Première séance du mardi 11 février 2025
- Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
- 1. Questions au gouvernement
- Souveraineté en matière d’intelligence artificielle
- Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
- Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
- Violences à Notre-Dame de Bétharram
- Programme d’éducation à la vie affective et sexuelle
- Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
- Assignation à résidence de Karim Mohamed-Aggad
- Fiscalité des autoentrepreneurs
- Français détenus en Iran
- Polémique autour de Merwane Benlazar
- Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
- Fonderie de Bretagne
- Industrie automobile
- Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
- Situation des autoentrepreneurs
- Indemnisation des victimes de la Dépakine
- Continuité territoriale pour les fonctionnaires et militaires ultramarins
- 2. Renforcement de la sûreté dans les transports
- Discussion des articles (suite)
- Article 1er (suite)
- Amendements nos 34 et 49
- M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports
- Amendements nos 36, 75, 50, 105, 4, 111, 220, 51 rectifié, 107 rectifié, 96 rectifié et 22
- Sous-amendement nos 265, 263
- Amendements nos 157, 195, 63, 64, 37, 52, 219, 38, 39, 40, 41, 129, 158, 194, 76 et 248, 88
- Sous-amendement no 255
- Après l’article 1er
- Article 2
- Après l’article 2
- Amendements nos 130, 159, 196 et 17 deuxième rectification
- Article 3
- Après l’article 3
- Suspension et reprise de la séance
- Article 5
- Amendement no 104
- M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur
- Amendement no 23
- Article 6
- Amendement no 106
- Après l’article 6
- Amendement no 222
- Article 7
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 7
- Article 8
- Article 8 bis
- Amendement no 110
- Article 8 ter
- Article 8 quater
- Amendement no 207
- Rappels au règlement
- Article 8 quater (suite)
- Amendements nos 45, 46, 35
- Après l’article 8 quater
- Amendement no 236
- Après l’article 9
- Amendement no 85
- Article 1er (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 3. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Questions au gouvernement
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle les questions au gouvernement.
Souveraineté en matière d’intelligence artificielle
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Lopez-Liguori.
M. Aurélien Lopez-Liguori
Madame la secrétaire d’État chargée de l’intelligence artificielle et du numérique, pendant qu’Elon Musk propose d’acheter ChatGPT pour 100 milliards de dollars, Macron…
M. Sylvain Maillard
Emmanuel Macron ! Soyez respectueux !
M. Aurélien Lopez-Liguori
…fait la manche au Grand Palais pour soutirer 109 milliards d’euros aux Émiriens et aux Canadiens. Le défi de l’IA est vertigineux. Comment la Macronie propose-t-elle de le relever ? En se mettant entre les mains d’États étrangers !
Du fait des progrès de l’IA, nous connaissons un moment de rupture technologique. Or une rupture technologique requiert une rupture politique. Vous pensez que seule la création de valeur compte, avec n’importe quel pays et l’argent de n’importe qui. Au long des dix dernières années, vous l’avez montré en laissant entrer le loup dans la bergerie, au détriment de nos intérêts stratégiques.
M. Sylvain Maillard
Je soupçonne que cette question a été écrite par ChatGPT !
M. Aurélien Lopez-Liguori
Ainsi, depuis 2014, 1 571 entreprises françaises ont été rachetées par des Américains : Exxelia, Sqreen, Alsid, Sentryo… L’État n’a pas levé le petit doigt pour les sauver.
À l’inverse, Marine Le Pen et le Rassemblement national incarnent cette rupture capable de faire de la France une puissance de l’IA. Cela passe par la création d’un fonds souverain, semblable à ceux dont la Norvège ou les États-Unis se sont dotés, pour diriger l’épargne des Français vers les secteurs où nous en avons le plus besoin.
Cela exige aussi de privilégier les entreprises françaises et européennes dans la commande publique. Fini le « en même temps » macroniste, qui prétend promouvoir le patriotisme économique tout en vendant nos données de santé à Microsoft !
Il faut enfin en finir avec cette prison réglementaire dans laquelle vous avez jeté nos entreprises : les entreprises françaises stratégiques doivent pouvoir déroger au RGPD et à l’AI Act !
Il est minuit moins le quart !
M. Sylvain Maillard
C’est faux !
M. Erwan Balanant
Il est quinze heures trois !
M. Aurélien Lopez-Liguori
Nous avons la chance en France de disposer des fleurons, des talents, des formations idoines. Mais l’heure tourne ! Si vous persistez à appliquer les mêmes recettes, votre politique nous mènera droit dans le mur. À quand une rupture, avant qu’il ne soit trop tard ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie
Je vous prie d’excuser ma collègue Clara Chappaz, retenue précisément au Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle, qui constitue une source de satisfaction car il rencontre un succès attesté par la présence de nombreux chefs d’État, entreprises et scientifiques. La qualité des débats qu’il abrite témoigne de l’intérêt qu’il suscite dans l’opinion publique et auprès de l’ensemble des acteurs internationaux.
Nous pouvons en être fiers, tout comme nous pouvons l’être des très belles annonces dont ce sommet a été le théâtre : 109 milliards d’euros d’investissement, qui se déverseront sur nos territoires, permettant la création d’emplois et la construction de notre souveraineté et de notre indépendance dans le domaine de l’intelligence artificielle, en mettant des sites clefs en main à la disposition des entreprises qui investissent, notamment dans les infrastructures.
Les atouts de la France en matière d’intelligence artificielle attirent les investissements : disponibilité du foncier, hyperconnectivité – qui est en particulier le fruit des dépenses importantes consenties dans le cadre de l’application du plan France très haut débit – et décarbonation de l’énergie, qui nous autorise à proposer des tarifs électriques compétitifs à celles et ceux qui veulent installer en France des infrastructures dédiées à l’IA.
De tout cela, nous devons être fiers. Nous ne devons pas nous flageller. En matière d’intelligence artificielle, nous devons développer nos capacités et créer un véritable modèle français et européen. Ce sommet nous permettra de le faire. Il y va de notre indépendance, de notre souveraineté et de l’appropriation de l’intelligence artificielle par tous nos concitoyens et les entreprises – car il s’agit d’un facteur d’augmentation de la productivité. (M. Philippe Vigier applaudit.)
Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Saint-Pasteur.
M. Sébastien Saint-Pasteur
J’associe à mes propos Antoine Vermorel-Marques, député du groupe DR, avec qui je promeus de manière transpartisane le sujet qui m’occupe ici, ainsi que mes collègues socialistes. Bien d’autres collègues se retrouveront également dans notre démarche.
Aujourd’hui, la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a 20 ans. Ce n’est pas un anniversaire à célébrer mais le rappel d’une promesse républicaine qui n’a pas été tenue. S’agissant de l’accessibilité, de l’emploi, de la scolarisation, vingt ans après, nous ne sommes pas encore au rendez-vous et le handicap demeure un motif majeur de discrimination : c’est tout simplement la première cause de saisine du Défenseur des droits.
Notre proposition est simple : soyons à la hauteur de l’enjeu, instaurons une nouvelle méthode de travail, attendue par 12 millions de personnes en situation de handicap et 9 millions d’aidants. Rassemblons l’Assemblée, le Sénat ainsi que les ministres concernés et fixons une échéance claire d’ici à cet été, arrêtons une méthode précise pour travailler collectivement autour d’axes de progrès. Ces axes sont nombreux : ils sont mis en exergue par les initiatives parlementaires, mais aussi par le travail incroyable que mènent les associations. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Antoine Vermorel-Marques applaudit aussi.)
Prenons acte de nos désaccords sans acrimonie et trouvons surtout des solutions majoritaires et concrètes.
Monsieur le premier ministre, êtes-vous prêt à vous engager, sur le fondement de l’article 48 de la Constitution, à partager avec le Parlement votre temps gouvernemental ? C’est le seul chemin que nous pouvons emprunter si nous voulons embrasser véritablement ce sujet, faire du handicap une grande cause de ce premier semestre et travailler sereinement et sérieusement à l’élaboration d’un texte de progrès. L’urgence l’impose, le moment l’exige mais seule une volonté commune à l’Assemblée et au gouvernement le permettra. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SOC, dont plusieurs députés se lèvent, et sur quelques bancs du groupe EcoS. – M. Stéphane Peu applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap
Je vous remercie, monsieur Saint-Pasteur, ainsi que M. Vermorel-Marques, pour votre proposition et votre engagement au sujet de l’enjeu majeur que constitue le handicap.
C’est aujourd’hui l’anniversaire de la loi de 2005 promue par Jacques Chirac pour donner à nos concitoyens en situation de handicap une place pleine et entière. Cet anniversaire nous oblige à faire de cette loi un bilan objectif et lucide. Comme l’indiquent les associations, nous sommes au milieu du gué. Nous avons considérablement accéléré depuis 2017 ; nous devons continuer à le faire afin d’atteindre pleinement les objectifs de la loi.
Deux possibilités sont ouvertes. D’abord, vous attendez l’engagement du gouvernement. Je rappelle que le premier ministre, dans son discours de politique générale, a fait part de son souhait de former très rapidement un comité interministériel du handicap. Il se réunira le 6 mars afin de contribuer très rapidement à dresser le bilan de la loi de 2005. Nous nous appuierons sur les travaux du Conseil national consultatif des personnes handicapées, du collectif Handicaps et sur ceux que l’Assemblée nationale et le Sénat mènent actuellement, afin de continuer à nous engager. Lors de la réunion du CIH, la feuille de route de l’ensemble des ministres prévoira un temps consacré à des engagements en faveur du traitement du handicap.
Vous proposez par ailleurs un changement de méthode, une coconstruction législative. Je saisis au bond la balle que vous lancez : vous avez raison, le sujet et le moment l’imposent. De nombreuses propositions appelleront des évolutions législatives – même si les associations attendent surtout que la loi de 2005 soit effective. Nous pouvons en tout état de cause continuer à travailler de manière collective et transpartisane. (Mme Anne-Cécile Violland applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Saint-Pasteur.
M. Sébastien Saint-Pasteur
Qu’est-ce qu’être français ? C’est une question que M. le premier ministre semble se poser. Pour de très nombreuses personnes en situation de handicap, la liberté n’est pas au rendez-vous – c’est la question de l’accessibilité – (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC – Mme Justine Gruet applaudit également), l’égalité non plus – parmi les personnes en situation de handicap, le taux de pauvreté et le taux de chômage sont quasiment deux fois plus élevés que dans le reste de population.
Quant à la fraternité, il nous appartient de la construire ensemble. J’attends que vous m’accordiez très rapidement un rendez-vous afin que nous déterminions la méthode à suivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, M. Romain Eskenazi s’étant levé. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)
Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
Mme la présidente
Avant de donner la parole à Mme Frédérique Meunier, pour poser une question au nom du groupe Droite républicaine, je salue l’arrivée parmi nous de Mme Élisabeth de Maistre, qui vient d’être élue dans la neuvième circonscription des Hauts-de-Seine. (Les députés du groupe DR se lèvent et applaudissent.)
La parole est à Mme Frédérique Meunier.
Mme Frédérique Meunier
Monsieur le premier ministre, il y a vingt ans, le 11 février 2005, la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées entrait en vigueur. Elle contribuait à l’accomplissement d’une des missions premières de notre société : protéger les plus fragiles, notamment ceux qui vivent avec un handicap.
Dans bien des domaines, cette grande loi de Jacques Chirac était ambitieuse et visionnaire. Elle a par exemple permis une meilleure reconnaissance de tous les handicaps et l’inscription du principe de solidarité de la communauté nationale.
Vingt ans après, elle laisse cependant un goût d’inachevé parce que moins de la moitié des établissements recevant du public sont accessibles aux personnes à mobilité réduite alors que la loi prévoyait qu’ils le soient tous en 2025 ; parce que le faible nombre d’AESH, la précarité de leurs contrats et de leurs conditions de travail entravent parfois l’accès à l’éducation.
J’ai une pensée pour Mathilde, 5 ans, à qui l’on a diagnostiqué un trouble du spectre autistique et qui bénéficie d’un parcours adapté dans l’une des deux unités d’enseignement en maternelle autisme qui existent en Corrèze. À 6 ans, elle devra intégrer une unité d’enseignement en élémentaire autisme mais il n’en existe pas dans ce département. Où ira-t-elle ?
Ces insuffisances ont des conséquences dramatiques et la précarité des personnes handicapées est une réalité : 12 % d’entre elles sont au chômage, 25 % sont pauvres. Un pays comme la France ne peut s’en satisfaire.
Vingt ans après, qu’entreprendrez-vous pour qu’enfin l’esprit de la grande loi de 2005 voulue par Jacques Chirac se traduise pleinement en actes ? Le groupe Droite républicaine, avec Laurent Wauquiez, se tiendra à vos côtés pour améliorer la prise en charge et les droits des personnes handicapées, dans une démarche transpartisane. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles
Il y a vingt ans, le président Chirac a voulu travailler à l’inclusion des personnes en situation de handicap, aussi bien dans leur vie privée que dans leur vie professionnelle. Le constat que vous venez de faire nous oblige : si nos efforts ont donné lieu à de réelles avancées – le nombre d’étudiants en situation de handicap a été multiplié par neuf, celui des élèves en situation de handicap dans l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire par quatre, tandis que celui des AESH est passé de 84 000 à 148 000, dont 2 000 postes supplémentaires cette année –, il n’en reste pas moins que nous devons les poursuivre.
Vous évoquez cette petite Mathilde, une enfant de 5 ans qui a fait l’objet d’un diagnostic dès l’âge de 3 ans. Elle bénéficie d’un accompagnement en maternelle dans le cadre d’une approche médico-sociale qui relève aussi de l’éducation nationale : autour du professeur des écoles, deux personnes s’occupent de l’enfant concernée.
Nous devons en effet nous inscrire dans une suite de parcours de soins, c’est-à-dire continuer à l’école élémentaire. Et c’est le travail qu’Élisabeth Borne, Charlotte Parmentier-Lecocq et moi menons pour qu’il y ait des réponses concrètes dans chaque département car plus on peut accompagner ces enfants dans leur scolarité, plus nous préparons l’inclusion. Cette promesse, nous la devons à chacune et à chacun des enfants de notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR. – M. Jean Terlier applaudit également.)
Violences à Notre-Dame de Bétharram
Mme la présidente
La parole est à M. Paul Vannier.
M. Paul Vannier
Monsieur le premier ministre, pourquoi n’avez-vous pas protégé les élèves de l’école Notre-Dame de Bétharram, victimes de violences pédocriminelles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Pas moins de 112 d’entre eux ont déjà déposé plainte pour dénoncer les agressions sexuelles, les violences physiques et les viols dont ils ont été victimes, des années 1950 au début des années 2010, au sein de cet établissement privé catholique béarnais, par au moins 14 agresseurs. Père d’élèves scolarisés dans l’établissement, époux d’une professeure de Bétharram, président du conseil départemental, vingt ans député de la circonscription, ancien ministre de l’éducation nationale, saisi à de multiples reprises de ces violences, vous avez toujours affirmé n’avoir rien su, rien vu, rien entendu. (Mêmes mouvements.) La chronologie, reconstituée par Mediapart, Le Monde et la presse locale, vous contredit pourtant entièrement : en 1996, ministre de l’éducation, vous vous rendez sur place pour soutenir l’établissement après le dépôt par des parents d’élèves d’une première plainte pour violences sur leur enfant ;…
Mme Ségolène Amiot
C’est un scandale ! Quelle honte !
M. Paul Vannier
…en 1998, vous tentez d’obtenir, à des fins personnelles, des informations pourtant couvertes par le secret de l’instruction auprès du juge saisi du dossier d’un élève victime de viol. Ainsi, depuis le milieu des années 1990, vous saviez ! Et alors que vos fonctions successives vous permettaient de protéger ces enfants, vous avez choisi l’omerta pendant trente ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Dominique Voynet et M. Damien Girard applaudissent également.)
Vous êtes aujourd’hui premier ministre. Comment expliquez-vous votre conduite aux Français ? Avez-vous depuis reçu d’autres alertes ? Voulez-vous l’impunité de cet établissement financé sur fonds publics ? Les anciens élèves de Notre-Dame de Bétharram, que vous avez jusqu’ici choisi d’ignorer, les millions de victimes d’abus sexuels et tous les parents d’élèves de France attendent votre réponse. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.
M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique
La méthode est maintenant très bien connue des Français, ils l’ont éprouvée à de très nombreuses reprises : dès que quelqu’un occupe des responsabilités, on s’ingénie à inventer de toutes pièces des scandales dont les rebondissements sont bien sûr recherchés (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP), de sorte que si la personne ne répond pas et choisit le silence, elle est coupable, et si elle répond pour démentir, elle est immédiatement mise en accusation. (Mêmes mouvements.)
Mme Ségolène Amiot
Vous ne faites rien contre la pédocriminalité !
M. François Bayrou, premier ministre
Permettez-moi d’expliquer ce dont il s’agit.
Mes premières pensées vont aux garçons qui ont été en souffrance dans ce type d’affaires, et à eux j’adresse ma sympathie – mais pas à ceux qui exploitent leur souffrance.
Ensuite, cette institution, collège et lycée privé, se situe en effet dans ma région, dans le village voisin de celui où je suis né, et il est vrai que mes enfants y ont été scolarisés. L’établissement a la réputation d’être strict, au point que les parents disaient : « Si tu ne travailles pas ou si tu n’es pas sage, on t’y enverra. » Tout le monde connaît des établissements de ce type.
