Question de : M. Christophe Bex
Haute-Garonne (7e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Christophe Bex attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la suspension du dispositif d'aides à la rénovation énergétique dit « MaPrimeRenov' ». Alors que près de deux millions de Français ont à ce jour bénéficié de ce dispositif et que le nombre de rénovations globales a été multiplié par trois au premier trimestre 2025, cette mesure suscite de vives réactions parmi les acteurs du logement, du bâtiment et de la transition énergétique. De nombreuses associations, réunies au sein du collectif Rénovons, alertent sur les effets délétères d'une telle suspension pour les ménages les plus modestes. Pour ces derniers, cette aide représentait un levier essentiel pour améliorer l'isolation de leur logement, réduire leur facture d'énergie et faire face à des extrêmes climatiques de plus en plus menaçants, dans un pays où l'on estime à 10 000 les décès annuels liés au froid et à 5 000 ceux causés par la chaleur. La suspension de ce dispositif aurait également des conséquences économiques majeures. Le président de la Fédération française du bâtiment, Olivier Salleron, a ainsi alerté sur les 100 000 artisans dont l'activité serait menacée à la suite de l'arrêt de cette prime. Le syndicat des artisans du bâtiment déplore une décision brutale et une absence de réelle planification, dans un contexte économique fragilisé où de nombreuses entreprises peinent à maintenir leur activité. Le dispositif MaPrimeRenov s'inscrit dans les objectifs de décarbonation que la France s'est fixés à l'horizon 2050. Il encourage l'adoption de systèmes de chauffage sobres et l'isolation des logements, éléments pourtant centraux de la transition écologique. Suspendre ce dispositif revient à briser la dynamique des ménages en matière de rénovation énergétique, dans un contexte de hausse des coûts de l'énergie et de crise écologique. Cette situation devrait, au contraire, conduire le Gouvernement à renforcer les politiques de sobriété énergétique. Enfin, les justifications économiques de cette suspension sont illusoires. Faire peser l'effort budgétaire imposé par le Gouvernement sur les épaules des plus vulnérables, des artisans et de l'environnement semble particulièrement injustifié et intolérable au regard des priorités sociales et environnementales actuelles. Face à ce constat, il interroge le Gouvernement sur ses intentions concernant la reprise de ce dispositif, dans un contexte où MaPrimeRénov' demeure un outil essentiel pour que le pays entame une réelle bifurcation écologique. Il souhaite également savoir si le Gouvernement entend mettre en œuvre une planification pluriannuelle, afin d'offrir davantage de visibilité aux professionnels du bâtiment, dont l'activité est fortement dépendante de la stabilité et de la lisibilité des dispositifs publics de soutien à la rénovation énergétique.

Réponse publiée le 15 juillet 2025

Le Gouvernement n'a pas varié dans le souhait de stabiliser le dispositif MaPrimeRénov'en 2025 et dans les années à venir. C'est pour cela que, pour 2025, les paramètres n'ont pas évolué par rapport à 2024, et que l'enveloppe budgétaire allouée par l'ANAH à MaPrimeRénov'de 3,6 Mds€ a permis de fixer des objectifs ambitieux de 350 000 rénovations, réparties entre 250 000 rénovations par geste et 100 000 rénovations d'ampleur (soit +10% par rapport à 2024). Cette stabilité a porté des fruits : à fin mai 2025, 122 712 ménages ont bénéficié de cette aide, avec une nette accélération des rénovations d'ampleur (44 162 logements concernés), multipliées par plus de trois par rapport à la même période en 2024, et le stock de dossiers déposés devrait garantir l'atteinte des objectifs 2025 de l'Anah de 100 000 rénovations d'ampleurs engagées dans l'année. Ce dynamisme témoigne de l'appropriation croissante du parcours accompagné, qui facilite les projets complexes grâce à un appui renforcé sur le plan technique et financier. Toutefois, stabilité ne signifie ni absence de maîtrise de la dépense publique, dans un contexte contraint, ni libre-cours aux nouveaux schémas de fraude. Or, 2 phénomènes sont apparus au cours du printemps, et ont appelé à une réponse la plus ciblée possible que le Gouvernement a dû mettre en place dès juin 2025. Le premier phénomène est celui de la fraude. Le Gouvernement dispose de chiffres précis à ce sujet : la fraude effective (fraude avérée + fraude potentielle) correspond à 3,5% des montants d'aides décaissées. Si l'on regarde l'ensemble des tentatives de fraudes (en incluant les fraudes évitées), ce taux monte à 9% du budget engagé. En 2025, de nouveaux schémas de fraude sont apparus via les accompagnateurs rénov'(MAR). Une centaine d'entre eux au niveau national a déposé en 2025 environ 16 000 dossiers présentant des signaux forts d'une diversité de fraude : usurpation d'identité du ménage ou de l'entreprise, audits manipulés, absence de neutralité. Cette fraude s'organise tout aussi diversement avec ou sans la complicité des ménages, avec ou sans travaux réellement effectués, avec ou sans la complicité des entreprises intervenantes. C'est l'activité de cette frange d'acteurs, marginale en nombre mais non négligeable en volumes et en flux de dossiers, qui nécessite la mise en place d'une instruction renforcée. Or, cette instruction nécessite une suspension du guichet pour analyser les dossiers avec les transferts de données permis désormais par la loi Cazenave, que le Conseil constitutionnel a validée.  Le deuxième phénomène est celui de l'afflux de dossiers dès janvier, provoquant un allongement des délais d'instruction de 70 à 105 jours, en partie aggravé par l'adoption tardive du budget 2025, mais surtout une consommation rapide de l'enveloppe financière disponible. La dynamique de dépôt des dossiers constatée en 2025 aurait mécaniquement conduit à un épuisement du budget en 9 mois au lieu de 12. Sans prendre aucune mesure, les dossiers déposés après épuisement du budget ne pourraient pas être instruits en 2025, allongeant le délai d'instruction de 3 à 5 mois supplémentaires ce qui n'est pas acceptable. Surtout, cet effet volume se couple avec une forte augmentation du coût des travaux (+7%) sur la rénovation d'ampleur, sans commune mesure avec l'inflation (autour de 2%). Cette augmentation a également un impact budgétaire et risque de conduire à financer moins de dossiers de rénovation si rien n'est fait. Sans renoncer à son souhait de stabiliser au maximum le dispositif, le Gouvernement a donc dû mettre en place une suspension la plus ciblée et la plus courte possible (23 juin - mi-septembre). Cette suspension ne porte que sur les dossiers de rénovation globale individuelle, sans modifier ni les monogestes, ni les rénovations des copropriétés (qui, en nombre de ménages concernés, représentent les 2/3 de l'aide accordée). Cette suspension a d'ailleurs été ajustée après l'écoute des acteurs le 17 juin 2025, en maintenant la possibilité pour les ménages de bénéficier d'une aide pour des gestes de travaux isolés ("monogestes").  Cette suspension ne remet pas en cause ni le budget 2025, sanctuarisé à hauteur de 3,6 Mds€ comme voté en loi de finances 2025, ni les paramètres de l'aide, à l'exception de ceux qui favorisent les phénomènes d'inflation observés, qui seront ajustés rapidement.  Le débat parlementaire à venir sur la loi de finances pour 2026, couplée aux consultations initiées dès la mi-juin par la ministre du Logement avec l'ensemble des acteurs, permettra de déterminer les conditions de distribution de MaPrimeRénov'en 2026. 

Données clés

Auteur : M. Christophe Bex

Type de question : Question écrite

Rubrique : Logement : aides et prêts

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Logement

Dates :
Question publiée le 17 juin 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025

partager