Question écrite n° 6388 :
Évolution du statut juridique des animaux dans le droit français

17e Législature

Question de : Mme Valérie Rossi
Hautes-Alpes (2e circonscription) - Socialistes et apparentés

Mme Valérie Rossi attire l'attention de M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité de faire évoluer le statut juridique des animaux dans le droit français, afin de mieux prendre en compte leur sensibilité et leur place croissante dans nos sociétés. Un rapport remis au Gouvernement avait, dès 2011, souligné l'écart entre le droit civil français et les textes européens, qui reconnaissent de longue date la sensibilité des animaux. L'Union européenne, en particulier depuis le traité d'Amsterdam, considère explicitement l'animal comme un être vivant doué de sensibilité. En France, si des avancées ont été réalisées dans le code rural et le code pénal, notamment pour réprimer les actes de cruauté envers les animaux, le code civil les assimile toujours à des biens meubles, au même titre qu'un objet. Cette situation apparaît aujourd'hui en décalage avec les attentes sociétales et les principes d'éthique contemporaine. Les Français sont de plus en plus nombreux à considérer leurs animaux de compagnie comme des membres à part entière de leur foyer. De plus, les recherches scientifiques confirment que les animaux sont capables d'émotions, de stress, de souffrance - autant d'éléments qui mériteraient une reconnaissance juridique adaptée. Le rapport susmentionné proposait deux pistes de réforme du code civil : soit la création d'une nouvelle catégorie de « biens protégés », tenant compte de la spécificité des animaux ; soit, plus audacieusement, la création d'une troisième catégorie juridique, à mi-chemin entre la personne et la chose, permettant de définir l'animal pour ce qu'il est : un être vivant sensible, sans pour autant lui conférer la personnalité juridique. Elle souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur ces propositions, ainsi que ses intentions en matière d'évolution du code civil, afin d'aligner le droit français avec les réalités scientifiques, les attentes citoyennes et les principes européens en matière de protection animale.

Réponse publiée le 19 août 2025

Depuis la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures, qui s'est notamment appuyée sur le rapport de Madame Suzanne Antoine sur le régime juridique de l'animal, le code civil contient une disposition spécifique dédiée aux animaux qui les désigne comme « des êtres vivants doués de sensibilité » et les soumet au régime des biens (article 515-14). Cette disposition, qui complète la protection des animaux au plan pénal, prévue par les articles 521-1 et 521-2 du code pénal, ainsi que celle organisée par le code rural et de la pêche maritime, à l'article L. 214-1, a conduit à supprimer de l'article 528 du code civil les animaux de la catégorie des meubles par nature. Cette réforme, largement saluée par les associations veillant à la protection des animaux, a donc déjà permis de placer les animaux dans une catégorie spécifique. Plus récemment, la loi n° 2024-536 du 13 juin 2024 a prévu la possibilité pour le juge qui prononce une ordonnance de protection d'attribuer la jouissance de l'animal de compagnie du foyer à la victime ; la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 garantit aux résidents d'EHPAD un droit d'accueillir leurs animaux de compagnie « sous réserve de leur capacité à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux de ces animaux ». Le droit positif actuel ménage ainsi un juste équilibre afin de tenir compte de la nature spécifique de l'animal et sa haute valeur affective, sans remettre en cause la primauté de la personne humaine (article 16 du code civil). Au regard de l'ensemble de ces éléments, il n'est pas envisagé de modifier le statut juridique de l'animal tel que défini à l'article 515-14 du code civil.

Données clés

Auteur : Mme Valérie Rossi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 6 mai 2025
Réponse publiée le 19 août 2025

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