Question écrite n° 6940 :
Fiabilité, transparence des tests génétiques en cas d'attaques suspectée de loup

17e Législature

Question de : M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Jean-Luc Warsmann alerte Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les difficultés rencontrées dans le suivi des attaques de loup à l'encontre des élevages ovins ardennais. Lors de l'assemblée générale de la Fédération des éleveurs de moutons ardennais qui a eu lieu mardi 20 mai 2025 à Marlemont (08), au cours de laquelle M. le député était représenté, plusieurs préoccupations ont été exprimées concernant le traitement des analyses génétiques réalisées à la suite d'attaques attribuées au loup. Les éleveurs dénoncent notamment les retours tardifs, partiels ou incomplets des résultats transmis par les laboratoires. Ces analyses, dont certaines sont financées par la fédération elle-même, n'intègrent parfois pas les marqueurs nécessaires pour identifier précisément l'origine de l'animal sur sa lignée alpine ou germano-alpine, par exemple. Par ailleurs, les résultats ne sont pas communiqués aux maires des communes concernées, alors même que ceux-ci sont en première ligne pour informer et accompagner les éleveurs et les citoyens. Il est également souligné l'intérêt de construire une base de données commune avec les pays frontaliers, afin d'améliorer la traçabilité des individus et la compréhension des dynamiques de déplacement. Les éleveurs regrettent aussi le manque de lisibilité sur les contacts à privilégier dans l'urgence et appellent à une meilleure diffusion de la fiche réflexe destinée aux communes. Surtout, ils dénoncent ce qu'ils perçoivent comme une volonté de dissimulation de la réalité de la situation quant à la présence du loup dans les Ardennes, alimentée par l'opacité et la lenteur des procédures actuelles. Il souhaite donc savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour garantir un traitement plus efficace, transparent et partagé des analyses génétiques effectuées à la suite d'attaques suspectées de loup et pour assurer une information claire, complète et rapide des éleveurs et des élus locaux dans le département des Ardennes.

Réponse publiée le 15 juillet 2025

La ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire est pleinement consciente de la détresse des éleveurs. Les attaques par le loup ont un impact conséquent sur leur activité, en termes économiques, mais aussi psychologiques et impliquent une adaptation subie de leurs pratiques agricoles. Dans ce contexte, si la population lupine semble se stabiliser selon les estimations élaborées en 2024 par l'office français de la biodiversité (OFB), établie à un effectif moyen de 1 013 individus, elle a toutefois connu, durant ces dernières années, une augmentation ainsi qu'une expansion géographique. En conséquence, un nombre élevé de dommages aux troupeaux ont été dénombrés, dont le bilan provisoire pour 2024 est chiffré à environ 12 000 animaux prédatés, en hausse sur le front de la colonisation. L'État accompagne les éleveurs, autant pour prévenir que pour indemniser, dans le cadre notamment du plan national d'actions (PNA) loup et activités d'élevage 2024-2029 qui vise à trouver le juste équilibre entre préservation de l'espèce et maintien de l'activité d'élevage. À cette fin, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire soutient financièrement les éleveurs pour la mise en place de mesures de protection des troupeaux. Cette politique repose sur un triptyque de moyens de protection : gardiennage, mise en place de parcs électrifiés et recours aux chiens de protection des troupeaux. Ainsi, l'aide à la protection des troupeaux contre la prédation a été maintenue et renforcée dans la nouvelle programmation de la politique agricole commune (PAC). Cette aide permet le financement du gardiennage par les bergers, l'achat de clôtures, l'achat et l'entretien de chiens de protection, ainsi que la réalisation d'études de vulnérabilité et un accompagnement technique. Cependant, des difficultés de protection de certains troupeaux subsistent, malgré les nombreux efforts des éleveurs à cet égard. C'est pourquoi l'un des objectifs du PNA loup et activités d'élevage 2024-2029 est également de permettre la délivrance d'autorisations de tirs dans les meilleurs délais dès lors que les conditions préalables en termes de protection des troupeaux sont réunies. Pour l'année 2025, suite à la dernière estimation établie par l'OFB sur la base d'une nouvelle méthode plus solide scientifiquement, le plafond de spécimens pouvant être détruits est fixé à 192. En outre, l'État a souhaité faciliter l'accès aux autorisations de tirs de défense afin d'apporter une réponse aux éleveurs bovins, équins et asins, victimes de prédation lupine et en l'absence d'un référentiel de protection validé. Un arrêté modifiant l'arrêté du 21 février 2024, fixant les conditions et limites dans lesquelles les dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup, a été signé conjointement par les ministres chargés de l'agriculture et de la transition écologique le 21 juin et publié le 22 juin 2025 au Journal officiel de la République. Cet arrêté a fait l'objet d'une consultation publique du 20 mai au 10 juin 2025. Cet arrêté qui s'inscrit dans le prolongement de l'arrêté du 7 février 2025, est pris en application du paragraphe IV de l'article 47 de la loi d'orientation n° 2025-268 du 24 mars 2025 pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture.  L'évolution organisée dans cet arrêté offre un cadre renforcé pour permettre aux éleveurs de défendre leurs troupeaux, notamment de bovins, qui représentent désormais près de 8 % de la totalité des attaques répertoriées sur des troupeaux domestiques.  Enfin, il est apparu nécessaire d'envisager l'évolution des textes internationaux (convention de Berne) et européens (directive Habitats) afin de tenir compte de l'état réel de conservation de l'espèce du loup. Le comité permanent de la convention de Berne a approuvé, le 22 mars 2025, la proposition d'abaissement du niveau de protection du loup, passant de « strictement protégé » à « protégé », portée par la Commission européenne sur demande des États membres. Dans cette continuité, les États membres ont également approuvé, le 16 avril 2025, la proposition de la Commission européenne de révision du statut de protection du loup dans le cadre de la directive Habitats. Enfin, le Parlement européen a voté en faveur de cette modification, le 8 mai 2025, et le Conseil a approuvé cette évolution à une très grande majorité le 5 juin 2025. Cela offrira plus de flexibilité à la France pour gérer les populations lupines. L'entrée en vigueur de ce déclassement interviendra probablement mi-juillet prochain, après la publication au Journal officiel de l'Union européenne (UE). Les travaux relatifs à la transposition de cette directive habitat sont actuellement conduites par la préfète coordinatrice en collaboration avec les professionnels concernés et le groupe national Loup.  Dans ce contexte, la France et l'UE continueront de soutenir la mise en place d'actions en faveur de la coexistence et de la prévention de la prédation. De plus, les aides destinées à indemniser les agriculteurs concernés par des attaques pourront être maintenues.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Warsmann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 27 mai 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025

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