Existence de commissariats clandestins chinois sur le territoire national
Question de :
Mme Constance Le Grip
Hauts-de-Seine (6e circonscription) - Ensemble pour la République
En raison de la fin de la XVIIe mandature, cette question écrite fut close sans réponse, Mme Constance Le Grip souhaite donc interroger M. le ministre de l'intérieur sur l'existence de commissariats clandestins chinois opérant sur le territoire national. Le 2 mai 2024, un reportage de l'émission « Envoyé spécial » a révélé pour la première fois une tentative de rapatriement forcé d'un ressortissant chinois depuis le sol français. Celui-ci aurait été orchestré par un commissariat clandestin basé à Aubervilliers avec l'implication de fonctionnaires de l'ambassade de la République Populaire de Chine en France et d'une association franco-chinoise dénommée « Amours et cœurs unis ». L'existence de commissariats clandestins chinois avait déjà été affirmée par l'ONG Safeguard Defenders lors de la publication d'un rapport en 2022 recensant une centaine de postes de police dans plus de 50 pays. Ces commissariats illégaux viseraient à contrôler et réprimer la diaspora chinoise et plus particulièrement les dissidents à travers des opérations d'intimidation et de coercition menées clandestinement. Ledit rapport identifiait alors 4 commissariats clandestins en France. Depuis 10 ans, selon cette même organisation, on dénombre plus de 12 000 rapatriements forcés à travers le monde réalisés par les autorités du ministère de la sécurité publique (MSP). Des pratiques exécutées en dehors de tout cadre légal et contraires aux principes du droit international. Enfin, la diffusion de ce reportage intervient dans un contexte plus général de hausse des activités d'ingérence en provenance de la Chine, y compris en France, comme les récentes révélations d'espionnage politique à l'encontre de parlementaires français l'illustrent. Fin 2022, le ministre de l'intérieur annonçait lors d'une séance de questions au Gouvernement au Sénat l'accentuation des efforts de renseignements de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) sur le dossier des commissariats clandestins chinois. Elle souhaite bénéficier d'un point de situation concernant l'opérationnalisation de ces commissariats clandestins sur le territoire français et aimerait connaître les dispositions envisagées par les autorités françaises pour y mettre fin si leur existence venait à être officiellement confirmée.
Réponse publiée le 3 juin 2025
Le 15 septembre 2022, l'ONG Safeguard Defenders a publié un rapport dénonçant l'existence de 54 stations de police implantées dans près de 21 pays. Ces « points de liaison » sont des émanations, à l'étranger, de collectivités et administrations locales chinoises (police, tribunaux, organismes dépendant du Parti communiste chinois, etc.). Au sein de cette catégorie des « points de liaison », les « stations de police » désignent les « extensions » à l'étranger de commissariats de police du ministère de la Sécurité publique (MSP), principale autorité policière chinoise. Ces « stations de police » ne sont pas à proprement parler des « commissariats chinois clandestins ». Elles sont composées « d'agents de liaison », incarnés par des individus ou des associations désignés au sein de la communauté. Non déclarées auprès des autorités françaises, ces entités rendent des services qui s'apparentent en tout point à ceux que des administrations régaliennes offrent, et qui entrent normalement dans le champ de la coopération bilatérale. Elles conduisent également des actions qui échappent par nature à toute coopération : collecte de renseignements sur la diaspora, participation à des actions de répression transnationale, recrutement de talents, etc. L'implantation de ces structures reflète fidèlement la vision que l'État chinois a des communautés chinoises d'outre-mer : les membres de ces communautés, quelle que soit l'ancienneté de leur installation dans le pays hôte, demeurent dans le giron de la République populaire de Chine, qui entend exercer un contrôle étroit sur eux. Le contrôle communautaire est un moyen d'entretenir les liens indéfectibles avec la mère patrie, mais aussi de s'assurer que ces communautés exposées aux influences occidentales ne deviennent pas indifférentes voire hostiles à la Chine. Le développement de ces « points de liaison » vise à contrôler et à faciliter l'administration des Chinois d'outre-mer. La DGSI a identifié 9 « stations de police » disposant de relais en France. Dès 2022, les services du ministère de l'Intérieur ont engagé diverses mesures d'entrave pour faire fermer ces structures. Les responsables de ces centres ont été convoqués par la DGSI et sommés de mettre fin à leurs activités. Un représentant des services de renseignement chinois et deux diplomates de l'ambassade ont été reçus à la DGSI et enjoints à respecter les schémas de la coopération bilatérale. Le ministère de la Sécurité publique chinois a également été mis en garde à ce sujet. À la suite de ces actions, la DGSI a pu constater la mise en pause de ce système. Des consignes ont été diffusées en ce sens par les autorités chinoises.
Auteur : Mme Constance Le Grip
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 5 novembre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025