Agir pour faire respecter le droit international à Gaza et en Palestine occupée
Question de :
M. Édouard Bénard
Seine-Maritime (3e circonscription) - Gauche Démocrate et Républicaine
M. Édouard Bénard attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la position de la France concernant la reconnaissance de l'État de Palestine et la mise en œuvre de ses engagements internationaux dans le cadre du conflit qui ensanglante les territoires palestiniens occupés. En mai 2025, plusieurs États membres de l'Union européenne dont l'Espagne, l'Irlande et la Norvège ont reconnu l'État de Palestine, estimant que cette reconnaissance est une condition de la paix et du respect du droit international. L'Assemblée générale des Nations-Unies a adopté le 18 septembre 2024, à une écrasante majorité, une résolution exigeant la fin de l'occupation israélienne des territoires palestiniens annexés depuis 1967, le démantèlement des colonies implantées sur ces territoires et la restitution des biens saisis. L'Assemblée générale a déclaré à cette même occasion, qu'Israël doit être tenu responsable de toute violation du droit international dans le territoire palestinien occupé, y compris du droit international humanitaire et des droits de l'Homme et doit assumer les conséquences juridiques de tous ses actes internationalement illicites, notamment en réparant le préjudice, y compris les dommages, causés par ces actes. Devant l'accumulation documentée de violations du droit international, la Cour pénale internationale a émis le 21 novembre 2024, trois mandats d'arrêts internationaux, l'un délivré à l'encontre de Mohammed Diab Ibrahim al-Masri, commandant en chef de la branche armée du Hamas, (mort confirmée en janvier 2025) et deux autres mandats visant Benyamin Netanyahou, premier ministre d'Israël et son ancien ministre de la défense, Yoav Gallant. Le 27 novembre 2024, le gouvernement a indiqué que « la France respectera ses obligations internationales, étant entendu que le Statut de Rome exige une pleine coopération avec la Cour pénale internationale (CPI) et prévoit également qu'un État ne peut être tenu d'agir d'une manière incompatible avec ses obligations en vertu du droit international en ce qui concerne les immunités des États non parties à la CPI. De telles immunités s'appliquent au Premier ministre Netanyahou et aux autres ministres concernés et devront être prises en considération si la CPI devait nous demander leur arrestation et remise. » Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères ajoute dans son communiqué que « conformément à l'amitié historique qui lie la France à Israël, deux démocraties attachées à l'État de droit et au respect d'une justice professionnelle et indépendante, la France entend continuer à travailler en étroite collaboration avec le Premier ministre Netanyahou et les autres autorités israéliennes pour parvenir à la paix et à la sécurité pour tous au Moyen-Orient. » Or le Gouvernement français a fait part de moins de prévention en adoptant, à raison, une position beaucoup offensive à l'égard du président de la fédération de Russie, Vladimir Poutine, dont le pays n'est, comme Israël, pas signataire du traité instaurant la CPI. Ainsi, lorsque la CPI a délivré le 17 mars 2023 un mandat d'arrêt international contre Vladimir Poutine et Maria Lvova-Belova, commissaire russe pour les droits de l'enfant, le communiqué de presse du ministère de d'Europe et des affaires étrangères déclarait que : « Fidèle à son engagement de longue date pour lutter contre l'impunité, la France continuera d'apporter son appui à l'indispensable travail de la justice internationale pour assurer que les responsables de tous les crimes commis en Ukraine rendent des comptes. Elle apporte son plein soutien à la CPI, ainsi qu'aux juridictions ukrainiennes qui concourent à cet objectif. » De fait, les responsables politiques israéliens visés par la CPI bénéficient d'un traitement privilégié de la part du Gouvernement français comparativement aux dirigeants russes. Or le Gouvernement israélien se moque ouvertement du droit international en affamant et en ciblant aveuglément la population civile ballottée au gré des ordres d'évacuation dans la bande de Gaza. Plus de 55 000 personnes sont mortes à Gaza depuis le déclenchement des hostilités, 4 200 étaient des enfants de moins de 5 ans dont 880 nourrissons. À ce décompte mortuaire, il faut ajouter les 127 400 personnes qui ont été blessées du fait des agissements de l'armée israélienne. Plusieurs responsables politiques membre du gouvernement israélien affirment depuis plusieurs mois, qu'il faut raser l'intégralité des infrastructures de la bande de Gaza et expulser l'ensemble de la population palestinienne au mépris de toutes les conventions internationales. Un mépris du droit qui s'est encore affirmé, dans la nuit du 8 au 9 juin 2025, lorsque l'armée israélienne s'est livrée à un acte de piraterie d'État en arraisonnant et en capturant l'équipage du voilier humanitaire Madleen qui naviguait dans les eaux internationales. Malgré l'accumulation de preuves d'exactions du gouvernement israélien, le Gouvernement français n'a toujours pas pris de mesures de rétorsions sérieuses à son encontre, à l'inverse de celles adoptées à juste raison, contre la Fédération de Russie et ce, afin d'œuvrer à mettre un terme aux crimes commis par le gouvernement israélien. La suspension de l'accord d'association entre l'Union-Européenne et Israël constituerait un acte fort pour impacter l'économie israélienne qui, dans les faits, alimente l'effort militaire mené contre la population civile palestinienne. Dans le même sens, il convient d'instaurer un embargo sur les livraisons de matériels français susceptibles d'avoir un usage militaire offensif, à l'image des maillons de fusil-mitrailleurs produits par la société Eurolinks, dont les dockers du port de Marseille - Fos ont empêché le chargement à destination d'Israël. Si le Gouvernement français réfute les accusations de livraisons d'armes à Israël, portées contre lui par des ONG, celui-ci reconnaît néanmoins que des livraisons de composants à usage militaire ou potentiellement à usage militaire, sont toujours effectués. De même, il affirme qu'une partie du matériel expédié en direction d'Israël a vocation à être réexporté et non pas à être utilisé par son armée. Le gouvernement israélien est familier des violations de ses engagements internationaux. Rien ne permet d'assurer que les matériaux expédiés de France, ou ayant transité par les ports et aéroports français, ne sont pas utilisés par son armée contre les civils palestiniens, ou pour armer ses proxys régionaux, tels que le gang « des forces populaires » qui se livre à des assassinats ainsi qu'au pillage de l'aide humanitaire destinée à la population gazaouie. Il convient également d'aborder la question des soldats franco-israéliens, formellement identifiés, qui ont commis des crimes de guerre tels que le pillage et la destruction de biens civils sans intérêt militaire, des maltraitances et humiliations de détenus palestiniens, l'utilisation de civils palestiniens comme bouclier humain, le ciblage de journalistes ou de personnel médical... Alors que la situation humanitaire ne cesse de s'aggraver, la position de la France demeure timorée, si ce n'est même complice, du fait de la passivité du Gouvernement. Il est encore temps d'agir pour faire primer le respect du droit sur la force et la barbarie. La reconnaissance de l'État de Palestine par la France constituerait un premier pas dans la résolution de ce conflit. Aussi il lui demande quelles initiatives diplomatiques fortes entend prendre instamment le Gouvernement français pour faire respecter le droit international, dans les territoires palestiniens illégalement occupés et mettre un terme au supplice infligé à la population civile gazaouie.
Auteur : M. Édouard Bénard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date :
Question publiée le 24 juin 2025