EHPAD, organisation et moyens dédiés aux contrôles
Question de :
Mme Marietta Karamanli
Sarthe (2e circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Marietta Karamanli attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l'autonomie et du handicap, sur le contrôle des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) à la suite des affaires mettant en cause, la qualité, la sécurité, la santé et la dignité des personnes accueillies. Selon les données publiques, fin 2024 96 % des 7 500 EHPAD avaient été inspectés (sur place) ou contrôlés (sur pièces) par les agences régionales de santé (ARS). 30 % de ces contrôles avaient été des inspections sur place et 70 % l'avaient été sur dossiers et documents. Pratiquement, cela pose la question de la surveillance effective des faits et situations de maltraitance qui nécessitent plutôt une visite et des relations ponctuelles avec les résidents et leurs familles. Selon les données disponibles, les emplois-types en ARS, au 31 décembre 2021, dans la catégorie « chargé de contrôle des établissements sanitaires et médico-sociaux » représentaient 3 % des emplois. 120 postes équivalents temps plein travaillé (ETPT) ont été accordés aux ARS en 2023 et 2024 pour la mise en œuvre du plan national de contrôle des EHPAD ; ces postes sont occupés majoritairement par des agents sous contrat ce qui ne garantit pas la pérennité des fonctions nécessaires. Côté sanctions, celles-ci peuvent être la mise sous administration provisoire (article L. 313-17 du code de l'action sociale et des familles), le transfert d'autorisation (article L. 313-18 du même code), la fermeture temporaire ou définitive, partielle ou complète (articles L. 313-15 et 16 du même code) et, depuis le décret du 9 août 2023, des astreintes journalières et des sanctions financières. Ces dernières sanctions n'auraient pas été effectives en 2024 à raison d'un problème administratif. Dans ces conditions, elle lui demande comment l'État entend structurer dans chaque ARS un service d'inspection, lui en donner les moyens en fonction de l'importance des établissements à contrôler, rendre effectives toutes les possibilités de sanction, créer si nécessaire une organisation nationale de ce contrôle avec pour objectif de viser toutes les catégories d'établissements et de disposer ainsi de moyens pouvant être mutualisés sur le territoire.
Réponse publiée le 8 juillet 2025
Dans les suites de l'affaire Orpéa, le Gouvernement a annoncé, le 8 mars 2022, diverses mesures relatives à la politique du Grand âge, fondées sur le bien vieillir, tant à domicile qu'en Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), parmi lesquelles le lancement d'un plan national d'inspection et de contrôle des 7 500 EHPAD de France en deux ans (2022-2024), à mener par les Agences régionales de santé (ARS) en lien avec les départements. Inédit dans son ambition, dans la mesure où ces établissements étaient auparavant contrôlés en moyenne tous les vingt ans, ce plan de contrôle avait pour objectif de prévenir, repérer et corriger les écarts à la norme, les carences, les risques de maltraitances et les dysfonctionnements de nature à affecter la prise en charge des personnes âgées accueillies en EHPAD. Il visait également à améliorer la qualité globale des prestations mises en œuvre par ces structures, aux fins de garantir notamment la sécurité, le bien-être et le respect des droits et libertés des résidents. Pour réaliser l'ensemble des missions d'Inspection et de contrôle (I-C) relevant de leur champ de compétence, les ARS ont mobilisé un total de 572,22 Equivalents temps plein (ETP) en 2023, parmi lesquels 179,23 ETP consacrés aux I-C réalisés dans les établissements sociaux et médico-sociaux dédiés aux personnes âgées, dont les EHPAD. Parmi ces effectifs, on retrouve les 120 ETP de renfort recrutés par les ARS en 2022 et 2023 pour mettre en œuvre le plan national d'I-C des EHPAD, étant précisé que ces effectifs de renfort ont par la suite été pérennisés dans le cadre de la loi de finances 2024. Le 27 mars 2025, la ministre chargée de l'autonomie et du handicap a rendu publics les résultats de ce plan national d'inspection – contrôle des 7 500 EHPAD. Le bilan au 31 décembre 2024 fait ainsi état de 7 416 missions d'inspection – contrôle d'EHPAD réalisées par les ARS sur place (34 % des cas) ou sur pièces (66 % des cas), au sein de 7 122 établissements différents. Ce bilan représente 96 % des EHPAD contrôlés au moins une fois entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2024. L'objectif de 100 % des EHPAD contrôlés sera atteint par l'ensemble des ARS en juin 2025. Dans le cadre de ce plan, le recours aux contrôles sur pièces a permis de toucher davantage d'EHPAD, d'identifier de potentielles situations à risques et de réserver les inspections sur place (34 % des contrôles réalisés, soit une proportion supérieure à celle de 20 % initialement prévue) aux situations considérées comme les plus sensibles au regard de l'analyse préalable des risques. Par ailleurs, le delta entre le nombre de missions réalisées (7 416) et le nombre d'EHPAD contrôlés (7 122) signifie que certaines structures ont fait l'objet de plusieurs contrôles entre 2022 et 2024. Cela souligne