Question de : Mme Katiana Levavasseur
Eure (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Katiana Levavasseur attire l'attention de Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins sur les conditions de travail particulièrement difficiles des infirmiers libéraux, ainsi que sur le manque de reconnaissance de leur profession. En effet, dans le cadre d'une consultation initiée par le syndicat Convergence Infirmière, près de 5 500 infirmiers libéraux de France ont partagé leurs témoignages sur leurs conditions de travail. Dans un contexte où les Français font face à une réelle pénurie de professionnels de santé et à une extension sur le territoire des déserts médicaux, le métier d'infirmier est confronté à des difficultés croissantes. Selon la consultation susmentionnée, alors que 84,42 % des infirmiers sont en réalité des infirmières, plus de 40 % des répondants indiquent soulever entre 250 et 750 kilos par jour et cela, dans des postures souvent très contraignantes, telles que la torsion du tronc, l'accroupissement ou être à genoux. Ils sont ainsi 98,78 % à déclarer adopter des postures pénibles pour effectuer les soins quotidiens. De même, les résultats de cette enquête font apparaître d'autres problèmes importants : difficultés de circulation et de stationnement, travail dans des températures extrêmes, manque d'hygiène et insalubrité de certains logements, exposition à des agents chimiques dangereux et même des violences verbales, physiques, voire sexuelles. De plus, la quasi-totalité des participants estiment que la charge mentale liée à la paperasserie administrative, à la menace des indus, aux procédures ordinales ou aux caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) sont des facteurs de pénibilité. Cela a bien évidemment des répercussions sur le moral des infirmiers libéraux, 76 % d'entre eux se déclarant fatigués, déprimés ou en burn-out en raison de leur activité. De même, plus de 65 % des infirmiers libéraux interrogés ont été contraints de consulter un professionnel de santé en raison de leurs conditions de travail, que ce soit pour des troubles musculosquelettiques, des troubles psychologiques ou sur les problèmes que leur travail engendrait dans leur couple ou sur le bien-être des enfants. Un autre sujet d'inquiétude qu'il convient de relever est la faible représentation des infirmiers libéraux dits « jeunes » (moins de 35 ans), qui ne constituent que 5,03 % des répondants, tandis que 41,06 % ont entre 50 et 60 ans. Cela témoigne d'un désintérêt marqué des jeunes générations pour cette profession, probablement informées des difficiles conditions de travail associées à ce métier pourtant crucial pour la société. Il faut agir contre cette situation et inverser la tendance ! Enfin, l'une des dernières informations que rapporte cette enquête : 79,16 % des participants s'inquiètent de la possibilité d'être contraints d'intégrer des structures d'exercice coordonné telles que les maisons de santé (MSP), les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou les équipes de soins primaires (ESP). Il serait souhaitable, pour tous, que le Gouvernement communique davantage et tienne mieux informés les professionnels de santé sur le terrain des projets à venir les concernant, pour éviter qu'une réelle méfiance s'installe entre les institutions et les infirmiers libéraux. Aussi, elle aimerait connaître la position du ministère face à ces retours du terrain, ainsi que les mesures qu'il envisage de prendre pour remédier au profond malaise touchant cette profession dans les mois à venir.

Réponse publiée le 24 juin 2025

Les infirmiers jouent un rôle essentiel dans notre système de soins, en particulier auprès des patients les plus fragiles,  grâce à la prise en charge à domicile des patients dépendants. Plusieurs mesures conventionnelles ont été adoptées au cours des dernières années pour mieux valoriser cet engagement des infirmières et infirmiers libéraux. L'avenant n° 8 de la convention nationale, entré en vigueur en janvier 2022, a prévu un doublement sur la période 2020 à 2024 du budget consacré au bilan soins infirmiers, dédié à la prise en charge des patients dépendants, avec un montant de 217 millions d'euros par an contre 122 millions d'euros prévus initialement. Par ailleurs, pour tenir compte de l'impact de l'inflation sur les frais de déplacement auxquels les infirmiers libéraux doivent faire face, en raison de l'importance des prises en charge à domicile, l'avenant n° 10, signé le 16 juin 2023, a prévu une augmentation de 10% de l'indemnité forfaitaire de déplacement à compter du 28 janvier 2024. Enfin, l'Assurance maladie a lancé au printemps 2024 une série de groupes de travail avec les organisations représentatives visant, notamment, à réduire les indus grâce à la clarification et à l'harmonisation des processus de prescription et de facturation. Par ailleurs, le rôle des infirmières et infirmiers dans l'organisation des soins sur le territoire et la transformation du système de santé se renforce depuis plusieurs années en raison de l'évolution de leurs compétences : reconnaissance de leur rôle en matière de prise en charge des plaies et de soins non programmés par la loi du 19 mai 2023, renforcement de leurs compétences vaccinales par le décret du 8 août 2023, création du statut d'infirmier-référent par la loi du 27 décembre 2023. En outre, de nombreux protocoles de coopération ont été créés pour ces professionnels (44 des 57 protocoles de coopération nationaux existants concernent les infirmiers, et 41 des 60 protocoles locaux). C'est aussi dans cette perspective que le ministre de la santé et de la prévention a lancé en mai 2023 un chantier d'ampleur pour repenser le métier d'infirmier autour de trois axes : les compétences, la formation et les carrières. Ce chantier a abouti à la proposition de loi sur le métier d'infirmier, en cours d'examen au Parlement et qui se traduira par une liste des soins rénovée dans son architecture et son contenu. Aussi, le ministre chargé de la santé et de l'accès aux soins a mandaté le directeur général de la caisse nationale de l'Assurance maladie, dans une lettre de cadrage le 20 mai dernier, pour ouvrir des négociations conventionnelles entre l'Assurance maladie et les organisations représentatives des infirmiers libéraux avant l'été 2025. Ces négociations auront vocation, d'une part, à répondre aux enjeux d'attractivité et de revalorisation du métier et, d'autre part, à donner corps, pour l'exercice de ville, à l'évolution majeure pour la profession que constitue la refonte du métier infirmier.  La loi infirmière, adoptée par le parlement, reconnait les compétences des infirmiers, inscrit pour la première fois une définition du métier, structuré autour de 5 grandes missions et ouvre l'accès à la consultation infirmière dans un cadre déterminé. C'est une avancée majeure pour la profession qui reconnait sa place dans le système de santé.

Données clés

Auteur : Mme Katiana Levavasseur

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Santé et accès aux soins

Ministère répondant : Santé et accès aux soins

Dates :
Question publiée le 5 novembre 2024
Réponse publiée le 24 juin 2025

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