XVIIe législature
Session ordinaire de 2025-2026

Séance du jeudi 16 octobre 2025

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Séance du jeudi 16 octobre 2025

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Motions de censure

    Discussion commune et votes

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion commune et les votes sur les motions de censure déposées en application de l’article 49, alinéa 2, de la Constitution, par Mme Mathilde Panot et quatre-vingt-six membres de l’Assemblée, d’une part, et par Mme Marine Le Pen, M. Éric Ciotti et cinquante-six membres de l’Assemblée, d’autre part.
    La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

    M. Julien Odoul

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    Comment faire pour parler de Gaza ? (Sourires sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Aurélie Trouvé (LFI-NFP)

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    Savez-vous ce qu’est un moine-soldat ? Un homme qui mène une guerre sacrée, qui croit servir une cause supérieure et qui, pour cela, brûle tout sur son passage. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Julien Odoul

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    Comme les terroristes du Hamas !

    Mme Aurélie Trouvé

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    C’est bien ce que vous êtes. Vous l’avez dit vous-même : vous êtes un moine-soldat, celui de M. Macron. Vous servez un pouvoir minoritaire persistant et, pour cela, vous saccagez les fondements mêmes de la démocratie. (Mêmes mouvements.)
    Le président Macron impose désormais son pouvoir contre la volonté du peuple. Il n’est plus garant des institutions de notre pays. (Mêmes mouvements.) Il n’a pas écouté une seule fois la colère qui s’exprimait dans les rues et sur les ronds-points. Il a volé par 49.3 deux années de retraite aux Français, il a décidé tout seul d’une dissolution de l’Assemblée nationale, puis il a ignoré le vote des Français. (Mêmes mouvements.) Battu dans les urnes, il a poursuivi une politique rejetée par le pays et il s’arroge à nouveau le droit de désigner un gouvernement de vaincus. (Mêmes mouvements.)
    Nous sommes, en ce moment même, à un tournant de l’histoire : la politique néolibérale en faveur des riches et des multinationales, celle de M. Macron, est massivement rejetée par le peuple. Elle ne peut continuer qu’en étant imposée contre le peuple. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.) Nous y voilà : c’est le néolibéralisme autoritaire et vous en êtes le moine-soldat, monsieur le premier ministre, avec vos pauvres armes, faites de tractations de couloir, de discussions secrètes et de deals politiciens méprisables.
    Vous trahissez l’esprit de la République et son principe premier : le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Dès lors, ce n’est pas vous l’enjeu, monsieur le premier ministre, c’est la France.

    Un député du groupe Dem

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    Je suis bien d’accord !

    Mme Aurélie Trouvé

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    Censurer aujourd’hui, c’est exprimer notre attachement viscéral à la démocratie. C’est sauver la République du fanatisme de ceux qui prétendent aimer la France tout en la mettant sous tutelle. C’est dire à nos concitoyens que leur voix compte encore, qu’ils peuvent être respectés et qu’en ce lieu, la conscience républicaine n’est pas morte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Monsieur le premier ministre, comme moine-soldat de M. Macron, vous avez participé, pendant huit ans, au saccage de notre économie. Il n’y a jamais eu autant d’entreprises qui ferment. Les salaires et les investissements productifs chutent, la souveraineté industrielle et la souveraineté alimentaire sont en très grave danger. Les fins de mois des Français deviennent insoutenables. Vous avez dévasté l’économie du pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Jean-Claude Raux applaudit également.)
    Votre budget, que vous dites sérieux et fiable, va amplifier le désastre. Les instituts économiques le prédisent : ce budget nous fera terminer l’année avec les pires résultats économiques parmi les puissances européennes. Les 30 milliards d’euros de nouvelles coupes budgétaires auront évidemment un très grave effet récessif et entraîneront la baisse du pouvoir d’achat de toutes les classes populaires.
    Ce sera un saccage pour les centaines de milliers d’autoentrepreneurs qui devront désormais payer la TVA et pour les très petites entreprises (TPE) du bâtiment qui subiront de plein fouet la nouvelle baisse des aides à la rénovation énergétique des logements. (Mêmes mouvements.) Je pense à tant d’autres encore, aux agriculteurs qui subissent les traités de libre-échange, aux boulangers et aux bouchers qui font face à la hausse des factures d’énergie. Votre politique dévaste la production et des millions de petites entreprises.
    Tous les budgets qui font l’unité de notre nation seront amputés : ceux du logement et de l’aide alimentaire, ou encore celui des territoires d’outre-mer qui va baisser de 200 millions d’euros. Ce sera aussi un saccage de notre planète et de notre santé. Vous amputez de 84 % le budget dédié à la sortie des pesticides et, dans le même temps, les gens qui souffrent de cancers liés à ces pesticides devront payer bien plus cher pour se soigner. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ « Quelle honte ! » et huées sur les mêmes bancs.)
    Votre budget relève d’une forme de dévotion –⁠ une dévotion cruelle, une dévotion aux marchés financiers et à la dette, qui ne peut pas finir autrement qu’en saccage. Je le dis à tous ceux qui ont été élus pour rompre avec le macronisme. Ce saccage budgétaire aura lieu si nous ne censurons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Une députée du groupe LFi-NFP

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    Exactement !

    Mme Aurélie Trouvé

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    Il aura lieu sans 49.3, certes, mais le moine-soldat empruntera bien d’autres chemins pour réussir sa mission, à commencer par les ordonnances. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    J’en viens au cœur du débat de ces derniers jours : la réforme des retraites et son devenir. Ne nous y trompons pas : si ce gouvernement demeure, il poursuivra la démolition de notre système par répartition. Car la suspension annoncée n’est qu’un leurre, une tromperie, un subterfuge. Au mieux, il ne s’agira que d’un très bref report, glissé par un amendement budgétaire dont rien ne garantit la présence dans le texte final. (Mêmes mouvements.)
    Et même s’il s’y trouvait, cet amendement confirmerait, entérinerait la retraite à 64 ans. Il serait payé très cher par les 17 millions de retraités –⁠ une baisse des pensions de 300 euros en moyenne par an. (Mêmes mouvements.) Cet amendement sera noyé dans un budget de destruction de la protection sociale : doublement des franchises médicales, baisse des allocations pour 13 millions de familles et pour plus de 1 million de personnes en situation de handicap, baisse des aides personnalisées au logement (APL) pour 300 000 étudiants.
    Pour faire passer cet amendement de petit décalage de la réforme des retraites, collègues socialistes,…

    Mme Sophia Chikirou

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    Où sont-ils ?

    Quelques députés du groupe RN

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    Ils ne sont pas là !

    Mme Aurélie Trouvé

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    …il faudra voter tout le budget de la sécurité sociale. Je pense, par exemple, à la remise en cause de l’aide médicale de l’État (AME). Et ça, vous ne le pouvez pas –⁠ et vous le savez. (« Bien dit ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Enfin, cette grâce de M. Lecornu rouvrira la voie à la retraite par capitalisation par la conférence sociale. Vraiment, si cette pseudo-suspension des retraites est une victoire, c’est bien pour le président et pour tous ceux qui le soutiennent. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.) Mais vous tous, qui avez été élus pour abroger la réforme des retraites, allez-vous vraiment vous laisser abuser par cette aumône en trompe-l’œil ? Il n’y a que deux options, ce matin : continuer le macronisme et le néolibéralisme, ou bien rompre avec eux. (Mêmes mouvements.)
    Les Français ne veulent plus du chaos des marchés. Ils veulent un État qui protège. Ils veulent la sécurité, celle du quotidien, pas celle qui fait de l’étranger un bouc émissaire. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ils veulent un travail qui permet de vivre, un médecin à moins de trente minutes de chez eux, une école qui n’abandonne aucun enfant. Ils veulent que la République reprenne la main, que les besoins humains l’emportent sur ceux de la finance. Ils veulent la souveraineté populaire face aux féodalités économiques. (Mêmes mouvements.)
    Arrêtons maintenant de liquider les ressources du pays pour enrichir la finance. Le monde change, c’est maintenant qu’il faut investir des dizaines de milliards d’euros dans la relance écologique et sociale.

    M. Roland Lescure, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique

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    Vous les trouvez où ?

    Mme Aurélie Trouvé

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    C’est maintenant qu’il faut transformer notre production, maintenant qu’il faut censurer. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.)
    Censure et retour aux urnes, c’est le seul espoir d’un souffle nouveau, le seul espoir de régénérer notre contrat social. Voilà le sens profond du vote de 2024 et du programme de rupture du Nouveau Front populaire, grâce auquel nous avons été élus et grâce auquel nous avons gagné ! (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent vivement.)
    Enfin, je tiens à dire aux millions de gens, aux travailleuses et aux travailleurs qui ont combattu la réforme des retraites en faisant grève et en manifestant : oui, c’est grâce à vous –⁠ et seulement vous – que la volonté d’abroger la réforme des retraites reste aussi majoritaire à l’Assemblée nationale et dans le pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) À vous tous, qui avez fait grève et manifesté, je dis : nous ne vous trahirons pas, nous continuerons le combat et nous censurerons ! Respectons le mandat de nos électeurs, pensons à l’espoir que nous avons soulevé ! (Mêmes mouvements.)
    Il est des moments où l’attentisme devient de la lâcheté –⁠ nous y sommes. Jean Jaurès disait : « Le courage, c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel. » Je m’adresse ici à tous ceux qui se disent ses héritiers : montrez ce courage et censurez ! (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent vivement. –⁠ Les députés du groupe GDR applaudissent également.)

    M. Pierre Cordier

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    Jean Jaurès n’était pas un Insoumis !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marine Le Pen.

    Mme Marine Le Pen (RN)

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    Le général de Gaulle, pour désigner le règne des partis, avait une formule : « Le régime de malheur. » En disant cela, le Général croyait décrire le passé, celui de la IVe République. Il se voulait historien ; pour le plus grand malheur de la France et des Français, vous en avez fait un prophète !
    Ce régime de malheur, c’est précisément la situation politique à laquelle nous faisons face, du fait de la piteuse coalition des partis du système qui se relaient à la tête de l’État depuis cinquante ans et n’ont aujourd’hui qu’un seul but : durer, se maintenir quelques semaines de plus, au détriment du peuple et de la nation.
    Ce régime de malheur, toutes les institutions de la Ve République avaient été conçues pour le rendre impossible, mais, à force d’ententes électorales et d’accords de couloir, vous avez réussi à transformer notre loi fondamentale en étouffoir de la démocratie.
    Ce dévoiement de nos institutions a atteint aujourd’hui un paroxysme. Les Français ne comptent même plus les motions de censure déposées, débattues et votées…

    M. Antoine Léaument

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    Pas par vous, madame Le Pen !

    Mme Marine Le Pen

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    …depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022. Ils ne savent même plus qui siège au gouvernement. Qui leur en voudrait ? La durée des ministres se compte, parfois, non plus en années ou en mois, mais en heures.
    Ce spectacle pathétique est un poison pour notre démocratie car il exaspère nos compatriotes et les détourne du goût de l’action publique. Or une démocratie ne vit que par l’énergie et par l’engagement des citoyens. J’espère donc que le théâtre des manœuvres auxquelles se sont livrés tous les partis du système depuis plus d’un an n’aura pas gravé dans le marbre, pour des millions de Français, un profond dégoût pour l’action politique.

    M. Aurélien Saintoul

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    Combien de fois avez-vous sauvé Macron, madame Le Pen ?

    Mme Marine Le Pen

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    Venons-en au fait : la représentation nationale est aujourd’hui réunie pour décider si votre gouvernement, monsieur le premier ministre, doit être censuré au vu de votre projet de budget. Je dis « votre », pardon ; peut-être aurais-je dû dire « le budget de M. Bayrou », « le budget de Bercy » ? Ce n’est tellement pas le vôtre, qu’il n’intègre même pas votre promesse au Parti socialiste de suspendre la réforme des retraites imposée, par un 49.3, par Élisabeth Borne. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Pire, la trajectoire de la réforme Borne est incluse dans votre texte –⁠ j’y reviendrai.
    Ce budget, donc, est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy ; non une année blanche, mais une année noire pour les Français, en particulier ceux qui travaillent et paient des impôts. Il y a d’abord la poursuite du matraquage fiscal : 19 milliards d’euros d’impôts supplémentaires, dont 10 milliards pour le seul impôt sur le revenu.

    M. Roland Lescure, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique

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    C’est faux !

    Mme Marine Le Pen

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    Sans parler du gel du barème, qui vous faisait d’ailleurs, il y a moins d’un an, pousser des cris d’orfraie, vous allez faire entrer 200 000 foyers de la classe moyenne dans le champ de l’imposition sur le revenu : sans doute une récompense pour la France qui bosse, alors que notre taux d’activité est déjà l’un des plus bas d’Europe. Il y a ensuite la poursuite de la gabegie : 28 milliards d’euros de dépenses publiques supplémentaires au-delà de l’inflation ! Aucun effort portant sur le train de vie des administrations, aucun effort de rationalisation du maquis des agences et organismes divers qui coûtent des dizaines de milliards par an. Il y a l’absence totale d’effort touchant l’immigration, l’absence totale d’action visant à réduire, ne serait-ce que d’un euro, le chiffre des milliards que nous coûtent chaque année l’aide médicale de l’État et le dispositif fou des visas pour soins, qui chaque année bat tous les records.

    Mme Sophia Chikirou

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    Vous êtes nulle en calcul !

    Mme Marine Le Pen

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    Enfin, et c’est sans doute le pire, il y a les mesures d’indécence sociale ; je pense à la fiscalisation des emplois étudiants, mais aussi et surtout à celle des indemnités versées par la sécurité sociale en cas de maladie de longue durée. Nous avons eu la hausse des franchises médicales, le déremboursement de médicaments, de pansements ; aujourd’hui, c’est aux plus vulnérables, à ceux qui sont éloignés de l’emploi et parfois réduits à la solitude, que vous entendez faire payer la note de vos lâchetés, de vos renoncements.
    Monsieur le premier ministre, je ne veux pas ajouter au débat politique, déjà marqué par le règne de la médiocrité et des effets de manche inutiles, la moindre pierre ;…

    M. Roland Lescure, ministre

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    C’est raté !