Mme Ségolène Amiot
Pas des établissements qui emploient des pédocriminels !
M. François Bayrou, premier ministre
Les accusateurs disent : « Il ne pouvait pas ignorer. » J’affirme que je n’ai évidemment jamais, au grand jamais, été informé de quoi que ce soit en matière de violences, a fortiori de violences sexuelles, et j’ai deux preuves à l’appui de mon affirmation. La première, c’est que j’avais déjà quitté le ministère de l’éducation nationale depuis des mois, c’est-à-dire en mai 1997, quand les premières plaintes ont été déposées en décembre 1997, puis en 1998.
M. Alexis Corbière
Vous étiez député !
Mme Ségolène Amiot
Ce n’est pas une preuve !
M. François Bayrou, premier ministre
L’autre preuve devrait faire consensus : croyez-vous que nous aurions scolarisé nos enfants dans un établissement dont il aurait été dit qu’il s’y passe des choses de cet ordre ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem.)
M. Sylvain Maillard
Bien sûr que non !
M. François Bayrou, premier ministre
Je peux vous assurer que tout est faux. Une plainte en diffamation sera évidemment déposée. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem.)
Programme d’éducation à la vie affective et sexuelle
Mme la présidente
La parole est à Mme Julie Delpech.
Mme Julie Delpech
Ma question s’adresse à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
La publication du programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle au Journal officiel marque une avancée très attendue. Mais pour qu’il change réellement la donne, il doit être pleinement appliqué. Or malgré le caractère obligatoire de ce type d’enseignement depuis plus de vingt ans, seuls 15 % des élèves en bénéficient et un quart des établissements n’en organisent toujours pas. Néanmoins, l’urgence est là : chaque année, deux millions de mineurs sont confrontés à des contenus pornographiques, tandis que 160 000 subissent des agressions sexuelles, souvent dans un cadre familial, et que les manifestations du sexisme restent alarmantes. Et pendant ce temps ? On débat, on polémique : ce programme, qui devrait protéger nos enfants, devient la cible de fantasmes absurdes, on agite des peurs, on crie à l’endoctrinement, on dénonce une idéologie imaginaire.
Mais où est l’idéologie quand, en maternelle et en primaire, il s’agit d’apprendre aux enfants à connaître leur corps, à gérer leurs émotions et à comprendre le consentement ?
Où est l’endoctrinement quand au collège, on les aide à traverser la puberté, à construire des relations saines et à reconnaître les violences sexuelles ?
Où est la menace quand au lycée, on parle de santé sexuelle, d’égalité et de prévention pour préparer les élèves à entrer dans l’âge adulte en confiance ?
Ce programme, adopté à l’unanimité par les organisations syndicales et par les représentants de parents d’élèves n’est pas une menace, c’est un kit de survie pour des millions de jeunes. Madame la ministre de l’éducation nationale, votre engagement pour le rendre plus accessible et plus compréhensible est à saluer. Mais pour qu’il soit pleinement appliqué, les enseignants doivent avoir les moyens et la formation nécessaires. Or faute de préparation et de ressources, ce sont souvent les associations qui interviennent mais, avec des moyens limités, elles ne peuvent répondre qu’à une demande sur deux, ce qui creuse les inégalités, notamment en milieu rural.
Comment garantir que les professeurs seront formés et accompagnés pour assurer ces enseignements dans tous les établissements ? Quels moyens seront déployés pour que ce programme ne reste pas un vœu pieux, mais une réalité pour chaque élève ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur plusieurs bancs du groupe Dem. – Mmes Dominique Voynet, Marietta Karamanli et Fatiha Keloua Hachi applaudissement également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Élisabeth Borne, ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche
Comme vous le soulignez, quand plus de deux millions de jeunes sont exposés à des contenus pornographiques sur internet chaque mois, que plus de 120 000 sont victimes de violences sexuelles, souvent dans le cadre familial, et que le sexisme progresse comme en témoigne une étude récente du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, il est urgent d’agir. Et c’est ce que nous allons faire en nous appuyant sur le programme qui a été approuvé, comme vous l’avez relevé, à l’unanimité du Conseil supérieur de l’éducation, et publié la semaine dernière. Ce programme sera bien mis en œuvre par les professeurs, avec l’appui des personnels de santé scolaire. Une formation des professeurs est à cet égard indispensable, et elle va être engagée dès le mois de mars auprès des référents académiques qui pourront ensuite la déployer auprès de l’ensemble des professeurs. Ceux-ci pourront aussi accéder à des formations en ligne et, à partir de la rentrée 2025, le ministère proposera également deux jours de formation en présentiel pour les professeurs qui le souhaiteront. Je conclus en indiquant que nous proposerons aux professeurs des livrets avec des exemples de contenus pour tenir les trois séances prévues et auxquelles malheureusement trop peu de jeunes accèdent aujourd’hui.
Vous le voyez : que ce soit sur cet enseignement ou sur le soutien aux professeurs qui le délivreront, nous serons présents, à la hauteur de l’enjeu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. – MM. Philippe Vigier et Éric Martineau applaudissent également.)
Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Peytavie.
M. Sébastien Peytavie
L’adoption de la loi du 11 février 2005 représentait un grand espoir pour les douze millions de personnes handicapées de notre pays. Or alors que nous fêtons les vingt ans de son adoption, on ne peut que constater que cette journée ne revêt nullement les couleurs de la célébration mais bien celles d’un retard affligeant dans tous les domaines : précarité massive, dérogations à n’en plus compter, ségrégation des personnes handicapées… Chaque jour, la France se déshonore davantage par ses entraves à l’application de la convention des Nations unies sur les droits des personnes handicapées.
Nous devons sortir de la vision médicalisée du handicap. Car ce n’est pas la déficience qui crée le handicap, mais bien une société excluante et des politiques publiques qui marginalisent. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, SOC et GDR. – Mmes Ségolène Amiot, Danielle Brulebois, Justine Gruet ainsi que MM. Antoine Vermorel-Marques et Philippe Vigier applaudissent également.)
Ma collègue Christine Le Nabour et moi débutons cette semaine une mission d’évaluation de la loi de 2005. Mais cette réflexion, nous devons la mener toutes et tous. Si je m’adresse à vous, monsieur le premier ministre, c’est aussi plus largement à nos institutions et aux collègues. Quand allons-nous enfin prendre en compte systématiquement les besoins des personnes handicapées dans nos textes de loi ? Ce sont souvent les premières touchées mais les dernières prises en compte, et j’ai une pensée particulière pour les personnes handicapées de Mayotte, qui pourraient bien être exclues davantage encore si les politiques de réhabilitation ne font pas de l’accessibilité une priorité absolue. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP et DR.) Les droits fondamentaux des personnes handicapées doivent être l’affaire de tous, il en va de la responsabilité de chacun et de chacune des ministres et des députés sur tous les bancs.
Dès lors, vingt ans après la loi de 2005, vous engagez-vous, monsieur le premier ministre, à ce que notre république reconnaisse enfin chacune et chacun de ses citoyens dans leur singularité ? Vous engagez-vous à ce que chaque projet de loi intègre systématiquement son impact sur les personnes les plus empêchées de notre société ? Car nous voulons non de la charité, mais des droits ! (Mêmes mouvements.) Le droit à une vie digne, le droit à l’éducation, le droit à un emploi décent et le droit à l’autodétermination. (Les députés des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC ainsi que M. Stéphane Peu se lèvent et applaudissent longuement. – Les autres députés du groupe GDR applaudissent également, de même que plusieurs députés des groupes EPR, DR, Dem, HOR et LIOT.)
Mme la présidente
La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.
M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique
Si le gouvernement avait le droit d’applaudir dans cette enceinte, je vous aurais applaudi.
Mme Dominique Voynet
Ne vous gênez pas ! (Sourires.)
Mme Sophia Chikirou
Ça n’empêche pas des actions concrètes !
M. François Bayrou, premier ministre
Mais c’est précisément parce que votre question et votre sensibilité sont importantes pour le gouvernement que je vous réponds personnellement. Vous m’avez demandé si je m’engageais à ce que tout texte de loi comporte les garanties que vous exigez : ma réponse est oui. C’est la raison pour laquelle j’ai convoqué un conseil interministériel sur les problèmes du handicap qui se tiendra dans quelques jours.
Nous avons déjà accompli des progrès considérables, en grande partie grâce à vous : je pense notamment à la suppression du reste à charge sur l’acquisition de fauteuils roulants, disposition dont nous nous sommes entretenus et qui va entrer en application dès la seconde partie de l’année 2025. Et vous n’êtes pas seul dans le combat que vous menez : il y a tous ceux qui, dans notre société, éprouvent des difficultés liées au handicap que vous évoquez si justement et qui acceptent de prendre des responsabilités. À ce propos, j’ai à l’esprit des visages d’hommes et de femmes adjoints dans des conseils municipaux et je tiens à exprimer la gratitude que nous avons à leur endroit mais aussi ma gratitude personnelle – ceux à qui je pense se reconnaîtront – parce qu’ils ont changé notre regard sur notre vie en commun, sur l’accessibilité de tous nos équipements publics et privés, et sur le fait que le handicap n’est pas un amoindrissement, mais une situation de vie que nous devons reconnaître créatrice droits et qui justifie la mobilisation de la nation et de ses responsables. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
Je profite de l’occasion pour informer les députés que Sébastien Peytavie et moi-même avons déposé, avec l’accord de tous les présidents de groupe, une proposition de résolution tendant à supprimer le vote par assis et levé à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Assignation à résidence de Karim Mohamed-Aggad
Mme la présidente
La parole est à M. Emeric Salmon.
M. Emeric Salmon
Karim Mohamed-Aggad est né en Alsace d’un père algérien et d’une mère marocaine. Il a obtenu la nationalité française par le droit du sol. Il est le frère de l’un des terroristes du Bataclan. En 2016, il a été condamné à neuf ans de prison pour avoir rejoint les rangs de l’État islamique. Libéré en 2022 après seulement six ans d’emprisonnement, il a été déchu de la nationalité française par un décret signé par Mme Borne en novembre 2023.
Après deux cent dix jours passés en centre de rétention administrative, il a, en juin 2024, été assigné à résidence dans un hôtel de ma ville, Lure, en Haute-Saône.
M. Ian Boucard
C’est une honte !
M. Emeric Salmon
Depuis lors, il y réside aux frais du contribuable français pour un coût de 2 700 euros par mois, petit-déjeuner compris. Il n’est plus français, il a été lourdement condamné et il est fiché S. Et pourtant, il demeure toujours en France. Que fait le gouvernement ?
Si des commerçants lurons ne s’étaient pas inquiétés de sa présence auprès de moi ou n’avaient pas alerté L’Est républicain, le préfet de Haute-Saône, tout comme le maire de Lure, seraient restés silencieux sur le sujet.
Il est urgent d’agir ! Nous voulons non plus des promesses mais des actes. Quand Karim Mohamed-Aggad sera-t-il enfin expulsé du territoire français ? Quand pourrons-nous enfin nous sentir en sécurité dans nos villes et dans nos campagnes ? Et existe-t-il d’autres situations similaires que le gouvernement cacherait aux Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, M. Stéphane Rambaud s’étant levé, ainsi que sur les bancs du groupe UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur
Je ne reviens pas sur le pedigree de cet individu, qui a été décrit. Il s’agit effectivement du frère de l’un des terroristes qui ont massacré des dizaines de personnes au Bataclan. Lui s’est expatrié au Levant en 2013 pour s’enrôler dans les rangs de Daech. Il est ensuite revenu en France, où il a été interpellé, jugé et condamné à neuf ans de prison pour association de malfaiteurs en vue de commettre un acte terroriste. Sur les neuf ans de cette peine, pourquoi n’en a-t-il passé que six en prison ? Je pose la question.
En 2023, il a été à juste titre déchu de la nationalité française par mon prédécesseur. Après sa libération, il a été retenu en centre de rétention administrative dans l’espoir d’un laissez-passer consulaire qui n’est jamais arrivé. Il en est donc sorti et a été assigné à résidence sous – je peux vous l’affirmer – une très étroite surveillance. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Il y a eu à trois reprises, en 2008, en 2020 et en 2022, des tentatives législatives, toutes censurées par le Conseil constitutionnel,…
Mme Caroline Colombier
Voilà !
M. Bruno Retailleau, ministre d’État
…d’instaurer des peines de sûreté ou de rétention pour des personnes dangereuses sortant de prison. Je dénonce cette situation. Malheureusement, le droit bénéficie trop souvent à des individus dangereux en raison d’une rupture de l’équilibre entre la protection des libertés et la protection de la société. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – Mme Danielle Brulebois applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emeric Salmon.
M. Emeric Salmon
Encore des paroles, toujours pas d’actes !
M. Patrick Hetzel
Pas du tout ! Vous n’avez pas écouté ce qu’il a dit !
M. Emeric Salmon
Cela commence à être terrible car les Français attendent. J’ai une seconde question, qui s’adresse à votre prédécesseur mais à laquelle vous aurez peut-être la réponse. Le maire de Lure, M. Houlley, candidat du Nouveau Front populaire aux législatives, a été prévenu en juin 2024 de la présence de Karim Mohamed-Aggad, cachée aux Lurons comme à moi, député sortant candidat à ma réélection. Faites-vous passer de petits calculs électoraux avant la sécurité des Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Fiscalité des autoentrepreneurs
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.
Mme Christine Pirès Beaune
Ma question s’adresse à Mme la ministre chargée du commerce, de l’artisanat, des PME et de l’économie sociale et solidaire. Quelle mouche vous a piquée ? Ou, devrais-je dire, quelle mouche a piqué Bercy pour que soit déclenchée cette attaque brutale et injuste contre les microentreprises ?
Bercy a prévu une hausse très violente de leur fiscalité. En effet, baisser aussi drastiquement que prévu le seuil d’assujettissement à la TVA revient tout simplement à augmenter les impôts. Les impôts de personnes qui gagnent très bien leur vie et roulent sur l’or ? Pas du tout ! Les autoentrepreneurs ont fait le choix de créer une microentreprise, travaillent seuls et, souvent, gagnent difficilement leur vie. Nous en connaissons tous, qui sont artisans, commerçants, coiffeuses à domicile, tailleurs de pierre ou auxiliaires de vie.
Devant le tollé provoqué par cette mesure introduite par un amendement du gouvernement adopté en seconde délibération au Sénat, vous avez annoncé sa suspension et le lancement d’une concertation, qui a commencé vendredi dernier et qui doit aboutir avant le 1er mars. J’ai plusieurs questions. Pensez-vous raisonnable de mener une véritable concertation dans un délai aussi court ? Comment Bercy a-t-il évalué à 400 millions d’euros la somme qu’est censée rapporter la mesure ? Je ne crois absolument pas à cette estimation et j’aimerais que nous puissions avoir accès à l’étude d’impact. La concertation doit aussi concerner les parlementaires. Nous y sommes prêts. Quand démarrons-nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire. (Mme Sophia Chikirou s’exclame.) Madame Chikirou, merci de laisser la ministre répondre.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire
Aucune mouche n’a piqué le gouvernement. La mesure dont vous parlez, qui concerne la franchise en base de TVA, a été introduite à l’article 10 du projet de loi de finances à l’issue d’une discussion menée au Sénat le 1er décembre 2024 par le gouvernement précédent. Le contexte d’adoption du budget n’a pas permis l’échange qu’aurait nécessité cette décision. Néanmoins, elle a régulièrement été abordée ici, notamment lors de la discussion, à l’automne dernier, d’amendements déposés par des députés au PLF pour 2025.
La franchise de TVA concerne toutes les formes d’entreprises. C’est une affaire de seuil et non une disposition spécifique aux microentrepreneurs. Leur régime demeure inchangé, avec des formalités allégées et des dispositifs fiscaux et sociaux particuliers. Le gouvernement est très attaché à l’entrepreneuriat et aux spécificités de l’autoentrepreneuriat.
Le ministre de l’économie Éric Lombard a annoncé la suspension de la mesure sur laquelle porte la question le temps que se tienne une négociation. J’ai commencé vendredi dernier des concertations avec différents acteurs – organisations professionnelles, chambres consulaires, associations représentant les microentrepreneurs. J’ai également demandé à mes services une étude d’impact par secteur d’activité.
Je conduis par ailleurs des discussions bilatérales sur le sujet. Une quarantaine de rendez-vous sont d’ores et déjà fixés. Enfin, hier, j’ai proposé d’associer les parlementaires à ces discussions en demandant à chaque groupe politique de l’Assemblée nationale et du Sénat de bien vouloir désigner un représentant.
M. Hadrien Clouet
C’est scandaleux !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Nous sommes dans un dialogue qui, comme vous l’avez compris, est la méthode du gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.
Mme Christine Pirès Beaune
Les organisations que nous avons interrogées lundi en visioconférence nous ont confirmé qu’elles n’avaient absolument pas été contactées pour une concertation avant l’examen du PLF. Certes, elles ont été vues vendredi mais cela n’empêche pas d’affirmer qu’un cafouillage a bien eu lieu. Par ailleurs, je suis persuadée que cette mesure ne renflouera pas les caisses de l’État alors qu’elle crée beaucoup de défiance chez les autoentrepreneurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme Émilie Bonnivard
C’est fini ! Temps écoulé ! Terminé !
M. Thibault Bazin
C’est parce qu’elle a droit à la TVA… (Sourires.)
Français détenus en Iran
Mme la présidente
La parole est à Mme Louise Morel.
