Fermetures de classes et inégalités scolaires en milieu rural
Question de :
M. Vincent Trébuchet
Ardèche (2e circonscription) - Union des droites pour la République
M. Vincent Trébuchet attire l'attention de Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la prise de décision de fermer des classes dans les écoles rurales. En dépit de la promesse présidentielle faite en 2019 de ne fermer aucune école sans l'accord du maire, de nombreux élus locaux constatent encore que les fermetures de classes sont décidées de manière unilatérale par les directeurs académiques des services de l'éducation nationale (DASEN), sans véritable concertation avec les communes concernées. Or la fermeture d'une classe constitue bien souvent le premier pas vers la disparition progressive de l'école tout entière, entraînant un cercle vicieux de perte d'attractivité pour le territoire et de décrochage scolaire pour les élèves. Par ailleurs, les critères actuellement retenus pour la carte de l'éducation prioritaire favorisent quasi exclusivement les établissements urbains, sans prendre suffisamment en compte les difficultés propres aux écoles rurales, notamment leur isolement géographique et les effets de celui-ci sur la réussite scolaire et l'égalité des chances. Cette inégalité de traitement contribue à accroître le sentiment d'abandon des habitants des villages. Il lui demande aussi donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre, d'une part, pour renforcer juridiquement la place des élus locaux dans les décisions de fermeture de classes et mettre fin à l'arbitraire constaté sur le terrain et, d'autre part, pour réviser les critères d'attribution des moyens de l'éducation prioritaire en intégrant pleinement les spécificités et les besoins des territoires ruraux.
Réponse publiée le 16 décembre 2025
La situation de l'école en milieu rural suscite depuis toujours une attention particulière de la part du ministère de l'éducation nationale, attention qui s'est accentuée avec les évolutions démographiques et les nécessaires enjeux d'équité territoriale. Dans ce contexte, il importe de rappeler la distinction entre la fermeture d'une classe et celle d'une école. Depuis 2019 et la décision du Président de la République, aucune école rurale ne peut être fermée sans l'accord du maire de la commune concernée. L'évolution du nombre de classes, qui dépend directement de la démographie scolaire, relève quant à elle de la responsabilité de l'inspecteur d'académie-directeur académique des services de l'éducation nationale (IA-DASEN). Dans les territoires ruraux, marqués par une déprise démographique plus forte qu'ailleurs, l'éducation nationale ne peut que prendre acte de ces évolutions, tout en veillant à garantir la continuité du service public d'éducation. Néanmoins, les services de l'Éducation nationale, tant aux échelons centraux que déconcentrés, dépassent cette approche strictement quantitative et associent l'ensemble des acteurs aux décisions qui concernent l'école en milieu rural. À cette fin, les observatoires départementaux des dynamiques rurales (ODR) ont été créés à l'automne 2023 et sont actifs dans tous les départements concernés par des ruralités. Coprésidés par le préfet et l'IA-DASEN, ils constituent un espace de dialogue, d'écoute et de concertation avec les élus et les partenaires de l'école. Leur mission est de partager des constats objectivés sur l'évolution démographique, d'anticiper les besoins et de proposer des actions adaptées aux réalités locales. Par ailleurs, l'accompagnement pédagogique des territoires ruraux fait également l'objet de dispositifs dédiés. L'éducation prioritaire, dont le principal critère est celui de la difficulté sociale, n'est pas exclusivement destinée aux territoires urbains puisque 10 % des réseaux d'éducation prioritaire sont situés dans des territoires ruraux et isolés. Pour faire face aux difficultés structurelles des territoires ruraux, en particulier l'éloignement géographique, la dispersion de l'habitat et le moindre accès aux services publics, un dispositif spécifique a été instauré dès 2021, les territoires éducatifs ruraux (TER). Ils visent à fédérer les acteurs locaux, éducation nationale, collectivités, associations, opérateurs sociaux et de santé, afin de renforcer l'attractivité de l'école rurale et d'accompagner la réussite des élèves. Le pilotage de ces TER s'est récemment renforcé autour de trois priorités nationales : l'orientation et l'ambition des jeunes, la santé et le bien-être et la culture. Un nouvel appel à projets est en cours pour une quatrième vague de labellisation, avec l'objectif de porter à 300 le nombre de territoires éducatifs ruraux d'ici 2027, qui à ce jour est de 204 TER. À l'échelle nationale, 124 établissements sont situés à la fois en éducation prioritaire et en TER, signe de l'articulation et de la complémentarité de ces dispositifs d'égalité des chances. La dynamique TER concerne directement l'Ardèche, où trois territoires sont aujourd'hui labellisés et mobilisent les acteurs locaux autour de la réussite des jeunes. Ces démarches sont complétées par le développement des espaces services jeunesse (ESJ), expérimentés depuis 2021. Ces structures de proximité permettent aux jeunes ruraux d'accéder à de l'information, à un accompagnement personnalisé et à des services liés à l'orientation, à la citoyenneté et à l'insertion. Elles contribuent à renforcer la continuité éducative et sociale dans des bassins de vie isolés. L'ensemble de ces dispositifs illustre la volonté du ministère de traiter la question éducative en milieu rural dans toutes ses dimensions, scolaire, sociale, culturelle et sanitaire, en privilégiant la concertation avec les élus et les partenaires locaux. Ils permettent de lutter contre l'isolement, de renforcer la cohésion et d'assurer aux jeunes élèves scolarisés en territoires ruraux les mêmes opportunités d'émancipation et de réussite que dans les autres territoires.
Auteur : M. Vincent Trébuchet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale
Dates :
Question publiée le 9 septembre 2025
Réponse publiée le 16 décembre 2025