Dysfonctionnement du chèque énergie
Question de :
Mme Marie-France Lorho
Vaucluse (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Marie-France Lorho appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur un nouveau dysfonctionnement du chèque énergie, dispositif coûteux et complexe qui pèse tant sur les administrés que sur l'administration. Le système du chèque énergie accumule les défaillances. En 2024, environ un million de ménages éligibles n'ont pas reçu leur chèque énergie, en raison des perturbations liées à la suppression de la taxe d'habitation. Les associations de consommateurs, telles que la CLCV et l'Unaf, ont dénoncé la complexité des démarches, avec seulement 3 % des nouveaux bénéficiaires potentiels ayant accédé à l'aide en 2024. À cela s'ajoutent des plaintes récurrentes sur des dossiers perdus, égarés ou mal traités, ainsi que sur les difficultés des ménages modestes à faire reconnaître leurs droits. Le report du versement du chèque énergie 2025 à novembre, contre avril-mai habituellement, en raison d'un retard dans l'adoption de la loi de finances, constitue une nouvelle avarie de ce système. Ce décalage place des milliers de Français, aux ressources limitées, dans une situation financière critique, notamment ceux confrontés à des factures de régularisation énergétique dès septembre 2025. Ce retard illustre une fois de plus l'inefficacité d'un dispositif qui, loin de simplifier l'accès à l'énergie, complique la vie des administrés et alourdit la charge administrative. Aussi, Mme la députée demande à M. le ministre les raisons précises du retard du versement du chèque énergie à novembre 2025 et l'impact estimé de ce décalage sur les ménages modestes confrontés à des factures avant cette date. Elle souhaiterait également avoir connaissance du coût total de gestion administrative du chèque énergie pour 2024 et 2025, y compris les dépenses liées aux erreurs, retards et réclamations. Enfin, elle lui demande quelles mesures sont envisagées par le Gouvernement pour réévaluer ce dispositif au profit d'une politique énergétique plus directe, telle qu'une réduction des prix de l'énergie accessible à tous les Français.
Réponse publiée le 8 juillet 2025
Jusqu'en 2023, l'éligibilité au chèque énergie s'appréciait au regard des critères suivants : le revenu fiscal de référence (RFR) de l'année N-2, établi à partir des éléments déclarés en année N-1 ; la composition du ménage, déterminée avec la taxe d'habitation au 1er janvier N-1. Par exemple, pour le chèque 2023, l'éligibilité au chèque énergie s'appréciait au regard des revenus 2021 et de la situation au regard de la taxe d'habitation au 1er janvier 2022. Compte tenu de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales au 1er janvier 2023, la liste des bénéficiaires du chèque énergie ne peut plus être établie selon les anciens critères depuis l'année 2024. Par conséquent, pour 2024, les bénéficiaires du chèque énergie sont les mêmes que ceux de 2023. Ainsi, 5,5 millions de ménages ont reçu leur chèque énergie automatiquement en avril 2024. En complément, un guichet de demande a également été mis en place pour permettre aux ménages qui sont éligibles au chèque énergie au titre de leur situation en 2022 (revenus et composition du ménage), mais ne l'étaient pas au titre de leur situation en 2021 ou dont la situation a changé depuis 2021, de demander respectivement un chèque énergie ou de demander un chèque énergie complémentaire. Cela concerne par exemple les jeunes qui entrent dans la vie active (primo-déclarants), les ménages qui ont connu une baisse de revenus entre 2021 et 2022 ou les ménages qui ont connu une naissance en 2022. Ce guichet était ouvert du 4 juillet au 31 décembre 2024. Dans le cadre de ce guichet, plus de 174 300 chèques énergie ont été attribués, soit plus de 17 % des ménages potentiellement concernés. Une mission d'inspection a étudié les nouvelles modalités d'attribution du chèque énergie à partir de 2025. Elle recommande de fonder l'attribution du chèque énergie sur les informations fiscales et de conserver l'envoi d'un seul chèque par logement. Pour cela, elle recommande de prévoir à partir de 2025 que l'attribution du chèque énergie soit associée au compteur d'électricité (numéro de point de livraison - PDL) du logement. Cette solution nécessite de collecter les références de PDL d'un logement et de l'associer au numéro fiscal du titulaire du contrat de fourniture d'électricité, pour vérifier les conditions de ressources. Le Gouvernement met tout en œuvre pour automatiser au maximum l'attribution du chèque énergie en 2025. Pour 2025, l'objectif est que le chèque énergie soit attribué de manière automatique au plus grand nombre par le croisement, par l'Agence de service et de paiement (ASP), d'une liste établie par la DGFIP avec : les données des gestionnaires de réseaux publics de distribution d'électricité ; les données déjà en sa possession (pré-affectations, paiement en ligne, activation automatique des protections associés) ; et celles des fournisseurs d'électricité. Les foyers qui ne seront pas identifiés automatiquement dans ce cadre pourront déclarer leur numéro fiscal et leur PDL sur une plateforme en ligne ou par courrier pour demander le chèque énergie 2025. Cette solution, associée à une communication gouvernementale, sera de nature à diminuer le nombre de foyers qui devront se déclarer sur cette plateforme. Les dispositions législatives pour cette réforme ont été inscrites à l'article 173 dans la loi de finances 2025 et devront être complétées par un décret d'application. Compte tenu de l'adoption tardive de la loi de finances 2025, le calendrier d'envoi des chèques énergie sera décalé à l'automne 2025. Ces chèques énergie pourront être utilisés jusqu'au 31 mars 2027. La baisse de crédits prend en compte ce décalage d'envoi et donc le décalage des usages des chèques 2025 en 2026 et 2027. S'agissant des frais de gestion du chèque énergie, ils comprennent les développements informatiques liés au dispositif, le pilotage du dispositif par l'ASP, l'éditique pour la campagne (papier sécurisé, impression, affranchissement, envoi postal…) et les relances pour les chèques non utilisés, l'intégration au bouquet France services, le traitement des réclamations des ménages et des acceptants, l'assistance utilisateurs. Ces deux derniers postes sont des postes à logique de « guichet ». Leur coût dépend donc notamment de l'actualité sur le chèque énergie : créations de campagnes exceptionnelles, réforme, création d'un guichet de demande. La forte actualité sur le chèque énergie depuis la crise énergétique a pu entraîner des délais plus longs dans le traitement des réclamations. Le montant des frais de gestion pour 2024 s'élève à 34 millions d'euros, dont 32 % concerne des réclamations et 23 % l'assistance utilisateurs. Il est toutefois difficile d'estimer ceux de 2025, dans la mesure où il n'est pas possible d'établir à l'avance le nombre de réclamations qui seront reçues, ni la sur-sollicitation de l'assistance utilisateurs qui seront générés par la réforme du dispositif. Enfin, il convient de rappeler qu'à la différence du chèque énergie, une politique consistant à réduire directement les prix de l'énergie pour tous les consommateurs n'est ni ciblée (elle bénéficierait également aux consommateurs aisés) ni compatible avec les objectifs de sobriété. Un tel dispositif atténuerait en effet le signal-prix nécessaire pour encourager la maîtrise des consommations.
Auteur : Mme Marie-France Lorho
Type de question : Question écrite
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Industrie et énergie
Dates :
Question publiée le 20 mai 2025
Réponse publiée le 8 juillet 2025