Question écrite n° 3046 :
Lutter contre l'uberisation des travailleurs du médico-social

17e Législature

Question de : M. Jérôme Guedj
Essonne (6e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Jérôme Guedj attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la précarisation des travailleurs du médico-social et l'essor de l'uberisation dans ce secteur. Alors que certains établissements de santé, notamment les EHPAD, rencontrent de grandes difficultés pour recruter ou remplacer leurs personnels, le recours à des travailleurs indépendants ou auto-entrepreneurs se développe de manière préoccupante. Des plateformes en ligne telles que Mediflash facilitent cette mise en relation, permettant aux établissements de réaliser des économies substantielles sur les cotisations sociales, tout en dégradant les conditions de travail des soignants. Ces solutions, qui garantissent des rémunérations jusqu'à 25 % supérieures à celles perçues en intérim ou en CDI, ne suffisent toutefois pas à garantir la sécurité de l'emploi ni une couverture sociale adéquate pour les travailleurs. Ce phénomène conduit à la précarisation des professionnels du secteur, qui ne bénéficient ni de stabilité ni de protections sociales. Le 1er janvier 2025, un arrêté censé renforcer l'attractivité des métiers du soin, jusque-là en tension, est entré en vigueur. Cependant, ce texte semble s'apprêter à ouvrir davantage le secteur à des plateformes numériques qui, progressivement, s'emparent du marché, précarisant davantage les travailleurs contraints à l'auto-entrepreneuriat. Dans ce contexte, il souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement envisage pour lutter contre l'uberisation des travailleurs du médico-social et garantir des conditions de travail dignes pour ces derniers.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Le Gouvernement est pleinement conscient des défis liés à la précarisation des travailleurs du secteur médico-social et à l'essor des plateformes numériques facilitant le recours au statut d'indépendant, notamment dans des secteurs en tension tels que les établissements d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes. En premier lieu, il convient de rappeler que les conditions d'exercice de certaines professions réglementées, comme celle d'aide-soignant, limitent légalement la possibilité d'exercer sous un statut indépendant. En effet, l'article R. 4311-4 du code de la santé publique dispose ainsi que « lorsque les actes accomplis et les soins dispensés relevant de son rôle propre sont dispensés dans un établissement ou un service à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social, l'infirmier ou l'infirmière peut, sous sa responsabilité, les assurer avec la collaboration d'aides-soignants, d'auxiliaires de puériculture ou d'accompagnants éducatifs et sociaux qu'il encadre et dans les limites respectives de la qualification reconnue à chacun du fait de sa formation. Cette collaboration peut s'inscrire dans le cadre des protocoles de soins infirmiers mentionnés à l'article R. 4311-3 ». De plus, l'arrêté du 10 juin 2021 relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat d'aide-soignant et portant diverses dispositions relatives aux modalités de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux précise que « le diplôme d'Etat d'aide-soignant atteste de l'acquisition des compétences requises pour exercer la profession d'aide-soignant sous la responsabilité d'un infirmier dans le cadre de l'article R. 4311-4 du code de la santé publique ». Par conséquent, en l'état actuel de la réglementation, un aide-soignant ne peut légalement exercer de manière autonome en tant que travailleur indépendant, mis à disposition sous ce statut via des plateformes numériques et ne peut exercer qu'en établissement ou en service à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social. En deuxième lieu, bien que certaines professions de santé puissent être exercées sous un statut libéral, comme celui des infirmiers diplômés d'État, leur exercice en tant que travailleur indépendant au sein d'un établissement de santé ou médico-social peut tomber sous le coup de la qualification de travail dissimulé. Le recours au statut d'indépendant dans ces établissements peut, dans certains cas, être requalifié en contrat de travail salarié s'il est démontré que les conditions d'exercice ne permettent pas une réelle autonomie du professionnel. En effet, un travailleur indépendant doit notamment disposer d'une liberté de choix de ses horaires, utiliser son propre matériel et être en mesure de développer une patientèle propre. Si ces conditions ne sont pas respectées, la relation contractuelle peut être qualifiée de travail dissimulé, exposant les établissements concernés à des sanctions pénales, assorties du paiement des cotisations sociales dues aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales. Le Gouvernement demeure attentif aux enjeux d'attractivité de ses professionnels et du rôle important des aides-soignants en lien étroit avec les autres professionnels de santé, pleinement conscient du rôle essentiel que chacun joue dans la qualité de l'accompagnement. Cette attention s'inscrit dans une approche globale visant à valoriser ces métiers et à sécuriser les parcours professionnels, notamment par le renforcement de la formation, l'amélioration de l'accès à des emplois durables et l'augmentation des rémunérations. 

Données clés

Auteur : M. Jérôme Guedj

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles

Ministère répondant : Autonomie et handicap

Dates :
Question publiée le 7 janvier 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025

partager