Situation de la psychiatrie de proximité et de l'accès aux soins en Mayenne
Question de :
Mme Géraldine Bannier
Mayenne (2e circonscription) - Les Démocrates
Mme Géraldine Bannier appelle l'attention de Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins sur la situation de la psychiatrie de proximité et de l'accès aux soins en Mayenne. Mme la députée a en effet été alertée par des médecins de sa circonscription sur la situation de la psychiatrie de proximité, fleuron national, qui, selon eux, « explose ». Ces médecins ajoutent : « Le bateau, maintenu à flots depuis six, sept ans coule ». Dans le département voisin de la Sarthe, on constate ainsi vingt-six départs en six mois. À Château-Gontier, en Mayenne, le bon fonctionnement repose d'abord sur l'extrême volontarisme d'une équipe dont trois des quatre psychiatres sont sur le départ ; l'un d'eux a soixante-sept ans, un autre soixante-et-onze... Leur dévouement force l'admiration ; les lits ferment mais ils se déplacent autant qu'ils le peuvent chez les patients. Leur service de psychiatrie est renommé. Il propose notamment des journées consacrées aux thérapies familiales. Mme la députée s'interroge sur l'avenir de ce travail s'il n'y a pas de relève médicale. Les gardes, elles, s'organisent tant bien que mal mais hors du cadre trop rigide imposé et il en est de même pour l'ouverture des urgences. Comme ces praticiens l'expliquent, ce qui prévaut, c'est le volontarisme : « Les acquis sociaux passent après ». La situation à Laval n'est pas meilleure : il n'y a plus que deux psychiatres sur les onze nécessaires. On a même signalé le cas d'un jeune psychiatre qui a renoncé à exercer son métier... Quant à l'accueil d'internes, il interroge : il faudra bien des encadrants et là où il y a déjà pénurie, pourra-t-on les accueillir ? C'est pourquoi ces médecins réclament d'urgence qu'on leur permette d'aller chercher des médecins là où ils sont, à l'étranger ; ils sont en capacité de filtrer les bons profils. Reste à offrir à ces médecins étrangers des conditions acceptables avec un statut de praticien attaché et non de stagiaire associé, à 1 300 euros par mois, comme il a été proposé à deux reprises récemment avec évidemment deux départs à la clef... Une certaine souplesse est sans doute requise en la matière. Une élue locale alerte aussi : un collectif de jeunes - recalés pour être kinésithérapeutes - s'organise pour partir à l'étranger et sans doute ne pas revenir. L'un de ces jeunes avait 14,5 de moyenne et a simplement raté son concours. Ces jeunes étaient prêts, eux, à s'installer dans un désert médical. Cette élue signale au passage qu'en matière de régulation, dans le nord du département de la Mayenne, on atteint une heure trente d'attente pour une ambulance, même quand il s'agit d'une patiente de quatre-vingt-quatorze ans. En bref, malgré les mesures prises récemment, la phrase la plus entendue sur ces sujets, de toutes parts, c'est : « On marche sur la tête ». Elle lui demande par conséquent quelles sont les solutions d'urgence envisagées pour une réforme de fond, systémique, qui s'avère parfaitement indispensable face à ces situations ubuesques et très difficiles à vivre du point de vue des patients.
