XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Deuxième séance du mardi 10 juin 2025

Sommaire détaillé
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Deuxième séance du mardi 10 juin 2025

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Hommage à deux sapeurs-pompiers et à une assistante d’éducation

    Mme la présidente

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    Mes chers collègues, notre nation est endeuillée à chaque fois qu’un serviteur de l’État perd la vie dans l’exercice de ses fonctions. Hier soir, deux sapeurs-pompiers de 22 et 23 ans sont décédés en portant secours à leurs concitoyens à Laon. Ce matin, une assistante d’éducation du collège Françoise Dolto, à Nogent, en Haute-Marne, a été mortellement poignardée par un élève de cet établissement.
    Face à ces drames effroyables, j’adresse les sincères condoléances de la représentation nationale aux familles et aux proches des victimes. Je veux, en notre nom à tous, dire la reconnaissance de la nation envers nos soldats du feu, qui risquent leur vie pour nous protéger. Je veux aussi dire notre soutien à l’ensemble de la communauté éducative. La violence n’a pas et n’aura jamais sa place dans nos établissements scolaires.
    En la mémoire de nos trois compatriotes décédés, je vous invite à observer une minute de silence. (Mmes et MM. les députés et les membres du gouvernement observent une minute de silence.)
    La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

    M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique

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    C’est une rencontre, ces deux drames, qui illustre, comme vous l’avez dit exactement, madame la présidente, le dévouement des uns, au mépris de tous les risques, et l’évolution de la société dans laquelle nous vivons, qui entraîne d’autres types de drames.
    Ces deux jeunes sapeurs-pompiers volontaires de 22 et 23 ans, engagés avec enthousiasme pour une œuvre de sauvegarde collective, avec la certitude qu’ils allaient à la fois aider leurs concitoyens et réaliser de cette manière une partie de leur vie, ont tous les deux été écrasés sous un immeuble qui s’est effondré : cela doit susciter chez nous une immense gratitude.
    Immense gratitude et mobilisation : c’est ce que nous devons aussi à cette jeune assistante d’éducation, cette jeune surveillante de 31 ans, mère d’un petit garçon de 4 ans. Les siens et ses proches sont tous anéantis par la rencontre dans un bourg, Nogent, en Haute-Marne, de 3 500 habitants, et dans un collège de 320 élèves, de ce que d’habitude on ne voit que sur les écrans de télévision.
    D’habitude, ces faits concernent des milieux sociaux profondément fragilisés ; or ce n’est pas le cas ici. Mais une chose est certaine dans ce second drame : c’est que les armes blanches, les couteaux, sont en train de devenir, parmi les jeunes, voire les très jeunes enfants –⁠ le garçon qui a pris la vie de cette surveillante avait 14 ans – une réalité de tous les jours. Nous en avons déjà parlé dans cet hémicycle et peut-être aurai-je l’occasion de rappeler dans une minute ce que nous avons fait et ce que nous devons faire à cet égard. Nous ne pouvons pas demeurer indifférents et les bras ballants face à ce qui est en train de se passer, devant cette vague qui progresse.
    Nous avons des décisions à prendre, certaines de nature législative, d’autres d’ordre réglementaire. Nous avons commencé à les prendre, puisque je rappelle que le drame de ce matin s’est déroulé alors que les gendarmes procédaient à un contrôle des sacs. Ces contrôles, nous les avons multipliés depuis trois mois : plus de 6 000 ont été effectués, qui ont permis de saisir près de 200 couteaux et 200 autres objets dangereux. Nous ne pouvons pas nous contenter de déplorer ce qui s’est passé ; nous sommes obligés, en conscience, de prendre de nouvelles décisions pour que nos enfants et ceux qui travaillent avec eux puissent être, au minimum, en sûreté. C’est une œuvre très difficile, parce que, comme tout le monde le voit bien, il ne s’agit pas d’un fait isolé, mais d’une dérive de la société et des enfants dont nous avons la charge, et que nous n’arrivons pas à mettre à l’abri des drames qu’ils fomentent eux-mêmes.
    Madame la présidente, nous avons une immense tâche devant nous. Peut-être aurons-nous l’occasion d’y revenir, mais je veux remercier la représentation nationale d’avoir une pensée pour ces deux garçons, pour cette jeune femme et pour le petit garçon qu’est son fils. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, SOC, DR, EcoS, Dem, HOR, LIOT, GDR et sur quelques bancs des groupes RN, LFI-NFP et UDR.)

    2. Questions au gouvernement

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle les questions au gouvernement.

    Surveillante poignardée par un élève

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marine Le Pen.

    Mme Marine Le Pen

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    Monsieur le premier ministre, les mots n’ont jamais suffi, les mots ne suffisent pas, les mots ne suffiront pas. Aujourd’hui, alors qu’elle remplissait sa mission au service des enfants de France, qu’elle était un de ces maillons qui permettent de garantir à nos enfants le droit à l’éducation, tel qu’il est décrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, à 31 ans, Mélanie est morte poignardée par un élève. Mes pensées vont à sa famille, en particulier à son très jeune enfant.
    Un nouveau drame vient donc de toucher l’école et, par conséquent, l’ensemble de notre nation. Un drame, pas un fait divers sur lequel on «  brainwasherait ». Un drame, qui appelle une réponse politique. C’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que notre société a vu la vie être progressivement désacralisée ; c’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que l’ultraviolence s’est banalisée, en particulier chez les mineurs ; c’est parce qu’il n’y a jamais eu de réponse politique que des enfants deviennent orphelins et que des parents sont obligés d’enterrer des enfants victimes de la barbarie.
    « Les différents ministres de la santé, de l’éducation nationale, de la justice, de l’intérieur […] n’ont pas pris la mesure depuis des années de la dérive d’une partie de la jeunesse, de son ensauvagement, de l’impact des réseaux sociaux et de la banalisation de la violence chez les adolescents entre eux et contre eux-mêmes. » Ces mots, tirés de la lettre publiée par la mère du jeune Elias il y a quelques jours, sonnent terriblement juste en ce 10 juin.
    Alors, monsieur le premier ministre, quelle va être la réponse politique du gouvernement à ce drame qui suscite la peur de toutes les familles, qui vivent dans l’angoisse de voir l’un des leurs tomber sous les coups des barbares, mais aussi –⁠ c’est à la fois juste et légitime – l’émotion, l’indignation, voire la colère du peuple de France ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre.

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Vous avez raison, madame la présidente Le Pen, de dire que les mots ne suffisent pas et ne suffiront pas. L’ampleur de la vague, nous la connaissons tous, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons. C’est une décomposition de la société dans laquelle nous vivons et c’est le surgissement de pratiques de vie communes. L’un de mes collègues disait à l’instant tout bas que son petit garçon de 10 ans lui a demandé quand il pourrait avoir un couteau à l’école. Cela concerne tous les milieux et d’abord, naturellement, les plus fragiles.
    On a deux choses essentielles à faire. La première, c’est de construire des règles et une réponse pénale susceptibles de dissuader ces jeunes, souvent des garçons, de saisir un couteau et de le mettre dans leur sac.

    Mme Sarah Legrain

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    Ça se saurait si ça marchait !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Je l’ai rappelé, nous avons publié le 27 mars une circulaire pour que des contrôles de police et de gendarmerie aient lieu à l’entrée des établissements scolaires. Depuis, il y a eu 6 200 contrôles, au cours desquels près de 200 couteaux ont été saisis et 567 conseils de discipline ont été réunis pour lutter contre ce fléau.
    Nous allons travailler à l’application effective de l’interdiction de port de ce type d’armes. Il va falloir durcir la réglementation, parce qu’un certain nombre de ces couteaux ne sont pas considérés comme des armes, même s’ils sont construits, pour une part d’entre eux, pour figurer des armes très violentes.
    La deuxième chose que nous devons faire, c’est travailler à la question de la santé mentale des plus jeunes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) À la première alerte, il faut qu’il puisse y avoir un examen, un diagnostic et une proposition de traitement, ou en tout cas une reprise de contrôle de ces jeunes. (Mme Elsa Faucillon s’exclame.)
    Ces deux missions, nous ne pouvons pas les éluder. Le 29 avril, j’ai demandé à Mme Naïma Moutchou et au préfet François Ravier de coprésider un groupe de travail, dont les conclusions m’ont été rendues le dernier jour du mois de mai. J’ai bien l’intention que les cinquante propositions de ce groupe de travail soient conduites à leur terme et je vais, si elle l’accepte, confier à votre collègue Naïma Moutchou la mission de vérifier leur application effective.
    Ce n’est pas une baguette magique ; nous n’avons pas la clé de toutes les questions qui se posent, car ces questions, pour l’essentiel, sont dans la société française, dans sa désorganisation, dans ses dérives. En revanche, ce que doit faire la loi, c’est assurer que les principes sont respectés autant que l’on puisse identifier des manquements à ces principes. J’ajoute que, même si les premières expériences n’ont pas été évidentes, nous devons travailler à l’installation de portiques (Murmures) à l’entrée des établissements scolaires ;…

    Mme Dieynaba Diop

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    Ça ne change rien !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    …ceux implantés dans plusieurs régions n’ont pas été maintenus partout, mais je suis persuadé que nous ne pouvons en rester à l’observation des accidents qui se multiplient. Le gouvernement a lui aussi l’intention d’aller dans le sens de cette expérimentation.

    MaPrimeRénov’

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Descoeur.

    M. Vincent Descoeur

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    Je voudrais en tout premier lieu exprimer la solidarité des élus de notre groupe, la Droite républicaine, qui s’associent à l’hommage que vous avez rendu, madame la présidente, à nos trois compatriotes décédés dans des circonstances tragiques.
    Ma question, à laquelle j’associe mon collègue Sébastien Martin, s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances. La décision du gouvernement de suspendre dès le 1er juillet le dispositif MaPrimeRénov’ a suscité incompréhension et colère des milliers de nos concitoyens engagés dans un projet de rénovation de leur logement, mais aussi des PME et des artisans du bâtiment, secteur déjà en souffrance, des collectivités locales impliquées dans l’animation du dispositif, de toute une filière dont l’activité sera une nouvelle fois affectée par l’instabilité des politiques publiques.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Celles de vos gouvernements !

    M. Vincent Descoeur

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    Cette décision soudaine, qui n’a fait l’objet d’aucune concertation, est en totale contradiction avec l’objectif affiché d’augmenter le nombre des rénovations thermiques pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Dois-je rappeler que cet outil, qui est l’un des rares dispositifs incitatifs, souffre de dysfonctionnements et est entaché par le débat récurrent et non sans fondement sur la fiabilité des DPE et que, de ce fait, il aurait certainement mérité une réflexion en profondeur – et peut-être décentralisée afin d’éviter les fraudes – mais en aucun cas une suspension brutale et non concertée. Comment les propriétaires, au premier rang desquels les plus modestes, vivant souvent en milieu rural, pourront-ils répondre à l’injonction qui leur est faite d’améliorer la performance de leur logement sous peine de ne plus pouvoir le louer ?
    Nous ne pouvons que souscrire à votre souci de lutter contre la fraude mais il est important que vous nous rassuriez et, surtout, que vous rassuriez les porteurs de projet et les acteurs de la filière, et que vous confirmiez que ce dispositif sera de nouveau fonctionnel et accessible dans les prochaines semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ Mme Danielle Brulebois applaudit aussi.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Bon courage !

    M. Thibault Bazin

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    Elle va sortir les rames !

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Vous l’avez rappelé, MaPrimeRénov’ est une politique essentielle qui concourt à ce que soient atteints les objectifs de la loi « climat ».Surtout elle connaît, vous l’avez rappelé une forte dynamique, au point d’en faire la principale aide à la rénovation thermique des logements : trois fois plus de dossiers ont été déposés cette année qu’en 2024 à pareille époque, en particulier s’agissant de rénovations d’ampleur. Depuis 2020, 2,5 millions de foyers ont bénéficié de MaPrimeRénov’ !
    Puisque vous vous adressiez à Eric Lombard, je l’associe à mes propos : il a rappelé que ce budget était sanctuarisé et que les 3,6 milliards d’euros de crédits seraient dépensés jusqu’au dernier centime. J’irai plus loin : nous allons même le compléter par plusieurs centaines de millions de certificats d’économie d’énergie. Cet effort sera poursuivi l’an prochain, si le projet de loi de finances pour 2026 est adopté.
    Les difficultés que vous rencontrez dans vos territoires tiennent à l’augmentation des délais de traitement, qui s’explique par l’afflux de dossiers que j’ai évoqué et par les deux mois de retard de l’adoption de la loi de finances pour 2025. Ces retards de paiement sont à peu près stables,…

    M. Thibault Bazin

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    Ce n’est pas une raison pour tout geler !

    Mme Valérie Létard, ministre

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    …à hauteur de quarante jours en moyenne, l’allongement des délais ayant toutefois pu atteindre 70 à 100 jours. L’accompagnement France Rénov’ en vue de rénovations d’ampleur a par ailleurs révélé une augmentation des fraudes, phénomène que la proposition de loi de Thomas Cazenave contre toutes les fraudes aux aides publiques permettra d’appréhender, dès le 1er juillet, grâce à un plan d’action que nous élaborons conjointement avec les services de Bercy.

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est incompréhensible !

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Plusieurs milliers de dossiers seront pris en compte dans ce… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice.)

    Interception du Madleen

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophia Chikirou.

    Mme Sophia Chikirou

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    Avant toute chose, j’exprime aux familles, proches, collègues des deux pompiers et de la surveillante qui ont perdu la vie les condoléances du groupe La France insoumise et notre solidarité pleine et entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)
    Monsieur le premier ministre, avez-vous vu les images magnifiques des mobilisations dans tout le pays en soutien aux douze membres d’équipage de la Flottille pour Gaza ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR. –⁠ Murmures sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.) Voyez-vous que partout dans le monde, sur tous les continents, les peuples se dressent pour dire stop au génocide ? Avez-vous lu les révélations du site Disclose et celles de onze associations, dont Attac et Progressive International, sur l’ampleur des livraisons d’armes de la France à Israël ? (Exclamations sur les bancs du groupe DR.) Depuis octobre 2023, la France a expédié plus de 15 milliards d’articles classés comme armes de guerre (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP) : bombes, grenades, missiles, pièces d’artillerie, en violation totale du traité international sur le commerce des armes ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Avez-vous vu les dockers de Fos-sur-Mer bloquer les containers d’armes destinés à l’armée israélienne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ MM. Peio Dufau et Hendrik Davi applaudissent également.) Voyez-vous comment chacun, là où il se trouve, tente d’agir pour sauver Gaza ? Je pense à ces professeurs du 20e arrondissement de Paris menacés de sanction après avoir chanté la fraternité avec le peuple gazaoui (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Laurent Jacobelli s’exclame) ; je pense à Jacqueline –⁠ grand-mère de Janna et Abderrahim, deux enfants tués à Beit Lahya –, qui a déposé plainte pour crime de guerre et complicité de ces crimes. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Sébastien Chenu

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    Et la journaliste que vous avez agressée ?

    Mme Sophia Chikirou

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    Et vous monsieur, qu’avez-vous fait, qu’avez-vous dit, qu’avez-vous dénoncé pendant tout ce temps pour que cessent enfin les massacres à Gaza ? (« Rien ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Monsieur le premier ministre, pourquoi avoir peur de Benyamin Netanyahou ? Pourquoi le laisser nous menacer, nous insulter, lorsqu’il traite mal Emmanuel Macron et à travers lui la France ? (Murmures sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.) Avez-vous au moins un peu honte de ne rien faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Avez-vous au moins un peu honte de voir notre diplomatie ainsi bafouée, ainsi humiliée ? (Murmures sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.) Aurez-vous le courage de vous dresser contre Benyamin Netanyahou pour exiger la libération… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. –⁠ Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent cette dernière. –⁠ Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger

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    Que fait la France, dites-vous ? La France est le premier pays à avoir, dès novembre 2023, organisé une levée de fonds –⁠ 1 milliard d’euros – pour l’aide humanitaire à Gaza. Si la France n’avait pas été là, aucun pays n’aurait suivi ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ « Quelle honte ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Chut, chers collègues !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    Ce qui est sûr, c’est que vous n’êtes jamais avares de buzz, de communication, comme l’ont encore démontré les événements de ces derniers jours. (Vives exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, s’il vous plaît !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    Que fait la France, demandez-vous ? Six ressortissants français étaient à bord du navire que vous avez cité. Le Quai d’Orsay a fait son travail, la France a fait son travail. (« Non ! » et vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Elle a averti ceux qui étaient sur ce navire des risques qu’ils couraient (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe DR), elle a maintenu en permanence le lien avec les autorités israéliennes, elle a fait son travail de présence consulaire. Cela a fait que, depuis hier, les six Français ont été en contact avec notre consul, (M. Jean-Paul Lecoq s’exclame) ce qui a fait que toutes les familles ont pu être contactées (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem) grâce au personnel du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, que vous dénigrez, que vous empêchez de travailler ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.) À la suite de vos pétitions, 45 000 mails ont complètement engorgé nos services de crise. Vous devriez avoir honte : pendant ce temps ces services ne peuvent travailler à la protection de nos ressortissants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR, dont quelques députés se lèvent, ainsi que sur les bancs des groupes DR, Dem et HOR et sur plusieurs bancs des groupes RN, LIOT et UDR.)
    La France n’a aucune leçon à recevoir de vous, qui ne faites que de la communication. L’aide humanitaire à Gaza doit être acheminée ; tout blocage est une honte, comme c’est une honte que vous manipuliez en permanence la souffrance des Gazaouis (Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR) dans vos seuls intérêts politiciens ! (Les députés des groupes EPR, Dem et HOR se lèvent et applaudissent. –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes RN et DR, dont plusieurs députés se lèvent, ainsi que sur les bancs du groupe LIOT, M. David Habib s’étant levé, et du groupe UDR.)

    Mme Elsa Faucillon

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    La honte ! Vous n’avez rien fait ! Vous ne reconnaissez même pas l’État de Palestine !

    Mme la présidente

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    Un peu de silence, chers collègues ! (Les exclamations se poursuivent sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Surveillante poignardée par un élève

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît ! La parole est à Mme Naïma Moutchou.

    Mme Naïma Moutchou

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    Monsieur le premier ministre, la société est sidérée de ce qui est en train de se passer. Les Français sont sous le choc et en colère quand quasiment chaque jour l’actualité leur jette à la figure un nouveau drame, une nouvelle violence. Chaque jour ou presque, des adolescents tuent à l’arme blanche, des enfants et leurs surveillants sont poignardés jusqu’à l’intérieur même des établissements scolaires. Ce matin c’est Mélanie, assistante d’éducation, qui a perdu la vie ; hier, c’étaient Elias, Laurène, Thomas, Sékou, Inès, Enzo, Matisse et tant d’autres encore, tous tués à l’arme blanche par des mineurs.
    Cette liste ce ne sont pas des faits divers, mais les signes d’un effondrement. Nous voyons l’autorité reculer partout et la violence gagner partout. Nous voyons une partie de la jeunesse qui sombre, qui bascule dans la brutalité la plus décomplexée. Nous voyons des adolescents qui sortent armés pour commettre le pire. C’est tout sauf une crise passagère, c’est un fléau, c’est l’ennemi public numéro un : voilà la conclusion de la mission que vous m’avez confiée à ce sujet, ainsi qu’au préfet François Ravier. Je vous ai remis le 28 mai notre rapport, qui n’est pas un simple document, qui doit être un électrochoc, une prise de conscience et, surtout, l’occasion d’agir.
    Il est temps –⁠ c’est ce que nous préconisons – d’interdire strictement la vente  et la détention de tout type d’arme blanche par les mineurs. Il est temps d’imposer le défèrement systématique des auteurs, de prévoir des sanctions pénales beaucoup plus rapides (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR et EPR) et d’instaurer des peines minimales, de sécuriser nos établissements scolaires, d’améliorer la chaîne de signalement. Il est temps d’investir dans la prévention, dans la santé mentale des jeunes et dans la médecine scolaire (Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC), de s’attaquer aux conséquences délétères des réseaux sociaux en interdisant le téléphone portable à l’école. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. –⁠ Mme Emilie Bonnivard applaudit également.) Les mesures sont prêtes, elles sont applicables. Nous ne pouvons plus nous contenter d’attendre ni nous contenter d’hommages et de minutes de silence, encore et encore. Ma question est simple, monsieur le premier ministre, mais elle est solennelle : quand déciderons-nous que cela suffit ? (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et LIOT ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

    M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique

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    D’abord, je veux vous remercier du travail que vous avez fait, avec le préfet Ravier, à la tête de cette commission qui, en à peine plus d’un mois, a réussi à construire un plan de réponse à cette vague qui paraît irrésistible, tant les armes que l’on dit blanches sont faciles d’accès –⁠ ne serait-ce que dans les cuisines familiales –, tant les adolescents qui se livrent à cette violence semblent pris d’une contagion de l’armement personnel dans les cartables des écoles.
    Ceci est insupportable et vous avez raison de défendre l’idée, que vous avez contribué à nourrir et que nous construisons, d’une réponse qui soit sans faiblesse, c’est-à-dire en interdisant le port de ces armes, en exigeant que lorsque ce port est constaté, il soit puni, et en bâtissant parallèlement une politique pour lutter contre la fragilité de ces adolescents et contre les accidents de santé mentale, qui sont si fréquents. Vous avez aussi raison de dire que nous ne résoudrons pas toutes les questions sans réfléchir à la manière dont notre société se vit, comment elle partage des valeurs, des principes, comment on essaie de les transmette aux plus jeunes, notamment aux élèves des collèges. « Quand allons-nous ? » demandiez-vous : la réponse est « maintenant ». Comme je l’ai indiqué, je vais vous demander d’accepter une mission que vous confiera le gouvernement, pour que vos préconisations soient matériellement et directement concrétisées. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et HOR. –⁠ Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. Thierry Tesson

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    Encore une mission pour enterrer le sujet ?

    Statut de la Polynésie française

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot.

    Mme Mereana Reid Arbelot

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    En 2013, une majorité d’États membres de l’ONU a choisi de réinscrire la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes, signifiant ainsi que la décolonisation n’y est pas achevée. Que ce soit du point de vue du droit international ou de ceux qui la réclament en Polynésie, la décolonisation n’est pas synonyme de rupture avec la France. Je rappelle que le préambule de 1946 de notre loi fondamentale dénonce la colonisation et prône l’émancipation des peuples dont notre pays a la charge.
    L’État refuse d’entamer la discussion avec les forces polynésiennes à la tête du pays. Ce refus d’ouvrir des discussions qui sont réclamées avec sérénité depuis douze ans renforce le sentiment que l’État ne s’intéresse aux demandes que lorsqu’elles s’expriment dans la crise. (Mme Sandrine Rousseau applaudit.) C’est particulièrement vrai pour les territoires dits d’outre-mer, dont les urgences remontent dans la pile des sujets qui retiennent l’attention de l’État en fonction de la gravité de la crise.
    Hier, à New York, le représentant de la France a réaffirmé le refus de la France d’aborder ce sujet devant la communauté internationale –⁠ soit ! Commençons alors à Paris et à Papeete. Monsieur le ministre, pourrions-nous rompre avec ce procédé malheureux et commencer à fixer les modalités et le calendrier des discussions ?
    Réunis pour le sommet sur les océans, les grands de ce monde s’accordent sur le rôle primordial que les pays océaniques ont à jouer pour sauver la planète. Les territoires français dits d’outre-mer représentent 97 % de la surface maritime de la France, faisant d’elle la fière deuxième puissance maritime mondiale. À présent, les pollueurs prétendent enseigner à des territoires et à des pays qui n’ont, eux, jamais mis la planète en péril les meilleures postures à adopter, alors que les pratiques ancestrales de ces derniers, autrefois moquées, sont à présent plébiscitées. N’est-il pas temps de tirer les leçons du passé et d’instaurer enfin respect, considération et humilité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer.

    M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer

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    Je rappelle à la représentation nationale que la Polynésie française est le territoire qui, au sein de la République, dispose de la plus grande autonomie et des compétences les plus étendues. La loi organique qui détermine ce statut d’autonomie attribue en effet la compétence de droit commun au pays polynésien, l’État ne conservant qu’une compétence d’attribution.
    La position de la France reste inchangée : elle conteste la réinscription en 2013 de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU, alors qu’elle l’a acceptée pour la Nouvelle-Calédonie, qui n’a pas la même histoire –⁠ je l’ai souvent rappelé ici.
    Le choix juridique qui vient d’être fait de déposer des recours contre l’État rend plus difficile la discussion portant sur la décolonisation. Vous avez cependant raison : le dialogue importe plus que toute autre chose.
    Hier, et encore ce matin, j’ai rencontré le président Brotherson au pavillon français à la conférence des Nations unies sur l’océan. Il a évidemment participé à la réunion des États du Pacifique qui a eu lieu ce matin. Je veux saluer ici la décision historique de création au fenua d’une aire marine protégée s’étendant sur plus de 1 million de kilomètres carrés.
    À bien des égards, la Polynésie montre la voie et inspire le respect, non seulement en France, mais aussi aux yeux du monde, je l’ai encore constaté ce matin.
    En juillet prochain, je me rendrai en Polynésie et nous y poursuivrons ce dialogue. Que ce soit en Polynésie ou plus généralement avec les territoires d’outre-mer, il doit continuer dans le respect et la considération, en innovant et en cherchant toujours le chemin le plus approprié.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot.

    Mme Mereana Reid Arbelot

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    Je ne vous parle ni d’autonomie, ni d’indépendance, mais de décolonisation ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.) Vous connaissez les erreurs commises par le passé dans le Pacifique et dans l’ensemble des anciennes colonies, océaniques comme continentales. Les enjeux environnementaux, économiques et géopolitiques sont immenses : changez de regard et changez de discours ! (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé. –⁠ Les députés des groupes GDR et LFI-NFP ainsi que quelques députés des groupes SOC et EcoS applaudissent cette dernière.)

    CCAS

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Martine Froger.

    Mme Martine Froger

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    Les centres communaux d’action sociale se mobilisent partout en France. Leur colère est légitime : alors que la précarité ne cesse de gagner du terrain chez nos concitoyens, que l’isolement progresse et que les besoins sociaux explosent, le gouvernement envisage de rendre facultative la création des CCAS dans les communes de plus de 1 500 habitants, aujourd’hui obligatoire.
    Sur le terrain, nous connaissons bien ces structures. Elles constituent un maillon essentiel de la solidarité locale, en permettant notamment la domiciliation des personnes sans abri, en assurant l’instruction des aides sociales, et en apportant un soutien aux familles en difficulté. Supprimer cette obligation sous couvert de simplification, sans aucune concertation, reviendrait à faire porter aux communes, déjà confrontées à une réduction constante de leurs moyens, la responsabilité d’un choix impossible : maintenir ou non un service public essentiel.
    En rendant facultatifs les CCAS, vous créez les conditions d’un renoncement progressif à la solidarité locale, au détriment des plus vulnérables. Vous faites le choix de fragiliser un réseau de proximité qui, depuis des décennies, a fait la preuve de son utilité et de son efficacité.
    Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, ce projet suscite une profonde inquiétude chez les élus locaux, les professionnels de l’action sociale et les associations de terrain. Il soulève une question de fond : comment le gouvernement peut-il prétendre renforcer la solidarité, tout en affaiblissant les structures qui la rendent concrète, visible et accessible au quotidien ?
    Ma question est donc simple : le gouvernement entend-il réellement persister dans cette direction, malgré les alertes du terrain ? Si tel est le cas, sur quelles évaluations objectives cette décision s’appuie-t-elle ? Surtout, quelles garanties concrètes pouvez-vous apporter pour que chaque habitant, quel que soit son lieu de vie, continue d’avoir accès à un accompagnement social digne et efficace ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Je vous remercie pour votre question car elle me permet de donner une réponse claire : il n’a jamais été question de supprimer les centres communaux d’action sociale. Il n’a pas plus été question de rendre leur création facultative dans les communes de plus de 1 500 habitants –⁠ elle l’est actuellement dans celles qui en comptent moins de 1 500.
    Dans le cadre du Roquelaure de la simplification, organisé en avril sous l’autorité du premier ministre, que je remercie, il avait été envisagé de donner aux élus locaux un maximum de liberté en matière de gestion, ce qui aurait renforcé la libre administration des collectivités locales, conformément à l’article 72 de la Constitution. L’objectif était simple : il s’agissait de consolider la démocratie locale en laissant les communes libres de leurs choix.
    Devant les craintes exprimées, le gouvernement annonce qu’il ne déposera aucun amendement à ce sujet dans le cadre de l’examen en cours des différentes propositions de loi de simplification. Cette liberté ne sera pas donnée aux collectivités : nous ne supprimerons pas les CCAS. (Applaudissements plusieurs bancs du groupe LIOT.)

    CCAS

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel

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    Madame la ministre des solidarités, votre collègue ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation vient de se livrer à un petit tour de passe-passe alors que depuis des semaines, voire des mois, le gouvernement est obsédé par la simplification à tout va.
    Dans chaque commune, dans chaque intercommunalité, les CCAS accompagnent nos aînés, les personnes isolées, les jeunes en rupture et les familles en difficultés –⁠ celles qui se demandent dès le 15 du mois comment nourrir leurs enfants jusqu’au 31. Madame la ministre des solidarités, monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, vous devriez le savoir : dans notre pays, la solidarité n’est pas optionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Stéphane Peu applaudit également.)
    Contrairement à ce que vous semblez penser, les centres communaux d’action sociale sont bien plus que des structures administratives. Ils incarnent le service public de proximité, l’engagement des élus locaux et des professionnels.
    Un Français sur cinq a déjà poussé la porte d’un CCAS et la pauvreté ne cesse d’augmenter dans notre pays : la mesure à laquelle vous venez de renoncer aurait entraîné une dégradation du service public.
    Je le redis à ce gouvernement : on ne vaincra pas la pauvreté en s’attaquant aux pauvres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
    Les CCAS pallient désormais les manquements de l’État en assurant des mesures d’hébergement d’urgence, compétence que vous n’assumez même plus ! À Lyon, Strasbourg, Rennes, Paris, Bordeaux, Alfortville et tant d’autres villes, ce sont nous qui mettons des familles à l’abri, qui hébergeons les mineurs isolés et les enfants qui dorment dans la rue. (Exclamations prolongées sur plusieurs bancs du groupe RN.)
    Et vous voulez supprimer les services de solidarité ? Quand arrêterez-vous de suivre cette logique de démantèlement, de casse des services publics ? Vous vous attaquez à tout, tout le temps : aux chômeurs, aux malades, aux retraités, aux collectivités locales. Vous supprimez les zones à faibles émissions, l’objectif zéro artificialisation nette, le dispositif MaPrimeRénov’, et maintenant les CCAS !

    M. Erwan Balanant

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    Ce sont vos amis qui ont supprimé les ZFE !

    Mme Sandrine Runel

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    Que restera-t-il de la solidarité après dix ans de macronisme ? À votre choc de simplification, nous préférons un choc de solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    M. Sébastien Chenu

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    Merci Stéphane Plaza !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Ne trouvez-vous pas votre question quelque peu excessive ? (Sourires sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. –⁠ «Non ! » sur plusieurs bancs du groupe SOC.) Nous ne vivons peut-être pas dans la même réalité. J’ai un avantage sur vous : j’ai été maire pendant vingt-cinq ans. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SOC. –⁠ « Avec quel bilan ? » sur plusieurs bancs du groupe RN.) J’ai donc été confronté aux difficultés qu’on rencontre quand l’on veut en assumer l’ensemble des compétences. (Exclamations sur les bancs des groupes RN. –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)
    Certains nous demandent de conforter l’action sociale en renforçant la compétence sociale des collectivités locales. Mais la compétence des communes est évidemment générale et le social en est le cœur ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Blandine Brocard applaudit également. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR.) Vous ne me ferez pas dire le contraire, pas plus qu’au gouvernement : le social est au cœur des compétences des communes, qu’elles assument grâce aux moyens dont elles disposent, parfois après un transfert de l’État. Je ne vous laisserai pas prétendre ici que nous abandonnons les pauvres en France ! Les pauvres sont en difficulté, et il appartient aux communes de les aider, avec le soutien de l’État. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Il n’y aura donc pas de suppression des CCAS, contrairement à ce que vous cherchez à faire croire. La clause de compétence sociale ne sera pas supprimée,…

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Chiche !

    M. François Rebsamen, ministre

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    …tout simplement parce que les communes, qui sont le nerf de la France, bénéficient de la clause de compétence générale, ce que vous semblez oublier. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Surveillante poignardée par un élève

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Marion.

    M. Christophe Marion

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    Un nouveau drame a eu lieu, comme un coup de plus porté à la République dont l’école est le berceau. Ce matin, à Nogent, une surveillante est morte, alors qu’elle accomplissait simplement sa mission, au service de la réussite de notre jeunesse.
    Au nom de mon groupe, je veux adresser à la famille et aux proches de la victime toute ma solidarité et mes pensées. Je veux dire toute notre fraternité aux personnels, aux professeurs, aux élèves endeuillés du collège et plus généralement à tous les personnels de l’éducation nationale, que je sais abasourdis. Je remercie enfin celles et ceux qui sont mobilisés depuis ce matin aux côtés de la communauté éducative du collège Françoise-Dolto, ainsi que la ministre Élisabeth Borne, qui s’est rendue sur place. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Notre groupe s’est mobilisé pour notre jeunesse. Depuis longtemps, nous alertons sur la diffusion et l’intensification de la violence chez nos jeunes. Avec Gabriel Attal, nous avons œuvré pour renforcer leur sécurité grâce à une proposition de loi visant à renforcer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents. La question des mineurs sera au cœur des réflexions engagées par le garde des sceaux à l’occasion de la réforme de la politique pénale qu’il souhaite mener et que nous accompagnerons.
    La ministre de l’éducation a également pris des mesures, en instaurant des contrôles aléatoires de sacs, mais nous constatons qu’ils ne permettent malheureusement pas d’éviter le pire.
    Monsieur le premier ministre, ma question est simple : au-delà de l’émotion qui nous étreint tous en cet instant, quelles décisions envisagez-vous de prendre pour éviter qu’un tel drame ne se reproduise ?
    Certes, il faut faire preuve d’une fermeté dissuasive car la banalisation de la violence ne peut être tolérée en République. Mais n’oublions pas que nos jeunes ont aussi besoin de pédopsychiatres, de médecins et d’infirmières scolaires –⁠ de personnes qui peuvent prévenir avant qu’il ne soit trop tard.

    M. Julien Odoul

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    Cela fait huit ans que vous êtes au pouvoir !

    M. Christophe Marion

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    Ce soir, vous procéderez à des annonces. Les Français ont besoin de mots et surtout d’actes clairs : il faut que vous agissiez. Nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Pompiers pyromanes !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

    Mme Caroline Parmentier

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    C’est son bilan !