    Mme Marine Le Pen

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    …mais quand même, sérieusement, comment voulez-vous –⁠ après des décennies de course à l’abîme – faire accepter une année de plus aux Français qu’on les spolie de leurs droits sociaux par incapacité à toucher à ceux que nous avons octroyés, de manière totalement irrationnelle, à la terre entière ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Comment pouvez-vous imaginer que le pays le plus fiscalisé, le plus socialisé au monde ne vous sanctionne pas, ne vous rejette pas, en voyant chaque année s’allonger la liste des injustices et des spoliations –⁠ toujours au détriment des Français les plus faibles, jamais au détriment de l’immigration massive, incontrôlée, qui mine nos comptes sociaux et rend nos rues de plus en plus violentes ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Tout cela alimente un climat de division et de ressentiment, aggrave la situation déjà gravissime de nos finances publiques après huit ans de « quoi qu’il en coûte » macroniste, sous l’œil effaré des marchés financiers qui nous prêtent des fonds, mais aussi des contribuables –⁠ ménages et entreprises – qui devront payer la note fiscale de ce champ de ruines budgétaire.
    Voilà pourquoi, monsieur le premier ministre, nous voterons sans hésiter la censure de votre gouvernement : tout simplement parce que ce budget n’est pas un budget, c’est-à-dire la somme de choix politiques, mais c’est l’acte ultime –⁠ nous l’espérons – d’un système politique à bout de souffle, à bout d’idées, et qui, par accumulation de saignées fiscales, de brutalisations sociales, n’aura rien produit d’autre qu’un pays à bout de forces. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Pour s’en convaincre, il suffit des statistiques publiques : les faillites d’entreprises, en particulier de très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME), battent tous les records établis depuis des décennies ; le taux de pauvreté, les difficultés d’accès aux soins médicaux, au logement, explosent ; l’immigration, je le répète, est, comme notre dette publique, hors de contrôle. Tel est l’état de la France que nous laisse Emmanuel Macron. Tel est le pays que nous devrons redresser –⁠ car tôt ou tard, c’est au Rassemblement national que reviendra cette mission, et nous la mènerons à bien ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Antoine Léaument

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    Non, jamais !

    Mme Marine Le Pen

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    Ce que je viens de rappeler, monsieur le premier ministre, ce sont des évidences ; en disant tout cela, je crois et même j’espère ne rien vous avoir appris.

    Mme Mathilde Panot

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    Vous avez voté trois fois sur quatre avec les macronistes !

    Mme Marine Le Pen

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    Sans doute est-ce ce qu’il y a de plus lamentable dans la situation politique que nous traversons : sauf peut-être d’un quarteron de gauchistes enfermés dans le déni du réel (Mêmes mouvements), les maux de la France sont parfaitement connus, les remèdes aussi. Il ne manque qu’une chose : le courage de les appliquer. Mais quand la classe politique, pour préserver ses petits intérêts, fait le choix collectif du déni du réel, rien n’est possible.
    C’est précisément cela que nous vivons. Tout a révélé, au cours des derniers jours, que votre seul objectif était d’éviter de nouvelles élections, de contourner le peuple, de le réduire au silence, de l’invisibiliser. Déposant ce projet de budget, vous assumez de vous couper un membre en renonçant à la seule véritable réforme qu’Emmanuel Macron ait conduite, celle des retraites ; réforme pour laquelle, soit dit en passant, vous avez mis le pays à feu et à sang –⁠ avant d’y renoncer dix-huit mois plus tard pour un fauteuil passablement élimé. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Dans quelques instants, l’Assemblée nationale va voter deux motions de censure : si une majorité de députés veulent votre départ, l’insondable sottise des postures des uns et des autres pourrait vous sauver. Si LFI refusait de voter en faveur de notre motion,…

    Mme Sophia Chikirou

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    Elle ne sert à rien !

    Mme Marine Le Pen

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    …si les quelques LR convaincus par l’idée de la censure refusaient de voter en faveur de la motion déposée par LFI, leur sectarisme et leur égoïsme –⁠ le plus stupide et le plus obtus – condamneraient les Français à subir votre budget de malheur. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Après votre accord avec Jean-Luc Mélenchon en vue du second tour des législatives,…

    M. Manuel Bompard

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    Neuf fois !

    Mme Marine Le Pen

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    …c’est donc à Olivier Faure que vous devrez peut-être votre maintien temporaire aux affaires : un dirigeant visionnaire qui, jusqu’à hier, ne savait même pas par quel véhicule juridique serait suspendue –⁠ puisque c’est là l’objet de l’accord de la honte conclu par les socialistes – la réforme des retraites d’Élisabeth Borne.

    M. Louis Boyard

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    Vous avez sauvé Bayrou pendant des mois !

    Mme Marine Le Pen

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    Issu de multiples rencontres entre vous –⁠ les alliés de M. Faure apprécieront –, cet accord n’est pas seulement honteux : il est placé sous le signe de la tromperie et de la malhonnêteté car rien ne nous dit qu’une fois intégré au texte l’amendement visant à suspendre la réforme Borne survivrait à un rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), à une réécriture par le Sénat, au passage en commission mixte paritaire (CMP), à une censure –⁠ en tant que cavalier budgétaire – par le Conseil constitutionnel, voire à un budget par ordonnances. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Vous auriez notamment beau jeu –⁠ il s’agit en Macronie d’un sport national – de vous cacher derrière la censure du Conseil : c’est ainsi que l’an dernier, vous avez laissé vider de sa substance votre loi sur l’immigration –⁠ ce qui avait comblé d’aise, paraît-il, Emmanuel Macron lui-même. Mais il y a encore mieux que les mesquines trahisons habituelles, il faut bien l’avouer, aux socialistes qui se retrouvent à cautionner la brutalisation sociale des plus faibles et le gel, une année de plus, du point d’indice de la fonction publique. Il y a mieux : il y a M. Wauquiez, il y a LR. Après avoir fait campagne pendant des mois sur son refus de se dissoudre dans le macronisme, M. Wauquiez, donc, a enfin clarifié sa position : il préférait en réalité se dissoudre dans le socialisme (Mêmes mouvements), soutenir d’un même geste la suspension de la réforme Borne et la désindexation des retraites. Merci, monsieur Wauquiez, pour cette clarification bienvenue. Vos électeurs apprécieront. (Mêmes mouvements.)

    M. Pierre Cordier

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    Tu aurais pu parler de moi, Marine !

    Mme Marine Le Pen

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    Voilà, monsieur le premier ministre, le visage de ceux qui vous permettront aujourd’hui, peut-être, de durer quelques semaines de plus –⁠ tous ces partis unis par la terreur de l’élection au point d’en oublier que, selon la Constitution, ils « concourent à l’expression du suffrage ». Désormais, ils sont tous d’accord pour concourir à éviter la tenue d’élections.

    M. Antoine Léaument

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    Et la destitution, madame Le Pen ?

    M. Jean-François Coulomme

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    Mais qu’est-ce qu’elle raconte ?

    Mme Marine Le Pen

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    Par pudeur, je n’évoquerai pas les déclarations de vos propres alliés : entre Édouard Philippe, qui appelle à la démission du président de la République mais refuse la dissolution, et Gabriel Attal, qui dit ne plus rien comprendre à Emmanuel Macron mais continue d’afficher son soutien au gouvernement, on s’y perd. Tout cela est pathétique.

    Mme Mathilde Panot

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    C’est vous qui êtes pathétique !

    Mme Marine Le Pen

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    Tout cela sera bien vite, je l’espère, ravalé au rang de mauvais souvenir.
    La vérité, chers collègues –⁠ je conclurai par là –, c’est que vous n’échapperez pas au vote des Français. Vous aurez tout fait, tout entrepris, tout sacrifié pour éviter de retourner aux urnes, mais vous y retournerez et vous devrez, la tête basse, la mine déconfite, reparaître devant vos électeurs avec le déshonneur de ceux qui, pendant des mois, auront joué la montre. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Mathilde Panot

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    C’est vous qui avez fait durer le gouvernement Bayrou !

    M. Antoine Léaument

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    Vous avez sauvé Bayrou neuf fois !

    Mme Marine Le Pen

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    Le Rassemblement national, lui, attend le jour de la dissolution avec une impatience croissante. Les 140 députés du RN et de l’UDR ont hâte de retourner devant les Français, car ils pourront, eux, regarder leurs électeurs droit dans les yeux ; ils pourront, eux, rendre compte avec fierté de leur action à l’Assemblée nationale ; ils pourront, eux, dire qu’ils ont fait honneur au contrat moral qui les lie à leurs compatriotes. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Votez donc la destitution du président de la République !

    Mme Marine Le Pen

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    Ils seront, eux, les artisans du grand redressement national, au sein d’une majorité claire qui sera rendue à notre pays par son seul souverain : le peuple.
    Ce n’est plus à vous que je m’adresse maintenant, mais à nos concitoyens : mes chers compatriotes, ne laissez personne vous dire que nous traversons une crise politique. Ce n’est pas une crise politique, c’est une crise politicienne ; une crise de vieux partis fatigués qui n’ont pour projet que d’empêcher le Rassemblement national d’arriver au pouvoir. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Mes chers compatriotes, ne laissez personne vous dire que nous traversons une crise de régime. Ce n’est pas une crise de régime, c’est la crise d’un régime, celui des partis –⁠ et il est en train de prendre fin. Mes chers compatriotes, vous allez, demain, retourner aux urnes. La nouvelle assemblée que vous aurez élue pourra alors adopter dès son installation un projet de loi spéciale ;…

    Mme Mathilde Panot

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    La loi d’amnistie !

    Mme Marine Le Pen

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    …le nouveau gouvernement présentera ensuite son budget, un budget reflétant les choix politiques exprimés par le vote du peuple français. (Mme Mathilde Panot s’exclame de nouveau. –⁠ Protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, s’il vous plaît !

    Mme Marine Le Pen

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    Ce sera enfin le retour de la vraie stabilité : pas celle des postes de vieux notables fatigués, mais celle d’un pays, d’un peuple à qui nous aurons enfin redonné confiance et espérance. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Dans tous les cas, car il s’agit en démocratie d’une loi incontournable, c’est à vous, peuple souverain, que reviendra le dernier mot. Avec toute notre force et notre détermination, nous vous rendrons le pouvoir. Voilà aujourd’hui le seul chemin à prendre : celui de la démocratie ! (Les députés des groupes RN et UDR se lèvent et applaudissent longuement.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre.

    M. René Pilato

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    Donc au premier secrétaire du Parti socialiste !

    M. Sébastien Lecornu, premier ministre

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    Mesdames les oratrices, je vous ai écoutées attentivement : ce qui me frappe le plus dans vos discours, c’est la convocation d’un peuple imaginaire, comme si le peuple ne s’était pas exprimé lors des dernières élections législatives. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
    On ne peut d’ailleurs dire, madame Le Pen, que ce gouvernement ait peur du peuple (Plusieurs députés RN désignent du geste les nombreux bancs vides au centre de l’hémicycle) puisque, dans quelques instants, l’Assemblée nationale l’aura soit censuré, soit confirmé. Madame la présidente Le Pen, on ne peut dire que nous ayons peur du peuple. Vous étiez candidate à l’élection présidentielle de 2017, à celle de 2022 ; à chaque fois vous avez été battue. (Quelques députés RN montrent la gauche de l’hémicycle en s’exclamant : « Grâce à eux ! ») Il y a eu des législatives anticipées, qu’avait demandées votre famille politique en réclamant la dissolution ; vous n’avez pas obtenu la majorité absolue. (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI-NFP et UDR.) Ce que je dis avec respect, c’est que personne, précisément, ne l’a obtenue. Aujourd’hui se présente devant vous un gouvernement soutenu –⁠ ou non : nous le verrons, je le répète, dans quelques instants – par un socle de députés suffisant pour qu’il puisse se maintenir. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît ! Chers collègues, allons !

    M. Sébastien Lecornu, premier ministre

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    Vous savez qu’aux termes de la Constitution du général de Gaulle –⁠ que vous défendez –, les membres du gouvernement tiennent aussi leur légitimité du président de la République, qui les nomme.
    Je ne ferai pas un long discours car tout a été dit lors de ma déclaration de politique générale, mais je retiens également que notre esprit de compromis, la volonté de faire en sorte que les débats aient lieu, sont au fond la meilleure pierre de touche de la bonne foi ou de la mauvaise foi. Compte tenu de l’abandon du 49.3,…

    Mme Mathilde Panot

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    Vous êtes un 49.3 à vous tout seul !

    M. Sébastien Lecornu, premier ministre

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    …du fait qu’est prévu le temps nécessaire à l’ensemble des débats (Exclamations sur divers bancs), s’exprimer à cette tribune en laissant croire à celles et ceux qui nous écoutent que la copie budgétaire remise est définitive –⁠ comme si les parlementaires n’avaient pas le loisir, le droit, la capacité de la modifier, l’amender, la transformer… (Les exclamations se poursuivent, de plus en plus vives.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, pourriez-vous respecter le premier ministre lorsqu’il s’adresse à vous ? (Protestations sur les bancs des groupes RN, LFI-NFP et UDR.) Je vous le demande à tous des deux côtés de l’hémicycle : un peu de silence ! Poursuivez, monsieur le premier ministre.

    M. Sébastien Lecornu, premier ministre

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    On ne peut pas ignorer la procédure budgétaire, faire comme si le texte qui est sur la table ne devait pas être discuté. Vous ne pouvez donc pas mentir aux Françaises et aux Français en soutenant que vous voulez censurer le gouvernement sur la base d’un texte que vous ne pourriez pas retravailler.
    La réalité est simple : soit nous entamons les débats, soit nous entrons une fois pour toutes dans la crise politique. Cela, les députés des groupes La France insoumise et Rassemblement national doivent l’assumer. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Nous sommes en effet à un moment de vérité. Souhaitons-nous l’ordre républicain (Protestations sur les bancs du groupe RN) et que les débats se déroulent à l’Assemblée nationale (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP), ou le désordre et le ralentissement du pays ? Censurer le gouvernement sur un texte avec lequel on n’est pas d’accord peut s’entendre ; le censurer avant tout examen d’un texte revient tout simplement à manquer de bon sens.
    Les motions de censure examinées ce matin sont quelque peu inédites dans l’histoire de la Ve République :…

    M. Antoine Léaument

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    Vous êtes de droite !

    M. Sébastien Lecornu, premier ministre

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    …pour la première fois, l’Assemblée nationale pourrait décider de se censurer elle-même en refusant d’entamer tout débat. (Exclamations continues sur les bancs des groupes RN, LFI-NFP et UDR.) L’histoire jugera très durement ces manœuvres politiciennes (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, Dem et HOR) par lesquelles on aura confondu la tribune de l’Assemblée nationale et une tribune publicitaire.
    L’élection présidentielle viendra. Vous aurez l’occasion de faire campagne. Pour le moment, ne prenez pas en otage le budget de la nation et celui de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR. –⁠ Protestations sur les bancs des groupes RN, LFI-NFP et UDR.)

