Proposition de loi Duplomb
Question de :
Mme Manon Meunier
Haute-Vienne (3e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Question posée en séance, et publiée le 28 mai 2025
PROPOSITION DE LOI DUPLOMB
Mme la présidente . La parole est à Mme Manon Meunier.
Mme Manon Meunier . Madame la ministre de l'agriculture, savez-vous ce qu'est le courage ? C'est ce que vous n'avez pas eu hier en acceptant un 49.3 déguisé (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS) sur la loi Duplomb pour priver l'Assemblée nationale d'un débat sur un sujet aussi fondamental que la souveraineté alimentaire de la France.
M. Vincent Descoeur . Obstruction !
Mme Manon Meunier . Vous avez eu peur que nous révélions la véritable intention de votre texte. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Non, il ne concerne pas la majorité des agriculteurs : seuls 65 des 63 000 élevages bovins en France sont visés. Son seul effet sur l'élevage, c'est l'accélération de l'agrandissement des exploitations (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS),…
M. Jean-François Coulomme . Exactement !
Mme Manon Meunier . …toujours plus difficiles à transmettre – à l'image de ces 65 élevages – et bien souvent tenues par l'agro-industrie.
Vous allez me rétorquer que c'est pour assurer la souveraineté alimentaire de la France.
M. Pierre Cordier . Madame préfère le sucre brésilien !
Mme Manon Meunier . Or la souveraineté alimentaire, ce ne sont pas des élevages développés par des firmes qui exportent massivement pour leurs profits (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS), des élevages agro-industriels hyperconsommateurs de matières premières importées : engrais, matériaux, alimentation animale ou encore énergie.
La souveraineté alimentaire, c'est accepter de protéger celles et ceux qui nous nourrissent en France,…
M. Pierre Cordier . Justement !
Mme Manon Meunier . …et arrêter de considérer l'agriculture comme une variable d'ajustement sur les marchés mondiaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR.) C'est d'abord et avant tout le droit d'un peuple à décider de son système alimentaire pour lui-même et à refuser l'emploi d'un pesticide comme l'acétamipride, dangereux pour l'environnement et pour la santé – en premier lieu celle des agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)
Alors oui, j'espère que vous avez honte, madame. Honte d'avoir privilégié le scénario selon lequel l'avenir de notre agriculture serait décidé à huis clos par sept députés et sept sénateurs. Honte de céder aux pressions d'Arnaud Rousseau qui ne prie que pour ses propres intérêts financiers. (Mêmes mouvements.) La souveraineté alimentaire, quand on est à votre place, c'est avant tout cesser de gouverner pour les seuls intérêts de l'agrobusiness – encore faudrait-il avoir un peu de courage. (Les députés du groupe LFI-NFP et plusieurs députés du groupe EcoS se lèvent et applaudissent. – Les autres députés du groupe EcoS ainsi que M. Olivier Faure, applaudissent également.)
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire . La souveraineté alimentaire est fondamentale. C'est la liberté d'un peuple, son autonomie. Le jour où il n'y aura plus, dans notre assiette, que des produits importés, vous serez les premiers à pleurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs des groupes EPR et HOR.)
Puis-je vous rappeler quelques chiffres ? En 2000, en matière de volailles, nous étions souverains à 149 %. Aujourd'hui, seul un poulet sur deux consommé en France y est élevé. (« À cause de vous ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
La souveraineté alimentaire, c'est ne pas se satisfaire qu'un fruit ou un légume sur deux ne soient pas produits dans notre pays. C'est une arme géostratégique que des ennemis sont prêts à activer contre un peuple agressé, comme on le voit avec le conflit russo-ukrainien.
La souveraineté alimentaire,…
M. Arnaud Le Gall . Vous l'avez détruite !
Mme Annie Genevard, ministre . …c'est prévoir l'avenir, préserver et sauvegarder les assiettes de nos enfants.
Vous donnez des leçons mais ne connaissez pas la situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui. (Mme Nicole Le Peih applaudit. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
M. Pierre Cordier . Hors-sol, les Insoumis !
Mme Annie Genevard, ministre . Notre souveraineté alimentaire est gravement menacée.
Par ailleurs, vous expliquez que l'agroalimentaire, c'est de l'agrobusiness – vous n'avez que ce mot à la bouche. Or là où il y a transformation, il y a production. S'il n'y a pas de transformation, il n'y a pas de production. J'en veux pour preuve le blé dur : le fait que nous ne le transformions pas pose un problème.
Vous avez tort : l'agroalimentaire emploie 350 000 personnes dans notre pays, essentiellement dans les territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.) Cette industrie remarquable a fait énormément d'efforts pour économiser l'eau et l'énergie et pour contractualiser avec les producteurs.
Vous devriez défendre l'agroalimentaire parce qu'il sert la production agricole. Or vous ne le savez pas, vous ne voulez pas le voir.
M. Jean-François Coulomme . Manon Meunier sait de quoi elle parle !
Mme Annie Genevard, ministre . Vous vous contentez de mantras qui ne correspondent en rien à la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – MM. Romain Daubié et Philippe Vigier applaudissent aussi.)
Auteur : Mme Manon Meunier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 mai 2025