    M. Gérald Darmanin, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice

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    Je me joins à l’émotion de M. le premier ministre : je pense à la famille de cette femme, ainsi qu’à tous les citoyens qui ont vu déferler cette violence alors que les gendarmes et l’éducation nationale procédaient au contrôle des sacs. Ces actes peuvent être commis par des individus très jeunes, inconnus des services de justice et de police. À 14 ans, certains sont manifestement capables de donner plusieurs coups de couteau dans le dos d’une surveillante.
    En l’absence de Mme la ministre de l’éducation nationale qui s’est rendue sur les lieux et en l’absence de M. le ministre de l’intérieur qui est retenu en raison du drame qui touche deux sapeurs-pompiers, je veux dire que dès mon arrivée place Vendôme j’ai pris une circulaire de politique pénale sous l’autorité de monsieur le premier ministre. Elle ne fait que deux pages et demi, mais elle insiste particulièrement sur les violences faites aux personnes, notamment dans les établissements scolaires.
    Dès la nomination de ce gouvernement, nous avons soutenu la proposition de loi du président Attal portant sur la justice des mineurs. Grâce à notre travail commun, dès sa promulgation qui interviendra après la décision du Conseil constitutionnel, cette loi permettra l’application de la comparution immédiate aux mineurs, fera de l’atténuation de peine pour les mineurs âgés de 16 ans et plus une exception, et inscrira la responsabilisation des parents dans le code de la justice pénale des mineurs dont elle était jusqu’à présent absente.
    Par ailleurs, à la demande du gouvernement, nous avons renforcé les outils de lutte contre le non-respect des mesures d’éducation judiciaire qui devront désormais être appliquées, sous peine de sanctions. Nous avons également instauré un couvre-feu généralisé dès la sortie de la classe, qui n’existait pas jusqu’alors, et prévu l’expérimentation du doublement des assesseurs dans les tribunaux pour donner plus de place à la société dans la prise de décision.
    Comme l’a dit M. le premier ministre, les propositions de Mme Moutchou seront suivies par la Chancellerie, qu’il s’agisse du déferrement systématique afin d’engager une action de la protection judiciaire de la jeunesse et de la police chargée des mineurs, de la modification du code de la justice pénale des mineurs comme nous l’avons évoqué au cours des débats, ou de la création d’une circonstance aggravante en cas de détention d’une arme blanche.

    Mme Caroline Parmentier

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    Vous avez tout raté !

    M. Gérald Darmanin, ministre d’État

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    Cela commencera dès aujourd’hui avec la loi Attal, et se poursuivra dès demain avec le prochain véhicule législatif que la Chancellerie soutiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Interception du Madleen

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Benjamin Lucas-Lundy.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Pourquoi M. Netanyahou, à la tête d’un des États les plus militarisés du monde, a-t-il peur d’un petit bateau rempli de farine, de lait pour nourrissons et de médicaments ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et GDR.)
    Pourquoi s’être comporté comme le chef d’un gang de voyous… (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    …en l’interceptant en pleine mer, violant les conventions internationales, foulant aux pieds le droit humanitaire et les valeurs fondamentales de toute civilisation ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)

    M. Kévin Pfeffer

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    Et le Hamas ?

    M. Laurent Jacobelli

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    Et le 7 octobre ?

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Rima Hassan, Greta Thunberg et leurs compagnons n’ont brandi aucune arme, si ce n’est celle de la morale. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Ils ont poussé un cri qui se propage à travers la planète : assez de femmes, d’hommes et d’enfants affamés, bombardés, asphyxiés ! Assez du massacre !

    M. Laurent Jacobelli

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    Et le 7 octobre, ça vous parle ?

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Face au génocide, aux quatre coins du globe, les consciences s’éveillent enfin. Les foules se lèvent. Le silence se brise jusqu’au cœur de la société israélienne.
    Dans quelques années, nos enfants, instruits par les récits et les images dont nous disposons déjà, nous demanderons ce que nous avons fait face à cela. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
    Notre génération sera jugée par la prochaine et par l’histoire sur ses actes. Alors aux actes, maintenant ! Allez-vous reconnaître l’État de Palestine et, avec lui, la dignité de tout un peuple ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)
    Allez-vous décider de sanctions dissuasives contre Israël, d’un embargo sur les armes, de la fin de toute forme de complicité par l’inaction ? La République française va-t-elle se hisser du côté de l’humanité, là où l’appellent ses valeurs ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    Nous pouvons partager un certain nombre de vos propos concernant l’insoutenable réalité de la situation à Gaza et l’incapacité honteuse et intolérable à y laisser passer l’aide humanitaire. En revanche, ne tombez pas dans le panneau de la communication, notamment concernant la flottille de Gaza. (Protestations sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Je l’ai dit tout à l’heure : la France a été très claire. Dès que nous avons eu connaissance de ce projet, nous avons prévenu les six ressortissants français présents sur ce navire. Nous avons été en lien constant avec les autorités israéliennes. Aussitôt l’arraisonnement du navire opéré…

    M. Manuel Bompard

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    C’est illégal !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    …, notre consul a fait son travail de présence consulaire auprès de l’ensemble des ressortissants.
    À ce stade, deux ont fait le choix d’un retour volontaire en France. Quatre l’ont refusé et devront donc comparaître devant la justice israélienne avant d’être expulsés. (« C’est faux ! » sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) C’est leur choix, et nous avions donné toutes les informations nécessaires à ce sujet. (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Je vous sais trop attentif à la souffrance des Gazaouis pour que nous nous appesantissions sur un énième coup de com’ opéré par certains. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Didier Le Gac

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    Bravo !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    La France est au rendez-vous. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je le répète. Dès le mois de novembre 2023, la France a organisé des levées de fonds pour pouvoir acheminer l’aide humanitaire à Gaza.
    Vous ne pouvez reprocher ni au président de la République ni au gouvernement français de ne pas chercher la paix et de ne pas œuvrer constamment pour la seule solution qui vaille : celle d’une solution à deux États. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Benjamin Lucas-Lundy.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Je parlais de la génération qui arrive. Je veux lui dire que j’ai honte de la façon dont vous organisez le débat public sur cette question tragique pour l’humanité. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
    Nous avons été capables, dans cet hémicycle, de nous lever unanimement et de faire silence pour les victimes des actes terroristes du 7 octobre.

    M. Kévin Pfeffer

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Nous avons été capables de réclamer unanimement la libération des otages.

    Mme Marie-Christine Dalloz et M. Antoine Vermorel-Marques

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    Non, pas unanimement…

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Pourtant, vous êtes incapable de la même unanimité pour dénoncer le génocide à Gaza ou pour reconnaître l’État de Palestine. (Exclamations sur les bancs du groupe DR. Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
    Vous ne répondez pas, vous fuyez vos responsabilités face à l’histoire et face au drame qui se joue là-bas. (Les députés des groupes EcoS et LFI-NFP ainsi que quelques députés des groupe SOC et GDR se lèvent et applaudissent.)
    Monsieur le ministre, monsieur le premier ministre, ressaisissez-vous !

    Bilan de la dissolution de l’Assemblée nationale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Alloncle.

    M. Charles Alloncle

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    Monsieur le premier ministre, permettez-moi avant tout de vous souhaiter un joyeux anniversaire. Un an déjà ! Un an de front républicain, un an d’alliance avec la France insoumise sans qui vous ne seriez pas avec nous aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Erwan Balanant

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    C’est le cirque…

    M. Charles Alloncle

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    Joyeux anniversaire aussi à Laurent Wauquiez, à Mathilde Panot, à Sandrine Rousseau.
    Surtout, n’oublions pas celui sans qui rien de tout cela n’aurait été possible : joyeux anniversaire à Gabriel Attal, castor le plus besogneux du barrage républicain, grand sauveur de notre démocratie –⁠ du moins celle qui s’arrête à la porte des bureaux de vote. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Erwan Balanant

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    C’est un one man show !

    M. Laurent Croizier

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    Respectez l’Assemblée !

    M. Charles Alloncle

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    Un an après, vous l’entendez, les Français vous disent merci. Merci d’abord pour cette assemblée plus représentative. Nos débats bénéficient d’un regard expert et inclusif. Sur ces bancs, on parle de narcotrafic avec des dealers,…

    Mme Mathilde Panot

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    Oh là là, il n’a rien à dire !

    M. Charles Alloncle

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    …on discute de justice avec des consommateurs, on débat même de sécurité avec des fichés S. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Merci aussi pour vos réformes majeures : taille des bouteilles d’eau, pannes d’ascenseur, grossophobie, chemsex… Tous ces fléaux qui font exploser les chiffres de l’insécurité !
    Pendant que vous œuvrez pour l’histoire, le réel, quant à lui, frappe malheureusement à la porte.

    M. Erwan Balanant

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    Ça n’a pas l’air de vous frapper, vous !

    M. Charles Alloncle

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    Cette porte, c’est celle du collège Françoise Dolto qu’une surveillante, poignardée à mort ce matin par un élève de quatorze ans, ne franchira plus.

    M. Erwan Balanant

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    Quelle indécence !

    M. Charles Alloncle

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    Merci donc à votre barrage de nous avoir évité le pire : l’union des droites, de l’ordre à l’école, des peines exécutées, des professeurs en sécurité… (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Alors, monsieur le premier ministre, maintenant que la bougie est soufflée, comptez-vous allumer autre chose que des écrans de fumée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

    M. Hervé de Lépinau

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    Merci les castors !

    M. Patrick Mignola, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

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    Lorsqu’on est un élu de la République, on se doit d’abord de défendre la démocratie.

    M. Julien Odoul

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    Tu as été élu où, toi ?

    M. Patrick Mignola, ministre délégué

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    Défendre la démocratie, ça ne passe pas par l’autodénigrement du Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Protestations sur les bancs du groupe RN.)
    Il y a un an, le président de la République a décidé de redonner la parole aux Français. Ils avaient alors le choix : opter pour une nouvelle majorité évidente et écrasante, ou au contraire faire de l’Assemblée nationale le miroir de leur propre diversité. Ils ont choisi cette deuxième option. Leur parole doit être respectée.
    Je veux rendre hommage aux parlementaires que vous êtes pour le travail qui a été effectué depuis, dans un esprit de compromis, pour avancer.

    M. Charles Alloncle

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    On n’a rien fait !

    M. Patrick Mignola, ministre délégué

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    Après avoir doté la France d’un bloc de textes financiers et budgétaires, vous avez voté des textes agricoles, des textes régaliens sur le narcotrafic et sur la justice des mineurs,…

    M. Sébastien Chenu

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    Vous êtes des incapables !

    M. Patrick Mignola, ministre délégué

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    …des textes portant sur des sujets sociétaux sensibles, pour lesquels tout le monde a salué l’attitude de l’Assemblée nationale, et des textes économiques et sociaux.
    À la fin de cette semaine, nous terminerons l’examen du projet de loi de simplification de la vie économique. Au mois de juin, nous parlerons de l’énergie, nous examinerons deux textes sur Mayotte sous l’autorité du ministre d’État et du premier ministre. Ces textes témoignent de l’action du gouvernement.
    Le Parlement n’a jamais été aussi puissant… (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe RN.)
    …pour peu pour peu qu’il travaille dans un esprit de compromis.
    Au moment où nous réfléchissons à l’évolution de nos modes de scrutin, cela devrait nous inspirer.

    M. Laurent Jacobelli

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    Langue de bois !

    MaPrimeRénov’

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Monsieur le ministre de l’économie, un petit point météo pour débuter, si vous le voulez bien.

    M. Erwan Balanant

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    Après le comedy club de droite, le comedy club de gauche…

    M. François Piquemal

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    Soleil et chaleur pour tout le monde,…

    M. Hervé de Lépinau

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    Viens dans le Sud, tu vas voir !

    M. François Piquemal

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    …petit risque orageux toutefois en fin de matinée ; 31 degrés en moyenne, avec des pics attendus à 21 degrés le matin à Nice et 38 degrés l’après-midi à Agen. Ce sont des températures anormalement élevées pour un mois de juin, vous en conviendrez, qui seront de plus en plus courantes avec le dérèglement climatique. Madame la présidente, j’espère que contrairement à plus de la moitié des Français, vous ne vivez pas dans un logement qui vous expose à la chaleur –⁠ ce qu’on appelle une bouilloire thermique.
    Si c’est le cas et que vous ne savez pas comment faire, faites comme les Français : ne comptez que sur vous-même et pas sur le gouvernement, qui vient de décider de suspendre MaPrimeRénov’. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Après avoir réduit son budget, il suspend maintenant le dispositif, invoquant notamment –⁠ je cite – l’afflux des demandes. En Macronie, c’est apparemment une idée étrange que de vouloir maintenir un système qui fonctionne… (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Aussi, les organisations écologistes vous suggèrent une proposition audacieuse –⁠ je ne sais pas si vous êtes prêt à l’entendre. Plutôt que de suspendre ce dispositif, une solution serait d’employer et de former des agents pour instruire les dossiers de rénovation et pour lutter contre les éventuelles fraudes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    En attendant, madame la présidente, si vous avez des proches âgés, des enfants, ou des personnes ayant des problèmes de santé dans votre entourage, mettez-les à l’abri et protégez-les du mieux que vous pouvez, ou demandez à M. Bayrou s’il compte relancer la production d’éventails.
    Si, comme Alex, patron d’une PME dans le secteur du bâtiment à Toulouse, vous voyez la moitié de vos chantiers annulés, faites comme tout le monde : licenciez et débrouillez-vous. À moins que le ministre ne retrouve la raison et que le dispositif MaPrimeRénov’ ne soit non pas suspendu, mais amélioré pour devenir plus attractif et efficace. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. –⁠ Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et GDR. )

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Je vais essayer de compléter les propos tenus tout à l’heure. Une chose est certaine : le gouvernement n’a certainement pas l’intention, comme je l’ai entendu, de supprimer MaPrimRénov’. Au contraire, il compte prendre le sujet à bras-le-corps pour être au rendez-vous des ambitions et pour poursuivre l’accompagnement des ménages.
    Le gouvernement souhaite adapter le dispositif afin de régler trois sujets apparus cette année : premièrement, l’accélération significative des demandes, marquée par un triplement des dossiers de rénovation globale ; deuxièmement, le retard de deux mois accusé au démarrage suite à un vote tardif du budget ; troisièmement, les dispositions de la proposition de loi Cazenave qui nous permettront de travailler sur un nouveau type de fraudes qui sont de plus en plus fréquentes –⁠ vous le savez si vous êtes en lien avec le terrain.
    Tous les dossiers déposés d’ici le 1er juillet seront instruits et payés s’ils sont conformes et ne sont suspects d’aucune fraude.
    Ensuite, dès le 17 juin, nous réunirons tous les acteurs du secteur pour travailler sur les modalités de cette suspension temporaire.

    M. Thibault Bazin

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    Pourquoi ne pas l’avoir fait avant ?

    Mme Valérie Létard, ministre

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    Elle prendra fin mi-septembre. Son objectif, vous l’avez compris, est de réduire les délais d’instruction au bénéfice de nos concitoyens et des entreprises, et de lutter fermement contre les fraudes. Des sanctions très fortes seront appliquées.
    Nous avons également pour objectif de maintenir le financement du dispositif à hauteur de 3,6 milliards d’euros pour la fin d’année, de le conforter par des certificats d’économie d’énergie, de maîtriser les fraudes et d’adopter un calendrier beaucoup plus régulier.

    Traversées clandestines de la Manche

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Golliot.

    M. Antoine Golliot

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    Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur. Depuis le début de l’année, jamais autant de migrants n’ont traversé la Manche à bord de small boats. Les autorités anglaises ont récemment enregistré un pic record, avec près de 1 200 migrants arrivés en une seule journée.
    Fin mai, un naufrage a eu lieu près de Boulogne-sur-Mer dans ma circonscription. À Veulettes-sur-Mer, en Normandie, un groupe de migrants a été intercepté deux fois en moins de vingt-quatre heures. À proximité de Dunkerque, on a également enregistré un naufrage.
    La litanie de ces faits peut être encore longue, malheureusement. Du Dunkerquois jusqu’aux plages normandes, en passant par le Calaisis et le Boulonnais, notre littoral est pris en otage par les flux de migrants et les passeurs. Nos côtes sont transformées en rampe de lancement de l’immigration illégale vers l’Angleterre.
    Malgré les millions d’euros versés par le Royaume-Uni et les moyens humains mobilisés par l’État, les réseaux de passeurs agissent toujours en toute impunité, et les départs se poursuivent, presque chaque nuit, sous les yeux des habitants de ma circonscription.
    Dans nos communes littorales, la situation est devenue ingérable : tensions avec les habitants, insécurité, épuisement des forces de l’ordre, transports en commun surchargés, nuisances pour les pêcheurs et le tourisme local.
    Permettez-moi d’avoir une pensée pour nos gendarmes et policiers régulièrement agressés, ainsi que pour toutes les vies perdues dans les traversées.
    Nous ne pouvons continuer de nous contenter de constater l’échec de l’État en matière de contrôle de l’immigration. Le Rassemblement national rappelle depuis des années la nécessité de rétablir la maîtrise de nos frontières nationales.
    Qu’allez-vous entreprendre pour protéger les habitants de l’immigration massive, pour démanteler les filières et pour mettre fin à ces traversées illégales qui défient chaque jour notre autorité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Je commencerai par rappeler que le renforcement continu du dispositif de protection des infrastructures ferroviaires et portuaires du Calaisis a été efficace ; il est malheureusement contrebalancé par les small boats et les taxi boats, devenus le principal moyen de franchissement de la Manche.
    L’attractivité du Royaume-Uni sur ces populations ne change pas ; elle est constante depuis de nombreuses années, malgré les efforts budgétaires des Britanniques que vous avez rappelés et qui s’élèvent à 540 millions d’euros.
    Depuis la fin du mois d’avril dernier, une compagnie de police nationale est déployée pour trois mois et un escadron de gendarmerie mobile est dédié à ces actions. Au total, plus de 1 200 membres des forces de l’ordre sont déployés sur le littoral de la Manche et de la mer du Nord.
    Les résultats de 2024 et de 2025 se situent à un niveau assez élevé : en 2024, le taux d’interception était de 58 % et 694 traversées ont réussi –⁠ ce dernier chiffre est de 244 pour l’année 2025.
    Nous restons mobilisés. Il est essentiel de suivre une stratégie commune avec les Britanniques. Nous sommes en train de la renégocier pour 2026. Tous les renforts annoncés au mois de novembre dernier par le ministère de l’intérieur –⁠ soixante-quinze agents supplémentaires de la direction nationale de la police aux frontières, renforcement de dix et quinze effectifs des commissariats de Calais et de Dunkerque, quatorze enquêteurs supplémentaires – ont été mis à disposition.
    La première cellule zonale d’échange de renseignements sur le trafic de migrants est installée depuis le 27 mai dernier. Elle permettra évidemment de mobiliser les services de renseignement pour mieux entraver les réseaux de passeurs, qui restent le problème majeur : ce sont eux qui aident et accompagnent ces migrants qui ne veulent pas rester en France, qui leur permettent de se rendre en Grande-Bretagne et de stationner notamment à Calais mais aussi sur l’ensemble de votre territoire.
    La lutte conjointe en amont contre l’immigration irrégulière transmanche s’intensifie donc. Il conviendra également…

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur le ministre.

    M. François-Noël Buffet, ministre

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    Pour répondre à votre question sur la protection de nos frontières,…

    Mme la présidente

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    Merci !

    M. François-Noël Buffet, ministre

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    …je rappelle également que la France… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. –⁠ Les députés du groupe DR applaudissent ce dernier.)

    Mme la présidente

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    Votre temps de parole est écoulé depuis onze secondes !

    Augmentation des taux de TVA

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun.

    M. Philippe Brun

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    Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ma question est claire et elle appelle une réponse claire : entendez-vous augmenter les taux de TVA ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

    M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

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    Vous me permettrez d’utiliser une partie de mes deux minutes de temps de parole pour expliquer quel est le sujet principal.

    M. Emmanuel Maurel

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    Ça commence mal !

    M. Éric Lombard, ministre

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    Le Premier ministre le dit depuis longtemps : nous avons 3 300 milliards d’euros de dette et, dans quelques années, nous verserons à nos créanciers 100 milliards d’euros d’intérêt. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Nous rencontrons aussi un problème de compétitivité.
    Nous avons donc décidé de maintenir les prélèvements fiscaux et sociaux au niveau où ils sont.
    Le reste appartient largement à la représentation nationale et aux partenaires sociaux. Je crois que vous faites allusion –⁠ peut-être, si j’ai bien compris – à la proposition du président de la République de réfléchir au financement de la protection sociale. Cette question ne s’adresse pas au gouvernement mais aux partenaires sociaux.

    M. Emmanuel Maurel

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    Le gouvernement a peut-être un avis ?

    M. Éric Lombard, ministre

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    Il leur appartiendra –⁠ si ma collègue Catherine Vautrin les saisit, puisque ces questions relèvent de son autorité, ou s’ils se saisissent eux-mêmes – de réfléchir à la meilleure façon de financer notre protection sociale.

    M. Alexis Corbière

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    Mais quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Éric Lombard, ministre

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    En effet, la sécurité sociale repose presque exclusivement sur le travail, que les contributions viennent des salariés ou des entreprises. Je rappelle d’ailleurs qu’une part importante de la sécurité sociale est financée par la TVA –⁠ petit rappel en passant.

    M. Jérôme Guedj

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    Les cotisations, c’est 58 % des ressources de la sécurité sociale !

    M. Éric Lombard, ministre

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    Une réflexion peut s’ouvrir sur un réaménagement à l’intérieur de ces équilibres.

    M. Emmanuel Maurel

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    C’est de moins en moins clair !

    M. Hervé de Lépinau

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    Il reste trente-six secondes…

    M. Éric Lombard, ministre

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    Mais, comme l’a dit le Premier ministre à de nombreuses reprises, nous allons écouter les propositions des uns et des autres jusqu’à la mi-juillet.

    M. Stéphane Peu

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    La TVA, c’est oui ou c’est non ?

    M. Thibault Bazin

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    Le résultat sera-t-il annoncé au congrès du parti socialiste ?

    M. Éric Lombard, ministre

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    Ce n’est qu’à ce moment-là que le gouvernement prendra des décisions et que le Premier ministre rendra ses arbitrages.

    M. Laurent Jacobelli

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    Je crois qu’il ne répondra pas !

    M. Alexis Corbière

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    On n’a rien compris !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun.

    M. Philippe Brun

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    Je tiens à dire ici solennellement, au nom des députés socialistes, que nous nous opposerons de toutes nos forces à l’augmentation de la TVA que vous préparez. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SOC ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)
    Nous nous y opposerons pour plusieurs raisons : cette TVA sociale frapperait d’abord les plus pauvres, car c’est un impôt sur les bas salaires, sur les petits retraités, sur les inactifs et sur tous ceux qui sont frappés par la hausse des prix –⁠ les prix alimentaires ont augmenté de 25 % depuis trois ans, et vous voulez encore les augmenter !
    Cette mesure injuste est aussi économiquement inefficace.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est vrai que les socialistes sont durs entre eux !

    M. Philippe Brun

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    Une étude récente de l’OFCE montre qu’elle détruirait 16 000 emplois et toucherait très nettement la consommation des Français, à un moment où l’OCDE révise ses prévisions de croissance de la France à 0,6 %, alors que votre premier budget –⁠ que nous n’avons pas voté – tablait sur 1,1 %.
    La TVA sociale, c’est une TVA antisociale. Et nous, les socialistes, l’avons annulée en 2012 lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, quand le gouvernement de Nicolas Sarkozy l’avait instaurée.

    M. Nicolas Forissier

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    Et vous l’avez regretté !

    M. Philippe Brun

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    D’aucune manière les socialistes n’accepteront, pendant la préparation de ce budget, que les classes populaires, que les classes moyennes, que ceux qui n’ont que leur travail pour vivre soient mis à contribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
    Au contraire, les baisses d’impôts –⁠ plus de 60 milliards d’euros par an – que vous avez instaurées depuis 2017 doivent être revues. Dans notre pays, ce sont toujours les mêmes qui payent. Aujourd’hui, nous disons plus que jamais que face aux grandes difficultés financières que rencontre notre pays, les plus aisés doivent être mis à contribution. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

    M. Éric Lombard, ministre

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    Mon rebond sera aussi rapide que votre question initiale : nous avons fait le choix, avec le Premier ministre et avec la ministre du travail, de faire confiance aux partenaires sociaux sur la réforme des retraites, et nous allons continuer ! (Exclamations sur les bancs des groupes SOC et GDR. –⁠ M. Jérôme Guedj s’esclaffe et applaudit ironiquement.)

    M. Jérôme Guedj

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    Saisissez-les, alors ! Voilà trois semaines que le président de la République en a parlé et ils ne sont toujours pas saisis !

    M. Stéphane Peu

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    Quand ça reste flou, c’est qu’il y a un loup…

    Suspension de MaPrimeRénov’

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annaïg Le Meur.

    Mme Annaïg Le Meur

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    Madame la ministre du logement, depuis 2020, le dispositif MaPrimeRénov’ a permis la rénovation de 2,5 millions de logements. Il s’est imposé comme un pilier essentiel de notre politique de transition énergétique tout en contribuant activement à la dynamisation de l’emploi dans le secteur du bâtiment. Nous saluons votre engagement sur ce dossier stratégique.
    Cependant, depuis l’annonce récente de sa suspension temporaire, mes collègues Ludovic Mendes, Bastien Marchive et moi-même entendons de fortes inquiétudes qui remontent du terrain.

    M. Laurent Jacobelli

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    C’est la DéprimeRénov’ !

    Mme Annaïg Le Meur

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    La première alerte vient des entreprises du bâtiment, confrontées à des encours importants. Un climat d’incertitude s’installe. Quelles garanties pouvez-vous leur apporter que la continuité et la pérennité du dispositif seront assurées, afin d’éviter un coup d’arrêt brutal à la dynamique engagée, avec les conséquences que cela impliquerait pour des dizaines de milliers d’emplois ?
    Quant aux copropriétés, nombreuses sont celles qui attendent l’application des mesures prévues par la proposition de loi visant à clarifier les obligations de rénovation énergétique des logements, toujours en attente d’inscription à l’ordre du jour de notre assemblée.
    Enfin, sur le plan budgétaire, alors que le dispositif a longtemps été sous-utilisé, il est aujourd’hui victime de son succès –⁠ et de sa complexité. Au-delà de la gestion des fraudes, dispose-t-on encore de marges de manœuvre suffisantes pour relancer MaPrimeRénov’ à la hauteur des besoins exprimés ?
    Dans un contexte où les impératifs écologiques et sociaux n’ont jamais été aussi pressants, nous ne pouvons nous résoudre à voir MaPrimeRénov’ devenir un nouveau rendez-vous manqué. Comment entendez-vous limiter les incertitudes actuelles, clarifier le calendrier et garantir que ce dispositif demeure un outil fiable, ambitieux et accessible à toutes les Françaises et tous les Français ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Merci de me permettre de préciser mes propos sur la suite de MaPrimeRénov’ –⁠ la suite, et non la fin : nous avons la volonté de mieux soutenir sa montée en puissance, qui montre combien cette politique est adaptée et répond à un besoin significatif d’accompagnement des ménages dans la résorption des émissions de gaz à effet de serre, en particulier dans la disparition des passoires thermiques.
    Pour rassurer les entreprises, je vous dirai que, le 17 juin, nous travaillerons avec l’ensemble du secteur sur cette période intermédiaire, pour anticiper et préparer le retour à la bonne gestion de ce dispositif, à la mi-septembre, avec une réduction des délais d’instruction, qui pèse trop à la fois sur les usagers et sur les entreprises, mais aussi de la fraude –⁠ c’est aussi à cela que correspond cette pause.
    Ces nouvelles modalités seront construites avec les acteurs du secteur.

    M. Thibault Bazin

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    Il faut aller plus vite, septembre, c’est trop tard !

    Mme Valérie Létard, ministre

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    La suspension du dispositif ne concerne pas les copropriétés, pour lesquelles la situation est plus compliquée qu’ailleurs et où les dossiers se travaillent sur plusieurs années. Il est donc indispensable de le maintenir.
    La proposition de loi défendue ici par M. Marchive et adoptée au Sénat grâce à Mme Gacquerre doit pouvoir revenir à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale : elle permettra de maintenir le calendrier de la loi « climat » et de respecter les objectifs fixés par celle-ci tout en laissant aux propriétaires le temps d’effectuer les travaux.
    Nous voulons mettre tout cela en œuvre le plus vite possible.

    Maladies liées à l’alimentation

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Monsieur le ministre de la santé, que vaut la santé de nos enfants ? Que vaut notre santé à tous et toutes ?
    Je ne parle pas ici des chiffres de la sécurité sociale –⁠ ceux-là vous inquiètent, je le sais : ah là là, attention, ça dérive, alors vous faites des réunions, vous vous inquiétez, vous dites partout qu’il va falloir faire des efforts, vous prenez les choses très au sérieux.
    Mais les cancers des enfants, mais les maladies cardiovasculaires, mais les cancers digestifs, notamment celui du pancréas, qui explose, d’où viennent-ils ?
    Quand la FNSEA met ses tracteurs devant l’Assemblée, là aussi, vous êtes inquiet –⁠ très inquiet, même, mon Dieu, il faut sauver les agriculteurs. Comme si sauver l’agriculture, c’était empoisonner les sols et les eaux ! Comme si soutenir les agriculteurs, c’était les rendre dépendants des industries agrochimiques comme Bayer-Monsanto ! Comme si l’agriculture biologique n’avait pas besoin d’être soutenue !

    M. Hervé de Lépinau

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    Ah, la bonne Parisienne !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Le cadmium est cancérigène et il est présent dans les engrais phosphatés : 36 % des enfants de moins de 3 ans dépassent l’exposition aux doses journalières recommandées –⁠ 36 % ! La contamination se fait via les céréales, le pain, les pâtes, les pommes de terre, soit les aliments de base.
    D’une main, vous voulez réduire les remboursements des maladies chroniques pour faire des économies, de l’autre, vous autorisez les pesticides. D’un côté, vous vous alarmez de la baisse de la natalité, de l’autre, vous autorisez l’acétamipride et les engrais au cadmium qui troublent l’érection et la fertilité.
    Monsieur le ministre, quand comptez-vous discuter sérieusement avec votre collègue de l’agriculture ? Quand comptez-vous enfin tordre le bras aux lobbys ? La loi Duplomb est une trahison de l’intérêt commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
    Nos cancers sont politiques. Notre santé est politique. Quel est votre plan de réduction de l’exposition des Français et des Françaises au cadmium et aux polluants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

    M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins

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    Prendre soin du budget de la sécurité sociale ou prendre soin de notre population d’une façon générale, ce n’est pas antinomique.
    Le cadmium n’est pas un des métaux lourds dont on parle le plus souvent ; je vous remercie donc pour votre question, tout comme je remercie Le Monde d’avoir publié un article fort intéressant dans son édition datée du 6 juin dernier.
    Je vais vous répondre sur quelques faits et chiffres.
    L’exposition aux métaux lourds, dont le cadmium, peut avoir un impact sur la santé, vous le savez parfaitement. Ils peuvent affecter les os et les reins et favoriser des maladies cardiovasculaires –⁠ dont je m’occupe, vous le voyez – ou des cancers –⁠ du sein, du poumon ou encore du pancréas, dont le nombre a effectivement été multiplié par quatre depuis trente ans.
    Je suis donc très heureux que nous ayons inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, le 23 juin, la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers.

    Mme Sandrine Rousseau

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    C’est trop tard !

    M. Yannick Neuder, ministre

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    J’en remercie le ministre chargé des relations avec le Parlement et la présidente de l’Assemblée nationale. Concernant le cadmium, je reviendrai sur quatre points importants. Premièrement, l’enquête Albane (Alimentation, biosurveillance, santé, nutrition et environnement), menée à ma demande par Santé publique France et l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) pour étudier les liens entre l’environnement, la nutrition et la santé, a débuté le 10 juin –⁠ c’est une étude d’imprégnation.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Les cancers seront-ils enregistrés ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Deuxièmement, s’agissant des normes, je serai particulièrement vigilant sur l’arrêté que doit prendre le ministère de l’agriculture pour fixer à 20 milligrammes par kilogramme la limite pour la teneur en cadmium des engrais phosphatés. D’autres pays comme la Finlande, la Pologne ou la Roumanie, ont déjà retenu ce seuil.
    Troisièmement, les Unions régionales des professionnels de santé médecins libéraux ont fait remonter l’intérêt d’un dépistage. Ce dépistage, qui est remboursé à l’hôpital, le sera en médecine de ville à l’automne.
    Quatrièmement, enfin, le gouvernement se mobilise, avec les parlementaires, les professionnels de santé et les citoyens, pour inciter à la diversification du mode alimentaire et favoriser les aliments bio, dont la teneur en cadmium est inférieure de 50 % à celle des aliments issus de l’agriculture conventionnelle, ainsi qu’une alimentation saine. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)

    Mme Sandrine Rousseau

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    Vous acceptez nos cancers !

    MaPrimeRénov’

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sophie Mette.

    Mme Sophie Mette

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    Le groupe Les Démocrates s’associe à la peine des familles des deux jeunes pompiers décédés ainsi qu’à celle de la jeune femme tuée ce matin, elle aussi dans l’exercice de ses fonctions.
    Le gouvernement a récemment confirmé la suspension jusqu’en septembre de MaPrimeRénov’ afin de maîtriser les dérives budgétaires liées à un excès de pratiques frauduleuses. Nous soutenons votre volonté de revoir le fonctionnement du dispositif. Cela doit d’ailleurs ouvrir la porte à une réflexion plus large, à laquelle notre groupe s’associera. Nous souhaitons en effet accélérer considérablement la rénovation énergétique, pour des raisons environnementales, mais aussi de pouvoir d’achat et de justice sociale. Ce travail ne peut se faire sans prendre en considération l’ampleur de la dette budgétaire de notre pays, qui s’est creusée depuis des décennies. Au-delà des clivages idéologiques, nous en appelons à la responsabilité des décideurs publics.
    Nous devons être particulièrement soucieux de l’utilité et de l’impact réel de chaque euro de dépense publique : les aides à la rénovation énergétique doivent tenir compte de l’ampleur des travaux et des revenus des ménages, sans provoquer d’envolée des factures. Ces aides publiques doivent soutenir leurs efforts, sans créer d’effet d’aubaine ou conduire à une inflation des coûts. Nous pouvons nous appuyer de manière utile sur ce qui se fait en Allemagne.
    Il ne s’agit pas que d’une question comptable : le budget met en jeu des choix majeurs en matière de souveraineté et de maîtrise de notre destin. Nous devons retrouver des marges de manœuvre pour maîtriser et réduire la dette de manière lucide et responsable. Nous en avons besoin pour financer une transition écologique à la hauteur des enjeux, pour inventer un modèle de solidarité fidèle à notre histoire et à nos valeurs, pour soutenir notre économie et sa capacité d’innovation. Cela doit se faire en investissant dans certains secteurs stratégiques pour que les acteurs de demain, aussi bien les jeunes que les moins jeunes, puissent être la force motrice de notre pays et de sa capacité productive.
    Les travaux budgétaires avancent, l’urgence de la rénovation énergétique est là… (Exclamations sur les bancs du groupe RN. –⁠ Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. –⁠ Plusieurs députés du groupe Dem applaudissent cette dernière.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Je vous remercie pour votre propos, qui expose de manière globale les enjeux qui seront devant nous au deuxième semestre 2025. Nous devons prendre en considération la nouvelle dynamique dans laquelle nous nous situons, utiliser les outils dont nous disposons désormais, grâce aux propositions de loi issues de vos rangs, pour garantir que chaque euro aille au bon destinataire et prévenir les dérives, mais aussi redéfinir avec le secteur du bâtiment les contours de la rénovation d’ampleur pour éviter les effets d’aubaine : en d’autres termes, nous mettons les moyens et entendons qu’ils soient utilisés à bon escient.
    Le dispositif de l’accompagnateur France Rénov est tout récent et la rénovation globale a pris véritablement son envol début 2024. Alors que nous disposons des premiers retours d’expérience, le gouvernement doit désormais, avec le Parlement –⁠ avec vous – et avec les acteurs du secteur, mettre à profit les deux mois et demi qui restent d’ici à mi-septembre pour continuer et amplifier l’effort, grâce à des certificats d’économie d’énergie supplémentaires, mais en responsabilité pour que le plus grand nombre en bénéficie. (« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.)