Réponse publiée le 26 novembre 2024
La santé mentale et la psychiatrie font l'objet d'une attention particulière ces dernières années, suite à la crise sanitaire et au vu des constats d'une dégradation de l'offre et d'une augmentation de la demande de soins psychologiques et psychiatriques. Des moyens importants ont été accordés au secteur depuis 2016, avec une hausse de 12,5 % de crédits entre 2022 et 2024, et de 32.3% entre 2016 et 2024. Pour répondre à ces constats, des travaux importants ont été engagés en lien avec les acteurs et sont portés par le délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie, le professeur Frank Bellivier, la commission nationale de la psychiatrie, co-présidée par le professeur Michel Lejoyeux, et les services du ministère de la santé. Les sujets centraux sont le renforcement de la prévention et la crise d'attractivité de la discipline. Convaincu de l'importance du sujet, le Premier ministre a décidé de faire de la santé mentale la grande cause nationale 2025, et lors de son déplacement le 10 octobre 2024 à Poitiers, il a présenté les grandes lignes de la politique qu'il souhaite mener sur le sujet dans les prochains mois : - mettre en place dans chaque ministère une feuille de route relative à la santé mentale dans son domaine ; - doubler le nombre de maisons des adolescents ; - mener des travaux permettant de déstigmatiser les troubles mentaux et de sensibiliser sur la santé mentale ; - améliorer le repérage, la prévention en santé mentale, par le biais notamment de la généralisation de la formation de premiers secours en santé mentale ; - améliorer la prise en charge des patients, en développant des filières de psychiatrie permettant de mieux orienter les patients et de les accompagner dans leur prise en charge, y compris de manière non programmée ; - généraliser les outils de coordination territoriale, permettant d'organiser les parcours et de favoriser une mobilisation des acteurs au niveau local ; - intensifier l'effort de recherche en santé mentale, en favorisant des projets portés par les acteurs de terrain. Sur le sujet de l'accès aux soins, des disparités se sont aggravées au fil des années avec le vieillissement de la population et la démographie décroissante des médecins généralistes. En réponse, les enjeux se concentrent sur trois axes : - l'accès à un médecin traitant et aux soins spécialisés, la difficulté la plus fréquemment rencontrée étant des professionnels ne prenant plus en charge de nouveaux patients ou encore, les délais d'attente pour accéder à une consultation de spécialiste (délai médian de 61 jours, avec certaines spécialités comme l'ophtalmologie ou la dermatologie allant jusqu'à près de 6 mois) ; - l'accès aux soins non-programmés, en l'absence du médecin traitant ou d'autres solutions de soins, en particulier le soir, les week-ends et jours fériés ; - le développement des stratégies d' « aller-vers » pour faire revenir au soin les populations qui en sont les plus éloignées et d'accéder à la promesse républicaine du droit à la santé pour tous. Ces priorités doivent être adressées selon deux temporalités distinctes à mener de front : - à court terme, avec des actions massives en mobilisant tous les leviers (organisation, financement, attractivité, innovation) en cohérence afin d'en multiplier les effets ; - à moyen/long termes, la coordination des professionnels de santé et l'évolution de l'offre de soins qui est la plus à même de transformer en profondeur notre système trop centré sur le modèle du médecin isolé (qui doit devenir minoritaire d'ici la fin de la décennie) et le recours non pertinent aux services d'urgence. En ce qui concerne la formation, il est en effet indispensable d'augmenter le nombre de psychiatres en formation. Le nombre d'internes est actuellement d'environ 500 par an, avec une volonté d'aller au-delà. Mais, il faut rendre le métier attractif, car les postes ouverts ne sont pas tous pourvus actuellement. Par ailleurs, la politique de renforcement des stages en dehors des centres hospitaliers universitaires va continuer à se déployer. Nous agissons également sur le développement des compétences infirmières dans le cadre de la refonte du référentiel infirmier qui doit mettre l'accent sur les connaissances en psychiatrie ; le décret relatif aux infirmiers diplômés d'Etat sera prochainement publié. Nous soutenons également le développement des Infirmiers en pratique avancée (IPA) : la mention santé mentale rencontre un succès confirmé, 21 % du total des 318 IPA d'ores et déjà formés le sont en santé mentale. Conformément à la loi dite « Valletoux » nous publierons, pour les praticiens à diplôme hors union européenne, avant la fin de l'année, 2 décrets en conseil d'Etat visant à sécuriser et à accompagner les praticiens exerçant déjà sur le territoire national (depuis 3 ans au moins, incluant la période concernant le diplôme de formation médicale spécialisée ou approfondie - DFMS/A) par une autorisation d'exercice provisoire (13 mois) dans l'attente de passer les épreuves de vérification des connaissances, renouvelable 1 fois ; un statut de praticien associé contractuel temporaire (PACT), avec une rémunération plus attractive et normée au niveau national pendant la durée de cette autorisation d'exercice provisoire. Par ailleurs, une réflexion est en cours pour proposer des épreuves mieux adaptées à ces praticiens déjà en exercice sur le territoire national. Parallèlement un travail est engagé avec une volonté de diversifier les acteurs avec notamment le souhait de mieux associer les psychologues à la prise en charge ambulatoire des troubles psychiques et mieux coordonnés avec les médecins généralistes. Mon Soutien Psy est un dispositif prometteur, qui s'élargit et qui doit être mieux connu. La caisse nationale d'assurance maladie effectue en ce moment une campagne dédiée aux psychologues pour qu'ils prennent part au dispositif. Elle diffusera une campagne en début d'année prochaine auprès du grand public. Le dispositif a évolué depuis le 15 juin 2024. L'accès au psychologue a été assoupli avec la suppression de l'adressage par un médecin et le passage du nombre annuel de séances de 8 à 12. La rémunération des psychologues conventionnés prise en charge passe également de 30 à 50 € la consultation.
Auteur : Mme Géraldine Bannier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 26 novembre 2024