Question écrite n° 6755 :
Indemnisation des éleveurs suite aux attaques de loups

17e Législature

Question de : Mme Florence Goulet
Meuse (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Florence Goulet attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les enjeux persistants en matière d'indemnisation des éleveurs victimes de prédation. Dans son département de la Meuse, le nombre d'animaux tués par le loup a augmenté de 41 % entre 2018 et 2024. Pourtant, la réponse indemnitaire apportée par le dispositif national reste très en deçà des enjeux. En effet, les délais de traitement et de versement des indemnisations atteignent parfois plus de six mois, mettant ainsi en péril la pérennité des élevages. Par ailleurs, au-delà des pertes directes, les éleveurs subissent des conséquences indirectes considérables. Une étude commandée par le ministère de la transition écologique, dans le cadre du Plan national d'action loup et activités d'élevage 2018-2023, a mis en évidence une baisse des mises bas pouvant atteindre 30 % à la suite des attaques. Ce même rapport a également souligné les limites des barèmes d'indemnisation, notamment en ce qui concerne les pertes indirectes. Malgré les promesses, aucune avancée significative n'a été mise en œuvre. Les barèmes d'indemnisation des pertes indirectes ne tiennent pas compte des données scientifiques actualisées, laissant un reste à charge non négligeable pour les éleveurs, qui doivent aussi supporter les conséquences psychologiques de ces attaques. De plus, Mme la députée rappelle que la requalification du statut du loup fin 2024, au niveau européen (convention de Berne), passant d'« espèce strictement protégée » à « espèce protégée », aurait dû conduire à une adaptation des transpositions normatives. Ce qui, à ce jour, n'a toujours pas été engagé en France. Aussi, elle lui demande quelles mesures concrètes elle entend mettre en œuvre pour réduire les délais de traitement, rendre les barèmes plus représentatifs des pertes réelles et intégrer les données scientifiques disponibles sur les pertes indirectes et les mesures d'indemnisations exceptionnelles qui peuvent être mises en place.

Réponse publiée le 2 septembre 2025

En 2024, l'indemnisation des pertes directes et indirectes liées à la prédation des grands prédateurs terrestres s'élevait à 5 523 000 €.Les aides financières, visant à indemniser les pertes subies par les éleveurs après une déprédation de grand prédateur, ont été révisées pour les pertes « directes » à environ +30% dans l'arrêté du 22 février 2024, conformément à l'évolution de l'indice des prix à la consommation observé de 2019 à 2024. Concernant les pertes « indirectes », conformément au Plan National d'Action (PNA) loup et activités d'élevage 2024-2029, leur calcul est en cours de révision pour proposer un système d'indemnisation davantage proportionné aux pertes effectivement subies par les éleveurs. Quatre groupes de travail se sont tenus à ce sujet en 2024, réunissant les représentants d'organisations professionnelles agricoles ainsi que les parties prenantes des groupes nationaux liés aux trois grands prédateurs (loup, ours, lynx), sur la base du rapport de l'Institut De l'Elevage (IDELE) remis en mai 2023 au Ministère en charge de l'environnement. Le fruit de ces travaux a été présenté aux parties prenantes en Groupe national loup, et sera prochainement traduit dans une modification de l'arrêté du 22 février 2024. En ce qui concerne les délais de traitement des dossiers d'indemnisation, ceux-ci ont été réduits en 2024, permettant de passer de 176 jours moyens de traitement (2021) à 135 jours (2024), soit un gain de plus de 40 jours. Ce délai comprend notamment la réception du constat, son instruction et les échanges avec l'éleveur pour récupérer certains justificatifs, sa transmission à l'Agence des Services et de Paiement (ASP) et le signalement éventuel d'anomalies. Dans le cas du département de la Meuse, le délai moyen de traitement des dossiers est de 92 jours. Différentes actions ont permis d'accélérer la procédure notamment la dématérialisation des constats de dommages, initiée au printemps 2023, ainsi que des séances de formation nationales des services de l'Etat sur la procédure d'indemnisation, le passage du courrier au courriel pour échanger avec les éleveurs concernés ou encore la simplification de la procédure de mandatement d'un éleveur à un tiers pour signer les constats de dommages. La durée de la procédure reste cependant dépendante de la saison (pic d'activité estival), de l'expérience du département dans l'instruction des demandes d'indemnisation (certains départements en zone d'expansion des loups sont peu familiers de la procédure), ou encore des différents recours possibles sur les dossiers. L'accélération des procédures d'indemnisation des éleveurs est au cœur des préoccupations de l'Etat. A ce sujet, la Préfète coordonnatrice du PNA a rappelé par instructions les engagements de délai de traitement dans toutes les procédures concernant la prédation lupine à l'ensemble des préfets concernés. Les efforts seront maintenus pour permettre une indemnisation dans les meilleurs délais. Par ailleurs, concernant le statut du loup, la France a voté favorablement à la proposition de changement d'annexe du loup au sein de la Convention de Berne le 7 décembre 2024 (passage de l'annexe IV à l'annexe V). Suite à ce vote, l'Union européenne a modifié en conséquence la Directive Habitat Faune Flore de 1992 (DHFF) le 17 juin 2025 pour reclasser le loup de l'annexe II à l'annexe III. Les Etats membres qui le souhaitent disposent désormais de dix-huit mois pour traduire cette directive dans leur droit national : dans l'attente de cette traduction pour laquelle nous sommes mobilisés, le loup demeure en France une espèce strictement protégée. En outre, et malgré son déclassement, l'espèce reste également « protégée » dans la Convention de Berne et d'intérêt communautaire au sens de la DHFF : à ce titre, le maintien de son bon état de conservation demeure une condition que les parties doivent respecter.  Le futur cadre de gestion de l'espèce et ses modalités opérationnelles sont donc à construire collectivement, en particulier avec le concours de l'ensemble des parties prenantes du Groupe National Loup, réunies sous l'égide de la Préfète Auvergne Rhône-Alpes, coordinatrice du Plan national d'action « Loup et activités d'élevage » (2024-2029). A ce titre, un groupe de travail a déjà été réuni en juin 2025, avec des représentants des éleveurs et des associations de protection de la nature afin de tirer les conséquences du changement de statut du loup. Il est à noter que ce déclassement n'impactera pas les aides financières apportées par l'Etat pour l'achat de moyens de protection (clôtures électrifiées, chiens de protection, gardiennage) et l'indemnisation des victimes de la déprédation, qui seront maintenues dans leur intégralité.

Données clés

Auteur : Mme Florence Goulet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 20 mai 2025
Réponse publiée le 2 septembre 2025

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