Question écrite n° 1061 :
Assouplissement des mesures pour remboursement frais d'équarrissage

17e Législature

Question de : Mme Géraldine Grangier
Doubs (4e circonscription) - Rassemblement National

Mme Géraldine Grangier attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la situation préoccupante des éleveurs, confrontés à une recrudescence des attaques de loups sur leurs troupeaux. Si des mécanismes d'indemnisation sont en place pour soutenir ces professionnels face aux pertes subies, les règles actuelles encadrant la prise en charge des frais d'équarrissage demeurent si rigides et complexes qu'elles privent souvent les éleveurs du remboursement intégral auquel ils devraient avoir droit. L'équarrissage, pourtant essentiel pour prévenir tout risque sanitaire après une attaque, représente un coût non négligeable pour les éleveurs. Selon les données disponibles, les frais se situent entre 70 et 150 euros pour une vache et entre 15 et 30 euros pour un mouton. Bien que l'État soit censé prendre en charge ces dépenses, la réalité sur le terrain est toute autre. Les éleveurs se heurtent à de multiples obstacles administratifs et à des conditions si restrictives qu'elles rendent leur indemnisation quasi inapplicable. Par ailleurs, les mesures de protection imposées pour prétendre à cette indemnisation, telles que l'installation de clôtures électrifiées, le recours à des chiens de protection ou encore le gardiennage des troupeaux, engendrent des coûts supplémentaires. Ces mesures, bien que nécessaires, sont financièrement hors de portée pour de nombreux éleveurs, notamment les petits exploitants des zones rurales déjà en difficulté. À ces dépenses viennent s'ajouter les pertes d'animaux, ce qui aggrave encore plus leur précarité. De surcroît, la hausse continue des frais d'équarrissage, alimentée par la crise énergétique et la saturation des installations de traitement, rend la situation encore plus critique. De nombreux éleveurs se retrouvent dans l'incapacité de financer ces coûts, contribuant ainsi à la détérioration de leur situation économique déjà fragile. Dans ce contexte, elle lui demande si le Gouvernement envisage de revoir et d'assouplir les règles d'indemnisation, afin qu'elles soient en adéquation avec la réalité quotidienne des éleveurs et qu'ils puissent enfin bénéficier d'une prise en charge intégrale, comme cela avait été initialement prévu. Il apparaît urgent que les mesures de protection exigées soient adaptées aux divers contextes locaux et que les démarches administratives, tout comme les exigences financières, soient allégées pour ne plus représenter un obstacle supplémentaire. Il en va de la survie de nombreux élevages, qui jouent un rôle central dans la préservation des territoires ruraux et le maintien de la biodiversité. Elle lui demande quelles mesures elle compte prendre pour alléger ce fardeau et garantir une meilleure protection économique des éleveurs concernés.

Réponse publiée le 18 mars 2025

La détresse des éleveurs est réelle et compréhensible. L'État est à leurs côtés, conscient de l'impact de la présence du loup sur leur activité, notamment en termes économique, psychologique et d'adaptation des pratiques. L'augmentation de la population lupine et son expansion géographique se traduit par un nombre élevé de dommages aux troupeaux (10 882 victimes en 2023). Attentif à cette situation, l'État souhaite un accompagnement fort auprès des éleveurs autant pour prévenir que pour indemniser. À cette fin, le ministère chargé de l'agriculture accompagne financièrement les éleveurs pour la mise en place de mesures de protection des troupeaux. Cette politique repose sur un triptyque de moyens de protection : gardiennage, mise en place de parcs électrifiés et recours aux chiens de protection des troupeaux. Ainsi, l'aide à la protection des troupeaux contre la prédation a été maintenue et renforcée dans la nouvelle programmation de la politique agricole commune. Cette aide permet le financement du gardiennage par les bergers, de l'achat de clôtures, de l'achat et de l'entretien de chiens de protection, ainsi que la réalisation d'étude de vulnérabilité et d'un accompagnement technique. Malgré les nombreux efforts des éleveurs pour protéger leur troupeau, des difficultés réelles de protection de certains troupeaux subsistent. En matière d'indemnisation des dommages, près de 4,7 millions d'euros ont été versés en 2023, par le ministère chargé de l'écologie, à la suite de 4 091 constats. Le nouveau plan national d'action (PNA) loups et activités d'élevage 2024-2029 prévoit un délai maximum de 125 jours afin de réduire le délai d'indemnisation. Pour indemniser au plus juste les pertes liées à la prédation, les barèmes d'indemnisation des dommages, fixés en fonction de l'espèce domestique, de ses caractéristiques et selon sa valorisation, ont été revalorisés, début 2024, à hauteur de + 33 % pour les ovins et + 25 % pour les caprins. De plus, des travaux pour une meilleure indemnisation indirecte (stress, baisse de lactation, génétique…) sont en cours. Début 2024, l'arrêté fixant les modalités de recours aux tirs a été modifié afin d'améliorer le protocole de tirs. Cet arrêté permet notamment l'usage des caméras d'observation nocturne, supprime l'obligation d'éclairage pour les louvetiers, et permet de passer à deux tireurs, voire trois (selon les circonstances locales), pour les tirs de défense simple. De plus, pour simplifier les procédures de délivrance des autorisations, une instruction aux préfets prévoit que les autorisations de tir soient accordées maximum 48 heures après une attaque et que le déploiement des louvetiers interviennent dans un délai maximum de 72 heures. Considérant l'absence de référentiel pour protéger les troupeaux de bovins, équins et asins, les préfets délivrent désormais, dès la première attaque, des autorisations de tirs de défense aux éleveurs victimes d'attaques lupines. Aussi, à noter que conformément à ce que prévoit le plan national loup (PNA) et activités d'élevage pour la période 2024-2029, des expérimentations ont été validées pour les troupeaux de bovins pour lesquels il n'existe pas de référentiel de protection ayant fait ses preuves, notamment sur le territoire de la Petite Montagne du Jura et sur le Plateau supérieur du Jura. De manière générale, le Gouvernement a élaboré un projet d'arrêté modifiant l'arrêté encadrant les destructions de loups afin d'apporter une plus grande sécurité juridique aux éleveurs qui ont des autorisations de tirs pour défendre leur troupeau de bovins. Le Gouvernement souhaite reconnaître les efforts des éleveurs en matière de réduction de la vulnérabilité notamment pour les espèces n'ayant pas de référentiel de protection ayant fait leurs preuves comme c'est le cas pour les troupeaux d'ovins. Cet arrêté a fait l'objet d'une consultation publique et des mises à jour en vue de prendre en compte les attentes pertinentes sont actuellement en cours par le ministère chargé de l'écologie en collaboration avec le ministère chargé de l'agriculture. Enfin, si le loup est à l'heure actuelle une espèce « strictement protégée » au titre de la convention de Berne et de la directive européenne « habitats, faune, flore », le Gouvernement est conscient que son expansion, dans un contexte d'activités pastorales, remet en question la vitalité de certains territoires. Les États membres européens se sont ainsi accordés, fin septembre 2024, pour que la Commission européenne porte une proposition de révision du statut de protection du loup dans la convention de Berne et le classer en espèces « protégée ». Cette proposition a toujours été soutenue par la France et fait partie des objectifs du nouveau PNA. Le Gouvernement français suivra avec attention ce processus de reclassement ainsi que ses impacts à l'échelle nationale.

Données clés

Auteur : Mme Géraldine Grangier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 22 octobre 2024
Réponse publiée le 18 mars 2025

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