    Industrie automobile

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthieu Marchio.

    M. Matthieu Marchio

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    L’industrie automobile française, jadis fleuron national, est aujourd’hui en déclin. Selon une étude récente du secteur, jusqu’à 50 % de la production de composants pourrait disparaître d’ici cinq ans. Résultat : 40 000 emplois sont menacés. Pourquoi ce naufrage ? Parce que la Macronie mène depuis des années une politique hostile aux automobilistes, en particulier les plus en difficulté : hausse des taxes sur le diesel, malus écologique toujours plus punitif, fin programmée des moteurs thermiques en 2035, et surtout les fameuses zones à faibles émissions, remises en cause grâce à la mobilisation des députés RN. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    Il n’y a en effet que les députés du Rassemblement national, avec Marine Le Pen, pour défendre ces millions de Français qui souffrent –⁠ ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter une voiture électrique à 40 000 euros. Vous ne jurez que par la voiture électrique, mais elle ne peut pas être l’unique solution. Elle est trop chère, peu autonome, longue à recharger, et ses batteries posent, elles aussi, de sérieux problèmes environnementaux. Elle doit s’inscrire dans un véritable mix énergétique offrant un choix aux Français, et non devenir une nouvelle religion sans pratiquants.
    L’automobile est le symbole de l’échec de votre politique de réindustrialisation. La France ne se réindustrialise pas ; elle bricole et elle recolle les morceaux pendant que tout s’effondre. Croyez-vous vraiment à la réindustrialisation de notre pays alors que, selon votre propre secrétaire général pour l’investissement, Bruno Bonnell, tant qu’on ne change pas profondément notre approche, « il faut arrêter de parler de réindustrialisation » ? Voilà l’aveu ! Alors que les États-Unis, le Japon et la Chine protègent leurs industries, vous, vous continuez à vous soumettre aux règles d’une Union européenne qui interdit toute préférence nationale, même quand il s’agit de sauver nos ouvriers et nos usines.
    Allez-vous enfin défendre notre industrie automobile et nos ouvriers ? Allez-vous imposer du contenu local, soutenir le thermique propre et garantir aux Français le droit de circuler librement, ou allez-vous encore céder au dogme d’un libre-échange qui ruine notre économie et menace notre souveraineté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Pas moins de 150 000 emplois industriels supplémentaires, des centaines d’usines qui ont ouvert,…

    Un député du groupe RN

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    Pipeau !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    …un pays qui est, pour la sixième année consécutive, le plus attractif d’Europe…

    M. Laurent Jacobelli

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    C’est déclaratif !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    …pour les investissements étrangers, en particulier industriels : cette majorité et celles qui se sont succédé depuis 2017, n’ont pas à rougir de leur bilan en matière industrielle.

    M. Hervé de Lépinau

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    Ah si ! De la même couleur que les sièges !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Est-ce que cela signifie que tout va bien et que tout cela est satisfaisant et suffisant ? Non.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il faut atterrir !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Il faut se battre pour nos filières en difficulté. Vous évoquiez l’automobile, qui en est une –⁠ en particulier celle des équipementiers automobiles. Il faut se battre sur chaque dossier industriel,…

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ce n’est pas un programme, ça !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    …comme nous l’avons fait pour la Fonderie de Bretagne –⁠ près de 300 emplois ont été sauvés grâce à l’engagement des élus et de l’État –, pour la cristallerie d’Arques, dans le Pas-de-Calais –⁠ là encore, grâce à l’engagement des élus et de l’État, près de 4 000 emplois ont été sauvés –, pour la papeterie Chapelle Darblay, en Seine-Maritime –⁠ le projet, qui met en jeu là aussi des centaines d’emplois, est aujourd’hui sur des rails.

    Un député du groupe RN

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    Qu’est-ce qu’on est bons !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Je le répète, il faut sortir des caricatures, monsieur le député, et admettre que l’action en matière industrielle se déploie depuis bien longtemps. Nous devons également nous battre pour la compétitivité de nos entreprises. Nous nous battons pour la simplification :…

    M. Laurent Jacobelli

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    Il y en a encore, des normes absurdes !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    …mon collègue François Rebsamen et moi-même l’avons fait en exemptant les projets industriels du ZAN, l’objectif zéro artificialisation nette, dans le cadre du projet de loi simplification.

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est un peu timide ! Le ZAN est toujours là !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Nous le faisons également en maintenant la stabilité fiscale et la baisse du coût du travail, qui a créé des centaines de milliers d’emplois depuis 2017. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous vivez où ?

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Vous nous dites qu’il faut mieux protéger. J’ai l’impression que vous avez manqué ce qu’il s’est passé ces dernières semaines et ces derniers mois. Nous avons œuvré pour que l’Union européenne, sur proposition de la France, sorte de la naïveté. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe RN.) Des propositions sont aujourd’hui sur la table pour taxer davantage l’acier chinois et pour protéger l’industrie automobile de manière plus significative.

    Mme la présidente

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    Un peu de silence, s’il vous plaît !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il raconte n’importe quoi !

    M. Marc Ferracci, ministre

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    Cette sortie de la naïveté, nous l’assumons –⁠ vous n’en avez en aucun cas la paternité. Nous la défendons au niveau européen et nous continuerons à le faire. (Exclamations sur les bancs du groupe RN. –⁠ Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et HOR.)

    Mme la présidente

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    Nous avons terminé les questions au gouvernement.

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Xavier Breton.)

    Présidence de M. Xavier Breton
    vice-président

    M. le président

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    La séance est reprise.

    3. Résultats de la gestion et approbation des comptes de l’année 2024

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

    Discussion d’un projet de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024 (nos 1285, 1492).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics

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    Le gouvernement vous présente aujourd’hui le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024, désigné par l’acronyme barbare de PLRGAC. Ce texte, qui constate le passé, est technique et à vocation comptable, comme son nom l’indique. Il est pourtant essentiel, car il traduit la réalité des choses : il s’agit de rendre compte des résultats de la gestion. Ce constat permet en particulier d’apprécier l’impératif de redressement de nos finances publiques. Il est donc nécessaire pour préparer l’avenir.
    Le premier ministre l’a dit le 15 avril dernier : la vérité permet d’agir. C’est le devoir de l’exécutif à votre égard –⁠ représentation nationale – et plus généralement le devoir de l’État auprès des citoyens, également contribuables, de dresser ce diagnostic. L’objectif est d’établir un constat comptable partagé pour mieux se projeter. L’examen de ce projet de loi est d’ailleurs un prérequis du débat budgétaire qui se tiendra à l’automne, c’est pourquoi nous le soumettons à l’Assemblée aujourd’hui. Bien que son équivalent ait été rejeté ces trois dernières années, son examen demeure une étape incontournable pour retrouver une gestion politique de nos finances publiques plus apaisée.
    Dans mon propos, je reviendrai d’abord sur les conditions de la gestion 2024, puis je préciserai le contenu technique de ce projet de loi et le mécanisme de correction qui en découle pour tenir la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques. Enfin, je vous présenterai les principes qui nous guident actuellement pour redresser les finances publiques.
    Concrètement, la gestion 2024 s’est distinguée par de nombreux aléas et une forte activité tout au long de l’année afin de corriger la trajectoire et de baisser la dépense de l’État par rapport aux plafonds définis en loi de finances initiale (LFI) pour 2024. En particulier, un décret d’annulation a été pris dès février et des plafonds de dépenses ministériels inférieurs aux crédits disponibles ont été instaurés et accompagnés d’un surgel à l’été. Ensuite, la fin de l’année 2024 a été marquée par la préparation de l’entrée inédite de la gestion 2025 en régime des services votés, avec l’adoption de la loi spéciale.
    Politiquement, chacun est fondé à faire des hypothèses sur ce qu’auraient pu ou dû être les décisions de 2024. Néanmoins, j’observe, au vu des reproches relatifs à la rapidité et à la proportionnalité des décisions, qu’un projet de loi de finances rectificative aurait connu un long parcours, ouvert des interrogations macroéconomiques et donné lieu à des complexités fiscales, voire à de nouvelles dépenses. Il n’aurait donc pas été de nature à contenir efficacement la dérive spontanée et rapide des comptes publics en 2024.
    Votre assemblée, sous l’impulsion de nombre d’entre vous, a constitué à cet effet une commission d’enquête sur les causes de la variation et des écarts des prévisions fiscales et budgétaires. Elle a rendu son rapport récemment et je tiens à nouveau à saluer la qualité de ses travaux. Ce rapport a constaté, au niveau technique, la très grande difficulté des prévisions et les aléas exacerbés auxquels notre économie fait face –⁠ et avec elle, nos finances publiques. Ces aléas et ces risques sont décuplés cette année sous l’effet de la triple crise que nous traversons : la crise géopolitique, la crise commerciale internationale et la crise économique marquée par la stagnation du modèle de croissance des pays occidentaux.
    Si la dégradation de nos finances publiques en 2024 a été réelle, l’effort en gestion pour contenir les dépenses de l’État l’a été également. Après les constats de 2024, nos débats porteront désormais sur 2025, 2026 et jusqu’à 2029, échéance que nous nous fixons pour ramener le déficit public sous les 3 % du PIB, et ainsi arrêter d’augmenter notre dette.
    Je tire surtout une conclusion importante de ces épisodes qui ont notamment reposé sur la mobilisation des administrations sous les gouvernements successifs : en dépit d’un contexte délicat, les Français ont pu mesurer combien la continuité des services publics a été pleinement assurée. Les efforts ont certes permis à la dépense de l’État d’être –⁠ heureusement – contenue, mais surtout aux Français de continuer à vivre dans un pays tenu.
    Ce texte présente quatre parties et dix articles, outre l’article liminaire. Ils traitent du solde public, des mécanismes du recours à l’endettement, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement non consommés. Les articles 7 à 10 sont plus exceptionnels et visent à pallier l’absence de loi de règlement. Ce projet de loi vise à assurer, comme préalable à notre vie en tant que nation, que nos comptes sont bien tenus. Il est donc souhaitable qu’il soit adopté et referme ainsi les exceptions qui handicapent l’annualité de nos finances publiques et la sincérité des débats.
    Les chiffres présentés dans ce texte posent un constat : la gravité de la situation de nos finances publiques à l’issue de l’année 2024 est présentée de manière claire et –⁠ je l’espère – incontestable. Le déficit public de l’année 2024 s’établit à 5,8 % du PIB. C’est un peu mieux par rapport à la dernière prévision de 6 % incluse dans la loi de fin de gestion, mais significativement moins bon que les 4,4 % prévus en loi de finances initiale pour 2024.

    M. Emmanuel Maurel

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    C’est mieux que si c’était pire !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Cet écart par rapport à la loi de finances initiale pour 2024 est le même que celui résultant de la comparaison avec la loi de programmation des finances publiques 2023-2027 actuellement en vigueur. Supérieur à 0,5 point de PIB, il est constaté par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) et considéré comme important au sens de l’article 62-II de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).
    Conformément aux dispositions du même article, le gouvernement présente, avec ce projet de loi, les raisons de cet écart entre la prévision et l’exécution de l’année 2024 et indique les mesures de correction envisagées pour y remédier. L’analyse de l’exécution est développée dans l’exposé général des motifs, a fait l’objet de publications et a été longuement commentée, c’est pourquoi je ne m’étendrai pas sur ce point.
    À la suite des crises, notre économie a connu des évolutions structurelles inattendues et reste exposée à des aléas significatifs, qui ont pesé fortement sur les recettes enregistrées en 2024, avec une élasticité de nouveau très faible. Les mesures prises en gestion pour modérer les dépenses sur le périmètre de l’État ont partiellement compensé cette dégradation : l’exécution de ces dépenses s’est élevée à 484,7 milliards, contre 491,9 milliards ouverts en LFI pour 2024 –⁠ soit un écart de 7,2 milliards.
    Pour l’année 2025 –⁠ puisque j’ai l’honneur de servir notre pays dans la gestion de ses comptes publics depuis le 23 décembre 2024 –, la loi de finances initiale a engagé un effort courageux dans le sens du redressement de nos finances publiques, en s’appuyant sur un budget de compromis forgé par le Parlement grâce à une commission mixte paritaire conclusive. Ce compromis nous oblige pour l’exécution de ce budget.
    C’est le sens de la nouvelle méthode de transparence et de réactivité que nous avons adoptée depuis la première édition du comité d’alerte en avril dernier. Cette méthode est destinée à faire face aux aléas, quoi qu’il arrive, et à maîtriser notre dépense publique, quoi qu’il arrive. Nous nous donnons collectivement les moyens de faire face aux aléas pour sécuriser le redressement de nos finances publiques.
    L’objectif fixé d’un déficit à 5,4 % est « impératif, ambitieux et atteignable », selon les mots du premier président de la Cour des comptes. Pour nous y tenir, nous avons déjà instauré une gestion renforcée : reports de crédits sur les périmètres ministériels, divisés par deux par rapport à 2024 ; réserve de précaution de plus de 8,5 milliards sanctuarisée en interministériel ; gestion prudentielle de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), doté d’une réserve de 1,1 milliard ; révision des dotations en fonction des trésoreries. Nous revenons aussi souvent que possible à l’idée que chaque euro public doit être efficace et déclencheur et ne pas créer des effets d’aubaine –⁠ à l’idée, en somme, que la dépense publique n’est pas automatique.
    Dans le même esprit, nous travaillons à la construction d’un budget base zéro pour 2026, qui étendra cet effort de redressement. Face aux nouveaux aléas géopolitiques, économiques et financiers, la prévision de croissance pour 2025 a été révisée à la baisse à deux reprises, d’abord de 1,1 % à 0,9 %, puis de 0,9 % à 0,7 %. En conséquence, nous avons annoncé dès avril 2025 de nouvelles marges de prudence à hauteur de 5 milliards pour l’État : cette mesure résulte d’une réaction rapide et transparente, prise dans le cadre d’un comité d’alerte dont la seconde réunion se tiendra fin juin et auquel le Parlement sera étroitement associé, tant la transparence doit être totale pour que la représentation nationale soit pleinement associée, non seulement au diagnostic, mais aussi à nos décisions.
    Nous assumons ainsi nos responsabilités pour tenir les objectifs de finances publiques de la loi de finances initiale et l’objectif d’un retour du déficit sous la barre des 3 % à l’horizon 2029. Nous nous attachons à mieux anticiper les aléas et les risques dès la gestion, dont la complexité nous impose une amélioration continue de notre pilotage. Nous y associons toutes les parties prenantes et tous les gestionnaires publics, qu’il s’agisse des représentants de l’État, des collectivités locales ou de la sphère sociale –⁠ et évidemment vous, parlementaires et représentants de la nation, qui devez être légitimement les premiers informés des diagnostics et des décisions.
    Cette prérogative démocratique est attachée à une autre fonction du Parlement : celle d’évaluer l’action du gouvernement mais aussi, en ce qui concerne nos finances publiques, l’efficacité de nos dispositifs publics. C’est un des enjeux majeurs de ce projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024, mais aussi du Printemps de l’évaluation qui alimente un débat nourri et précieux pour préparer au mieux le budget 2026 et les suivants.
    Avec le plan d’action lancé avec Éric Lombard en avril dernier, nous ouvrons désormais ce que certains appelaient auparavant une « boîte noire ». La boîte n’est pas noire et l’avenir doit être construit ensemble. Je vous remercie pour votre soutien. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Nous examinons aujourd’hui le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024. En tant que rapporteur général du budget, je souhaite rappeler les trois raisons qui, à mes yeux, appellent au rejet de ce texte.
    Premièrement, la situation de nos finances publiques est de plus en plus préoccupante –⁠ même Mme la ministre l’a reconnu il y a un instant. D’une année sur l’autre, le déficit se creuse. En 2024, il a atteint 5,8 % du PIB, bien au-delà des prévisions initiales de 4,4 %. La dette publique a franchi fin 2024 les 3 300 milliards d’euros.
    Au-delà de ces chiffres, c’est la trajectoire même de nos finances publiques qui est inquiétante. Pendant que nos partenaires européens engagent des réformes structurelles pour redresser leurs comptes, nous poursuivons une trajectoire inverse, sans plan crédible de rééquilibrage. Le Haut Conseil des finances publiques a d’ailleurs déclenché le mécanisme de correction prévu par l’article 62 de la Lolf, en constatant que le déficit structurel est supérieur d’environ 1,5 point à celui prévu par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 –⁠ le seuil de déclenchement étant de 0,5 point.
    Ces déficits ont été limités par des annulations de crédits massives : plus de 10 milliards d’euros ont été annulés, sans passage devant le Parlement, dès le mois de février.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Heureusement !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    D’autre part, l’importance des reports de crédits est le signe que le freinage des dépenses n’est pas durable. Nous sommes donc confrontés à un budget qui ne prépare pas le redressement indispensable de nos finances publiques.

    M. David Amiel

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    Il fallait voter la réforme des retraites !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Les hypothèses macroéconomiques du gouvernement et ses prévisions de recettes se sont révélées trop optimistes ; je l’ai souligné à plusieurs reprises en commission des finances, notamment lorsque nous avons enquêté sur les variations et les écarts des prévisions fiscales et budgétaires pour les années 2023 et 2024. Un écart de 23 milliards d’euros a été constaté en 2024 entre les prévisions de recettes fiscales de l’État et l’exécution.
    Enfin, le caractère rigide des dépenses s’accentue : 77 % des dépenses de l’État échappent à tout pilotage effectif. Pire, le stock de restes à payer atteint un niveau sans précédent : il s’élevait à 217 milliards à la fin 2024, soit le double du stock de fin 2018. Cela représente trois années de dépenses ministérielles hors masse salariale, ce qui compromet la soutenabilité budgétaire du pays à moyen terme. Nous n’avons donc pas de trajectoire pluriannuelle crédible.
    Deuxièmement, depuis l’automne 2022, tous les projets de loi de finances –⁠ hors les projets de loi de fin de gestion – ont été adoptés par le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, ce qui est problématique. Nous avons été systématiquement privés de débat parlementaire sur les choix budgétaires fondamentaux. Le budget 2024 n’a pas échappé à cette logique : au moyen du 49.3, il a été considéré comme adopté, sans vote, avant même que nous ayons examiné l’article 2. Souvenons-nous de la véritable raison de cette procédure : à l’époque, les différentes composantes de la minorité présidentielle n’étaient même pas d’accord entre elles. Le Modem, par exemple, voulait une version de l’article 2 relatif au barème de l’impôt sur le revenu tout à fait différente de celle du gouvernement.
    Toujours est-il que cette procédure prive le Parlement d’un vote sur les choix budgétaires fondamentaux. Or le vote du budget est un des actes politiques majeurs de la vie parlementaire, c’est l’expression même de la souveraineté des représentants du peuple. En recourant systématiquement au 49.3 pour l’adoption des lois de finances, le gouvernement prive les parlementaires de la possibilité d’amender le texte, de débattre des priorités en matière de dépenses comme de recettes et plus largement de discuter de la soutenabilité des choix proposés.
    Troisièmement, je le rappelle, l’éventuel rejet de ce texte n’aurait pas de conséquences juridiques bloquantes. Il n’entraverait ni l’exécution du budget de l’année 2025 ni le financement de l’État pour l’année prochaine. L’article 41 de la Lolf prévoit uniquement que « le projet de loi de finances de l’année ne peut être mis en discussion devant une assemblée avant le vote par celle-ci, en première lecture, sur le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année afférent à l’année qui précède celle de la discussion dudit projet de loi de finances ». Il suffit donc que le texte que nous examinons aujourd’hui soit mis au vote, quel qu’en soit le résultat. En revanche, le rejet de ce projet de loi aurait une signification politique claire et forte : il marquerait notre refus de cautionner la dérive actuelle des finances publiques.
    Je rappelle également que, si la Cour des comptes a de nouveau –⁠ peut-être pour la dernière fois – certifié les comptes, elle l’a fait en émettant cinq réserves majeures. En outre, son premier président a explicitement évoqué le risque d’une non-certification à l’avenir, dans le cas où la sincérité de la loi de finances ne s’améliorerait pas.
    Enfin, les articles 7, 8 et 9 du projet de loi visent à revenir sur nos votes hostiles sur les comptes 2021, 2022 et 2023, ce qui n’est pas acceptable : la représentation nationale ne saurait se déjuger après trois votes successifs. De manière plus générale, je considère qu’il est de notre responsabilité de nous prononcer avec clarté. Ainsi, je serai favorable aux amendements de suppression des articles et opposé aux demandes de rapport, lesquelles n’ont pas leur place dans un tel texte. Une motion de rejet préalable a été déposée ; le plus simple serait de la voter, ce qui nous éviterait d’examiner une centaine d’amendements dont la majorité vise à demander des rapports.
    En conclusion, je souhaite que cette séance soit conduite de façon rapide et efficace. Il est inutile de faire excessivement durer nos débats sur ce texte. Pour toutes ces raisons, en cohérence avec ma position exprimée en commission des finances, je vous invite à rejeter ce projet de loi comme nous avons rejeté les trois précédents. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. –⁠ M. Jean-Philippe Tanguy applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    On nous demande aujourd’hui d’approuver les comptes de l’État pour l’année 2024, qui résultent d’un budget imposé par 49.3. On nous dit qu’il est vain de rejeter une photo, mais une photo raconte une histoire ; en l’occurrence, celle des comptes à la dérive d’une politique qui échoue. Tout cela se produit alors que nous vivons un changement d’époque : le système capitaliste qui s’appuyait jusqu’ici sur le libre-échange s’appuiera désormais sur une confrontation commerciale qui, par certains aspects, ressemble à la situation d’avant 1914.
    Pour faire face à ce « tsunami stratégique », comme l’appelle François Bayrou, le gouvernement propose de rester sur la même barque avec les mêmes rames. Pour faire face, il n’offre qu’une politique qui a échoué. J’ai entendu en commission la ministre des comptes publics dire que ce texte d’approbation des comptes devait permettre « un constat comptable partagé », mais il est illusoire d’opposer l’hypothétique vérité des chiffres à l’affrontement des discours : il faut seulement observer ce que ces chiffres révèlent. Or ils révèlent beaucoup de l’échec économique et budgétaire de la politique de l’offre accentuée depuis 2017, dont la logique veut que le travail coûte toujours trop cher et que le capital ne soit jamais rassasié.
    C’est un échec budgétaire, car le solde du budget de l’État s’est effondré, atteignant un déficit de 6 % de PIB. Cela s’explique en premier lieu par le niveau des recettes fiscales, inférieur de plus de 40 milliards d’euros à la prévision. Quand le gouvernement répète qu’il faut s’assurer que les comptes sont tenus, on est donc en droit de rire jaune ; mais quand il s’en prend aux fonctionnaires qui seraient trop nombreux, on n’a même plus envie de rire. C’est une tromperie. Le nombre de fonctionnaires, qui, je le rappelle, inclut les contractuels, augmente, comme n’importe quelle catégorie d’actifs –⁠ c’est normal dans un pays où il y a de la croissance –, mais leur part dans l’emploi total recule : de 21,1 % en 1997, elle est tombée à 19,7 %. Pourtant, les besoins, eux, ne reculent pas ; ils augmentent.
    C’est aussi un échec économique, car cette politique n’a mené à aucune victoire, ni en matière d’investissement, ni en matière d’emploi, ni en matière d’écologie. En matière d’investissement, c’est un échec : selon le dernier baromètre EY que vous citez souvent, le nombre de projets étrangers en France a reculé de 14 % en 2024 et ils y sont 1,5 à 4 fois moins créateurs d’emplois que chez nos voisins. Entre 2023 et 2024, les projets manufacturiers étrangers sont responsables de moins en moins de créations d’emploi –⁠ 40 % de moins qu’en 2023 – et de plus en plus de destructions d’emploi –⁠ 66 % de plus qu’en 2023.
    En matière d’emploi, c’est un échec. Créer des postes d’apprentis et brandir le statut d’autoentrepreneur –⁠ le nec plus ultra du modernisme macroniste –, cela ne crée pas de bons emplois stables et rémunérateurs ni de cotisations pour les comptes de la sécurité sociale. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), l’apprentissage explique 38 % des créations d’emplois salariés marchands sur la période s’étendant de 2018 à 2023. S’y ajoutent 700 000 nouveaux autoentrepreneurs selon l’Urssaf.
    Abordons maintenant toutes les dépenses coupées, tous les besoins ignorés en 2024. Je ne parle ici que de l’écart entre la loi initiale et les crédits effectivement exécutés.
    Vous avez coupé le budget de l’enseignement scolaire. Le gouvernement a enlevé 188 millions à l’école primaire et supprimé 3 786 emplois, comme le révèle la consommation du plafond d’équivalents temps plein (ETP). Pourtant, l’OCDE rappelle que la France figure parmi les trois pays européens qui ont le plus d’élèves par enseignant, seules la Roumanie et l’Angleterre faisant pire.
    Vous avez coupé le budget du climat : les restes à payer du fonds Vert ont augmenté de 60 % entre 2023 et 2024. Vous le coupez encore cette année en suspendant MaPrimeRénov’ alors que 100 000 dossiers ont été déposés depuis mars. C’est là, dans ce genre d’arbitrage politique, que résident l’instabilité et l’incertitude. Selon les dernières données d’I4CE, l’Institut de l’économie pour le climat, relatives aux investissements écologiques par filière, ceux-ci ont reculé en 2024 de 7,2 % dans l’électricité renouvelable, de 6,3 % dans la rénovation énergétique des bâtiments et de 2,9 % dans les véhicules électriques. C’est au point que même M. Macron, oubliant qu’il vous a laissé gouverner pour appliquer cette politique, en arrive à vous critiquer.
    Vous avez coupé le budget de la biodiversité. Selon un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) datant de novembre 2022, il faudrait presque 1 milliard d’euros par an pour mener la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB). Pourtant, les crédits du programme budgétaire Paysages, eau et biodiversité ont été sous-utilisés à hauteur de 25 % en 2024 : seulement 379 millions d’euros ont été consommés sur les 511 millions prévus. Là encore, c’est un abandon. Dans le seul périmètre de l’État, il faudrait doubler, voire tripler les dépenses écologiques, mais vous les coupez. Nous avons besoin de passer de 19 milliards d’euros par an à 36, voire à 71 milliards, selon l’institut consulté. Madame la ministre, je vous ai entendue parler de votre slogan du « quoi qu’il arrive » ; tout le monde sait ce qui va arriver, le Giec –⁠ Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – et l’IPBES –⁠ Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques – le répètent rapport après rapport, mais vous regardez ailleurs.
    S’agissant de la sécurité, là aussi, vous coupez. Alors que l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et Météo-France prévoient une augmentation des feux de forêt de 13 à 22 % d’ici cinq ans, le budget de la sécurité civile a subi en 2024 une coupe de 6 %, contre seulement 0,2 % pour celui de la gendarmerie et 1 % pour celui de la police.
    Madame la ministre, vous avez parlé de « traduire la réalité des choses ». La réalité, la voici : le constat n’est pas partagé, les comptes ne sont pas tenus et il n’y a pas de « quoi qu’il arrive ». Il n’y a que la certitude du danger climatique et social dans lequel ces coupes et ces errements nous précipitent, sans parler des effets récessifs de votre politique sur l’économie. J’appelle donc à voter contre ce texte, voire à le rejeter en votant la motion dans quelques minutes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Motion de rejet préalable

    M. le président

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    J’ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
    La parole est à M. David Guiraud.

    M. David Guiraud

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    Il y a un an, je disais à cette tribune que si la population comprenait parfaitement notre système budgétaire, il y aurait une révolution demain matin. À la lecture des documents budgétaires dont nous débattons ce jour, je maintiens ma position. J’entends approfondir la démonstration suivante : par son budget, le gouvernement français pille son propre peuple et règne par le mensonge, la dissimulation et l’absence de vote démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Emmanuel Mandon

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    Rien de nouveau sous le soleil pour LFI !

    M. David Guiraud

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    J’ai l’intention de marteler ces éléments parce qu’ils sont essentiels à la compréhension des événements, mais aussi parce qu’ils sont fondés sur des faits incontestables, chiffrés, documentés. D’ailleurs, vous n’avez jamais répondu sur ce point. Certains nous accuseront de répéter les mêmes choses que l’année passée, alors je répondrai, comme le poète, que « si on [nous] reproche les mêmes colères, les mêmes foutus thèmes », c’est parce qu’on fait de la politique « populaire dans tous les sens du terme ».

    M. Emmanuel Mandon

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    Quelle poésie !

    M. David Guiraud

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    Avec vous, les « esprits sont descendus à force de les réduire, alors nos [discours] ne seront entendus qu’à force de les dire ».
    Les chiffres du budget semblent annoncer un désastre pour la France. Vous le répétez tellement qu’on en vient à se demander si cela vous préoccupe ou si cela vous arrange. Le déficit public s’élève à 5,8 % du produit intérieur brut, c’est-à-dire que l’État dépense 152 milliards d’euros de plus qu’il ne gagne. La dette publique, quant à elle, se creuse d’année en année ; dans les comptes que vous nous présentez, elle s’établit à 3 305 milliards.
    Ce qui est fou, c’est que cela fait plus de vingt ans que tous les gouvernements qui se succèdent nous assènent comme des coups de matraque que la priorité absolue est de désendetter la France, que la dette justifie toutes vos politiques antisociales, tous les renoncements, le dépouillement des services publics comme des Français, tout cela pour qu’au bout du compte, plus de vingt ans plus tard, on en soit toujours rendu au même point, en pire. Le niveau de stupidité économique et de médiocrité de ceux qui nous gouvernent fait peur, à tel point que je crois bien que c’est pour ce genre de politiciens qu’il y a marqué « ne pas boire » sur les bouteilles de shampooing. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Ces chiffres sont préoccupants parce qu’ils remplissent une fonction : créer un choc suffisamment puissant sur le débat public pour que tous vos éléments de langage saturent la pensée, paralysent les consciences et empêchent l’expression d’une alternative politique. Oui, ces chiffres de la dette et du déficit sont préoccupants si on les regarde aussi idiotement que les vaches regardent passer les trains.
    Mais il faut rapprocher ce constat d’un autre dont on parle beaucoup moins : les recettes fiscales nettes de l’État, c’est-à-dire l’argent qu’il engrange, n’ont jamais été aussi élevées. Pour témoigner de cet enrichissement, il suffit de regarder l’argent récolté grâce à nos impôts depuis le début du premier mandat d’Emmanuel Macron. En 2017, les recettes fiscales nettes de l’État s’élevaient à 295 milliards d’euros. Après le covid, en 2021, leur montant était identique. Ensuite, elles ont explosé : elles sont passées à 323 milliards d’euros en 2022, et s’élèveront à 325 milliards d’euros en 2025.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Il faut vous mettre d’accord avec Coquerel !

    M. David Guiraud

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    Il faut ajouter à ce montant une somme colossale qui nous est cachée (« Oh ! » sur les bancs du groupe EPR), qui n’apparaît plus dans les recettes fiscales nettes de l’État : l’argent de la TVA. (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.) Gardez votre salive, chers collègues ; si vous vouliez gueuler, il fallait venir plus nombreux, car on vous entend très peu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes EPR et Dem.)
    Cet argent est si bien caché que, depuis 2024, l’État a adopté une nouvelle convention comptable concernant les niches fiscales du pays, qui lui permet de cacher plus de 12 milliards d’euros de dépenses fiscales qui reposent sur la TVA. Cette convention comptable a été dénoncée par la Cour des comptes, car elle réduit le montant des dépenses fiscales de l’État en les faisant passer de 23 milliards d’euros à l’origine à seulement 11 milliards. Ces dépenses fiscales sont désormais disparues, aussi introuvables qu’un macroniste ou un lepéniste lorsqu’il doit s’opposer au génocide à Gaza. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Jean-Philippe Tanguy s’exclame.)

    Un député du groupe EPR

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    N’importe quoi !

    M. David Guiraud

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    La TVA, c’est l’impôt le plus dur et le plus injuste pour les Français, ceux des classes populaires et moyennes. Cet impôt a littéralement explosé depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, sous l’effet notamment de la hausse générale des prix qui a considérablement appauvri les Français. En 2017, on récoltait 163 milliards d’euros de TVA ; en 2019, 179 milliards ; en 2021, 186 milliards ; en 2024, 212 milliards ; et on s’attend à 222 milliards en 2025. Pourtant, les documents budgétaires dont nous disposons indiquent qu’en 2024, l’État a engrangé seulement 96,8 milliards issus de la TVA. Il manque donc, dans les documents budgétaires de l’État, 115 milliards de la TVA, soit les deux tiers du déficit public français de l’année 2024.

    Mme Marianne Maximi

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    Incroyable !

    M. David Guiraud

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    Où est passé l’argent de la TVA ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) J’ai déjà eu l’occasion de l’expliquer et je vais le refaire, tant il s’agit d’un scandale d’État. Sous Emmanuel Macron, l’argent de la TVA a été détourné massivement du budget de l’État. Avant lui, de 2013 à 2018 par exemple, l’argent de la TVA allait quasiment à 100 % dans les poches de l’État. Les transferts vers la sécurité sociale ne représentaient que 5 à 10 % du produit total de la taxe : ainsi, pour 100 milliards de TVA récoltés, 5 à 10 milliards partaient vers la sécu. À partir de 2019, les transferts de TVA explosent. D’un coup, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), l’État se met à transférer 46 milliards vers la sécurité sociale, ce qui correspond à 26 % du produit de la TVA. Depuis cette date, les montants des transferts à la sécu n’ont fait que croître : 53 milliards en 2021, puis 57 milliards en 2022 et 58 milliards en 2024.
    La raison de ces transferts est tout aussi scandaleuse. Elle est révélée dès 2019 par la Cour des comptes, qui évoque dans son rapport sur les recettes fiscales de l’État « l’affectation aux administrations de sécurité sociale d’une nouvelle fraction importante de TVA, prenant principalement en charge le coût des baisses de cotisations sociales décidées en contrepartie de la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ». L’État français a donc fait porter à la sécurité sociale le poids d’une politique destinée aux grandes entreprises en la forçant à se priver de milliards d’euros à cause des exonérations de cotisations. Mais pour éviter l’implosion d’une sécurité sociale privée de cotisations, le gouvernement fait financer ces cadeaux aux entreprises par l’argent de la TVA. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Sébastien Delogu

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    Bravo ! Excellent !

