Question écrite n° 4642 :
Lutte contre les pratiques déloyales des plateformes chinoises

17e Législature

Question de : Mme Louise Morel
Bas-Rhin (6e circonscription) - Les Démocrates

Mme Louise Morel appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'absence de contrôle effectif du respect des réglementations françaises et européennes par certaines plateformes de commerce en ligne, notamment asiatiques. L'Union européenne dispose de l'un des cadres réglementaires les plus stricts au monde en matière de protection des consommateurs, de lutte contre la contrefaçon et de respect des normes environnementales. Les entreprises françaises et européennes font l'objet de contrôles réguliers et s'exposent à des sanctions en cas de manquement. Or il apparaît que certaines plateformes, telles que Shein et Temu opérant sur le sol européen et connaissant une croissance exponentielle sur le marché français, ne respectent pas toujours ces règles et bénéficient d'avantages compétitifs déloyaux. Des études révèlent notamment que les produits vendus sur ces plateformes ne respectent pas toutes les normes de sécurité en vigueur. Une étude de Toy Industries of Europe indique que 95 % des jouets testés sur Temu sont non conformes aux standards européens. Par ailleurs, ces ventes massives de produits à bas coût, expédiés individuellement depuis l'étranger, ont un impact non négligeable sur l'environnement. Ces entreprises bénéficient en outre d'avantages concurrentiels importants, tels que des exemptions douanières et des tarifs postaux préférentiels. D'après les données fournies par le groupe La Poste, Shein et Temu représentent 22 % des colis acheminés sur le territoire national, contre moins de 5 % il y a cinq ans. Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en place pour garantir le respect des normes et réglementations françaises et européennes par ces plateformes. Elle lui demande également quelles actions seront entreprises pour assurer une concurrence loyale entre tous les acteurs du marché, protéger les consommateurs et préserver le tissu commercial français.

Réponse publiée le 10 juin 2025

Le Gouvernement est plus que jamais mobilisé sur ce sujet prioritaire pour nos commerces. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) veille au quotidien à la sécurité et la conformité des produits vendus sur les places de marché en ligne. Elle organise ainsi chaque année depuis 2018 des campagnes de prélèvements reposant sur la procédure de l'« achat mystère » (permettant aux enquêteurs de se placer dans la situation d'achat d'un consommateur) de produits proposés sur les places de marché électroniques les plus populaires : Amazon, Temu, Shein, Aliexpress… Ces enquêtes annuelles permettent d'éprouver, d'une part, la réactivité des plateformes, qui se positionnent souvent comme de simples intermédiaires mais qui doivent malgré tout supprimer ou rendre inaccessibles promptement les annonces de produits illicites dès qu'elles sont informées de l'existence d'une anomalie, et, d'autre part, leur niveau de coopération pour la gestion des campagnes de rappel des produits dangereux. Lorsque nécessaire, les services de la DGCCRF établissent des fiches d'indice de danger pour que les produits identifiés comme dangereux puissent immédiatement être traités comme des alertes. S'agissant de produits proposés par des vendeurs non identifiés et vraisemblablement situés en dehors de l'Europe, la DGCCRF cherche systématiquement à contacter les opérateurs économiques en cause pour obtenir un prompt retrait des annonces de ces produits, selon la procédure dite de « notice & takedown » (procédure prévue pour ce type d'opérateur de plateforme lorsqu'il est établi qu'il héberge un contenu illicite). En cas d'absence de réaction d'une place de marché face à des produits dont la dangerosité et la non-conformité constituent des manquements à la législation, une injonction de retrait des annonces illicites est alors formalisée. Elle se double si nécessaire d'une procédure d'injonction numérique [1], qui permet de solliciter les fournisseurs d'accès Internet afin de rendre inaccessible aux internautes situés en France les pages web des sites incriminés. Par ailleurs, conformément au DSA [2], chaque fournisseur de service intermédiaire (dont les fournisseurs de places de marché) n'ayant pas d'établissement au sein de l'Union européenne mais y proposant des services, est tenu de désigner un représentant, responsable légal en cas de non-conformité au DSA. Enfin, la plupart de ces plateformes ayant été désignées « très grandes plateformes » par la Commission européenne, elles sont soumises à des obligations encore plus strictes notamment d'atténuation des risques systémiques découlant de l'utilisation de sa plateforme. Les obligations de ces plateformes ont encore été renforcées récemment, avec l'entrée en vigueur du règlement sur la sécurité générale des produits, le 13 décembre 2024. Par exemple, elles doivent retirer les produits illicites de leurs plateformes sous 48 heures quand ils leur sont signalés. Et ils doivent veiller à ce que des produits identiques ne réapparaissent pas sur leur plateforme ensuite. En parallèle, afin d'assurer l'information des consommateurs susceptibles d'avoir acheté des produits dangereux, la DGCCRF publie régulièrement des communiqués de presse mettant en garde les consommateurs français à l'égard de produits clairement identifiés comme dangereux et/ou d'opérateurs dont le comportement enfreint la réglementation en vigueur (annonces illicites, absence de réponse aux sollicitations des autorités françaises demandant des mesures correctives, etc.). Plus largement, la DGCCRF appelle régulièrement les consommateurs à demeurer vigilants dans le choix des produits qu'ils achètent sur Internet et particulièrement sur les places de marché électroniques en les invitant à consulter sur son site ses conseils pour les achats en ligne ainsi que la liste des produits d'ores et déjà rappelés. Pour améliorer la surveillance des offres sur Internet, les consommateurs peuvent également déposer sur la plateforme SignalConso un signalement de toute anomalie qu'ils auraient constatée. Le Gouvernement est plus que jamais mobilisé sur ce sujet et a annoncé le 29 avril plusieurs actions massives. La Ministre du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et Moyennes entreprises et de l'Economie sociale et solidaire a ains, premièrement, demandé un triplement des contrôles sur ces plateformes. Deuxièmement, elle a piloté l'élaboration d'une nouvelle doctrine de contrôle, dite "à 360°", permettant de contrôler en même temps les différents manquements potentiels d'une plateforme de commerce en ligne. Troisièmement, elle a également demandé que lorsqu'un manquement est constaté auprès d'un commerçant physique, il soit vérifié également que ce manquement n'est pas commis sur une plateforme en ligne.  La Ministre a demandé, par ailleurs, un renforcement de la coordination entre la DGDDI et la DGCCRF. Enfin, la France est particulièrement proactive au niveau européen, afin de mobiliser les autres Etats membres dans des enquêtes transnationales. La France agit également pour mettre fin à l'exemption de droits de douane sur les colis d'un montant inférieur à 150 euros et pour la mise en place de frais de gestion pour les colis qui traversent nos frontières.  Grâce à la forte mobilisation du Gouvernement, la Commission européenne a annoncé dernièrement son souhait que des frais de gestion de 2 euros soient mis en place sur les petits colis de moins de 150 euros. Le Gouvernement poursuit sa forte mobilisation sur ce sujet prioritaire pour notre économie et la préservation de notre tissu commercial et industriel. [1] Telle que prévue à l'article L. 521-3-1 du code de la consommation [2] Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques

Données clés

Auteur : Mme Louise Morel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce extérieur

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Commerce, artisanat, PME, économie sociale et solidaire

Dates :
Question publiée le 4 mars 2025
Réponse publiée le 10 juin 2025

partager