Mme Louise Morel
À cette heure, trois Français sont retenus en Iran depuis 2022 : Cécile Kohler, Jacques Paris et Olivier Grondeau, l’identité de ce dernier venant d’être révélée. Je souhaite appeler l’attention du gouvernement sur la situation alarmante que vivent ces trois personnes, particulièrement Cécile Kohler, professeure agrégée de lettres modernes originaire de Soultz, en Alsace. Elle est détenue arbitrairement dans la prison d’Evin et le 30 janvier a marqué le triste cap de ses mille jours de détention. Ce sont mille jours de trop.
Sans aucun fondement, Cécile Kohler est accusée d’espionnage. Elle subit des conditions de détention inhumaines, notamment l’isolement cellulaire prolongé, assimilable à de la torture selon les normes internationales. À en croire des témoignages de codétenues, elle est extrêmement affaiblie physiquement. Récemment, Narges Mohammadi, lauréate du prix Nobel de la paix, a déclaré que « les mauvais traitements dont Cécile est victime présagent de conséquences extrêmement lourdes et irréversibles sur sa santé physique et mentale ».
Je veux avoir ici une pensée pour la famille et les proches de Cécile Kohler, ainsi que pour ceux de Jacques Paris et d’Olivier Grondeau. Ils endurent cette épreuve avec une dignité et une résilience exemplaires. Leur souffrance est immense et il est de notre devoir de tout tenter pour y mettre un terme. (Applaudissements prolongés sur tous les bancs.)
Au-delà des efforts déjà engagés par la diplomatie française, quelles actions le gouvernement conduit-il pour garantir à nos ressortissants des conditions de détention dignes ? Plus important encore, quels leviers diplomatiques sont mobilisés, dans un contexte international particulièrement difficile, pour faire progresser les négociations et obtenir la libération de ces trois Français ? (Applaudissements prolongés sur tous les bancs, de très nombreux députés s’étant levés.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères
Merci d’avoir appelé l’attention du gouvernement et de la représentation nationale sur le sort de nos compatriotes otages d’État de la République islamique d’Iran. Ainsi que vous l’avez indiqué, cela fait plus de mille jours que Cécile Kohler et Jacques Paris y sont retenus arbitrairement, contraints à des aveux forcés, obligés de dormir à même le sol dans des cellules éclairées en permanence, réduits à des contacts avec leurs familles très épisodiques et organisés sous la surveillance de leurs geôliers, privés de contact avec notre ambassade depuis plus d’un an. Comme vous l’avez rappelé, en droit international, de telles conditions sont assimilables à de la torture.
Pour sa part, Olivier Grondeau est retenu arbitrairement depuis plus de huit cent cinquante jours. Le 13 janvier, il a eu le courage de témoigner à visage découvert après avoir été déplacé d’une prison à l’autre et avoir vu ses conditions de détention se dégrader. Condamné à une peine de cinq ans, il a des contacts plus réguliers avec sa famille et il devrait en avoir un aujourd’hui avec notre ambassade.
Nous nous tenons évidemment aux côtés des familles. Je les ai rencontrées le 17 octobre 2024 et le président de la République fera de même prochainement. Nous agissons avec fermeté et avons indiqué aux autorités iraniennes que nous ne lèverions aucune sanction tant que ces otages ne seraient pas libérés. J’ai par ailleurs récemment appelé l’Union européenne à prendre des sanctions nouvelles contre les responsables de ces détentions arbitraires.
Malheureusement, tout cela ne suffit pas car le calvaire des otages d’État ne s’arrête pas le jour de leur libération. Ils en portent encore le fardeau pendant des mois, voire des années. C’est pourquoi j’ai demandé aux services du Quai d’Orsay des propositions visant à créer un statut pour les anciens otages. Le but est de les accompagner et de leur éviter une double peine alors qu’ils ont déjà payé de leur liberté le simple fait d’être des citoyens français. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, DR, EcoS, Dem, HOR, LIOT et GDR.)
Polémique autour de Merwane Benlazar
Mme la présidente
La parole est à Mme Farida Amrani.
Mme Farida Amrani
« Un influenceur d’Allah », « un voyageur temporel du VIIe siècle bédouin », « un salafiste bon teint », « une étape importante de la conquête islamiste a été franchie » : des médias Bolloré aux réseaux sociaux en passant par le Sénat, une cabale raciste et islamophobe lancée par votre camp politique, madame la ministre de la culture, et alimentée par l’extrême droite se met en marche contre Merwane Benlazar, humoriste qui est intervenu sur France 5 dans l’émission « C à vous ». (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.) Son tort : un pull ample, un bonnet Zara, une barbe, mais surtout le fait d’être arabe (Exclamations sur les bancs du groupe RN) ; voilà ce qui lui aura valu quinze menaces par minute pendant plusieurs jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.) La chasse aux sorcières est ouverte pour exhumer, tronquer, sortir de leur contexte des mots et des blagues afin de salir et de disqualifier leur auteur, avec pour but une mort médiatique et professionnelle.
Mme Émilie Bonnivard
On voit où sont vos priorités !
Mme Farida Amrani
Le processus est bien rodé, Merwane n’est pas le premier à subir ces raids numériques, qui visent ceux dont le seul tort est d’être d’apparence arabo-musulmane. (Protestations sur les bancs du groupe RN.) « Il ne sera plus à l’écran » : c’est par ces mots que vous avez réagi la semaine dernière au Sénat. Le message envoyé à une partie de nos compatriotes est désastreux et dévastateur. C’est une faute politique. (Mme Hanane Mansouri s’exclame.) Alors que le budget de votre ministère subit une saignée – une baisse de plus de 150 millions d’euros, qui aura des conséquences catastrophiques sur la création culturelle et la transmission des savoirs –, vous avez choisi de consacrer votre temps à une polémique raciste montée de toutes pièces. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Madame la ministre, êtes-vous désormais directrice des programmes de l’audiovisuel public ? Allez-vous admettre que cette éviction relève d’une censure islamophobe pure et simple ? Ou allez-vous continuer à nous faire croire que la plus grande menace pour la République, c’est un bonnet, une barbe et un pull trop grand sur France 5 ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, dont les députés se lèvent, ainsi que sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Rachida Dati, ministre de la culture
Je répéterai ce que j’ai déjà dit tout en précisant mon propos. Vous savez très bien que le recrutement des chroniqueurs et des journalistes relève soit de l’antenne, soit de la production, et non du ministère de la culture. S’agissant de l’humoriste en question, a-t-il tenu des propos répréhensibles à l’antenne ? (« Non ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Non – je l’ai dit et je le redis –, ni sur France Inter ni dans « C à vous ». A-t-il, par le passé, tenu des propos qui ont pu heurter, choquer ou blesser ? Oui. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Raphaël Arnault
Et Éric Zemmour, non ?
Mme Rachida Dati, ministre
Voulez-vous écouter ma réponse ? (Mêmes mouvements.) On parle d’un humoriste ; pourquoi évoquer Zemmour ? Ce n’est pas la même chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.) Parle-t-on d’une quelconque condamnation ? Les propos en question ne tombent pas sous le coup d’une qualification pénale, alors arrêtez de m’interrompre et écoutez-moi jusqu’au bout ! (Les exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP se poursuivent.)
Mme Émilie Bonnivard
Peut-on faire respecter le calme ?
M. Michel Herbillon
Madame la présidente, et si vous présidiez ?
Mme Rachida Dati, ministre
Les propos de Merwane Benlazar étaient-ils, donc, pénalement répréhensibles ? Non. Étaient-ils choquants ? Oui. Je répète : l’antenne et la production disposent d’une entière liberté dans le choix et le recrutement des animateurs et des journalistes ; je n’y prends aucune part.
En revanche, je rejoins votre indignation sur un point : rien ne justifie la déferlante de haine, le racisme ni l’essentialisation systématique. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Mais cela vaut aussi pour l’humoriste en question, qui devrait, de son côté, arrêter de dire qu’il a été viré par une Arabe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
Un député du groupe EPR
Deux poids, deux mesures !
Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Le Nabour.
Mme Christine Le Nabour
Le 2 août 1971, ce jour où tout a basculé pour moi ; le jour où le handicap s’est invité chez nous. Cette situation, des millions de personnes l’ont vécue et la vivent encore en tant que parents, frères, sœurs et amis. À cette époque, l’exclusion était banale et le sentiment de ne pas faire partie de la société, largement partagé ; une époque où la notion d’accessibilité n’en était qu’à ses balbutiements. Beaucoup, comme mon père, restaient coincés chez eux car rien n’était accessible.
Des évolutions législatives ont certes apporté des progrès. Le 11 février 2005, la loi est venue réaffirmer la volonté de promouvoir une société plus inclusive en garantissant aux personnes handicapées le plein exercice de leurs droits, une participation active à la vie sociale, économique et culturelle. Depuis 2017, le gouvernement a pris conscience de la nécessité d’agir pour et avec les personnes handicapées, en particulier grâce aux soixante-quinze propositions de la Conférence nationale du handicap d’avril 2023.
Vingt ans après 2005, où en sommes-nous ? Certaines personnes en situation de handicap peinent à fêter cet anniversaire. Elles étaient nombreuses venues crier leur impatience, hier soir, place de la République. J’y étais et j’ai écouté leur colère et leur désarroi de vivre encore dans un environnement qui entrave leur quotidien. Ainsi, moins de 50 % des établissements recevant du public leur sont accessibles. Force est de constater que nous ne sommes pas au rendez-vous de l’effectivité de leurs droits. Comme un clin d’œil de l’histoire, à ma vie d’enfant aidante, c’est aussi la semaine où Sébastien Peytavie et moi lançons notre mission d’évaluation de cette loi qui a vingt ans aujourd’hui. L’enjeu est grand et nous engage tous.
Madame la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap, je sais que vous avez pris à bras-le-corps la mission qui vous a été confiée. Comment faire pour accélérer le progrès, mobiliser encore davantage et faire en sorte qu’enfin, les personnes en situation de handicap puissent choisir leur vie ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem. – M. Sébastien Peytavie applaudit aussi.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap
Merci pour votre question et pour votre engagement personnel, bien compréhensible, en matière de handicap. Merci pour le travail que vous menez au sein du groupe d’études que vous coprésidez avec Laurent Panifous et que vous mènerez dans le cadre de la mission que vous démarrez avec Sébastien Peytavie. Avec les travaux du Sénat, du Conseil économique, social et environnemental, du Conseil national consultatif des personnes handicapées et du Collectif handicaps, vos efforts nous permettront de prendre la pleine mesure du bilan de la loi de 2005 comme du chemin qu’il reste à parcourir.
Vous avez évoqué la colère que ressentent les personnes en situation de handicap, qui ont manifesté hier. Je comprends, ressens et partage cette colère, dont je souhaite faire un moteur d’action. Ma détermination m’a poussée à hâter la réforme relative aux fauteuils roulants, annoncée par le président de la République, demandée par le premier ministre et attendue avec impatience par les personnes en situation de handicap.
Le travail se poursuivra dans le cadre du prochain comité interministériel du handicap. Le premier ministre l’a dit, le gouvernement continuera à s’engager : chaque ministre prendra sa part de responsabilité, transcrite dans sa feuille de route. Le prochain comité aura pour thèmes l’accessibilité et le riche héritage laissé par les Jeux olympiques et paralympiques : un héritage matériel – de nouveaux logements et équipements accessibles, et une meilleure mobilité – mais également immatériel. Celui-ci nous sera utile dans tous les volets de l’action ministérielle ; le gouvernement s’engage à l’exploiter pleinement, dès le 6 mars prochain. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Fonderie de Bretagne
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Girard.
M. Damien Girard
Monsieur le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie, une industrie sans usines n’a pas d’avenir. Fonderie de Bretagne est à l’agonie et Renault joue la montre. Lors de l’audition de Lucas de Meo, le 4 février, la représentation nationale a fait bloc. Elle l’a questionné, quasi unanime pour dénoncer son absence de vision et défendre ce site stratégique – une unité rare, à la hauteur de l’enjeu. Il est désormais impératif que le gouvernement, à commencer par vous, monsieur le ministre, se montre lui aussi à la hauteur.
Car ce que réclament les salariés, ce n’est pas une faveur, une subvention à perte ou une perfusion éternelle. Ils demandent simplement du temps : deux ans pour se diversifier, s’adapter et devenir une pépite industrielle créatrice d’emplois. Pourtant, Renault refuse ; pire, Renault se cache derrière des contrevérités. On nous parle de l’électrification qui obligerait à diminuer les volumes de commandes. C’est faux : les pièces fabriquées sur ce site équipent aussi bien les véhicules thermiques qu’électriques.
En plus de cette mauvaise foi, Renault joue la provocation en proposant aux salariés une solution indécente : être délocalisés à 500 kilomètres, loin de leur terre, de leurs familles, de leurs racines. Cette proposition est insultante. L’État détient 15 % de Renault, ce qui vous donne un levier – et une responsabilité. Renault n’a pas hésité, par le passé, à solliciter massivement la solidarité nationale : ce sont les impôts des Français qui ont contribué à le sauver. Quand on a bénéficié d’un tel soutien, le made in France doit être une exigence, pas un slogan. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, SOC et GDR.)
Les salariés se battent. Les élus locaux sont mobilisés. La représentation nationale a fait son devoir. Pourtant, vous n’êtes encore jamais venu sur le site. Je vous invite à venir le visiter pour rencontrer les salariés de Fonderie de Bretagne. (Mêmes mouvements.) Acceptez-vous cette invitation ? Imposerez-vous à Renault le respect de ses engagements pour défendre un site essentiel à notre souveraineté industrielle ? Ne laissez pas Renault fuir ses responsabilités ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie
Mes pensées vont avant tout aux salariés de Fonderie de Bretagne qui vivent, depuis des mois, une situation difficile. Ce dossier a mobilisé les services de l’État, en particulier ceux de la délégation interministérielle aux restructurations d’entreprises, ainsi que mon cabinet. J’ai moi-même eu l’occasion d’échanger, à de multiples reprises, avec les salariés et leurs représentants, mais également avec la direction de Renault, pour tenter de trouver des solutions industrielles. Actuellement l’entreprise est en redressement judiciaire, dont la période d’observation s’achèvera dans quelques semaines.
Nous avons cherché à rapprocher les points de vue, en concertation avec les élus. Je veux en particulier saluer l’action du député Jean-Michel Jacques, qui n’a pas ménagé ses efforts pour essayer de trouver une voie de sortie pour Fonderie de Bretagne (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR), envisageant par exemple une diversification des activités en direction des industries de défense. Ces solutions sont sur la table. L’État s’est également engagé, dans le cadre des discussions avec le repreneur, Private Assets, et avec Renault, à consentir un effort financier, sous la forme d’un prêt du fonds de développement économique et social, de l’ordre de 14 millions d’euros.
Les efforts de l’État vont se poursuivre et se poursuivent déjà. Nous allons évaluer les propositions de reprise formulées dans le cadre du redressement judiciaire. Notre méthode pour traiter les entreprises en difficulté, en particulier les équipementiers automobiles – l’ensemble de la filière souffre…
M. Emeric Salmon
À cause des écolos !
M. Marc Ferracci, ministre
…de la transition vers le moteur électrique, mais aussi d’une concurrence parfois déloyale de la part des acteurs chinois –, ne change pas. Il s’agit de trouver des solutions industrielles lorsque c’est possible, et sinon d’accompagner les salariés dans la dignité. Nous l’avons fait, nous le faisons et nous continuerons à le faire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Industrie automobile
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Michoux.
M. Éric Michoux
Monsieur le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie, ma question s’inscrit dans la suite de celle qu’a brillamment formulée notre collègue Damien Girard.
L’Europe impose le véhicule électrique comme un dogme absolu : un dogme qui ignore toute réalité industrielle et qui menace 200 000 emplois en France et 3 millions en Europe. L’interdiction des moteurs thermiques en 2035 est une folie. L’automobile est placée dos au mur, comme un condamné à mort devant choisir entre la peste et le choléra.
D’un côté, la peste stratégique : si les constructeurs n’atteignent pas leurs objectifs, inatteignables, en 2035, d’une production de 100 % de véhicules électriques, ils devront payer 15 milliards d’euros à leurs concurrents – 15 milliards de crédits de CO2 achetés à Tesla ou au chinois BYD. De l’autre, le choléra industriel : les constructeurs français devront réduire la production de leurs véhicules thermiques de 2,5 millions d’unités – une folie, un suicide industriel. La Chine inonde notre marché avec des véhicules subventionnés et l’Europe regarde ailleurs. Demain – écoutez bien ! –, ils vendront à Paris leurs véhicules à carburants de synthèse. Oui, Pékin investit des milliards dans ces carburants, là où l’Europe a stoppé tout investissement – par idéologie, encore une fois.
Oui, l’Europe est un stratège kamikaze. Oui, notre industrie automobile est mortelle. Oui, le grand remplacement industriel est devant nous ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Monsieur le ministre, allez-vous enfin défendre l’industrie automobile en développant une stratégie en matière de carburants de synthèse – également utiles à l’aéronautique ? Allez-vous vous opposer aux 15 milliards d’euros d’amende pour nos constructeurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie
Vous m’interrogez sur la situation de la filière automobile et sur le lien unissant cette situation et les réglementations européennes. La filière est confrontée à deux défis. Le premier est celui d’une compétition mondiale qui ne s’exerce pas toujours dans des conditions loyales. C’est la raison pour laquelle, il y a quelques semaines, la Commission européenne a proposé au Conseil européen, qui l’a accepté, de pénaliser les véhicules électriques chinois en leur appliquant des tarifs douaniers plus élevés. Je pense qu’il s’agit qu’une telle mesure de protection était attendue par tous les acteurs de la filière.
