Question de : M. François Ruffin
Somme (1re circonscription) - Écologiste et Social

M. François Ruffin interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'abandon en cours de l'agriculture biologique du pays. Un agriculteur bio lui a fait part de sa crainte, de son sentiment d'abandon : « Ma trésorerie s'est dégradée jusqu'au point où je n'ai plus aucune épargne. En 2023, j'ai fait - 50 000 euros et la même chose en 2024. J'avais un peu de marge de manœuvre sur la ferme et des économies de côté, je n'ai plus rien. J'hésite à arrêter ». Dans plusieurs de ses stratégies gouvernementales, comme le programme ambition bio ou le plan stratégique national de la PAC, l'État français s'est fixé comme objectif d'atteindre 18 % de surfaces agricoles en bio d'ici 2027 et 21 % d'ici 2030. Mais quel fossé entre le papier et la réalité ! Aujourd'hui, la surface agricole bio n'atteint que 10,4 % et elle a même diminué en 2023 par rapport à 2022. Les agriculteurs bio subissent depuis plusieurs années une crise historique. Les conversions sont à l'arrêt, les fermes décrochent, les usines de transformation bio tournent au ralenti. Le tout dans un contexte climatique instable et inflationniste. Et que fait l'État ? Rien, ou plutôt l'inverse de ce qu'il faudrait faire. Il a supprimé les aides au maintien en bio en 2017. Une fois installés, les agriculteurs bio ne perçoivent donc plus rien, ou trop peu, pour tenir dans la durée. Pourtant, faute de conversions suffisantes, près d'un milliard d'euros non utilisés risquent de repartir à Bruxelles. Ce reliquat financier devrait être réaffecté d'urgence pour aider les fermes bio. Il ne respecte toujours pas les objectifs de la loi Egalim, qui fixait comme obligation d'atteindre 20 % de bio dans les cantines scolaires à partir du 1er janvier 2022. Aujourd'hui, le plafond est aux alentours de 7 %... Et il y a quelques jours, le Gouvernement a annoncé supprimer deux tiers du budget de l'Agence bio, autrement dit, la mise à mort du « chef d'orchestre » en charge d'étudier, de promouvoir et de développer la filière bio. Alors, il lui demande : va-t-elle officiellement décider de laisser tomber l'agriculture bio du pays ? Va-t-elle laisser tomber ces fermes qui tentent de proposer un autre avenir à l'agriculture ? Il souhaite connaitre sa position sur le sujet.

Réponse publiée le 16 septembre 2025

Une baisse importante des conversions en agriculture biologique constatée ces dernières années a conduit à une sous-utilisation des enveloppes du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) consacrées aux aides à la conversion à l'agriculture biologique du plan stratégique national (PSN), générant ainsi un reliquat mobilisable du FEADER. Le redéploiement de ce reliquat du FEADER a conduit à ce qu'une partie significative de ces crédits revienne au secteur de l'agriculture biologique. Ainsi, l'enveloppe de la voie de l'écorégime spécifique à l'agriculture biologique est augmentée de 96 millions d'euros (M€) au total pour les campagnes 2026 et 2027, ce qui constitue un signal fort en vue de la consolidation et du maintien des exploitations bio existantes. Alors qu'en 2024, le montant du niveau bio de l'écorégime avait été fixé à 96,17 €/hectare (ha), cette revalorisation a pour objectif de pouvoir verser en 2026 et 2027, un montant de 110 €/ha et d'atteindre ainsi le montant cible qui avait été acté lors de l'élaboration du PSN. En outre, en réponse à une demande de la filière, il a été décidé la création d'un programme opérationnel « lait bio », doté de 5 M€ en 2026 et de 7 M€ en 2027. Ce nouveau programme favorisera l'accès à des outils de structuration de la filière et de pilotage des marchés du lait bio, et viendra ainsi consolider cette filière, qui a été particulièrement affectée par la crise à laquelle l'agriculture biologique est confrontée. Malgré l'arrêt de l'aide au maintien à l'agriculture biologique en métropole pour cette nouvelle programmation 2023-2027, plusieurs dispositifs mis en place depuis 2023 contribuent à maintenir le soutien aux pratiques et méthodes des agriculteurs convertis à l'agriculture biologique. Ainsi, la création d'un niveau spécifique relatif à la « certification Bio » de l'écorégime permet de rémunérer les exploitants concernés 30 € par hectare de plus par rapport au niveau supérieur de l'écorégime. Par ailleurs, le crédit d'impôt bio a été revalorisé à hauteur de 4 500 €/an à compter de 2023 et jusqu'en 2025. D'autres réaffectations au bénéfice de filières nécessitant un appui spécifique, ou pour appuyer des thèmes prioritaires (comme l'installation, typiquement, mais aussi l'investissement), ont également été effectuées, qui bénéficieront aux producteurs bio éligibles à ces mesures. Il convient en outre de souligner que plusieurs mesures ont été prises ces dernières campagnes afin de soutenir les exploitants en agriculture biologique. L'État a mobilisé en 2023 et en 2024 deux dispositifs successifs d'aide de crise spécifiquement destinés à soutenir la trésorerie des exploitations bio en difficulté, à hauteur de 104 M€ en 2023 et 105 M€ en 2024. Pour faire face à la crise de la demande, des moyens budgétaires exceptionnels ont également été mobilisés en matière de communication et de structuration des filières.

Données clés

Auteur : M. François Ruffin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 10 juin 2025
Réponse publiée le 16 septembre 2025

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