    M. David Guiraud

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    L’argent issu de l’impôt le plus injuste est donc directement aspiré par l’État pour le redonner immédiatement au grand patronat. La conclusion est simple et sans appel : sous Emmanuel Macron, les gouvernements nous imposent une TVA sociale de 5 points de PIB, tous les ans, sans débat ni vote sur le sujet. Mais ce n’est pas tout. Nous avons parlé ici d’une TVA sociale de 60 milliards d’euros, mais il en manque presque le double en 2024, à savoir 115 milliards d’euros. Il y a donc encore plus de 50 milliards de TVA à retrouver, ce qui est fait dans ce texte, qui fait état d’un transfert de 53 milliards de TVA aux collectivités locales en 2024. Ils servent eux aussi à compenser des cadeaux fiscaux faits aux grandes entreprises avec la fin de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ainsi que la fin de la taxe d’habitation qui touchait, certes, en partie, la classe moyenne, mais surtout les Français les plus riches. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Danielle Brulebois

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    Elle touchait tous les ménages !

    M. David Guiraud

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    La conclusion est simple et sans appel : sous Emmanuel Macron, les gouvernements nous imposent depuis plusieurs années non pas une, mais deux TVA sociales, pour un montant de plus de 110 milliards d’euros en 2024. Il y a là un enseignement d’une importance capitale : sauf quand il s’agit des plus riches, notamment avec la fin de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) –⁠ j’y reviendrai –, les baisses d’impôts sous Emmanuel Macron n’existent pas. Ce ne sont que des mensonges. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Protestations sur les bancs des groupes EPR et Dem.) En effet, la taxe d’habitation, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ou les cotisations sociales qui ont fait l’objet d’exonérations massives ont toutes été compensées. Ces recettes fiscales n’ont pas disparu, elles ont été payées par les Français par le biais de l’impôt principal qui est la TVA.
    Par conséquent, il n’y a pas eu une baisse, mais une reconfiguration des impôts et donc de leur assiette, qui définit qui paie des impôts. C’est là le plus scandaleux, l’organisation du pillage qui explique à la fois le dépouillement de l’État et l’appauvrissement généralisé et la destruction de nos services publics : quasiment toutes les baisses d’impôts décidées par Emmanuel Macron ont été payées en réalité par un impôt sur la consommation de la masse des Français des classes populaires et moyennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. René Pilato

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    Exactement !

    M. David Guiraud

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    Quasiment toutes les baisses d’impôts à destination des multinationales et des plus riches ont été payées argent comptant par la masse des Français au moyen de l’impôt le plus injuste qui existe. Même la fin de la taxe sur l’audiovisuel public, plus connue sous le nom de redevance télé, que le gouvernement a présentée comme un petit coup de pouce pour le pouvoir d’achat des Français, a été compensée par l’argent de la TVA. Le pire, c’est que nous avons face à nous des dirigeants, comme le premier ministre Bayrou, qui osent évoquer l’idée d’une TVA sociale. Il faudrait pourtant dire une nouvelle TVA sociale, une troisième TVA sociale, pour faire encore partir notre argent en fumée dans des politiques qui ne ramènent rien de bon pour ceux qui sont dans le besoin et qui vampirisent tout au bénéfice de ceux qui vivent déjà dans l’abondance. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Comment s’étonner alors que notre société s’engouffre dans l’instabilité politique et sociale ? Comment peut-on encore rester les bras croisés et s’étonner que la colère dans le pays augmente aussi vite que les prix dans les outre-mer ?
    Pour justifier ce cambriolage destructeur, par lequel vous feriez passer Spaggiari ou Mesrine pour des amateurs, vous répétez partout : « vous comprenez, les plus riches font tenir debout la France, ils font tourner le pays en payant le plus d’impôts, bla bla bla… » Pourtant, la vérité est la suivante. D’abord, ce n’est pas l’impôt sur le revenu qui est la première source d’impôt en France, mais la TVA. Ensuite, les plus riches, on le sait, ont été bien épargnés par les impôts sous Emmanuel Macron. Ainsi, la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune en impôt sur la fortune immobilière (IFI) a entraîné une perte de recettes pour l’État de 4,5 milliards, selon un rapport publié par France Stratégie en 2023 ; l’instauration de la flat tax représente un coût de 1,8 milliard pour l’État selon le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2022.
    Surtout, même après ces baisses d’impôts ciblées sur les plus riches, l’infamie continue, puisqu’une note du Trésor de 2024 nous apprend que sur une année comme 2023, tous les Français ont payé plus d’impôts, sauf les plus riches. En 2023, l’impôt net moyen des 10 % les plus aisés a reculé de 0,1 % et leur taux d’imposition réel est passé de 17,5 % à 15,2 %. Pourquoi tout le monde fait-il un effort pendant que les 10 % les plus aisés restent sur le banc à regarder ? Les riches payent peut-être, dans l’absolu, plus d’impôt, mais c’est aussi eux qui bénéficient le plus des dispenses d’impôt, même à présent, après tous les cadeaux qu’on leur a faits. Je conjure les Français honnêtes qui m’écoutent de comprendre un fait budgétaire, mathématique : contrairement à ce qu’on leur répète à longueur de journée, à ce poison qu’on leur injecte en permanence dans les veines pour diviser et donc pour mieux régner, dans ce pays, il n’y a qu’un assistanat, et c’est celui des riches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Prenons deux exemples. La Cour des comptes nous dit que le crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile constitue la deuxième niche fiscale de l’État en 2024. L’État donne en effet de l’argent pour aider les familles qui emploient du personnel de ménage, notamment, ce qui coûte 6,7 milliards à l’État. Ce n’est pas une dépense inutile pour tous, car après tout, pourquoi ne pas aider les travailleurs, par exemple, à déclarer des personnels de ménage et à les régulariser ? Observez cependant comment partout, tout le temps, les plus riches sont favorisés et les plus modestes sont négligés. Pour ce qui est de ce crédit d’impôt, la Cour des comptes note que les 10 % des Français les plus riches reçoivent en moyenne de l’État 2 426 euros par an, soit presque deux smic, tandis que les foyers qui font partie des 10 % les plus pauvres reçoivent de l’État seulement 838 euros. Au total, l’aide de l’État pour les 10 % les plus riches s’élève à 1,1 milliard d’euros, tandis que pour les 10 % les plus pauvres elle ne dépasse pas les 400 millions d’euros. Ainsi, avec la deuxième niche fiscale de l’État, il aide trois fois plus les 10 % les plus riches qu’il n’aide les 10 % les plus pauvres. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Pour ce qui est de l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions de retraite, il constitue la troisième niche fiscale de l’État et coûte 4,8 milliards d’euros en 2024. Là aussi, on pourrait considérer qu’elle est utile si elle vient aux aides aux retraités les plus en difficulté. Mais, une fois encore, cette aide de l’État profite peu aux plus pauvres et beaucoup aux plus riches.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Vous n’êtes pas d’accord entre vous !

    M. David Guiraud

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    La Cour des comptes nous apprend que « le bénéfice par ménage est ainsi de moins de 8 euros par an pour les 30 % les moins aisés, contre plus de 900 euros par an pour les [10 % des ménages les] plus aisés » et que ces 10 % les plus aisés des bénéficiaires captent 1,4 milliard d’euros, soit 30 % du coût de cette dépense fiscale.
    Voilà le résultat de ce qui s’appelle une politique de classe, menée avec intensité et férocité à tous les niveaux de notre société.

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Il a raison !

    M. David Guiraud

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    C’est précisément parce qu’il s’agit d’une politique de classe que ce gouvernement qui veut sabrer toutes les dépenses publiques, qui s’en prend aux fonctionnaires, qui refuse d’investir dans la transition écologique, qui s’oppose à toute augmentation de salaires et des minima sociaux et qui laisse notre économie en souffrance, n’ira jamais chercher d’économies sur sa propre classe sociale, les grandes fortunes et les plus fortunés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Mathieu Lefèvre

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    Vous racontez n’importe quoi !

    M. David Guiraud

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    Évidemment, ce discours budgétaire constitue aussi un plaidoyer pour l’unité de notre peuple.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Vous êtes bien placé pour en parler !

    M. David Guiraud

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    En effet, nous sommes bien conscients qu’à mesure que les richesses nationales sont aspirées par le pouvoir en place, à mesure qu’elles diminuent, que les services publics s’effondrent, que les frustrations s’accumulent dans les cœurs faute de moyens et que la rancœur grandit dans les foyers, le racisme vient jouer son rôle, celui de désigner des coupables à portée de main, alors que le pouvoir est, lui, si lointain. Le racisme vient proposer à ceux qui ont l’impression que leurs vies leur échappent, à ceux qui ont l’impression de disparaître, d’exister à nouveau, mais en écrasant les autres.
    Nous proposons, en nous appuyant sur les faits budgétaires que j’ai présentés, non pas de vivre sans colère, mais de la canaliser et de la rediriger là où elle doit l’être, vers l’État et vers ceux qui nous écrasent. Bien sûr, il y a de la colère dans mes propos, mais comment pourrions-nous rester sages vu l’état de la France que l’on nous propose ? Quand bien même le gouffre entre les Français semble immense tant il a été creusé sans discontinuer par des responsables politiques et médiatiques aussi cyniques que besogneux, il y a bien quelque chose de commun à tous les Français : ce sont les puissants qui les harcèlent. Collègues, prenez conscience de la colère que votre politique crée, car l’humiliation est puissante et peut galvaniser des millions de gamins aux rêves subtilisés. Bien sûr, avec les œillères qui sont les vôtres, vous verrez cet appel à la paix sociale comme une perturbation mais, après tout, qui peut prétendre faire de la politique sans prendre position ?

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Excellent !

    M. David Guiraud

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    Nous connaissons vos méthodes. Ces derniers temps, vous dissimulez votre violence en parlant de nous et en vérité de millions de Français qui vous contestent comme d’une meute de chiens déchaînés, mais si la négociation avec vous ne peut porter que sur la longueur des chaînes de nos voisins, demandez-vous comment les Français ne finiront pas par vous mordre, si vous les traitez comme des chiens. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent.)

    M. le président

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    Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Je ne sais pas dans quel pays vous vivez, mais ce n’est pas le même que le mien. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Pour vous, ce sont les salons parisiens !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Le pays dans lequel je vis est un pays dans lequel les taux de TVA n’ont pas bougé depuis 2017 : ils s’élèvent à 5,5 %, 10 % et 20 %.

    M. Louis Boyard

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    Et l’inflation ?

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Ce n’est pas parce qu’il y a de l’inflation que les taux augmentent.

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    Mais le montant de la TVA, oui !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Quand vous payez une baguette de pain, la TVA sur la baguette de pain n’a pas augmenté.

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    Le montant de la TVA, si !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Ensuite, vous nous dites qu’il y a des niches fiscales pour les plus aisés sur la TVA. Il y a effectivement beaucoup de taux réduits. Je vous en citerai quelques-uns et je laisserai à la sagacité de l’Assemblée le soin de savoir si cela concerne les plus aisés, comme vous le soutenez. Il y a un taux réduit sur le logement social, sur la rénovation et les travaux d’entretien des bâtiments, notamment la rénovation énergétique (Exclamations sur les bancs du groupe RN), pour se rendre en Corse par ferry ou par avion, pour les billetteries sportives de clubs de toutes les villes, ou encore dans la restauration. Je ne vois pas en quoi ces taux réduits seraient des niches fiscales pour les plus aisés de notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Lorsque vous dites qu’il y a un détournement de TVA, on se pince. La TVA est un impôt prélevé sur les contribuables français qui finance des services publics pour les Français.

    M. René Pilato

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    Les Français savent que vous mentez !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    À vous écouter, il y aurait dans mon bureau une caissette remplie d’un argent caché que nous n’utiliserions pas et qui priverait les Français d’un service public.

    M. René Pilato

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    Prenez l’argent sur l’IR !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Ensuite, vous évoquez le crédit d’impôt services à la personne : je vous avoue ma perplexité.

    M. René Pilato

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    Les Français savent que vous leur mentez !

    M. le président

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    Laissez parler Mme la ministre !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    J’avais compris que ce crédit d’impôt était un bon outil pour créer du travail légal –⁠ et non du travail dit au noir – ainsi que pour aider nos personnes âgées à rester chez elles et nos familles à garder leurs enfants.
    Je l’ai dit publiquement ce matin : si le gouvernement, comme certains députés, souhaite examiner l’ensemble de ces mesures pour vérifier si elles sont bien calibrées et ajustées, il est hors de question que nous touchions au crédit d’impôt services à la personne, que cela concerne la garde d’enfants ou l’assistance aux personnes âgées. Je n’ai donc pas compris quel était votre projet.

    M. René Pilato

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    Vous n’avez rien compris ! On se demande pourquoi vous êtes là !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Vous non plus, vous n’avez pas très bien compris le sens de mes propos. Vous parlez de l’abattement fiscal de 10 % des retraités : là aussi, votre position est assez paradoxale. Cet abattement est plafonné à 4 321 euros par foyer, ce qui veut dire que si vos revenus dépassent 43 210 euros par an, l’abattement n’a plus aucun impact marginal sur votre réduction d’impôt. Certes, les personnes qui ont plus de 44 000 euros de revenus par an sont issues de la classe moyenne supérieure, mais elles ne sont pas milliardaires pour autant. L’abattement de 10 % pour les retraités ne doit donc pas être considéré comme une niche bénéficiant aux plus riches.
    Enfin, je voudrais rappeler à la représentation nationale ce qui a été fait en 2024 –⁠ cela a été coûteux, mais cela a été fait. Toutes les aides sociales ont été revalorisées de 4,6 % le 1er avril 2024. Il n’y a eu ni gel ni baisse des aides sociales. Les classes populaires et moyennes ne se sont pas appauvries. Les retraites ont été valorisées de 5,3 %.

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    C’est le montant de l’inflation !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Monsieur Guiraud, je ne sais pas ce qui s’est passé dans votre vie en 2024, mais manifestement, vous ignorez ce qui a été voté, vécu et demandé. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
    Je voulais remettre quelques points sur les « i », car tous ces mensonges maltraitent la réalité. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. René Pilato

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    On se demande pourquoi il y a plus de pauvres !

    M. le président

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    Nous en venons aux explications de vote.
    La parole est à Mme Félicie Gérard.

    Mme Félicie Gérard (HOR)

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    Comme chaque année, nous avons la charge d’approuver les comptes des années précédentes. Ce projet de loi n’est pas politique : il vise à dresser un constat et à arrêter les comptes de l’année 2024. C’est une exigence que nous connaissons bien dans nos entreprises, nos associations et nos collectivités.
    Comme chaque année, nous devons débattre de l’habituelle motion de rejet des groupes de gauche. Il faut le rappeler : ce projet de loi n’est pas un texte destiné à valider ou à sanctionner le contenu de la politique menée ; c’est un bilan comptable factuel.
    Cet après-midi, vous nous appelez donc à rejeter un état des lieux pourtant stratégique pour notre pays, puisqu’il engage notre crédibilité sur les marchés financiers internationaux. Son rejet fragiliserait un peu plus notre pays. Dans le contexte international actuel, nous n’avons vraiment pas besoin de cela.
    Cette motion de rejet ne propose et ne résout rien. Vous préférez, comme toujours, la posture au débat, en faisant d’un texte technique une bataille politique. Un jour, peut-être, sur la question des finances publiques, notre assemblée saura agir avec sérieux et responsabilité.

    Mme Marianne Maximi

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    Sans 49.3 ?

    Mme Félicie Gérard

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    Au groupe Horizons & indépendants, nous y travaillons sans relâche. C’est pourquoi nous voterons contre cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Pierre Bataille.

    M. Jean-Pierre Bataille (LIOT)

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    Ce projet de loi d’approbation des comptes devait être un moment de vérité budgétaire, mais il ne l’est pas. Encore une fois, nous débattons d’un budget que le Parlement n’a pas adopté et qui lui a été imposé par un énième recours au 49.3. Or, quand le recours au 49.3 n’est plus l’exception mais la règle, cela affaiblit profondément notre démocratie parlementaire.
    Madame la ministre, même si vous n’en êtes pas comptable en termes de temporalité, reconnaissez que l’exécution budgétaire 2024 n’est pas simplement éloignée des prévisions : elle relève d’une dérive structurelle, causée par un pilotage budgétaire défaillant et une perte de maîtrise dans la gestion de nos finances publiques.
    Le déficit se creuse toujours plus et la dette s’envole : ce sont les symptômes d’une gouvernance en panne. Les crédits sont annulés en cours d’année, les engagements ne sont pas consommés, les restes à payer explosent. L’État promet sans tenir et il annonce sans exécuter. Ce texte ne propose aucune réforme, aucune remise en question sincère. Qu’en sera-t-il en 2025 ?
    Depuis trois ans, l’Assemblée rejette les projets d’approbation des comptes. Ce n’est pas une posture, mais un signal politique, un acte de responsabilité face à une méthode devenue opaque qui relègue la représentation nationale au second rang.
    C’est pourquoi le groupe LIOT s’opposera à ce texte. Nous refusons d’avaliser ce que nous n’avons ni débattu ni décidé. Nous défendons un Parlement représentatif, qui contrôle et qui éclaire. S’agissant de la motion de rejet préalable, chaque collègue reste libre de son vote, conformément au principe qu’incarne la lettre « L » –⁠ pour liberté – qui figure dans le nom de notre groupe. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LIOT.)

    M. le président

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    La parole est à M. Emmanuel Maurel.

    M. Emmanuel Maurel (GDR)

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    Il faut tordre le cou à l’idée selon laquelle il ne s’agirait que d’un débat technique. Le bloc central essaye de nous le faire croire, mais c’est un débat politique qui porte à la fois sur la méthode et sur le contenu du budget.

    Mme Danielle Brulebois

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    Si, c’est un débat technique !

    M. Emmanuel Maurel

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    Sur la méthode, comme vient de le rappeler le collègue Bataille, ce budget n’a été adopté par personne.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Exactement !

    M. Emmanuel Maurel

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    Sur le contenu, c’est le bilan budgétaire le plus désastreux du XXIe siècle : depuis l’an 2000, il n’y a jamais eu une telle distorsion entre les prévisions de recettes et les recettes réelles, et c’est vous –⁠ et vous seuls – qui en êtes responsables !
    Madame la ministre, chaque année, la loi d’approbation des comptes est rejetée. Cela devrait vous interpeller et vous inciter à davantage de modestie et d’humilité dans vos argumentaires. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Quand on s’enorgueillit d’être les champions du sérieux budgétaire et qu’on est responsable de ce dérapage inédit, pour ne pas dire incroyable, il faut se remettre en cause –⁠ mais ce n’est manifestement pas votre spécialité.
    Ce qui me contrarie, c’est d’abord le fait que vous allez lancer à nouveau la chasse à la dépense, alors que nous sommes très nombreux sur ces bancs à vous démontrer qu’il s’agit d’un problème de recettes et que l’évolution des dépenses est la même en France qu’en Europe. (M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit.)

    M. Mathieu Lefèvre

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    Mettez-vous d’accord entre vous !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Non !

    M. Emmanuel Maurel

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    Si, madame la ministre –⁠ je pense notamment aux dépenses de l’enseignement supérieur, de la défense, de la justice et de l’éducation. La réalité, c’est que vous n’arrivez pas à admettre ce problème très simple.
    Ensuite, je suis aussi contrarié par l’argument, devenu quasiment un gimmick, qui consiste à dire : « C’est mieux que si c’était pire. Nous nous attendions à un déficit de 6 %, mais celui-ci ne s’élève qu’à 5,8 % : il faut s’en réjouir. » Eh bien non, il ne faut pas s’en réjouir.
    Contrairement à d’autres groupes, nous votons la motion de rejet quand nous nous opposons au texte qui est présenté. Nous voterons donc la motion. (M. le président de la commission des finances et M. Benjamin Lucas-Lundy applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Fayssat.

    M. Olivier Fayssat (UDR)

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    J’ai souvent l’occasion de m’exprimer sur les motions de rejet préalable de la France insoumise et de l’extrême gauche en général. D’habitude, je ne dissimule pas notre exaspération face à ce refus du débat, mais il arrive parfois que le rejet du texte soit prévisible. C’est le cas aujourd’hui, notamment en raison des résultats absolument consternants du budget.
    Si l’on y ajoute l’absence de conséquences de refus du budget, rien ne s’oppose à ce que l’UDR, en responsabilité, vote cette motion de rejet qui nous évitera de perdre du temps. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Matthias Renault.

    M. Matthias Renault (RN)

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    Quelques éléments me surprennent dans la prise de parole de notre collègue de la France insoumise. D’abord, sa diatribe anti-TVA et anti-impôts : c’est assez nouveau de la part de LFI. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Puisque vous défendez désormais cette position, il faudra voter nos amendements qui proposent, chaque année, de baisser la TVA sur les énergies et les produits de première nécessité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) C’était mon premier point, qui portait sur la colonne « recettes ».
    Passons maintenant à la colonne « dépenses ». Vous appelez à augmenter les dépenses publiques partout et tout le temps –⁠ on ne sait pas très bien jusqu’où cela va aller. Voulez-vous revenir au communisme, à la politique économique de l’URSS ? Je rappelle que les dépenses publiques soviétiques rapportées au PIB –⁠ 50 % – étaient moins élevées que chez nous en 2025 –⁠ 57 %. En outre, l’URSS était moins endettée que la France.

    Mme Eva Sas

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    L’URSS n’existe plus !

    M. Matthias Renault

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    L’année 2024 a été celle de la catastrophe financière, avec 169 milliards d’euros de déficit public et 3 300 milliards d’euros de dette publique. La Macronie, Bruno Le Maire en tête, nous a expliqué que c’était la faute du covid et de la guerre en Ukraine, mais nous sommes le plus mauvais élève de l’Europe, avec un déficit s’élevant à 5,8 % du PIB. Ensuite viennent la Slovaquie –⁠ 5,3 % – et l’Autriche –⁠ 4,7 %. La moyenne de la zone euro s’élève à 3,1 %.
    Il y a même des pays qui se payent le luxe d’avoir un excédent budgétaire – l’Irlande, Chypre, la Grèce, le Luxembourg et le Portugal. Même l’Italie, ancien plus mauvais élève, a complètement redressé la barre. Alors que son déficit s’élevait à 7,2 % du PIB en 2023, l’Italie de Giorgia Meloni est passée à 3,4 % en 2025, ce qui a permis une baisse d’impôts de 30 milliards d’euros.
    Tous les pays européens, que leur gouvernement soit de gauche, du centre, de droite ou bien nationaliste, font mieux que la France macroniste. Bien évidemment, nous voterons cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. David Amiel.

    M. David Amiel (EPR)

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    Comme chaque année, nous sommes rassemblés pour le grand théâtre du vote de la loi de règlement. Vous êtes tellement obsédés par l’idée de tout rejeter que vous en venez à déchirer ce qui n’est qu’une simple photographie destinée à nos administrations.

    M. René Pilato

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    Elle n’est pas belle, la photographie !

    M. David Amiel

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    Nous avons passé un cap avec la dénonciation de hausses de TVA imaginaires par la France insoumise. La seule hausse de TVA qui a eu lieu dans l’histoire récente, c’est celle qui a été faite sous le mandat de François Hollande, par le Parti socialiste. Depuis, il n’y en a eu aucune. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
    Le rejet de cette loi de règlement serait encore plus absurde cette année, puisque jamais un budget n’a été autant scruté par notre assemblée. Pendant de longs mois, une commission d’enquête transpartisane, présidée par Éric Coquerel et corapportée par Éric Ciotti et Mathieu Lefèvre, s’est réunie au sein de la commission des finances pour établir la raison des écarts par rapport aux prévisions.
    Ses conclusions sont limpides. Première conclusion : « Les écarts résultent principalement d’une hausse des recettes des prélèvements obligatoires plus faible que prévu. » Exit donc les théories complotistes de M. Guiraud et la théorie des dépenses dissimulées.
    Deuxième conclusion : « Des écarts à la prévision qui s’expliquent en grande partie par des raisons techniques. » Exit donc la théorie de l’erreur de politique économique qu’on nous a abondamment servie.
    Troisième conclusion : « Un effort en réponse portant majoritairement sur les dépenses de l’État avec un effort de plus de 30 milliards d’euros. » Exit donc la théorie de l’impuissance publique qu’on nous a ressortie à l’instant.
    En réalité, les actions courageuses de Bruno Le Maire et de notre collègue Thomas Cazenave ont permis de limiter le déficit à 5,8 % du PIB au lieu des 6,1 % prévus. Il faudra encore du courage pour continuer à réduire ce déficit. C’est probablement pour cela que certains tentent de déchirer cette copie budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Gabrielle Cathala.

    Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP)

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    Deux ans de 49.3 sur tous les budgets, dont celui de M. Bayrou, avec la bénédiction de Mme Le Pen, ont contraint notre pays à l’austérité la plus violente depuis trente ans. Plus de 1 000 milliards d’euros de dette supplémentaire en sept ans, estimation mensongère du déficit, explosion des inégalités et paupérisation des services publics : votre politique budgétaire est un échec total. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Pire, sans aucune légitimité, vous annoncez déjà 40 milliards d’économies pour 2026 et vous souhaitez instaurer la TVA sociale –⁠ ou plutôt antisociale, devrais-je dire. Rappelons-le : la TVA est l’impôt le plus injuste et la TVA sociale existe déjà, car la TVA compense déjà les baisses de cotisations accordées aux entreprises, soit 57 milliards d’euros par an payés par tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Personne ne sera étonné que seuls le Medef et Gilbert Cette, président d’un Conseil d’orientation des retraites à la solde d’Emmanuel Macron, dont la mission est de faire travailler les Français jusqu’à 66 ans et demi, soutiennent cette mesure.
    C’est toujours la même musique : prendre dans les poches des plus modestes pour faire, sur leur dos, des cadeaux aux plus fortunés et aux grandes entreprises. Vous cherchez à faire 40 milliards d’économies et vous voulez instaurer une TVA antisociale, alors que, d’après la Cour des comptes, les réformes fiscales d’Emmanuel Macron conduisent à un manque à gagner annuel de 62 milliards pour l’État, sans compter les 200 milliards de cadeaux accordés aux grandes entreprises sans contrepartie.
    L’État social coule, car il est privé des recettes qui lui permettraient de financer correctement ses services publics. Pendant ce temps, la croisière s’amuse. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    La croisière s’amuse à Gaza !

    Mme Gabrielle Cathala

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    Les groupes du CAC 40 ont distribué un montant record de 98 milliards d’euros à leurs actionnaires en 2024 et la fortune des 500 Français les plus riches a doublé en sept ans. Voilà un bilan certainement très satisfaisant pour vous, puisque votre gouvernement est au seul service d’une minorité de Français. Toutefois, pour la grande majorité d’entre eux, ce bilan est profondément injuste. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Ce bilan rend votre proposition de TVA antisociale d’autant plus violente, tant pour les 11 millions de Français qui vivent sous le seuil de pauvreté que pour les quelque 35 % d’entre eux qui ne peuvent manger trois repas par jour ou se privent pour nourrir leurs enfants. Il n’est donc pas question pour nous de valider votre politique budgétaire mortifère. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Baumel.

    M. Laurent Baumel (SOC)

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    Le groupe socialiste votera lui aussi en faveur de cette motion de rejet. Il le fera parce qu’il est défavorable à ce projet de loi d’approbation des comptes –⁠ point qu’il faut désormais préciser.
    Nous avons entendu la thèse selon laquelle ce projet de loi ne serait qu’une photographie appelant approbation automatique. C’est oublier la latitude accordée au gouvernement quant à la mise en œuvre des dépenses votées par le Parlement. L’examen du présent texte nous offre la possibilité d’exercer un contrôle, certes symbolique mais aussi politique, sur le degré de sous-exécution des crédits votés par le Parlement. En l’occurrence, nous désapprouvons les substantiels annulations et gels intervenus au cours l’année 2024, qui ont aggravé la logique initiale du budget pour cette même année.
    Plus fondamentalement, nous ne sommes pas des commissaires aux comptes et il ne serait guère conséquent d’approuver l’exécution d’un budget dont nous désapprouvons la logique même. Or nous désapprouvons nous aussi l’obstination des gouvernements macronistes à ne vouloir traiter la question des déficits qu’à travers le prisme de la baisse des dépenses publiques, sans jamais remettre en question les totems macronistes de la défiscalisation dont bénéficient les plus riches.
    En votant contre cette loi, nous marquons donc notre désaccord avec cette logique et avec un bloc central incapable de concevoir de véritables concessions en vue de construire un compromis budgétaire. Ce vote constitue donc un signal que le groupe socialiste envoie à celles et ceux qui, comme vous, madame la ministre, seront chargés de préparer et de faire adopter le futur texte budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Thierry Liger.

    M. Thierry Liger (DR)

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    Depuis de nombreuses années, la France s’enfonce dans un marasme financier sans précédent. L’année 2024 n’a pas fait exception à la règle ; elle a même marqué un dérapage historique des finances publiques hors période de crise. La loi de finances initiale prévoyait un déficit de 4,4 % du PIB, lequel déficit s’est finalement établi à 5,8 %, soit un écart de près de 50 milliards d’euros. La dette publique dépasse aujourd’hui les 3 300 milliards d’euros et nos dépenses publiques représentent 56,4 % du PIB. La situation française contraste avec celle de certains de nos partenaires européens, qui ont commencé à réduire leur déficit et leur dette. En effet, ces chiffres font de la France le pays européen qui s’est le plus endetté depuis dix ans. Pour la première fois de son histoire, notre pays a d’ailleurs emprunté à des taux supérieurs à ceux de la Grèce.
    Sur le plan budgétaire, l’année 2024 est donc la pire année que la France ait connue depuis 2017, ce qui a conduit la Commission européenne à la placer en procédure de déficit excessif. Si le déclenchement de cette procédure n’implique pas nécessairement la prise de sanctions, il rend impératif un travail renforcé pour enrayer la spirale de l’endettement.
    Mes chers collègues, cette situation préoccupante exige de notre part rigueur et responsabilité. Il est important que la gestion des comptes 2024, marquée par une aggravation inédite du déficit et par le niveau d’endettement qu’elle a précipité, puisse être débattue au sein de cet hémicycle. Les Français attendent de nous des réponses et non des manœuvres politiciennes, bien éloignées de leurs préoccupations et de leur quotidien. Les députés de la Droite républicaine se sont constamment opposés à la gestion budgétaire des gouvernements qui se sont succédé depuis sept ans, dénonçant des trajectoires budgétaires irréalistes et peu ambitieuses.

    M. Pierre Cordier

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    Il a raison !

    M. Thierry Liger

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    Face aux résultats de l’exercice 2024, nous réaffirmons notre désapprobation d’une politique qui s’est montrée incapable d’assainir durablement nos finances publiques. Cependant, en responsabilité, nous avons toujours privilégié le débat démocratique. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Pierre Cordier

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    Nous voulons débattre !

    M. Thierry Liger

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    Aussi les députés de la Droite républicaine voteront-ils contre cette motion de rejet. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Tristan Lahais.

    M. Tristan Lahais (EcoS)

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    Je souhaite d’abord réagir aux propos qui viennent d’être tenus à propos de la prétendue manœuvre que constituerait, de la part de la gauche, cette motion de rejet préalable. Les choses sont en fait assez simples : nous sommes contre ce texte et votons par conséquent cette motion de rejet –⁠ je ne crois pas que vous puissiez vous prévaloir de la même cohérence après les dernières semaines qui se sont écoulées à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Emmanuel Maurel applaudit également.)
    Les collègues du bloc central ont affirmé que ce texte ne serait qu’une photographie des comptes publics 2024, dont nous devrions prendre acte. Comme élu local, je sais bien que l’approbation du compte administratif ne vaut pas approbation du budget. Toutefois, le vote sur le présent texte renvoie à l’approbation des conditions d’adoption du budget 2024, de son déploiement et de ses résultats ainsi qu’à votre rapport à la démocratie et aux textes budgétaires. Il ne semble donc pas inconséquent de notre part –⁠ au contraire ! – de réaffirmer notre souhait que le Parlement, et singulièrement l’Assemblée nationale, soit associé plus étroitement au travail budgétaire.
    Nous avons trois raisons de voter cette motion de rejet préalable. Notre premier désaccord porte sur la sincérité d’un exercice comptable…

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Il y a eu une commission d’enquête !

    M. Tristan Lahais

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    …marqué par un écart inédit entre la prévision et la réalisation. Le deuxième tient à la démocratie :…

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Parlons-en, de la démocratie !

    M. Tristan Lahais

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    …alors que vous aviez l’occasion de susciter une nouvelle discussion budgétaire au Parlement, vous ne l’avez pas fait, en dépit de nos demandes répétées. Le troisième est un désaccord de fond avec les résultats d’une politique de l’offre qui coûte cher…

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Parce que la politique de la demande ne coûte pas cher, peut-être ?

    M. Tristan Lahais

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    …en exonérations de cotisations sociales et autres aides aux entreprises, asséchant les sources de financement du service public et de la protection sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

    M. le président

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    La parole est à M. Emmanuel Mandon.

    M. Emmanuel Mandon (Dem)

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    Depuis le début de l’examen de ce projet de loi en commission, nous ressentons une curieuse impression de déjà-vu :…

    M. Antoine Léaument

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    C’est vrai !

    M. Emmanuel Mandon

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    …une fois de plus, nous sommes confrontés à du flou et à un décalage par rapport à ce que vivent nos compatriotes. Or si nous sommes là, c’est pour nous préoccuper du véritable enjeu, examiner les comptes budgétaires,…

    M. Emmanuel Maurel

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    Ils sont mauvais !

    M. Emmanuel Mandon

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    …prendre acte du résultat de l’exercice, poser des questions sur l’exécution en dépenses comme en recettes, bref, exercer notre fonction de contrôle.
    Au lieu de quoi, en commission des finances, nous avons assisté à une version assez peu sophistiquée du jeu de massacre. On a refait le match –⁠ bravo !

    M. Emmanuel Maurel

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    Il n’y a pas eu de match !

    M. Emmanuel Mandon

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    Au gré des présences et des votes, une série de demandes de rapport a été accrochée au squelette de ce projet de loi, comme si la qualité du contrôle dépendait de la multiplication du nombre de documents produits par le ministère des finances.

    M. Sylvain Maillard

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    Il a raison !

    M. Emmanuel Mandon

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    Si la Constitution ne nous obligeait pas à prendre le texte initial comme base de nos discussions, nous serions ainsi confrontés à une sorte de projet zombie,…

    M. Antoine Léaument

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    C’est vous, les zombies ! (L’orateur mime un zombie.)