De manière plus générale, la réglementation répond à l’objectif de passer au véhicule électrique d’ici à 2035. Comme nous l’avons exprimé dans une tribune, mes collègues Agnès Pannier-Runacher, Benjamin Haddad et moi-même restons attachés à cet objectif, qui a contribué à mettre en mouvement toute la filière. Ni les constructeurs ni les équipementiers n’en réclament d’ailleurs la remise en question ; ils demandent, en revanche, des mesures d’adaptation et davantage de flexibilité, en particulier concernant les amendes dues au titre de l’année 2025. C’est ce que nous proposons dans cette tribune : que la Commission prenne ses responsabilités et étale le paiement des amendes de 2025 sur plusieurs années. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui ces amendes sont injustes.
M. Ian Boucard
Il faut les supprimer, alors !
M. Marc Ferracci, ministre
En effet, après avoir consenti de lourds investissements pour électrifier leurs gammes, les constructeurs sont confrontés à une demande de véhicules électriques insuffisante pour plusieurs raisons. Nous défendons des mesures visant à soutenir cette demande ; celles qui portent sur le verdissement des flottes professionnelles, ont d’ailleurs été adoptées dans le cadre du projet de loi de finances. Nous soutenons aussi la demande d’assouplissement des amendes et, plus largement, celle d’un plan d’urgence pour l’industrie automobile européenne, que la Commission est en train d’instruire et dont j’espère qu’elle se saisira dans les prochains jours.
Anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Ce 11 février marque les 20 ans de la loi « handicap ». Certains, dont le Collectif handicaps qui regroupe cinquante-quatre associations nationales représentatives des personnes en situation de handicap, de leur famille et des proches aidants, préfèrent parler d’un « non-anniversaire ». Ces associations ne nient pas les progrès accomplis depuis 2005, mais elles soulignent à juste titre que l’essentiel de la loi de 2005 est demeuré lettre morte. La promesse d’égalité des droits et des chances n’est pas honorée.
La loi du 11 février 2005 devait changer complètement notre paradigme d’appréhension du handicap ; elle promettait de rompre avec une approche strictement médicale et d’adapter les politiques publiques en conséquence. Le handicap devait cesser d’être conçu comme une affaire individuelle pour être considéré comme ce qu’il est : l’effet, parfois invisible, d’un accident, du hasard, auquel l’ensemble de la société doit s’adapter afin de le prendre en charge.
Force est de constater que nous en sommes très loin. L’accès à la culture, entendue comme outil d’émancipation, en constitue à mon sens l’un des meilleurs indicateurs. Ma collègue Sophie Mette et moi-même avons mené un travail visant à évaluer les politiques publiques destinées à favoriser l’accès à la culture des personnes en situation de handicap. Nous avons formulé des propositions concrètes, car il apparaît que l’accès à la culture est un impensé des politiques publiques en faveur de ces personnes.
Plus généralement, la puissance publique s’avère défaillante au regard de son obligation d’égalité de traitement de tous les citoyens. Cela vaut pour de trop nombreuses dispositions inscrites dans la loi de 2005. Ainsi la suppression du critère d’âge pour obtenir la prestation de compensation du handicap, prévue à l’article 13, n’est-elle toujours pas effective à ce jour. Comment le gouvernement compte-t-il honorer enfin la promesse d’égalité républicaine et, surtout, avec quels moyens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et EcoS ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap
Merci pour votre question, pour votre engagement et pour les travaux sur l’accès à la culture que vous avez conduits avec Mme Mette. Cela me donne une nouvelle occasion de saluer l’ensemble des travaux parlementaires, dont on peut mesurer encore une fois la diversité, la richesse et l’intérêt.
Vous nous interrogez : que faire ces prochaines années, vingt ans après l’adoption d’une loi porteuse de tant d’espoirs et d’engagements ? Je l’ai indiqué, je partage le constat des associations : nous sommes au milieu du gué. Malgré les efforts consentis et les avancées intervenues depuis 2017 – le recul du chômage des adultes, les progrès vers une école plus inclusive pour les enfants en situation de handicap –, beaucoup reste à faire, notamment dans le domaine de la culture, essentiel pour l’exercice de la citoyenneté. À ce titre, je vous remercie des propositions que vous m’avez présentées ; plusieurs ont retenu mon attention, notamment la création d’une certification pour les contenus « faciles à lire et à comprendre », outil important, que nous pouvons continuer à défendre ensemble, pour favoriser la pleine citoyenneté de nos concitoyens en situation de handicap.
Puisque nous traitons de la culture, je m’arrête un instant sur le portail national du livre accessible : il vient d’être mis en ligne et doit permettre de rendre la lecture accessible à chacun, quel que soit son handicap. Je souligne également que l’IA et d’autres innovations nous font entrevoir des solutions.
Après avoir fait le bilan et pris la mesure de ce qui reste à faire, le gouvernement prendra de nouveaux engagements le 6 mars prochain, à l’occasion du prochain comité interministériel du handicap.
M. Stéphane Peu
Et la PCH ?
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Il importe de faire respecter la loi de 2005, notamment en supprimant le critère d’âge pour l’obtention de la PCH.
Situation des autoentrepreneurs
Mme la présidente
La parole est à M. Thomas Lam.
M. Thomas Lam
Créé en 2009, le statut d’autoentrepreneur visait à faciliter l’entrepreneuriat en simplifiant les démarches administratives et fiscales. Ce cadre a permis à des millions de Français de se lancer dans une activité indépendante, contribuant ainsi à la vitalité économique de nos territoires et à ouvrir les portes de la création d’entreprise au plus grand nombre.
Pourtant, ce statut fait aujourd’hui l’objet de nombreuses remises en cause et d’un alourdissement constant des charges qui pèsent sur ses bénéficiaires. Les cotisations sociales ont augmenté de manière continue depuis sa création, la dernière hausse datant du 1er janvier dernier. Le PLF pour 2025 prévoit d’abaisser le seuil d’exonération de la TVA de manière brutale et significative, avec rétroactivité de surcroît. Une telle mesure fait peser un danger imminent sur de très nombreux travailleurs indépendants, spécialement celles et ceux dont les activités sont destinées à des particuliers. En effet, elle aurait pour conséquence soit une hausse des tarifs, risquant de provoquer une perte de clients, soit une baisse de la rémunération et de la protection sociale, paupérisant le travailleur.
Par ailleurs, la baisse de ce seuil ferait disparaître de nombreuses activités de revente de produits reconditionnés ou de seconde main, dont le prix de vente actuel n’inclut pas la TVA, disparition inacceptable quand on cherche à promouvoir une consommation plus durable. Il faut également nous garder de pousser d’honnêtes travailleurs à ne plus déclarer une partie de leur activité.
Au groupe Horizons & indépendants, il nous semble nécessaire de revenir à l’esprit initial du statut d’autoentrepreneur, conçu pour être un outil simple et attractif. Nous avons pris bonne note de la suspension de la mesure, le temps de mener une concertation, et nous saluons cette initiative.
Madame la ministre chargée du commerce et de l’artisanat, quelles mesures concrètes entendez-vous prendre pour alléger ces contraintes et redonner au régime d’autoentrepreneur toute sa force et son efficacité ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire
Votre question renvoie à deux sujets : celui des autoentrepreneurs et celui de la franchise de TVA.
S’agissant du premier, l’article 10 du PLF ne modifie en rien le régime des microentrepreneurs qui conservent le bénéfice de toutes les dispositions fiscales antérieures : l’application d’un abattement lors du calcul de l’impôt sur le revenu, un dispositif social facilitant le calcul des cotisations grâce à l’application d’un simple taux sur le chiffre d’affaires et des formalités allégées.
Concernant le sujet plus large de la protection sociale des autoentrepreneurs, je suis prête à travailler à plus long terme et selon un format à définir.
Vous évoquez ensuite la franchise de TVA, laquelle s’applique – je le rappelle – à toutes les formes d’entreprises dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas un certain seuil. Le nouveau dispositif a été introduit le 1er décembre dernier au Sénat par le précédent gouvernement. Constatant que les échanges avaient été insuffisants, le ministre Éric Lombard a annoncé dès jeudi dernier la suspension de la mesure, le temps de procéder aux concertations nécessaires. Elles ont débuté vendredi et se poursuivront, j’espère, jusqu’à la fin du mois de février ; je propose d’ailleurs d’y associer les députés et les sénateurs de façon que chacun puisse faire part de ses suggestions.
Très attaché à l’entrepreneuriat, le gouvernement tient à préserver le dispositif de la microentreprise, essentiel à la vitalité de quelque 3 millions d’entreprises présentes sur l’ensemble du territoire. Notre méthode est fondée sur la concertation et le dialogue, nous poursuivrons dans cette voie. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)
Indemnisation des victimes de la Dépakine
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Loir.
Mme Christine Loir
Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Depuis plusieurs années déjà, les victimes de la Dépakine se battent pour faire reconnaître leurs droits. Le 1er juin 2017 un dispositif d’indemnisation, sous tutelle de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, a été prévu pour les femmes et leurs enfants exposés pendant la grossesse. Pourtant, une injustice demeure.
En effet, une étude récente de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a mis en évidence un risque accru de troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant, si le père a pris de la Dépakine pendant la période de conception. Ces hommes n’ont jamais été informés des risques et leurs enfants souffrent aujourd’hui des mêmes séquelles que ceux exposés à travers leur mère. Selon l’Apesac, l’association qui soutient les patients et leurs familles, plus de 161 000 hommes étaient sous traitement en 2022.
À l’occasion de la journée internationale de l’épilepsie, il est essentiel de rappeler que ces familles subissent chaque jour les conséquences des traitements prescrits pour cette maladie. J’ai donc également une pensée toute particulière pour les plus de 600 000 personnes épileptiques de France.
Depuis le 6 janvier 2025, l’ANSM a amélioré l’information sur ces risques. Importante et nécessaire, cette avancée ne répond pas aux attentes des familles déjà concernées ; il faut aller plus loin. Ces pères et ces enfants méritent eux aussi une reconnaissance et un accompagnement adapté. Envisagez-vous donc d’intégrer ces « papas Dépakine » au dispositif d’indemnisation de l’Oniam afin d’apporter une réponse juste et équitable à toutes les familles touchées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins
Merci pour cette question sur un sujet, la Dépakine, que vous connaissez bien pour l’avoir étudié. Il s’agit d’une question de santé publique, mais aussi d’une question humaine et le gouvernement adresse une pensée solidaire aux familles dont l’enfant souffre d’une malformation à cause de ce produit.
Permettez-moi de rappeler deux choses. Premièrement, la Cour d’appel a confirmé l’imputabilité de l’État via l’ANSM. Deuxièmement, une étude est parue, tendant à établir un lien de cause à effet entre l’administration de valproate de sodium et certaines malformations – neurovégétatives, dégénératives ou encore cardiaques – présentées par des enfants dont le père avait été traité par Dépakine.
La France a pris l’initiative d’une saisine de l’Agence européenne des médicaments et de son comité de pharmacovigilance. Cette démarche a abouti à une révision de la doctrine et à la publication d’une nouvelle réglementation par l’Agence, qui restreint les conditions de prescription de la Dépakine : seul un neurologue, un pédiatre ou un psychiatre peut désormais signer la première ordonnance, que le médecin généraliste pourra uniquement renouveler. Il s’agit de veiller à ce que les hommes en âge de procréer et désireux de le faire puissent arrêter le traitement par Dépakine suffisamment tôt – en général, trois mois – avant de passer à l’acte.
Concernant l’indemnisation, plusieurs mesures ont été prises. Un fonds d’indemnisation a été prévu, mais, par souci d’empathie, l’Oniam propose également une procédure amiable permettant de prendre en charge les victimes plus rapidement. En pleine responsabilité, nous allons examiner l’extension de la prise en charge que vous nous proposez, sous réserve que l’existence d’un lien de cause à effet soit confirmée. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Loir.
Mme Christine Loir
J’entends vos arguments, monsieur le ministre. Pour aller plus loin, j’invite chaque parlementaire siégeant sur ces bancs à cosigner la proposition de résolution que je m’apprête à déposer afin que ces pères et ces enfants soient enfin reconnus comme victimes. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – M. Laurent Mazaury applaudit aussi.)
Continuité territoriale pour les fonctionnaires et militaires ultramarins
Mme la présidente
La parole est à Mme Nicole Sanquer.
Mme Nicole Sanquer
À côté du principe d’égalité entre tous les fonctionnaires de l’État, l’appartenance des Français d’outre-mer à la République a toujours justifié l’adoption de mesures adaptées à leurs territoires. Plusieurs avancées en faveur d’une égalité réelle – révision de l’indemnité temporaire de retraite, prime d’installation pour les militaires, congés bonifiés – ont pu être déployées, ce dont je vous remercie.
Cependant, les travaux ne sont pas terminés, car plusieurs injustices et discriminations persistent pour les Ultramarins engagés pour la France et par la France. Ainsi les Français du Pacifique sont-ils considérés comme des Français de l’étranger par les administrations de l’État.
Par ailleurs, les fonctionnaires du Pacifique pâtissent d’une absence de réciprocité de traitement lorsqu’ils doivent suivre une formation ou intégrer un service en France : alors que les fonctionnaires hexagonaux affectés en outre-mer bénéficient de dispositifs d’accompagnement pour faciliter leur installation dans nos collectivités, il n’en est rien pour les lauréats de concours ultramarins lorsqu’ils doivent exercer dans l’Hexagone, ce qui les contraint souvent à rompre tout lien familial jusqu’à l’espoir d’un retour.
En outre, le retour dans nos territoires est compliqué et compromis, car conditionné à l’obtention d’un centre des intérêts matériels et moraux qui demeure contraignant et subjectif. Est-il demandé à un Breton ou à un Niçois de prouver ses origines pour obtenir une affectation prioritaire dans son territoire de rattachement ? Non !
Enfin, je pense à nos militaires engagés pour la France, souvent oubliés dans les circulaires et décrets prévoyant le bénéfice d’avantages tels que l’affectation préférentielle ou le calcul de l’avancement.
Vous l’aurez compris, les fonctionnaires et les militaires ultramarins sont contraints de mener un véritable combat pour bénéficier des droits reconnus aux autres agents. Monsieur le ministre, pour rendre tout leur sens aux propos tenus publiquement par le président Emmanuel Macron en juillet 2021 lors de son déplacement en Polynésie Française : « Ici, c’est la Polynésie ; ici, c’est la France ! », dans quels délais entendez-vous mettre en place des mesures concrètes pour assurer aux agents ultramarins qu’ils sont pleinement reconnus comme Français à part entière, et non comme Français à part ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer.
M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer
Madame la députée, chère Nicole Sanquer, vous avez raison : la République doit être attentive aux spécificités de chacun de ses territoires sur les trois océans. Vous le soulignez, le principe de continuité territoriale comprend deux versants : concrétiser la liberté pour chacun de se déplacer et de s’installer sur l’ensemble du territoire national ; donner à chacun la possibilité de revenir aisément sur le territoire auquel il est attaché. Les congés bonifiés, que vous connaissez bien, répondent à cette logique.
Il existe aussi un outil permettant de donner la priorité aux fonctionnaires originaires des outre-mer : le centre des intérêts matériels et moraux. Le comité interministériel de juillet 2023 a rénové et harmonisé les critères d’obtention du CIMM, dont la portabilité est par ailleurs garantie. Veillons à ce que cela soit bien mis en œuvre !
S’agissant des militaires, auxquels nous devons toute la reconnaissance de la nation, le régime des concours a été aligné afin que les avantages dont bénéficie un lauréat affecté outre-mer bénéficient également aux lauréats ultramarins affectés dans l’Hexagone. Nous ne les oublions donc pas. En outre, le décret du 25 avril 2022 crée une indemnité d’installation dans l’Hexagone au profit des militaires provenant de plusieurs territoires ultramarins, dont la Polynésie.
Les fonctionnaires de l’État originaires de ces territoires bénéficient également d’une prime spécifique d’installation à leur arrivée dans l’Hexagone.
Je veux développer les opportunités des jeunes Ultramarins et leur offrir les conditions de leur épanouissement sur le territoire qui leur est cher. Notre ambition doit être de permettre aux territoires d’outre-mer de bénéficier des compétences des personnes qui leur sont attachées et qui veulent y revenir.
Enfin, je vous confirme l’entrée en vigueur, d’ici la fin du premier trimestre, du « passeport retour » destiné à accompagner les personnes souhaitant retourner s’installer sur un territoire ultramarin dans le cadre d’un projet professionnel. Vous voyez qu’il existe un ensemble de dispositifs au service de ces ambitions.
Mme la présidente
Merci, monsieur le ministre.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Nous pouvons sans doute les concrétiser. Je reste à votre disposition pour le faire.
Mme la présidente
Nous avons terminé les questions au gouvernement.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Jérémie Iordanoff.)
Présidence de M. Jérémie Iordanoff
vice-président
M. le président
La séance est reprise.
2. Renforcement de la sûreté dans les transports
Suite de la discussion d’une proposition de loi
M. le président
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports (nos 134, 636).
Discussion des articles (suite)
M. le président
Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles, s’arrêtant aux amendements identiques nos 34 et 49 à l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président
Sur les amendements nos 34 et identique, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir l’amendement no 34.
