Retour de la jeunesse des outre mer vers le territoire ultramarin d'origine
Publication de la réponse au Journal Officiel du 8 juillet 2025, page 6134
Question de :
Mme Mathilde Panot
Val-de-Marne (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Mathilde Panot interroge M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer, sur les conditions assurant un retour possible de la jeunesse ultramarine vers son territoire d'origine. En effet, la fuite des jeunes diplômés est un drame pour les départements et régions d'outre-mer. Aux Antilles par exemple, les jeunes de 21 à 29 ans sont 44 % à résider hors de leur région de naissance et jusqu'à 55 % pour Mayotte, soit presque deux fois plus que pour les jeunes des départements de l'Hexagone. Au total, 37 % des 15-64 ans nés aux Antilles vivent hors de leur région de naissance, soit 10 points de plus que pour leurs compatriotes nés dans un département de l'Hexagone. Leur retour dans leur territoire d'origine est d'ailleurs de plus en plus tardif. Cette situation cache l'ampleur de l'inégalité sociale et géographique qui persiste avec les territoires d'outre-mer, loin des promesses de continuité territoriale. Deux fois plus de jeunes de 15 à 29 ans ne sont ni en emploi ni en formation en Guadeloupe qu'en Hexagone. L'accès aux emplois publics locaux est, de fait, ségrégué : à la Réunion, 11 % des cadres publics seulement sont originaires de la Réunion, quand 45 % sont hexagonaux. Les jeunes restés au « pays » souffrent d'un taux d'emploi de plus de 20 points inférieurs à ceux résidant dans une autre région. Certes, désormais, la prise en compte du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) est possible pour les agents demandant leur mutation en outre-mer. Cependant elle n'est pas suffisamment appliquée et les données manquent à son sujet, y compris via le dit-observatoire sur le site du ministère des outre-mer. Les rapports du CESE ou de la Défenseure des droits des quatre dernières années appellent tous à agir urgemment en ce sens et établissent un certain nombre de propositions que Mme la députée souhaite porter à la connaissance de M. le ministre afin qu'elles appellent enfin des actes. La Défenseure des droits propose ainsi de renforcer l'aide au voyage en vue d'une formation dans l'Hexagone pour les jeunes qui s'engageraient à revenir travailler sur un emploi identifié dans les outremers. Elle suggère également de renforcer les liens entre Pôle emploi et des associations locales de retour professionnel dans le territoire d'origine ou d'encourager l'organisation de concours aux emplois publics avec affectation locale comme cela a pu être fait pour les concours de greffiers en Guyane et à Mayotte. Ainsi, Mme la députée souligne auprès de M. le ministre qu'il est temps que le CIMM prime réellement et légalement pour tous les agents souhaitant être mutés dans leur territoire ultramarin d'origine. De plus, elle lui demande de rendre possible la création d'un observatoire de l'emploi public ultramarin qui apparaît désormais indispensable afin de compiler des données satisfaisantes et d'émettre des recommandations ciblées sur ce sujet. Enfin, elle appelle le Gouvernement à mettre en œuvre les propositions du groupe de la France insoumise - NFP sur la création a minima d'un institut régional d'administration (IRA) ultramarins par bassin océanique et d'une Agence de soutien et de coordination à l'ingénierie locale des collectivités d'outre-mer, qui permettraient de créer une véritable « culture outre-mer » au sein du service public et des collectivités tout en permettant une insertion professionnelle renforcée.