la démarche qualitative mise en œuvre par les ARS, consistant à effectuer de nouveaux contrôles dans les EHPAD nécessitant un suivi particulier, du fait de risques constatés ou suspectés à l'issue d'un premier contrôle réalisé, dans le but notamment de s'assurer de la mise en œuvre des mesures correctives coercitives édictées (injonctions et prescriptions). S'agissant des suites données aux inspections – contrôles réalisés, il ressort que près de 90 % d'entre elles n'ont effectivement pas débouché sur une injonction, qui correspond à la mesure corrective coercitive la plus élevée, prise face à un écart majeur à la réglementation et / ou à un risque grave. Une sanction administrative ne pouvant être prononcée que dans les situations où l'organisme ne remédie pas dans le délai fixé par l'ARS aux manquements constatés, le nombre de sanctions administratives réduit est un reflet du nombre de situations corrigées par les organismes gestionnaires sans qu'une sanction soit nécessaire. On comptabilise au 31 décembre 2024 un total de 55 sanctions administratives prononcées – parmi lesquelles des décisions de mise sous administration provisoire, de suspension et de cessation totale ou partielle d'activité - au sein de 41 EHPAD, ainsi que 40 signalements au procureur de la République effectués. Parmi ces sanctions administratives, le Code de l'action sociale et des familles (CASF) prévoit également la possibilité de prononcer des astreintes journalières et des sanctions financières prévues à l'article L. 313-14 du CASF. Ce dispositif de sanction n'a effectivement pas été mobilisé par les ARS dans le cadre du plan de contrôle des EHPAD. Le décret n° 2023-761 du 9 août 2023 relatif aux modalités de mise en œuvre des astreintes journalières et des sanctions financières prévoit en effet, quelle que soit l'autorité de tarification ayant prononcé la sanction, la compétence du préfet de département pour émettre les titres de perception. Les mêmes textes prévoient le versement du produit des astreintes journalières et des sanctions financières au budget général de l'Etat, ou, lorsque les structures redevables relèvent de l'objectif global des dépenses, à la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. La mise en œuvre pleine et entière de ce dispositif a nécessité des travaux interministériels en cours de finalisation, en lien avec les services du ministère de l'intérieur et la direction générale des finances publiques, en vue de sécuriser ces circuits comptables. La stratégie nationale de lutte contre les maltraitances 2024-2027 porte l'ambition d'inscrire dans la durée la politique de contrôles réguliers des établissements accueillant des personnes âgées. Les contrôles des EHPAD vont donc se poursuivre, avec une inscription d'objectifs de contrôle au sein des programmes régionaux d'inspection-contrôle des ARS. Ils s'inscriront notamment dans le cadre du suivi des suites données aux contrôles de l'exercice 2022-2024 et à la finalisation du plan de contrôle d'ici la fin du premier semestre 2025. La programmation de nouveaux contrôles sera issue d'une analyse préalable de risques qui devraient être essentiellement organisés sur site. Cette stratégie nationale comporte également un axe visant à la mise en place d'un plan de contrôle dans le champ du handicap sur la période 2025-2027. Afin d'atteindre cet objectif, une partie des moyens humains dédiés au plan de contrôle des EHPAD sera redéployée au profit du plan de contrôle des établissements accueillant des personnes en situation de handicap. Ce plan s'appuiera sur les méthodes introduites dans le cadre du plan d'inspection-contrôle des 7 500 EHPAD avec une programmation des inspections-contrôle à partir d'une démarche d'analyse des risques, sans exclure la possibilité d'inspection-contrôle sur la base de plaintes ou de signalements, dans un objectif de ciblage et de priorisation des établissements et services à inspecter en priorité et des thèmes de contrôle à investiguer. Pour 2025, un objectif de 500 inspections-contrôles a été défini pour démarrer le plan de contrôle. Pour les années suivantes, les objectifs tiendront compte du niveau de criticité des établissements et services, après analyse préalable de leur niveau de risque. La préparation et la réalisation de ces contrôles sera également réalisée en lien avec les Départements en 1er lieux en cas de co-autorisation mais également avec d'autres services de l'Etat tels que les MDPH, l'éducation nationale, etc. Ce plan se déclinera avec un taux plus ambitieux d'inspections sur place de 80 % (contre a minima 20 % pour le plan de contrôle EHPAD). Enfin, ces inspections-contrôles dans le champ du handicap intègreront les enjeux spécifiques de « logique de parcours » et de la politique de transformation de l'offre. Comme pour le plan de contrôle des EHPAD, cette orientation nationale d'inspection-contrôle du secteur du handicap fera l'objet d'un suivi national en lien avec les ARS.
Auteur : Mme Marietta Karamanli
Type de question : Question écrite
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Autonomie et handicap
Ministère répondant : Autonomie et handicap
Dates :
Question publiée le 13 mai 2025
Réponse publiée le 8 juillet 2025