    M. Emmanuel Mandon

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    …dont tous les articles initiaux auraient disparu au profit de dizaines de demandes de rapport. Est-ce bien sérieux ?
    Ce projet de loi fournit une photographie exacte de la situation, constatée selon les procédures normales et certifiée par la Cour des comptes. Voter en faveur de ce texte revient à signifier qu’il rend compte avec exactitude de l’état définitif de l’exécution budgétaire pour 2024 et qu’il répond aux exigences imposées par la loi organique relative aux lois de finances, ni plus ni moins.
    En déposant une énième motion de rejet, nos collègues de la France insoumise suggèrent que les chiffres auraient été maquillés (M. Nicolas Sansu s’exclame), que la Cour des comptes les aurait certifiés à tort et que les travaux du Printemps de l’évaluation dans lesquels nous nous impliquons collectivement depuis un moins n’auraient aucune valeur. Vous l’aurez compris, nous tenons au débat et nous voterons contre la motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    Je mets aux voix la motion de rejet préalable.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        230
            Nombre de suffrages exprimés                229
            Majorité absolue                        115
                    Pour l’adoption                145
                    Contre                84

    (La motion de rejet préalable est adoptée.)

    M. le président

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    En conséquence, le projet de loi est rejeté. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

    M. le président

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    La séance est reprise.

    4. Approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2024

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant approbation des comptes de la sécurité sociale pour l’année 2024 (nos 1456, 1491, 1523).
    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    En application de la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le gouvernement a l’obligation de présenter un projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) –⁠ c’est-à-dire l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et le fonds de solidarité vieillesse (FSV) – dont l’équivalent, sur le périmètre de l’État, est le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes. Ce projet de loi participe à l’effort de transparence de nos comptes sociaux et avec ses nombreuses annexes, il renforce l’information du Parlement en la matière. Aucun projet de loi d’approbation des comptes n’a pour le moment été adopté, les exercices 2022 et 2023 ayant été rejetés. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de ce rejet alors que nous avons pour objectif commun de faire preuve de transparence.
    L’année 2024 a été marquée par l’effet retard de l’inflation : quand celle-ci redevient normale et repasse sous les 2 %, les recettes cessent d’être tirées par elle, mais les dépenses restent élevées en raison des revalorisations de prestations fondées sur l’inflation passée. Le ralentissement salutaire de l’inflation, en 2024, n’a donc pas été favorable au rétablissement des comptes sociaux. Après trois années de baisse continue entre 2021 et 2023, le déficit de la sécurité sociale est reparti à la hausse en 2024 pour atteindre 15,3 milliards d’euros, soit 0,5 point de PIB. Cette dégradation des comptes sociaux, que le gouvernement avait anticipée, est cependant inférieure à la prévision inscrite dans la partie rectificative de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2025, en raison de recettes plus élevées et de dépenses mieux maîtrisées.
    Le déficit continuera à croître en 2025 et pourrait atteindre, si nous ne faisons rien, 21,9 milliards d’euros selon la prévision du rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), ce qui est proche des 22,1 milliards d’euros que nous avons inscrits dans la LFSS pour 2025. En 2028, toujours à situation constante, le déficit, porté par la dynamique des dépenses de santé et des dépenses de pensions, devrait même atteindre 22 milliards pour l’ensemble de la sécurité sociale.
    Parmi les différentes branches, la dynamique de dépense est variable : elle est très forte pour la branche maladie et la branche autonomie, forte pour la branche vieillesse et faible pour les branches famille et accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Depuis la crise sanitaire et le Ségur de la santé, les dépenses sous Ondam –⁠ objectif national de dépenses d’assurance maladie – ont ainsi progressé pour atteindre 256,4 milliards d’euros contre 200 milliards en 2019, soit une hausse de 56,4 milliards.
    Le résultat constaté en 2024 est légèrement inférieur à l’objectif budgétaire rectifié par la LFSS pour 2025, mais il reste supérieur à l’objectif qui avait été fixé en texte initial. Contrairement aux années récentes, le dépassement de l’Ondam n’est pas imputable à des événements exceptionnels. Cette surexécution concerne principalement les dépenses de soins de ville. Les dépenses les plus dynamiques sont la prise en charge des cotisations d’une partie des professionnels de santé, les indemnités journalières, les dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux ainsi que les honoraires des personnels paramédicaux et ceux des médecins spécialistes.
    La branche AT-MP a quant à elle été régulièrement excédentaire sur la dernière décennie. La dynamique de cette branche reste soutenue : ses dépenses sont tirées par des prestations comme les indemnités journalières, qui ont augmenté de 8,6 % en 2024, ou les rentes d’incapacité permanente.
    En 2024, la dynamique des dépenses de retraite est restée forte : elles ont augmenté de 5 points en volume. Le solde des régimes de base de la branche vieillesse et du fonds de solidarité vieillesse se dégrade fortement, puisque le déficit de l’ensemble est passé de 1,4 milliard en 2023 à 4,5 milliards en 2024. La revalorisation des pensions –⁠ de 5,3 % – intervenue au 1er janvier 2024 contribue pour 60 à 75 % à l’augmentation des dépenses de retraite ; les comptes de l’année 2024 subissent clairement le poids de cette revalorisation, qui a coûté à elle seule environ 15 milliards d’euros.
    Quant à la branche autonomie, elle enregistre un excédent, mais ses dépenses progressent rapidement –⁠ elles ont augmenté de 6,2 % en 2024 – et vont continuer à progresser en 2025. Enfin, si la branche famille est excédentaire depuis 2018, son équilibre est structurellement soutenu par la réduction du nombre de naissances qui se diffuse progressivement à l’ensemble des dépenses. Ni l’excédent de 2024 ni celui, réduit de moitié, de 2025, ne sont de bonnes nouvelles : cet effet volume est positif pour le solde, mais très inquiétant pour notre pays, et le gouvernement entend y répondre avec le plan Démographique 2050.
    Je sais que la non-certification des comptes de la branche famille par la Cour des comptes est une source de préoccupation permanente et importante pour tous. Les incertitudes sur la fiabilité des données, notamment en ce qui concerne le calcul du RSA et de la prime d’activité, ne sont pas normales. Nous sommes attentifs à progresser sur ces aspects, notamment grâce au préremplissage automatique des déclarations de ressources trimestrielles, instauré depuis le 1er mars 2025 –⁠ je sais que Catherine Vautrin et Amélie de Montchalin y veillent très sérieusement.
    Je terminerai en évoquant la dette sociale. La Cour des comptes a tiré il y a quelques semaines le signal d’alarme, le premier président évoquant même un risque de crise de liquidité pour l’Urssaf Caisse nationale. Les souplesses de gestion qui ont été introduites notamment par la LFSS pour 2025 sont certes précieuses, mais elles ne peuvent pas répondre à elles seules à un tel risque. Avec de la dette de court terme, l’Urssaf ne pourra financer sans risque une dette sociale qui continuerait à croître chaque année. Si c’était nécessaire, la situation difficile de l’Urssaf Caisse nationale et l’alerte lancée par la Cour des comptes nous rappellent une exigence fondamentale : il faut ramener à l’équilibre les comptes de la sécurité sociale, qui n’ont pas vocation à être financés par de l’endettement, donc par les générations futures.
    Nous célébrerons les 80 ans de la sécurité sociale au mois d’octobre. Fille de la Résistance et de la crise des années trente, cette grande institution sociale a permis de sécuriser notre économie et notre société. Projet politique, la sécu a fait de la France une démocratie accomplie. Face à la dégradation des comptes sociaux, nous ne pouvons nous comporter en simples consommateurs dotés d’un droit de tirage. La tâche de notre génération est d’assurer un financement soutenable de notre système de protection sociale, pour nous-mêmes et pour les jeunes générations. Les fondateurs de la sécurité sociale avaient devant eux, sans le savoir, au moins deux facteurs clés de succès : une croissance élevée et un bond démographique, auxquels j’ajouterai des gains de productivité importants. Nous devons garantir son financement dans un monde fini, marqué par une croissance bien plus faible et par une démographie –⁠ pour l’instant – en berne.
    Exercice budgétaire après exercice budgétaire, le risque est de ne traiter que les paramètres du moment en accumulant globalement des déficits et de la dette. Le premier ministre a présenté les enjeux de la situation le 27 mai dernier : le PLF et le PLFSS pour 2026 devront contribuer à redresser les finances publiques, mais nous devrons aussi mener, dans le même temps, des réformes beaucoup plus structurantes pour que notre pays retrouve de la force productive et contributive.
    Les travaux conduits ici, au Parlement, mais aussi dans le cadre de la Commission des comptes de la sécurité sociale et au sein de trois Hauts Conseils du champ social, doivent nous permettre de dessiner un chemin commun pour revenir à l’équilibre en 2029. Par deux fois, le Parlement a refusé l’obstacle en rejetant les deux premiers projets de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale en 2022 et 2023. Alors que nous abordons six mois décisifs, je pense qu’un vote négatif, qui pourrait constituer une solution de facilité, ne serait pas tout à fait à la hauteur de la situation.

    M. Yannick Monnet

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    Je pense que nous allons tout de même voter contre !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics

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    Je souhaite brièvement mettre en lumière quelques éléments complémentaires par rapport à ce qui vient d’être dit par Astrid Panosyan-Bouvet. Vous le savez, ce texte est une nouveauté introduite par la loi organique de mars 2022, qui a voulu transposer au champ social le modèle du projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’État, afin que le Parlement puisse approuver les comptes de l’année passée avant d’examiner le projet de loi de financement de l’année à venir.
    Cette loi visait, je le rappelle, à renforcer la transparence de nos comptes sociaux et à approfondir le contrôle parlementaire, en s’appuyant notamment sur de nouveaux outils d’évaluation et des indicateurs de performance. Or force est de constater que cet objectif reste inachevé puisqu’à ce jour, aucune loi d’approbation n’a encore été adoptée : les projets relatifs aux exercices 2022 et 2023 ont, vous le savez, été rejetés. Je souhaite qu’il en aille différemment cette année, car approuver les comptes n’est pas donner un blanc-seing à la gestion passée : c’est plutôt reconnaître leur sincérité et leur transparence. C’est l’esprit de ce projet de loi et des quelque 600 pages d’annexes qui l’accompagnent –⁠ le fait qu’il y ait 600 pages ne signifie rien en soi, mais on trouve dans ce document des éléments très clairs et très complets sur l’état des comptes.
    Le constat qu’Astrid Panosyan-Bouvet vient de dresser est clair et vous le connaissez : le solde des régimes obligatoires de base et du fonds de solidarité vieillesse s’établit à 15,3 milliards d’euros de déficit en 2024, soit un peu moins, certes, que les 18 milliards anticipés, mais nettement plus que la trajectoire votée en décembre dernier, qui prévoyait un déficit de 10 milliards.
    La détérioration du solde est le résultat d’une mécanique implacable : les recettes, élastiques à l’inflation et aux salaires, ont commencé à ralentir en 2024, sans que les dépenses ne s’ajustent. En 2023, l’inflation avait contribué positivement aux recettes, en particulier grâce à la revalorisation du smic et à son impact sur les cotisations. En 2024, ce même mécanisme a joué à l’envers : les dépenses indexées sur l’inflation de l’année précédente sont, du fait des mesures de revalorisation et de la progression des volumes, restées plus dynamiques. En un mot, la dynamique de dépenses n’a pas été ajustée à celle des recettes.
    Quelques chiffres en témoignent : les recettes ont augmenté de 4,6 %, tandis que les dépenses ont progressé de 5,3 %. Il en résulte ce déficit de 15 milliards qui marque une rupture nette, puisque le déficit, qui s’était certes creusé en 2021 –⁠ il s’établissait alors à 24 milliards –, s’était largement résorbé en 2023 –⁠ il avait été réduit à 10 milliards. L’amélioration des comptes en 2022 et 2023 était due pour une large part à l’extinction progressive des dépenses exceptionnelles liées au covid et aux effets de l’inflation ; or ces éléments n’ont pas perduré en 2024.
    Il nous faut donc désormais aller beaucoup plus loin. Rétablir les comptes de la sécurité sociale et, avec eux, nos comptes publics dans leur ensemble, nécessitera des mesures de court, moyen et long terme pour en retrouver la maîtrise. C’est un enjeu de souveraineté, mais aussi d’équité intergénérationnelle, puisque nul n’avait imaginé, en 1945, que notre protection sociale serait génératrice de dette, ce qui est d’autant plus inquiétant dans le contexte démographique qui nous attend dans la prochaine décennie.
    C’est aussi un enjeu d’efficience, car la dette publique et la dette sociale ont un coût. Autant le dire tout de suite : avec une dette publique de plus de 115 % du PIB et des charges d’intérêt de plus de 60 milliards d’euros, je ne crois pas que la solution pour rétablir nos comptes passe par des transferts de charges entre sous-secteurs ou entre la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) et l’Urssaf Caisse nationale, ni par une hausse des recettes. Nous payons déjà très cher le financement de la dette. Aucun mécanisme comptable ne saurait masquer à court terme cette réalité.
    Par ailleurs, certains disent qu’il suffirait de transférer une part de la dette à la Cades. Dois-je rappeler qu’en 2024, les excédents de la Cades, qui correspondent à l’amortissement de la dette des régimes obligatoires de base, ont tout juste compensé le déficit courant de ces régimes et du FSV ? C’est là un motif de très grande préoccupation et la raison pour laquelle je ne crois pas à la solution facile d’un transfert du déficit courant à la Cades en l’absence de mesures de redressement crédibles. Ce serait une fuite en avant irresponsable et insoutenable, par définition dangereuse.
    Nous devons donc reconnaître lucidement que les comptes de 2024 agissent comme un révélateur : ils mettent au jour un déficit structurel croissant, de l’ordre d’un demi-point de PIB, et ce malgré des recettes toujours dynamiques. En effet, j’y insiste, les recettes demeurent dynamiques : dans de nombreux cas, elles progressent à un rythme supérieur à celui de la croissance et de l’inflation.
    La perspective à moyen terme est très préoccupante. Ce projet de loi d’approbation ne le dit pas explicitement, mais l’analyse des trajectoires le rend évident. À législation constante, vous le savez, le déficit social continuerait de se creuser, pour atteindre plus de 24 milliards d’euros en 2028. S’ajouteraient alors des déficits courants cumulés, qui fragiliseraient durablement notre capacité à financer la protection sociale.
    Il est donc urgent d’agir, avec détermination, responsabilité et esprit de justice. Il nous appartient de faire des choix libres, comme une nation qui regarde en face ce qu’elle doit faire pour assurer la solidité de son modèle social, sans le condamner à l’accumulation de dettes qui sont certes invisibles aujourd’hui, mais constituent un renoncement silencieux à ce qui a fondé notre pacte républicain.
    Pour finir, je souhaite revenir sur l’enjeu de la certification des comptes de la branche famille. J’ai eu l’occasion de le dire ici à plusieurs reprises en répondant à des questions au gouvernement, cette situation est pour nous très insatisfaisante ; elle nous préoccupe autant que vous. Non, le gouvernement ne se satisfait pas de ces 6,3 milliards d’euros de risque résiduel, mêlant indus et rappels. Cela reflète des incertitudes persistantes quant à la fiabilité des données, notamment celles qui servent au calcul du RSA et de la prime d’activité, versés par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) pour le compte de l’État et des départements. Il s’agit là d’un enjeu majeur de justice sociale, de confiance dans notre système social et de bonne gestion des deniers publics.
    Vous le savez, nous avons pris des mesures fortes. En particulier, le préremplissage automatique des ressources, généralisé depuis le 1er mars 2025, est un levier majeur pour fiabiliser les données, pour simplifier les démarches des allocataires, pour lutter à la fois contre la fraude et le non-recours. Les effets de cette réforme, qui correspond, je le rappelle, à un engagement du président de la République concernant la solidarité à la source, ne se verront évidemment que dans les prochains exercices.
    De même, le plan de lutte contre les fraudes aux finances publiques lancé par le gouvernement en mai 2023, lorsque Gabriel Attal était ministre des comptes publics, commence à porter ses fruits. En 2024, l’Urssaf et l’ensemble des caisses de sécurité sociale ont fait progresser de 30 % le volume de fraudes détectées, pour un total record de 2,9 milliards d’euros, soit près de deux fois plus qu’en 2019 –⁠ et la branche famille y a largement contribué.
    Mais il faut aller plus loin. Nous devons poursuivre la modernisation des outils de gestion, renforcer les échanges de données entre administrations et accompagner les usagers comme les professionnels dans un objectif commun : garantir que chaque euro de la sécurité sociale soit versé à bon droit et au bon bénéficiaire.
    En résumé, nous restons pleinement mobilisés. Je souhaite que le prochain PLFSS permette d’améliorer concrètement les capacités des services à lutter contre la fraude. La certification complète et sans réserve de toutes les branches est bien notre objectif commun. Elle est la condition d’une sécurité sociale solide, équitable et digne de la confiance des citoyens. Néanmoins, l’absence de certification ne remet pas en cause la sincérité du présent projet de loi, la Cour des comptes ayant estimé que « les tableaux d’équilibre […] fournissent une représentation cohérente des recettes, des dépenses et du solde qui en découle ».
    C’est dans un esprit de lucidité et de transparence que je vous invite à examiner ce projet de loi d’approbation des comptes. C’est dans le même esprit que je souhaite engager, dans le sillage de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale qui s’est tenue le mardi 3 juin –⁠ dans un format exceptionnel, en présence de plusieurs d’entre vous –, un travail de fond visant à redresser la trajectoire de nos comptes sociaux dans la perspective d’un retour à l’équilibre avant 2029. Catherine Vautrin, Astrid Panosyan-Bouvet, Yannick Neuder et moi-même ne souhaitons pas nous arrêter à la description des problèmes d’hier ; le gouvernement dans son ensemble veut réfléchir avec vous aux solutions de demain.

    M. Yannick Monnet

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    Les problèmes d’hier, c’est vous !

    M. le président

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    La parole est à M. Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales.

    M. Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales

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    Alors que se poursuit aujourd’hui et demain le Printemps social de l’évaluation, nous nous réunissons ici pour examiner le projet de loi portant approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024. Cette nouvelle catégorie de textes, issue des travaux conduits par notre ancien collègue Thomas Mesnier, vise à conférer un caractère plus solennel à notre mission de contrôle de l’application des lois de financement de la sécurité sociale, en permettant de consacrer, au printemps, un temps spécifique à l’exécution des comptes sociaux de l’année passée.
    Permettez-moi un mot préalable de méthode, qui n’est pas dénué de portée politique : je prends la parole en tant que rapporteur général bien que je n’aie ni contribué à la préparation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, ni soutenu les gouvernements responsables de son exécution jusqu’à la dissolution de l’Assemblée. Cela étant dit, je tiens à souligner l’importance du respect de notre cadre organique et à rappeler que les chiffres présentés, qu’ils soient flatteurs ou préoccupants, sont ceux de la réalité. Il est de notre devoir de les analyser objectivement.
    Sur le champ des administrations de sécurité sociale, plus large que celui des régimes de base, l’article liminaire présente un équilibre apparent de 0 point de PIB. En valeur, cela correspond à un léger excédent, de 1,3 milliard d’euros selon les données initiales, porté à 2,3 milliards après révision par l’Insee. Cette légère augmentation correspond à un ajustement lié au dynamisme des recettes, en particulier celles des régimes complémentaires et de l’Unedic.
    L’article 1er, relatif aux régimes obligatoires de base, fait apparaître un déficit de 16,5 milliards d’euros, ramené à 15,3 milliards si l’on tient compte de l’excédent du fonds de solidarité vieillesse. Ce solde a connu une nette dégradation par rapport à l’année 2023, puisque le déficit était alors de 10,8 milliards. On relève en outre un écart majeur à la prévision initiale de la LFSS pour 2024, qui anticipait un déficit de 10,5 milliards.
    Les branches maladie et vieillesse concentrent les déficits, qui s’élèvent respectivement à 13,8 milliards et à 5,6 milliards. Ces chiffres marquent sans ambiguïté le terme de l’amélioration consécutive à la sortie de la crise sanitaire, qui avait été tirée par un rebond de l’activité économique et la fin progressive des dispositifs exceptionnels. Désormais, en dehors de toute crise conjoncturelle aiguë, les comptes sociaux se détériorent, et se détériorent fortement. Cette évolution doit susciter de notre part un profond questionnement.
    Les recettes ont été manifestement surestimées par rapport aux prévisions initiales, ce qui témoigne selon les uns d’un excès d’optimisme, selon les autres de prévisions techniques défaillantes. Du côté des dépenses, les dynamiques observées confirment l’insuffisance des mesures de régulation. La Cour des comptes l’a souligné à plusieurs reprises : dans le champ de l’Ondam, près de 25 % des économies initiales n’ont pas été réalisées –⁠ 0,7 à 1,1 milliard d’euros sur les 4,4 milliards d’euros prévus.
    S’agissant de la branche vieillesse, la revalorisation automatique de 5,3 % au 1er janvier 2024 explique à elle seule les trois quarts de l’évolution des prestations de retraite. En un an, cela représente 13,8 milliards d’euros, sur les 18 milliards de dépenses supplémentaires de la branche. Ces chiffres sont préoccupants pour la soutenabilité de nos finances sociales.
    L’Ondam, qui fait l’objet de l’article 2 –⁠ tel est le mécanisme en France pour la sécurité sociale : nous fixons des objectifs de dépenses à ne pas dépasser –, a été exécuté à hauteur de 256,4 milliards d’euros, soit un dépassement de 1,5 milliard par rapport à la cible votée. Cela correspond à une progression de 8,6 milliards d’euros en un an, et de 71,3 milliards d’euros par rapport à 2017. Pourtant, les conditions semblaient réunies pour que l’on tienne enfin cet objectif : l’inflation s’était normalisée plus rapidement qu’anticipé et, je le pense, des marges de manœuvre existaient pour faire davantage d’économies. Ce manquement en dit long sur la difficulté à contenir les dynamiques de dépenses structurelles.
    La Cades, créée en 1996, a amorti l’an dernier 16 milliards d’euros de dette, allégeant d’autant la charge pesant sur les générations futures. Relevons néanmoins que ce montant est inférieur à celui des années précédentes.
    L’article 3, enfin, propose une lecture patrimoniale des comptes sociaux, donnant une vision plus complète du bilan des régimes.
    Je ne saurais passer sous silence le fait que ce projet de loi a été rejeté en commission, à la suite de la suppression de la totalité de ses articles. Ce rejet exprime une défiance forte, non pas nécessairement à l’égard des chiffres eux-mêmes –⁠ ils relèvent d’un constat factuel –, mais à l’égard de la gestion des comptes sociaux et d’une stratégie jugée inadaptée ou insuffisante au regard des défis que nous devons affronter. Ce rejet est un signal politique fort, qui traduit notre exigence de clarté, de sincérité et, je le crois, d’engagement en matière de maîtrise des finances sociales –⁠ même si les propositions des groupes politiques diffèrent à ce sujet. Mes collègues et moi serons particulièrement attentifs à la prise en compte de cette exigence, car il y va de l’avenir de notre modèle.
    Si j’en crois mon intuition, et sans insulter l’avenir, la motion de rejet préalable que s’apprête à présenter notre collègue Hadrien Clouet sera adoptée, et nous ne pourrons même pas examiner les articles du projet de loi. Pourtant, il me semble essentiel d’évaluer la gestion passée, pour en tirer des leçons, car il y a bel et bien des leçons à en tirer.

    M. Hadrien Clouet

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    Quelles sont donc ces leçons ?

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Mes chers collègues, assurons notre mission de contrôle des dépenses sociales, si mal pilotées ; ne manquons pas ce rendez-vous de l’évaluation !
    Indépendamment du constat politique, la situation des comptes sociaux appelle une vigilance accrue. Le déficit structurel persistant des régimes de base, conjugué à la fin du redressement consécutif à la sortie de la crise sanitaire, laisse présager des tensions durables pour notre système de protection sociale. Les dernières prévisions soumises aux membres du Conseil d’orientation des retraites (COR) confirment celles que le premier président de la Cour des comptes était venu présenter à notre commission en mars dernier, c’est-à-dire un déficit de 6,6 milliards d’euros, qui se stabiliserait à ce niveau à l’horizon 2030.
    Dans son rapport d’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss) pour 2025, la Cour des comptes tire la sonnette d’alarme : l’Urssaf Caisse nationale, qui assure la trésorerie du régime général –⁠ prenant en cela la suite de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), créée en 1967 –, voit sa dette croître fortement, puisque celle-ci a atteint 49 milliards d’euros en 2024. Si cette tendance se poursuit, le plafond de dette de l’Urssaf Caisse nationale, actuellement fixé à 65 milliards d’euros, déjà largement relevé par la LFSS pour 2025, pourrait être atteint voire dépassé dès 2026, ce qui exposerait le régime général à un risque de liquidité inédit.
    Ce signal doit être entendu : le déséquilibre chronique ne peut se perpétuer sans remise en cause des trajectoires de dépenses et sans réformes de structure. Il ne suffit plus d’amortir la dette sociale ; il faut aussi tarir la source de son accumulation. Cet état de fait suscite des interrogations légitimes quant à la résilience de notre système de financement de la sécurité sociale.
    À court terme –⁠ peut-être plus court qu’on ne le pense – se posera la question du refinancement de ces déficits par la Cades, solution dont chacun sait ici à quel point elle se heurte à des obstacles politiques et financiers.
    Sur le plan financier –⁠ vous l’avez évoqué, madame la ministre chargée des comptes publics –, la Cades est déjà fortement sollicitée, avec une trajectoire d’amortissement qui repose sur près de 20 milliards d’euros de recettes spécifiques, fournies par la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et la contribution sociale généralisée (CSG). Une nouvelle reprise nécessiterait donc soit de prolonger la durée de vie de la Cades au-delà de 2033, soit d’accroître ses recettes, ce qui équivaudrait à alourdir la charge fiscale des générations actuelles et futures.
    Sur le plan politique, une telle opération reviendrait à externaliser une fois de plus le déficit courant, sans effort de redressement en amont, ce qui est incompatible avec l’exigence de soutenabilité des finances sociales. Quant à une modification du périmètre ou de l’horizon d’amortissement de la dette sociale, elle nécessiterait une mesure législative, voire organique, qui pourrait se heurter à une forte opposition du Parlement, dans un contexte de majorité relative et de vigilance renforcée sur la dette publique.
    Dans ces conditions, il est impératif de traiter non pas uniquement les symptômes du déséquilibre, mais sa cause : maîtriser la dynamique de l’Ondam ; renforcer les dispositifs de régulation ; accroître les recettes par le plein emploi et la création de richesses ; surtout, assainir la trajectoire des comptes sociaux sans recours systématique à l’endettement. En effet, à force de repousser les ajustements nécessaires, c’est la soutenabilité du modèle français de protection sociale qui se trouve fragilisée. Nous devons collectivement prendre la mesure de la situation.
    S’il a pour objet de constater des chiffres, ce projet de loi met en lumière des dynamiques préoccupantes. Le redressement des comptes sociaux reste un impératif budgétaire mais aussi un enjeu de solidarité entre les générations. Il est urgent de s’y atteler. Il y va de la pérennité de notre modèle et de notre souveraineté. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Personne ne pourra dire : « On ne savait pas ».
    Pourtant, à écouter les discours des uns et des autres, on pourrait presque en douter…Certains ne proposent-ils pas de revenir à la retraite à 62 voire à 60 ans…

    M. Hadrien Clouet

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    Oui !

    M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis

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    …quand d’autres, sur d’autres bancs, suggèrent d’augmenter le budget de la défense de 50 milliards à 100 milliards sans remettre en cause notre modèle social ?
    Comment tenir de tels discours ? Tout le monde le sait, et la Cour des comptes l’a confirmé : la trajectoire de nos comptes sociaux n’est plus sous contrôle et le déficit, qui s’élève à 15 milliards cette année, sera de 24 milliards dans trois ans seulement !
    Tout le monde le sait : pour contenir cette dette et fluidifier le financement, il nous faudrait porter de 45 à 135 milliards le plafond d’endettement de l’Acoss vers qui nous faisons rouler la dette à court terme.
    Comment pouvons-nous accepter de faire supporter le poids de la solidarité d’aujourd’hui à nos enfants et nos petits-enfants ? (Mme  Justine Gruet et M.  Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.) Comment pouvons-nous accepter de laisser dériver nos comptes et de faire peser sur d’autres que nous la responsabilité de prendre, demain, des mesures beaucoup plus difficiles que celles que nous n’avons pas le courage de prendre aujourd’hui ?
    Pourtant, les mesures existent ! Elles sont là : nous les avons déjà toutes et tous proposées. En matière de retraite, d’autres pays européens ont agi plus fortement que nous : en Europe, l’âge moyen de départ à la retraite est de 67 ans ; il sera bientôt de 70 ans au Danemark ou en Italie. Au même moment, et alors que l’espérance de vie n’a jamais été aussi élevée, nous sommes en train de nous demander si nous n’allons pas revenir en arrière !
    Nous avons proposé d’adapter la journée de carence pour favoriser ceux qui n’ont jamais recours à la solidarité nationale par rapport à ceux qui y font sans cesse appel.
    Nous pouvons engager une nouvelle réforme de l’assurance chômage pour inciter au cumul emploi chômage et remettre certaines personnes sur le marché de l’emploi plus rapidement qu’aujourd’hui.
    Nous avons la possibilité de limiter dans le temps le versement du RSA ou encore d’instaurer un délai de carence beaucoup plus important sur les aides sociales non contributives pour toutes les personnes qui arrivent dans notre territoire. Nous pouvons voter ensemble une aide sociale unique plafonnée à 70 % du smic.
    Toutes ces solutions sont sur la table ; pourtant, tout reste encore à faire ! Face à ce que ces comptes 2024 nous révèlent, aurons-nous le courage d’engager ensemble les réformes nécessaires ?
    Le pronostic vital de notre système social est désormais engagé et la fiabilité de nos comptes remise en question par la Cour des comptes qui, pour la deuxième année consécutive, a refusé de certifier les comptes de la branche famille et de la Cnaf. Comment nous satisfaire d’une situation dans laquelle la CAF comptabilise 6 milliards d’euros d’erreurs et d’indus qu’elle n’espère plus récupérer –⁠ nous laissant imaginer le reste ?
    Dans ces circonstances, je vous inviterai à rejeter ce texte, comme l’ont fait la commission des finances et celle des affaires sociales, et ce, en raison d’un triple déficit : le déficit de nos comptes, le déficit de fiabilité de ces comptes et enfin, le pire, le déficit de courage.
    Ce déficit collectif face à cette situation n’est pourtant pas une fatalité ! Si nous voulons que la fraternité inscrite au fronton des bâtiments de la République ne soit pas demain un lointain souvenir, nous avons toutes et tous à faire preuve de beaucoup plus de courage ! (Mme  Justine Gruet applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

    Mme Stéphanie Rist

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    Le ministre de la santé n’est pas là !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Voici seulement trois ans, notre assemblée a adopté à l’unanimité une réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) –⁠ entreprise à l’initiative de notre ancien collègue Thomas Mesnier, alors rapporteur général de notre commission – dont l’un des principaux apports a consisté en la création d’une nouvelle catégorie de lois de financement, la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss). Il était pertinent de dédier chaque année du temps à l’examen des comptes de l’exercice précédent au moment où le printemps social de l’évaluation, inauguré en 2019 et auquel notre commission se consacre depuis quelques jours, était discuté.
    Cette loi d’approbation avait pour objectif d’améliorer la transparence, l’information et le débat avant que nous n’en venions à l’examen du PLFSS de l’exercice suivant. C’est l’esprit de la loi organique : le PLFSS ne peut être mis en discussion devant une assemblée avant l’examen du projet de loi d’approbation.
    Avec ce troisième projet de loi d’approbation, nous pouvons déjà procéder à un premier bilan : le Parlement n’en a adopté aucun, ni celui de 2022, ni celui de 2023 et –⁠ le rapporteur général l’a rappelé – tous les articles du texte examiné aujourd’hui ont été successivement supprimés mercredi dernier en commission.
    Nous devons nous interroger collectivement sur cet état de fait. Pourquoi en est-il ainsi alors que l’adoption des comptes administratifs est la règle dans toutes les collectivités de France et de Navarre ?
    Comme chaque année, il sera beaucoup question de photographie dans nos débats. Le Placss restitue une photo de nos comptes sociaux à un instant donné, en l’occurrence au 31 décembre de l’année précédente. Bien sûr, chacun est libre de considérer que ce qu’il voit sur la photo n’est pas à son goût. Je suis le premier à exprimer des interrogations, et même des inquiétudes, à l’unisson du premier président de la Cour des comptes que nous avons entendu il y a quelques jours en commission.
    Une fois de plus, les déficits des deux principales branches –⁠ maladie et vieillesse – connaissent une évolution préoccupante alors que les défis qui nous attendent dans ces domaines sont considérables. Une fois de plus, les comptes de la branche famille n’ont pu être certifiés.
    Le constat unanimement partagé du caractère inquiétant de la situation constitue une raison de ne pas rejeter ce Placss : déchirer la photo ne changera en rien la réalité à laquelle notre pays est confronté. Détourner la procédure en rejetant ce texte revient à manifester son agressivité vis-à-vis du photographe plutôt qu’envers l’état de fait.
    Adopter ce projet de loi d’approbation n’est pas donner un blanc-seing au gouvernement précédent et encore moins au gouvernement actuel. C’est simplement prendre acte collectivement des faits, si déplaisants soient-ils, avant d’envisager ensuite la manière d’y remédier, chacun avec ses solutions.
    Refuser de regarder la réalité en face augurerait fort mal de la manière dont nous affronterons ensemble les défis immenses qui nous attendent en matière de protection sociale.
    Cette réalité est incontestable : le vieillissement de la population –⁠ donnée aussi durable qu’inéluctable – a des incidences sur l’ensemble des branches de la sécurité sociale ; l’allongement de la durée de vie entraîne l’augmentation des soins, du nombre de prises en charge au titre de l’autonomie et des dépenses de retraite. Tout cela alors même que nous devons rester vigilants à l’égard des déficits et de la souveraineté financière de notre pays. Non seulement les régimes sociaux n’ont pas vocation à être durablement déséquilibrés mais nous voyons s’approcher le moment où les déficits et la dette finiront par mettre en danger le modèle auquel tous nos concitoyens sont attachés depuis quatre-vingts ans.
    Si les réformes structurelles de nos systèmes de santé et de retraite, la recherche de solutions pour l’autonomie, la remise en ordre du financement de la sécurité sociale ne peuvent plus attendre, nous avons besoin avant d’agir d’un constat partagé dont la première étape est l’approbation des comptes de l’exercice passé.
    Voilà pourquoi nous devons commencer par adopter le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale qui nous est aujourd’hui soumis. (M.  Cyrille Isaac-Sibille applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est déjà beaucoup mieux !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Il y a une alternative. À la lecture biaisée qui présente un déficit colossal de la sécurité sociale, on peut opposer une vision sincère qui en modère les alarmes.
    On nous propose d’approuver les comptes de la sécurité sociale pour l’année 2024 ; je vous invite au contraire à les rejeter pour les raisons suivantes : si ce texte fait apparaître un déficit de 15,3 milliards d’euros en 2024, il est trompeur car le calcul réalisé par le gouvernement oublie sciemment les recettes de la Cades qui rembourse la dette sociale. Chacun constatera dès lors qu’il est bien étrange d’afficher un tel déficit sans tenir compte du fait que la dette sociale se réduit chaque année grâce au remboursement opéré par cette caisse.
    Ainsi le bon chiffre est le suivant : presque 4 milliards d’euros excédentaires –⁠ et non de déficit – pour 2024.
    En effet, si 19 milliards de recettes passent actuellement dans le remboursement de la dette Covid –⁠ que l’État a largement fait porter à la sécurité sociale sans aucune justification – ces 19 milliards pourraient financer la sécurité sociale et, une fois ramenée dans le giron de l’État, cette dette pèserait moins car l’État roule sa dette et n’en rembourse que les intérêts, contrairement à la sécurité sociale qui rembourse aussi le capital. Ainsi, le budget actuel est-il une très mauvaise affaire !
    En 2024, le régime de la sécurité sociale était en réalité excédentaire : c’est mon premier désaccord avec le texte du gouvernement.
    Ce texte avance que notre sécurité sociale serait mise en danger par des dépenses excessives ; c’est trompeur et faux. Le gouvernement omet de dire que, depuis les années 1990 et, plus encore, depuis 2017, un projet patient et minutieux est à l’œuvre : baisser les recettes de la sécurité sociale.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est vrai !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Cette idée date des conservateurs américains qui, depuis les années 1980 veulent, selon l’expression de l’économiste Alan Greenspan, « affamer la bête ». Même la Cour des comptes conclut aujourd’hui –⁠ je la cite mot pour mot – à une « fragilisation du financement de la sécurité sociale ». Cela passe par le fait de charger la barque avec des augmentations massives de dépenses décidées par l’État sans interrogation sur la faisabilité de leur financement : ainsi le Ségur de la santé, s’il est légitime, coûte-t-il plus de 10 milliards à la sécurité sociale.

