Sécurisation de la D2060 et report des poids lourds vers l'A19
Question de :
M. Thomas Ménagé
Loiret (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Thomas Ménagé interroge M. le ministre de l'intérieur sur la situation particulièrement préoccupante de la circulation et de la sécurité routière sur la route départementale D2060 dans le Loiret, particulièrement pour sa section allant de Courtenay à Orléans, dont l'accidentologie récente atteste d'un niveau de dangerosité structurel nécessitant une réponse. Les collisions graves survenues par exemple le 17 février 2024 à La Selle-en-Hermoy, le 15 janvier 2024 à Thorailles et le 2 février 2023 à Saint-Maurice-sur-Fessard, ainsi que l'ensemble des accidents répertoriés par la presse locale et les retours des élus locaux, mettent en évidence une configuration routière inadaptée à l'intensité du trafic et, plus particulièrement, au passage régulier de poids lourds sur un axe dont les caractéristiques géométriques et environnementales ne permettent plus d'assurer un niveau de sécurité acceptable pour les usagers. M. le député souligne que la mise en service de l'autoroute A19 devait constituer un itinéraire de délestage naturel pour les véhicules de fort tonnage, ce qui correspondait d'ailleurs aux objectifs initiaux ayant présidé à la réalisation de cet équipement. Toutefois, l'écart significatif entre les tarifs de péage applicables aux véhicules lourds et les coûts acceptables pour les transporteurs a eu pour effet de maintenir sur la D2060 un trafic de transit qui aurait dû basculer vers l'axe autoroutier, qui est plus adapté. Les difficultés récurrentes d'insertion des poids lourds sur l'A19 conjuguées à la structure tarifaire de cette concession contribuent à un phénomène de report à rebours, c'est-à-dire au maintien sur une route départementale d'un trafic qui excède manifestement ses capacités de sécurité, de résilience et de confort pour les usagers. L'inadaptation de la D2060 à un tel niveau de circulation de poids lourds se traduit par la multiplication de situations de danger, par une déformation progressive de la chaussée liée à la charge cumulée du trafic lourd et par des conditions de dépassement devenues aléatoires du fait de la largeur limitée de la voie (1x1) et de la configuration des abords. Il apparaît que l'absence de travaux de sécurisation résulte directement d'un déficit de financement, ce qui laisse aujourd'hui cet axe sans perspective d'aménagement alors même que sa vulnérabilité croît. Dans ce contexte, l'absence d'alternative gratuite pour les poids lourds soulève une interrogation juridique majeure. Si le cadre du code général des collectivités territoriales permet aux autorités départementales de réglementer la circulation pour des motifs de sécurité en vertu de l'article L. 3221-4, la question se pose de savoir dans quelles conditions une restriction générale visant les véhicules de plus de 3,5 tonnes peut être regardée comme proportionnée lorsque seule une autoroute concédée est susceptible de constituer un itinéraire de substitution sur un trajet de plusieurs dizaines de kilomètres. Il est constant que la jurisprudence du Conseil d'État admet l'existence d'un itinéraire payant comme solution de contournement dès lors que celui-ci est adapté et fonctionnel, mais l'absence d'intervention de l'État sur la tarification ou la coordination avec le concessionnaire laisse les collectivités dans une situation où aucun levier opérationnel n'est réellement disponible. Il apparaît que la capacité du conseil départemental à limiter le transit des poids lourds dépend directement de l'appréciation du caractère « raisonnable » de l'alternative proposée, ce qui suppose une analyse des contraintes techniques, financières et pratiques pesant notamment sur les transporteurs. La difficulté tient à ce que, faute d'adaptation tarifaire de l'A19 ou de mécanisme d'incitation, la restriction locale pourrait être contestée au motif qu'elle impose une charge disproportionnée aux professionnels, sans pour autant permettre la sécurisation de la D2060 dans un délai raisonnable. La collectivité se retrouve dès lors face à un vide opérationnel : elle ne peut ni engager les travaux nécessaires faute de financements, ni empêcher efficacement le transit lourd faute d'alternative économiquement soutenable et de solution répondant à une nécessaire sécurité juridique. M. le député demande donc à M. le ministre de préciser si le Gouvernement entend résoudre cette contradiction entre les compétences juridiques des collectivités, les impératifs de sécurité publique et les contraintes économiques liées à l'usage d'une infrastructure autoroutière concédée. Il souhaite connaître la position de l'État sur la nécessité d'un réexamen des conditions tarifaires pour les poids lourds sur l'A19, d'un soutien accru aux collectivités pour la sécurisation des axes départementaux exposés à une accidentologie élevée ainsi que d'une clarification du cadre juridique applicable aux restrictions de circulation lorsque l'unique itinéraire de substitution est une autoroute à péage. Il considère enfin qu'une intervention du Gouvernement est indispensable afin de permettre la mise en œuvre d'une stratégie cohérente de report modal des poids lourds vers l'A19 en lien avec le conseil départemental du Loiret et, le cas échéant, les collectivités concernées, cette solution étant susceptible de réduire de manière significative les risques graves auxquels les usagers de la D2060 demeurent exposés aujourd'hui. Il souhaite connaître ses intentions à ce sujet.
Auteur : M. Thomas Ménagé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Transports routiers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date :
Question publiée le 2 décembre 2025