    M. Emeric Salmon

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    Nul !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Metzdorf.

    M. Nicolas Metzdorf (EPR)

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    Le général de Gaulle (Exclamations sur les bancs du groupe RN) affirmait : « Notre Constitution est à la fois parlementaire et présidentielle, à la mesure que ce que nous commandent à la fois les besoins de notre équilibre et les traits de notre caractère. » Nul ne doute du trait de caractère unique de l’Assemblée nationale aujourd’hui. Bien que profondément divisée, elle n’a jamais eu autant de pouvoir et elle a à ses côtés un gouvernement réaliste, qui souhaite plus que jamais laisser la loi se faire au Parlement, comme l’a clairement rappelé le premier ministre. Le gouvernement propose et l’Assemblée, enfin, dispose. Il est donc regrettable que la chambre basse envisage de se dessaisir de ce pouvoir. La censure est un acte grave, fort et solennel, qui engage la stabilité de la nation et qui doit être mis à l’ordre du jour lorsque la situation l’exige. Malheureusement, depuis quelques années, elle est devenue l’outil indispensable du bon opposant qui promet, à chaque occasion, de faire tomber le gouvernement de la France, comme si la chose pouvait être légère.
    Depuis deux ans, cette Assemblée ne renverse plus des gouvernements : elle renverse le sens même de notre engagement politique. Nous avons confondu le contrôle du pouvoir avec la jouissance de l’obstruction. Or la beauté de notre promesse ne réside pas dans la paralysie de l’État, elle réside dans l’espoir que nous pouvons susciter chez les Français d’avoir une vie meilleure. Le vrai courage n’est pas de renverser des gouvernements ou de dissoudre des assemblées, c’est de réussir à gouverner ensemble, malgré tout.
    La vérité, c’est que la Ve République est aujourd’hui plus affaiblie par son Parlement que par ses gouvernements successifs. À force de tout remettre en cause, scrutin après scrutin, motion après motion, nous prenons le risque d’épuiser non seulement les institutions mais aussi la confiance en notre pays. Ce n’est pas le gouvernement qui vacille, c’est la parole publique tout entière qui se fragilise.
    Dans cet hémicycle, chacun peut avoir ses désaccords, ses priorités, ses convictions, mais il est un principe qui nous oblige tous : celui de la continuité de la France. C’est de la solidité de nos institutions que dépendent la place et la voix de la France et des Français dans le concert des nations. Quand la France parle, le monde écoute encore –⁠ du moins encore un peu. Mais si elle continue de se diviser, le monde ne pourra qu’être sourd à ce qui ne sera désormais plus que le murmure d’une puissance devenue régionale. Quelle ironie de nous voir tomber par nos propres mains, à l’heure où nos ennemis deviennent de plus en plus nombreux. Ce qui a fait la force de notre pays dans l’histoire, c’est la solidité de nos institutions et la responsabilité de nos dirigeants. Aucun agenda politique ni personnel ne saurait suffire à justifier l’ébranlement de la Ve République. Cette stabilité si importante pour la France est d’autant plus nécessaire que de nombreux dossiers sont urgents.
    Avant de citer les chiffres alarmants liés à l’absence de budget, si je peux me permettre une référence qui rappellera de bons souvenirs au premier ministre, je précise qu’en Nouvelle-Calédonie le gouvernement local ne peut être démissionnaire moins de dix-huit mois après avoir été installé. (M. le premier ministre sourit.) Si cette disposition pouvait nous inspirer ici, je serais fier que mon île ait apporté sa pierre à la stabilité de la nation, ce qui, vous en conviendrez, démontre quelque peu la gravité de la situation. (Mme Constance Le Grip applaudit.)
    Le budget, donc. Du fait des délais impartis pour son adoption, nous nous tenons désormais sur un fil. L’absence de projet de loi de finances au 1er janvier 2026 aurait des conséquences lourdes, estimées à 11 milliards d’euros, soit 0,4 point de déficit. Sur ces 11 milliards, 3 milliards sont directement liés à l’hypothèse d’une absence de textes financiers, pénalisant la croissance, notamment en raison de la baisse de la consommation des ménages, selon les chiffres de la Banque de France. Viennent ensuite 8 milliards d’euros simplement en perte de mesures d’économie et de hausse des recettes : 3 milliards au titre de la revalorisation des retraites, 3 milliards de rendement lié au plan relatif aux niches, 1 milliard au titre de la taxe sur les complémentaires et 1 milliard pour le décalage d’un mois des mesures nouvelles. Ainsi, selon le gouverneur de la Banque de France, à l’heure ou nous parlons, l’instabilité nous a déjà coûté 0,2 % de PIB, soit l’équivalent du budget annuel du ministère des affaires étrangères.
    Dès lors, une seule question se pose : avons-nous encore les moyens de nos querelles ? Je ne le crois pas. Évidemment, et le premier ministre l’a lui-même reconnu, ce budget est perfectible. C’est normal puisqu’il n’est pas encore passé sous les fourches caudines de l’Assemblée. À nous de nous en saisir et de trouver les fameux compromis nécessaires. Jamais, dans l’histoire de la République, les parlementaires n’auront exercé une influence aussi importante sur le budget de la nation. D’autant, mes chers collègues, que c’est bien lors de l’examen de ce budget que sera proposé ce que vous aviez tous demandé, outre le renoncement au 49.3 : la suspension de la réforme des retraites. Le premier ministre aura répondu aux deux principales revendications des oppositions qui, jusqu’à présent, justifiaient les censures. Quel parlementaire peut-il envisager de dire à ses concitoyens qu’il ne veut pas discuter du budget ?
    La deuxième urgence de ce gouvernement de mission, il faut le noter, ce sont les territoires d’outre-mer. Un projet de loi concernant la vie chère est prêt. Dans les territoires en question, nos compatriotes en ont besoin tant la situation du pouvoir d’achat est dramatique. Sans gouvernement, les prix continueront de filer et la population de se paupériser. Toute censure aura un impact négatif concret et rapide sur le quotidien de nos concitoyens ultramarins. Je le répète, chers amis de par-delà les mers, avons-nous les moyens de nos querelles ? Je ne le crois pas non plus.
    Permettez-moi désormais d’avoir un mot particulier pour deux territoires meurtris, et pour Mayotte d’abord, dont les plaies du cyclone Chido sont encore ouvertes. Des engagements ont été pris et il est désormais temps de les respecter dans le budget que nous allons examiner. On ne peut pas se contenter de tweeter lors d’une catastrophe naturelle sans permettre au gouvernement de prendre les mesures nécessaires au rétablissement d’une situation indigne. Nous avons fait une promesse républicaine à ce territoire ; nous ne pouvons pas décevoir ainsi son amour de la patrie.
    Enfin, la Nouvelle-Calédonie. Je ne sais plus quoi vous dire tant je désespère de voir un jour aboutir un processus commencé il y a sept ans maintenant avec l’organisation du premier référendum. Nous avons connu trop de campagnes électorales, trop de fractures, trop de barricades, trop de vies brisées pour être désormais les otages du jeu national. Nous sommes si près de tourner la page de la violence et de la haine, si près d’en écrire une nouvelle, que je vous demande solennellement d’avoir une pensée pour nous si vous hésitez à voter la censure. Si ce gouvernement tombe, tout espoir de paix s’envole. Combien faut-il de morts pour que la nation se donne le peu de temps nécessaire pour achever le processus de paix en Nouvelle-Calédonie ?

    Mme Constance Le Grip

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    Il a raison !

    M. Nicolas Metzdorf

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    Combien de vies fauchées faut-il pour que la politique s’arrête ? On nous demande souvent de nous entendre malgré nos différences, parce que la Nouvelle-Calédonie le mérite, mais je vous retourne désormais cette requête d’unité nationale. Depuis que l’archipel a pris feu en mai dernier, nous avons connu une nouvelle Assemblée et cinq gouvernements différents. Je sais que nous sommes loin, que nous sommes particuliers et que nos voix se noient dans les millions de voix de l’Hexagone, mais nous aussi nous sommes la France !
    Excusez-moi d’évoquer mon territoire avec tant de gravité mais je crois, avec humilité, qu’il n’y a pas mieux placé qu’un Calédonien pour vous dire que la fracture d’un peuple est un poison qui tue même les pays qu’on pensait indestructibles. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.) Nous avons la possibilité de travailler ensemble et de dépasser nos clivages pour sauver la France. Nous l’avons fait trop tard à Nouméa. Nous avons encore le temps de le faire à Paris. Je sais qu’il y a les militants, les sondages et le calendrier électoral. Je sais les réseaux sociaux et le microcosme parisien. Mais avant tout, et plus que tout, il y a la France. Je souhaite donc que le gouvernement de Sébastien Lecornu tienne le plus longtemps possible et que sa mission réussisse. Pour la France, pour toute la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Mme Michèle Tabarot applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Baumel.

    M. Laurent Baumel (SOC)

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    Monsieur le premier ministre, en préambule, je tiens à vous dire que nous comprenons intimement et parfaitement les sentiments et les raisonnements qui conduisent nos collègues des autres groupes de gauche à vouloir censurer votre gouvernement. Nous comprenons et partageons l’exaspération engendrée par le spectacle accablant de ce président de la République qui, chagriné des mauvais résultats des élections européennes, a voulu lui aussi jouer à la dissolution, a perdu les élections législatives qu’il avait convoquées et s’est obstiné ensuite à en nier le résultat en ne consentant à nommer que des gouvernements à sa convenance, et cela même lorsque le prétendu socle commun qui servait de prétexte à cette dénégation démocratique a volé en éclat, il y a dix jours, sous le regard médusé du pays.
    En préambule, je tiens également à vous dire que notre non-censure d’aujourd’hui n’est en aucun cas un pacte de non-censure. Nous ne nous engageons à rien…

    M. Louis Boyard

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    Vous vous êtes engagés sur le programme du NFP !

    M. Laurent Baumel

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    …et surtout pas à voter ou à laisser passer le budget récessif et injuste que vos ministres nous ont présenté. Nous ne renonçons à rien. Si vous-même ou d’autres ici en doutaient, nous rappelons le précédent de François Bayrou, qui s’était un peu vite bercé d’illusions à notre sujet. Alors, si en dépit de ces rappels, nous faisons néanmoins le choix de ne pas vous censurer dès votre entrée en scène, c’est pour trois raisons.

    M. Kévin Pfeffer

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    Garder vos sièges, garder vos sièges et garder vos sièges !

    M. Laurent Baumel

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    La première tient à notre vision, je dirais aussi à notre compréhension, de la nature même de cette législature : elle est absolument inédite parce que dépourvue de majorité absolue et même relative, et elle est la première manifestation du tripartisme qui structure désormais notre période politique. Dès son avènement, les socialistes ont admis et énoncé qu’elle ne pourrait fonctionner que sur la base de compromis substantiels entre les forces qui ont composé le front républicain de juillet 2024. Dès son avènement, nous avons pris nos distances avec l’illusion d’une application intégrale du programme du NFP (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP)…

    M. Emeric Salmon

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    Et Lucie Castets ?

    M. Laurent Baumel

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    et nous avons conçu le gouvernement que nous avons proposé de former autour de Lucie Castets comme un gouvernement minoritaire appelé à chercher des majorités texte par texte dans l’Assemblée telle qu’elle est. Dans notre vision, cette configuration nouvelle n’est d’ailleurs pas nécessairement une régression : le système pyramidal structuré autour d’un président tout-puissant, appuyé sur une majorité pléthorique et docile, n’a pas produit, au cours des dernières décennies, un bonheur politique et une confiance dans les institutions telles qu’il faille à tout prix nous hâter de retrouver ce paradis perdu. Au moins notre assemblée reflète-t-elle largement le pluralisme réel du pays.
    À supposer donc qu’il soit hautement désirable, le retour à la normalité de la Ve République ne serait pas, en outre, garanti par un retour actuel aux urnes, qu’il prenne la forme d’une dissolution ou d’une démission du président. Les Françaises et les Français ne le demandent pas forcément (« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP)  : à travers nos échanges hebdomadaires avec eux, nous sentons qu’il existe une base sociale dans le pays pour accueillir avec soulagement, et peut-être même soutenir demain, une expérience institutionnelle novatrice qui parviendrait à concilier le pluralisme et la stabilité, la confrontation naturelle des orientations avec la capacité d’agir que ce pays éminemment politique continue d’attendre de son État –⁠ une expérience qui nous sortirait de l’image déprimante d’un pays bloqué par la somme de ses intransigeances.

    M. Louis Boyard

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    Mais enfin qu’est-ce que vous avez ?

    M. Laurent Baumel

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    La deuxième raison de notre non-censure tient à notre conception de l’action politique, celle qui a historiquement fondé l’identité du socialisme démocratique et l’a distingué des mouvements révolutionnaires ou gauchistes.
    Depuis toujours, nous préférons nous battre ici et maintenant, dans le cadre des institutions, pour obtenir des avancées concrètes pour celles et ceux que nous défendons, plutôt que de travailler sans cesse à approfondir des contradictions et des crises censées faire advenir des grands soirs sans cesse différés et souvent décevants.
    Dans le moment présent, même si nous partageons l’exaspération devant l’attitude présidentielle, nous ne sommes pas convaincus que faire tomber à la chaîne tous les gouvernements qui passent pour précipiter une élection présidentielle à l’issue incertaine soit le meilleur service que la gauche puisse rendre aux couches populaires qui ont besoin d’elle.
    Forts de nos soixante-neuf députés, nous préférons engager le rapport de force, agir dans l’hémicycle pour essayer d’inscrire les propositions politiques issues de notre programme commun dans le droit positif. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Nous croyons à la nécessité et à la valeur du compromis. Nous voulons des avancées concrètes pour les gens.
    Monsieur le premier ministre, la troisième raison de notre non-censure est que vous avez, à travers l’annonce de la suspension immédiate et complète de la réforme des retraites que nous vous demandions publiquement, fait une concession réelle qui constitue aussi une avancée réelle.

    M. Thomas Ménagé

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    Vous n’y croyez même pas !

    M. Louis Boyard

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    Vous allez devoir voter le PLFSS en bloc !

