mettent des bâtons dans les roues au ministère de l’intérieur et aux préfectures pour éviter que les clandestins soient renvoyés dans leur pays d’origine.
Bien sûr que ces associations aident au séjour irrégulier ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 281.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 256
Nombre de suffrages exprimés 251
Majorité absolue 126
Pour l’adoption 87
Contre 164
(L’amendement no 281 n’est pas adopté.)
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Tavel, pour un rappel au règlement. Sur le fondement de quel article du règlement le formulez-vous ?
M. Matthias Tavel
Sur le fondement de l’article 70 du règlement et de l’article 1er de la Constitution. (« Oui, c’est une honte ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Les propos qui viennent d’être tenus contre l’association SOS Méditerranée portent gravement atteinte aux valeurs qui sont inscrites à l’article 1er de la Constitution. (Les députés des groupes LFI-NFP et GDR se lèvent et applaudissent. – Les députés des groupes SOC et EcoS, dont plusieurs se lèvent, applaudissent également.)
M. Emeric Salmon
Ce n’est pas un rappel au règlement !
M. Matthias Tavel
Je veux pour ma part témoigner notre solidarité à cette association, dont l’un des bateaux s’est fait tirer dessus en Méditerranée par des garde-côtes libyens. Et… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
L’article 70 du règlement traite notamment des manifestations troublant l’ordre et des scènes tumultueuses. Ce n’est pas un rappel au règlement.
M. Thierry Tesson
Le ridicule tue !
M. Matthias Tavel
Ce n’est pas de notre faute si vous ne respectez pas la Constitution et ses valeurs !
Après l’article 9 (suite)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 923 et 37, pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur chacun de ces amendements, je suis saisie d’une demande de scrutin public : sur le no 923, par les groupes Ensemble pour la République et La France insoumise-Nouveau Front populaire ; sur le no 37, par les groupes Rassemblement national et La France insoumise-Nouveau Front populaire.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 923.
Mme Josiane Corneloup
Il s’agit d’un amendement de mon collègue Fabien Di Filippo. En 2016, l’État a accordé 306 millions d’euros de subventions aux associations d’aide aux migrants.
Mme Sandra Regol
Le mariage avec le RN est en bonne voie !
Mme Josiane Corneloup
En 2022, il leur a versé près de 981 millions d’euros ; la somme a donc plus que triplé. Ces associations sont également financées par des dons et bénéficient généralement de la réduction d’impôt prévue à l’article 200 du code général des impôts.
Or certaines de ces associations agissent contre le respect de nos lois et la protection de nos concitoyens, en se mobilisant notamment pour empêcher l’exécution des mesures administratives d’éloignement prononcées contre des étrangers présents illégalement sur notre territoire.
Il n’est pas acceptable que l’État français soutienne, en leur accordant des subventions mais aussi le bénéfice de la réduction d’impôt, des structures qui le combattent et qui nuisent aux intérêts de notre nation. C’est pourquoi le présent amendement vise à retirer le bénéfice de la réduction d’impôt aux associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’actes visant à aider des personnes présentes illégalement sur le territoire français.
------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------
M. Matthias Renault
Le troisième périmètre est celui de la défiscalisation. Je suis désolé de le dire, mais il n’y a pas de droit à défiscalisation pour les associations dans notre pays, ni de droit à financement public. Il ne s’agit pas d’un droit constitutionnel. Ce n’est pas porter atteinte à la liberté d’association que de retirer une défiscalisation ou une subvention publique. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Damien Girard
Bien sûr que si !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Je l’ai dit ce matin, mais je vais rappeler, monsieur le député, quel est le fonctionnement dans notre pays. Une association se déclare en préfecture ; elle a un objet ; de cet objet découle un droit à réduction d’impôt.
Mme Sandra Regol
Pas besoin d’aller chercher la Constitution !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Dès lors qu’une association est déclarée d’intérêt général, cette reconnaissance ouvre doit à la réduction d’impôt correspondante. Ainsi que je l’ai dit précédemment, toute association ayant une activité qui revêt, de manière prépondérante, un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, concourant à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, ouvre droit à une réduction d’impôt sur le revenu en cas de don d’un particulier : 66 % du montant du don est déductible de l’impôt, dans la limite de 20 % du revenu imposable du donateur.
Par ailleurs, je souligne que l’intérêt général est défini, dans ce champ, par le fait d’avoir une activité non lucrative, une gestion désintéressée et de ne pas bénéficier seulement à un cercle restreint de personnes. Voilà quel est notre droit. Il ouvre effectivement un droit automatique à réduction d’impôt. Si vous voulez changer ce droit,…
M. Matthias Renault
Oui !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
…il faut changer le droit des associations institué entre 1901 et aujourd’hui. La direction générale des finances publiques ne choisit pas les associations, elle ne détermine pas ce qui serait une bonne défense de l’environnement ou une mauvaise, une bonne culture ou une mauvaise, un bon féminisme ou un mauvais.
M. Stéphane Rambaud
Bla bla bla !
Mme Amélie de Montchalin, ministre
Elle accorde cette réduction d’impôt à toute association qui remplit ces critères. C’est pourquoi, depuis ce matin, mes explications sont un peu monotones. Je répète en effet que si vous voulez changer le droit des associations, ce n’est pas avec moi que vous pourrez le faire. Faire cesser les activités d’organisations condamnées relève du droit civil et pénal ; c’est avec M. le garde des sceaux qu’il faut traiter cette question.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 581 et 828.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 236
Nombre de suffrages exprimés 231
Majorité absolue 116
Pour l’adoption 82
Contre 149
(Les amendements identiques nos 581 et 828 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2026.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra