Problème des « déserts militaires » dans le recrutement de la réserve
Question de :
M. Alexandre Dufosset
Nord (18e circonscription) - Rassemblement National
M. Alexandre Dufosset attire l'attention de M. le ministre des armées sur la problématique des « déserts militaires » dans le recrutement et l'implantation territoriale de la réserve. Alors que la loi de programmation militaire 2024-2030 projette de porter le nombre de réservistes à 105 000 d'ici à 2035, soit un réserviste pour deux militaires d'active, certains départements sont privés de structures de recrutement, de formation ou d'accueil pour les jeunes candidats à la réserve. Ce déséquilibre semble compromettre la réussite du Plan réserve 2035, lequel vise pourtant à faire de la réserve un dispositif pleinement intégré à la défense nationale. La montée en puissance de la réserve apparaît en effet comme un impératif stratégique pour assurer la résilience de la Nation, renforcer la protection du territoire et pallier le déficit de masse opérationnelle face aux menaces contemporaines. Dans un rapport de 2016, la Commission armées-jeunesse identifiait déjà une trentaine de départements comme relevant de « zones de faible implantation militaire ». Huit ans plus tard, ces territoires restent pour beaucoup sans régiment, sans base, sans présence militaire et donc sans « force d'appel » visible ou opportunité concrète pour les jeunes de s'engager. Cette situation concerne en particulier des départements ruraux, des villes moyennes éloignées des centres de décision militaire, ainsi que certaines collectivités d'outre-mer. Ce manque d'infrastructures nuit également à l'ancrage de la culture de défense dans ces territoires. La situation est d'autant plus préoccupante que les dissolutions successives d'unités depuis les années 1990 ont laissé des régions entières sans relais de proximité entre les citoyens et les armées. Or l'engagement ne se décrète pas : il s'incarne, il se rend possible. Quant au développement des unités de réserve spécialisées (bataillons, flottilles, escadrons), bien qu'indispensable, il ne peut suffire à corriger les fractures territoriales, s'il n'est pas accompagné d'un effort d'implantation sur les zones historiquement délaissées. Il est essentiel que les jeunes désireux de servir la Nation, ou ceux qui n'y pensent pas spontanément mais pourraient s'engager si on leur en présentait la possibilité, ne soient pas freinés par leur code postal. L'accès à la réserve doit devenir une chance effective sur l'ensemble du territoire. C'est pourquoi M. le député souhaite savoir quelles mesures concrètes M. le ministre entend mettre en œuvre pour identifier, cartographier et résorber les « déserts militaires ». Il lui demande s'il envisage par exemple la création de structures de proximité telles que des détachements mobiles, ou des antennes légères, dans les départements sans implantation militaire hors gendarmerie.
Réponse publiée le 5 août 2025
La montée en puissance de la réserve obéit à un double impératif capacitaire et de cohésion nationale. Au plan capacitaire, l'objectif est de répondre aux besoins opérationnels des armées, directions et services du ministère afin d'être en mesure de répondre aux menaces actuelles, jusqu'à une hypothèse d'engagement majeur. Concernant la cohésion nationale, elle est un facteur essentiel pour la résilience de notre outil de défense qui passe notamment par la constitution d'une réserve opérationnelle, en tant que trait d'union naturel entre la Nation et son armée. Sous statut militaire lors des convocations, le réserviste est employé, selon ses compétences, ses aptitudes et ses désidératas, tant dans des unités de combat qu'au sein d'états-majors ou de services du ministère des armées. Si la distance entre le lieu de résidence et de travail du réserviste et sa formation d'emploi ne constitue pas un facteur bloquant à son engagement, celle-ci peut devenir une difficulté alors que le contexte actuel requiert un surcroît de disponibilité et une fréquence plus élevée de convocations. Un effort est mené pour améliorer la disponibilité du réserviste ainsi que pour réduire la distance et les coûts liés aux frais de déplacement entre le lieu de résidence et la formation d'emploi. Les statistiques montrent ainsi que 75 % des réservistes résident à moins de 100 kilomètres de leur formation d'emploi. Le désir d'engagement, qui va croissant au sein de la population française, l'effort de communication dont fait l'objet la réserve militaire, mais aussi la numérisation d'une partie du processus de recrutement par le biais du système d'information « Réservistes opérationnels connectés » font qu'aujourd'hui tous les départements de France métropolitaine ou d'outre-mer comptent au moins un réserviste. En 2024, 978 réservistes étaient affectés dans les 30 départements considérés comme « zones de faible implantation militaire » et 4 430 réservistes y étaient domiciliés (sur un total de 40 000). Les armées poursuivent leurs efforts pour améliorer leur empreinte territoriale. Ainsi, l'armée de terre a créé des unités d'intervention de réserve qui sont rattachées administrativement à des unités d'active mais qui peuvent être implantées dans des « déserts militaires » ne disposant pas d'unité d'active. Ces unités sont impliquées notamment dans des missions de sécurisation de points sensibles. À horizon 2030, des bataillons zonaux sous l'autorité des officiers généraux de zone de défense viendront compléter ce dispositif et renforcer le maillage territorial de l'armée de terre. La marine nationale met en place des flottilles côtières composées de réservistes qui seront implantées dans des lieux qui ne disposent pas actuellement de base navale. L'objectif est de mettre en place une flottille côtière tous les 100 kilomètres sur tout le littoral métropolitain et dans chaque territoire d'outre-mer. Les armées poursuivront la dynamique de maillage territorial des réserves ainsi que l'effort de recrutement pour répondre à leurs besoins opérationnels. Les besoins en compétences spécifiques et la création d'unités spécialisées liées à la protection de sites sensibles permettront localement une augmentation de la présence de réservistes dans les zones de faible implantation militaire.
Auteur : M. Alexandre Dufosset
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Dates :
Question publiée le 29 avril 2025
Réponse publiée le 5 août 2025