Prévention du suicide chez les agriculteurs
Question de :
M. Thomas Ménagé
Loiret (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Thomas Ménagé interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la question cruciale de la prévention du suicide chez les agriculteurs, un drame humain et social qui continue de frapper avec une ampleur préoccupante les campagnes. Selon les dernières données disponibles de la Mutualité sociale agricole (MSA) et de l'Institut national de veille sanitaire, le taux de suicide chez les exploitants agricoles et les travailleurs du secteur agricole demeure sensiblement supérieur à celui observé dans la population générale. Ce phénomène, récurrent depuis plusieurs décennies, traduit tout à la fois la fragilité économique d'une importante partie des exploitations, la solitude d'un métier aux exigences très prenantes, la pression administrative croissante, les difficultés d'accès aux soins psychologiques en milieu rural et, plus largement, la perte de repères qui frappe un univers professionnel autrefois porteur de fortes solidarités communautaires. Dans un contexte où la viticulture, l'élevage bovin, l'arboriculture ou encore le maraîchage ont connu des crises multiples, qu'il s'agisse des prix trop bas à la production, des aléas climatiques, des nouvelles contraintes environnementales et réglementaires, ou encore de la concurrence internationale exacerbée, de nombreux exploitants témoignent de l'épuisement de leur modèle économique et de leur détresse personnelle. Cette détresse fait trop souvent basculer certains vers des gestes irrémédiables, laissant derrière eux des familles brisées et des territoires entiers meurtris. Face à ce constat, les pouvoirs publics ont certes engagé, depuis plusieurs années, différentes initiatives : renforcement du rôle des cellules pluridisciplinaires « Agri'écoute » portées par la MSA, développement de numéros d'appels d'urgence, expérimentation de dispositifs locaux d'accompagnement psychologique, ou encore prise en charge financière ponctuelle de consultations psychiatriques. Pourtant, les retours de terrain mettent en évidence les limites de ces dispositifs, encore trop lourds, trop méconnus et insuffisamment financés pour répondre à l'ampleur du phénomène. Par ailleurs, l'articulation entre l'État, la MSA, les associations locales d'aide aux agriculteurs en difficulté et les réseaux de soins reste souvent lacunaire, ce qui entraîne une perte de temps précieuse dans la prise en charge des situations de crise. Il apparaît également que, malgré l'importance croissante du sujet dans le débat public, les campagnes de communication et de sensibilisation ne parviennent pas à briser le tabou entourant les idées suicidaires dans le monde agricole. Beaucoup d'exploitants continuent de craindre le regard de leurs pairs ou vivent leur détresse dans une solitude totale, sans oser recourir aux dispositifs existants. La culture du silence et de la dignité face aux difficultés économiques ou personnelles aggrave encore le risque. De plus, l'isolement géographique empêche parfois un accès rapide à un médecin, à un psychologue ou à une structure de prévention spécialisée. De nombreux acteurs du terrain, qu'il s'agisse des syndicats agricoles, des chambres d'agriculture, des associations d'entraide, des élus locaux ou des services de la MSA, réclament depuis longtemps un véritable plan d'ampleur nationale, doté d'un budget conséquent, afin de prioriser la prévention du suicide en agriculture à la hauteur de l'urgence sociale qu'elle constitue. Cela passe par le recrutement accru de psychologues dédiés au suivi du monde agricole, par l'instauration de permanences régulières au sein même des maisons des agriculteurs ou des préfectures, par la création d'un fonds national d'aide immédiate aux exploitants en détresse économique et par une meilleure formation de l'ensemble des acteurs publics et parapublics au repérage des signaux de souffrance psychologique. Dans d'autres pays européens comparables, des plans spécifiques ont déjà montré leur efficacité, en combinant aide économique d'urgence, accompagnement social, suivi médical spécialisé et campagnes ciblées de sensibilisation au sein des territoires ruraux. La France, pays à forte tradition agricole et attaché au bien-être de ses exploitants, ne saurait accuser un retard dans ce domaine où il en va de la vie et de la dignité de milliers de ses citoyens. Aussi, il souhaiterait savoir si le Gouvernement entend mettre en œuvre un plan national renforcé de prévention du suicide agricole, associant moyens financiers pérennes, soutien psychologique de proximité et simplification administrative réelle pour les agriculteurs les plus fragiles. Il lui demande de préciser quels nouveaux moyens elle entend engager pour renforcer la prévention, améliorer la détection des situations de détresse, coordonner les dispositifs existants et faire reculer durablement ce fléau silencieux qui sape depuis trop longtemps le tissu humain et social de la ruralité française.
Auteur : M. Thomas Ménagé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Date :
Question publiée le 30 septembre 2025