Question de : M. Mickaël Bouloux
Ille-et-Vilaine (8e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Mickaël Bouloux appelle l'attention de Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi, sur l'exposition potentiellement mortelle des travailleurs aux fortes chaleurs. Depuis 2018, 48 personnes sont officiellement décédées dans des accidents du travail liés à la chaleur. Selon santé publique France, ce chiffre est largement sous-estimé. En effet, les inspecteurs du travail, dépêchés sur les lieux lors d'un accident mortel, sont chargés d'en déterminer la cause et, le cas échéant, d'en établir le lien avec la chaleur. Mais cela reste un jugement subjectif et les difficultés médicales pour identifier clairement la chaleur comme la cause du décès sont nombreuses - par exemple le fait que la chaleur puisse être un facteur aggravant de pathologies préexistantes. De plus, l'inspection du travail fonctionne en sous-effectifs, avec, d'après la Cour des comptes, un taux de vacance de 18 % en 2022 sur les 2 048 sections du territoire. Ces éléments mettent en péril la capacité de l'État à correctement quantifier l'impact des fortes chaleurs sur les travailleurs et, par conséquent, sa capacité à agir avec prévoyance et efficacité, a fortiori dans une époque de dérèglement climatique et d'intensification des épisodes caniculaires. Les ouvriers du BTP et les vendangeurs sont à cet égard parmi les plus exposés et le seront plus encore dans un futur proche. À ce titre, le code du travail prévoit que l'employeur, en cas de fortes chaleurs, puisse prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs », notamment après avoir évalué « les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs ». Le salarié peut aussi exercer son droit de retrait en cas de « danger grave et imminent ». Enfin, le décret du 28 juin 2024 actualise le régime chômage intempéries dans le BTP et permet aux salariés de bénéficier d'une indemnisation en cas d'arrêt de travail en période de canicule - c'est-à-dire dès lors que Météo France portera la vigilance canicule aux niveaux orange et rouge. En revanche, un pic de chaleur sur une journée ne rentre pas dans le cadre de ce décret, sauf arrêté préfectoral. En été 2023, dix des onze décès comptabilisés ont eu lieu alors que la vigilance canicule était en-dessous du niveau orange. Ces dispositions restent limitées dans leur portée et ne posent pas de seuils de température et d'humidité au-delà desquels il serait obligatoire de limiter voire d'arrêter le travail, comme c'est le cas par exemple à Chypre. Dans ce contexte, il souhaite connaître son avis sur ce sujet et s'il compte mettre en œuvre des mesures pour, d'une part, améliorer la quantification de ces accidents du travail et pour, d'autre part, préserver efficacement la santé des travailleurs lors des prochains épisodes caniculaires.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Dans un contexte d'adaptation au changement climatique, la prévention du risque lié à la chaleur constitue un enjeu grandissant en termes de conditions de travail, de santé et de sécurité des travailleurs. Les épisodes caniculaires et le travail par fortes chaleurs entraînent une dégradation des conditions de travail dans la majorité des secteurs d'activité et augmentent les risques d'accidents du travail. Face à la récurrence et à l'intensité croissantes des épisodes de chaleur, le ministère chargé du travail accentue les actions en faveur de la prévention de ce risque émergent, dans le cadre notamment du plan de prévention des accidents du travail graves et mortels et du 3ème plan national d'adaptation au changement climatique. À cet égard, un projet de texte réglementaire est en cours, après la consultation des partenaires sociaux dans le cadre du conseil d'orientation des conditions de travail et devrait être publié très prochainement pour une entrée en vigueur le 1er juillet 2025. Son objectif est de renforcer les dispositions de prévention au sein du code du travail et du code rural pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs lors des vagues de chaleur durant la période de vigilance canicule et ce, dès le seuil de vigilance jaune. En parallèle, la mobilisation des agents du système d'inspection du travail se poursuit sur la prévention des risques professionnels liés aux vagues de chaleur. Les actions de sensibilisation et de contrôle des mesures de prévention déployées par les entreprises seront reconduites à l'été 2025, ciblées notamment sur les secteurs les plus exposés (BTP, agriculture, restauration, logistique, etc.). A titre d'exemple, plus de 1 700 interventions dédiées ont été menées en 2024. Au niveau national, des actions de communication autour des risques liés aux vagues de chaleur seront également redéployées cette année, en lien étroit avec les acteurs de la santé au travail. Par ailleurs, des travaux sont en cours pour renforcer la surveillance de la mortalité et de la morbidité associées aux vagues de chaleur et développer une meilleure connaissance de l'impact de la canicule sur la santé et la sécurité des travailleurs. Une étude sera conduite par Santé publique France, dans l'objectif d'analyser de manière rétrospective la répartition spatio-temporelle des cas d'accidents du travail des régimes général et agricole, et notamment les causes spécifiques en lien avec la chaleur. Cette étude se fera en partenariat avec la caisse nationale d'assurance maladie et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, sur la base d'une exploitation statistique des données mises à disposition.

Données clés

Auteur : M. Mickaël Bouloux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Climat

Ministère interrogé : Travail et emploi

Ministère répondant : Travail et emploi

Dates :
Question publiée le 1er avril 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025

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