Réponse publiée le 8 juillet 2025
Le Gouvernement est attaché à la possibilité pour les jeunes originaires des outre-mer d'y revenir, s'ils le souhaitent, pour y vivre et y travailler. Les jeunes talents des outre-mer peuvent beaucoup apporter à leur territoire de naissance ou d'origine. Ainsi, ont été déployés plusieurs dispositifs destinés à favoriser le retour des jeunes ultra-marins. En ce qui concerne les fonctionnaires, le principal mécanisme est la priorité légale de mutation selon le centre des intérêts matériels et moraux (CIMM). En vue de sécuriser et simplifier encore davantage les mutations prioritaires au titre du CIMM, une circulaire du 2 août 2023 a introduit les principes de portabilité et de conservation de la reconnaissance du CIMM. En plus de ce dispositif facilitant le retour dans le cadre d'une mutation des fonctionnaires déjà en poste, les concours nationaux à affectation locale ont été créés pour les primo-affectations. Ces concours permettent de créer une voie supplémentaire d'affectation visant à cibler la promotion des postes en tension, soit dans certains territoires, soit dans certaines professions tout en maintenant une organisation du concours au niveau central. Aussi, le recours aux concours nationaux à affectation locale répond à la nécessité d'un équilibre entre les besoins spécifiques de fonctionnaires des ministères et les difficultés particulières de vacances de postes dans certains territoires ultramarins et pour certaines professions. Cela explique, par exemple, que davantage de concours nationaux à affectation locale sont ouverts pour recruter des professeurs en Guyane et à Mayotte que dans les collectivités des Antilles. Concernant les instituts régionaux d'administration, les cinq établissements existants (Bastia, Lille, Lyon, Metz, Nantes) permettent de satisfaire à la totalité des besoins de recrutement des administrations de l'État. L'ouverture d'un IRA supplémentaire conduirait à une réduction mécanique du nombre d'élèves accueillis dans chacun des autres IRA et, par conséquent, à une surcapacité des établissements. De plus, les affectations à la sortie des IRA n'obéissent pas à une logique départementale, mais à une logique de vacance de postes. La localisation d'un IRA dans un département d'outre-mer ne permettrait doc pas une affectation ultra-marine ensuite. La priorité est, en revanche, la prise en compte des enjeux ultramarins dans la formation de tous les fonctionnaires. Le dispositif de continuité territoriale financé par l'Etat permet aux ultramarins de se former dans le cadre d'une mobilité et de retourner s'installer dans leur collectivité de départ une fois diplômés en bénéficiant du financement de la totalité des frais de transport aérien. Le dispositif "Cadres avenir" est déployé à Mayotte, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Il comporte un engagement du bénéficiaire de revenir s'installer professionnellement au terme de sa formation. Il comprend un accompagnement dont la finalité est de guider le nouveau diplômé dans sa recherche d'emploi et dans ses formalités pour une bonne installation. Toujours afin d'accompagner le retour des jeunes actifs et conformément aux engagements pris par le Gouvernement lors du dernier comité interministériel des outre-mer (CIOM) de juillet 2023, une aide dénommée "passeport pour le retour" a été créée à l'article L. 1803-6-1 du code des transports. Elle s'adresse aux anciens bénéficiaires d'un passeport mobilité qui, établis dans une région de France hexagonale, s'engagent à s'installer durablement en outre-mer pour y exercer leur activité professionnelle. Les retours aidés peuvent se faire vers l'ensemble des outre-mer. Le demandeur devra justifier d'une embauche, d'un projet de création d'une entreprise ou de reprise d'une entreprise. Il devra également répondre à des conditions de revenus. Enfin, le dispositif prévoit non seulement la prise en charge du titre de transport permettant l'installation en outre-mer mais également une allocation d'installation. A noter que ce dispositif peut être complété par toute personne morale de droit public ou privé souhaitant s'associer, par convention avec l'Etat, au financement de l'aide. Enfin, le dispositif prévoit non seulement la prise en charge du titre de transport permettant l'installation en outre-mer mais également une allocation d'installation couvrant notamment les frais de déménagement dans la limite d'un plafond. Ce dispositif peut être complété par toute personne morale de droit public ou privé souhaitant s'associer, par convention avec l'Etat, au financement de l'aide. La publication du décret d'application est prévue, après consultation des collectivités, avant la fin du mois de juillet 2025. Enfin, pour répondre à la proposition de création d'une agence de soutien et de coordination à l'ingénierie locale des collectivités d'outre-mer, le Gouvernement a mis en place un fonds outre-mer au sein de l'Agence française de développement. Cette mesure permet aux collectivités d'outre-mer de bénéficier d'un appui à la maîtrise d'ouvrage pour la mise en oeuvre de leurs projets depuis 2020, et ainsi de renforcer les capacités d'ingénierie de ces collectivités locales, reconnu comme le principal frein à la réalisation des investissements en outre-mer.
Auteur : Mme Mathilde Panot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Outre-mer
Ministère répondant : Outre-mer
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 27 janvier 2025
Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 8 juillet 2025