Sapeurs-pompiers et maladies professionnelles
Question de :
M. Lionel Tivoli
Alpes-Maritimes (2e circonscription) - Rassemblement National
M. Lionel Tivoli attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la reconnaissance pour les sapeurs-pompiers de certains cancers comme maladies professionnelles. Outre l'exposition aux fumées d'incendie lors des différentes interventions qu'ils réalisent, les inhalations involontaires de retardateurs de flammes auxquelles sont régulièrement soumis les sapeurs-pompiers présentent un risque significatif pour leur santé. En effet, ces retardateurs de flammes, composés chimiques dont l'objet est de limiter l'inflammabilité des produits du quotidien, ont été reconnus comme substances cancérogènes et reprotoxiques. Le taux de mortalité par cancer chez les sapeurs-pompiers apparaît plus élevé que dans la population générale. Cependant, seuls deux types de cancers sont actuellement susceptibles d'être considérés comme liés à l'activité des sapeurs-pompiers : le carcinome du nasopharynx pour les travaux d'extinction des incendies et le carcinome hépato-cellulaire pour les services de secours. Ce chiffre est bien supérieur dans d'autres pays, notamment au Canada ou en Ontario aux États-Unis d'Amérique. Face à cette situation particulièrement préoccupante, il est urgent de réactualiser la liste des cancers pouvant être reconnus en tant que maladies professionnelles chez les sapeurs-pompiers. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire part des mesures qui pourraient être prises afin d'assurer une meilleure protection aux soldats du feu dont les missions, parfois périlleuses, sont indispensables à la sécurité des Français.
Réponse publiée le 3 juin 2025
La prise en charge des risques liés à la toxicité des résidus d'incendie et à la pollution par les particules fines constitue une problématique majeure de protection de la santé des sapeurs-pompiers clairement identifiée par le Gouvernement. Depuis plusieurs années et notamment à la suite de la publication en 2017 d'un rapport de la CNRACL relative à la prévention des risques induits par les résidus des fumées d'incendie sur la santé des sapeurs-pompiers, les services du ministère de l'intérieur ont engagé un plan d'actions visant d'une part, à mieux connaître la réalité de l'exposition à certains risques et leurs conséquences pour les sapeurs-pompiers, et, d'autre part, à mieux les prévenir et les empêcher. Après avoir établi, en 2018, un guide de doctrine opérationnelle « prévention des risques liés à la toxicité des fumées » à destination des services d'incendie et de secours (SIS), l'amélioration de la protection individuelle des sapeurs-pompiers a été inscrite dans des travaux continus notamment au sein du plan global de santé, sécurité et qualité de vie en service porté par le ministère de l'intérieur et s'est traduite par l'évolution des équipements de protection individuelle (cagoule de protection filtrante, …). Dans le domaine de la connaissance des risques, les services du ministère de l'intérieur ont également initié plusieurs chantiers d'études relatifs à l'élaboration d'une matrice emploi/tâche/exposition visant à identifier les risques associés à chaque activité de sapeurs-pompiers et au soutien d'un travail de thèse sur les effets à moyen et long termes des activités de sapeur-pompier sur la santé. S'agissant des maladies professionnelles chez les sapeurs-pompiers, il peut être utile de rappeler qu'il est d'ores et déjà possible de bénéficier de leur reconnaissance lorsque l'affection résulte d'une maladie non inscrite au tableau des maladies professionnelles, conformément au dernier alinéa de l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique. Des travaux scientifiques nécessaires à conforter le faisceau d'arguments internationaux tendant à mettre en évidence le lien entre l'activité de sapeur-pompier et certains cancers sont en cours. Ils devraient permettre d'établir un consensus, sur les pathologies à soumettre à l'inscription au tableau des maladies professionnelles, notamment au sein de l'observatoire national sur la santé des agents des SIS, mis en place en 2024 et dans lequel les organisations représentatives des sapeurs-pompiers professionnels sont partie prenante. Une demande de révision du tableau des maladies professionnelles a par ailleurs été adressée à madame la ministre chargée du travail en décembre 2024. Ces études contribueront également à poser des éléments plus concrets du suivi de l'exposition des sapeurs-pompiers aux risques inhérents aux différentes missions des services d'incendie et de secours, éléments qui pourront utilement éclairer le suivi médical des sapeurs-pompiers tout au long de la carrière ainsi que le suivi post-professionnel instauré dans la fonction publique territoriale par le décret n° 2015-1438 du 5 novembre 2015. En particulier, concernant le suivi tout au long de leur carrière, les sapeurs-pompiers bénéficient d'ores et déjà d'examens cliniques et de bilans sanguins réguliers permettant de dépister les cancers hématologiques tel le lymphome. Le dépistage du sang dans les urines permet aussi de détecter les cancers de l'arbre urinaire. S'il n'existe pas d'examens de dépistage systématique aujourd'hui recommandés en France en prévention de la toxicité des fumées, des cytologies urinaires pour les sapeurs-pompiers très exposés, comme certains formateurs utilisant régulièrement les dispositifs de feux réels, sont préconisés par un référentiel national, à paraître dans le cadre de la réforme des textes relatifs à l'aptitude des sapeurs-pompiers. Il est souligné que la réforme de l'arrêté du 6 mai 2000 fixant les conditions d'aptitude médicale des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires est largement initiée suite à la parution du décret n° 2025-330 du 10 avril 2025 relatif à la médecine d'aptitude des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires ainsi que de son arrêté d'application qui permettront, au 1er janvier 2026, de disposer d'un système rénové. De même, les actions menées avec les parlementaires sur les conditions d'exercice de la médecine professionnelle et préventive au sein des services d'incendie et de secours seront aussi de nature à mieux tenir compte des risques de cancers. Dans un domaine particulièrement complexe, les travaux et les dispositifs que le Gouvernement déploient ont vocation à déterminer plus précisément les risques auxquels les sapeurs-pompiers sont exposés, y compris pour les fumées toxiques, à prévenir l'apparition de maladies et à mieux les protéger face à ces risques.
Auteur : M. Lionel Tivoli
Type de question : Question écrite
Rubrique : Accidents du travail et maladies professionnelles
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 5 novembre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025