M. Yoann Gillet
Voici un amendement de bon sens. L’insécurité dans les transports en commun est une réalité que personne ne peut ignorer – sauf peut-être nos collègues du NFP.
Plus de 108 000 victimes en 2024 : un chiffre accablant qui, malheureusement, illustre parfaitement la situation. Pendant que les discours rassurants se multiplient, la réalité est implacable. Les violences sexuelles explosent (+ 6 %) et les outrages et agressions contre les forces de l’ordre progressent encore (+ 4 %). Ces statistiques reflètent un sentiment d’impunité grandissant et une perte totale de respect pour l’autorité.
D’autres chiffres sont sans appel : 23 % des délinquants interpellés sont mineurs, 48 % sont des étrangers. Cette réalité démontre une fois de plus qu’il est urgent de faire preuve d’une fermeté absolue envers les mineurs délinquants et met en lumière, pour ceux qui refusent encore de l’admettre, le lien évident entre immigration et insécurité. Nos métros, nos bus, nos trains deviennent des zones de non-droit empruntées chaque jour, la peur au ventre, par des millions de Français.
Face à une telle situation, que fait le gouvernement ? Rien, ou si peu : il prend des demi-mesures inefficaces pendant que nos concitoyens subissent chaque jour cette insécurité. Les Français n’en peuvent plus. Ils paient le prix de l’inaction, des discours creux et des renoncements des gouvernements successifs.
Avec cet amendement, nous proposons une réponse immédiate et concrète : renforcer les pouvoirs des agents de sûreté, qui font un travail remarquable, en leur permettant de procéder plus efficacement, et avec davantage de souplesse, aux palpations de sécurité.
Cependant, ne soyons pas naïfs : cela ne suffira pas, il faut aller beaucoup plus loin. Il est impératif d’adopter des peines planchers pour les récidivistes, d’expulser systématiquement les délinquants étrangers – les Français le demandent et le Rassemblement national le propose depuis des années – et d’en finir avec l’excuse de minorité, trop souvent utilisée comme un passe-droit.
Les Français attendent des actes : l’ordre doit être restauré sans faiblesse ni compromis. Il est temps d’agir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. Pascal Jenft, pour soutenir l’amendement identique no 49.
M. Pascal Jenft
Nous avions déjà déposé cet amendement en commission. Le texte évoque « l’existence de menaces graves pour la sécurité publique ». Mais où commence la gravité ? Une menace pour la sécurité des passagers est déjà grave, elle devrait suffire pour déclencher une action et un contrôle.
En outre, l’ajout de la notion de gravité risque d’ouvrir le champ à une remise en question perpétuelle des actions des agents de sécurité. Il reviendra alors au juge de créer diverses jurisprudences pour définir a posteriori si la menace était grave et si elle nécessitait une action.
Voilà pourquoi je vous propose, par cet amendement, de supprimer le mot « graves » à l’alinéa 8 de l’article 1er.
M. le président
La parole est à M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements identiques.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
Je vous remercie, monsieur Jenft, d’avoir défendu votre amendement sur le fond, contrairement à M. Gillet. Je ne vous cache pas que cet amendement, déjà défendu en commission, ne vient pas renforcer les pouvoirs des agents de sûreté. Il n’a d’ailleurs pas d’effet juridique : il vient simplement modifier l’intitulé de l’arrêté préfectoral. Avis défavorable.
M. Yoann Gillet
Les mots ont un sens !
M. le président
La parole est à M. le ministre chargé des transports, pour donner l’avis du gouvernement.
M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports
Le juge constitutionnel veille à ce que les prérogatives accordées à ces agents soient strictement nécessaires, adaptées et proportionnées à leurs missions. L’exigence d’une condition tenant à la gravité de la menace pour la sécurité publique renforce la proportionnalité de la mesure ; sa suppression contribuerait au contraire à la fragiliser, ce qui serait dommageable. Je fais confiance au discernement des agents et donne donc un avis défavorable à ces amendements.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 34 et 49.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 79
Nombre de suffrages exprimés 79
Majorité absolue 40
Pour l’adoption 37
Contre 42
(Les amendements identiques nos 34 et 49 ne sont pas adoptés.)
M. le président
L’amendement no 36 de M. le rapporteur est rédactionnel.
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Sagesse.
M. le président
La parole est à M. Julien Rancoule.
M. Julien Rancoule
Ce n’est pas un amendement rédactionnel. Vous pérennisez le fait que les fouilles et les palpations seront conditionnées à la prise en considération de l’identité de genre de la personne.
Mme Anna Pic
Et alors ?
M. Julien Rancoule
Or nous parlons de palpations en cas de risque avéré, lorsqu’une personne est susceptible d’être en possession d’une arme. Je ne comprends pas pourquoi vous vous couchez devant l’idéologie woke des gauchistes qui se trouvent en face de nous. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Élise Leboucher
Non mais sérieux !
M. Julien Rancoule
En matière de sécurité, il faut être pragmatique. Il me semble que plus de soixante-dix genres sont reconnus par certains organismes. Comment se déroulera donc un contrôle ? Faudra-t-il faire appel à soixante-dix agents, de genres différents, pour procéder aux palpations ? La réalité, c’est que les agents ne pourront pas appliquer cette mesure, car ils ne prendront pas le risque de ne pas respecter l’identité de genre de la personne qu’il faut palper. Vous sabordez cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. Fabien Di Filippo
Pourquoi rédiger l’article ainsi ?
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
L’amendement est rédactionnel dans la mesure où il vise uniquement à changer de place – d’alinéa – une disposition que nous avions votée en commission.
M. Fabien Di Filippo
Oui, mais combien d’amendements fera-t-il tomber ?
M. le président
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo
J’aimerais être éclairé. La rédaction sera modifiée par l’adoption de cet amendement. Or M. Jenft et moi avons déposé des amendements qui portent sur le fond, notamment sur le problème de l’identité de genre soulevé par le collègue Rancoule. Si l’adoption de cet amendement rédactionnel fait tomber nos amendements, nous nous y opposons.
Nous sommes défavorables à cette rédaction, parce que nous parlons d’une situation grave et qu’il est déjà difficile de demander aux personnes s’il est possible de procéder à des palpations pour les contrôler. Si l’individu prétend que son identité est fluide – je ne parle même pas d’une identité de genre particulière –, celle-ci pourrait changer au cours du contrôle. Ce type de rédaction place donc nos agents dans une situation impossible.
Mme Sandra Regol
Ça ne veut pas dire ça !
M. Fabien Di Filippo
Avant de voter, je veux savoir si l’adoption de cet amendement ferait tomber tous les nôtres qui suivent. Si tel est le cas, il est hors de question pour nous de le voter.
Mme Sandra Regol
Il suffit de lire l’ordre du jour !
M. le président
Je vous réponds très précisément : l’adoption de cet amendement ferait tomber le no 75, les nos 50 et identique, le no 62, les nos 111 et identique ainsi que les nos 51 rectifié et identique.
Je mets aux voix l’amendement no 36.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 88
Nombre de suffrages exprimés 87
Majorité absolue 44
Pour l’adoption 40
Contre 47
(L’amendement no 36 n’est pas adopté.)
M. Emeric Salmon
Très bien ! Bravo !
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 75.
Mme Sandra Regol
Il s’agit également d’un amendement rédactionnel qui vise à uniformiser l’ensemble du texte afin qu’il soit applicable…
M. Fabien Di Filippo
Inapplicable !
Mme Sandra Regol
…le mieux possible et que les usagères et usagers soient aussi respectés que les personnes chargées de pratiquer les palpations ou les fouilles.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Cet amendement vise à uniformiser le texte en prenant en considération les dispositions adoptées en commission. Avis favorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Sagesse.
M. le président
La parole est à Mme Stéphanie Galzy.
Mme Stéphanie Galzy
Le terme « genre » est juridiquement imprécis et mal défini. Remplacer « sexe » par « genre » pourrait transformer les débats juridiques en véritables casse-tête. Imaginons des avocats qui tenteraient de définir les nuances de genre lors d’un procès : un festival de philosophie de comptoir !
Encore une fois, c’est plus fort que vous : revoilà les théories fumeuses sur le genre. Combien existe-t-il de genres selon vous ? Personnellement, étant très pragmatique, je ne connais que deux sexes et pas de genre : des femmes et des hommes, bref rien de plus naturel. Cela empêche-t-il les libertés dans nos comportements ? Évidemment non. En revanche, cela évite les dérives néopolpotistes qui suscitent des réactions chez nos compatriotes. Vos théories fumeuses sont l’antichambre de la dictature rouge et verte que vous voulez imposer aux Français avec vos amis de LFI. (Exclamations et rires sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme Mathilde Feld
N’importe quoi !
Mme Stéphanie Galzy
Lorsque je vous entends rire, j’ai simplement envie d’appeler les infirmiers de l’Assemblée nationale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR, et sur quelques bancs du groupe DR.)
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol.
Mme Sandra Regol
Il est tout de même étonnant que dans le cadre de la discussion d’un texte sur la sécurité, sur le quotidien des Françaises et des Français, nous ayons droit à une offensive aussi ciblée et précise. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Vous racontez à longueur de journée que vous voulez œuvrer pour la sécurité de nos concitoyens ; il est regrettable que vous soyez en réalité obsédés par ce qui définit, à vos yeux, un homme ou une femme. De là à penser que votre féminité ou votre masculinité sont très fragiles, il n’y a qu’un pas. (Mêmes mouvements.)
En ce qui me concerne, je n’ai aucun problème avec mon identité, que ce soit en tant que citoyenne, en tant que Française ou en tant que femme. C’est peut-être pour cela que je n’éprouve pas le besoin d’établir sans arrêt des définitions. Interrogez-vous un peu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
J’ai un point de désaccord avec Sandra Regol. Contrairement à elle, je ne suis pas étonné que le sujet arrive sur la table, puisque les groupes, mouvements et partis politiques antidroits et antichoix utilisent chaque débat pour défendre leurs théories (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EPR. – Mme Sandra Regol applaudit aussi. – Exclamations sur les bancs du groupe RN), qu’il s’agisse du droit à l’avortement ou de l’éducation complète à la sexualité.
M. Fabien Di Filippo
Cela n’a rien à voir !
M. Laurent Jacobelli
Vous êtes un wokiste, vous aussi ?
M. Ian Boucard
Nous n’avons pas du tout parlé de sexualité !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Vous venez porter vos attaques en caricaturant celles et ceux qui défendent tout simplement les droits humains, les droits des femmes et la dignité des personnes LGBT, notamment trans. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Vous y revenez à chaque discussion, ce qui donne lieu à des désaccords profonds entre les uns et les autres.
M. Laurent Jacobelli
C’est vous qui introduisez ce débat !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Il n’est guère surprenant que vous utilisiez chaque débat pour pousser vos idées, que nous combattons. Je maintiens mon avis favorable. Nous poursuivrons peut-être cette discussion lorsque nous examinerons d’autres amendements d’ici quelques minutes.
M. Yoann Gillet
Si c’est pour dire des bêtises, arrêtez de parler !
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Tabarot, ministre
Je veux être clair sur cette question. Pendant que nous discutons de l’identité de genre, des usagers et des agents subissent des agressions dans nos transports. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR. – Mme Danielle Brulebois applaudit également.) C’est à eux que nous devons des réponses concrètes et immédiates. Lorsque j’ai rédigé la proposition de loi, j’étais loin d’imaginer que nous discuterions de ces questions.
Mme Élise Leboucher
C’est l’extrême droite qui lance ce débat !
M. Philippe Tabarot, ministre
Notre priorité doit être la sécurité de nos réseaux. Les questions sociétales méritent probablement un débat approfondi, mais dans un cadre législatif plus adapté. On ne peut pas prendre en otage la sûreté des Français pour des considérations qui dépassent largement le cadre de cette loi. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Danielle Brulebois
Tout à fait !
M. Philippe Tabarot, ministre
Je rappelle que les palpations de sécurité sont déjà encadrées par la loi. Elles sont soumises à des conditions claires : le consentement de la personne et la réalisation par un agent du même sexe. L’objectif est d’assurer la sécurité tout en garantissant la dignité de chaque personne. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)
Mme Élise Leboucher
Ce n’est vraiment pas à la hauteur !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 75.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 101
Nombre de suffrages exprimés 101
Majorité absolue 51
Pour l’adoption 49
Contre 52
(L’amendement no 75 n’est pas adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 50 et 105.
La parole est à M. Pascal Jenft, pour soutenir l’amendement no 50.
M. Pascal Jenft
Nous allons certainement nous répéter, mais la notion dont il est ici question a été introduite en commission.
S’il est légitime que les palpations de sécurité soient réalisées par un agent du même sexe que la personne, et après autorisation de cette dernière, il ne faut pas non plus aller trop loin.
Si le fait de tenir compte de l’identité de genre, comme le prévoit désormais le texte, est de nature à satisfaire les tenants d’une idéologie, cette condition serait en réalité inapplicable et ô combien néfaste. Si une personne contrôlée se prétend non binaire, faudra-t-il faire appel à un agent lui-même non binaire pour procéder aux palpations ? Cela signifierait que chaque équipe devrait comprendre une personne non binaire ? Expliquez-moi ! En réalité, il suffira à toute personne, à tout contrevenant, de se déclarer non binaire pour échapper à toute palpation et à tout contrôle. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Nadège Abomangoli
Non mais franchement !
M. le président
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 105.
M. Fabien Di Filippo
Je suis content que l’amendement rédactionnel du rapporteur ait été rejeté – cela nous permet de tenir cette discussion. Comme l’a très bien dit le ministre, l’important, c’est la sécurité dans les transports. Il ne faut pas compliquer le travail de nos agents !
M. Éric Michoux
Évidemment !
M. Fabien Di Filippo
Je regrette profondément les outrances et les insinuations du rapporteur.
M. Laurent Jacobelli
Oui, c’est n’importe quoi ! Idéologues !
M. Fabien Di Filippo
Pourquoi parler d’avortement ? Cela n’a rien à faire dans nos débats, et n’a d’ailleurs été abordé par personne. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR et sur quelques bancs du groupe DR.)
Alors, au lieu d’introduire des concepts complètement fumeux dans ce texte, qui rendront impossible le travail des agents et compliqueront celui des juridictions, je suis d’accord avec le ministre : restons-en aux palpations par un agent de même sexe, sans autre précision.
Un député du groupe RN
C’est du bon sens !
M. Fabien Di Filippo
Comme celui de mon collègue, mon amendement vise donc à supprimer la précision relative à l’identité de genre. Même les personnes qui la défendent ne sont pas capables de la définir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable. (M. Laurent Jacobelli s’exclame.)
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Sagesse. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)
M. Frédéric Boccaletti
Monsieur le ministre, quand même !
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Nous estimons que si des agents formés peuvent certes réaliser des palpations dans certaines conditions très encadrées, cela reste un geste très intrusif. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.) C’est la raison pour laquelle ces précisions ont été introduites en commission.
M. le président
La parole est à M. Bryan Masson.
M. Bryan Masson
Je l’ai rappelé hier au nom du groupe Rassemblement national, monsieur le ministre, votre proposition de loi va dans le bon sens. Nous essayons juste de faire en sorte que la loi soit applicable. Or ces précisions la rendront inapplicable !
J’ai l’impression que le rapporteur, assis non loin de vous, essaie de pilonner votre proposition de loi et de la rendre inapplicable. Si nous adoptons ses amendements, elle n’ira pas dans le bon sens.
Monsieur le ministre, je plaide pour une clarification. Assumez vos convictions !
Mme Prisca Thevenot
Ah, ils ont des convictions au RN ?
M. Bryan Masson
Vous et nous savons que la sécurité des Français se joue dans les transports.
M. Christophe Bentz
Eh oui !
M. Bryan Masson
Ne laissez pas le groupe macroniste pilonner votre texte et le rendre inapplicable ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Tabarot, ministre
Je pense que mon intervention était claire. (« Non ! » sur les bancs du groupe RN.) Ma priorité, c’est d’avancer sur les palpations, d’où mon avis de sagesse sur les amendements. Vous savez parfaitement ce que cela signifie. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Mme Prisca Thevenot
Non ! Ça veut dire quoi ?
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 50 et 105.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 110
Majorité absolue 56
Pour l’adoption 57
Contre 53
(Les amendements identiques nos 50 et 105 sont adoptés. En conséquence, l’amendement no 62 tombe.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR et sur quelques bancs du groupe DR.)
M. Christophe Bentz
Le wokisme en prend un coup !
M. Pouria Amirshahi
Vous n’aviez pas annoncé le scrutin public, monsieur le président !
M. le président
C’est moi qui l’ai décidé.
M. le président
La parole est à M. Roger Vicot, pour soutenir l’amendement no 4.
M. Roger Vicot
Hier, nous avons déjà évoqué le fait que la palpation n’est pas un geste anodin. Je note que le débat revient aujourd’hui dans les mêmes termes.
En l’état de sa rédaction, l’article 1er dispose que la palpation vise à protéger les personnes et les biens, conférant aux agents de sécurité des prérogatives de plus en plus étendues. Nous souhaitons la limiter aux seuls cas nécessaires à la protection des personnes.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable. La sécurité des biens est intimement liée à celle des personnes. La mission de prévention des agents du service de la sûreté ferroviaire (Suge) et du groupe de protection et de sécurité des réseaux (GPSR) s’entend à la fois pour les personnes et les biens.
