Question écrite n° 6291 :
Absence de politique industrielle et suppressions d'emplois chez ArcelorMittal

17e Législature

Question de : M. Frédéric Weber
Meurthe-et-Moselle (3e circonscription) - Rassemblement National

M. Frédéric Weber alerte M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, sur l'annonce par le groupe ArcelorMittal d'un plan de suppressions de postes concernant sept sites industriels du nord de la France, dont celui de Florange, dans le département de la Moselle. Selon les informations publiées par la presse, ce sont près de 600 emplois qui seraient concernés à l'échelle nationale, dont une centaine sur le seul site de Florange. Cette décision brutale intervient dans un contexte de fragilité persistante pour la filière sidérurgique française, pourtant stratégique pour la souveraineté industrielle. Ancien salarié d'ArcelorMittal à Florange, M. le député rappelle que le savoir-faire des salariés de ce site est unanimement reconnu et que c'est dans cette même usine qu'a été fabriquée la flamme olympique des Jeux de Paris 2024. Cette situation est d'autant plus préoccupante que la vallée de la Fensch reste marquée par des décennies de désindustrialisation et par les conséquences sociales lourdes des choix de désengagement successifs de l'État. Depuis 2012 et la fermeture des hauts-fourneaux de Florange malgré les promesses non tenues de l'exécutif de l'époque, la sidérurgie française continue d'être affaiblie par une absence de politique industrielle cohérente, par une exposition à une concurrence internationale déloyale, par un prix de l'énergie dissuasif et par un empilement de normes qui freinent les capacités de production. M. le député souhaite savoir quelles actions le Gouvernement entend mener pour protéger les salariés directement menacés par ce plan, pour garantir la pérennité des capacités sidérurgiques sur le territoire national et pour assurer un environnement industriel viable face aux distorsions de concurrence subies, notamment en matière d'énergie et de règles commerciales. Il lui demande également si l'État entend ouvrir un dialogue avec la direction d'ArcelorMittal afin d'examiner, en lien avec les partenaires sociaux toutes les pistes susceptibles de préserver l'emploi et le tissu industriel de ces territoires.

Réponse publiée le 2 septembre 2025

L'industrie sidérurgique est un secteur stratégique pour l'économie de l'Union européenne, fournissant des intrants essentiels à de nombreux secteurs – dont l'automobile, l'énergie, la construction et la défense. Le Gouvernement est conscient de la situation préoccupante de la sidérurgie française et européenne, laquelle est confrontée à plusieurs défis majeurs menaçant sa pérennité. Les coûts de production ont augmenté en raison de la hausse des coûts de l'énergie et du prix du carbone (i), alors que les prix ont chuté en raison des surcapacités mondiales, de la concurrence déloyale de pays-tiers et de la baisse de la demande (ii). En conséquence, la production de l'Union européenne a diminué et l'utilisation actuelle des capacités est inférieure aux niveaux de rentabilité. Cette situation complique la décarbonation des usines sidérurgiques européennes, plusieurs producteurs ayant interrompu leurs investissements dans des projets d'acier vert, à l'image d'ArcelorMittal à Dunkerque, dont le projet de décarbonation est une étape indispensable pour pérenniser à terme son activité ainsi que l'attente de nos objectifs nationaux de baisse des émissions de gaz à effet de serre. La pérennité de l'activité d'ArcelorMittal en France, et généralement la compétitivité de toute la sidérurgie de l'Union Européenne, doit s'analyser à l'aune de ce contexte difficile. Cette situation unique appelle la France à s'engager aux niveaux national et européen. Au niveau national, a été signée, en janvier 2024 et via l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, une convention d'aide de 850 millions d'euros. Cette aide n'a pas encore été versée puisqu'elle est conditionnée à la commande effective des actifs stratégiques du projet, à savoir les fours à arc électrique et le réacteur de réduction directe du fer. Par ailleurs, pour permettre à ArcelorMittal et plus généralement aux industriels dits « électro-intensifs « d'accéder à une électricité compétitive, EDF développe, dans le cadre de l'accord conclu avec l'État en novembre 2023, une nouvelle politique commerciale basée sur des contrats de long terme d'environ 10 ans – négociés bilatéralement avec les industriels dans une logique de partage de risque. En janvier 2024, ArcelorMittal a annoncé avoir signé avec EDF une lettre d'intention relative à la conclusion d'un contrat d'allocation de la production, ce qui lui permettra de sécuriser ses approvisionnements futurs en électricité en France – et ce à un prix compétitif. Au niveau européen, le Gouvernement plaide pour des mesures urgentes nécessaires pour assurer à ArcelorMittal, ainsi qu'aux autres acteurs européens, des perspectives économiques claires et porteuses lui permettant d'engager ses investissements dès 2025. En octobre dernier, la France a d'ailleurs été à l'initiative de la réouverture de la mesure de sauvegarde afin d'améliorer la protection de la filière de l'acier européen. Le Gouvernement a également alerté la Commission européenne sur la nécessité absolue d'élaborer un plan d'urgence pour l'acier européen. Ce plan a figuré parmi les priorités des 100 premiers jours du nouvel exécutif européen, en faveur d'une amélioration significative des instruments de défense commerciale, afin qu'ils soient plus efficaces et rapidement opérationnels. En parallèle, et pour maintenir l'enjeu de la sidérurgie européenne sur le haut de la pile des priorités de l'Union européenne, le Gouvernement a été à l'initiative d'un « sommet européen pour une stratégie européenne autour de l'industrie de l'acier » en février 2025. Ce sommet a été l'occasion de rappeler à la Commission les mesures urgentes à prendre, notamment la mobilisation complète et accélérée des instruments anti-dumping et antisubventions, y compris sur la base de la menace de préjudice. L'amélioration rapide de la mesure de sauvegarde actuellement en vigueur, y compris avec la mise en place de niveaux de quotas plus adaptés à la demande européenne ou encore la présentation d'un nouveau mécanisme de défense commerciale, a aussi été évoquée. Enfin, il a été question de l'amélioration du mécanisme d'ajustement aux frontières pour le carbone afin de garantir que les aciers importés supportent une tarification carbone alignée sur celle que paient déjà les sidérurgistes européens dans le cadre de l'EU-ETS (emissions trading system). Le Gouvernement est quoi qu'il en soit pleinement mobilisé pour assurer à ArcelorMittal un cadre lui permettant de confirmer ses investissements en France. Il en va non seulement de notre souveraineté en matière de production d'acier, maillon essentiel de très nombreuses chaînes de valeur, mais aussi de la capacité de notre sidérurgie à se décarboner – en assurant à la fois sa viabilité économique et la réalisation de nos objectifs climatiques. La France ne saurait devenir un simple atelier de transformation d'acier produit hors du continent, toutes les grandes puissances industrielles étant également des puissances sidérurgiques.

Données clés

Auteur : M. Frédéric Weber

Type de question : Question écrite

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Industrie et énergie

Ministère répondant : Industrie et énergie

Dates :
Question publiée le 29 avril 2025
Réponse publiée le 2 septembre 2025

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