Question écrite n° 9886 :
Association d'entraide de la noblesse

17e Législature

Question de : M. Bastien Lachaud
Seine-Saint-Denis (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur sa question écrite n° 1295 de la 16e législature, portant sur l'Association d'entraide de la noblesse. En effet, le Gouvernement évite de répondre à la question qui est posée et se contente de rappeler l'état du droit. Or la question posée était tout autre et n'a pas perdu d'actualité, le dernier fichier en date du 25 novembre 2024 listant les associations reconnues d'utilité publique comprenant toujours l'Association d'entraide de la noblesse. Il est pourtant patent que cette association ne remplit aucune mission d'utilité publique et que tel n'a jamais été le cas depuis le décret du 29 juillet 1967. Pour rappel, M. le député avait déjà interrogé le Gouvernement par une question écrite n° 14943 de la 15e législature en date du 11 décembre 2018 et avait détaillé les raisons pour lesquelles en aucun cas cette association ne pourrait être considérée comme poursuivant des buts d'intérêt général. Le Gouvernement n'avait pas daigné y apporter une réponse à la date de la fin de la mandature, soit trois ans et demi plus tard. Selon le journaliste Charles de Laubier, auteur d'une enquête publiée en 2017 dans le journal l'Express, l'association « est en fait un club très fermé de l'ancienne aristocratie française dont la plupart des membres se considérant encore aujourd'hui « aristocrates », sont monarchistes, royalistes et antirépublicains ». La sociologue Monique Pinçon-Charlot, spécialiste des études sociologiques des classes privilégiées, explique à propos de l'un de ses membres sur France Inter : « Faire partie de cette association, c'est le nec plus ultra. Ce sont exclusivement des nobles qui se cooptent avec l'objectif de s'entraider. Il s'agit d'une classe sociale qui est mobilisée pour la défense de ses intérêts. Cela passe par cette sociabilité mondaine ». Il est difficile de croire que cette association corresponde réellement à une activité d'utilité publique : en effet, son principe même est excluant, elle trie ses potentiels membres selon de stricts critères de parrainage et de cooptation, qui relèvent davantage de l'Ancien régime et de la monarchie que de l'utilité publique républicaine. En effet, selon l'article 3 de ses statuts, définissant les conditions pour y adhérer : « Les candidats doivent être présentés par quatre membres dont au moins deux originaires de la même province qu'eux. Leur admission doit, sur avis favorable du conseil d'administration, qui n'est pas tenu de motiver ses décisions, être prononcée par l'assemblée générale aux bulletins secrets, à la majorité des voix. Tout candidat doit être de noblesse française, majeur ou émancipé et justifier sa filiation naturelle et légitime jusqu'à celui de ses auteurs en ligne directe et masculine pour lequel il produira un acte officiel récognitif de noblesse régulière française, acquise et transmissible. Les familles des pays annexés depuis 1789 produiront les preuves requises dans leur pays d'origine. Pour être admise dans l'association, la femme doit faire les preuves de son mari. L'adoption légale ne transmet la qualité aux bénéficiaires de titres, que conformément aux articles 35 et 36 du second décret du 1er mars 1808 ». L'ensemble de ces conditions sont parfaitement antirépublicaines : la noblesse a été abolie par la République, la distinction entre filiation naturelle et légitime a été abolie par l'ordonnance du 4 juillet 2005 et ratifiée par la loi du 16 janvier 2009. Les femmes sont subordonnées à leurs maris au mépris de toute égalité républicaine. Selon la même enquête, l'organisation revendique aujourd'hui 6 000 membres et aurait concerné seulement quelque 2 300 familles depuis sa création. Il est donc impensable que la puissance publique finance d'une façon, même indirecte, une telle association, aussi antirépublicaine dans ses principes et ses buts. Pourtant, en 2021 le Gouvernement a défendu une loi confortant le respect des principes de la République dite « séparatisme » pour pouvoir exiger des associations qu'elles signent un contrat d'engagement républicain. Il est difficile d'envisager qu'une telle association, au vu de ses activités antirépublicaines affichées, puisse s'inscrire dans ce cadre et a fortiori conserver un statut d'utilité publique. Ce deux poids deux mesures est proprement insupportable et ne saurait être toléré plus longtemps. Aussi, il souhaite savoir quand enfin il abrogera ou retirera le décret reconnaissant l'utilité publique de cette association afin de faire cesser le scandale que constitue son financement public de fait depuis 1967. Il lui demande également s'il compte se rapprocher de son homologue de Bercy concernant le redressement fiscal, afin que la collectivité récupère les fonds indûment perçus, qui manquent si cruellement au financement des services publics.

Données clés

Auteur : M. Bastien Lachaud

Type de question : Question écrite

Rubrique : Associations et fondations

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date :
Question publiée le 30 septembre 2025

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