Question écrite n° 2279 :
Situation des familles pratiquant l'instruction en famille

17e Législature

Question de : M. Pierre-Yves Cadalen
Finistère (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Pierre-Yves Cadalen attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale sur la situation des familles pratiquant l'instruction à la maison et notamment leur difficulté à obtenir la désormais nécessaire autorisation. Le Gouvernement doit communiquer sur les résultats de l'application de cette loi. Comme le dénonçait M. le député Eric Coquerel lors de l'examen de l'article 21, l'exposé des motifs visait clairement à contrer les effets d'« un entrisme communautariste ». M. le député se demande si l'on a des résultats concernant ce but précis. Si l'on souhaite assurer la qualité de l'instruction pratiquée en famille, une mesure augmentant les contrôles (comme proposée par l'amendement n° 1120 refusé en janvier 2021) et une mesure augmentant les effectifs de l'inspection de l'éducation nationale aurait eu plus de sens. M. le député s'interroge également sur les autres conséquences de l'application de cette loi. En effet, depuis sa mise en application et la fin de l'autorisation de droit accordée pour deux ans aux enfants déjà instruits en famille, de très nombreux parents se heurtent à des refus des rectorats. Ces refus sont rarement motivés, surtout lorsque les demandes relèvent du fameux motif 4, portant sur « la situation propre à l'enfant ». Cette formule floue permet de refuser les dossiers sans guère de justification, ce qui pose la question de l'existence même d'un tel motif. M. le député s'interroge sur les critères d'évaluation des dossiers relevant de ce motif 4 et leur cadre national, seule assurance de l'égalité de traitement des dossiers sur le territoire. M. le député se demande encore pourquoi ces critères n'ont pas été communiqués aux parents afin de les aider dans la constitution de leur dossier de demande d'autorisation, comme il existe des guides pour toute requête administrative. Outre le fait que ce point n'a jamais été discuté dans l'hémicycle, ce but pose question car le nombre des enfants en instruction en famille n'a connu qu'une augmentation minime et explicable, par le contexte post-covid et par l'instauration de l'instruction obligatoire à partir de 3 ans, ce qui a entraîné le recensement de nouveaux enfants dans les chiffres. Le nombre d'enfants en instruction en famille n'est toujours que de 0,4 % en France. M. le député tient à rappeler que la majorité des parents qui pratiquent l'instruction en famille motivent leur choix par la possibilité de mieux suivre le rythme d'apprentissage de leurs enfants et la crainte des violences scolaires. Des investissements massifs dans l'école publique seraient bien plus efficaces pour qui voudrait ramener des enfants à l'école que des mesures coercitives qui pèchent par leur manque de clarté et d'honnêteté. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse publiée le 17 juin 2025

La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République (dite loi CRPR) et ses textes d'application prévoient des mesures fortes visant à lutter contre les séparatismes, notamment en garantissant le droit à l'instruction de chaque enfant. À cet égard, le législateur a prévu qu'une meilleure protection des enfants et des jeunes doit se traduire par la mise en place de modalités d'autorisation d'instruction dans la famille plaçant l'intérêt supérieur de l'enfant au cœur du dispositif. Ainsi, depuis la rentrée scolaire 2022, il ne peut être dérogé à l'obligation de scolarisation que sur autorisation préalable délivrée par les services académiques, pour des motifs tirés de la situation de l'enfant et limitativement définis par la loi. Le Conseil d'État a apporté des précisions concernant le traitement des demandes d'autorisation d'instruction dans la famille fondées sur le motif 4° relatif à la situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif. Le ministère ne prévoit pas d'y apporter de précisions supplémentaires. L'autorité administrative doit ainsi contrôler que « cette demande expose de manière étayée la situation propre à cet enfant motivant, dans son intérêt, le projet d'instruction dans la famille et qu'il est justifié, d'une part, que le projet éducatif comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de cet enfant, d'autre part, de la capacité des personnes chargées de l'instruction de l'enfant à lui permettre d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire » (décision CE n° 467550 du 13 décembre 2022). Il en résulte que les responsables légaux sollicitant une autorisation d'instruction dans la famille pour ce motif ne doivent pas seulement justifier de la situation propre de leur enfant et présenter un projet éducatif. Ils doivent justifier que ce projet éducatif est conçu en fonction de la situation de leur enfant et adapté à celle-ci, de telle manière que l'enfant puisse bénéficier d'un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire. En outre, la mise en œuvre de la loi CRPR s'est accompagnée d'un renforcement des effectifs dédiés à l'instruction dans la famille au sein des services académiques avec le recrutement de personnels d'inspection chargés du contrôle de l'instruction dans la famille. Le suivi des enfants instruits dans la famille a également été renforcé par l'attribution d'un identifiant national (INE) pour tous les enfants soumis à l'obligation d'instruction (article 51 de la loi CRPR) et par la création de l'instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire (article 49 de la loi CRPR et décret d'application n° 2022-184 du 15 février 2022). Ces dispositifs visent à assurer le respect du droit à l'instruction de chaque enfant résidant sur le territoire national, en renforçant notamment, au sein de cette instance départementale, le suivi des mises en demeure de scolarisation des enfants instruits dans la famille.

Données clés

Auteur : M. Pierre-Yves Cadalen

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 17 juin 2025

partager