Avenir de la formation française en odontologie sur le territoire national
Question de :
M. Vincent Rolland
Savoie (2e circonscription) - Droite Républicaine
M. Vincent Rolland interroge M. le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'avenir de la formation française en odontologie sur le territoire national. Le nombre de primo-inscrits diplômés d'un pays de l'Union européenne autre que la France a connu une croissance exponentielle ces 10 dernières années. Il est passé de 255 praticiens en 2011 à 1 294 en 2022, auxquels s'ajoutent 19 primo-inscrits diplômés hors Union européenne. L'augmentation du numerus clausus en France, qui a produit ses effets à partir du milieu des années 2010, n'a pas inversé la tendance. La création de 5 nouvelles facultés, ajoutées aux 16 existantes, semble déjà insuffisante. En effet, selon les données publiées par l'Ordre des chirurgiens-dentistes en 2022, le nombre de primo-inscrits au tableau de l'Ordre diplômés hors de France (1 313 praticiens) a dépassé pour la première fois celui des primo-inscrits issus de la filière française odontologique (1 294 praticiens). Alors même que la formation en odontologie est gratuite en France, elle souffre depuis ces dernières années de la concurrence agressive de très lucratifs et coûteux organismes de formation privés espagnols et portugais. Un non-sens qui montre l'absurdité du système. Si la courbe du nombre d'étudiants français formés dans un autre pays de l'Union européenne devait continuer à progresser avec autant de dynamisme au détriment de la formation française, c'est l'avenir de toute la filière odontologique française d'excellence qui pourrait être en péril. Et pour cause, les analyses de l'Ordre démontrent que les nouveaux diplômés issus de la filière française s'installent très majoritairement autour de leur UFR d'origine, quand les primo-inscrits issus de la filière espagnole s'installent majoritairement dans le sud-ouest et ceux issus de la filière portugaise en Île-de-France. Aussi, la création de nouvelles facultés en odontologie dans des zones où la densité des chirurgiens-dentistes est faible pourrait contribuer à limiter le phénomène de désertification en soins bucco-dentaires sur ces territoires. À noter également, le manque de prévision que la situation engendre. Si l'assurance maladie peut effectuer des projections de dépenses à partir du nombre de diplômés issus de la filière française, puisque le numerus clausus est connu à l'avance, il lui est matériellement impossible d'anticiper le nombre de chirurgiens-dentistes entrant en France du fait du mécanisme de la reconnaissance automatique de leur diplôme. Étant désormais plus nombreux que les chirurgiens-dentistes issus de la filière française, ils contribuent à augmenter très significativement la dépense globale des soins dentaires, donnant une impression trompeuse de dépenses hors de contrôle ; ce qui entraîne des mesures de maîtrise des dépenses au détriment des patients et des professionnels, alors que la dépense « par tête » est en vérité stable. Il l'alerte donc afin de savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour infléchir significativement et durablement cette tendance et ses conséquences.
Réponse publiée le 27 mai 2025
La loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé a rénové en profondeur l'accès aux formations de médecine, de pharmacie, d'odontologie et de maïeutique (MPOM) depuis la rentrée universitaire 2020. Depuis la première année de déploiement de la réforme, les capacités d'accueil dans les quatre filières de santé ont été augmentées par rapport à la dernière année universitaire du numerus clausus, permettant ainsi de répondre pleinement aux besoins de santé croissants de chaque territoire. Ainsi, en 2023-2024, plus de 17 100 places ont été ouvertes en médecine, pharmacie, odontologie et maïeutique. Plus spécifiquement, le nombre d'admis dans la filière odontologie en 2023-2024 était de près de 1 500 par an, soit une hausse de près de 14 % par rapport à la moyenne annuelle de la période 2016-2020. La répartition de l'accès aux soins reste une préoccupation majeure de notre ministère en lien avec le ministère chargé de la santé comme le démontre la récente ouverture de sites universitaires en odontologie dans plusieurs sites (Tours, Caen, Rouen, Besançon, Dijon en 2022 ; Amiens en 2023). Des antennes ont été ajoutées à Grenoble et à Poitiers. Ces ouvertures permettront de diplômer 260 étudiants supplémentaires. Ces créations d'UFR devraient avoir un impact positif sur le maillage territorial, les diplômés restant en majorité dans leur UFR d'origine. A moyen terme, ces nouvelles facultés pourront encore augmenter leur recrutement d'étudiants. Mais, il est nécessaire former des enseignants hospitalo-universitaires qui sont encore trop peu nombreux. L'investissement dans des locaux de simulation et dans des fauteuils dentaires hospitaliers constitue également un enjeu immobilier majeur. Les promotions d'étudiants supplémentaires en odontologie commencent leur 2e cycle de formation en odontologie à compter de la rentrée universitaire 2024 et les premiers diplômés arriveront en 2027. Par ailleurs, suite à la promulgation de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, la mise en œuvre de la réforme du contrat d'engagement de service public (CESP) est étendue notamment aux étudiants admis à poursuivre des études de santé à l'issue de la première année du premier cycle des études de médecine, d'odontologie, de maïeutique et de pharmacie ou ultérieurement au cours de ces études. En contrepartie d'une allocation mensuelle, les bénéficiaires du CESP s'engagent pendant un nombre d'années égal à celui durant lequel ils auront perçu l'allocation à exercer leurs fonctions, à compter de la fin de leur formation, dans une zone « sous-dense ».
Auteur : M. Vincent Rolland
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions de santé
Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Enseignement supérieur et recherche (MD)
Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 27 mai 2025