Question écrite n° 5147 :
Protocole d'accord signé en 2024 entre l'Union européenne et le Rwanda

17e Législature

Question de : Mme Clémence Guetté
Val-de-Marne (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Mme Clémence Guetté alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la nécessaire suspension du protocole d'accord signé en 2024 entre l'Union européenne et le Rwanda qui visait à « favoriser le développement de chaînes de valeur durables et résilientes pour les matières premières critiques », notamment en permettant au Rwanda d'exporter à l'Union européenne des produits miniers. Déjà fortement critiqué dès sa signature, cet accord est aujourd'hui sous le feu des projecteurs après une nouvelle escalade dans les exactions commises par la milice du M23 et le Rwanda en République démocratique du Congo (RDC). En effet, les Nations unies ont largement documenté le pillage de ressources minières dans la région des Grands lacs par les forces rebelles en RDC soutenues par le gouvernement rwandais et, dans une moindre mesure, par l'Ouganda. Cette situation permet ensuite l'injection de minerais pillés dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et européennes. Pour le dire autrement, ce protocole d'accord ratifie l'accaparement des ressources minières de l'est de cette région par le Rwanda. En effet, pour le chercheur Fabien Lebrun, 90 % des minerais exportés par le Rwanda proviennent de RDC. Cela n'est pas nouveau. Dans les années 2000, l'inflation du prix du coltan, dont deux tiers des ressources mondiales se trouvent dans l'est de la RDC, et la production massive d'une console de Sony avaient conduit à une ruée sur les minerais. Les affrontements qui s'y succèdent depuis lors ont un bilan dramatique : entre 1998 et aujourd'hui, six millions de personnes sont mortes en raison des conflits en RDC, bon nombre d'entre elles ayant succombé à la faim ou à la maladie. Le 13 février 2025, les parlementaires européens ont voté pour la suspension de cet accord. Selon les déclarations du porte-parole français, « la France est favorable à la suspension rapide du mémorandum d'entente entre l'Union européenne et le Rwanda sur la coopération en matière de minerais critiques ». Elle l'interroge donc sur ce que compte entreprendre la France pour accélérer la suspension de cet accord et plus généralement pour que cessent les pillages des ressources minières en RDC.

Réponse publiée le 17 juin 2025

Le mémorandum d'accord (Memorandum of Understanding, MoU) négocié par la Commission européenne et conclu entre l'Union européenne et le Rwanda en 2024, porte sur le développement de chaînes de valeur durables et résilientes pour les matières premières critiques. Il a pour but de promouvoir la transparence des industries extractives, en améliorant la formation et les compétences liées à la chaîne de valeur pour les matières premières critiques et stratégiques. La France, avec plusieurs autres Etats membres, s'est exprimée en faveur de la suspension de ce mémorandum. Il appartient toutefois à la Commission européenne de proposer celle-ci au Conseil de l'Union européenne, qui devra ensuite l'acter à l'unanimité. La France seule ne peut donc, juridiquement, pas prendre l'initiative de la suspension de cet accord, ni le suspendre à titre national. De manière plus générale, concernant la situation à l'est de la République démocratique du Congo (RDC), la France est pleinement mobilisée, en soutien aux médiations africaines, en vue d'un cessez-le-feu sur le terrain. La question des ressources minières constitue un point d'attention majeure pour notre diplomatie. Lorsque le ministre s'est rendu dans la région des Grands Lacs en janvier 2025, il a appelé les parties à trouver une solution pacifique et négociée des différends. La France condamne fermement les agissements du mouvement M23, soutenu par le Rwanda, qui violent l'intégrité territoriale de la RDC. La situation humanitaire sur le terrain est catastrophique. Nous nous assurons que les actions de l'Union européenne permettent d'obtenir une amélioration significative de la situation sur le terrain. A cet égard, le décaissement de fonds humanitaires d'urgence par la Commission à hauteur de 60 millions d'euros a été positif, dans le contexte où le gel de l'aide humanitaire américaine fragilise le tissu humanitaire congolais (70 % de l'aide humanitaire versée en RDC provient des Etats-Unis), condamnant certaines ONG à arrêter leurs actions. La France a soutenu l'adoption de mesures restrictives, par le Conseil affaires étrangères du 17 mars 2025, visant des individus et entités impliquées dans les trafics de minerais à l'est de la RDC.

Données clés

Auteur : Mme Clémence Guetté

Type de question : Question écrite

Rubrique : Mines et carrières

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 18 mars 2025
Réponse publiée le 17 juin 2025

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