Question écrite n° 1477 :
Arrivée de migrants potentiellement dangereux pour la sécurité des Français

17e Législature

Question de : M. Sébastien Chenu
Nord (19e circonscription) - Rassemblement National

M. Sébastien Chenu alerte M. le ministre de l'intérieur sur une note confidentielle, rédigée par la police aux frontières et l'Office français de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim), qui alerte sur une pression migratoire grandissante sur plusieurs voies d'accès à l'Union européenne et soulève des préoccupations sécuritaires importantes pour la France. Selon cette note, 138 238 migrants sont déjà entrés illégalement en Europe en 2024, s'ajoutant aux 380 750 entrées en 2023 et aux 331 551 de 2022. La voie occidentale, qui concerne l'Espagne et ses enclaves de Ceuta et Melilla ainsi que les îles Canaries, est particulièrement affectée. Le nombre d'arrivées irrégulières en Espagne a bondi de 63 % cette année, atteignant 35 456 migrants pour les huit premiers mois de 2024 contre 21 780 sur la même période en 2023. À Melilla, les tentatives de franchissement des clôtures frontalières ont explosé de 167 % en juillet 2024 comparé à juillet 2023. Les flux en provenance de pays comme le Mali, le Sénégal et le Maroc, ainsi que les tentatives de contournement des dispositifs de surveillance maritime par des embarcations de plus grande taille, mettent à rude épreuve les systèmes de contrôle des frontières espagnoles. Cette situation fait craindre une répercussion de la pression migratoire sur les frontières franco-italienne et franco-suisse. Le rapport souligne également des risques sécuritaires grandissants, notamment avec l'arrivée par la Grèce de migrants palestiniens, décrits comme « potentiellement dangereux ». En août 2024, neuf Palestiniens en provenance de camps de réfugiés syriens ont été interceptés sur l'île grecque de Leros. Ces individus, porteurs de passeports de l'Autorité palestinienne, ont suscité de vives inquiétudes en raison de leur comportement agressif et de leurs réponses évasives lors des interrogatoires. Ces profils atypiques, qui diffèrent de ceux observés précédemment, laissent craindre que des personnes à risque puissent entrer en Europe et éventuellement en France. Ces comportements à risque se manifestent également par les stratégies dangereuses adoptées par les passeurs, comme des manœuvres de contournement maritime ou des comportements de fuite face aux forces de l'ordre, provoquant parfois des confrontations directes. En août 2024, une embarcation rapide a tenté d'échapper à un contrôle des garde-côtes grecs, entraînant un incident au cours duquel le pilote a été mortellement blessé. Face à cette situation, M. le député souhaite connaître quelles mesures sont prévues pour renforcer la sécurité aux frontières franco-italienne et franco-suisse, identifiées comme des zones sensibles face à cette pression migratoire croissante ? De plus, quelles actions concrètes sont mises en place pour renforcer la coopération avec les autorités espagnoles, italiennes et grecques, afin de mieux gérer ces flux migratoires et prévenir les risques sécuritaires posés par des individus potentiellement dangereux ? Enfin, il lui demande comment le Gouvernement prévoit de répondre à ces nouveaux défis en matière de gestion des comportements à risque, tant du côté des migrants que des passeurs.

Réponse publiée le 15 juillet 2025

La lutte contre l'immigration illégale constitue une priorité du ministre d'État, ministre de l'intérieur, qui répond aux fortes attentes de nos concitoyens. L'objectif est tant de ralentir les flux d'entrées que d'accélérer les éloignements. Reprendre le contrôle de la politique migratoire exige, avant tout, une lutte implacable contre les réseaux criminels. Cet objectif est poursuivi par l'ensemble des forces de l'ordre et notamment par les services de la direction nationale de la police aux frontières (DNPAF), en particulier l'état-major opérationnel des frontières (EMOF) et l'Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (OLTIM), chef de file national de la lutte contre les filières.  Sur le plan national, des instructions très fermes ont été données par le ministre d'État, ministre de l'intérieur, à tous les préfets par circulaire du 28 octobre 2024 pour renforcer le pilotage des politiques migratoires. Par instruction du 25 novembre 2024, il a par ailleurs demandé aux préfets de considérablement renforcer la surveillance et les contrôles aux frontières, avec la mise en place de véritables plans zonaux de stratégie et de surveillance des différents segments frontaliers et des axes de circulation. Un plan national de renforcement de la lutte contre le trafic illicite de migrants a par ailleurs été présenté par le ministre d'État le 7 février 2025, mobilisant des mesures opérationnelles, techniques, juridiques et de coopération internationale. Articulé autour de l'OLTIM, de la DNPAF et d'une nouvelle « cellule d'échange de renseignements sur le trafic de migrants » (CERTIM), il s'appuie sur les services du ministère (préfecture de police, directions générales de la police et de la gendarmerie nationales, direction générale des étrangers en France…), des services de renseignement et des services du ministère de l'économie. Une instruction visant à sa déclinaison territoriale a été adressée aux préfets le 22 avril 2025. La menace terroriste reste également pleinement prise en compte : le contrôle aux frontières intérieures est régulièrement reconduit. La mobilisation est réelle. En 2024, les forces de l'ordre ont démantelé 269 filières de passeurs et mis en cause plus de 1 300 trafiquants de migrants. D'octobre 2024 à février 2025, au cours des 6 premiers mois d'action du ministre d'État au ministère de l'intérieur, le nombre d'étrangers en situation irrégulière (ESI) interpellés a augmenté de 6 % par rapport à la même période de 2023-2024. Le nombre d'éloignements forcés a augmenté durant cette même période de 9 %. En 2024, plus de 21 000 éloignements ont été réalisés depuis la métropole par la police nationale, soit + 27 % par rapport à 2023 et près de 9 000 missions d'escorte d'ESI et de reconduites à la frontière ont été réalisées par la gendarmerie. Par ailleurs, plus de 135 000 procédures ont été engagées contre des étrangers en situation irrégulière en 2024, soit + 23 % par rapport à 2023. Il doit aussi être rappelé que le ministère de l'intérieur poursuit la mise en œuvre du plan « CRA 3 000 », qui prévoit de disposer de près de 3 000 places de rétention administrative à l'horizon 2027, contre 1 900 environ actuellement. Sur proposition du ministre d'État, ministre de l'intérieur, un Comité interministériel de contrôle de l'immigration s'est tenu le 26 février 2025, mobilisant tous les ministères concernés (diplomatie, justice, santé, économie, éducation, emploi, etc.). Ce Comité a notamment décidé la généralisation à l'ensemble des segments frontaliers terrestres de la « Force Frontières » (police, gendarmerie, douanes, réservistes, force Sentinelle), initialement déployée en 2023 sur la frontière avec l'Italie. Des démarches sont également engagées à l'échelle internationale et au niveau européen. La lutte contre l'immigration irrégulière est une des priorités de la France dans sa politique diplomatique (délivrance des visas, etc.). La France poursuit en particulier ses efforts dans le cadre de la refonte de l'inefficace directive « retour » et pour accélérer le déploiement du Pacte européen sur la migration et l'asile. S'agissant de l'Italie, avec laquelle une « unité de recherches opérationnelles » a été mise en place pour mieux lutter contre les passeurs, la coopération est excellente (99 % des réadmissions demandées sont exécutées par les autorités italiennes). Les réadmissions sont également importantes avec l'Espagne, second point d'entrée - après l'Italie - de l'immigration clandestine en France. La coopération avec l'Espagne est bonne et le sujet reste un point de très grande vigilance puisque les flux d'immigration sont en hausse par cette voie, alors qu'ils sont en forte baisse via l'Italie. La frontière franco-italienne demeure le premier point d'entrée en hexagone : la gendarmerie nationale y a interpellé 6 788 étrangers en situation irrégulière (ESI), essentiellement dans le département des Alpes-Maritimes. La réserve opérationnelle de la gendarmerie y contribue activement dans le cadre de l'opération Limes. A la frontière franco-espagnole, l'action de la gendarmerie a permis d'interpeller plus de 1 000 ESI en 2024. La coopération est également bonne avec la Suisse. La pression migratoire à la frontière franco-suisse a fortement diminué en 2024 par rapport à 2023 (- 65 %). La France s'est également engagée pour faire évoluer le cadre de la coopération migratoire avec le Royaume-Uni. Les accords de Sandhurst financent par exemple l'emploi quotidien d'un escadron de gendarmerie mobile et de 500 réservistes opérationnels sur la côte de la Manche et une partie des infrastructures et équipements afférents, grâce à un plan pluriannuel de 540 M€ de 2023 à 2026. En plus de ces financements britanniques, les forces de sécurité intérieure contribuent par l'engagement quotidien de nombreux effectifs sur la voie publique et dans des missions spécifiquement dédiées. Sur le plan international, un représentant spécial a été nommé pour œuvrer au renforcement des accords de réadmission des étrangers en situation irrégulière. Les partenariats avec les pays situés sur les principales routes migratoires ont été renforcés. Des accords de réadmission ont par exemple été signés avec le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Un dialogue migratoire intense a été développé avec le Maroc, qui s'est par exemple traduit, en janvier et février 2025, par une hausse de 93 % des laissez-passer consulaires obtenus dans les délais utiles à l'éloignement (par rapport à la même période de 2024). Les efforts se poursuivent pour densifier les accords au Moyen-Orient et en Asie, et pour obtenir une réelle coopération migratoire avec l'Algérie. Le ministère de l'intérieur réalise des missions au profit de l'agence européenne FRONTEX : près de 100 gendarmes y ont par exemple été détachés en 2024 pour des missions provisoires, et la gendarmerie doit être en mesure de mobiliser en cinq jours une force de réaction rapide de soixante militaires. La contribution de la gendarmerie à FRONTEX doit augmenter pour atteindre plus de 150 gendarmes détachés en 2027 sur des missions de courte ou de longue durée. Enfin, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, soutient plusieurs textes d'initiative parlementaire visant à reprendre le contrôle sur l'immigration, notamment concernant l'extension de la durée de rétention des délinquants dangereux, et le renforcement de l'intervention de l'OFII dans les centres de rétention administrative à la place des associations.

Données clés

Auteur : M. Sébastien Chenu

Type de question : Question écrite

Rubrique : Immigration

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 15 juillet 2025

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