    Mme Stéphanie Rist

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    Vous en demandiez encore plus !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    L’État prive aussi la sécurité sociale de recettes : rien qu’en 2024, on compte 5,5 milliards d’exonérations non compensées. Citons également l’autoentrepreneuriat : depuis 2017, il est érigé en totem modèle par le gouvernement mais les 700 000 autoentrepreneurs bénéficient de taux réduits de cotisation et ne rapportent rien aux caisses.
    Ainsi, en compensant les 5,5 milliards d’euros de cotisations et en réaffectant au moins une partie des 19 milliards d’euros de recettes de la Cades, les comptes de la sécurité sociale seraient excédentaires de 400 millions en 2028 et le problème serait en partie résolu.
    On peut aller plus loin et soumettre à cotisations les dividendes et les rachats d’actions. C’est possible ! Cette mesure, adoptée dans le budget de la sécurité sociale pour 2025 avant d’être balayée par le 49.3, rapporterait 10 milliards.
    On pourrait aussi modestement augmenter les cotisations d’assurance vieillesse : un surplus de 0,25 point supplémentaire par an pendant cinq ans rapporterait 2,5 millions par an. La sécurité sociale serait ainsi excédentaire, non de 400 millions, mais de 18 milliards en 2028 et nous pourrions financer l’abrogation de la réforme des retraites en revenant de 64 à 62 ans.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Tout va très bien, madame la marquise !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Car la solution n’est pas de travailler plus vieux ; si le COR recommande de reculer une nouvelle fois l’âge de départ à la retraite, on a bien vu que la dernière réforme imposée par M. Macron ne règle pas le problème…

    Mme Stéphanie Rist

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    Elle améliore la situation !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    …puisqu’en 2030 le déficit, estimé à 1,7 milliard au moment de la réforme, devrait finalement être de 6,6 milliards.
    Reculer l’âge de la retraite est inapproprié à un moment où le chômage repart à la hausse –⁠ il atteindrait 8,3 % de la population active en 2026 selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) – et où la productivité recule –⁠ moins 3,5 % entre 2019 et 2023. Dans ce contexte, laisser les gens disponibles plus longtemps pour travailler est un contresens : cela ne donne pas d’emploi aux chômeurs, cela en crée même davantage !
    Pour conclure, je veux insister sur deux points : ni l’assurance maladie ni les retraites ne sont en cause. S’agissant de la première, il y a des baisses dans la colonne des recettes, comme je l’ai dit, mais aussi dans celle des dépenses. La Cour des comptes est claire : « […] 304 millions d’euros d’annulations ont concerné les établissements de santé, ce qui a contribué à majorer d’autant leurs déficits. » Ce sont donc bien des coupes budgétaires qui creusent les déficits de la branche maladie.
    S’agissant des secondes, même le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites –⁠ organisme qui nourrit pourtant la petite musique gouvernementale sur le recul de l’âge de départ – admet que la quasi-stabilisation de la part des dépenses dans le PIB d’ici à 2070 relève de l’évidence. On pense même qu’elle baissera.
    Il existe donc une alternative.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est vrai !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    La sécurité sociale n’est pas acquise : elle a été conquise. Il faut retourner chercher les recettes dont nous disposions auparavant et cesser d’abaisser les revenus du travail –⁠ y compris leur part socialisée, que vous appelez « cotisations »…

    M. Hadrien Clouet

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    Excellent !

    Mme Stéphanie Rist

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    Cela pose un petit problème de démocratie !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    …lorsque vous êtes de bonne humeur car, le reste du temps, vous préférez parler de « charges ». Il faut s’opposer à cette politique de faillite organisée. Il faut rejeter cette loi d’approbation des comptes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Motion de rejet préalable

    M. le président

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    J’ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Mesdames et messieurs les ministres –⁠ ou devrais-je dire ce soir les huissiers puisque vous voulez piller notre bien commun le plus précieux, la sécurité sociale ? –, après avoir discuté du budget de l’État, nous examinons à présent une loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale.
    D’où viennent ces comptes ? De votre loi de finances ! Et d’où vient cette loi de finances ? D’un 49.3 ! Vous qui, hors de cette enceinte, nous écoutez, tenez-vous bien : la Macronie veut que nous validions des comptes dont elle a imposé l’adoption. Nous avons donc déposé cette motion de rejet afin d’en finir tout de suite avec ce cirque. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Par ailleurs, le simple fait que les perdantes et les perdants des dernières élections soient là, devant moi, à présenter des textes financiers, suffirait à les rejeter en bloc et sans distinction. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Mme de Montchalin parlait tout à l’heure de ce texte comme d’un révélateur. Nous sommes bien d’accord : il nous donne l’occasion de révéler que vous êtes minoritaires dans l’hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Toutefois, s’il faut le rejeter, c’est pour une raison plus profonde. La sécurité sociale, telle que le peuple français l’a collectivement créée en 1946, revient aux intéressés, donc aux travailleuses et aux travailleurs. Ses conseils d’administration étaient d’ailleurs initialement composés aux deux tiers d’ouvriers. Il est vrai qu’en matière de protection sociale, il y a toujours plus d’humanité dans deux minutes de discussion avec un salarié que dans tous les journaux intimes de Vincent Bolloré. (Mme Anaïs Belouassa-Cherifi rit.)
    Madame de Montchalin, vous nous disiez que le déficit de la sécurité sociale était chose nouvelle. Or ce n’est pas vrai du tout : l’histoire de France ne débute pas avec Édouard Balladur ni Alain Juppé. En réalité, rien de nouveau sous le soleil : dès les premières décennies de la sécurité sociale, lorsqu’on constatait un léger déficit, on augmentait les cotisations. Le régime général était en effet en déficit en 1950, en 1951, en 1954, en 1955, en 1964, en 1965, en 1966 et en 1967.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Mais de combien ?

    M. Hadrien Clouet

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    Le risque de déficit existait donc depuis le début. Lorsqu’il devenait réalité, venait-on verser de grosses larmes, l’air paniqué ? Eh bien non, on augmentait l’assiette des cotisations ou le taux de cotisation plutôt que d’obliger les personnes à sortir leur carte bancaire pour payer encore plus cher leurs médicaments. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Puisque je présente la motion de rejet des comptes de la sécurité sociale, j’en profite pour adresser le salut des Insoumises et Insoumis à toutes celles et tous ceux qui luttent pour que l’argent que vous voulez retirer soit maintenu. Je pense aux chauffeurs de taxi qui refusent l’inacceptable convention avec l’assurance maladie… (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Sandrine Runel applaudit également.)

    Mme Stéphanie Rist

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    Quelle honte !

    M. Hadrien Clouet

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    …qui les obligerait à transporter sur la plage arrière trois passagers, serrés comme des sardines, au détriment de leur confort bien sûr –⁠ ce dont vous vous fichez – mais aussi et surtout du droit des malades à la confidentialité s’agissant de leur pathologie.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    N’importe quoi !

    M. Hadrien Clouet

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    Je pense bien sûr également aux soignantes et soignants en lutte dans l’ensemble du pays, par exemple à l’équipe de réanimation pédiatrique de l’hôpital des enfants à Toulouse, où, chaque jour, cinq gamins ne peuvent bénéficier de soins prodigués par une auxiliaire puéricultrice. Je pense aussi au personnel de l’hôpital d’Apt qui tente de garder son service de chirurgie, aux brancardiers de La Timone à Marseille, qui ne sont que seize alors qu’ils travaillent pour quarante-neuf services et aux soignants qui se battent comme des diables pour conserver vingt-cinq lits à l’hôpital de Valognes ou pour maintenir ouvertes les urgences de Castelnaudary.
    Si des luttes sont donc en cours, je veux aussi mentionner des victoires. Car, lorsqu’on se bat, on obtient des résultats. Je songe au personnel de l’hôpital psychiatrique d’Auch, qui, après vingt-trois jours de grève, a arraché trente-deux recrutements, sept titularisations, une modification de planning, le maintien des lits et le paiement des jours de grève. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) D’ailleurs, grâce à cette victoire, l’argent collecté dans la caisse de grève a été reversé aux postiers de la commune de Gimont, située à proximité, eux aussi en lutte contre le démantèlement du service public –⁠ dans les deux cas, les responsables sont les mêmes.
    Ceci nous rappelle que la lutte paie. Depuis vingt-quatre jours, des représentants de la Macronie répétaient pourtant qu’il n’était pas possible de satisfaire de telles revendications parce qu’il n’y avait pas d’argent. Or, lorsqu’on se bat, lorsqu’on fait grève, l’argent apparaît. Félicitations à ces personnels. Nous devons agir de la sorte partout. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    D’ailleurs, c’est bien pour contenir ces mouvements populaires et leurs victoires récurrentes que vous relancez l’intox classique sur « le trou abyssal de la sécurité sociale », une légende que la bonne société nous ressort régulièrement. La sécurité sociale existe depuis quatre-vingts ans et, depuis quatre-vingts-ans, la bourgeoisie tente, par tous les moyens possibles et imaginables, de la dépouiller.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Oh là là !

    M. Hadrien Clouet

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    Chaque fois qu’elle réalise son forfait –⁠ un cadeau aux laboratoires pharmaceutiques par-ci, une dette covid par-là –, elle arrive, l’air chafouin, le visage luisant de larmes, pour nous dire que c’est insoutenable et que l’argent est introuvable. S’il avait fallu tout arrêter la première fois qu’une personne est venue nous annoncer que la sécu est infinançable, nous aurions mis fin au système dès le lendemain de sa création.
    Amis qui vous trouvez hors de ces murs, vous avez sans doute déjà entendu certains –⁠ les macronistes notamment, la droite en général – dire : « Nous avons les charges les plus lourdes du monde ! ». Déjà, lorsque quelqu’un dit « charges » plutôt que « cotisations », on comprend tout de suite que, pour lui, les pensionnés et les malades représentent un coût pour la société et qu’il faut s’en débarrasser.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Mais non !

    M. Hadrien Clouet

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    Je vous invite donc à consulter le compte rendu des débats de l’Assemblée nationale. Vous constaterez que cette fable pour enfants apparaît dès 1949 puisqu’un député de droite, Jean Masson, déplore alors des charges écrasantes. Pourtant, quatre-vingts ans après, nous pouvons dire non seulement que nous y avons bel et bien survécu mais aussi que c’est grâce à ces cotisations, prétendument écrasantes, que nous avons gagné dix-huit ans d’espérance de vie (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Grâce à chaque euro de cotisation arraché au capital et à ses représentants, ce sont autant de maternités construites, d’hôpitaux équipés, de soignants payés, d’invalides soignés et de seniors qui vivent dignement.
    Au bout de quatre-vingts ans de panique comptable de la droite, nous avons appris à nous en accommoder et à faire les bons calculs. Il faut dire, entre nous, que vous êtes de sacrés roublards puisque vous parvenez à présenter des déficits inexistants.
    Pour bien le comprendre, je propose une petite leçon de macronisme sous forme de travaux pratiques. Rappelons tout d’abord que vous avez découpé la sécurité sociale en branches et en sous-entités afin de créer des magouilles comptables.
    Soyons simples : imaginons une caisse dans laquelle on verse 2 euros de cotisations et qui reverse 2 euros d’indemnisation. Tout est donc à l’équilibre jusqu’au jour où un gros malin –⁠ parfois macroniste, parfois issu du groupe LR, je ne fais pas la différence – arrive et nous propose d’optimiser et de rationaliser en créant des branches. Par exemple, plutôt que de verser 2 euros dans une caisse unique, on les répartit entre une branche maladie et une branche accidents –⁠ 1 euro dans chacune. Pourquoi pas ? Cela fonctionne.
    Or un jour, patatras, il faut verser 1,5 euro pour les malades et seulement 50 centimes pour les accidentés. Puisque les deux caisses sont séparées, on nous explique qu’il n’y a plus assez d’argent dans la branche maladie alors que l’autre branche connaît un excédent. Le même bougre va alors se promener sur les plateaux de télévision pour expliquer qu’il manque de l’argent, qu’il faut couper tous les droits, que les malades coûtent trop cher et qu’il faut dérembourser les traitements. Voilà comment on invente un déficit. Une telle tactique est d’ailleurs à l’œuvre dans tous les secteurs : vous avez agi de la même manière avec le rail par exemple. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    C’est exactement ce que l’on observe avec les comptes de la sécu de 2024. L’article liminaire du projet de loi –⁠ il ne faut pas aller bien loin, la lecture des dix premières lignes suffit – indique que les recettes représentent 26,6 % du PIB et que les dépenses représentent –⁠ je vous le donne en mille – 26,6 % du PIB. Nous sommes à l’équilibre.
    Pourtant, nous avons droit matin, midi et soir à une offensive médiatique sur le thème du déficit. La raison, c’est que vous avez planqué 16 milliards. Ce n’est pas rien ! D’ailleurs, lorsque quelqu’un cache, ne serait-ce que 50 ou 100 euros, on en fait toute une histoire –⁠ mais il s’agit en général de personnes dans le besoin.
    Comme cela a été dit, vous avez planqué cet argent dans la Cades, la caisse d’amortissement de la dette sociale pour ceux qui n’auraient pas ce sigle barbare en tête, une création d’Alain Juppé –⁠ ça commence bien. (Rires sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Rappelons les différents épisodes de cette histoire : vous avez d’abord réduit la contribution des plus grands groupes financiers. Il a donc manqué de l’argent à la sécu –⁠ d’autant plus que vous l’avez ensuite obligée à supporter la dette covid. Puisque vous avez supprimé des recettes et qu’elle avait besoin d’argent, elle a emprunté car elle ne pouvait pas abandonner les gens à leur sort.
    Vous avez alors créé une caisse, destinée à contenir l’argent du remboursement. Celle-ci immobilise, chaque année, des milliards qui seraient bien sûr plus utiles si on les consacrait à nos hôpitaux et à nos retraites plutôt qu’à un remboursement selon un calendrier très serré. En outre –⁠ tenez-vous bien –, on a gaspillé au passage avec cette caisse 75 milliards d’euros d’intérêts et de commissions bancaires, des revenus totalement parasitaires, soit l’équivalent de quinze ans de déficit du système de retraites. Or cette fois, cela ne dérange personne, on n’entend aucune protestation.

    M. René Pilato

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    C’est une honte !

    M. Louis Boyard

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    Les Mozart de la finance !

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est vraiment honteux !

    M. Hadrien Clouet

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    Vous placez donc 16 milliards dans une caisse pour rembourser une dette artificielle. Or puisque la caisse appartient aux administrations de sécurité sociale, nous sommes à l’équilibre –⁠ bien malgré vous.
    Vous ne savez pas utiliser l’argent. Pire : vous l’utilisez mal, délibérément. Pourtant, il existe. Simplement, il reste loin des besoins.

    Mme Ségolène Amiot

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    À qui profite le crime ?

    M. Hadrien Clouet

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    L’argent est bien là –⁠ j’y insiste –, en dépit de votre politique, car vous avez percé le panier de la sécurité sociale. Puisqu’on vous le dit depuis des décennies, je ne peux pas imaginer que vous ne le compreniez pas, vous êtes trop intelligents. Par conséquent, vous le faites exprès, c’est délibéré.
    Depuis trente ans, nous subissons des charges indues, des recettes perdues, des cadeaux aux grands groupes –⁠ autant de politiques qui aboutissent à l’étranglement programmé de la sécurité sociale.
    Puisque nous sommes présents avec vous cet après-midi, rendons-nous utiles et refaisons les comptes ensemble. Si l’on met de côté la question de la Cades, que je viens d’évoquer, et que l’on se concentre uniquement sur les régimes de base de la sécurité sociale, on note qu’il y a 643 milliards de dépenses et 628 milliards de recettes, soit un déficit de 2 %. Au passage, ce dernier est trois fois inférieur au déficit du budget de l’État, qui est entre vos mains. Cela prouve qu’il vaut mieux faire appel à un syndicaliste ouvrier qu’à un technocrate macroniste pour gérer nos comptes –⁠ mais passons. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Pour vous aider, nous allons examiner les comptes point par point –⁠ prenez des notes ! Branche accidents du travail et maladies professionnelles : 700 millions d’excédent. Branche famille –⁠ celle qui verse les allocations familiales, l’allocation de rentrée scolaire, le RSA et la prime d’activité –⁠ : 1,1 milliard d’excédent. Branche autonomie : 1,3 milliard d’excédent. Jusqu’ici, tout va bien.
    Toute votre agitation porte donc en réalité sur deux branches de la sécurité sociale. S’agissant de la branche maladie, vous nous dites qu’il manque 14 milliards. Le montant est d’ailleurs un peu plus élevé que prévu parce que vous avez retiré 2 milliards de TVA qui étaient pourtant promis –⁠ je suis donc tenté de vous dire qu’il faudrait rendre l’argent avant de venir vous plaindre.
    Or figurez-vous –⁠ vous n’allez pas me croire – que les 14 milliards manquants correspondent, à l’euro près, au Ségur de la santé. (« Ça alors, comme c’est étonnant ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je parle –⁠ souvenez-vous – de cette hausse de salaire qu’ont arrachée les soignantes et les soignants, que vous avez acceptée mais que vous n’avez pas financée –⁠ vous avez préféré simplement prendre l’argent dans les caisses des hôpitaux pour pouvoir appliquer cette mesure.
    Cela dit, heureusement que nous sommes là et que nous sommes désireux d’aider la Macronie –⁠ vous ne pourrez pas dire demain que vous ne saviez pas, cela vous évitera au moins de causer des dégâts comme vous le faites lorsque vous agissez dans l’ignorance. Je vais donc vous confier un secret : en 2024, les exonérations de cotisations pour la branche maladie s’élèvent à 40 milliards. Cela signifie que vous donnez, notamment au grand patronat, trois fois plus que le montant qui manque à l’assurance maladie. Chaque fois qu’une infirmière ou un aide-soignant manque à l’hôpital, souvenons-nous que vous avez offert trois fois le montant de son salaire au Medef. Chaque fois qu’un patient paie 1 euro de franchise médicale sur une boîte de médicaments, qu’il se souvienne que 3 euros ont été versés au Medef en contrepartie. Voilà où passe notre argent : dans des cadeaux aux bailleurs de fond du pouvoir.
    Regardons à présent les dépenses de la branche vieillesse –⁠ c’est-à-dire les retraites. Il manque 5,6 milliards. Ouvrez grand les oreilles –⁠ une fois encore, vous risquez d’être secoués : 1 misérable point de cotisation patronale –⁠ soit 1 % – suffit à combler le manque de financement. Avec seulement 1 centime par euro –⁠ ce qui représente 14 euros sur un Smic – nous sommes à l’équilibre, voire en très léger excédent.
    Si vous n’êtes pas convaincus, pas de problème. Après tout, je suis là pour avancer des solutions avant de rejeter votre texte,…

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Avec le RN !

    M. Hadrien Clouet

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    …afin que, l’année prochaine, vous ayez tiré quelques enseignements de la situation actuelle. Je vous propose donc une autre option : aligner la cotisation des hauts salaires sur les petits salaires. Il faut que tout le monde sache –⁠ car ce n’est pas forcément évident – que, dans ce pays, on cotise, pour sa retraite, à hauteur d’un peu plus de 10 % de son salaire lorsque celui-ci s’élève au maximum à 3 900 euros mais seulement à hauteur de 2 % lorsqu’on est au-dessus de ce plafond. Plus on est riche, moins on cotise aux caisses de retraites.

    Mme Ségolène Amiot

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    Pour une meilleure retraite !

    M. Hadrien Clouet

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    Si l’on met fin à cette injustice, si l’on abroge ce privilège, on obtient plus de 10 milliards d’euros pour les caisses de la sécurité sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Si vous n’êtes pas prêts non plus à prendre cette mesure –⁠ imaginons que vous soyez de vraies têtes de mule –, j’ai encore une solution de rechange. Vous pourriez soumettre à cotisations sociales les revenus de participation, d’intéressement, d’épargne salariale et de stock options. Cela permettrait également d’arriver à l’équilibre.
    Nous pourrions aussi –⁠ mais je crains de vous noyer sous les propositions – lancer une vraie politique contraignante d’égalité salariale entre les femmes et les hommes (Applaudissements   sur les bancs du groupe LFI-NFP) puisque les femmes sont toujours payées 25 % de moins en raison de qualifications différentes, d’un temps de travail inférieur et de discriminations dans l’emploi.
    Si vous augmentez de 25 % leurs salaires, les caisses de retraite déborderont !

    M. Romain Daubié

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    Qui paiera ?

    M. Hadrien Clouet

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    Les employeurs, évidemment ! À votre avis, qui paie, quand on parle de salariés ? Quelle question !
    Vous vouliez une réforme de structure : la voici, non ? La justice, c’est toujours une réforme de structure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Les macronistes, quand je parle du salaire des femmes, me demandent qui paiera !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Qui embauchera ?

    M. Hadrien Clouet

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    C’est l’employeur, qui profite de la situation actuelle pour sous-payer une femme qui travaille alors qu’elle fait le même boulot que son collègue homme ! Apparemment, ça vous convient, mais pas à nous ! Si vous voulez voler les femmes, applaudissez ! Vous ne nous trouverez jamais à vos côtés pour le faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Si vous appliquez les quatre propositions que j’ai faites, non seulement tout risque de déficit sera effacé mais nous réaliserons 10 milliards d’excédent,…

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    L’argent magique !

    M. Hadrien Clouet

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    …de quoi mettre fin au scandale des heures supplémentaires non payées à l’hôpital, de quoi assurer la gratuité réelle des soins hospitaliers, de quoi ouvrir 100 000 places dans les maisons de retraite publiques, de quoi créer 400 centres de santé et inaugurer 200 maternités. En plus, ça vous occupera : à la place de faire de mauvais textes, vous irez inaugurer des trucs ! (Applaudissements et sourires sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Tout cela, c’est ce que votre politique coûte au peuple français.
    Bref : il n’y a pas de déficit, collègues, mais un sabotage ! Celui de la sécurité sociale, qui est le plus bel acte d’amour de l’humanité envers elle-même ! Souvenons-nous des mots d’Aimé Césaire : « Ce n’est pas par la tête que les civilisations pourrissent. C’est d’abord par le cœur. » Ne pourrissons pas ! Sortons du macronisme ! Rejetons ce texte ! (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. –⁠ M. Paul Molac et Mme Sandrine Runel applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur général.

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Mes chers collègues, il y aurait beaucoup à dire. Je ne répondrai pas à chaque élément de cette intervention. Le président de la commission des finances nous avait donné un avant-goût de sa tonalité et le député Hadrien Clouet, toujours brillant,…

    Mme Stéphanie Rist

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    Simpliste !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    …l’a prononcée avec son sens de la formule (Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe LFI-NFP), non sans se montrer un brin caricatural sur un certain nombre de points.
    Les chiffres de ces comptes de la sécurité sociale seraient trompeurs ? Mes chers collègues : c’est faux ! Les chiffres ne représentent que la réalité de ce qu’on a dépensé et collecté. On ne peut pas insinuer ici –⁠ ce serait très inquiétant pour notre démocratie parlementaire ! – que les chiffres seraient faux. Nous serions en excédent ? Mais enfin ! Nous n’avons pas participé aux mêmes auditions de la Cour des comptes ! Nous ne sommes pas en excédent !
    Ce serait un calcul du gouvernement ? Vous savez que je ne l’ai pas toujours franchement soutenu (« Mais si ! » sur quelques bancs du groupe RN) mais les chiffres livrés dans ces comptes de la sécurité sociale ne sont pas le produit d’un calcul du gouvernement ! Ils procèdent seulement du respect de notre cadre organique, qui prévoit que nous approuvions des comptes.
    Vous faites un calcul, monsieur le président de la commission des finances, qui vous conduit à nous expliquer que nous ne sommes pas en déficit. J’ai repris ce calcul, aux termes duquel on aurait planqué 16 milliards. Vous êtes cohérent avec votre collègue Hadrien Clouet !

    M. René Pilato

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    Ah oui, ils sont cohérents !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Mais il suffit d’ouvrir le Placss pour l’année 2024 pour voir qu’ils n’ont pas été planqués : ces 16 milliards, on les montre ! Ils servent à rembourser notre dette sociale.

    M. Jean-François Coulomme

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    La dette de l’État !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Non, pas la dette de l’État : la dette sociale.
    Veut-on signifier aux générations actuelles et surtout aux générations futures que nous n’avons pas à rembourser notre dette alors même que nous avons emprunté ?

    M. Éric Coquerel

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    Non !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Je ne sais pas si vous mesurez à quel point ce serait leur envoyer un message d’irresponsabilité ! Voulez-vous que les taux d’intérêt qui s’appliquent à nous et, par conséquent, le coût de notre dette augmentent ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ce message est sidérant et profondément irresponsable ! Je le dis à tous ceux qui hésiteraient,…

    M. Emeric Salmon

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    Nous n’hésitons pas ! Nous allons dépecer ce texte !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    …ne sachant pas s’il faut voter ou non cette motion de rejet préalable : ce serait cautionner une vision profondément irresponsable !
    Je ne vous enlève pas une chose : vous souhaitez protéger les salariés. Or les mesures prises pendant la crise sanitaire visaient à les protéger socialement. On peut bien sûr discuter de cette protection mais elle a été fournie.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Ce ne sont pas les comptes de la sécu !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Si, en partie !
    Un plan aurait été conçu, qui viserait à diminuer les dépenses de la sécurité sociale. Certains ici soutiendraient un tel plan, mais il n’a jamais existé ! Vous êtes les seuls à affirmer que ces dépenses ont diminué ! Au contraire, elles ont progressé, plus rapidement que la croissance. C’est une réalité ! Si votre motion n’est pas votée, il sera justement intéressant d’examiner cette augmentation.
    Il y a aussi une énormité : la réforme des retraites adoptée il y a deux ans aurait aggravé la situation ? Très sincèrement, qui ici peut penser sérieusement que, sans l’adoption de cette réforme, les comptes de la sécurité sociale auraient, en 2030, été dans un état pire que les projections, déjà pas très bonnes, ne le laissent anticiper ?

    M. René Pilato

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    Ceux qui sont trop malades pour aller bosser quand ils sont vieux !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    C’est une évidence !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Les indications du COR ne vont pas dans ce sens.
    Monsieur le député Hadrien Clouet, je vous écoute toujours avec attention. Vous avez commencé par appeler à en finir avec le cirque. (Mme Ségolène Amiot s’exclame.) Très sincèrement, mes chers collègues, je ne sais pas qui fait le cirque.

    M. Jean-François Coulomme

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    Au moins, on a trouvé les clowns !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Moi, je respecte tout le monde. Je pense que le sujet dont nous parlons est trop grave pour s’exprimer ainsi. (Mme Justine Gruet et M. le rapporteur pour avis applaudissent.) Nous sommes là pour examiner nos comptes sociaux. Ici, nous avons un boulot. Or souvent, nos concitoyens nous demandent : « Que faites-vous au Parlement ? Quel spectacle donnez-vous ? »
    Nous avons une mission : contrôler les comptes sociaux. Nous pouvons les rejeter mais, au moins, examinons-les ! Il n’y a que quatre articles dans ce texte : ce n’est pas beaucoup ! Nous pouvons tout de même consacrer quelques heures à leur examen, afin de les commenter et que vous puissiez vous exprimer sur l’Ondam ou encore les différents régimes ! Alors, chacun pourra échanger ! Sans cela, vous couperez court au débat. Or vous aimez le débat, monsieur Clouet !

    M. Hadrien Clouet

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    On adore ça !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Il est encore temps de retirer votre motion. Certains l’ont fait à d’autres moments ! Si nous votons cette motion de rejet préalable, pensez-vous sincèrement que la vie des Français s’en trouvera améliorée ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. L’orateur se tourne vers les bancs des groupes RN et UDR.) Je me tourne de l’autre côté : vous aussi allez voter. Je pense que cette motion de rejet préalable est malvenue. Il faut que nous puissions examiner les quatre articles afin de déterminer ce qui a été fait en 2024 et nous prononcer sur les chiffres.

    M. Emeric Salmon

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    On est là pour rejeter, pas pour réécrire !

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    J’imagine que vous avez bien écouté nos collègues : pouvez-vous souscrire à cette réécriture comptable fallacieuse, un brin caricaturale ? Pouvons-nous collectivement souscrire à la volonté de ne pas rembourser la dette sociale ? Nous ferions emprunter à notre pays un chemin très dangereux !
    Telles sont les raisons pour lesquelles je vous invite à vous opposer à cette motion de rejet préalable.

    Explications de vote

    M. le président

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    Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Nous en venons aux explications de vote. La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac (LIOT)

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    Nous examinons le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024. L’issue de cet examen ne remet nullement en cause la mise en discussion du PLFSS, ce qui relativise l’importance du vote du présent texte. Il y a d’ailleurs quelque incohérence à examiner un tel projet de loi d’approbation alors même que la LFSS afférente a été adoptée sans vote ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Je le dis d’entrée de jeu : notre groupe ne pourra soutenir un texte qu’il n’a pas pu voter et qui trace d’inquiétantes perspectives d’avenir.
    Au terme de l’année 2024, nous ne pouvons que déplorer l’état des comptes. En effet, s’il s’avère finalement moins important que prévu, le déficit des comptes sociaux s’élève tout de même à 15,3 milliards d’euros en 2024, contre 10,8 en 2023. Il pourrait atteindre 22,1 milliards d’euros en 2025 et 24,1 en 2028.
    Dans ce contexte préoccupant, la plus haute juridiction financière de notre pays alerte sur une potentielle crise de liquidité susceptible de compromettre le financement de nos prestations sociales. Cette trajectoire pose notamment le problème des recettes. On a beaucoup parlé des dépenses mais certains groupes ont insisté sur les recettes, car ce déficit vient bien d’un amoindrissement de ces dernières, avec par exemple 80 milliards de cotisations sociales !
    Notre groupe avait pourtant proposé, lors de l’examen des précédents PLFSS, de supprimer ces allègements à partir de 2,5 smic, compte tenu du rapport coût-efficacité. Nous ne cachons pas notre inquiétude majeure face au déficit et à l’endettement croissant des hôpitaux publics, dont l’encours dépasse 30 milliards. J’en profite pour saluer une fois de plus la compétence et le dévouement du personnel de ces hôpitaux dans leur lutte continue contre la maladie et pour le bien-être de nos concitoyens.
    S’agissant de l’année 2024, notre groupe peut difficilement se prononcer sur un budget dont il ne partageait pas les orientations à l’automne 2023 et à propos duquel il n’a ensuite pas pu s’exprimer.

    M. le président

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    La parole est à M. Yannick Monnet.

    M. Yannick Monnet (GDR)

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    D’abord, mesdames les ministres, ne nous dites pas ici ce qu’il serait ou non responsable de voter. Depuis que je suis élu, je n’ai jamais eu l’occasion de voter un seul PLFSS. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) J’ai défendu des amendements, j’en ai fait adopter et vous les avez balayés à coups de 49.3 ! Le résultat de ces comptes est donc le vôtre. Je suis convaincu que les choix d’Emmanuel Macron depuis 2017 conduisent à cette situation et qu’elle est préméditée et volontaire.
    Deuxièmement, ne nous dites pas que le contexte serait insupportable. Je vous rappelle quand même que la sécurité sociale a été créée en 1945, alors que le pays se trouvait dans une autre situation qu’aujourd’hui ! Heureusement qu’à l’époque, les gens avaient un peu plus d’ambition et de sens de l’intérêt général, sans quoi nous n’aurions jamais, alors, créé la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Nicolas Thierry applaudit également.)
    Troisièmement, je trouve que la photo n’est pas bonne. Je suis désolé, monsieur le rapporteur : si l’on nous demande de voter c’est qu’on nous demande notre avis ! Donc nous le donnons, en exerçant notre liberté de vote ! Donc nous avons le droit de voter contre et de dire pourquoi nous nous opposons à cette photographie. Il s’agit d’affirmer qu’elle ne nous convient pas, non de remettre en cause les chiffres.

    Mme Liliana Tanguy

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    Ben si !

    M. Yannick Monnet

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    Toutefois, je ne voterai pas la motion de rejet préalable, car je fais partie de ceux qui pensent que les chiffres livrés dans le rapport de la Cour des comptes sont très inquiétants, du moins pour certains d’entre eux, raison pour laquelle je crois que nous ne pouvons faire l’économie d’un véritable débat sur le financement de la sécurité sociale.

    Mme Liliana Tanguy

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    Ben alors ?

    M. Yannick Monnet

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    Je voterai contre tous les articles et contre cette photographie mais j’estime que nous devons avoir ce débat sur la sécurité sociale, sur la question des recettes et sur celle des dépenses. L’enjeu fondamental n’est d’ailleurs pas le déficit puisque, tant qu’il y aura du travail, il y aura des cotisants et le déficit sera stabilisé. Le problème réside dans la dette et dans sa financiarisation et, plus largement –⁠ je pense qu’il s’agit là de votre projet politique –, dans la financiarisation de la sécurité sociale, qui conduit à substituer de l’impôt à la cotisation, ce qui change la nature même de cette dernière. Nous devons avoir ce débat dès à présent.

    Mme Sandrine Runel

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    Ça fait dix ans qu’on le leur demande !

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Fayssat.

