Question écrite n° 4976 :
Isolement numérique croissant des territoires ruraux

17e Législature

Question de : M. Julien Guibert
Nièvre (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Julien Guibert attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de l'intelligence artificielle et du numérique, sur l'isolement numérique croissant des territoires ruraux, où des milliers de Français se retrouvent privés de connexion à internet et de téléphonie en raison de la suppression ou de la défaillance d'infrastructures essentielles. Le cas du village de Sermages illustre cette situation alarmante : la disparition d'un pylône de télécommunication prive ses habitants de tout réseau, les contraignant à parcourir plusieurs kilomètres pour passer un simple appel ou envoyer un message. Cette coupure, qui pourrait durer jusqu'en 2027, met en péril l'activité économique locale, complique l'accès aux services publics et accentue la fracture numérique qui touche déjà durement les zones rurales. Au-delà des difficultés du quotidien, cette absence de réseau représente une menace majeure pour la sécurité des habitants. Sans téléphone, il devient impossible de contacter les secours en cas d'accident, de malaise ou d'urgence domestique, exposant particulièrement les personnes âgées et isolées à des risques accrus. L'impossibilité de recevoir des alertes en temps réel en cas de catastrophe naturelle ou d'évènement climatique extrême aggrave encore cette vulnérabilité. Alors que l'État affiche des ambitions de couverture numérique pour tous, les campagnes restent trop souvent laissées pour compte par les opérateurs, qui privilégient les zones urbaines au détriment des territoires moins denses. Les collectivités rurales, quant à elles, se retrouvent démunies face à ces coupures prolongées et ne disposent ni des moyens techniques ni des financements nécessaires pour pallier ces manquements. M. le député souhaite donc savoir quelles mesures urgentes le Gouvernement entend prendre pour garantir un rétablissement rapide de la connexion dans ces villages touchés par une fracture numérique grandissante. Il l'interroge également sur la mise en place de contraintes renforcées pour les opérateurs en matière de maintien et de réparation des infrastructures rurales, ainsi que sur la possibilité de créer un fonds d'urgence permettant aux collectivités locales de financer des solutions alternatives immédiates en cas de coupure prolongée.