    M. Laurent Baumel

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    Une concession réelle, car nous connaissons l’attachement presque obsessionnel du président de la République et de vos amis pour ce totem du bilan macroniste. Nous nous souvenons de la façon dont les outils de la coercition et de l’obstruction parlementaire ont été mobilisés pour l’imposer et le maintenir coûte que coûte, face à une assemblée et un pays récalcitrants.
    Une avancée réelle, car nous pouvons ici ou là ergoter, minorer, dévoiler notre supposée naïveté, mais nous sommes fiers d’avoir exercé cette pression…

    M. Emeric Salmon

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    Vous êtes fiers d’être naïfs !

    M. Laurent Baumel

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    …qui permettra demain à 3,5 millions de personnes usées ou fatiguées par une vie de travail de partir plus tôt à la retraite si elles le souhaitent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NFP.)

    M. Kévin Pfeffer

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    Vendus !

    M. Laurent Baumel

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    Monsieur le premier ministre, je termine mon propos par là où je l’ai commencé. Pour la première fois de cette législature, vos amis et vous-même semblez comprendre que la pérennité de cette législature a un prix. À la différence de votre prédécesseur, vous semblez vouloir nous épargner les leçons de morale ou d’économie pour nous traiter comme on traite ses opposants en l’absence de majorité. En ne joignant pas nos voix à la censure, ce matin, nous faisons le pari que vous continuerez à le comprendre dans le débat budgétaire qui vient.

    M. Emeric Salmon

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    Un pari perdu d’avance !

    M. Laurent Baumel

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    Sur la suspension de la réforme des retraites, je vous le dis solennellement : il n’y aura pas d’entourloupe ou de ruse procédurale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    M. Louis Boyard

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    Elle est déjà là, l’entourloupe !

    M. Aurélien Le Coq

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    L’entourloupe, c’est vous !

    M. Kévin Pfeffer

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    Quelle naïveté !

    M. Laurent Baumel

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    Vous êtes le garant que la suspension devienne une réalité juridique à la fin du processus budgétaire.

    M. Louis Boyard

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    Vous-mêmes n’y croyez pas !

    M. Laurent Baumel

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    La pérennité de votre gouvernement est désormais liée à l’engagement que vous avez pris à cette tribune devant des millions de Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Monsieur le premier ministre, vous avez renoncé au 49.3. C’est un progrès démocratique…

    M. Louis Boyard

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    Oh, merci, grand seigneur !

    M. Laurent Baumel

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    …qui permettra aux majorités parlementaires de corriger votre copie. Chacun sera mis devant ses responsabilités et assumera ici les classes sociales et les intérêts qu’il défend. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NFP.)
    C’est infiniment mieux qu’un budget imposé par ordonnances, mais si vous voulez –⁠ et nous le voulons – que la France ait un budget et un gouvernement à la fin de cette année, ce geste ne vous exonère pas de la responsabilité de faire de nouvelles concessions sur la trajectoire financière, sur la justice sociale ou encore sur le pouvoir d’achat.

    Mme Caroline Parmentier

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    Allez dire ça à vos électeurs !

    M. Laurent Baumel

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    M. Retailleau vous accusera peut-être d’être notre otage ; ce n’est pas notre affaire. Nous demandons simplement que les idées validées par un tiers des Français lors des élections législatives trouvent leur place légitime dans le budget de la nation.
    Nous faisons le pari qu’une forme d’intelligence politique collective peut encore émerger du bourbier créé par l’apprenti sorcier de l’Élysée.
    Un automne parlementaire ne suffira pas à recréer l’amour des Français pour leurs institutions, mais nous pouvons commencer à leur redonner du crédit.

    M. Louis Boyard

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    Vous n’y croyez même pas vous-mêmes !

    M. Laurent Baumel

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    Nous pouvons agir pour éloigner le pire, les souffrances, les malheurs, les désordres, les salissures de notre République, auxquels notre échec collectif pourrait désormais rapidement nous conduire.
    Voyez donc, monsieur le premier ministre, cette non-censure comme un sursis et comme un appel au sursaut. En ce mois d’octobre 2025, les Français nous regardent,…

    M. Aurélien Le Coq

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    Ah ça, oui, ils vous regardent !

    M. Laurent Baumel

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    …vous regardent ; ne les décevez pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    M. Emeric Salmon

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    Les Français vous vomissent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Didier Berger.

    M. Jean-Didier Berger (DR)

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    Nous éprouvons ensemble l’expression d’un hiatus démocratique inédit. Il y a quinze mois, chacun d’entre nous a gagné dans sa circonscription. Pourtant, ici, personne n’est vraiment vainqueur puisqu’il n’y a pas de majorité claire.

    M. Emeric Salmon

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    Vous avez piqué le discours de M. Baumel ?

    M. Jean-Didier Berger

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    Par leurs suffrages, les Français ont placé entre nos mains une responsabilité démocratique supplémentaire : celle de nous mettre d’accord, de sortir des postures politiciennes, de faire preuve d’humilité et de créativité pour sortir des impasses politiques.
    Le vote des Français a retiré du pouvoir à l’exécutif. Vous en avez pris acte, monsieur le premier ministre, en renonçant expressément à l’utilisation du 49.3 à l’occasion de l’examen du budget de la nation. Nous avons désormais davantage de pouvoir entre nos mains. Cette responsabilité nous oblige.
    Bien sûr, en chacun des députés ici présents résonnent ses engagements, ses convictions, ses idées. Chacun voudrait appliquer son programme à la lettre mais il n’y aura pas de solution chimiquement pure jusqu’à la prochaine élection présidentielle. Si tel est le cas, c’est parce que nous constituons probablement l’assemblée la plus représentative et la plus démocratique de toute la Ve République.
    Beaucoup d’autres pays européens connaissent cette situation et beaucoup réussissent. L’échec n’est donc pas une fatalité. Cette situation nous donne même à toutes et à tous une liberté d’action considérable qui engage chacune et chacun d’entre nous. Cette liberté d’action, à l’occasion d’un vote aussi décisif, peut faire basculer le destin d’une nation. Elle doit donc s’exercer en dehors de toute considération personnelle ou partisane. Plus l’enjeu est impérieux, moins le mandat doit être impératif.
    Face à l’impasse de la dissolution, la droite républicaine a assumé l’intégralité de ses responsabilités. Nous avons choisi d’envoyer l’un des nôtres, Michel Barnier, pour être premier ministre. Après la censure de son gouvernement, nous avons soutenu un autre premier ministre qui n’était pourtant pas issu de notre formation politique et avec qui les relations ne s’apparentaient pas tout à fait à une histoire d’amour.

    M. Pierre Cordier

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    Pas vraiment, non…

    M. Jean-Didier Berger

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    Pourtant, nous l’avons fait, et cela pour éviter les conséquences d’une nouvelle censure alors que la première avait déjà plongé le pays dans l’incertitude.
    Il nous est aujourd’hui demandé de nous prononcer une nouvelle fois sur l’opportunité d’une censure. Vous le savez, nous avons des points de désaccord importants avec ce gouvernement, à commencer par les questions budgétaires.
    Le Haut Conseil des finances publiques l’a dit : l’année 2025 commence à marquer le début de la réduction des déficits. Mais cette réduction passe intégralement par l’impôt et en aucun cas par la baisse de la dépense publique. Comment est-ce possible, dans le pays le plus taxé du monde et qui dépense le plus ?
    S’il y avait une majorité et une opposition, comme c’est traditionnellement le cas à l’Assemblée nationale, nous serions probablement dans l’opposition et nous voterions probablement contre ce projet de budget. Mais voilà, il n’y a pas de majorité. Si personne ne prend ses responsabilités, s’il ne reste plus que des oppositions, alors nous serons plongés dans le néant budgétaire.
    En moins de deux ans, la France a connu cinq premiers ministres, nous rappelant ainsi les heures les plus sombres de la IVe République. Le général de Gaulle et Michel Debré ont précisément conçu nos institutions et notre constitution comme des remparts face à cette instabilité, permettant à la France d’avoir une stabilité qui lui confère sa solidité. Ces institutions garantissent que l’intérêt supérieur de la nation passe avant les intérêts partisans. C’est précisément en considération de l’intérêt national que les députés de la droite républicaine ont aujourd’hui décidé de ne pas censurer ce gouvernement ;…

    Mme Caroline Parmentier

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    Encore bravo…

    M. Jean-Didier Berger

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    …pas seulement parce que les Français sont très majoritairement opposés à cette censure (Exclamations sur les bancs du groupe RN),

    M. Emeric Salmon

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    Vous irez le dire à vos électeurs !

    M. Jean-Didier Berger

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    …mais parce qu’il y va de l’intérêt supérieur de la nation.
    L’intérêt national commande aujourd’hui de trouver les voies et moyens d’un accord pour doter la France d’un budget avant la fin de l’année. L’intérêt national nous enjoint d’honorer les engagements de la France pris auprès des instances de l’Union européenne. L’intérêt national ordonne de comprendre que sous le regard attentif et circonspect des marchés financiers, c’est la crédibilité de la signature de la France qui est en jeu.
    Parmi les censeurs ici présents, qui ira payer les traites exorbitantes des Français ? (Mêmes mouvements.)

    M. Emeric Salmon

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    Vous augmentez ces traites ! Vous n’avez pas honte ?

    M. Jean-Didier Berger

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    Qui ira consoler ceux qui se retrouveront au chômage quand des emplois seront supprimés sans être compensés par des créations d’emplois, faute de visibilité pour les entrepreneurs et les investisseurs ? (Mêmes mouvements.) Qui ira expliquer aux usagers des services publics que ces derniers ont été supprimés ou amoindris par les villes, les départements et les régions par votre faute, parce que vous avez créé les conditions de l’instabilité ? (Mêmes mouvements.)

    M. Emeric Salmon

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    La France est déjà en faillite !

    M. Jean-Didier Berger

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    Aucun d’entre vous n’aura ce courage. Vous n’irez pas expliquer que vous avez choisi la politique de la terre brûlée, celle sur laquelle rien ne repose, celle qui se fait au détriment de l’intérêt des Français. (Mêmes mouvements.)
    Le choix de l’intransigeance idéologique est bien confortable pour vous. Nous ne ferons pas ce choix. Pourtant, monsieur le premier ministre, ne pensez pas que nous manquerons d’attention et de vigilance à chacune de vos décisions. Ne pensez pas que nous accepterons tout et n’importe quoi s’agissant de la réforme des retraites.
    Vous savez et nous savons tous, y compris ceux qui s’apprêtent à censurer et qui demandent même l’abrogation de la réforme des retraites, que cette dernière était non seulement nécessaire, mais insuffisante.

    M. Théo Bernhardt

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    Alors, censurez !

    M. Jean-Didier Berger

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    Nous, élus responsables, serons donc obligés d’y revenir en 2027…

    M. Kévin Pfeffer

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    Vous avez fait 4 % à la dernière élection présidentielle !

    M. Jean-Didier Berger

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    …et de proposer de nouvelles solutions pour tenir compte de la réalité démographique. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Tous les autres pays européens, quelles qu’en soient les majorités politiques, constatent qu’il faut passer l’âge de départ à la retraite à 65, 67, voire à 70 ans, comme l’ont fait certains de nos voisins.

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Et pourquoi pas 85 ans, pendant qu’on y est ?

    M. Jean-Didier Berger

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    C’est la raison pour laquelle nous ferons le choix de la vigilance face à toutes ces décisions.
    Vous avez la responsabilité, et nous avons la responsabilité, de sauver notre système de retraite. Je vous invite à avoir un peu de mémoire : il y a cinquante ans, nous avions quatre cotisants pour un retraité, contre 1,5 cotisant aujourd’hui ; nous serons bientôt à un seul cotisant par retraité. Quand nous aurons moins de cotisants que de retraités, qui paiera ?
    Monsieur le premier ministre, vous comprendrez que la décision que nous prenons aujourd’hui est tout sauf anodine. Est-ce à dire que les députés de la droite républicaine qui acceptent de ne pas voter la censure vous accordent une confiance aveugle ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe RN.) En aucun cas.
    Ce soutien sera le plus exigeant que vous connaîtrez. Il s’exercera texte par texte, article par article, amendement par amendement.
    Il s’appuiera sur la bienveillance avec laquelle vos ministres donneront des avis, que j’espère le plus souvent favorables, sur les amendements que nous déposerons. En somme, ce soutien dépendra du vôtre. Il dépendra du vôtre lorsque nous proposerons de préférer la baisse de la dépense publique aux augmentations d’impôts. Il dépendra du vôtre lorsque nous proposerons de mettre en place les outils nécessaires à la revalorisation du travail et à la lutte contre l’assistanat, dont l’allocation sociale unique plafonnée, parce que nous sommes intimement convaincus que ceux qui travaillent doivent toujours gagner davantage que ceux qui bénéficient de la solidarité nationale.
    Ce soutien dépendra du vôtre, monsieur le premier ministre, lorsque nous proposerons de supprimer les titres de séjour pour soins et de transformer l’AME en aide médicale d’urgence.
    Je suis certain que chacun ici, sur les bancs du gouvernement, mesure l’effort que font les députés de la Droite républicaine –⁠ un effort qui ne saurait être déçu. Plus que tout, il est dicté par le bon sens. Comment trouver 44 milliards en commençant par une censure qui coûterait 12 milliards ? Je sais qu’il y a ici –⁠ on les entend très bien –…

    M. Kévin Pfeffer

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    Elle est bonne, la soupe ?

    M. Pierre Cordier

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    Vous en mangez aussi !

    M. Jean-Didier Berger

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    …des élus qui préfèrent instrumentaliser l’outil constitutionnel de la censure à des fins partisanes ou personnelles.
    Je m’adresse à ceux qui veulent profiter des circonstances pour faire prévaloir la fureur et le bruit, déstabiliser la Ve République et inventer de toutes pièces une nouvelle constitution qui n’offre aucune garantie démocratique aux Français. Vous ne parviendrez à désarmer ni la police, ni la République. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Vous y laisserez jusqu’à votre dernière énergie, parce que l’instinct démocratique du peuple français sera toujours plus fort que toutes vos manigances.
    Je m’adresse aussi à ceux, guère plus glorieux, qui font prévaloir les agendas personnels sur l’intérêt national. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.) En décrétant pour de mauvaises raisons que vous censurerez désormais « tout, tout le temps », en vous alignant sur la position de La France insoumise, vous avez donné les clés de la négociation au Parti socialiste : vous avez rendu nécessaire la suspension de la réforme des retraites.

    Mme Michèle Tabarot

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    Absolument !

    M. Jean-Didier Berger

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    Mais peut-être était-ce au fond ce que vous souhaitiez, vous qui êtes favorables à l’abrogation de cette réforme et qui avez un programme plus à gauche que la gauche. (« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.) Vous prétendez n’être ni de droite, ni de gauche. En réalité, vous n’êtes ni de droite, ni de droite.

