Indemnisation chômage des travailleurs frontaliers
Question de :
M. Stéphane Viry
Vosges (1re circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Stéphane Viry appelle l'attention de Mme la ministre du travail et de l'emploi sur le régime d'indemnisation chômage des travailleurs frontaliers. Dans un contexte où la maîtrise des finances publiques est une priorité nationale, la question des allocations perçues par les travailleurs résidant en France mais exerçant leur activité dans les pays transfrontaliers mérite d'être posée. En effet, selon l'Unédic, plus de 77 000 de ces travailleurs perçoivent des allocations chômage calculées sur la base de leur ancienne rémunération étrangère, souvent nettement supérieure aux salaires pratiqués en France. Ainsi, l'allocation moyenne pour ces travailleurs frontaliers atteignait 2 670 euros en 2023, contre 1 265 euros pour les autres allocataires du régime français, avec une charge significative de 720 millions d'euros pour la France. Ces écarts de traitement suscitent des interrogations légitimes et révèlent une disparité avec les travailleurs ayant choisi d'exercer leurs compétences sur le sol français. À l'heure où la valorisation du travail et l'équité républicaine sont au cœur des questions nationales, envisager une réforme de ce système pour limiter les écarts de prestations apparaît comme une piste sérieuse. Plafonner ces allocations en fonction de critères plus cohérents avec le marché national pourrait constituer un signal fort en faveur de la justice sociale et de la bonne gestion des finances publiques. Il lui demande quelle est sa position face à cette situation et quelles mesures elle envisage pour rétablir une plus grande équité dans le traitement des demandeurs d'emploi au sein du régime d'assurance chômage français.
Réponse publiée le 29 juillet 2025
En application des dispositions de l'article 65 du règlement européen (CE) n° 883/2004, qui ne peuvent être modifiées unilatéralement par la France, le travailleur frontalier en chômage complet bénéficie des prestations de chômage en application de la législation de son Etat de résidence, comme s'il avait été soumis à cette législation au cours de son dernier emploi. Ces prestations sont servies par l'Etat du lieu de résidence et le calcul de l'allocation s'effectue dans les conditions de droit commun, en vigueur dans cet Etat. Un mécanisme de remboursement prévoit que l'Etat du dernier emploi rembourse 3 à 5 mois d'allocations servies à l'Etat de résidence. A ce titre, les travailleurs frontaliers résidant en France se voient appliquer les dispositions du régime général d'assurance chômage définies par le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 et, depuis le 1er janvier 2025, par la convention du 15 novembre 2024. Il n'est pas juridiquement possible de les soumettre à des règles d'indemnisation spécifiques sans risquer de contrevenir au principe d'égalité tel que défini à l'article 65 du règlement (CE) 883/2004, qui précise qu'ils « bénéficient de prestations chômage selon la législation de leur Etat de résidence, comme s'ils avaient été soumis à cette législation lors de leur dernière activité professionnelle ». En outre, une restriction de la durée d'indemnisation ou un plafonnement de l'allocation de retour à l'emploi pour les travailleurs frontaliers serait contraire aux principes européens de non-discrimination et de libre circulation des travailleurs. Toutefois, la France soutient les travaux initiés en 2016 par la Commission européenne pour réviser ce règlement et prévoir la compétence de l'Etat d'emploi en matière d'indemnisation chômage, au-delà d'une certaine durée d'emploi dans cet Etat, pour indemniser les travailleurs frontaliers en conformité au principe général du règlement de la lex loci laboris. Une telle révision restaurerait le lien entre les contributions versées à l'Etat d'activité et les prestations perçues par le demandeur d'emploi et permettrait une répartition plus équitable de la charge financière entre les États membres. Cette révision peine toutefois à aboutir, compte tenu des positions divergentes des Etats membres sur ce sujet. La présidence polonaise du Conseil de l'Union européenne qui s'est achevée le 30 juin 2025 a permis des avancées significatives sans toutefois aboutir à la révision de ce règlement européen. Aussi, le gouvernement français restera pleinement mobilisé sur cettte question au cours des prochains mois. Sans attendre la révision, la France souhaite agir dans le cadre de ses relations bilatérales avec la Suisse et le Luxembourg, pour opérer un premier rééquilibrage financier avec ces deux Etats concernant l'indemnisation du chômage des travailleurs frontaliers.
Auteur : M. Stéphane Viry
Type de question : Question écrite
Rubrique : Frontaliers
Ministère interrogé : Travail et emploi
Ministère répondant : Travail et emploi
Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 29 juillet 2025