Si un objet est susceptible de présenter un risque pour la sécurité des biens, il faut donc pouvoir procéder à une palpation, car il n’est pas impossible que l’individu dispose également d’objets susceptibles de présenter un risque ou une menace pour la sécurité des personnes.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
L’intention de cet amendement est claire : il s’agit de limiter le recours aux palpations qui, je le répète, sont très intrusives. C’est une façon de dire qu’il faudrait les réserver aux situations d’urgence, et non se focaliser sur le risque pour les biens. D’ailleurs, par quelle intuition la personne en charge de la palpation pourra-t-elle déterminer le danger pour les biens ?
M. Fabien Di Filippo
Lunaire…
(L’amendement no 4 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 111 et 220.
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 111.
M. Fabien Di Filippo
Nous poursuivons notre œuvre afin de remettre de la rationalité dans le texte pour faire en sorte qu’il soit parfaitement applicable.
De manière incompréhensible, à l’alinéa 9, la rédaction fait de nouveau référence à la notion de genre – je reviendrai sur l’identité de genre dans un prochain amendement. C’est pourquoi je souhaite que le mot « genre » soit remplacé par le mot « sexe », en cohérence avec la rédaction de tous les autres alinéas, pour les raisons que j’ai déjà développées. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
La parole est à M. Pascal Jenft, pour soutenir l’amendement no 220.
M. Pascal Jenft
Il s’agit d’un amendement identique. Si c’est un homme qui est contrôlé, c’est un homme qui réalisera la palpation, si c’est une femme, c’est une femme qui officiera. Point ! C’est aussi simple que cela !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je comprends la volonté de clarification et d’harmonisation des termes des alinéas 8 et 9. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol.
Mme Sandra Regol
On continue dans la même obsession, qui nous fait perdre beaucoup de temps alors que plus de 200 amendements ont été déposés sur ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Puis-je placer un mot, messieurs ?
Quelle est cette obsession récurrente consistant à afficher partout le mot « sexe » ?
M. Thomas Ménagé
C’est la vôtre, d’obsession !
Mme Sandra Regol
Bravo messieurs, nous allons perdre une bonne demi-heure.
Quelques députés du groupe RN
Ne présagez pas de notre identité de genre ! (Sourires.)
Mme Sandra Regol
Pourrait-on faire preuve de maturité et conserver le bon travail de la commission, qui a abouti à cette rédaction de compromis sur laquelle vous revenez intégralement sans jamais avoir participé à nos débats ? Merci beaucoup ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
Peut-être cette terminologie nous permettrait-elle d’avancer ?
M. Laurent Jacobelli
C’est le Parlement qui décide !
Mme Sandra Regol
Les forces de l’ordre appliquent déjà de telles dispositions, et respectent genre et sexe.
M. Fabien Di Filippo
Mais là, il n’y a pas « sexe », seulement « genre » !
Mme Sandra Regol
Pourquoi ne peut-on aboutir à une formulation applicable et claire pour les agents, qui pourront ainsi s’adapter aux personnes et leur demander leur consentement ? Cela ne serait-il pas mieux perçu par les usagers, qu’ils soient fouillés ou spectateurs ? C’est important pour l’image des agents chargés de la sécurité des transports en commun. Mais ça, il semblerait que vous vous en moquiez ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)
M. le président
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo
Je n’accepte pas vos critiques, madame Regol. Vous venez de présenter un amendement visant à introduire le mot « genre ». C’est vous qui nous faites perdre du temps. Quelle hypocrisie ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR et sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Sandra Regol
On n’est pas en maternelle ! Peut-on travailler ?
M. Fabien Di Filippo
Vous êtes mauvaise perdante !
M. le président
Les scores ont été très serrés sur les amendements précédents. Je vais donc recourir à un scrutin public.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 111 et 220.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 137
Nombre de suffrages exprimés 132
Majorité absolue 67
Pour l’adoption 70
Contre 62
(Les amendements identiques nos 111 et 220 sont adoptés.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 51 rectifié et 107 rectifié.
La parole est à M. Pascal Jenft, pour soutenir l’amendement no 51 rectifié.
M. Pascal Jenft
Il s’agit de supprimer la mention de l’identité de genre à la fin de la seconde phrase de l’alinéa 9, pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués. S’il est légitime que les palpations soient réalisées par un agent du même sexe que la personne, et après l’autorisation de celle-ci, n’allons pas trop loin.
Dans sa rédaction issue de la commission, l’alinéa 9 impose de tenir compte de l’identité de genre. C’est idéologique. Au risque de me répéter, je plaide pour la suppression de cette notion.
Un député du groupe RN
Le ministre pourra dire merci au RN !
M. le président
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 107 rectifié.
M. Fabien Di Filippo
Il s’agit de supprimer les considérations liées à l’identité de genre à la fin de l’alinéa 9, par cohérence et souci d’efficacité.
Il ne s’agit pas d’une perte de temps. Certains essaient d’introduire des débats sociétaux dans ce texte. (M. Emmanuel Duplessy s’exclame.) Nous ne cherchons qu’à simplifier le travail des agents qui interviennent dans des situations tendues. Il faut que les règles d’intervention soient parfaitement claires.
M. Alexandre Portier
Exactement !
M. Fabien Di Filippo
Vous ne l’assumez pas, mais vous cherchez simplement à rendre leur travail impossible. C’est ce que nous combattons.
Un député du groupe RN
Ce sont des anarchistes !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Par cohérence avec mon précédent avis, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée nationale.
M. le président
Je vais à nouveau recourir à un scrutin public.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 51 rectifié et 107 rectifié.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 148
Nombre de suffrages exprimés 144
Majorité absolue 73
Pour l’adoption 83
Contre 61
(Les amendements identiques nos 51 rectifié et 107 rectifié sont adoptés.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR, et sur quelques bancs du groupe DR.)
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 96 rectifié.
Mme Sandra Regol
Cet amendement vise à supprimer la possibilité pour les agents de la Suge et du GPSR de percevoir des indemnités forfaitaires pour des infractions au code des transports si elles sont directement versées à l’exploitant du service de transport collectif.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Vous proposez de supprimer une disposition introduite en commission par un excellent amendement de notre collègue Vincent Caure, visant à renforcer notre dispositif de lutte contre la fraude. Avis défavorable.
(L’amendement no 96 rectifié, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de cinq amendements, le no 22, qui fait l’objet de deux sous-amendements du gouvernement nos 265 et 263, et les nos 157, 195, 63 et 64, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 157 et 195 sont identiques.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 22.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
J’ai évoqué cet amendement dès la discussion générale, car il est nécessaire.
En commission, nous avons adopté l’article 1er sans dispositif de saisie des objets. J’ai entendu vos remarques sur le caractère flou des termes de la proposition de loi avant son passage en commission – l’agent pouvait « retirer » des objets susceptibles de « gêner » et d’« incommoder ».
Du fait de la suppression des alinéas en cause par le biais d’un amendement en commission, je n’ai pu vous présenter une rédaction alternative. C’est chose faite. L’amendement reprend la rédaction issue de nos travaux de mai 2024.
Il s’agit de réintroduire un dispositif de conservation des objets, en le limitant aux seuls objets dangereux pour les voyageurs, et non plus aux objets gênants et incommodants. L’amendement, s’il est adopté, permettra également de conserver l’objet dans un cadre plus clair – une confiscation d’une durée limitée à quarante-huit heures.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Il est indispensable de réintroduire un tel dispositif compte tenu de l’évolution des menaces qui pèsent sur les usagers des transports en commun, notamment du fait de la détention de plus en plus courante d’objets dangereux pouvant servir à intimider ou à exercer des violences – j’avais évoqué ce phénomène hier en vous donnant des chiffres.
M. le président
La parole est à M. le ministre, pour soutenir les sous-amendements nos 265 et 263, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Philippe Tabarot, ministre
Le sous-amendement no 265 tend à supprimer la référence à l’officier de police judiciaire et au ministère public à l’alinéa 3 de l’amendement no 22. Le gouvernement considère en effet qu’en l’absence d’infraction commise et faute de cadre précisément défini, la conservation par ces deux autorités des objets saisis n’entre pas dans leurs attributions.
Le sous-amendement no 263 tend à encadrer davantage le dispositif introduit par l’amendement en prévoyant qu’un récépissé devra être remis en échange de tout objet dangereux saisi et conservé. Ce récépissé devra faire mention de la nature de l’objet et de l’identité de son propriétaire.
Mme Élisa Martin
Aïe ! Ça se complique !
M. le président
Sur l’amendement no 22, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 157.
M. Corentin Le Fur
Il est de bon sens. Certains individus se promènent dans les transports avec des armes blanches létales, qui permettent de commettre des agressions ; il faut pouvoir saisir ces armes sans l’accord de ceux qui les détiennent. Il est invraisemblable que le consentement du détenteur soit requis pour la saisie d’une arme qui n’est pas autorisée, qui peut être dangereuse et contribuer à cette insécurité contre laquelle nous luttons tous !
Mme Élisa Martin
Il va falloir recruter !
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 195.
M. Ian Boucard
Il s’agit d’un des débats intéressants que nous avons eus en commission. Une alliance baroque allant de la gauche au Rassemblement national a supprimé la disposition reprise dans cet amendement – ce fut l’une des grandes incohérences de nos travaux en commission. Nous étions convenus de la retravailler, mais si l’amendement de M. le rapporteur sous-amendé par les deux sous-amendements de M. le ministre est adopté, je retirerai le mien, car ils offrent davantage de cohérence.
M. le président
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir les amendements nos 63 et 64, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Éric Pauget
Comme mon collègue Ian Boucard, je propose de rétablir la rédaction initiale par l’amendement no 63. L’amendement no 64 tend à supprimer les termes « gêne » et « incommodant », qui posent des problèmes.
Cependant, si l’amendement du rapporteur et les deux sous-amendements du gouvernement sont adoptés, je retirerai les miens.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Chers collègues, je vous remercie pour le travail effectué à nos côtés, avec le ministre et nos équipes, sur un sujet juridiquement complexe. Je donnerai un avis favorable sur les deux sous-amendements défendus par le ministre, qui renforcent la cohérence du dispositif et sa sécurité juridique tout en l’encadrant davantage, ce qui avait été demandé par plusieurs groupes, par exemple en prévoyant la remise d’un récépissé. L’objectif est de réintroduire cette disposition particulièrement attendue par nos agents sur le terrain. Dans les faits, ils sont souvent contraints de laisser partir le détenteur d’un objet dangereux sans pouvoir saisir celui-ci.
Par conséquent, avis favorable sur les deux sous-amendements, et demande de retrait, sinon défavorable, sur les amendements autres que le no 22.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Avis favorable sur l’amendement no 22 du rapporteur, sous réserve de l’adoption des sous-amendements nos 265 et 263. Je remercie les députés qui ont retiré leur amendement ; je propose aux autres de faire de même au profit de l’amendement no 22 sous-amendé.
M. le président
La parole est à M. Corentin Le Fur.
M. Corentin Le Fur
Je suis notre excellent ministre et le rapporteur et retire mon amendement.
(L’amendement no 157 est retiré.)
(Les sous-amendements nos 265 et 263, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 22, tel qu’il a été sous-amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 149
Nombre de suffrages exprimés 136
Majorité absolue 69
Pour l’adoption 116
Contre 20
(L’amendement no 22, sous-amendé, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 195, 63 et 64 tombent.)
M. le président
L’amendement no 37 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 37, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements, nos 52 et 219, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Pascal Jenft, pour soutenir l’amendement no 52.
M. Pascal Jenft
À l’heure où le quart des mis en cause pour vols et violences dans les transports sont des mineurs, il est d’importance capitale que le futur article L. 2251-11 du code des transports leur soit applicable. Cet article aura un effet dissuasif en instaurant une transaction immédiate qui tient lieu de réponse pénale. Il ne serait pas logique d’y faire échapper les mineurs, dans la mesure où ils constituent une part des auteurs de violences dans les transports. (M. Laurent Jacobelli applaudit.)
M. le président
L’amendement no 219 de M. Guillaume Bigot est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
En proposant d’ouvrir une nouvelle possibilité de règlement par transaction, y compris pour les infractions au code des transports commises par des mineurs, vous anticipez d’autres débats qui auront lieu cette semaine.
Je donnerai un avis défavorable. Le droit français ne prévoit pas que la procédure de transaction puisse s’appliquer aux mineurs, lesquels font l’objet d’un régime pénal spécifique et protecteur. À l’inverse, la transaction instaure une responsabilité automatique et financière : elle sort du cadre des sanctions adaptées aux mineurs, qui doivent être éducatives et individualisées. Je vous demande donc de retirer vos amendements ; à défaut, j’y donnerai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis que le rapporteur, même si je comprends votre intention.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Il n’y a rien d’étonnant à ce que nous anticipions le débat sur la façon dont la société doit considérer les mineurs. Pour notre part, nous souhaitons maintenir un traitement spécifique, même s’il a déjà été dégradé : nous ne voulons pas entrer dans une logique d’alignement des régimes applicables aux majeurs et aux mineurs.
(Les amendements nos 52 et 219, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
L’amendement no 38 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 38, accepté par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 39.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je comprends que nous puissions avoir des désaccords – je m’adresse aux deux côtés de l’hémicycle –, mais l’amendement précédent était rédactionnel, comme celui-ci et les deux suivants. Ils faciliteront le travail de toilettage ultérieur.
M. Christophe Bentz
Nous avons le droit de ne pas être d’accord avec la rédaction !
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je suis favorable à cet amendement et aux deux suivants : ils sont purement rédactionnels.
(L’amendement no 39 n’est pas adopté.)
M. le président
Les amendements nos 40 et 41 de M. le rapporteur sont donc rédactionnels.
(L’amendement no 40 est adopté.)
(L’amendement no 41 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 129, 158 et 194.
L’amendement no 129 de Mme Virginie Duby-Muller est défendu.
M. le président
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 158.
M. Corentin Le Fur
L’objectif est le même que celui de l’amendement que j’ai défendu précédemment : dans une logique de sécurité, je propose de permettre à des organismes privés de saisir des armes létales, y compris si la personne qui les détient n’y consent pas.
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 194.
M. Ian Boucard
Il s’agit plus précisément de permettre aux agents de sécurité privée de saisir ces armes létales.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je comprends parfaitement l’intérêt de ces amendements. Cependant, dans le dispositif, il est fait mention des armes blanches. Cela reviendrait à accorder aux agents de sécurité privée des prérogatives beaucoup plus importantes, quasiment alignées sur celles des agents de police ou des forces de sécurité, alors que ces agents de sécurité n’ont pas le même niveau de formation que ceux du GPSR et de la Suge. Je vous demanderai donc de retirer vos amendements ; à défaut, je donnerai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
C’est bien la confirmation d’une de nos grandes inquiétudes. On franchit un cap : des agents de sécurité privée sont progressivement autorisés à pratiquer des gestes réservés aux policiers de plein exercice, si vous me passez l’expression.
M. Fabien Di Filippo
Qu’est-ce que ça veut dire ?
M. Jérôme Nury
C’est le cas dans les aéroports !
Mme Élisa Martin
C’est le principe du continuum de sécurité : cap après cap, sujet après sujet, on donne de plus en plus de prérogatives à ces agents, sans tenir compte du droit ou de leur formation. Tout cela n’est pas très raisonnable.
M. le président
La parole est à M. Julien Rancoule.
M. Julien Rancoule
Arrêtons de stigmatiser les agents de sécurité, qui sont formés – ils doivent suivre 175 heures de formation.
Mme Élisa Martin
C’est vous qui voulez les mettre en danger !
M. Julien Rancoule
Prenons un exemple : il y a moins d’un an, une attaque a eu lieu à la gare de Lyon. C’est un agent de sécurité – Abderahmane Cissé – qui a interpellé une personne qui poignardait des passants. Vous voulez empêcher les agents de sécurité de retirer un couteau des mains d’un agresseur ! Il faut faire confiance à ces gens qui sont formés pour assurer la sécurité des personnes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Élisa Martin
Mais vous les mettez en danger !
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Chère collègue Martin, vous avez caricaturé ces amendements…
Mme Élisa Martin
À peine !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
…que M. Boucard et d’autres collègues avaient déjà déposés en commission, car ils souhaitaient ouvrir le débat, avec conviction. Nous devons en effet avoir ce débat, notamment dans la perspective d’une ouverture à la concurrence. Ces questions devront être examinées dans le rapport qui sera remis par le gouvernement – si vous votez en ce sens tout à l’heure.
Par ailleurs, le ministre et moi avons rendu un avis défavorable,…
Mme Élisa Martin
Et alors ? Nous ne sommes pas là pour décorer !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
…au regard des prérogatives données, qui seraient plus importantes que celles des agents du GPSR et de la Suge, dont la formation reste plus poussée que celle des agents de sécurité.
(Les amendements identiques nos 129, 158 et 194 ne sont pas adoptés.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements, nos 76, 248 et 88, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 76.
Mme Sandra Regol
Si vous m’y autorisez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement no 88. Ces deux amendements proposent d’expérimenter les récépissés… (Brouhaha sur les bancs des groupes RN et DR.) Si on vous dérange, messieurs, il faut le dire, mais si vous voulez discuter, vous pouvez aussi quitter l’hémicycle !
M. Laurent Jacobelli
Vous n’êtes pas la présidente de séance !
M. le président
Madame Regol, je vous prie de continuer vos explications.