    M. Emeric Salmon

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    Vous êtes socialistes !

    M. Jean-Didier Berger

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    Puisqu’il n’existe finalement dans ce pays rien de plus proche que les extrêmes, je le dis à tous les censeurs : les Français –⁠ le peuple souverain – vous enverront, à travers la facture de l’histoire, le prix du mépris que vous vous apprêtez aujourd’hui à déverser avec désinvolture sur l’intérêt national.

    M. Emeric Salmon

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    4 % !

    M. Kévin Pfeffer

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    4 % aux élections présidentielles !

    M. Jean-Didier Berger

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    À l’issue de ce vote, vous aurez entre vos mains, monsieur le premier ministre, mesdames et messieurs les ministres, le dernier fil d’Ariane qui relie la confiance des Français aux députés de la nation.

    M. Roland Lescure, ministre

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    C’est vrai !

    Un député du groupe RN

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    Vous êtes déjà dans la poubelle !

    M. Jean-Didier Berger

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    Il vous appartient d’en prendre le plus grand soin. Les députés de la Droite républicaine seront ultra-vigilants –⁠ aussi bienveillants que vigilants. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe Dem. –⁠ Mme Constance Le Grip applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Léa Balage El Mariky.

    Mme Léa Balage El Mariky (EcoS)

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    Voter une motion de censure n’est jamais un geste anodin.

    M. Boris Vallaud

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    Bravo !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Ce n’est jamais une posture –⁠ en tout cas, ce n’est pas ma conception.

    M. Boris Vallaud

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    Ah !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    C’est un acte grave.

    M. Alexis Corbière

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    C’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Mais je crois qu’il y a plus grave encore : accepter de devenir les figurants d’une mauvaise pièce de théâtre présidentiel. (Exclamations sur les bancs du groupe Dem. –⁠ Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Marcellin Nadeau applaudit également. )
    La bonne nouvelle, c’est que nous, parlementaires, disposons d’un pouvoir inviolable en démocratie : celui de ne pas consentir, celui de ne pas accorder notre confiance, celui de la retirer.

    M. Alexis Corbière

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    C’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    La confiance du Parlement envers le gouvernement n’est jamais que l’écho de celle du peuple envers ses dirigeants. Qu’est-ce que la confiance, sinon la condition première du bon fonctionnement de notre pays ? Or cette confiance, non seulement vous ne la demandez pas, monsieur le premier ministre, mais vous ne la méritez pas. Nous ne vous censurons pas par plaisir. Nous le faisons parce que votre gouvernement, sa composition, sa direction, son intention, ne correspondent pas à ce que nous estimons juste pour le pays.
    Commençons par le décor, qui dit parfois l’essentiel. Je veux partager avec vous mon étonnement : dans le rang protocolaire, le ministre de l’intérieur arrive en premier, suivi de la ministre des armées. Que l’on me comprenne bien : la sécurité intérieure et nationale n’est secondaire pour personne ; mais elle ne saurait être enfermée dans les seules limites que vous lui assignez. Pour beaucoup de nos concitoyens, la sécurité véritable, c’est celle du quotidien : l’emploi, la santé, l’environnement, le logement (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.),…

    M. Alexis Corbière

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    C’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    …tout ce qui leur permet de vivre dignement et de maîtriser leur existence. Monsieur le premier ministre, quelle place avez-vous accordée à l’éducation nationale et à la jeunesse ? Celle de l’arrière-plan. Et que dire de la protection de l’enfance, dont tous les signaux sont au rouge et qui n’a même pas de secrétariat d’État,…

    Une députée du groupe EcoS

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    Elle a raison !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    …ou encore de l’économie sociale et solidaire –⁠ 14 % du PIB !–, privée d’interlocuteur dédié ? Quant à la composition du gouvernement que vous nous proposez, si je ne veux retirer à personne ses qualités, il faut bien dire la vérité au sujet de ce casting : des proches du président de la République, des anciens de vos cabinets ministériels, des LR exclus…

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Eh oui !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Bref, un dernier carré de fidèles, des « moines-soldats » et des opportunistes en transition vers de prochaines aventures électorales…

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Exactement ! La honte !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Cerise sur l’indigeste gâteau, ce gouvernement est encore moins paritaire que les précédents. Voilà donc la modernité macroniste : un air de famille et un parfum d’entre-soi. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ Mme Elsa Faucillon applaudit également.)
    Allons désormais au fond des choses. Le budget que vous nous présentez n’est pas un projet pour la nation. C’est une addition d’injustices : rigueur extrême pour les classes moyennes et populaires, clémence excessive pour les ultrariches et les grands groupes, et un silence assourdissant pour le climat. Vous avez même poussé le zèle jusqu’à reprendre 80 % des propositions de M. Bayrou, celles-là mêmes que cette assemblée venait tout juste d’écarter.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Exactement !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Gel des prestations sociales et suppression de l’aide personnalisée au logement (APL) pour les étudiants étrangers,…

    Une députée du groupe EcoS

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    C’est pire que Bayrou !

    Mme Danielle Simonnet

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    Honteux !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    …hausse des timbres fiscaux pour l’accès à la nationalité française –⁠ comme si celle-ci devenait un privilège censitaire –, limitation de la durée des arrêts de travail initiaux, division par deux du fonds Vert –⁠ dont la dotation avait déjà diminué l’an passé : voici quelques exemples éloquents de vos intentions.
    En augmentant les franchises médicales, vous affaiblissez mécaniquement le financement solidaire de la sécurité sociale.

    M. Alexis Corbière

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    C’est une honte !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Vous accélérerez la financiarisation de la santé : les mutuelles augmenteront leurs tarifs, les ménages paieront, et chaque centime non remboursé par la sécurité sociale sera un coup de canif dans l’édifice du Conseil national de la résistance. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Marcellin Nadeau applaudit également.)
    Quant à la suspension de la réforme des retraites, pour laquelle vous avez changé trois fois de véhicule législatif en quarante-huit heures –⁠ à croire que vous êtes devenu un défenseur de la multimodalité –, elle aurait pu être une bonne nouvelle. Mais ce que vous proposez n’est qu’un report de trois mois pour les générations nées entre 1964 et 1968. L’âge pivot de 64 ans et la cible des 172 trimestres demeurent inscrits dans la loi –⁠ vous suspendez la marche pour mieux la reprendre. Et, comme souvent, les mots enjolivent la réalité : ce que vous appelez « suspension » n’est en réalité qu’un ralentissement cosmétique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS. –⁠ Mme Elsa Faucillon applaudit aussi.)
    Alors, c’est vrai, vous accomplissez un geste d’une portée inédite : vous renoncez à l’article 49.3 de la Constitution. L’Assemblée nationale aura enfin le droit de voter. Attention, on frôle la révolution démocratique ! Pardon de vous le dire, mais faire passer le respect du Parlement pour une faveur censée justifier notre confiance, c’est confondre la démocratie avec une cour royale. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Marcellin Nadeau applaudit également.)

    M. Alexis Corbière

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    Bravo !

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Implacable !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Et quand bien même vous seriez tenu de composer avec les forces de cet hémicycle, il ne faut pas se laisser abuser : la Ve République demeure un régime où l’exécutif règne en maître sur la fabrique de la loi et dispose d’un pouvoir réglementaire si vaste qu’il peut gouverner sans nous.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    C’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Pour le dire autrement, vous laisser à Matignon, c’est assumer la droitisation de l’ensemble de nos politiques publiques. Et cela, nous ne l’acceptons pas. Mais ce qui se joue ici dépasse infiniment la question du désaccord politique. Ce qui est en cause, à travers votre nomination, c’est la manière dont le pouvoir présidentiel se conçoit et s’exerce, contre les usages, contre l’esprit d’équilibre et, à la fin des fins, contre nos concitoyens. Si nous vous censurons, monsieur le premier ministre, c’est en républicains sincères, attachés à la régularité du pouvoir et à la dignité de ses procédures.
    Il y a un an, le président de la République a pris l’une des décisions les plus graves de la Ve République : dissoudre l’Assemblée nationale, dans l’espoir secret que la victoire du Rassemblement national révèle son imposture.

    M. Pierre Cordier

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    Ça, c’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Il n’était pourtant pas nécessaire de jouer avec la République : il suffit de les écouter chaque jour se contredire.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est vrai !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Ce pari dangereux s’est changé en manœuvre cynique lorsque le chef de l’État a demandé à ses candidats de refuser le barrage républicain.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Quelle honte !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Emmanuel Macron se rêvait en Churchill ; il se réveille en Hindenburg. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.) Et vous êtes de ceux, monsieur le premier ministre, qui ont rendu cela possible. Vous vous dites gaulliste, mais le Général aurait-il dîné en catimini avec Le Pen pour parler des conflits aux portes de l’Europe comme vous l’avez fait au printemps dernier ? Non. C’est contre cela que les Françaises et les Français ont voté : contre la banalisation de l’extrême droite, pour un vrai changement, pour la justice sociale, pour la protection de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe GDR.)
    Et pourtant, nous y voilà : un président qui s’obstine à mépriser le verdict des urnes, qui nomme pour la troisième fois et demie un premier ministre à sa main, pour poursuivre la même politique, comme si rien ne s’était passé ; un président qui détourne sa fonction de garant des institutions pour échapper à sa propre responsabilité ; un président qui tord la lettre et l’esprit de la Constitution pour mettre la République à son service (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR)  ;…

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Il est tordu !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    …un président minoritaire devenu hors de contrôle, qui veut rester au centre du jeu. Tout, désormais, concourt à épuiser notre démocratie. Si vous n’avez pas notre accord pour gouverner, c’est parce que nous avons encore la faiblesse de croire qu’en République, tous les coups ne sont pas permis. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS Mme Elsa Faucillon applaudit également.)
    À l’heure où le vent brun souffle de nouveau sur les continents, l’entêtement du président de la République nous rapproche des démocraties illibérales, celles qui refusent le partage du pouvoir, celles qui préfèrent l’autoritarisme à la délibération. Cet autoritarisme s’est encore exprimé avant-hier, lorsque le chef de l’État, non content d’infantiliser régulièrement les Françaises et les Français, a cru bon de nous menacer : voter cette motion de censure reviendrait, selon lui, à voter la dissolution.
    Non, chers collègues, la dissolution n’est pas la conséquence institutionnelle automatique d’une censure. C’est une décision politique, une responsabilité qui appartient au président de la République, et à lui seul. Emmanuel Macron pourrait parfaitement revenir à la raison et donner enfin un sens au résultat des urnes de juillet dernier.

    Mme Danielle Simonnet

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    Voilà !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Et même s’il devait persister dans son aveuglement, vous pourriez, vous, monsieur le premier ministre, nommé pour la troisième fois –⁠ ce serait audacieux, admettons-le –, proposer une feuille de route fidèle à ce que le pays a exprimé –⁠ des mesures pour réparer vraiment la France. Je n’ai pas le droit de brandir ici le programme du Nouveau Front populaire, mais il pourrait vous inspirer utilement. Pas pour appliquer tout le programme, rien que le programme : un dixième suffirait déjà à répondre à bien des attentes du pays. Vous pourriez même vous appuyer sur des propositions déjà adoptées par cette assemblée –⁠ je pense, par exemple, à la taxe Zucman défendue par mes collègues Eva Sas et Clémentine Autain. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe GDR. –⁠ M. Pierre Pribetich applaudit aussi.)
    Non, la dissolution n’est pas l’issue naturelle de cette censure. Nous refusons de porter la responsabilité d’un choix qui n’est pas le nôtre. C’est vrai, cette assemblée ne ressemble à aucune autre dans l’histoire de la Ve République. Elle est si fragmentée qu’aucune tendance politique ne dispose de la majorité et que les compromis seront nécessaires. Mais c’est précisément parce que cette situation est sans précédent qu’il faut respecter les principes fondamentaux de notre république parlementaire. Deux exigences auraient dû être respectées : que le président de la République accepte enfin le résultat des urnes, passe la main et admette la cohabitation ;…

    Mme Danielle Simonnet

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    Oui !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    …qu’un projet commun, clair et débattu, soit présenté devant les députés, accompagné d’une question de confiance. Rien de tout cela n’a été fait.
    Monsieur le premier ministre, votre nomination procède d’une décision autoritaire à laquelle nous ne pouvons souscrire.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Tout à fait !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Nous refusons que la Ve République devienne une monarchie élective. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    M. Alexis Corbière

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    Elle l’est déjà !

    Mme Léa Balage El Mariky

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    Et puisque vous ne sollicitez pas notre confiance, nous sommes contraints de vous offrir la censure. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS, dont certains députés se lèvent, et sur quelques bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Blandine Brocard.

    Mme Blandine Brocard (Dem)

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    En prenant la parole face à vous aujourd’hui, ce n’est pas à vous que je veux m’adresser. C’est en pensant aux Français –⁠ et à eux seuls – que je parle. En effet, nous sommes là, vous comme moi, par leur volonté. Nous sommes là pour eux, rien que pour eux. À force de ne parler qu’entre nous, nous oublions à qui nous devons vraiment rendre des comptes : c’est leur voix, leur colère, leurs espérances, leurs vies que nous devons défendre –⁠ pas nos ego ni nos ambitions. Nous sommes leurs représentants et cela nous oblige profondément.
    Cela nous oblige à travailler, inlassablement, pour eux et non pour des jeux d’appareils ou des postures partisanes qui stérilisent le débat public et abîment notre démocratie. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Cela nous oblige à privilégier, toujours, le sens de la construction plutôt que celui de la destruction, le dialogue plutôt que le vacarme, le respect plutôt que la surenchère, le courage d’agir plutôt que la facilité de critiquer, la force de proposition plutôt que le rejet et la censure systématiques. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)
    N’en avez-vous pas assez, chers collègues, de consacrer tant de temps et d’énergie à vociférer et si peu à écouter ? Je ne dis pas être d’accord, mais simplement écouter : c’est la base même du travail démocratique. Or, depuis des mois, notre assemblée donne trop souvent un piètre spectacle, celui d’un champ de bataille où l’on crie plus fort qu’on ne construit, où le bruit remplace le sens, où les invectives tiennent lieu de pensée.
    N’en avez-vous pas assez, chers collègues censeurs, de confondre opposition et obstruction, de penser que crier, c’est convaincre,…

    M. Emeric Salmon

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    Les Français sont convaincus !

    M. Christophe Blanchet

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    Écoutez-la !

