Rénovation urbaine et prise en compte du rapport adressé au Gouvernement
Question de :
M. François Piquemal
Haute-Garonne (4e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. François Piquemal interroge M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation sur la poursuite de la rénovation urbaine et la prise en compte du rapport récemment adressé à l'exécutif à ce sujet. Depuis le lancement de la première phase de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) en 2003, un vaste programme de renouvellement urbain a été déployé dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV). Au coût de 48 milliards d'euros pour 900 quartiers rénovés rien que pour le premier PNRU, ce dispositif a néanmoins montré ses limites. D'une part, sa politique de démolition-reconstruction a été menée sans véritable consultation des cinq millions d'habitantes et d'habitants concernés. D'autre part, aucune évaluation n'a permis de mesurer si les objectifs affichés, notamment en matière de mixité sociale et de renouvellement urbain, ont été atteints. Face à l'ampleur des opérations - 164 400 logements démolis pour 142 000 reconstruits, 408 500 réhabilités et 385 400 « résidentialisés » -, le groupe parlementaire de La France Insoumise a initié une mission d'information sur le bilan de l'ANRU. Son rapport a mis en évidence une dérive du dispositif, où l'objectif initial de renouvellement urbain a laissé place à une logique de démolition-reconstruction-gentrification, avec un coût social, écologique et financier considérable. Or vingt ans après le lancement du premier plan ANRU, le Gouvernement semble avoir purement et simplement renoncé à toute ambition en matière de rénovation urbaine. Plutôt que de corriger les écueils du passé, il a choisi l'immobilisme. D'après Mediapart, un rapport commandé par le Premier ministre en février 2024, qui préconisait la mise en place d'un troisième plan ANRU, a été transmis à l'exécutif pour être ignoré. Tandis que le Gouvernement prétend poursuivre le renouvellement urbain, le cabinet de M. le ministre a répondu que la priorité était de finaliser la deuxième phase de l'ANRU, dont les engagements ne seront pas bouclés avant 2026 et les travaux avant 2030. En refusant d'anticiper la suite du programme, l'exécutif prend le risque d'une longue période d'inaction. Comme trop souvent, le Gouvernement avance sans feuille de route, cédant aux injonctions de l'extrême droite qui rejette « la politique de la ville » et l'« investissement dans les banlieues au détriment de la ruralité », selon les propres mots de Marine Le Pen. Cette vision, qui oppose artificiellement territoires ruraux et quartiers populaires, divise le peuple français et ignore les besoins réels des habitantes et habitants, partout sur le territoire. En 2022, le Président de la République affirmait que les habitantes et habitants des quartiers populaires sont « une chance pour notre pays ». Où sont ces belles déclarations lorsqu'il s'agit d'agir ? Certes, les plans de renouvellement urbain étaient imparfaits, mais ils avaient le mérite d'exister. Plutôt qu'être abandonnés, ils auraient dû être profondément réformés pour donner la priorité à la réhabilitation des logements, en intégrant des exigences écologiques strictes et en plaçant les habitantes et habitants au cœur des décisions. Au nom de l'austérité budgétaire et d'un glissement idéologique vers la droite, le Gouvernement sacrifie aujourd'hui le renouvellement urbain. Il annonce une vague « revue de projets » confiée à une mission indépendante, mais cette proposition, absente du rapport, demeure floue et insuffisante. Pourtant, ce même rapport, dont M. le député ne partage pas l'ensemble des solutions préconisées et des orientations, insistait sur l'urgence d'un troisième plan ANRU, prenant en compte de nouveaux critères : intégration d'indicateurs environnementaux dans la sélection des quartiers rénovés, priorité à la réhabilitation plutôt qu'à la démolition, mise en place d'une réelle consultation démocratique des habitantes et habitants. Il lui demande donc ses intentions en matière de rénovation urbaine, alors que la deuxième phase de l'ANRU s'achèvera en 2026. Il souligne l'urgence d'un plan ambitieux, fondé sur la réhabilitation des logements plutôt que sur leur destruction et élaboré en concertation avec les premières et premiers concernés : les habitantes et habitants des quartiers populaires.
Réponse publiée le 16 septembre 2025
Afin de répondre aux enjeux de requalification des quartiers prioritaires de la politique de la ville, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour assurer l'achèvement du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain (NPNRU). Le NPNRU mis en œuvre par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) mobilise 12 milliards d'euros de concours financiers au bénéfice de 480 quartiers d'intérêt national ou régional. À ce jour, plus de 70 % des opérations sont engagées, traduisant ainsi une implication forte des acteurs et une dynamique opérationnelle soutenue. Au regard de cet état d'avancement du NPNRU, le Gouvernement a d'ores et déjà annoncé, lors de la revue nationale des projets du 20 mai 2025, deux mesures stratégiques pour sécuriser la mise en œuvre du programme : d'une part, le report du délai limite d'engagement des opérations de 2026 en 2027, et d'autre part, le report du délai de solde des opérations en 2034, au lieu de 2032. Ces reports permettront d'accompagner sereinement la réalisation et l'achèvement des différents chantiers. Dans un contexte économique et politique en pleine évolution, ces décisions répondent directement aux constats partagés par les collectivités et les opérateurs du secteur pour mener à bien le NPNRU. En ce qui concerne l'avenir du renouvellement urbain, dans la droite ligne du rapport remis au Gouvernement le 18 février 2025 par Madame Anne-Claire MIALOT, directrice générale de l'ANRU, et Messieurs Cédric VAN STYVENDAEL, maire de Villeurbanne, et Jean-Martin DELORME, président de la section "Habitat, Aménagement et Cohésion sociale" de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD), une mission de préfiguration a été confiée le 5 août 2025 par la ministre chargée du logement à Monsieur Philippe VAN DE MAELE, ancien directeur général de l'ANRU et actuel directeur général du Conservatoire du Littoral. Pour prolonger et renforcer la rénovation urbaine et inventer un nouveau modèle, cette mission aura trois objectifs : - définir un tour de table financier en identifiant des sources de financement pérennes et promouvoir de nouveaux leviers opérationnels et financiers ; - proposer des priorités d'intervention en termes de territoires : de nombreux quartiers d'habitat social dégradés, encore exclus de la rénovation urbaine, attendent une intervention publique, au nom de la cohésion sociale et de l'égalité républicaine. D'autres territoires, comme les centres anciens de villes moyennes ou les copropriétés en difficulté, nécessitent aussi une action. Ces projets devront intégrer les enjeux climatiques, de mixité et démographiques ; - inventer une nouvelle gouvernance pour permettre un pilotage et une gestion au plus près des territoires. Cette mission de préfiguration remettra son rapport au Gouvernement à la fin de l'année 2025. Les grandes orientations stratégiques d'un prochain programme de renouvellement urbain seront ensuite arrêtées pour répondre au mieux aux attentes exprimées localement par les habitants des quartiers.
Auteur : M. François Piquemal
Type de question : Question écrite
Rubrique : Bâtiment et travaux publics
Ministère interrogé : Aménagement du territoire et décentralisation
Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation
Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 16 septembre 2025