Mme Sandra Regol
Il s’agit donc d’expérimenter les récépissés dans le cadre des fouilles, des palpations ou des inspections visuelles. Cette pratique, qui a fait l’objet de nombreuses études, permet notamment d’évaluer objectivement les cas de contrôle, de détecter d’éventuels problèmes s’agissant de tel ou tel individu et de disposer d’un suivi. C’est un dispositif gagnant-gagnant, à la fois pour la population et pour les agents.
L’amendement no 88 est un amendement de repli, qui propose que l’expérimentation porte uniquement sur les palpations de sécurité.
M. le président
L’amendement no 248 de M. Vincent Caure est défendu ; le no 88 de Mme Sandra Regol vient de l’être.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 255 à l’amendement no 88.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous avons débattu en commission de la question, fort légitime, du renforcement de l’encadrement des saisies et palpations lorsque celles-ci ne sont pas pratiquées dans le cadre d’un arrêté préfectoral. Je m’étais alors engagé, notamment pour ce qui concerne les saisies, à ce que nous continuions à réfléchir, avec Sandra Regol, à la manière de mieux encadrer ces contrôles.
De son côté, le gouvernement a pris acte de cette intention, comme l’a montré le sous-amendement no 263, qui prévoit un récépissé pour les saisies.
Si je suis défavorable à l’amendement no 76, déjà déposé en commission et qui concerne toutes les pratiques de contrôle du GPSR et de la Suge, je suis en revanche disposé à ce que nous adoptions l’amendement no 88, sous-amendé ainsi que je le propose, de manière à expérimenter la délivrance d’un récépissé lors d’une palpation, dispositif exorbitant du droit commun. Dans ces conditions, l’amendement no 248 pourrait être retiré au profit de l’amendement no 88 sous-amendé.
J’ajoute que le gouvernement aura sans doute une position différente, ce qui ne l’empêche pas, comme je l’ai rappelé, d’avoir entendu qu’il était nécessaire d’encadrer ces pratiques.
(L’amendement no 248 est retiré.)
M. le président
Sur l’article 1er, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis du gouvernement sur les amendements et le sous-amendement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Cette expérimentation aura pour effet d’alourdir inutilement la procédure des palpations administratives, qui est avant tout préventive. En effet, la palpation ainsi que l’inspection visuelle des bagages ont pour objet de prévenir l’introduction d’objets dangereux dans les emprises de transport et ne doivent pas être conditionnées au constat d’une infraction. Par ailleurs, les agents ont la possibilité d’utiliser une caméra-piéton lors de ces opérations, afin de diminuer les potentielles tensions. Le récépissé ne doit donc concerner que les situations effectives d’infraction. C’est la raison pour laquelle je donne un avis défavorable aux amendements ainsi qu’au sous-amendement.
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes.
M. Thomas Portes
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas nous dire que le récépissé va alourdir la procédure alors qu’on parle d’un garde-fou contre d’éventuelles discriminations !
Je vous ai interrogé hier sur le nombre d’heures consacrées à la lutte contre les discriminations que comporte la formation des agents de la Suge et du GPSR, mais je n’ai pas obtenu de réponse. Vous parlez aujourd’hui de rétablir une forme de confiance, mais l’enquête publiée par le Défenseur des droits sur les relations police-population fait état de contrôles discriminatoires : quand vous êtes perçu comme jeune, homme, noir ou arabe, vous avez vingt fois plus de chances d’être contrôlé que le reste de la population ; vous êtes plus souvent tutoyé, insulté ou brutalisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Alors que vous vous apprêtez à généraliser ces contrôles et à accroître les prérogatives de la Suge et du GPSR, la moindre des choses serait de prévoir des garanties et la remise d’un récépissé. Cela nous fournira un retour d’expérience permettant de lutter contre les discriminations. Ce n’est pas un outil miracle, mais c’est un minimum. (Mêmes mouvements.)
M. le président
La parole est à M. Bryan Masson.
M. Bryan Masson
Nous allons évidemment nous opposer à ces amendements qui viennent alourdir la procédure. En matière de sécurité des Français dans les transports, il faut tendre vers la simplicité et l’efficacité. Or les mesures proposées constituent évidemment une contrainte supplémentaire pour les agents en charge de la sécurité, comme pour les usagers.
Arrêtons de pointer du doigt celles et ceux qui assurent la sécurité de nos compatriotes ! Les procédures sont parfaitement balisées, et il faut cesser avec ces amendements qui les alourdissent. N’ayons pas peur de la simplification administrative, puisque c’est un terme que l’on entend beaucoup dans les rangs de cet hémicycle. Renforçons la sécurité de nos compatriotes et cessons de stigmatiser ceux qui l’assurent ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je voudrais simplement rappeler à notre collègue du Rassemblement national que si ces amendements sont en discussion, c’est suite aux interrogations qui ont surgi en commission, y compris au sein de son groupe, sur l’encadrement des mesures de contrôle, et qui ont abouti à la suppression des saisies. J’ai entendu ces interrogations, ce qui m’a conduit à réfléchir, notamment à partir des propositions de Sandra Regol, à la manière d’encadrer les divers types de contrôle. Nous avons avancé sur les saisies, tandis que les palpations font l’objet de positions divergentes entre le gouvernement et moi-même, l’essentiel étant que nous parvenions à adopter l’article 1er dans les minutes qui viennent.
Néanmoins, je le redis, les questions portant sur l’encadrement, la proportionnalité et l’efficacité des contrôles sont parfaitement légitimes, et il est important que nous leur apportions des réponses.
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Tabarot, ministre
Monsieur Portes, je vous ai en partie répondu hier au sujet de la formation du GPSR et de la Suge,…
Mme Élisa Martin
Non ! On vous a demandé le nombre d’heures !
M. Philippe Tabarot, ministre
…mais je peux le faire une nouvelle fois : douze heures sont consacrées à la déontologie en formation initiale, à quoi s’ajoutent cinquante-deux heures consacrées aux techniques d’intervention dans le respect de la déontologie.
M. Ian Boucard
Très précis, monsieur le ministre !
M. Jean-Luc Bourgeaux
C’est clair et net !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 76.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 170
Nombre de suffrages exprimés 170
Majorité absolue 86
Pour l’adoption 76
Contre 94
(L’amendement no 76 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix le sous-amendement no 255.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 171
Nombre de suffrages exprimés 170
Majorité absolue 86
Pour l’adoption 82
Contre 88
(Le sous-amendement no 255 n’est pas adopté.)
M. le président
Monsieur le rapporteur, maintenez-vous votre avis favorable sur l’amendement no 88 malgré le rejet du sous-amendement ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Oui, avis favorable.
(L’amendement no 88 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 1er.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 173
Nombre de suffrages exprimés 173
Majorité absolue 87
Pour l’adoption 123
Contre 50
(L’article 1er, amendé, est adopté.)
M. Pierre Cordier
L’article 1er s’est droitisé !
M. Fabien Di Filippo
C’est bien comme ça ; c’est plus propre.
Après l’article 1er
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 18, 140 et 168, portant article additionnel après l’article 1er.
Sur ces amendements, je suis saisi par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 18.
M. Ian Boucard
Il s’agit de faciliter l’application des mesures que nous avons adoptées à l’article 1er en rendant obligatoire la détention d’une pièce d’identité, pour que les auteurs d’incivilités et d’infractions autres que tarifaires dans les transports publics soient en mesure de justifier leur identité et leur adresse. Aujourd’hui, si vous n’avez pas de billet, vous êtes tenu de présenter une pièce d’identité au contrôleur ; nous voudrions qu’il en soit de même, demain, si vous taguez une rame de RER ou commettez une autre infraction, de manière à faciliter la verbalisation par les agents de sécurité de la RATP et de la SNCF.
M. le président
L’amendement no 140 de Mme Virginie Duby-Muller est défendu.
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 168.
M. Corentin Le Fur
Les actes de violence perpétrés dans les transports en commun, principalement à l’encontre des femmes, sont inacceptables, comme le sont les tags, l’abandon de déchets ou les nombreux actes d’incivilité. Les agents doivent pouvoir contrôler l’identité de leurs auteurs et obtenir leur véritable adresse. C’est une mesure de bon sens, et j’espère qu’elle sera adoptée.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Si je comprends votre intention, je ne vois pas comment ces dispositions pourraient s’appliquer, dans la mesure où les agents du GPSR et de la Suge ne sont pas habilités à procéder à des contrôles d’identité. En outre, ils ne pourront pas vérifier si la personne a déjà été condamnée.
C’est donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je partage pleinement l’objectif visés par ces amendements qui prévoient l’obligation pour les auteurs d’infractions au code des transports de justifier leur identité, obligation qui existe déjà pour les personnes dépourvues de titre de transport. Cela étant dit, je ne suis pas certain que cela règle véritablement le problème de fond. En l’état du droit, les agents qui verbalisent ces infractions peuvent relever l’identité des contrevenants ; en revanche, ils ne sont pas autorisés à la contrôler – j’espère que les choses évolueront, et je vois mon ami Éric Pauget qui approuve : il sait que le même problème existe avec la police municipale – en l’absence d’un officier de police judiciaire.
Je suis donc désolé d’émettre un avis défavorable.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Outre l’argument pertinent qui vient d’être avancé, je trouve gênante l’intention qu’on devine derrière les moyens proposés pour résoudre la difficulté à laquelle nous faisons face.
D’abord, vous mélangez les problèmes d’incivilité avec les problèmes d’agression à l’encontre des personnes. De toutes les manières, ces actes ne sont le plus souvent pas commis en présence des agents des transports, quelle que soit leur qualité.
Votre intention de prendre les gens la main dans le sac paraît donc inadaptée, si ce n’est démago.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 18, 140 et 168.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 168
Nombre de suffrages exprimés 166
Majorité absolue 84
Pour l’adoption 85
Contre 81
(Les amendements identiques nos 18, 140 et 168 sont adoptés.)
Mme Élisa Martin
Ils vont être contents, les policiers !
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 83, qui porte également article additionnel après l’article 1er.
Mme Sandra Regol
Il vise à renforcer le contenu des modules de la formation initiale dispensée aux futurs agents de la Suge et du GPSR. Sans décider du contenu précis des modules, lequel relève du pouvoir réglementaire, nous proposons d’inscrire dans la loi l’ajout de deux unités d’enseignement à celles déjà existantes afin de rendre les interventions des agents plus efficaces.
L’arrêté du 28 septembre 2016 prévoit un bloc d’enseignement juridique et un bloc d’enseignement technique, qui sont essentiels pour acquérir les connaissances indispensables et comprennent plusieurs modules. Nous proposons de les compléter par un bloc d’enseignement consacré à la psychologie, axé autour de la gestion du stress et des façons d’aborder certaines interactions, afin de les aider dans leur travail, qui peut devenir stressant dès lors qu’ils sont insuffisamment formés, et par un bloc pluridisciplinaire qui a pour vocation d’apporter aux agents un recul et une capacité d’analyse pour toutes les situations dans lesquelles ils interviennent. Nous jugeons ces blocs tout aussi essentiels. Il s’agit de doter les agents d’outils qu’ils cherchent parfois dans des formations extérieures.
Il reviendra au gouvernement, par l’actualisation du décret de 2016, de décider du contenu précis de ces deux nouveaux blocs.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Il me semble que l’amendement est déjà satisfait. J’en demande donc le retrait ; à défaut, j’y donnerai un avis défavorable. Je laisse toutefois le ministre revenir sur le contenu précis des unités d’enseignement de la formation initiale.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
L’admission à la formation initiale pour les futurs agents du GPSR se fait après une visite médicale, des tests de présélection et un recrutement sur dossier, avec un taux de recrutement d’un pour soixante-dix.
La formation théorique s’étale sur 450 heures, effectuées en quinze semaines. Elle comprend quatorze évaluations éliminatoires. Ses modules abordent entre autres les connaissances juridiques, l’emploi des armes, les gestes du métier ou la déontologie. La formation pratique consiste en une année de terrain. Une fois recrutés, les agents bénéficient de plusieurs jours de formation chaque année.
Je rappelle que l’article R. 2251-23 du code des transports dispose que « l’entreprise conçoit et met en œuvre au profit de chaque agent une formation adaptée, en particulier dans les domaines touchant au respect de l’intégrité physique, de la dignité des personnes, de la déontologie, de la prévention des violences et des atteintes à caractère sexiste, aux libertés publiques et aux interventions sans uniforme ». Puisque votre amendement est satisfait, je vous demande de le retirer.
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol.
Mme Sandra Regol
L’amendement n’est pas entièrement satisfait. Vous avez d’ailleurs oublié de mentionner qu’une partie des agents sont très bien formés au tir, assurément plus que nos forces de police nationale, ce qui n’est pas rassurant, bien que cela dépende du côté où l’on se situe.
Mme Élisa Martin
Eh oui !
Mme Sandra Regol
Il s’agit non de remettre en cause ce qui existe, ni ce qui est déjà réalisé par la SNCF et la RATP, mais de continuer à aider les agents à faire face à un métier qui évolue, notamment dans la nature des violences et des agressions auxquelles ils sont exposés. Sans dénigrer leur niveau de formation, nous souhaitons avancer ensemble et les doter d’outils adaptés à une société qui évolue.
(L’amendement no 83 n’est pas adopté.)
Article 2
M. le président
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 5, 77, 102 et 224, tendant à supprimer l’article 2.
La parole est à Mme Céline Thiébault-Martinez, pour soutenir l’amendement no 5.
Mme Céline Thiébault-Martinez
L’article 2 prévoit d’élargir le périmètre d’intervention des agents de sécurité employés par la RATP ou la SNCF aux abords immédiats des gares et des stations, sans préciser la nature de ces abords ni leur étendue.
Cette extension présente des risques importants d’atteinte aux libertés fondamentales. (Brouhaha sur plusieurs bancs des groupes RN, DR et UDR.)
Pourrais-je avoir le silence, s’il vous plaît ? (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme Ségolène Amiot
Vous voulez peut-être qu’on vous apporte le thé ?
M. Pierre Cordier
Président !
M. Ludovic Mendes
Elle est en train de mettre en cause votre présidence !
M. le président
Je demande à tout le monde de se calmer. Madame Thiébault-Martinez, je vous prie de reprendre.
Mme Céline Thiébault-Martinez
Merci, monsieur le président. En effet, l’appréciation par les seuls agents de sécurité du caractère inopiné ou urgent de la situation justifiant l’intervention nous interpelle fortement, leur formation juridique étant loin d’être équivalente à celle des policiers ou des gendarmes.
Nous ne souhaitons donc pas un tel élargissement, d’autant plus qu’il appartient à l’État de recruter un nombre suffisant de policiers et de gendarmes pour garantir la sécurité de la population partout, et pas seulement dans les transports. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 77.
Mme Sandra Regol
Les articles L. 2251-1-1 et L. 2251-1-2 du code des transports encadrent précisément le périmètre d’intervention des agents de sécurité, dont l’extension peut néanmoins être débattue.
Nous estimons que l’article 2 élargit beaucoup trop ce périmètre, engendrant une confusion entre les périmètres d’intervention des agents de sécurité ferroviaire et des forces de l’ordre, qu’il s’agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale.
L’enchevêtrement des fonctions, des territoires et des périmètres d’application vers lequel nous nous dirigeons nous semble particulièrement dangereux, raison pour laquelle nous souhaitons supprimer cet article.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 102.
Mme Élisa Martin
En l’état du texte, le cadre dans lequel les agents de sécurité ferroviaire seront amenés à intervenir sur la voie publique, au-delà des abords immédiats des gares, sera laissé à leur appréciation subjective.
On peut s’interroger sur le danger que présenteraient de telles interventions, d’autant plus que certains de ces agents, notamment ceux travaillant pour la Suge, sont équipés d’armes de poing.
M. le président
Sur les amendements identiques nos 5, 77, 102 et 224, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 224.
Mme Elsa Faucillon
L’élargissement progressif et continu du pouvoir des agents de sécurité employés par la SNCF et par la RATP leur confère des responsabilités toujours plus proches de celles de la police nationale. Il dénature la mission de ces agents de sécurité et soulève des inquiétudes en matière de libertés individuelles et de protection de la vie privée.
Cet élargissement risque d’aboutir à un dévoiement des missions de ces agents, au point qu’ils ne pourront plus assurer les missions pour lesquelles ils ont été embauchés.
Le risque principal, au-delà des atteintes aux libertés individuelles et à la vie privée, est que vous délégitimiez ce faisant le pouvoir de la police nationale. Or nous voyons déjà à quel point la confiance des citoyens à son égard est entachée. (« Par votre faute ! » sur les bancs du groupe RN.) Il faudrait pouvoir y remédier.
M. Éric Pauget
C’est faux !
M. Jean-Pierre Vigier
C’est n’importe quoi !
Mme Elsa Faucillon
Si, c’est une réalité.
M. Marc de Fleurian
N’importe quoi !
Mme Dominique Voynet
Arrêtez de les défendre, c’est pire !
Mme Elsa Faucillon
J’en suis désolée, mais c’est aussi le cas, dans une moindre mesure, de la confiance à l’égard des personnalités politiques.
Par cet élargissement, on confère aux agents de sécurité une partie de la violence légitime dont l’usage est circonscrit à l’État, et des prérogatives qui lui sont initialement réservées sont confiées à des agents qui n’ont ni la même formation ni les mêmes missions. Par ce grand flou, vous dénaturez les missions de chacun. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Avis défavorable. Nous sommes manifestement en désaccord. Mme Regol considère que ces nouvelles prérogatives seraient extrêmement dangereuses. En ce qui me concerne, c’est ne pas donner les moyens de poursuivre en dehors de la gare quelqu’un qui commet un trouble à l’ordre public que je trouve extrêmement dangereux.