    Mme Blandine Brocard

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    …de refuser tout débat avant d’essayer de comprendre, de déposer des motions de censure avant même d’avoir entendu la déclaration de politique générale du premier ministre ? Quelle étrange conception du débat démocratique ! Quelle curieuse idée de la responsabilité parlementaire !

    M. Éric Martineau

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    Bravo !

    Mme Blandine Brocard

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    Et si, au lieu d’une motion de censure automatique, vous proposiez enfin un projet alternatif, un plan B, comme le font nos voisins allemands ? Ah, pas tout à fait : là-bas, on pratique la motion de censure constructive, on ne se contente pas de dire « non », on doit proposer une autre voie et, surtout, convaincre une majorité. C’est cela, la politique : proposer, porter une vision, convaincre, pas juste taper du pied en criant « censure ! ».
    La situation du pays et celle du monde exigent tout l’inverse : du sérieux, de la responsabilité et du travail. Ces mots semblent devenus désuets pour certains, mais ils sont exigés par les Français. Alors écoutons-les et mettons-nous au travail –⁠ vraiment.
    L’urgence est de redonner du sens à la politique, de la rendre à nouveau lisible et crédible.

    M. Christophe Bex

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    Pour cela, il faut un projet !

    Mme Blandine Brocard

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    Soyons dignes des Français, redonnons du crédit à la parole publique. Refusons que la politique, avec un grand « p », soit salie, bafouée, caricaturée par le vacarme des siamois populistes et la paresse des cyniques. Alors oui, certains ici ne veulent que le chaos et d’autres prospèrent sur les peurs, sur les colères, sur les blocages qu’ils organisent eux-mêmes. Les uns et les autres rêvent d’un effondrement, car c’est la seule manière pour eux d’exister. Mais nous sommes, j’en suis convaincue, bien plus nombreux –⁠ de sensibilités différentes – à croire sincèrement à notre engagement de servir et non de se servir.
    À ceux qui ne cessent d’être dans les outrances et les caricatures, à malmener nos institutions, et qui jouent avec la colère et les mensonges comme on joue avec le feu, stop !

    M. Christophe Bex

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    Emmanuel Macron !

    Mme Blandine Brocard

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    Stop, car à force de tout dénaturer, c’est la démocratie elle-même que vous détruisez ; à force de tout balayer d’un revers de la main, c’est notre force d’action et de changement pour les Français que vous freinez. Finalement, ce n’est pas le gouvernement que vous affaiblissez : c’est le pays tout entier.

    M. Emeric Salmon

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    C’est vous qui avez tout cassé !

    Mme Blandine Brocard

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    La France, ce n’est pas un champ de ruines partisanes, c’est un héritage commun, une exigence de chaque jour et un avenir partagé.
    Elle mérite tellement mieux que nos querelles d’appareils, nos indignations de façade, nos micros tendus pour un buzz. Il est toujours plus facile de dénoncer que de proposer, de critiquer que de construire, de diviser que de rassembler. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.) Mais si nous ne faisons que cela, à quoi servons-nous ?

    M. Emeric Salmon

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    Vous, à rien !

    Mme Blandine Brocard

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    Pourquoi ne serions-nous pas capables, ici, de regarder ce qui nous unit plutôt que de brandir sans cesse ce qui nous sépare, de chercher le commun plutôt que la fracture, de parler de la France plutôt que de nos camps ?
    Pendant que nous nous invectivons, des jeunes cherchent un logement qu’ils ne trouvent pas, des familles travaillent dur et ne s’en sortent plus, des agriculteurs peinent à vivre de leur métier,…

    Mme Danielle Simonnet

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    La faute à qui ? Au gouvernement !

    Mme Blandine Brocard

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    …des enseignants doutent du sens de leur mission, des entrepreneurs mettent la clé sous la porte, des policiers et gendarmes se sentent démunis, des soignants tiennent à bout de bras nos hôpitaux.

    M. Emeric Salmon

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    C’est votre bilan !

    Mme Danielle Simonnet

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    La faute à qui, enfin ?

    Mme Blandine Brocard

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    Et pendant ce temps-là, nous nous lançons des anathèmes –⁠ j’en entends sans cesse des deux côtés depuis tout à l’heure – (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem) et nous débattons pour savoir qui criera le plus fort. Mes chers collègues, par ces mots, je nous parle à tous, je nous appelle à nous réveiller, à nous rappeler la raison pour laquelle nous sommes ici. Nous ne sommes pas des figurants d’un théâtre médiatique, nous ne sommes pas des acteurs d’un jeu d’ego. Nous sommes les dépositaires d’un bien précieux : la confiance des Français.
    Cette confiance, nous la perdons tous, jour après jour, chaque fois que nous hurlons au lieu d’écouter, chaque fois que nous faisons passer nos intérêts avant ceux du pays, chaque fois que nous censurons au lieu de construire. Les Français ne nous demandent pas d’être d’accord sur tout. Ils savent bien évidemment que la politique, c’est aussi le désaccord ; mais ils veulent que ce désaccord soit fécond, utile, digne, porteur, responsable et constructif.
    Le premier ministre nous assure qu’il ne fera pas usage du 49.3 : saisissons cette occasion pour essayer de nous écouter et, à défaut de nous entendre, pour construire la nuance. À moins qu’encore une fois, la censure repoussée, vous choisissiez de bloquer le débat, de le monopoliser en restant sourds aux attentes des autres –⁠ « Tout mon programme, rien que mon programme ! » Quand on ne représente qu’un tiers des Français –⁠ cela vaut pour tout le monde ici –, c’est oublier les attentes des deux tiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et HOR.)

    M. Emeric Salmon

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    Huit ans pour dire cela !

    Mme la présidente

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    Monsieur Salmon, s’il vous plaît.

    Mme Blandine Brocard

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    Car nos divisions vont bien au-delà du spectacle affligeant et mesquin que nous offrons à nos concitoyens, qui ne savent d’ailleurs plus vers qui se tourner, entre des responsables impopulaires et des irresponsables populaires. (M. Mickaël Cosson applaudit.)
    Nos divisions nous rendent surtout très vulnérables et nous placent dans une position d’extrême fragilité dans un contexte géopolitique international où les équilibres se tendent et où les menaces se rapprochent. Ceux qui refusent de le voir, au mieux se bercent d’illusions, au pire mentent et trompent les Français. Pendant que nous nous écharpons sur des postures, le monde, lui, ne nous attend pas.
    On peut bien continuer à se quereller sur l’âge de départ à la retraite, alors que, soit dit en passant, tous nos voisins l’ont relevé. Mais à quoi cela sert-il si, dans le même temps, les dangers s’accumulent à nos portes ? Ingérences étrangères, dirigeants belliqueux ne jurant que par l’extension de leur territoire, cyberattaques visant à faire éclater notre démocratie, risques d’intrusion dans nos espaces aériens et maritimes, projets d’attentats terroristes sur notre sol : notre pays n’est pas un îlot protégé de l’extérieur.
    Nos débats, nos faiblesses, nos divisions, nos clivages sont observés, exploités et manipulés par d’autres puissances. Face à cela, notre devoir est clair : protéger la France dans son intégrité, dans sa liberté, dans son unité et dans sa souveraineté.
    Le premier rempart, c’est la lucidité et non les dogmatismes dont certains se révèlent être une véritable cinquième colonne ; le premier acte de courage, c’est la vérité et non la facilité et la complaisance. Mes chers collègues, nous n’avons pas le droit d’abandonner la politique aux cyniques. Nous n’avons pas le droit de laisser le doute, la peur et le bruit gouverner à notre place. Nous n’avons pas le droit de décevoir encore. Alors maintenant, au travail ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
    Les Français nous attendent et ils ont raison, parce qu’ils ont besoin de nous, non pas comme d’un triste spectacle, mais comme d’un espoir. Redonnons à la politique ce qu’elle n’aurait jamais dû perdre : le sens du service, le sens du collectif et le sens de l’honneur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.–⁠ Mmes Joséphine Missoffe et Anne-Cécile Violland applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Christophe.

    M. Paul Christophe (HOR)

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    À force de déposer des motions à répétition, certains semblent avoir oublié que la démocratie, ce n’est pas le vacarme permanent : c’est le courage du dialogue, c’est la force du débat, c’est l’intelligence du compromis, dans le respect du mandat que nous ont confié les Français.
    De quoi allons-nous débattre ce matin ? Il nous faut l’expliquer à celles et ceux qui nous écoutent encore –⁠ s’il en reste, au vu de la désolante prestation que nous leur offrons ces derniers temps. Il nous faut leur dire tout le ridicule de cette scène. Nous sommes aujourd’hui réunis pour débattre de motions de censure qui ont été déposées par les extrêmes, alors même que le gouvernement ne s’était pas encore exprimé sur ses orientations et ses choix budgétaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.) C’est assez cocasse, vous en conviendrez, puisque cela revient à congédier un salarié avant même son premier jour. Il serait, par nature, fautif, coupable de ne pas venir de vos rangs, mais il en est ainsi. Sans même laisser le premier ministre prononcer le moindre mot, l’extrême droite et l’extrême gauche ont décidé de s’unir pour bloquer le pays.

    M. Christophe Bex

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    Il n’y a pas d’extrême gauche dans cet hémicycle !

    M. Sylvain Berrios

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    Il y en a un qui s’est reconnu…

    M. Paul Christophe

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    Voilà donc leur conception du débat démocratique : censurer, toujours ; écouter, jamais !
    Commençons à regarder, à l’extrême droite de notre hémicycle, ces élus qui, à longueur de discours, nous donnent des leçons de sagesse et de supériorité. Observons cette extrême droite faire soudainement preuve d’un enthousiasme politique après des mois d’errance dans les couloirs de notre assemblée. Souvenons-nous qu’en février 2023, le Rassemblement national déposait une motion de censure contre le gouvernement qui proposait alors d’instaurer la réforme des retraites. Nous voilà en octobre 2025 et ce même parti dépose une motion de censure contre un gouvernement qui propose, cette fois, de suspendre cette réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    Il a raison !

    M. Paul Christophe

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    Chercher la cohérence idéologique de l’extrême droite me semble à présent plus difficile que de trouver une aiguille dans une botte de foin. Comme son programme, désormais introuvable en ligne, le Rassemblement national n’a plus aucune colonne vertébrale –⁠ si ce n’est la haine des autres, je vous l’accorde.
    Je m’étonne donc de cette nouvelle prise d’affection pour la censure. C’est un véritable revirement et je ne saurais croire que votre goût soudain pour le blocage du pays trouve sa source dans un appétit électoraliste attisé par les derniers sondages.

    M. Timothée Houssin

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    Vous n’avez plus d’électeurs !

    M. Paul Christophe

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    Pire, je n’ose imaginer que cela ne soit qu’un moyen de faire oublier vos très récentes déconvenues judiciaires.
    De l’autre côté de notre hémicycle, l’extrême gauche n’est pas en reste, elle qui a fait du chaos son mantra. À ses yeux, la censure n’est plus un outil démocratique : elle est devenue un instinct partisan. Ses députés ont une envie chronique de censurer. Loin de chercher le débat, ils ont désormais le réflexe de l’étouffer et je n’oublie pas, pour ma part, que le réflexe n’est rien d’autre qu’un mouvement sans réflexion. Vous ne cherchez ni à construire ni à convaincre.

    Mme Zahia Hamdane

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    Heureusement que vous êtes là !

    M. Paul Christophe

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    La censure, dans votre bouche, n’est plus l’expression d’une conviction mais celle d’une stratégie : occuper le temps médiatique, saturer le débat, empêcher toute avancée qui ne serait pas le fruit de votre mauvais génie. Vous prétendez défendre le peuple, mais vous privez le Parlement de sa voix. Quel paradoxe !

    M. Louis Boyard

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    Nous respectons les électeurs !

    M. Paul Christophe

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    Vous vous dites l’incarnation même de la démocratie, mais vous en dévoyez les outils. Quelle fumisterie ! Vous revendiquez l’art du débat, mais vous en trahissez aujourd’hui l’esprit en refusant toute contradiction –⁠ d’un claquement de doigts, les grands débatteurs que vous êtes se transforment en piètres censeurs.

    Mme Zahia Hamdane

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    Ben voyons !

    M. Paul Christophe

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    Par ailleurs, censurer, mais dans quel but ? L’instabilité, le chaos ? Nous en sommes déjà au troisième premier ministre en un an.

    Mme Zahia Hamdane

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    Tout à fait !

    M. Christophe Bex

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    Respectez le résultat des urnes !

    M. Paul Christophe

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    Quand allez-vous enfin penser à l’intérêt des Français ? Qu’ont-ils à gagner à voir ce blocage politique se poursuivre ? En réalité, avouez-le, vous n’espérez que la dissolution et l’instabilité politique. Même si vous n’avez que faire du prix financier, politique et démocratique d’une telle attitude, je veux ici vous le redire : la facture pour les Français d’une nouvelle dissolution serait de 15 milliards, pour refaire ce que le peuple vient tout juste d’élire.
    Et pour quel résultat demain ? Un hémicycle où l’extrême droite gagnerait quelques sièges supplémentaires, mais sans pour autant disposer d’une majorité.

    M. Emeric Salmon

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    Vous êtes voyant ?

    M. Paul Christophe

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    Nous serions alors dans une Assemblée toujours aussi fracturée qu’aujourd’hui, tout aussi incapable de s’entendre dans un pays de nouveau paralysé par les divisions. Ainsi, les Français douteraient encore davantage de leurs institutions. Le prix le plus lourd ne serait alors pas dans les urnes, mais dans les têtes. C’est la confiance démocratique qu’on érode, qu’on abîme, à force de jouer avec les institutions comme avec des allumettes.
    J’en suis sincèrement convaincu : la France n’a pas besoin de vos calculs stériles, de vos querelles vaines. Les Français attendent de nous que l’on travaille, que l’on propose, que l’on argumente. Dans la tempête politique que nous connaissons, dans cette crise larvée que beaucoup ici nourrissent, il devient urgent de revenir à l’essentiel : l’intérêt général.
    Chez Horizons, nous faisons le choix de la stabilité, de la cohérence, du débat parlementaire et de la vérité : ces mots devraient –⁠ nous en sommes certains – guider toute action publique et tout discours politique.

    M. Frédéric Weber

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    Ce n’est pas Horizons, c’est Crépuscule !

