Question écrite n° 6852 :
Pouvoi de l'État contre les victimes du chlordécone devant la Cour de Cassation

17e Législature

Question de : M. Marcellin Nadeau
Martinique (2e circonscription) - Gauche Démocrate et Républicaine

M. Marcellin Nadeau alerte M. le ministre d'État, ministre des outre-mer, sur la décision de l'État de former un pourvoi devant la Cour de Cassation pour contester l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 11 mars 2025. Il lui fait part de la stupéfaction des citoyens de Martinique et de Guadeloupe à cette annonce, alors même que plus de la moitié des terres antillaises sont polluées par le chlordécone. Cette décision affirme que « l'État a commis des fautes en accordant des autorisations de vente d'insecticides à base de chlordécone » et qu'il a une « responsabilité » dans le préjudice de santé provoqué, produit interdit et classé dangereux, élément déjà reconnu par le Chef de l'État en 2019 à l'occasion d'un voyage aux Antilles. Le recours de l'État en l'espèce marque donc un déni de réalité, comme un recul grave, refusant sa responsabilité. Il marque ce faisant, à nouveau, un mépris envers les habitants des terrioires d'outre-mer qui ont trop souvent été les victimes de la colonisation. Il lui demande en conséquence s'il va revoir sa décision de former un pourvoi devant la Cour de Cassation en la matière.

Réponse publiée le 12 août 2025

Par un arrêt du 11 mars 2025, la Cour administrative d'appel de Paris a condamné l'Etat à indemniser 11 personnes, faisant état d'éléments personnels et circonstanciés caractérisant un préjudice d'anxiété lié au risque de développer une pathologie grave. L'Etat s'est pourvu en cassation à l'encontre de cette décision pour permettre au Conseil d'Etat de se prononcer, et ainsi pour sécuriser la jurisprudence relative aux conditions d'indemnisation. Cette démarche juridique ne remet pas en cause la reconnaissance par l'Etat de sa part de responsabilité dans les préjudices liés aux conditions d'autorisation de mise sur le marché des insecticides à base de chlordécone. En effet, lors de l'examen au Sénat, le 12 juin dernier, de la proposition de loi du député Elie Califer, visant à reconnaître la responsabilité de l'État et à indemniser les victimes du chlordécone, le Gouvernement a confirmé qu'il reconnaissait pleinement la part de responsabilité de l'Etat dans les préjudices engendrés par cette pollution. Le ministre d'Etat, ministre des outre-mer, s'est montré explicitement favorable à ce que cette reconnaissance soit inscrite dans la loi. Si l'État n'est pas le seul responsable, il assume pleinement sa responsabilité propre. Sans attendre l'adoption définitive de cette proposition de loi, l'Etat poursuit le déploiement de la stratégie chlordécone (Plan Chlordecone IV 2022-2027) qui se traduit par une quarantaine de mesures concrètes, pour informer, protéger et réparer par l'action. L'objectif est de permettre aux populations antillaises de vivre sans risque chlordécone. Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé à ouvrir une nouvelle voie d'indemnisation pour les personnes souffrant d'une maladie résultant d'une exposition à la chlordécone en dehors de l'activité professionnelle. Une mission d'inspection interministérielle sera prochainement lancée pour faire formuler des recommandations sur les modalités de mise en œuvre et de gestion d'un tel dispositif, et sur l'articulation avec le fonds d'indemnisation des victimes des pesticides concernant les victimes professionnelles. Le 12 juin dernier, devant le Sénat, le ministre d'Etat, ministre des outre-mer, l'a indiqué clairement, à propos du pourvoi : "Je veux réaffirmer la responsabilité de l'État. Une décision du Conseil d'État doit permettre de consolider le dispositif d'indemnisation sur le plan juridique."

Données clés

Auteur : M. Marcellin Nadeau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Dates :
Question publiée le 20 mai 2025
Réponse publiée le 12 août 2025

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