Autorisation de travail pour les sans-papiers dans les métiers en tension
Question de :
M. Pierre-Yves Cadalen
Finistère (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Pierre-Yves Cadalen alerte M. le ministre de l'intérieur sur la situation absurde dans laquelle se trouvent les personnes sans-papiers désireuses de travailler. En effet, la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration (dite « loi Darmanin ») permet l'admission au séjour des ressortissants étrangers justifiant d'une expérience professionnelle salariée dans des métiers en tension. Une circulaire ministérielle, éditée dans la foulée, demandait aux préfets de faire remonter les difficultés de mise en place de cette mesure. M. le député s'interroge sur les remontées de terrain effectuées par les préfets. Cette disposition devait permettre aux personnes sans-papiers de pouvoir travailler dans les secteurs en tension : il n'en est rien dans les faits. Si l'on prend l'exemple du secteur agricole : l'inspection du travail et la Mutualité sociale agricole exigent désormais des employeurs dans l'agriculture qu'ils vérifient que les étrangers ont un titre de séjour. Les étrangers, de leur côté, doivent d'abord justifier de 12 bulletins de salaire pour obtenir un titre de séjour. Cette situation est absurde et inhumaine pour les étrangers sans titre de séjour qui n'ont aucun revenu et qui ne peuvent survivre que par l'aide des associations. Elle l'est aussi pour les employeurs : en cas de non-embauche, leur activité économique est mise en péril ; en cas d'embauche, ils risquent de lourdes amendes et des poursuites pénales. M. le député souhaite suggérer à M. le ministre d'accorder aux étrangers sans titre de séjour une autorisation de travail pour les secteurs en tension. Ainsi, ils pourraient justifier d'une expérience professionnelle salariée dans ces secteurs en tension et demander par la suite un titre de séjour. Il souhaite connaître ses intentions à ce sujet.
Réponse publiée le 17 juin 2025
Les ressortissants étrangers qui souhaitent séjourner et travailler en France disposent de dispositifs migratoires légaux à l'instar notamment de la carte de séjour « travailleur saisonnier », ou de la carte de séjour « travailleur temporaire » ou « salarié », sous réserve qu'ils remplissent certaines conditions de délivrance. Lorsque l'emploi souhaité est constitutif d'un métier en tension à l'instar des métiers agricoles, l'obtention du visa et du titre de séjour est en outre facilitée dans la mesure où l'autorisation de travail indispensable à l'obtention des documents de séjour précités est délivrée sans vérification de l'opposabilité de la situation de l'emploi. L'admission exceptionnelle au séjour (AES) ne constitue par conséquent qu'une voie dérogatoire à la procédure d'accès au droit au séjour et au travail en France telle qu'organisée par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) relevant du pouvoir discrétionnaire du préfet, comme le rappelle la circulaire du 23 janvier 2025 fixant des orientations générales relatives à l'admission exceptionnelle au séjour (NOR : INTK2435521J). Par ailleurs, c'est à titre exceptionnel, conformément à l'article 27 de la loi du 26 janvier 2024, que les étrangers en situation irrégulière qui exercent une activité professionnelle dans des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement depuis au moins douze mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois et qui justifient d'une période de résidence ininterrompue d'au moins trois années en France peuvent, sous certaines conditions et jusqu'au 31 décembre 2026, solliciter auprès du préfet la délivrance d'un titre de séjour « métiers en tension » pour une durée d'un an. Au regard des besoins et des difficultés de recrutement identifiés dans certains métiers ou zones géographiques, la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, a renforcé l'articulation entre besoins en mains d'œuvre et régularisation par le travail avec la création d'un nouveau motif d'admission exceptionnelle au séjour lié à l'exercice d'une activité salariée dans un métier en tension. Ce motif permet la prise en considération pour les ressortissants étrangers dépourvus de droit au séjour résident depuis au moins trois ans en France, de leur expérience professionnelle déjà acquise, parfois irrégulièrement, et de leur emploi actuel dans un métier en tension. La liste des métiers en tension a été réactualisée par arrêté du 21 mai 2025 de la ministre chargée du travail et de l'emploi auprès de la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, et du ministre de l'Intérieur. Par ailleurs, en vertu des articles L. 5221-5 et R. 5221-3 du code du travail, un ressortissant étranger titulaire d'une autorisation de travail ne peut exercer régulièrement une activité professionnelle salariée sans détenir un titre de séjour ou document provisoire de séjour permettant l'exercice d'une telle activité à l'instar des titres de séjour « travailleur temporaire » ou « salarié ». Ainsi, la délivrance d'une autorisation de travail ne prémunit pas l'employeur contre l'adoption de sanctions administratives ou pénales au motif d'emploi illégal de ressortissants étrangers dès lors que ces derniers sont dépourvus de titre de séjour ou de document de séjour. Sur l'exemple du secteur agricole, l'objectif privilégié est la structuration des voies d'immigration légales, en lien avec les fédérations d'employeurs, les filières professionnelles du secteur, les États tiers et leurs services d'emploi parties prenantes à cet objectif, ainsi que les délégations locales de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration (OFII). Pour combler les manques de main d'œuvre au niveau local, cette structuration permet déjà de proposer aux entreprises agricoles françaises une main d'œuvre déjà formée, sélectionnée en fonction de ses compétences par les agences de l'emploi des pays tiers, et contribuant à une immigration maitrisée par l'ensemble des parties.
Auteur : M. Pierre-Yves Cadalen
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 17 juin 2025