    M. Olivier Fayssat (UDR)

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    Que les prévisions aient été utilisées comme une variable d’ajustement ou qu’il s’agisse d’une mauvaise surprise décevante, ce déficit de 15 milliards n’est pas un accident : c’est un échec de plus. Dans ces conditions, nous n’approuverons pas les comptes de la sécurité sociale. De toute évidence, la majorité de cet hémicycle se prononcera dans le même sens. Nous ne voulons pas cautionner ce budget calamiteux et voterons donc pour cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Joëlle Mélin.

    Mme Joëlle Mélin (RN)

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    L’exercice d’aujourd’hui, qui consiste à se prononcer sur l’approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2024, explique à lui seul les mécanismes de la grande déroute budgétaire de la France. Comment peut-on donner quitus à un compte de gestion issu de la compilation de chiffres d’origines diverses, dont les différents éléments ont été disséqués et fait l’objet d’évaluations très négatives dans deux rapports récents de la Cour des comptes ?
    Le premier, le rapport de certification des comptes du régime général de sécurité sociale pour l’exercice 2024, est assassin. Quelques exemples : 20 milliards d’euros de fraude détectés et non recouvrés ; un déficit de 14 milliards et des anomalies importantes relatives aux estimations comptables, aux actifs et aux passifs mais surtout à la gestion des bénéficiaires, pour 4,4 milliards, présentés par la branche maladie ; s’agissant de l’activité de recouvrement, des faiblesses majeures du cadre général du contrôle interne, eu égard en particulier aux 73 milliards des niches sociales ; la branche vieillesse présente un déficit de 5,6 milliards et pâtit également de contrôles internes très insuffisants –⁠ un dossier sur huit présente toujours des erreurs à la liquidation –, tandis que 40 milliards de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales sont payés par l’État ; quant à la branche famille, en trois ans, elle a tout simplement perdu 16 milliards, corps et biens. Dans l’ensemble, un épais brouillard plane sur les deux tiers du budget de la sécurité sociale, soit 450 milliards.
    Le deuxième rapport, relatif à l’application des lois de financement de la sécurité sociale, est tout aussi clair : une trajectoire des comptes de la sécurité sociale hors de contrôle, avec une projection de dette impressionnante. La Cades ne peut statutairement plus rien absorber et l’Urssaf Caisse nationale devra assumer un plafond d’emprunt multiplié par dix en quinze ans –⁠ il est ainsi passé de 13 à 135 milliards. Comment voulez-vous que tout cela éclaire ? L’esprit qui règne est l’inverse de celui de la loi.
    Dès lors, il nous est impossible d’approuver ces comptes. La photo est à la fois incertaine et fallacieuse au regard de la situation réelle –⁠ oui, monsieur le rapporteur général, fallacieuse ! Nous voterons donc cette motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Stéphanie Rist.

    Mme Stéphanie Rist (EPR)

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    Après, la semaine dernière, la énième motion de censure inutile de la session, après des stratégies d’obstruction, après une stérile proposition de résolution d’abrogation de la réforme des retraites, voici la nouvelle idée démago de la semaine offerte par les insoumis : voter avec le RN une motion de rejet sur un texte qui n’est qu’une photographie de nos comptes sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Pourtant, nous aurions pu discuter des 24,1 milliards d’euros de déficit à venir, des branches vieillesse et maladie à rééquilibrer, des solutions de financement qui ne détruiraient pas plusieurs dizaines de milliers d’emplois et des réformes structurelles qui permettraient de sauvegarder notre modèle social dans le temps. Mais vous ne souhaitez pas débattre (Mêmes mouvements), …

    M. Hadrien Clouet

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    Vous n’avez pas voulu débattre du PLF !

    Mme Stéphanie Rist

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    …vous ne voulez pas regarder la réalité en face. Vous en porterez la responsabilité et c’est pourquoi notre groupe ne votera évidemment pas cette nouvelle plaisanterie. (Applaudissements sur divers bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Agnès Poussier-Winsback applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Louis Boyard.

    M. Louis Boyard (LFI-NFP)

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    Je vais dire bravo au gouvernement parce que la réforme des retraites passée par le 49.3 et qui en plus fait baisser le chômage des seniors, c’est le truc le plus macroniste que j’aie entendu de la semaine. Fallait vous voir faire la fête : « Ouais, moins 0,4 point sur le chômage des seniors !… » Mais vous ne dites pas que le chômage des jeunes, lui, augmente tant qu’il a dépassé les 19 %. À coups de 49.3, vous avez fait travailler plus longtemps papy et mamy, et mettez à leur place leurs petits-enfants, qui sont là à attendre, au chômage, alors qu’ils aimeraient se lancer dans la vie. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous prétendez faire partie de l’orchestre du Mozart de la finance alors qu’en réalité, vous êtes plus proches de l’autotune… Vos chiffres sur le chômage des jeunes ne sont même pas sincères. Détaillons-les et voyons quels emplois vous créez : 900 000 dans l’apprentissage et 700 000 dans l’autoentreprenariat… Comment trouver un logement et vivre avec l’inflation quand le salaire est inférieur au smic ? Comment les jeunes pourraient-ils devenir autonomes grâce aux contrats spécifiques que vous avez créés pour eux mais qui ne serviront qu’à les placer dans une situation spécifique de précarité ? (Mêmes mouvements.)
    Vous allez me dire qu’il ne faut pas laisser une dette aux générations futures. Mais le meilleur moyen de trouver des cotisations, c’est encore de créer du travail. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.) Et les dizaines de milliards de cadeaux que vous avez faits aux ultrariches n’ont pas permis de créer du travail, encore moins du travail qui rende indépendants les jeunes. Et si vous vous souciiez tant soit peu de ne pas laisser une dette aux jeunes, vous vous attaqueriez à la dette écologique, qui les préoccupe bien davantage !

    Mme Stéphanie Rist

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    Et les ZFE ? !

    M. Louis Boyard

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    S’il y a besoin d’investissements publics pour créer les 300 000 postes d’agriculteurs et pour développer l’industrie verte dont on a besoin, croyez-moi que les jeunes sont prêts à lutter contre cette dette !
    Enfin, vous nous dites que c’est juste une photographie des comptes, mais nous, on n’a pas demandé au photographe de faire la photo ! D’ailleurs le photographe n’était pas invité à la fête puisqu’il a été battu aux dernières élections ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel (SOC)

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    Nous devons vous reconnaître, mesdames les ministres, une qualité : vous ne manquez pas d’audace. Car une semaine après le tollé du gouvernement suscité par la Cour des comptes qui qualifie ses trajectoires budgétaires de chaotiques et hors de contrôle, vous nous demandez aujourd’hui, très tranquillement, d’approuver la banqueroute sociale de 2024… Six mois après un énième passage en force de votre budget par le 49.3, vous nous demandez d’approuver les comptes d’une loi de finances sur laquelle la représentation nationale n’a même pas pu s’exprimer !
    Alors là c’est trop ! Nous n’en pouvons plus de vos discours irresponsables et surtout austéritaires !

    M. Jean-François Coulomme

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    Les socialistes vont censurer le gouvernement !

    Mme Sandrine Runel

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    C’est toujours pour vous la faute aux dépenses sociales et voilà pourquoi vous programmez la mort de notre protection sociale. Avec vous, c’est toujours moins pour les services publics mais, par contre, jamais de taxe sur le capital. Encore cette année, votre gouvernement s’est obstiné dans sa politique de l’offre, sans comprendre qu’elle envoyait la sécurité sociale droit dans le mur : les exonérations de cotisations sociales ayant augmenté de près de 49 milliards d’euros sur les huit dernières années, il n’y a pas besoin d’être une championne d’algèbre pour voir que ce montant permettrait d’amortir une bonne partie du déficit. Mais non, vous et les vôtres, vous avez fait le choix de subventionner les entreprises sans condition ni contrepartie, au détriment de notre système de protection sociale.
    Dès lors, mesdames les ministres, ce ne sont pas les comptes de la sécurité sociale que vous nous demandez d’approuver, mais encore une fois un renoncement. (M. Hadrien Clouet applaudit.) Un renoncement à ce que la sécurité sociale incarne depuis sa création : la solidarité, la justice et la dignité !

    M. Peio Dufau

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    Eh oui !

    M. Louis Boyard

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    Votez la censure !

    Mme Sandrine Runel

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    Nous, socialistes, voulons redonner à notre protection sociale les moyens de son ambition. Nous voterons donc d’abord la motion de rejet –⁠ on verra pour la censure plus tard ! – car nous refusons d’être complices de ce démantèlement silencieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet (DR)

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    Pas de faux suspense : le groupe Droite républicaine s’opposera à la motion de rejet préalable déposée par La France insoumise. Non pas que nous soutenions le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale mais nous refusons, nous, de mêler nos voix à celles des insoumis. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    C’est la meilleure blague de l’année !

    Mme Justine Gruet

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    Ce texte permet de dresser le bilan budgétaire de la sécurité sociale : il révèle un déficit de plus de 15 milliards d’euros, inférieur aux prévisions certes, mais un tel niveau de dépenses doit nous amener collectivement à faire preuve de courage. Car derrière ces montants colossaux, c’est l’avenir de notre système social qui se joue avec une branche vieillesse non financée, une dette sociale croissante et un risque de crise de liquidités dès 2027. La Cour des comptes est formelle : la branche famille n’est toujours pas certifiable et les indus non recouvrés atteignent 6,3 milliards d’euros. Pire, l’endettement net de la sécurité sociale a grimpé à près de 121 milliards d’euros, soit 10 milliards de plus qu’en 2020 au moment de la crise sanitaire. Vous l’aurez compris : face à une telle situation, nous avons besoin de lucidité et de réformes structurelles.
    Ainsi, tout le monde devrait contribuer à un impôt direct, à hauteur de ses possibilités ; les allocations familiales devraient être une vraie aide à l’accompagnement éducatif et non une source de revenus ; l’allocation sociale unique, défendue par Michel Barnier, est une piste à suivre pour gagner en efficacité dans la dépense publique et pour retrouver le chemin du travail pour celles et ceux qui s’en sont éloignés.

    M. Jean-François Coulomme

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    Pourquoi n’est-il plus là alors ? !

    Mme Justine Gruet

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    Pour le financement des retraites, nous devons répondre aux besoins de projections plus individuelles et plus efficientes tout en prévoyant une part de capitalisation.
    Mais le RN en s’alliant à LFI, tout comme il l’avait fait pour censurer Michel Barnier, préfère empêcher tout débat en rejetant le texte en bloc. C’est une posture politique et non une solution. L’heure est donc au choix courageux parce qu’il est temps de changer de cap. Nous ne validerons donc pas ces comptes, mais nous nous opposerons au rejet préalable pour pouvoir exposer nos divergences et construire des alternatives crédibles. (M. Jean-René Cazeneuve applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Hendrik Davi.

    M. Hendrik Davi (EcoS)

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    Pourquoi voter cette motion de rejet préalable sur les comptes de la sécurité sociale ? La première raison est démocratique : le projet de loi de financement de la sécurité sociale a été rejeté par la commission des affaires sociales et par l’Assemblée en séance. Ce projet n’est pas celui de notre assemblée : c’est celui de l’exécutif, celui du 49.3 ! (« Oh là là ! » sur plusieurs bancs des groupes RN, DR et HOR.)
    Sur le fond, qu’apprend-on avec ces comptes de la sécurité sociale ? Il faut les examiner parce qu’ils sont intéressants. Le premier enseignement, c’est qu’il y a un décalage entre le contenu du document et le discours catastrophiste sur l’état des finances de la sécurité sociale : le premier ministre parle de « déficit considérable » et propose une révolution à travers son projet de TVA sociale et, de son côté, la Cour des comptes sonne le tocsin sur le déficit de la sécurité sociale en qualifiant les finances de « hors de contrôle » et en annonçant un « point de bascule », rien que ça ! Or quand on veut tuer la sécurité sociale, on l’accuse de déficit, c’est la même rengaine depuis 1945 !

    M. Sylvain Berrios

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    Mais calmez-vous.

    M. Hendrik Davi

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    Qu’en est-il vraiment ? S’agissant du périmètre des administrations de la sécurité sociale, il y a un excédent, certes en baisse mais tout de même un excédent de 1,3 milliard d’euros, et personne ne l’a dit ! Sur le périmètre des régimes obligatoires, il y a certes un déficit de 15 milliards, mais moindre que les 18 milliards attendus, sachant que les dépenses de l’assurance maladie s’élèvent à 257 milliards, soit 0,5 milliard de moins que prévu. Quant à ces 15 milliards, ils correspondent à un déficit global de 2,4 %, soit moins que les 3 %, chers collègues, Hadrien Clouet l’a rappelé. Mais il est vrai qu’on ne peut pas se féliciter d’un budget en déficit, d’autant plus que vous avez imposé l’allongement du départ à la retraite et que l’hôpital est en situation de burn-out chronique.
    Quelles sont les solutions ? Il faut en finir avec trois absurdités : en finir avec les exemptions de cotisations sociales, par exemple avec la participation aux résultats de l’entreprise qui constitue un manque à gagner de 14,6 milliards d’euros, en finir avec les exonérations de cotisations sociales non compensées, soit 5,5 milliards d’euros selon la Cour des comptes et en finir avec les exonérations sur les primes, soit 3 milliards ! Au total 28 milliards avec la hausse de la CSG, la cotisation sociale généralisée, rien que pour une année ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Merci pour ce moment !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    C’est de l’argent magique !

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois (Dem)

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    Comme sur le projet de loi d’approbation des comptes de l’État à l’instant et comme sur celui d’approbation des comptes de la sécurité sociale l’année dernière, notre assemblée doit à nouveau se prononcer sur une motion de rejet déposée par le groupe LFI. Une nouvelle fois, les députés de La France insoumise veulent nous entraîner par des méthodes qui n’honorent pas la représentation nationale. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Parfois, cela consiste à pourrir le débat –⁠ j’utilise à dessein ce terme – en déposant des milliers d’amendements, et aujourd’hui cela revient tout bonnement à refuser le débat par cette motion de rejet. Dans les deux cas, le résultat est le même : nous empêcher de débattre du fond. Certes, vous utilisez les outils légaux mis à la disposition de tous les parlementaires, mais vous ne pouvez ignorer le tort que vous faites à la démocratie représentative. (« Oh ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous dévoyez non seulement la lettre, mais également l’esprit de nos institutions. C’est particulièrement le cas pour cette motion de rejet. M. Clouet nous a fait en la défendant un très beau numéro de démagogie, voire de populisme sinon de complotisme… On a ainsi entendu que des milliards auraient été dissimulés. C’est affligeant.

    M. Hadrien Clouet

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    16 milliards !

    M. Nicolas Turquois

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    Il faut rappeler que la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale nous permet d’examiner, séparément du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’état des comptes de l’année précédente. C’est une disposition législative de 2022 qui permet d’avoir un temps dédié à l’examen des comptes sociaux. Or vous, les chantres de la VIe République, vous refusez d’examiner un texte de loi qui précisément renforce l’information du Parlement sur la situation des comptes sociaux et sur les résultats des politiques de sécurité sociale. Quand le patient a la fièvre, comme c’est le cas pour notre sécurité sociale avec ses 15 milliards d’euros de déficit, le groupe LFI propose tout bonnement de jeter le thermomètre à la poubelle. Quel bel esprit de responsabilité…. Le groupe Les Démocrates se refuse à participer à cette démarche. Nous voterons contre la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    M. Thibault Bazin, rapporteur général

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    Très bien !

    M. Christophe Bex

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    Mais c’est une aberration que ce PLFSS !

    M. le président

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    La parole est à M. François Gernigon.

    M. François Gernigon (HOR)

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    Pour la troisième année consécutive, notre assemblée examine un projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale en vertu de la loi organique du 14 mars 2022. Il ne s’agit pas d’un débat budgétaire classique, mais d’un exercice démocratique de transparence. Ce texte n’oriente pas l’avenir, mais il éclaire le passé et permet ainsi au Parlement de mieux comprendre les trajectoires réelles, d’en mesurer les écarts avec les prévisions et le cas échéant, d’en tirer les leçons.
    Les chiffres que nous examinons aujourd’hui sont sans ambiguïté : en 2024, le déficit du système a atteint 15,3 milliards d’euros, et la trajectoire prévue pour 2025, soit 22 milliards de déficit, appelle une réponse claire. Nous ne pouvons plus nous contenter de piloter à vue. Branche après branche, le constat est le même : la branche maladie, avec un déficit de 13,8 milliards d’euros, continue de dériver sous l’effet d’une dynamique de dépenses structurelles, et la branche retraite glisse peu à peu dans le rouge malgré la réforme de 2023. Au-delà des déficits, c’est la nature même du financement de la protection sociale qui se transforme : la part des cotisations sociales s’effrite tandis que celle des impôts affectés dépasse durablement les 50 %. Cette évolution appelle à un débat de fond sur l’assiette, sur la lisibilité et sur la confiance dans notre système.
    Mon groupe rappelle que ce texte n’engage pas les orientations futures du gouvernement, mais qu’il permet à la représentation nationale de constater l’état de nos comptes sociaux. Vous pouvez, mes chers collègues, vous mentir à vous-mêmes et cette année encore rejeter le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale par refus de voir la réalité en face, mais le groupe Horizons & indépendants ne jouera pas à ce jeu et votera évidemment contre cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. le président

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    Je mets aux voix la motion de rejet préalable.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        169
            Nombre de suffrages exprimés                169
            Majorité absolue                        85
                    Pour l’adoption                111
                    Contre                58

    (La motion de rejet préalable est adoptée.)

    M. le président

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    En conséquence, le projet de loi est rejeté.
    (Applaudissements sur divers bancs des groupes LFI-NFP et RN.)

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures vingt.)

    M. le président

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    La séance est reprise.

    5. Profession d’infirmier

    Commission mixte paritaire

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi sur la profession d’infirmier. (no 1489).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure de la commission mixte paritaire.

    Mme Nicole Dubré-Chirat, rapporteure de la commission mixte paritaire

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    J’exprime ma fierté et ma joie que les deux chambres du Parlement aient pu si rapidement conclure un accord à propos de la proposition de loi sur la profession d’infirmier. Ce texte est historique. Il va transformer la manière dont nous considérons la profession infirmière dans le droit français et nous rapprocher de nos voisins européens. Désormais, le métier d’infirmier ne sera plus défini par exception au monopole médical. Il ne sera plus contraint par un décret de compétences, dit décret d’actes, mais sera défini à partir de ce qui fait l’essence de la profession : ses missions.
    Au terme de l’examen parlementaire, nous avons retenu six grandes missions : les soins curatifs, préventifs, palliatifs et relationnels ; la prévention, la promotion de la santé et l’éducation thérapeutique ; la coordination des parcours de santé et l’orientation des patients ; la participation aux soins de premier recours ; la formation des étudiants, des pairs et des autres professionnels de santé ; la recherche en science infirmière. Elles définissent ce qui fait l’unité du métier d’infirmier, dans tous les secteurs d’activité et d’exercice, en ville, à l’hôpital, en Ehpad, dans les écoles ou dans les crèches.
    Pour les 650 000 infirmiers, qui constituent la colonne vertébrale de notre système de soins, ce texte marque une reconnaissance qui était attendue depuis longtemps. Sa portée n’est pas purement symbolique. En ne définissant plus les actes, on va permettre aux infirmiers d’évoluer dans leur pratique, d’améliorer leurs compétences et de mieux répondre aux besoins de la population.
    Il ne sera plus nécessaire de modifier la loi pour permettre aux infirmiers de prescrire un examen biologique ou un dispositif médical. On leur reconnaît le droit de prescription des produits de santé et des examens complémentaires nécessaires à leur exercice auprès des patients. Ce texte reconnaît enfin la consultation infirmière, dont le périmètre et le prix seront fixés dans le cadre de discussions avec la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam).
    Au terme de la commission mixte paritaire (CMP), nous nous sommes mis d’accord avec les sénateurs sur neuf articles. L’article 1er, que je viens d’évoquer et qui bénéficiera à tous les infirmiers, où qu’ils exercent, redéfinit leur métier. L’article 1er  bis A crée la fonction d’infirmier coordonnateur en Ehpad. L’article 1er  bis fait des infirmiers des professionnels de santé chargés des soins de premier recours, au même titre que les médecins traitants. L’article 1er  ter crée un dispositif d’accompagnement à la reprise d’activité pour les infirmiers ayant interrompu leur carrière pendant une durée prolongée. L’article 1er  quater  A dispose que les infirmiers scolaires seront désormais des infirmiers spécialisés recrutés au niveau master, soit à bac + 5. L’article 1er  quater ouvre la possibilité d’expérimenter l’accès direct aux infirmiers exerçant dans des structures d’exercice coordonné. L’article 2 élargit les lieux d’exercice des infirmiers en pratique avancée (IPA) et prévoit la possibilité pour les infirmiers spécialisés d’exercer en pratique avancée selon des modalités spécifiques. L’article 2  bis inclut les conditions de facturation des indemnités kilométriques dans le contenu des conventions négociées entre l’assurance maladie et les infirmiers libéraux.
    Les discussions en CMP ont été plutôt consensuelles et ont permis d’améliorer la rédaction d’articles dont le fond n’était pas contesté. Par exemple, nous avons transformé le dispositif de formation obligatoire après une interruption longue en un dispositif d’accompagnement à la reprise d’activité qui nous a paru nettement plus approprié.
    Nous avons cependant eu deux désaccords : l’un sur l’opportunité de créer une spécialité de niveau master pour les infirmiers scolaires et l’autre sur la reconnaissance en pratique avancée pour les infirmiers spécialisés. Comme certains sénateurs, je me suis opposée au premier point car je trouve la formation de spécialité longue et coûteuse alors que nous manquons cruellement d’infirmiers et d’infirmières scolaires : il n’y en a qu’un ou qu’une pour 6 600 élèves et 15 000 postes sont vacants. Ces professionnels manifestent d’ailleurs aujourd’hui, tandis qu’Élisabeth Borne, ministre de l’éducation nationale, a proposé qu’ils fassent plus de visites et de repérages des troubles existants. Leurs missions de prévention, d’éducation et d’accompagnement sont nécessaires à toutes les étapes de la scolarité et auprès de tous les élèves. Ils ont d’autres possibilités que la spécialité de niveau master : la formation continue, qui pourrait être harmonisée et labellisée, ainsi que l’accès à la formation IPA, avec un exercice dans le secteur de l’enfance rendu possible par l’article 2 du texte.
    À propos du second point de désaccord, qui porte sur une partie de l’article 2, je pense que la reconnaissance de pratique avancée pour les infirmiers spécialisés devra se faire sous conditions, notamment celles définies par un futur décret en Conseil d’État, afin de ne pas déstabiliser la fonction d’IPA, qui est déjà fragile.
    Compte tenu de l’attente et de l’urgence à faire entrer ce texte en vigueur, je vous prie, monsieur le ministre, de veiller à la publication rapide de ses décrets d’application. Et j’invite mes collègues à voter de façon unanime en sa faveur, car il est attendu par toute la profession infirmière, que je remercie chaleureusement pour son travail quotidien auprès des patients, partout dans le territoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR. –⁠ Mme Justine Gruet applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

    M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins

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    Je suis très heureux de retrouver l’Assemblée pour ce qui constitue l’ultime étape du cheminement parlementaire d’une réforme importante et attendue. J’ai dit dès l’ouverture des débats sur cette proposition de loi que nous devions avancer vite pour concrétiser la refonte du métier d’infirmier.
    Je veux donc d’abord rendre hommage à l’important travail transpartisan mené sur ce texte. Je salue naturellement Mme la rapporteure, Nicole Dubré-Chirat, avec qui le dialogue a été constant tout au long des débats, M. le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux, les membres de la CMP et l’ensemble des parlementaires, de tous les bancs, qui se sont intéressés au texte.
    La capacité à avancer rapidement, à dialoguer et à coconstruire est pour moi la preuve, s’il en fallait une, que nous savons nous rassembler, en passant au-dessus les clivages et les considérations partisanes, quand il s’agit de concevoir des réformes utiles et concrètes pour le système sanitaire, la santé des Français et les professionnels du secteur. Dès mon arrivée au ministère, j’ai indiqué que je voulais construire ma politique de santé avec le Parlement et les parlementaires. Ce texte est le parfait exemple de ce que je voulais dire et c’est dans cet état d’esprit que je veux que nous continuions à travailler ensemble.
    Or nous avons encore de quoi faire ! Sans être exhaustif, je pourrais parler du futur texte sur l’accès aux soins destiné à décliner le pacte sur les déserts médicaux, de la suppression du numerus apertus ou de la proposition de loi relative au registre national des cancers, que vous devriez avoir l’occasion d’examiner le 23 juin.
    Pour en revenir au sujet du jour, je tiens à souligner combien les infirmières et les infirmiers se sont mobilisés dans toutes les concertations et les dizaines de groupes de travail installés depuis 2023 pour préparer cette réforme, que nous leur devons. Nous la devons aux plus de 640 000 infirmières et infirmiers et aux plus de 100 000 étudiants qui aspirent à exercer ce passionnant métier. Ils sont et seront les chevilles ouvrières de notre système de santé, dans les services hospitaliers, en ville, au domicile des patients et jusque sur les terrains de crise, comme à Mayotte où je me suis rendu deux fois depuis que je suis ministre. Ce sont eux qui prennent soin de nos concitoyens à travers les très nombreuses missions qu’ils assurent au quotidien et dans tous les territoires.
    C’est pour cela que, conformément à mes engagements, j’ai adressé au directeur de l’assurance maladie une lettre de cadrage ambitieuse qui permettra d’ouvrir des négociations conventionnelles et de traduire, en ville, les avancées de ce texte. Si j’ai tenu à prendre le temps de saluer l’important travail de fond mené par les parlementaires et avec la profession, des prémices de la réforme jusqu’en CMP, c’est parce qu’il aboutit à un texte équilibré et ambitieux, à un texte à la hauteur des enjeux et des attentes.
    Le métier d’infirmier est peut-être celui qui a le plus évolué au cours des dernières années. Il s’est grandement diversifié et élargi, notamment sous l’effet d’une demande de soins croissante et de la hausse des maladies chroniques ainsi que des polypathologies. Dans le même temps, il est devenu plus technique et plus pointu.
    Le Parlement a été moteur dans ces avancées, par exemple en étendant les compétences vaccinales des infirmiers, en les autorisant à rédiger des certificats de décès ou en ouvrant un accès direct à certaines de leurs activités. Ces mesures s’inscrivent pleinement dans les orientations du pacte de lutte contre les déserts médicaux que j’ai annoncé en avril.
    Toutefois, nous avons aujourd’hui besoin d’une refonte plus globale, que ce texte permet. Avec lui, par la première définition législative en propre du métier d’infirmier, nous sortons de la logique un peu étroite et fermée du décret d’actes, qui n’avait d’ailleurs pas été revu depuis 2004. L’approche de la profession par grandes missions est bien plus cohérente, agile et réaliste. Elle représente un changement important dans la vision française du métier, voire une petite révolution.
    Les cinq grandes missions traduites dans la proposition de loi s’alignent parfaitement avec les besoins actuels du système de santé. Le texte consacre par ailleurs la notion de consultation infirmière, en s’appuyant sur les 277 diagnostics existants et déjà au cœur du raisonnement clinique des infirmiers. Ainsi que je l’ai déjà affirmé, la consultation infirmière n’a aucunement vocation à concurrencer la consultation médicale. La philosophie de ce texte consiste à faire progresser tout le système de santé et à faire des leviers de toutes les compétences dont nous sommes riches et dont nous avons besoin. Il n’a jamais été question d’opposer les professions entre elles. Au contraire, le but est de les faire progresser toutes dans leurs champs respectifs.
    C’est exactement dans cet état d’esprit constructif que nous avons cheminé à propos de l’article 2 du texte. Sa rédaction, telle que confirmée par la CMP, résulte d’un important travail collectif mené avec Mme la rapporteure, avec les sénateurs et avec les représentants des différentes spécialités infirmières. Elle ouvre la voie à la définition d’une pratique avancée pour chacune des trois spécialités infirmières –⁠ infirmier de bloc, infirmier d’anesthésie et infirmier de puériculture – tout en préservant la spécificité de chacune.
    Nous avons atteint notre objectif : que les avancées bienvenues de l’article 2 correspondent le plus possible aux attentes des professionnels comme aux impératifs de sécurité des soins. Je m’en réjouis, car j’ai toujours soutenu la pratique avancée, que je considère comme un levier tant pour renforcer l’accès aux soins que pour dynamiser les carrières infirmières. C’est d’ailleurs moi qui ai signé en janvier 2025 le décret instaurant l’accès direct aux IPA dans les établissements de santé et dans les structures d’exercice coordonné. J’ai également signé l’arrêté leur ouvrant la primo-prescription le mois dernier. Nous continuons donc, avec réalisme et ambition, de renforcer et d’accompagner la montée en charge de la pratique avancée, en elle-même comme dans le champ spécifique de l’exercice spécialisé.
    Mesdames et messieurs les députés, j’ai tenu à rendre hommage à la profession infirmière et à son rôle essentiel auprès des patients dans tous les territoires. Ce texte de reconnaissance et de confiance est la traduction de la place centrale que les infirmiers et infirmières occupent dans le système de santé et de la priorité que nous leur accordons. C’est un jalon majeur dans la transformation du métier. Les décrets d’application de ce texte ambitieux suivront rapidement. Les concertations avec la profession aboutiront prochainement à un décret en Conseil d’État, qui définira l’exercice infirmier à travers cinq domaines d’activité et de compétence ; un arrêté fixera notamment la liste des soins. Les autres textes réglementaires suivront au même rythme ; j’y serai attentif et je me mobiliserai personnellement pour que soient traduites dans les faits les nouvelles missions des infirmiers.
    Je vous assure, comme j’assure à tous les professionnels, que je suis pleinement mobilisé pour faire en sorte que ces mesures fortes se déploient rapidement sur le terrain, afin qu’elles produisent leur plein effet dans le quotidien des Français et des professionnels.
    Le travail continue. Je suis tout autant impliqué dans la réingénierie en cours de la formation infirmière, avec Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle est en effet nécessaire pour traduire dans les cursus les avancées du texte et pour moderniser avec la même ambition les études de la prochaine génération d’infirmières et d’infirmiers qui soigneront notre pays.
    Depuis toujours, le métier infirmier est innovant, en progression constante. Il a accompagné toutes les transformations de notre système de santé depuis son origine. Nous avons plus que jamais besoin des infirmiers et des infirmières pour relever les défis multiples de l’accès aux soins. C’est pourquoi nous continuerons de construire avec détermination l’avenir de ce beau métier, si essentiel. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. le président de la commission mixte paritaire.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    La proposition de loi sur la profession d’infirmier, que j’avais déposée avec Nicole Dubré-Chirat et de très nombreux collègues, comptait dans sa version initiale trois articles. Elle avait été adoptée le 10 mars dans cet hémicycle, à l’unanimité des députés. Il y a un mois, le 5 mai, les sénateurs approuvaient à leur tour son contenu, tout en lui apportant quelques modifications et ajouts. Lorsque j’ai ouvert, en tant que président, les travaux de la commission mixte paritaire qui s’est tenue la semaine dernière à l’Assemblée nationale, j’avais bon espoir que nous réussissions car ce texte est attendu depuis des années par les infirmiers et infirmières de France.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Il était attendu par les professionnels, mais aussi par les Français. Depuis de longues années, et plus encore depuis la pandémie, ceux-ci savent ce que nous devons à la compétence, au dévouement et à l’investissement des infirmières et des infirmiers dans le système de santé. À l’heure où l’accès aux soins est un sujet de préoccupation pour nos concitoyens, tous connaissent la valeur de ces professionnels. Face au vieillissement de la population et à l’extension des déserts médicaux, il convient de reconnaître le rôle indispensable que jouent les infirmiers, qu’ils exercent en libéral, en maison de santé, en maison de retraite, à l’hôpital ou dans les établissements scolaires, dans la prise en charge des patients.
    En 2050, la France comptera 20 millions de personnes de plus de 65 ans. Les besoins en soins infirmiers augmenteront plus vite que le nombre d’infirmiers. Il était plus que temps de franchir une nouvelle étape, décisive, dans l’histoire de la profession.
    La commission mixte paritaire a montré la volonté transpartisane des deux chambres de soutenir un texte enrichi par la navette parlementaire. Cela témoigne de notre engagement commun à trouver des solutions concrètes pour améliorer l’accès aux soins. Tout le mérite en revient à notre rapporteure, Nicole Dubré-Chirat, que je remercie pour son travail, ainsi qu’à nos collègues sénateurs Jean Sol et Anne-Sophie Romagny, qui ont œuvré dans le même sens au Sénat. Je salue également mon homologue Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales du Sénat : nous avons toujours travaillé en bonne intelligence.
    Permettez-moi de témoigner également ma reconnaissance à M. le ministre et, à travers lui, à l’ensemble du gouvernement. En première lecture, j’avais émis le vœu que cette proposition de loi, très attendue sur le terrain, puisse cheminer et aboutir avant l’été. Il me semblait impensable que la suspension estivale des travaux en diffère de plusieurs mois l’adoption définitive. Cette demande de priorité a été entendue et, malgré les contraintes d’ordre du jour que nous ne connaissons que trop bien, le Parlement a été saisi en temps et en heure. Je m’en réjouis et je remercie tous ceux qui ont agi en ce sens, au gouvernement et au sein des conférences des présidents.
    Mme la rapporteure a déjà indiqué en quoi consistait l’accord scellé en commission mixte paritaire et chacun connaît désormais les contours du texte. Je me bornerai à rappeler sa dimension historique : une loi va définir ce qui fait l’essence de la profession infirmière, indépendamment des lieux et des modes d’exercice, à travers de grandes missions. La France s’aligne enfin sur les autres pays. C’en est fini du décret d’actes, dont la rigidité freinait depuis trop longtemps l’évolution du métier.
    La reconnaissance de la consultation infirmière et du droit de prescription des infirmiers pour tous les produits de santé et examens complémentaires nécessaires à leur exercice : voilà des avancées incontestables à même de répondre aux attentes légitimes des 650 000 infirmiers et infirmières.
    Comme je le disais en mars, nous empruntons la voie qu’il convenait de suivre : définir la compétence des infirmiers de manière autonome et non relativement à d’autres professions de santé. Le texte n’amène ni à substituer des professionnels à d’autres ni à instaurer une médecine de second ordre –⁠ contrairement à ce que certains ont pu prétendre avec excès. Elle participe au contraire d’une évolution vers un système de santé articulé autour de l’équipe soignante, avec un rôle propre pour chacun. La compétence infirmière y a toute sa place ; la pratique avancée y apporte également sa contribution. C’est un combat de cette majorité. Ce combat doit continuer. D’autres leviers pourront, à l’avenir, être actionnés.
    Ce texte marque une avancée importante, qu’il faudra prolonger en traitant le sujet de la formation et en veillant à ce que l’assurance maladie ouvre des discussions en vue de la valorisation des nouvelles compétences et responsabilités des infirmiers et infirmières. Ces étapes sont essentielles. Je souhaite qu’elles soient franchies rapidement.
    Pour le signal de confiance que nous adressons ce soir aux soignants, soyons fiers de ce que nous nous apprêtons à voter. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    Discussion générale

    M. le président

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    Nous en venons à la discussion générale. Comme nous avons un intervenant pour chacun des groupes, je pense qu’il sera difficile de procéder au vote d’ici à la levée. Tout dépendra de la durée des interventions –⁠ étant entendu que chacun est libre d’utiliser ou non la totalité des cinq minutes qui lui sont attribuées. Nous ferons le point tout à l’heure.
    La parole est à M. Jean-François Rousset.