    M. Paul Christophe

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    La stabilité, d’abord. Loin d’être le synonyme de l’immobilisme, elle est le signe d’une grande et nécessaire responsabilité. C’est elle qui garantit la continuité de l’État et la confiance des Français envers la représentation nationale.
    La cohérence, ensuite. Gouverner, c’est tracer une ligne claire et la tenir, même si elle n’est pas la plus commode ou la plus populaire. La cohérence, c’est la marque de la conviction.
    Le débat parlementaire, nous le souhaitons : il dotera notre pays d’un budget qui nous permettra de respecter nos engagements et de rétablir nos finances.
    La vérité, enfin. Si elle n’est pas toujours confortable, elle seule permet de garantir la confiance. Dire la vérité, c’est respecter les Français, refuser les recettes magiques et les promesses insoutenables. Stabilité, cohérence, débat parlementaire et vérité : voilà les quatre piliers d’une action publique digne et durable. C’est sur ces piliers que le groupe Horizons a la volonté de reconstruire la parole politique,…

    M. Frédéric Weber

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    Ah !

    M. Paul Christophe

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    …quand d’autres se contentent de la rabaisser. C’est dans cet esprit que nous ne souhaitons pas censurer un gouvernement sous prétexte qu’il défendrait quelques idées différentes des nôtres. C’est encore dans cet esprit que nous nous exprimons –⁠ sans trembler, sans hésiter – sur la suspension de la réforme des retraites, que nous jugeons déconnectée de toute réalité démographique et financière. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe HOR.)
    Je l’ai dit au moment de votre discours de politique générale et je le répète : avec les députés de mon groupe, nous ne voterons pas n’importe quoi. Nous n’avons aucunement l’intention de renier nos valeurs et nous comptons bien utiliser le temps du débat budgétaire pour défendre nos convictions avec constance.
    La France a besoin d’un budget crédible, sincère et équilibré. Elle n’a rien à gagner à entendre les excès et les postures des extrêmes, qui ne veulent assurément pas la réussite de notre pays.
    Monsieur le premier ministre, vous nous avez rappelé l’essence même du mandat de député. Le législateur est ici pour débattre et faire la loi. Alors oui, vous proposerez, nous débattrons et nous voterons.

    M. Emeric Salmon

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    Et il ordonnera !

    M. Paul Christophe

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    Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons & indépendants ne soutiendra pas ces motions de censure mortifères et irresponsables. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem ainsi que sur plusieurs bancs du groupe EPR. –⁠ M. Salvatore Castiglione applaudit également.)

    M. Sylvain Berrios

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Mazaury.

    M. Laurent Mazaury (LIOT)

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    Depuis des semaines, les citoyens nous regardent avec méfiance et inquiétude : ils sont las, voire en colère. Dans ma circonscription des Yvelines, j’ai rencontré des habitants de tous les bords politiques, porteurs d’un seul et même message : à l’Assemblée nationale, entendez-vous enfin pour qu’on avance, pour qu’on adopte un budget, pour que nos entreprises puissent se projeter et pour que nos messages et nos priorités soient entendus et fassent l’objet de mesures concrètes, mais avant tout réalistes.
    Il est grand temps que nous puissions exercer les missions qui nous ont été confiées il y a à peine plus d’un an. Celles-ci ont été largement compromises par différentes baisses de régime liées à l’instabilité politique qui, si elle retarde nos travaux, a aussi comme effet d’augmenter mécaniquement nos dépenses publiques.
    Une dissolution, largement décriée tant elle a été désastreuse, et la succession de trois gouvernements en un an –⁠ sans compter celui qui n’a duré que quelques heures – ont eu pour effet d’exaspérer nos concitoyens, d’augmenter notre instabilité économique et politique et de peser un peu plus sur nos finances publiques, dont le rééquilibrage constituait déjà une urgence.
    Nous débattons d’une énième motion de censure qui, si elle devait être votée, produirait les mêmes effets que ceux de l’instabilité dont je viens  de vous rappeler les méfaits et les conséquences plus que désastreuses pour notre pays. C’est dans ce contexte qu’une très large majorité des députés du groupe LIOT ne votera pas cette censure.

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    Bravo !

    M. Laurent Mazaury

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    Cela étant réaffirmé, il nous faut maintenant dire avec fermeté pourquoi cette large majorité du groupe ne souhaite pas la voter et ce qu’elle attend dans le futur proche –⁠ très proche.
    Tout d’abord, notre groupe l’a dit et redit depuis le mois de septembre : il est urgent que les voix républicaines de cet hémicycle puissent travailler ensemble, en faisant des compromis, pour voter de réels budgets, et non des budgets spéciaux jusqu’à l’élection présidentielle, afin que notre France puisse fonctionner et tenir son rang. Nous constatons déjà tous les jours les dégâts d’une éventuelle loi spéciale et de l’instabilité politique dans nos territoires, où des entreprises hésitent à s’installer et où d’autres ont peur d’investir.
    Par ailleurs, nous attendons de vous, monsieur le premier ministre, un réel dialogue avec le Parlement ainsi qu’un investissement –⁠ ou un réinvestissement – considérable dans certains secteurs que nous connaissons tous : la justice, la sécurité, la santé, l’éducation. Et que dire de nos territoires ultramarins, qui manquent cruellement de moyens ? Ces sujets deviennent une source de tensions et d’exaspération pour nos concitoyens.
    S’agissant des retraites, le groupe LIOT défend depuis longtemps la suspension de la réforme de 2023 ainsi que la tenue d’une conférence de financement. Aussi accueillons-nous avec bienveillance –⁠ mais aussi avec beaucoup d’attentes – votre volonté de la suspendre. Il ne s’agit pas seulement d’attendre 2027, bien que l’élection présidentielle puisse donner un nouveau souffle à ce débat, mais de travailler dès aujourd’hui, avec sérieux et en écoutant nos concitoyens et les partenaires sociaux, à une réelle refonte du système. Celle-ci devra viser à la fois à protéger notre modèle social et à assurer la pérennité de son financement à long terme, dans le contexte démographique que nous connaissons et que personne ne peut nier.
    Nous attendons également de vous que les débats qui s’annoncent puissent conduire à une plus grande justice fiscale. Il n’est pas possible de faire toujours reposer les efforts sur les mêmes. Beaucoup de nos concitoyens ne comprennent plus pourquoi ils travaillent quand ils rencontrent des difficultés pour se soigner, pour se loger, voire pour se nourrir. Leur pouvoir d’achat diminue pendant qu’ils voient les plus grandes fortunes s’enrichir davantage chaque année.
    Dans ce contexte, il est indispensable que les plus fortunés contribuent davantage à l’effort, sans toucher pour autant le capital productif, et d’agir pour que le travail paie plus. C’est ce chemin que le groupe LIOT a toujours souhaité emprunter.
    Notre groupe veillera également à ce que les territoires d’outre-mer ne soient pas mis de côté. Chacun d’entre eux fait face à des enjeux spécifiques et urgents. Je pense notamment, pour n’en citer qu’un –⁠ et cela ne vous surprendra pas –, à Mayotte qui, il y a près d’un an, a été violemment frappée par le cyclone Chido. Nous connaissons le bilan de cette catastrophe. Il est désormais temps d’agir : une ligne budgétaire spécifique, relative aux 4 milliards d’euros prévus, doit enfin concrétiser la promesse donnée ici même, dans cet hémicycle.
    Par ailleurs, comme l’a déjà rappelé notre président délégué Christophe Naegelen, placer le ministère des outre-mer en treizième position dans l’ordre protocolaire constitue un mauvais signal –⁠ signal symbolique, certes, mais mauvais. (M. Frédéric Maillot applaudit.) Nous veillerons donc particulièrement à ce que tous les territoires d’outre-mer, mais également la Corse, soient bien pris en compte.
    Il est impératif pour les Français que nous puissions travailler dans la confiance. Pour cela, votre indépendance vis-à-vis du chef de l’État est nécessaire. Le dialogue que vous appelez de vos vœux traduit –⁠ j’en suis convaincu – une volonté sincère de votre part, mais il ne pourra se nouer sans votre libération de la tutelle du président de la République.
    À cet égard, nous ne pouvons accepter que celui-ci rejette la responsabilité de l’instabilité sur le Parlement, alors qu’elle est indiscutablement le fruit malheureux d’une mauvaise décision –⁠ la dissolution de 2024 –, prise seul et pour de mauvaises raisons, qui a coûté plus de 14 milliards d’euros à la France selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Malheureusement, sa récente déclaration ne l’honore pas ; il ne faudrait pas qu’elle alimente en coulisse les ressentiments au cours des débats indispensables à notre pays qui vont bientôt commencer.
    Nous ne pouvons pas nous contenter de promesses. Nous devons donc poser des actes concrets et construire en commun, dans le seul intérêt des Français. C’est l’appel que je vous lance, à vous, monsieur le premier ministre, mais également à tous nos collègues.
    Si notre groupe, dans sa très grande majorité, ne votera pas la censure, il restera responsable. Si, à l’avenir, le dialogue que nous souhaitons nouer avec vous et votre gouvernement pour faire face aux urgences devait être rompu, notre décision d’aujourd’hui pourrait être différente demain. Quand bien même nous avons le plaisir de voir sur le banc des ministres notre cher collègue, ami et ancien président de groupe Laurent Panifous, nous restons un groupe d’opposition mais qui se veut, comme il l’a toujours été, constructif.
    Nous espérons que cette attitude d’opposition constructive contribuera à des débats sincères qui permettront l’adoption de mesures justes et d’un budget le plus équilibré possible dans ces circonstances politiques particulières. Vous avez souhaité renoncer à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. C’est une première étape vers une écoute sincère de votre part. Néanmoins, il faut aussi que, durant les débats, les propositions que chacun d’entre nous formulera puissent être entendues et appréciées. Aller jusqu’au bout des échanges sans prendre en considération les propositions de tous n’aboutirait à aucune mesure efficace pour notre pays et continuerait à alimenter la méfiance de nos concitoyens.
    Donnons un budget juste à notre pays. Je fais ici le vœu que les débats de notre Parlement aboutissent à des propositions réalistes et évitent ainsi, contrairement à l’an dernier, toutes les surenchères financièrement délirantes. En résumé, je n’ai qu’une chose à dire : au travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs du groupe HOR. –⁠ Mme Joséphine Missoffe applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Ciotti.

    M. Éric Ciotti (UDR)

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    Ce matin, la représentation nationale doit faire un choix, difficile et courageux, qui engage l’avenir de notre nation tout entière.
    Oui, nous devons choisir entre la continuité d’un pouvoir usé jusqu’à la corde, sans cap et sans légitimité, et le sursaut de la vérité et du courage ; choisir ou non d’effacer le macronisme ; choisir ou non de mettre fin aux souffrances des Français ; choisir ou non de mettre fin à l’immigration de masse et à l’ensauvagement de notre société ; choisir ou non de stopper la spirale infernale des 3 400 milliards de dette et du record mondial des impôts, comme le rappelait récemment le Fonds monétaire international (FMI), qui dénonçait la gestion calamiteuse du président Macron et prévoyait qu’à l’horizon 2030, la dette française dépasserait celle de la Grèce –⁠ voilà le résultat de votre gestion ! Enfin, choisir ou non de sauver nos services publics et de protéger nos concitoyens les plus fragiles.
    Avec le groupe Union des droites pour la République, nous avons déposé cette motion de censure, aux côtés de Marine Le Pen et du groupe Rassemblement national. Non par calcul, mais par conviction ; parce que nous croyons que la France mérite mieux que la survie d’un système qui s’effondre.
    Depuis huit ans, les Français regardent un pouvoir qui promet la réforme mais ne fait que livrer la confusion ; qui parle d’autorité mais pratique la faiblesse ; qui prétend incarner la modernité mais ressuscite les inepties d’une gauche qui aura fait tant de mal à la France.
    Ce dernier gouvernement n’est pas celui du redressement, c’est celui du renoncement. Il n’a pas de majorité, pas de vision, pas de légitimité. Il n’a qu’un seul maître, qu’un seul guide, qu’une seule boussole : la peur –⁠ la peur du peuple français, la peur des urnes. Nous ici, représentants de la coalition des patriotes amoureux de la France –⁠ cette coalition qu’attendent les Français –, nous n’avons pas peur.
    En homme de droite représentant les aspirations de millions de Français, je censurerai avec détermination votre gouvernement fantoche. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.) Je le fais sans hésitation, sans état d’âme, sans ambiguïté, pour une raison simple, évidente pour tous les Français : votre politique est tout simplement socialiste.

    M. Éric Ciotti

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    Oui, je censurerai un gouvernement socialiste dont M. Hollande est devenu le vice-premier ministre, un gouvernement otage du Parti socialiste, un gouvernement prisonnier d’Olivier Faure, qui vous tient, qui vous contraindra, qui vous dicte déjà votre ligne. Aujourd’hui, ils vous ont imposé de reculer sur la réforme des retraites –⁠ nous verrons ce qu’il en adviendra –, le seul totem du macronisme, que vous avez bradé à la sauvette. Demain, ils vous imposeront la taxe Zucman (Sourires et exclamations sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS), le retour de la taxe à 75 %, des impôts, des taxes, des normes, des règlements, et vous céderez ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.) À genoux, pour survivre piteusement, vous céderez sur tout.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Il s’y connaît !

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Il s’est mis à genoux devant Marine Le Pen !

    M. Éric Ciotti

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    Vous céderez sur les impôts, sur les dépenses, sur la dette, sur l’immigration, sur la sécurité. Déjà, le ministre de l’intérieur conteste pudiquement qu’il y ait une submersion migratoire, alors que notre pays a accueilli l’année dernière près de 550 000 étrangers. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. Éric Ciotti

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    Je censurerai un gouvernement socialiste et son budget qui incarne la recette immuable du socialisme : toujours plus de dépenses –⁠ 30 milliards –, toujours plus de dette –⁠ 77 milliards d’intérêts de la dette –, toujours plus d’impôts –⁠ au moins 19 milliards.

    M. Roland Lescure, ministre

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    C’est faux !

    M. Éric Ciotti

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    Ce budget, c’est la fuite en avant d’un gouvernement qui ne sait plus produire, qui punit l’effort, qui dévalorise le travail,…

    M. Pierre Pribetich

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    Oh là là !

    M. Éric Ciotti

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    …qui décourage l’investissement, qui alourdit la fiscalité et qui étouffe la compétitivité. Je censurerai ce gouvernement car nous combattons sa philosophie selon laquelle la France se maintient par la redistribution et non par le travail, par la dépendance et non par la liberté, par la dépense et non par la responsabilité. Mais ce gouvernement traduit en quelque sorte le retour aux sources du macronisme. Oui, vous revenez aux origines. Rappelons-le, Emmanuel Macron fut l’homme lige de François Hollande –⁠ son secrétaire général à l’Élysée, puis son ministre de l’économie – avant, certes, de le trahir. (M. Pierre Pribetich s’exclame.) Derrière l’opportunisme, ce pouvoir, en réalité, n’a jamais cessé d’être celui de la gauche camouflée, cachée sous les habits d’un prétendu nouveau monde. (M. Benjamin Lucas-Lundy s’esclaffe.) Vous avez berné les Français. Certains ont cru naïvement à la promesse du « en même temps »,…

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Nous n’y avons jamais cru !

    M. Éric Ciotti

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    …mais ce dépassement a fini par tourner à la confusion. Cette confusion, à présent, se traduit par la compromission et par le chaos. Nous censurerons car nous croyons à la liberté, à l’identité, à l’autorité, à la responsabilité, à la souveraineté, au mérite, au travail, toutes ces valeurs que vous avez renoncé à défendre (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN), et parce que nous savons qu’on ne redresse pas la France avec les idées de ceux qui l’ont terriblement affaiblie, abaissée, dégradée.

    M. Éric Ciotti

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    J’en appelle à tous ceux qui aiment la France : votez cette motion de censure, au-delà des partis, au-delà des consignes, au-delà des intérêts personnels. N’ayez pas peur !

    M. Pierre Pribetich

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    Il se prend pour le pape !

    M. Éric Ciotti

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    N’ayez pas peur du jugement des Français ! Ne sacrifiez pas la France à la survie d’un système politique déjà mort. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.) Comme en 1958, l’heure du courage a sonné. Ne sacrifiez pas les Français à la survie d’un président déchu qui a trahi la patrie.

    M. Éric Ciotti

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    Je m’adresse en particulier aux députés du groupe Droite républicaine –⁠ même si leurs bancs sont quasi intégralement vides, cher Pierre Cordier. (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. Pierre Cordier

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    Il n’y a pas la quantité, mais il y a la qualité ! (Sourires.)

    M. Éric Ciotti

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    Voilà ce que représente désormais la famille politique que j’ai eu l’honneur de présider, qui fut l’héritière du général de Gaulle : elle est absente au rendez-vous des Français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Plusieurs députés du groupe RN

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    La honte !

    M. Éric Ciotti

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    Malgré leur absence, je m’adresse, par l’intermédiaire de Pierre Cordier, qui a le courage d’être là (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN), à mes amis Les Républicains : n’écoutez pas votre peur. Je la connais, je l’ai connue ; ne l’écoutez pas. Ne cédez pas aux menaces, aux coups de menton, aux calculs à la petite semaine, aux tentatives de déstabiliser les uns pour valoriser les autres. Écoutez les Français, écoutez vos électeurs, écoutez vos sympathisants,…

    M. Éric Martineau

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    Écoutez-vous parler !

    M. Éric Ciotti

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    …écoutez surtout la France, qui vous demande d’arrêter ce désastre et de la sauver avec nous. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.) Refuser la censure, c’est gagner peut-être quelques semaines sous la tutelle de M. Olivier Faure, un hypothétique et court répit avant une dissolution inéluctable ; mais refuser la censure, c’est perdre, avec certitude et définitivement, la confiance de ceux qui vous ont donné mandat pour les représenter et pour les protéger. Les menaces, la peur, ne vous sauveront pas ; l’union, oui ! Empruntez le chemin courageux de l’union comme je l’ai fait l’année dernière : censurez. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.) Ne vous compromettez pas dans le soutien à ce gouvernement. N’avalez pas cette couleuvre, ce boa, cet alligator rose ! (Sourires.) Aucun électeur de droite ne vous le pardonnerait. Avec nous, osez le courage ! Censurez ; pas pour vous, mais pour la France. (Les députés des groupes UDR et RN se lèvent pour applaudir et acclamer l’orateur.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    Mme Émeline K/Bidi (GDR)

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    Depuis un an, notre pays est confronté à la plus grave crise politique qu’il ait connue sous la Ve République. Monsieur Lecornu, vous êtes le cinquième premier ministre à se présenter devant notre assemblée depuis 2022. La sortie de crise nécessite assurément le respect mutuel et le respect de nos institutions. Or le respect est fondé sur la confiance, la confiance sur l’honnêteté et l’honnêteté sur le respect de la parole donnée.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Pourtant, depuis votre récente nomination, nous avons essuyé vos fausses promesses. En premier lieu, vous avez promis la rupture, alors que, tant dans la méthode que dans le fond, vous restez fidèle à Emmanuel Macron. Nous attendions un gouvernement de gauche ; c’est à droite que vous êtes allé chercher un semblant de majorité, avant que cette même droite vous laisse seul au milieu du gué. Vous avez promis le dialogue, mais vous refusez d’écouter. Vos longues consultations n’ont finalement permis que la reconduction d’un gouvernement composé des derniers fidèles, des derniers soldats, appuyés sur un socle qui n’a plus rien de commun ni de majoritaire. Vous vous enlisez dans le déni démocratique. Vous avez même promis, après votre démission, de ne plus revenir, mais vous voilà devant nous aujourd’hui.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Pour rester coûte que coûte, vous promettez encore. Après que vos amis ont fait adopter en force, contre le Parlement et contre le peuple, la réforme des retraites, vous concédez enfin –⁠ tout juste – sa suspension. Il vous aurait suffi d’un simple décret pour tenir cette promesse, mais vous préférez nous renvoyer à un amendement au PLFSS, un amendement que votre socle bancal a déjà promis de combattre de toutes ses forces. Entre l’obstruction parlementaire et les rouages du calendrier budgétaire, bienheureux celui qui peut croire encore à cette promesse de victoire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.) Quand bien même nous parviendrions à faire adopter un tel amendement, quel maigre résultat : neuf mois de travail en plus et des pensions au rabais ! Vous avez promis aux Français une facture salée ; en réalité, nous ne reviendrons pas à l’état d’avant 2022. Au groupe GDR, nous avons fait de la lutte contre la réforme des retraites un symbole fort de notre mandat. Nous avons été de tous les votes, de toutes les manifestations, dans cette assemblée comme dans la rue. Mais voyez-vous, les symboles, cela ne se brade pas !

    Mme Émeline K/Bidi

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    Alors, pour tenter de nous convaincre, vous promettez toujours. Vous faites mine de redécouvrir la démocratie parlementaire. Vous promettez désormais d’abandonner l’usage du 49.3 –⁠ et nous devrions vous croire désarmé ? De combien d’autres outils constitutionnels userez-vous pour contraindre les débats et faire adopter votre budget ? Abandonnerez-vous l’utilisation du vote bloqué prévu à l’article 44, alinéa 3 ?

    M. Pierre Henriet

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    C’est un outil du droit ! C’est dans la Constitution !

    Mme Émeline K/Bidi

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    Délaisserez-vous la seconde délibération, prévue à l’article 101 de notre règlement ? Si nous augmentons les recettes, renoncerez-vous à nous opposer l’article 40 de la Constitution lors de l’examen des dépenses ? Enfin, renoncerez-vous à procéder par voie d’ordonnance, comme les articles 47 et 47-1 vous en offrent la possibilité ? Sur tous ces outils, vous ne vous êtes jamais prononcé. Le renoncement à l’article 49.3 est un leurre et vous le savez. Même minoritaire, même affaibli, même esseulé, vous continuez de vous jouer de notre assemblée.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Quant au président de la République, alors que 68 % des Français réclament désormais sa démission, il s’enferme dans le déni, menace de dissoudre l’Assemblée nationale. Quelle drôle de partition : pendant que vous flattez les députés pour tenter de leur faire croire que l’avenir du pays est entre leurs mains, votre mentor rappelle que le véritable pouvoir est entre les siennes. Vous avez en commun de vouloir faire croire que l’origine de la crise comme sa solution reposeraient uniquement sur notre assemblée –⁠ habile façon de fuir votre responsabilité. Or si notre assemblée est morcelée et sans majorité, c’est par la faute d’Emmanuel Macron qui, un soir de juin 2024, a pris la décision, seul et sans même en informer son propre camp, de prononcer la dissolution. Voilà la véritable cause du désordre politique. Depuis un an, pour compenser son absence de majorité, il use et abuse de la Constitution, fragilisant le pouvoir législatif et l’ensemble de nos institutions, mettant à nu les fragilités de la République, transformant la crise politique en crise institutionnelle, tout cela dans l’unique but de préserver ses intérêts et ceux d’une poignée de très riches à qui il a fait des milliards d’euros de cadeaux fiscaux depuis son arrivée au pouvoir, au détriment des travailleurs, des retraités, des étudiants, des ménages pauvres et modestes, de la jeunesse qu’il sacrifie.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Votre budget pour 2026 en est la parfaite illustration : année blanche, baisse des aides au logement, augmentation du coût des carburants, augmentation de la TVA pour les autoentrepreneurs, gel des barèmes de l’impôt sur le revenu, baisse du nombre de fonctionnaires, déremboursement des médicaments et tant d’autres mesures encore… Vous jugez ce budget imparfait, nous le trouvons inadmissible.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Il est vrai que les rebondissements ont été nombreux depuis votre première nomination et que le recrutement de votre gouvernement n’a pas été une sinécure. Ne croyez pas que je m’en amuse : comme la plupart de nos concitoyens, nous avons trouvé le spectacle plutôt affligeant. Dans cet emploi du temps de ministre fraîchement nommé, démissionnaire et remissionné, vous avez pourtant trouvé le temps de modifier le budget préparé par votre prédécesseur. Vous auriez pu faire mieux ; vous avez choisi de faire pire en limitant l’effort demandé aux plus riches.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Pour les territoires d’outre-mer, ce sera la double peine. Les coupes sur le budget général s’ajoutent aux coups de rabot sur la mission Outre-mer. Le taux de chômage est déjà deux à trois fois plus élevé que dans l’Hexagone ? Qu’à cela ne tienne, vous prévoyez une coupe de 350 millions sur l’exonération Lodeom –⁠ loi pour l’ouverture et le développement économique de l’outre-mer. L’innovation et l’économie font rayonner la France, mais vous prévoyez de retrancher 400 millions d’euros de l’aide à l’investissement des entreprises en outre-mer. Tous les secteurs sont concernés –⁠ le bâtiment, le commerce, le tourisme – et les conséquences seront inévitables sur l’emploi, le logement, le pouvoir d’achat. Nos territoires, que tous les indicateurs économiques et sociaux placent loin derrière l’Hexagone, avaient besoin d’un plan de rattrapage ; vous leur promettez un plan de largage.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Au nom de notre appartenance à la nation, vous souhaitez que nous participions à l’effort budgétaire. Vous avez l’égalité à géométrie variable. Depuis des décennies, nous réclamons des moyens égaux pour nos services publics, l’égalité des droits sociaux et de justes compensations pour nos difficultés structurelles. Pourtant, en 2025, il manque toujours des routes en Guyane, de l’eau à Mayotte, des logements à La Réunion. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.) Dans tous nos territoires, nous subissons le chômage de masse, la cherté de la vie, la pauvreté extrême. La France ne gère ses anciennes colonies qu’à travers les crises qu’elles traversent et les catastrophes qui les frappent. Quand les caméras se déplacent, vos regards viennent à nous. Ces crises peuvent être sociales, environnementales ou institutionnelles ; d’ailleurs, vous parvenez le plus souvent à les créer vous-même, comme en Nouvelle-Calédonie, où l’entêtement du président de la République au sujet du dégel du corps électoral a mis l’archipel à feu et à sang. En proposant le report des élections provinciales, vous lui emboîtez le pas, sans même vous remettre en question. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.)

    Mme Émeline K/Bidi

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    Monsieur le premier ministre, vous trouvez que la France est malade ? L’outre-mer agonise. Vos coupes budgétaires finiront de tuer nos économies. Ce n’est pas par dogmatisme que nous les refusons, mais par réalisme et par amour de nos pays. Chaque coup de rabot creusera un peu plus l’écart entre notre développement et celui de l’Hexagone et fera reculer l’objectif d’égalité –⁠ et, croyez-moi, nous en sommes loin. Notre message à cette tribune est clair : pas de coupe budgétaire pour l’outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. –⁠ M. Steevy Gustave applaudit également.)
    Monsieur le premier ministre, nous ne sommes pas les artisans du chaos pour lesquels vous aimeriez tant nous faire passer. Mais au nom de quoi devrions-nous nous résigner et accepter un tel budget, qui choisit d’épargner les plus riches pour accabler les ménages modestes et les petites entreprises, en outre-mer plus encore qu’ailleurs ? Pour permettre une hypothétique suspension de la réforme des retraites financée par le gel des pensions ? Parce que vous nous donnez l’illusion de pouvoir débattre en renonçant à utiliser l’article 49.3 alors que votre besace constitutionnelle regorge d’autres outils pour contraindre la discussion budgétaire ? Au nom de la sacro-sainte stabilité, mais laquelle ? Celle du président de la République assis sur son trône ou celle des marchés financiers, que vous affectionnez tant ?
    Mesdames, messieurs du gouvernement, aujourd’hui, nous ne censurons pas un homme, un nom, mais votre budget mortifère pour la France et pour nos territoires d’outre-mer. Nous censurons vos fausses promesses, vos faux-semblants, vos mensonges à la face de ceux que vous méprisez, drapés dans une démocratie d’apparat. Nous censurons le gouvernement parce que nous n’avons pas d’autre solution, parce qu’après que nous avons connu le pire, vous nous promettez encore pire. Nous vous censurons parce que nous voulons que notre pays sorte de la crise, parce que nous sommes persuadés que la seule solution est désormais le départ du président de la République. Votre départ doit le précéder. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La discussion commune est close.
    Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure déposée par Mme Mathilde Panot et 86 membres de l’Assemblée.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l’hémicycle.
    Le scrutin va être ouvert pour trente minutes : il sera donc clos à onze heures trente.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures quarante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Voici le résultat du scrutin :
    Majorité requise pour l’adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l’Assemblée         289
    Pour l’adoption                271
    La majorité requise n’étant pas atteinte, la motion de censure n’est pas adoptée.
    Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure déposée par Mme Marine Le Pen, M. Éric Ciotti et 56 membres de l’Assemblée.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l’hémicycle.
    Le scrutin va être ouvert pour trente minutes : il sera donc clos à douze heures dix.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à midi dix.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Voici le résultat du scrutin :
    Majorité requise pour l’adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l’Assemblée         289
    Pour l’adoption                144
    La majorité requise n’étant pas atteinte, la motion de censure n’est pas adoptée.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, mardi 21 octobre, à quinze heures :
    Questions au gouvernement.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à midi quinze.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra