Réglementation problématique des bâches à incendie en Charente-Maritime
Question de :
M. Pascal Markowsky
Charente-Maritime (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Pascal Markowsky alerte M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés financières croissantes rencontrées par les communes rurales de Charente-Maritime dans l'application de la réglementation relative à la défense extérieure contre l'incendie (DECI). Cette réglementation impose aux communes l'installation de bâches incendie, des citernes souples destinées à pallier l'insuffisance des réseaux d'eau potable dans les zones rurales afin de garantir un accès rapide à l'eau pour la lutte contre les incendies. Si cet objectif de sécurité est essentiel, les contraintes financières liées à la mise en conformité posent de sérieux problèmes aux collectivités locales. En effet, ces bâches incendie, dont le coût peut atteindre 20 000 euros l'unité, représentent une charge considérable pour les petites communes, notamment celles composées de nombreux hameaux ou réparties sur un territoire étendu. Certaines d'entre elles doivent en installer plusieurs pour se conformer aux exigences légales et dans certains cas, il est nécessaire d'en déployer jusqu'à une dizaine, ce qui amplifie encore le poids financier. Les élus locaux s'interrogent également sur l'efficacité réelle de ces bâches, qui sont parfois peu utilisées par les services d'incendie, lesquels privilégient souvent des points d'eau naturels ou des camions-citernes. Bien que l'État subventionne jusqu'à 80 % du coût de ces installations par le biais de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), le reste à charge de 20 % demeure une contrainte financière importante pour des communes déjà confrontées à la baisse des dotations publiques et qui réclament une meilleure utilisation des ressources. Par ailleurs, il est à noter que l'installation de ces bâches pose des problèmes d'intégration paysagère, notamment lorsqu'elles sont situées à proximité de sites sensibles. Leur implantation près de monuments historiques, de sites classés ou d'espaces naturels protégés dégrade l'harmonie visuelle de ces lieux emblématiques, mettant en péril la préservation du patrimoine et des paysages ruraux. Il est donc crucial de réfléchir à des solutions alternatives ou à des critères d'implantation plus stricts pour éviter de porter atteinte à ces sites tout en garantissant la sécurité incendie. Elles doivent par ailleurs être remplacées au bout de dix ans environ, ce qui ajoutera à terme une nouvelle pression financière sur les collectivités. Beaucoup d'élus estiment que l'argent mobilisé pour ces bâches pourrait être mieux employé pour d'autres projets essentiels au développement local, tels que l'entretien des infrastructures ou le renforcement des services publics. Tout en reconnaissant l'importance de garantir une protection efficace contre les incendies, les maires des communes rurales demandent une révision de la réglementation, afin qu'elle soit mieux adaptée aux réalités locales. Ils souhaitent que le cadre législatif permette de réduire les coûts pour les communes, tout en maintenant un niveau de sécurité adéquat pour les habitants. Ainsi, M. le député demande à M. le ministre quelles mesures il envisage de prendre pour réexaminer la réglementation relative aux bâches incendie, afin d'alléger la charge financière qui pèse sur les communes rurales. Il souhaite également savoir si des ajustements ou des réorientations des subventions pourraient être envisagés, afin de permettre aux collectivités de mieux prioriser leurs investissements, tout en garantissant la sécurité incendie dans des conditions financièrement soutenables.
Réponse publiée le 17 juin 2025
La défense extérieure contre l'incendie (DECI) a pour objet d'assurer, en fonction des besoins résultant des risques à prendre en compte, l'alimentation en eau des moyens des services d'incendie et de secours. Elle est placée sous l'autorité du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) chargé d'un pouvoir de police administrative spéciale. La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 et son décret d'application n° 2015-235 du 27 février 2015 ont profondément réformé les normes applicables en matière de DECI. Antérieurement fixées par voie de circulaire, notamment la circulaire n° 465 du 10 décembre 1951, elles imposaient des règles uniformes pour l'ensemble du territoire, notamment en matière de distance des points d'eau incendie. Il est précisé que la nature des points d'eau pouvant concourir à la DECI n'est pas définie au niveau national mais par chaque règlement départemental et peut revêtir plusieurs formes : poteaux et bouches d'incendie, points d'eau naturels ou artificiels, points de puisage, réseaux d'irrigation agricoles, citernes enterrées, bâches à eau… Depuis la réforme précitée de la loi 2011-2015, la DECI ne répond en effet plus à une norme nationale, mais relève d'une approche déconcentrée et décentralisée. Ainsi, le cadre juridique national de la DECI ne fixe aucune valeur de volume ou de débit des points d'eau incendie pas plus qu'il ne fixe de distance entre ces points d'eau. Toutes ces valeurs sont désormais déterminées dans le règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie (RDDECI) arrêté par le préfet de département après avis du conseil d'administration du SDIS. Par ailleurs, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent mettre en place un schéma communal ou intercommunal de DECI. Il permet notamment de détailler la DECI du territoire, de l'adapter aux particularismes, de prioriser ou de planifier sur plusieurs années les équipements à mettre en place. Le Gouvernement n'envisage pas la remise en cause des principes fondateurs de cette réforme et de revenir à des normes nationales et uniformes en matière de DECI. Toutefois, des difficultés de mise en œuvre dans certains territoires, notamment ruraux, ont été relevées et mises en exergue dans plusieurs rapports sénatoriaux ou gouvernementaux. Par instruction du 6 mars 2025, le ministre d'État, ministre de l'intérieur a demandé aux préfets de département d'arrêter d'ici la fin de l'année un plan d'actions dédié à la défense extérieure contre l'incendie consistant tout d'abord à effectuer un bilan de la mise en œuvre de cette politique publique et notamment du règlement départemental de DECI. Si ce bilan le révèle nécessaire, les préfets sont invités à adapter les règlements départementaux de DECI aux différences de situation pour pleinement mettre en œuvre les dispositions de réforme de la loi 2011-2015 tant dans sa lettre que dans sa philosophie qui ne consistait pas à passer d'une norme nationale uniforme à une règle départementale tout aussi uniforme. Pour éclairer les préfets dans l'état des lieux de la défense extérieure contre l'incendie dans leur département et d'envisager les adaptations le cas échéant nécessaires de leur règlement départemental, il leur est recommandé de s'appuyer sur une concertation avec l'ensemble des acteurs territoriaux concourant à la DECI et notamment des collectivités territoriales. Par ailleurs, le ministère de l'intérieur contribuera à mettre en valeur toutes les possibilités juridiques et techniques offertes par le cadre de la DECI ainsi que les initiatives innovantes ou de « bonnes pratiques » prises dans certains territoires.
Auteur : M. Pascal Markowsky
Type de question : Question écrite
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 5 novembre 2024
Réponse publiée le 17 juin 2025