Réponse publiée le 24 juin 2025

Dès le début des années 2000, les Gouvernements successifs ont mis en place différents programmes pour soutenir les déploiements de réseaux afin de généraliser l'accès des Français aux services de télécommunications, notamment mobiles – et de désenclaver ainsi les territoires isolés, dont les zones rurales, en les reliant à ces réseaux. Ces programmes ont ainsi permis de combler des failles du marché, en imposant aux opérateurs d'installer des sites de télécommunication mobile dans des zones où ils n'auraient pas, à court terme, déployé leurs équipements (par manque voire en l'absence de rentabilité). Parmi eux, le New Deal Mobile mis en place par le Gouvernement à partir de 2018 contre le renoncement, par les pouvoirs publics, d'une partie des recettes dues au titre de l'utilisation de fréquences hertziennes contre des engagements des opérateurs d'investir massivement pour l'aménagement numérique du territoire, a été un moteur important de l'amélioration de la couverture des zones rurales en services mobiles. Entre 2017 et 2022, plus de 23 500 sites de télécommunication mobile ont ainsi été déployés dans des zones rurales, sur 35 000 sites déployés au total, soit 67 % des nouveaux sites. De même, la part du territoire métropolitain situé sur une zone ne disposant d'aucun service de télécommunication mobile (zone dite « blanche ») est passée de 11 % à 1,9 % entre 2018 et 2023 [1]. L'effort important consenti par l'Etat pour l'aménagement numérique du territoire à travers le New Deal Mobile et d'autres programmes de couverture, comme les obligations de déploiement de la 5G imposées en 2020 aux opérateurs, continuera de produire ses effets en matière de résorption de la fracture numérique a minima jusqu'en 2031. Concernant en particulier le site de télécommunication mobile couvrant la commune de Sermages que vous évoquez dans votre question, celui-ci a été installé par l'opérateur Orange pour remplir son obligation de couvrir le centre-bourg de la commune voisine de Saint-Léger-de-Fougeret, identifié dans le cadre de l'ancien programme « zones blanches centres-bourgs » mis en place par l'Etat. Dans le droit-fil du non-renouvellement par le bailleur du contrat d'occupation du terrain sur lequel était installé le site, Orange était contraint d'éteindre ce site et de se reporter sur un autre emplacement lui permettant de remplir son obligation de couverture du centre-bourg de Saint-Léger-de-Fougeret. Le bailleur n'étant pas tenu par le cadre légal de garantir le maintien du site sur son terrain à l'issue du contrat le liant à Orange, il n'existait pas de voie de droit pour lui imposer un renouvellement dudit contrat qui aurait permis le maintien de la couverture de la commune de Sermages. Afin de remédier à la perte de couverture partielle qu'entraîne le déplacement dudit site, la commune de Sermages pourrait en revanche avoir recours à d'autres dispositifs de couverture mis en place par le Gouvernement. Pour cela, elle pourrait notamment prendre attache avec l'équipe-projets locale de la Nièvre, pilotée par la sous-préfecture de Château-Chinon, constituée au titre du New Deal Mobile précité (source : « Une équipe projet locale dédiée  », Nièvre Numérique [site internet], URL : https://www.nievrenumerique.com/le-reseau/la-telephonie-mobile/une-equipe-projet-locale-dediee). Les équipes-projets, réunissant des représentants des collectivités et des services déconcentrés de l'Etat, sont en effet les intermédiaires appropriés pour suivre et mettre en œuvre les dispositifs du New Deal Mobile au niveau local, et spécifiquement le dispositif de couverture ciblée. Ce dispositif prévoit la désignation, par arrêtés, de 5 000 zones à couvrir par les opérateurs. Ces zones sont choisies par les équipes-projets locales qui disposent chaque année de dotations qu'elles utilisent pour la couverture de zones de leur territoire. Concernant les délais de couverture, les opérateurs sont tenus, au titre du dispositif de couverture ciblée, de couvrir dans un délai de 24 mois – réduit à 12 mois si la collectivité met à disposition de l'opérateur un emplacement raccordé au réseau électrique. Si une zone de la commune de Sermages était désignée pour être couverte par l'équipe-projets de la Nièvre dans le prochain arrêté qui sera pris par le Gouvernement cette année, les opérateurs seraient ainsi tenus de mettre en service un site de télécommunication mobile à l'horizon de 2027 comme vous l'indiquez. Aussi ce délai de déploiement, établi à partir d'une évaluation précise des procédures auxquelles sont soumis les opérateurs, est-il incompressible. De manière plus générale, les opérateurs sont tenus à des obligations de transparence sur d'éventuelles pannes ou indisponibilités touchant leurs sites de télécommunication mobile : ils sont tenus, au titre de leurs licences d'utilisation de fréquences, de publier et de maintenir à jour, sur leur site Internet, la liste de leurs sites en panne ou en maintenance et qui ne fournissent pas de service d'appels, de SMS ou d'internet. Cette obligation est contrôlée par l'Autorité de régulation des Communications électroniques, des Postes et de la Distribution de la presse (Arcep) qui publie sur son site internet les sites en panne ou en maintenance déclarés par les opérateurs au cours des dix derniers jours (source : Arcep, « L'état des réseaux mobiles », Arcep [site internet], URL : https://sitehs.arcep.fr/#5/46.544/2.241). L'Arcep met également à la disposition des utilisateurs une plateforme de signalement nommée « J'alerte l'Arcep » (Arcep, « J'alerte l'Arcep », Arcep [site internet], URL : https://jalerte.arcep.fr/). [1] Arcep, New Deal mobile : point d'étape, 1er février 2024.

Données clés

Auteur : M. Julien Guibert

Type de question : Question écrite

Rubrique : Télécommunications

Ministère interrogé : Intelligence artificielle et numérique

Ministère répondant : Industrie et énergie

Dates :
Question publiée le 11 mars 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025

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