    M. Jean-François Rousset

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    Je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement la rapporteure, Nicole Dubré-Chirat, pour son engagement constant sur ce texte, qui arrive aujourd’hui à son terme. À l’écoute des professionnels de terrain, elle a su construire une proposition de loi ambitieuse, qui reconnaît pleinement le rôle essentiel des infirmières et des infirmiers dans notre système de santé.
    Je salue également l’investissement des ministres qui se sont succédé sur ce dossier, notamment Mme Agnès Firmin Le Bodo, ainsi que le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux, dont le travail a permis d’aboutir à ce résultat, et le ministre Yannick Neuder, qui nous permet d’examiner ce soir ce texte.
    Nous pouvons être satisfaits de l’accord trouvé entre les deux chambres. Il marque une avancée majeure dans la reconnaissance des compétences des professionnels infirmiers. Je le rappelle souvent : on compte 1 infirmier ou 1 infirmière pour 500 habitants. Ce sont des professionnels de proximité, souvent les premiers à entrer en contact avec le patient.
    Depuis 2017, nous avons engagé un mouvement fort vers l’interprofessionnalité et la montée en compétences des soignants. Cette proposition de loi s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Elle clarifie les missions des infirmiers ainsi que leur rôle dans la permanence des soins et renforce leur place dans la pratique avancée. La reconnaissance de la consultation infirmière constitue un tournant important.
    Au-delà, le texte valorise pleinement le rôle de coordination et d’orientation du patient dans le parcours de santé qu’assurent les infirmières et infirmiers. Ils sont pleinement investis dans les structures de soins coordonnés. Ils sont en outre des relais essentiels pour la prévention et l’éducation à la santé –⁠ un rôle exercé au plus près des patients, à domicile, dans des structures de soins coordonnés ou encore à l’école.
    L’accès direct est une avancée structurante : il permet de fluidifier l’accès aux soins, au bénéfice de tous, et de gagner ainsi du temps médical efficace.
    Je me réjouis de la reconnaissance accrue des infirmiers en pratique avancée. Ce statut, qui exige un haut niveau de compétences, mérite d’être pleinement valorisé.
    Autre point important : la transmission à l’Ordre national des infirmiers de l’information relative à la cessation d’activité, qui permettra d’avoir une vision claire des professionnels en exercice. De même, les dispositifs d’accompagnement au retour à l’exercice après une longue interruption –⁠ plus de six ans – sont une réponse bienvenue aux situations concrètes signalées dans l’Aveyron.
    La présente proposition de loi représente une avancée considérable. Elle affirme avec force les compétences des infirmières et des infirmiers : réflexion clinique, diagnostic, action au plus près des besoins des patients. Toutefois, je suis convaincu que cette évolution devra s’accompagner d’une réforme plus large de la formation des soignants. Il nous faut repenser l’enseignement dès le début des études, intégrer les nouvelles attentes des professionnels comme celles des patients et veiller à n’abandonner aucune vocation en cours de route. La réforme de la formation infirmière, actuellement en préparation, devra s’inscrire dans cette réflexion globale.
    Le groupe Ensemble pour la République votera avec conviction pour la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Très bien ! Prenez exemple !

    M. le président

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    La parole est à Mme Karen Erodi.

    Mme Karen Erodi

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    Le texte qui revient de la commission mixte paritaire était attendu par la profession infirmière, qui n’en peut plus, ainsi que par les usagers, qui constatent chaque jour la casse de notre système de santé. Certes, la commission mixte paritaire a permis certains progrès : le rôle propre de l’infirmier est enfin inscrit dans la loi et n’est plus une dérogation ; la consultation infirmière est consacrée et va libérer du temps médical, tout comme l’expérimentation de l’accès direct ; la prescription de certains soins et examens est élargie ; la reconnaissance statutaire des spécificités et la pratique avancée progressent.
    Ces victoires, le corps infirmier les a obtenues au profit des patients. N’en déplaise à l’Ordre des médecins, il convient de rappeler que les infirmières ont souvent pris le relais pour certains actes, notamment dans les déserts médicaux. Les réfractaires ont trouvé des relais à droite et à l’extrême droite : l’avis de l’Académie de médecine sur les compétences propres aux infirmières a été réintégré dans le texte et sera requis avant l’entrée en vigueur des décrets d’application. Frileuse, la droite concède des missions socles mais l’Ordre des médecins, vexé, maintient son paternalisme surplombant grâce aux sénateurs !
    Collègues, est-ce cela une réforme d’ampleur ? Est-ce cela la réponse à une profession qui souffre, qui alerte, qui démissionne ? Non : c’est juste le minimum syndical. On peut se féliciter de l’adoption d’un diplôme de niveau 7 pour les infirmières scolaires, acquis de courte tête en CMP, ou de l’officialisation des infirmiers coordinateurs en Ehpad et en unités de soins de longue durée. Néanmoins, aux racines de la crise, le texte ne touche pas.
    Il n’accorde que des miettes s’agissant des salaires ; les infirmiers et infirmières français sont moins bien payés que la moyenne des infirmiers de l’OCDE. À diplôme égal, la France est en bas du classement. Et l’on s’étonne que 60 000 postes soient vacants ! À part une ouverture de négociations, que nous avons arrachée, il n’y a rien de significatif pour faire face à l’inflation galopante et à l’explosion des factures –⁠ pensons aux plus de 500 000 infirmières libérales qui galèrent chaque jour.
    Le texte n’accorde également que des miettes s’agissant de la pénibilité. L’espérance de vie d’une infirmière est de sept années inférieure à celle d’une autre femme. Une sur cinq part à la retraite avec une reconnaissance d’invalidité. Même si la majorité a freiné des quatre fers, nous avons réintégré la question de la pénibilité dans les négociations.
    Enfin, le texte ne contient rien sur la formation. Malgré 5 000 candidatures chaque année, les abandons en instituts de formation en soins infirmiers explosent ; vous ne répondez pas au mal-être étudiant, vous maintenez une formation surchargée et non conforme aux réglementations européennes. Les faits parlent d’eux-mêmes : 85 % des infirmières estiment que leurs conditions de travail se sont dégradées depuis le covid ; plus d’une infirmière sur deux envisage de changer de métier ; le taux d’abandon des études est passé de 3 % en 2011 à 13 % en 2022.
    Chers collègues, il est nécessaire de donner un prolongement à ce texte et vous en avez l’occasion puisque j’ai déposé, avec ma collègue Sandrine Runel, une proposition de loi visant à indexer les actes sur l’inflation, à allonger la formation et à planifier l’ouverture de places en institut de formation. Ce texte, travaillé avec la profession, est là, sur la table. Emparez-vous en et résolvez sans délai cette crise des vocations !
    Nous voterons ce texte, parce que nous accompagnons la dynamique et les revendications de la profession et parce que nous ne laisserons pas tomber les infirmières et les infirmiers dans leur lutte pour davantage de reconnaissance.
    Nous le voterons avec lucidité, mais aussi avec détermination, celle qui nous pousse à aller plus loin. Je veux rendre hommage aux infirmières et aux infirmiers qui se mobilisent aujourd’hui aux environs de l’Assemblée et qui ont patiemment travaillé à arracher cette victoire. Je salue les collectifs qui ont porté ce texte. Je pense aux milliers d’anonymes qui tiennent à bout de bras notre système de santé.
    Ce que les soignants attendent, ce n’est pas une loi technique, mais une rupture. Ce vote accompagne leur lutte pour une véritable reconnaissance, celle d’une profession très largement féminisée. Revenons aux sources, soyons fiers de nos fondamentaux, qui ont donné naissance à notre système de santé publique et à son personnel, toujours à la pointe du progrès et à la renommée mondiale. Revenons à une égalité d’accès aux soins ! Revenons à un 100 % de sécurité sociale, où chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ! Revenons à un système de santé qui attire à lui des milliers de jeunes souhaitant prendre soin à leur tour de nos malades et de nos aînés. Je souhaite, pour finir, exprimer toute ma considération et ma gratitude à nos soignantes et à nos soignants. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel

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    Enfin, nous y sommes ! Après tant d’années d’attente pour la profession, nous allons enfin adopter une proposition de loi valorisant le métier d’infirmier. Il était temps !
    Les infirmières sont au cœur de l’accès aux soins ; elles sont souvent les premières à écouter, à prévenir, et souvent les dernières à accompagner. Dans nos hôpitaux, nos Ehpad, nos centres de santé ou à domicile, elles assurent une présence et des soins constants. Et face aux défis de la démographie médicale, du vieillissement de la population, ou encore des crises sanitaires, les besoins en soins infirmiers ne font qu’augmenter. Reconnaître leur valeur, c’est donc protéger la santé de toutes et de tous.
    Le rôle des infirmières est d’autant plus central que le manque de personnel soignant et médical est criant et que le Gouvernement ne fait qu’aggraver la situation de l’hôpital public un peu plus chaque année. Dans ce contexte, la consécration de la consultation infirmière et de l’accès direct est une grande avancée.
    Cette proposition de loi a le mérite de raccorder le droit aux réalités de terrain des infirmières. De manière très pratique, l’accès direct permettra d’éviter des situations ubuesques, comme celle où une infirmière ne peut pas changer le pansement d’un patient parce que son ordonnance a expiré.
    Au-delà de l’accès direct, cette proposition de loi reconnaît les compétences propres des infirmières spécialisées, notamment de celles de l’éducation nationale. Au terme d’une bataille menée de haute lutte face à nos collègues du bloc central lors de la CMP, c’est nous, à gauche, qui avons réussi à conserver l’article 1er  quarter  A, qui consacre la spécialité d’infirmier scolaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.) C’est une reconnaissance nécessaire pour ces professionnels qui prennent soin de nos enfants et qui constituent souvent leur premier interlocuteur sur la santé mentale, la prévention et la santé sexuelle.
    Nous le savons, et cela nous a été rappelé aujourd’hui de manière tragique, la santé mentale de nos jeunes est un vrai sujet. Et je veux ici rendre hommage à cette femme, assistante d’éducation, qui a perdu la vie dans l’exercice de ses fonctions. Pour protéger les professionnels de l’éducation nationale et pour protéger nos enfants, il est urgent de consacrer le rôle central des infirmières scolaires.
    Si les avancées de cette proposition de loi sont à louer, elle n’est toutefois pas suffisante pour assurer à nos soignantes et à nos soignants des conditions de travail décentes. Contraintes physiques, port de charges lourdes, horaires de nuit, charges émotionnelles... Arriver jusqu’à la retraite est un parcours du combattant pour les infirmières.
    Ces femmes –⁠ car le métier d’infirmier est à 87 % exercé par des femmes –, qui devaient être la « grande cause » du quinquennat Macron, en ont finalement été les grandes oubliées. Alors que ces professionnelles du soin sont si essentielles à notre quotidien, le gouvernement ne se décide toujours pas à leur assurer un niveau de vie décent. Ce texte n’a pas un mot non plus pour faire face à la pénurie croissante d’infirmières dans le territoire. Or les projections sont claires : d’ici 2050, les évolutions démographiques entraîneront une hausse des besoins en soins infirmiers plus rapide que la hausse du nombre d’infirmières.
    Face à tous ces enjeux, cette proposition de loi est une étape, mais pas une fin. Le groupe Socialistes votera pour ce texte, parce qu’il est essentiel pour la profession et pour les patients, mais il faut maintenant aller plus loin, investir réellement et massivement dans nos professionnels soignants et dans nos hôpitaux, avoir une politique de formation médicale et paramédicale et prévoir sur le temps long les enjeux du grand âge. Soyez enfin à la hauteur de la grandeur de nos soignants ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Josiane Corneloup.

    Mme Josiane Corneloup

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    Je tiens tout d’abord à remercier la rapporteure, ainsi que tous les ministres qui se sont investis sur ce texte. Au nom du groupe Droite républicaine, je veux saluer le travail exigeant mené en commission mixte paritaire et affirmer notre soutien plein et entier au texte issu de cette CMP, au cours de laquelle des solutions concrètes ont été trouvées.
    Ce texte, nous en sommes convaincus, marque une étape essentielle pour renforcer, reconnaître et clarifier le rôle des infirmiers dans notre système de santé, quels que soient leur mode d’exercice et le lieu où ils travaillent. C’est un texte attendu à la fois par les professionnels et par les Français.
    Il était grand temps, après plus de vingt ans sans véritable réforme de son cadre légal d’exercice, de remettre à plat une profession dont les missions ont profondément évolué et que les crises récentes, notamment celle du covid-19, ont placée en première ligne. Très appréciés des Français, ces professionnels doivent être davantage reconnus. Leurs missions doivent aussi évoluer, au regard du vieillissement de la population et de l’accroissement des pathologies chroniques, mais aussi de la désertification médicale qui touche de nombreux territoires. Les infirmiers sont indispensables ; leur rôle mérite d’être pleinement reconnu.
    L’article 1er, tout d’abord, modernise la définition du métier d’infirmier. Nous saluons particulièrement l’introduction du diagnostic infirmier et la reconnaissance des consultations infirmières, qui permettront une meilleure autonomie dans la pratique. Ce sont des avancées structurantes, équilibrées, encadrées par décret et fondées sur une logique de coordination avec les autres professionnels de santé. Nous approuvons également l’universalité des missions décrites. De même, la substitution de l’expression « soins éducatifs » par celle d’ « éducation à la santé » témoigne d’un souci de précision terminologique que nous saluons : il ne s’agit pas d’éduquer au sens scolaire, mais bien de promouvoir la santé et la prévention, ce qui est au cœur des missions infirmières d’aujourd’hui. (M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit.)
    À l’article 1er  bis  A, la CMP a corrigé un point sensible : la question du lien hiérarchique entre l’infirmier coordonnateur et le médecin coordonnateur dans les établissements médico-sociaux. Nous nous réjouissons que ce lien ait été transformé en collaboration, en lien avec l’encadrement administratif et soignant. C’est un compromis équilibré, qui respecte la logique hiérarchique en place sans enfermer l’infirmier dans une subordination stricte, et qui permet de préserver l’esprit de travail en équipe sans confusion des responsabilités.
    L’article 1er  ter, qui encadre la reprise d’activité des infirmiers en pratique avancée après une interruption, a également été substantiellement amélioré. L’évaluation des compétences, initialement obligatoire, devient facultative et sur demande. C’est une solution pragmatique, qui répond à la demande des professionnels, tout en préservant la qualité des soins et la sécurité des patients.
    Enfin, l’article 1er  quater  A, relatif aux infirmiers de l’éducation nationale, a été maintenu. Le groupe Droite républicaine y est favorable : les missions éducatives et préventives en milieu scolaire sont essentielles, notamment face à la montée des problèmes de santé mentale chez les jeunes. Il est cohérent que ces professionnels soient mieux reconnus, avec une spécialisation et une certification à la hauteur de leurs responsabilités.
    Ce texte n’est pas un aboutissement, mais une fondation. Il faudra encore renforcer l’attractivité de la profession infirmière, améliorer la reconnaissance salariale et poursuivre le dialogue entre professionnels pour construire une médecine du XXIe siècle plus humaine, plus accessible et plus efficiente Ce texte constitue toutefois une avancée certaine. Il témoigne d’un esprit de responsabilité, d’écoute et de dialogue et surtout d’un respect profond pour les 700 000 infirmières et infirmiers de notre pays. C’est pourquoi le groupe Droite républicaine votera en sa faveur. Il répond aux attentes du terrain, il clarifie le cadre juridique, il renforce les compétences et, surtout, il honore une profession indispensable à notre système de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Charlotte Garin.

    Mme Marie-Charlotte Garin

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    Nous arrivons au terme de l’examen de la proposition de loi sur la profession d’infirmier. Le groupe Écologiste et social est convaincu qu’il est urgent et essentiel de revaloriser cette profession.
    Pourquoi ? Parce que la France compte 640 000 infirmiers et infirmières et que c’est la première profession de santé du pays. Or cette profession est en crise. Les salaires sont trop bas, très en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE : une infirmière allemande gagne 1,4 fois plus qu’une infirmière française et une infirmière belge gagne 1,9 fois plus. Une infirmière débutante à l’hôpital reçoit 1 500 euros net. Comment se loger avec un tel salaire ?
    Par ailleurs, les conditions de travail se sont dégradées : le nombre d’infirmiers par patient est insuffisant et les soignants subissent des rythmes de travail intenables. Et, alors que l’âge de départ à la retraite est repoussé, rappelons que l’espérance de vie des infirmières est inférieure de sept ans à la moyenne nationale. Pire, une infirmière sur cinq part aujourd’hui à la retraite en situation d’invalidité. En conséquence, 50 % des infirmières quittent l’hôpital dans les dix premières années. Les infirmières libérales ne vont pas mieux, puisque 70 % d’entre elles parcourent plus de 15 000 kilomètres par an et qu’elles sont fortement touchées par l’inflation. Depuis 2018, tout a augmenté : l’énergie, la prévoyance, le carburant… Même les gants sont 80 % plus chers. Or rien de tout cela n’a été pris en compte par l’assurance maladie et l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est toujours sous-estimé.
    Les demandes de reconnaissance des infirmières sont anciennes et légitimes, mais notre groupe reste prudent et s’interroge sur les intentions réelles du gouvernement. Que contient cette proposition de loi ? Elle crée une consultation infirmière, un diagnostic infirmier, un droit de prescription pour certains actes et un suivi au long cours sans passer par le médecin. En réalité, beaucoup de ces tâches sont déjà réalisées par les infirmières, mais sans aucune reconnaissance. Ceci est dû à une transformation massive du métier ces dernières années, notamment du fait de la désertification médicale.
    Pour notre groupe, il est clair que le principal objectif du gouvernement, avec cette proposition de loi, est de pallier le manque de médecins par l’augmentation des responsabilités des infirmiers et des infirmières. Oui, nous manquons de médecins, et oui, il y a des déserts médicaux, mais est-ce une bonne solution que de charger encore plus des infirmières déjà épuisées, sans revalorisation salariale et sans formation renforcée ? C’est là, pour nous, qu’est le danger, car cette proposition de loi risque d’augmenter leur charge sans leur donner davantage de moyens, ce qui pourrait se traduire par plus de souffrance au travail.
    Grâce à nos amendements et au travail collectif, nous avons obtenu une avancée importante : une négociation sur les rémunérations devra être engagée dès la promulgation de cette loi. Elle tiendra compte de la montée en compétence et de la pénibilité du métier. La commission mixte paritaire a aussi permis une autre avancée : la création d’une spécialité d’infimier scolaire.
    Cette proposition de loi sur la revalorisation du métier d’infirmier et d’infirmière n’est que le début du chemin. La bataille pour les rémunérations sera cruciale et il importe que cette loi ne soit pas un marché de dupes : travailler plus sans gagner plus.
    Au-delà de ce texte, il faut un vrai plan de formation pour une montée en qualification des infirmiers et des infirmières et un accompagnement massif pour celles et ceux qui veulent faire de la pratique avancée. Nous voterons en faveur de ce texte, qui est très attendu par la profession, mais notre groupe restera vigilant quant à son application et aux négociations à venir ; nous veillerons à ce qu’il soit effectivement un moyen de mieux reconnaître cette profession. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je me réjouis que nous soyons réunis aujourd’hui pour adopter cette proposition de loi qui constitue une étape majeure dans la modernisation de la profession d’infirmier et dans la reconnaissance de leur place dans notre système de santé, de soins et de prévention.
    Oui, notre assemblée peut voter des textes utiles. Je tiens, à ce titre, à saluer l’engagement de nos collègues Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales, et Nicole Dubré-Chirat, rapporteure de cette proposition de loi.
    Ce texte clarifie et élargit les missions et les compétences des infirmiers, tout en affirmant leur rôle essentiel au sein de notre système de santé. Enfin, leur métier est pleinement reconnu par la loi. Enfin, un véritable statut leur est accordé. Enfin, leurs compétences sont étendues, en cohérence avec l’évolution concrète de leur métier.
    Ce soir, je pense à toutes les infirmières et à tous les infirmiers qui exercent en établissement, en ville ou au domicile des patients. Il était temps que la loi leur rende la place qu’ils occupent déjà dans les faits et qu’elle réponde au malaise profond que traverse cette profession. Cette reconnaissance est plus qu’un symbole, elle s’accompagne d’évolutions concrètes : l’extension de la pratique avancée aux infirmiers anesthésistes de bloc opératoire et puéricultrices ; l’expérimentation d’un accès direct ; l’amélioration des conditions de facturation des frais kilométriques.
    Ces avancées permettent de sécuriser des pratiques existantes, d’encadrer de nouvelles compétences, d’accompagner la montée en responsabilité des infirmiers. L’évolution du statut de ces derniers doit également constituer un levier pour repenser l’organisation des soins. Notre système reste cloisonné, marqué par une répartition rigide des compétences entre les professions ; ce fonctionnement freine la coopération, ralentit la délégation de tâches, limite parfois des évolutions de carrière, pourtant indispensables à l’attractivité des métiers. Or les défis sont devant nous : le vieillissement de la population ainsi que l’explosion des maladies chroniques, imposent une mobilisation collective et une coordination renforcée de tous les acteurs de la santé.
    Nous devons donc engager une transformation profonde du système, décloisonner les pratiques, valoriser toutes les compétences disponibles, conformément à la vision que je défendais déjà en 2021 dans le rapport d’information intitulé « L’organisation des professions de santé : quelle vision dans dix ans et comment y parvenir ? » Je préconisais alors d’une part un décloisonnement des parcours et de nouveaux modes d’organisation des soins, d’autre part un accompagnement de la montée en compétence des professions paramédicales selon la théorie de l’escalier, c’est-à-dire en consolidant les socles de compétences et en favorisant une montée en compétence individuelle. Pleinement inscrite dans cette dynamique, la proposition de loi constituera un progrès pour les professionnels de santé, mais aussi pour les patients ; c’est pourquoi le groupe Démocrate votera en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et EPR. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    Si tout le monde est d’accord, chers collègues, je vous propose d’essayer de terminer cette discussion générale et de mettre le texte aux voix avant de lever la séance. (Approbation sur divers bancs.) Les orateurs restent bien sûr libres d’utiliser l’intégralité de leur temps de parole, mais si nous poursuivons à ce rythme, nous y parviendrons.
    La parole est à M. François Gernigon.

    M. François Gernigon

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    Nous examinons la proposition de loi sur la profession d’infirmier, dans sa version issue de la commission mixte paritaire du 6 mai. Ce texte déposé par Nicole Dubré-Chirat et Frédéric Valletoux, adopté par notre assemblée en première lecture, enrichi par le Sénat, marque une étape décisive dans la reconnaissance et la modernisation du métier d’infirmier, au service de notre système de santé et des patients. Son parcours parlementaire témoigne d’un large consensus, tant à l’Assemblée qu’au Sénat, sur la nécessité de donner à la première profession paramédicale de France, forte de 600 000 personnes, un cadre législatif à la hauteur de ses compétences et de ses responsabilités. Ce consensus s’est traduit en CMP par un accord solide que je salue.
    L’article 1er, cœur du texte, vise à redéfinir le périmètre d’intervention des infirmiers et à sécuriser juridiquement leurs actes. Il complète le code de la santé publique afin que les consultations infirmières, diagnostics infirmiers et prescriptions spécifiques réalisés dans un cadre réglementé ne puissent être considérés comme relevant de l’exercice illégal de la médecine ; il décrit les missions socles de la profession, consacrant la participation des infirmiers au premier recours, la reconnaissance des soins relationnels, la coordination avec les autres professionnels de santé.
    D’autres dispositions concernent entre autres l’actualisation régulière, après avis de la Haute Autorité de santé (HAS), des listes d’actes autorisés, gage d’adaptabilité et de sécurité pour les patients comme pour les professionnels. Il convient de souligner des avancées majeures : la clarification du partage des responsabilités entre médecins traitants et infirmiers dans les soins de premier recours reconnaît la contribution essentielle des infirmiers, notamment en pratique avancée, sans remettre en cause la place centrale du médecin. L’encadrement de la reprise de l’activité, avec obligation d’informer l’Ordre dès trois ans d’interruption et possibilité d’une évaluation des compétences, constitue également un important progrès. La consécration du rôle spécifique des infirmiers en milieu scolaire et universitaire, attendue de longue date, valorisera leur mission de coordination éducative et sanitaire. Citons encore l’expérimentation de l’accès direct aux infirmiers, au sein de structures coordonnées, pour fluidifier les parcours de soins et améliorer l’accessibilité, particulièrement dans les territoires sous-dotés.
    L’article 2 ajoute les services de protection maternelle et infantile (PMI), de santé scolaire, d’aide sociale à l’enfance (ASE), aux lieux d’exercice des IPA ; enfin, la clarification de la facturation des indemnités kilométriques pour les infirmiers exerçant en zone rurale, prévue par l’article 2  bis, mettra fin à des disparités injustifiées et facilitera l’accès aux soins dans les territoires les plus fragiles.
    Intervenant dans un contexte de pénurie médicale, de vieillissement de la population, d’explosion des maladies chroniques, cette réforme s’inscrit dans la continuité des lois de 2016, 2021 et 2023 qui ont progressivement élargi le champ d’action des infirmiers et renforcé la confiance dans les compétences paramédicales. En 2024, 86 % des Français estimaient que les infirmiers n’étaient pas assez reconnus, 85 % qu’il serait utile de renforcer leur rôle. Cette proposition de loi vise à répondre à cette attente en valorisant la profession, en sécurisant son exercice et en améliorant la qualité de la prise en charge des patients ; pour toutes ces raisons, le groupe Horizons & indépendants votera résolument en sa faveur. Je vous invite à adopter le texte issu de la commission mixte paritaire pour donner à la profession d’infirmier le cadre qu’elle mérite, pour une santé accessible et humaine dans tout le territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    Sur l’ensemble du texte issu des conclusions de la commission mixte paritaire, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Nicole Sanquer.

    Mme Nicole Sanquer

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    Infirmiers et infirmières jouent un rôle crucial en matière d’organisation et de pérennisation de notre système de santé, particulièrement dans un contexte de désertification médicale et de vieillissement de notre population. Notre groupe souhaite leur rendre hommage, d’autant que ce rôle n’est pas reconnu à sa juste valeur, notamment si l’on considère leur rémunération. Ces dernières années, plusieurs textes législatifs ont certes fait évoluer leurs missions et leurs compétences, mais la profession reste strictement encadrée par un décret d’actes qui en alimente le manque de reconnaissance et la perte d’attractivité.
    Il était temps que le Parlement adopte enfin un texte visant à cette reconnaissance. La proposition de loi consacre les missions des infirmiers, renvoyant au niveau réglementaire la déclinaison de leurs compétences et des actes qu’ils sont autorisés à pratiquer, ce qui permettra à l’avenir une évolution plus souple et une plus grande autonomie de la profession. Une autre innovation réside dans la reconnaissance des soins relationnels et de la consultation infirmière, fondée sur le diagnostic infirmier. Elle existait dans les faits : en l’instaurant en droit, officiellement, nous affirmons que le soin ne saurait se réduire à une série d’actes techniques, qu’il doit intégrer pleinement une dimension humaine.
    Par ailleurs, depuis leur création en 2018, les IPA ont fait la preuve de leur efficacité, apportant une réponse de proximité et de qualité, notamment dans les zones en tension médicale. Par conséquent, l’extension à la PMI, la santé scolaire et l’ASE de la liste des lieux éligibles constitue une évolution logique et nécessaire. Nous conservons une inquiétude au sujet de la santé scolaire : le Sénat prévoit une pratique en lien avec un médecin, alors que ces services pâtissent d’une pénurie avérée de professionnels de santé. Surtout, il fallait répondre à la demande des infirmiers spécialisés, restée lettre morte depuis 2019. La rédaction issue du Sénat est sans doute plus claire, puisqu’elle permet une pratique avancée selon des modalités propres à chaque spécialité infirmière, notamment l’anesthésie, le bloc opératoire, la puériculture. Notre groupe insiste toutefois sur la nécessité de supprimer les obstacles rencontrés sur le terrain par les IPA, d’abord en améliorant l’accès, encore hétérogène, à la formation ; ensuite en les intégrant mieux au système de santé, ce qui requiert de communiquer au sujet de cette profession auprès de tous les acteurs impliqués ; enfin en revoyant le modèle économique.
    Nous saluons les apports de l’Assemblée et du Sénat retenus en CMP, notamment la reconnaissance de la contribution des infirmiers aux soins de premiers recours et celle du statut d’infirmier coordonnateur en Ehpad, actant le rôle essentiel de ces professionnels dans l’organisation et le suivi des soins des résidents, mais aussi dans le management de l’équipe soignante, alors que le médecin coordonnateur n’exerce souvent qu’à temps très partiel. Cette proposition de loi, que notre groupe soutiendra avec force, n’est qu’un point de départ : elle doit s’accompagner d’une revalorisation de la rémunération des infirmiers qui tienne compte de la pénibilité du métier, d’une révision des modalités de formation, que les étudiants sont de plus en plus nombreux à arrêter avant la fin de leur cursus, et de la fin des inégalités entre infirmiers et médecins en matière d’indemnités kilométriques, qui sont source d’injustices. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Loir.

    Mme Christine Loir

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    Les infirmières et infirmiers sont les piliers silencieux de notre système de santé. À l’hôpital, à titre libéral, en Ehpad, en milieu scolaire, dans nos campagnes ou dans les quartiers urbains, ils assurent la continuité des soins, la proximité humaine, parfois même la seule présence médicale possible. Ils incarnent ce que notre République a de plus précieux : le service, le dévouement, la constance dans l’effort. Pourtant, leur voix reste trop souvent ignorée. Leurs conditions de travail se dégradent, leur formation est négligée, leur pouvoir d’achat méprisé. Dix ans après le début de leur carrière, plus de 17 % des infirmiers hospitaliers ont opté pour un emploi indépendant.
    Cette proposition de loi équivaut à un premier pas vers une rénovation en profondeur du métier d’infirmier. Elle vise à introduire dans le droit la consultation et le diagnostic infirmiers, la conciliation médicamenteuse, un droit de prescription encadré, et étend les missions des IPA. L’accord en commission mixte paritaire a donné lieu à un texte de compromis, salué par les soignants que nous avons pu rencontrer. Mes collègues députés du Rassemblement national et moi-même y reconnaissons des avancées que nous avons soutenues : la reconnaissance du statut d’infirmier coordonnateur en Ehpad, celle des infirmiers scolaires comme relevant d’une spécialité autonome, la révision du calcul des indemnités kilométriques, revendiquée par les infirmiers libéraux. Nous regrettons toutefois que ces mesures utiles restent fragmentaires : elles interviennent sans vision d’ensemble, sans réforme de fond des conditions d’exercice, sans moyens budgétaires clairement identifiés.
    Le Rassemblement national défend une vision plus ambitieuse, à la hauteur de l’enjeu, de l’engagement des soignants –⁠ par exemple la hausse de 10 %, immédiate, du salaire des infirmiers hospitaliers, afin de rejoindre sa moyenne européenne. Le texte posant enfin cette question essentielle de la rémunération, avec l’annonce de son ouverture à la négociation, il convient que cette démarche, pour être crédible, s’appuie sur un calendrier clair et des engagements concrets : nous y serons attentifs. Responsabiliser davantage les infirmières, pourquoi pas ? C’est même bien légitime ; seulement, cette évolution doit s’accompagner de garanties en matière de formation, de protection juridique, de reconnaissance salariale. Le fait de leur transférer certaines missions ne doit pas constituer une réponse par défaut à la désertification médicale, mais s’inscrire dans une stratégie cohérente, équilibrée, respectueuse de toutes les professions de santé.
    Ce texte qui, encore une fois, contient des points d’appui, ne doit pas être un aboutissement, mais un début ; un socle, non un alibi. Que la République cesse de se reposer sur la vocation de ses soignants pour masquer les défaillances de la politique de santé ! Nous soutiendrons la proposition de loi ; néanmoins, pour le Rassemblement national, le combat en faveur de la reconnaissance des infirmiers continue. (Mme la rapporteure applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Fayssat, dernier orateur de la discussion générale. (Applaudissements sur divers bancs.)

    M. Olivier Fayssat

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    Je suis touché, chers collègues : vous avez déjà saisi le sens de mon propos ! (Sourires.) Je serai donc bref,…

    M. Philippe Gosselin

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    C’est une bonne idée ! (Mêmes mouvements.)

    M. Olivier Fayssat

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    …d’autant que ce texte important, attendu, a été largement salué par les professionnels de santé, comme par vous d’ailleurs. Le groupe UDR tient à souligner à quel point la proposition de loi marque une étape importante dans la reconnaissance d’un métier essentiel, fort de près de 600 000 professionnels, dont plus de 140 000 libéraux ; un métier de proximité, d’écoute –⁠ j’en dirais davantage si je ne sentais pas que M. le président, derrière moi, souhaite que j’accélère encore. (Mêmes mouvements.)
    Cette proposition de loi redéfinit enfin le cadre d’exercice des infirmiers, en pleine cohérence avec les évolutions de la réalité de terrain. Elle introduit la reconnaissance de la consultation infirmière, acte le droit de prescription pour certains produits et examens, et permet aux patients de consulter un infirmier en premier recours. Ce sont des avancées concrètes, attendues de longue date.
    Nous saluons également l’élargissement des missions confiées aux infirmiers en pratique avancée ; il leur permettra de pratiquer au sein des services de protection maternelle et infantile ou dans le cadre de la santé scolaire.
    Ces évolutions s’inscrivent dans une logique plus générale de délégation de tâches qui répond à la pénurie de médecins que nous connaissons. Elle constitue aussi, et peut-être surtout, une juste reconnaissance de la montée en compétences de l’ensemble de la profession. Il s’agit donc d’une actualisation bienvenue qui met en adéquation les textes avec la réalité des pratiques.
    Nous nous réjouissons que les travaux de la commission mixte paritaire aient permis d’aboutir à un accord rapide et consensuel. Le soutien affirmé de l’Ordre national des infirmiers comme de celui de syndicats professionnels atteste de la pertinence et de l’équilibre du texte. Le groupe UDR votera donc en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs de la commission et sur ceux du groupe EPR.)

    M. Philippe Gosselin

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    C’est bref et concis !

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, telle qu’elle est issue de la commission mixte paritaire.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        88
            Nombre de suffrages exprimés                88
            Majorité absolue                        45
                    Pour l’adoption                88
                    Contre                0

    (L’ensemble de la proposition de loi est adopté.)

    6. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, ce soir, à 21h45 :
    Discussion de la proposition de résolution européenne visant à étendre les compétences du Parquet européen aux infractions à l’environnement.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt et une heures quinze.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra