Situation des couples binationaux extra-européens
Question de :
Mme Anna Pic
Manche (4e circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Anna Pic attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les difficultés rencontrées par les couples binationaux extra-européens dans leurs démarches de reconnaissance de leur union et d'obtention de visa. Selon les chiffres de L'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), parmi les 236 300 mariages conclus en France en 2015, près de 15 % unissaient une personne de nationalité étrangère et une personne de nationalité française, alors qu'ils ne représentaient que 6 % en 1950. Néanmoins, nombre de ces couples font face à des procédures administratives particulièrement complexes, souvent perçues comme un véritable parcours du combattant et dont les conséquences peuvent être lourdes, que cela soit sur le plan psychique ou pratique. À titre d'exemple, le Collectif des couples franco-indiens souligne que ces démarches peuvent être vécues comme un traumatisme, laissant planer une suspicion d'union de complaisance presque systématique. Cet état de fait, conjugué à l'exigence de fournir des documents administratifs qui n'ont parfois pas d'équivalents dans leur pays d'origine, complexifie encore davantage leur situation. Ces obstacles entraînent des séparations prolongées et une grande détresse pour les couples concernés. Elle lui demande donc comment le Gouvernement entend répondre aux préoccupations exprimées par ces couples et ainsi permettre l'exercice effectif de leurs droits.
Réponse publiée le 6 mai 2025
La délivrance de visas de long séjour pour les conjoints de Français, quelle que soit la nationalité du conjoint étranger, se fait en application des articles L312-3, L423-1 à 6, R312-2, R431-16 6° du CESEDA (code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile). Les visas de court séjour sont délivrés en application du code Schengen. Les conjoints de Français se voient délivrer gratuitement et de plein droit des visas de long séjour permettant leur installation en France, sans aucune autre formalité. Le demandeur doit seulement justifier de son mariage et de la nationalité française de son conjoint. Aucun autre justificatif n'étant demandé, cette facilité est généralement saluée par nos ressortissants vivant à l'étranger ainsi que leurs conjoints. Ce type de visa n'est refusé qu'en cas de motif d'ordre public, de fraude, ou d'annulation du mariage. La non dissolution du mariage est prouvée par la simple présentation d'une copie intégrale récente de l'acte de mariage français, transcrit ou dressé. Par ailleurs, la loi du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité des mariages, entrée en vigueur le 1er mars 2007, a instauré un contrôle a priori des unions célébrées à l'étranger (articles 171-2 et 171-4 du code civil) et renforcé le contrôle a posteriori des mariages (articles 171-6 à 171-8 du code civil) aux fins de lutter contre les mariages entachés d'un défaut de sincérité d'intention matrimoniale ainsi que les mariages forcés. Ce changement permet de préserver les ressortissants Français d'éventuels mariages de complaisance ou d'annulations ultérieures de mariages entachés d'un motif de nullité tel que la minorité du conjoint français, le défaut de comparution personnelle du conjoint français, la bigamie, les mariages prohibés entre parents et le mariage célébré par un officier public incompétent. Désormais, même si les actes de mariages célébrés à l'étranger continuent à produire des effets à l'égard des époux et des enfants, ils doivent être transcrits pour que les époux puissent se prévaloir de cette qualité auprès des tiers et des administrations publiques, notamment lors d'une demande de visa en qualité de conjoint de ressortissant français. Les modalités du contrôle de la validité des mariages sont encadrées et soumises à des délais. Lorsqu'un couple souhaite s'unir à l'étranger, il doit obligatoirement solliciter la délivrance d'un certificat de capacité à mariage (CCAM), en application de l'article 171-2 du code civil. Toutes les modalités de cette procédure sont explicitées sur le site Internet Service Public et sur ceux des ambassades et consulats. En cas de doute sérieux concernant la validité de ces projets d'union, des auditions des deux conjoints peuvent être menées en France ou à l'étranger. Si ces doutes sont avérés, il est sursis à la délivrance du CCAM, et le tribunal judiciaire de Nantes est saisi dans le cadre d'une procédure d'opposition à mariage. La juridiction doit statuer dans un délai de deux mois à compter de sa date de saisine. A chaque étape de cette procédure, les délais de traitement sont contractés dans toute la mesure du possible, au regard des moyens dévolus aux ambassades et consulats ainsi que des disponibilités des mairies réquisitionnées pour auditionner le conjoint résidant en France. Les époux n'ayant pas sollicité de CCAM ou n'ayant pas attendu l'aboutissement de leur demande avant de se marier, peuvent tout de même solliciter la transcription de leur acte de mariage. Ils doivent alors être auditionnés, ce qui peut allonger les délais de traitement. En cas de saisine du parquet de Nantes après la célébration du mariage, dans le cadre de la demande de transcription (articles 171-7 ou 171-8 du code civil), le Procureur de la République de Nantes dispose de 6 mois pour autoriser la transcription ou s'y opposer. En l'absence de réponse dans ce délai, l'acte ne peut être transcrit qu'à sa demande ou à celle du tribunal judiciaire de Nantes. Par ailleurs, la vérification de la validité de l'acte de mariage étranger au regard de l'article 47 du code civil est effectuée concomitamment, ce qui peut induire des délais supplémentaires si des levées d'acte sont à effectuer auprès des autorités locales. Le couple est tenu informé à chaque étape de cette procédure par les postes diplomatiques et consulaires et le cas échéant par le parquet de Nantes. Le renforcement du contrôle de la validité des mariages n'a pas alourdi les démarches des ressortissants français de manière disproportionnée. En 2024, plus de 38 000 actes de mariage ont été transcrits dans les registres de l'état civil consulaires, et seuls 5 % ont fait l'objet d'une saisine du parquet de Nantes, soit un peu moins de 2 000 mariages ou projets de mariage.
Auteur : Mme Anna Pic
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 4 février 2025
Réponse publiée le 6 mai 2025