Aujourd’hui, les agents du GPSR et de la Suge, qui sont souvent les premiers à être sur place, doivent interrompre les poursuites une fois passées les limites de la gare. Il faut leur donner la prérogative momentanée de pouvoir agir aux abords immédiats des gares. On peut faire confiance à leur professionnalisme et à leur niveau de formation, très souvent supérieur à celui des agents de sécurité privée et quasi équivalent à celui de nos forces de l’ordre, pour gérer correctement la variabilité des abords.
En commission, nous avons intégré, outre le droit de poursuite, un dispositif permettant au préfet d’autoriser les agents de la Suge et du GPSR à exercer sur la voie publique des missions, même itinérantes, de surveillance contre les vols, les dégradations, les effractions et les actes de terrorisme.
Nous avons également introduit un dispositif plus général, semblable à celui figurant dans la version initiale de la proposition de loi, précisant que les agents de la Suge et du GPSR pouvaient intervenir spontanément et momentanément sur la voie publique aux abords immédiats des emprises immobilières pour lesquelles ils sont compétents, si le caractère urgent de la situation le justifie. Il est impératif de maintenir l’ensemble du dispositif, tel qu’il a été conçu en commission des lois.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je rappelle que l’article 2 a pour objet de permettre aux agents de sécurité d’exercer leurs missions sur la voie publique aux abords immédiats des emprises immobilières. En l’état du droit, les agents de sécurité de la Suge et du GPSR ne peuvent assurer une mission sur la voie publique qu’à condition d’avoir reçu un ordre de mission spécifique indiquant la date, la durée, le lieu et l’objet de la mission et de l’avoir préalablement porté à la connaissance des services de police et de gendarmerie territorialement compétents.
Vous constatez que ce n’est pas simple et que cela pose des difficultés opérationnelles, auxquelles l’article 2 apporte de vraies réponses. Il s’agit de pouvoir répondre rapidement, quand les forces de l’ordre ne peuvent intervenir immédiatement, à des situations inopinées ou urgentes présentant un risque pour la sécurité et nécessitant une intervention immédiate. Or ces agents, qui exercent leurs missions dans les emprises immobilières, sont à proximité.
Un équilibre doit toutefois être trouvé pour éviter toute confusion avec les missions assurées par les forces de sécurité intérieure. Une autorisation préalable du représentant de l’État est par principe nécessaire quand les agents de la Suge et du GPSR exercent leurs missions sur la voie publique. L’article 2 rend l’intervention sans autorisation préalable possible quand le caractère particulier de la situation le justifie. J’y tiens donc particulièrement et émets par conséquent un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président
La parole est à M. Alexandre Dufosset.
M. Alexandre Dufosset
Nous voterons évidemment contre ces amendements : notre pays connaît un climat de tension, marqué par une menace terroriste très élevée.
J’en profite pour vous rappeler les événements survenus le 1er octobre 2017, quand deux jeunes femmes ont été mortellement poignardées sur le parvis de la gare de Marseille Saint-Charles. Leur assaillant – un islamiste – a été neutralisé par une patrouille de l’opération Sentinelle, sur le courage et le dévouement de laquelle nous avons pu compter.
Demain, des agents de la Suge pourront en faire autant. Leur interdire aujourd’hui d’intervenir aux abords des gares pourrait compromettre une intervention rapide et efficace dans le but de protéger les Français.
J’ai entendu des représentants de La France insoumise s’alarmer d’une remise en cause des libertés individuelles. Ignorent-ils que la sécurité est la première des libertés des Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Je m’autorise à répéter les propos que j’ai tenus hier. L’article 2 contrevient aux principes énoncés dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, selon laquelle les droits des citoyens sont garantis par la force publique, qui est exercée au nom de l’intérêt général et non d’intérêts particuliers.
Quels que soient le niveau et la qualité des formations suivies par les agents de la RATP ou de la SNCF chargés de la sécurité, on ne peut considérer qu’ils sont l’égal de cette force publique. Pour cette raison, nous refusons l’article 2 et je rappelle que le Conseil constitutionnel partage cette position.
Pour régler le problème des effectifs de policiers et de gendarmes dans ce pays, il faudrait plutôt payer leurs heures supplémentaires, les traiter correctement,…
M. Laurent Jacobelli
Rassurez-nous : vous ne voulez quand même pas les désarmer ?
Mme Élisa Martin
…et créer les conditions permettant de les recruter. Nous disposerons alors d’un service public de la paix, capable d’assumer toutes ses missions de sécurisation de l’espace public. Incidemment, nous pourrions même disposer de plus d’enquêteurs ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Laurent Jacobelli
Pas sûr que la direction de votre parti goûte cette suggestion !
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 5, 77, 102 et 224.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 173
Majorité absolue 87
Pour l’adoption 53
Contre 120
(Les amendements identiques nos 5, 77, 102 et 224 ne sont pas adoptés.)
M. le président
Sur l’article 2, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 94.
Mme Sandra Regol
Après le rejet de nos amendements de suppression, je profite de l’examen de cet amendement de repli pour répondre à M. le rapporteur. Je n’ai jamais dénié aux équipes d’intervention du GPSR ou de la Suge le droit de poursuivre un contrevenant, mais je souhaite que cette prérogative soit encadrée. Elle doit être bornée et articulée avec celles des autres forces de sécurité qui exercent dans leur périmètre.
À ce sujet, la version initiale de la proposition de loi était presque équilibrée, ce qui est loin d’être le cas de sa version actuelle : le périmètre d’intervention défini est bien trop vaste.
L’amendement no 94 tend donc à limiter la possibilité laissée aux équipes du GPSR et de la sûreté ferroviaire de patrouiller, sur autorisation préfectorale, en dehors des gares et stations. Cette limitation a déjà été en vigueur et peut sans grande complexité être reconduite ; elle s’appliquerait aux patrouilles, qui ne se confondent pas – vous me l’accorderez – avec les poursuites.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous sommes défavorables à cet amendement, comme nous l’étions aux amendements tendant à supprimer l’intégralité de l’article 2.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Défavorable.
M. le président
La parole est à M. Julien Rancoule.
M. Julien Rancoule
Si je comprends bien, vous voulez donner moins de droits aux agents de la Suge qu’aux simples citoyens, qui peuvent, en vertu de l’article 73 du code de procédure pénale, poursuivre et interpeller un individu en cas de délit flagrant.
Soyez cohérents ! Nous parlons d’agents formés : donnons-leur le moyen d’interpeller, déjà accordé à tout citoyen. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme Sandra Regol
Mais ça n’a rien à voir : un simple citoyen n’est pas assermenté !
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes.
M. Thomas Portes
Il ne s’agit pas de limiter, mais d’encadrer les patrouilles, pour garantir qu’elles ont lieu dans le respect de la loi.
Depuis le début de l’examen de ce texte, vous instrumentalisez la lutte contre le terrorisme : vous voulez nous faire croire qu’un agent de la Suge ou du GPSR qui verrait un terroriste aux abords d’une emprise ferroviaire ou d’une station de métro ne pourrait intervenir, parce que le règlement ne le lui permettrait pas.
Vous vous faites leurs défenseurs, mais vous ne connaissez pas leur métier !
M. Laurent Jacobelli
Et vous donc !
M. Thomas Portes
Ces agents iraient à la rencontre d’un individu malveillant et interviendraient !
Mme Naïma Moutchou
Ça ne marche pas comme ça !
M. Thomas Portes
Voilà la réalité ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Nous, nous souhaitons qu’il n’y ait pas de délégation extrafonctionnelle et que la police, en tant que force régalienne, puisse intervenir dans l’espace public.
M. Laurent Jacobelli
Mais ça, c’est juste la loi !
M. Thomas Portes
Vous, vous voulez que tout le monde puisse intervenir, partout et tout le temps, sans aucune garantie. Ce n’est pas notre vision de la sécurité ! (Mêmes mouvements.)
M. Romain Tonussi
Encore un qui a inventé l’eau chaude…
(L’amendement no 94 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 42 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 42, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Emmanuel Duplessy, pour soutenir l’amendement no 95.
M. Emmanuel Duplessy
Cet amendement de repli tend à exclure la répression de la vente à la sauvette du champ d’application de l’article 2. D’une part, cette activité a très rarement à voir avec la question de la sûreté ferroviaire ; d’autre part, le temps qu’exige sa répression est tel que les agents pourraient être détournés trop longtemps de leur mission première, celle d’assurer la sécurité.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous avons déjà débattu de la vente à la sauvette en commission et je ne partage pas votre lecture des menaces, risques et perturbations qu’elle entraîne dans les réseaux de transport ou à leurs abords. Je demande donc le retrait de votre amendement, sinon mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
En elle-même, la vente à la sauvette ne présente pas de risques pour la sécurité physique des usagers, bien que celui de chute soit réel lorsque les objets en vente sont entreposés sur le sol. Cela étant, sa répression améliore la sécurité dans les emprises de transport : les services internes de sécurité des opérateurs évoquent régulièrement une augmentation du nombre et une aggravation de la violence des rixes qui surviennent aux abords des gares, sachant que celles-ci peuvent être liées à la vente à la sauvette, à des conflits de territoire ou au trafic et à la consommation de drogues.
Interdire l’intervention des agents de la Suge ou du GPSR aux abords immédiats des gares et des stations revient donc à laisser s’installer le problème, avec un effet immédiat sur la sûreté des usagers des transports en commun.
Notre avis est donc défavorable.
M. le président
La parole est à M. Bryan Masson.
M. Bryan Masson
Depuis le début de l’examen du texte hier soir, l’extrême gauche a défendu une série d’amendements…
Mme Élisa Martin
Qu’est-ce que ça peut vous faire ?
M. Bryan Masson
…tendant à contraindre les agents qui assurent la sécurité des Françaises et des Français dans les transports.
Mme Sarah Legrain
Ce n’est pas parce que vous êtes l’extrême droite que nous sommes l’extrême gauche !
M. Bryan Masson
Ces amendements visent à contraindre, à alourdir et à limiter la capacité des agents à assurer la sécurité de nos concitoyens. Sincèrement, il y a de quoi s’interroger : dans quel camp êtes-vous ? Voulez-vous continuer à soutenir les voyous et les délinquants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Laurent Jacobelli
Et les fichés S ?
M. Bryan Masson
Car à travers ces amendements, vous n’augmentez pas la capacité d’action des agents, mais bien celle des voyous et des délinquants ! Nous sommes là pour lutter contre l’insécurité. Dans quel camp êtes-vous ? Je crois le savoir : vous êtes les amis des voyous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Le droit d’amendement des députés est inaliénable : que ça vous plaise ou non, c’est comme ça !
M. Philippe Ballard
Et le droit à la sécurité des Français ?
Mme Élisa Martin
Du reste, je ne prétends pas, moi, savoir qui vous soutenez. Je propose donc qu’on s’en tienne là.
M. Fabien Di Filippo
Oui, arrêtez-vous là !
Mme Élisa Martin
En creux, vos avis dévoilent votre intention : viser, comme je le rappelais hier soir, ceux qui sont le plus en difficulté et ceux qui sont les plus pauvres – en somme, ceux que vous voulez faire partir. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Pierre Cordier
Elle est infernale !
M. Fabien Di Filippo
Et bourrée de préjugés !
Mme Élisa Martin
La meilleure preuve de ce que j’avance, la voici : ce n’est pas la vente à la sauvette que vous visez, mais ce qui pourrait en découler, si l’on en croit les explications tirées des fiches que vous lisez avec tant d’application. La vente et ses conséquences sont deux choses différentes, et il appartient à la police – et à personne d’autre – de révéler et d’objectiver ces dernières.
De surcroît, à se voir confier toujours plus de missions, il est à craindre que les agents chargés de la sécurité dans les gares ne puissent plus exercer leur cœur de métier !
M. Laurent Jacobelli
Personne ne vous applaudit, à croire que vous n’avez même pas convaincu vos collègues !
(L’amendement no 95 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 43 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 43, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 2, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 174
Majorité absolue 88
Pour l’adoption 126
Contre 48
(L’article 2, amendé, est adopté.)
Après l’article 2
M. le président
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 2.
Sur les amendements nos 130 identiques, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public ; sur l’amendement no 17, je suis saisi par le groupe Droite républicaine d’une autre demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Les amendements identiques nos 130 de Mme Virginie Duby-Muller, 159 de M. Corentin Le Fur et 196 de M. Ian Boucard sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Les discussions portant sur ces amendements de bon sens, mais qui doivent être précisés, ont été nombreuses. Ce n’est pas être d’extrême droite que de souhaiter élargir le périmètre d’action d’un agent intervenant dans un bus exploité par une compagnie privée : il pourrait assurer la sécurité des passagers lors de leur descente, sachant qu’aujourd’hui, il n’a pas de pouvoir hors dudit véhicule. Ce faisant, nous ouvrons la réflexion sur le pouvoir d’éviction qui peut être donné à des agents de sécurité privée.
Je demande le retrait des amendements identiques nos 130, 159 et 196, au profit de l’amendement no 17 deuxième rectification de M. Ian Boucard, que je soutiendrai. Je pensais qu’il ferait l’objet d’une discussion commune avec ces trois-ci.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je rappelle que cette possibilité est déjà offerte aux agents exerçant au profit d’une autorité organisatrice de transports (AOT), aux abords immédiats des espaces qu’ils sécurisent – les préfets les y autorisent régulièrement.
Je comprends cependant l’intérêt de permettre l’intervention sur la voie publique des agents de sécurité privée dans des situations plus nombreuses, notamment lorsque les voyageurs montent et descendent des véhicules. En revanche, les dispositions proposées trouveraient plus naturellement leur place dans le code des transports que dans le code de la sécurité intérieure.
Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur ces trois amendements identiques et soutiendrai l’amendement no 17 deuxième rectification de M. Boucard.
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard.
M. Ian Boucard
Je vais retirer mon amendement no 196 au profit du no 17 deuxième rectification, qui vise à modifier le code des transports plutôt que celui de la sécurité intérieure. Nous en avions longuement discuté en commission des lois. Je remercie d’ailleurs le rapporteur et le ministre des transports, ainsi que son cabinet, qui ont permis que cette disposition trouve ainsi mieux sa place dans la loi.
M. le président
Retirez-vous aussi votre amendement, monsieur Le Fur ?
M. Corentin Le Fur
Oui, pour les mêmes raisons.
(Les amendements identiques nos 130, 159 et 196 sont retirés.)
M. le président
L’amendement no 17 deuxième rectification de M. Ian Boucard est défendu.
Je mets aux voix l’amendement no 17 deuxième rectification, qui a fait l’objet d’un avis favorable de la commission et du gouvernement.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 161
Nombre de suffrages exprimés 160
Majorité absolue 81
Pour l’adoption 117
Contre 43
(L’amendement no 17 deuxième rectification est adopté.)
Article 3
M. le président
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 6, 103, 176 et 225, tendant à supprimer l’article 3.
La parole est à M. Paul Christophle, pour soutenir l’amendement no 6.
M. Paul Christophle
Alors qu’il est déjà possible d’interdire l’entrée en gare, l’article 3 prévoit d’élargir ce régime d’interdiction en laissant une trop grande liberté d’interprétation aux agents compétents en matière de police du transport. Dans bien des cas, cela pourrait contrevenir à la liberté de circulation, comme nous l’avons souligné en commission. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes, pour soutenir l’amendement no 103.
M. Thomas Portes
Avec cet article, vous souhaitez conférer aux agents de la Suge et du GPSR des pouvoirs de police générale. Alors qu’ils peuvent déjà sortir quelqu’un d’un train et lui en interdire l’accès, vous voudriez qu’ils puissent désormais interdire d’accéder aux emprises des gares, leur déléguant ainsi un pouvoir élargi, alors que de telles prérogatives sont celles de la police ! (M. Sébastien Delogu applaudit.) Vous ne répondez jamais aux agents de la Suge qui réclament davantage de personnel et de présence humaine pour remplir leurs missions. Vous ne proposez pas de créer des emplois supplémentaires, mais d’élargir leurs compétences : c’est inacceptable ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Un mot pour nos collègues du Rassemblement national : que cela vous plaise ou non, le Conseil d’État vous a qualifiés d’extrême droite ! Quant à nous, dans cet hémicycle, nous sommes simplement la gauche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 176.
Mme Sandra Regol
Cet article est surtout inapplicable. Comment pourrions-nous surveiller toutes les gares et toutes les stations de TER, de RER et de métro d’Île-de-France, pour ne prendre que cet exemple ? Que des fauteurs de troubles récidivistes ne puissent pas revenir commettre des méfaits dans les gares est une bonne idée, mais à moins d’instaurer la reconnaissance faciale à l’entrée de celles-ci, la mesure sera inapplicable. Le Conseil constitutionnel, qui est encore en mesure de prendre des décisions fondées sur la Constitution, a d’ailleurs rappelé que cela était interdit.
M. le président
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 225.
Mme Elsa Faucillon
J’ajoute que cet article traduit un nouveau désengagement de l’État. Non seulement il prévoit de confier à des agents de services de sécurité internes des prérogatives qui sont normalement celles de la police nationale, mais il le fait sans leur accorder de moyens supplémentaires, que ce soit aux uns ou aux autres.
Messieurs les députés du Rassemblement national, vous pouvez continuer à bomber le torse,…
Mme Émilie Bonnivard
C’est Delogu qui fait ça, d’habitude !
Mme Elsa Faucillon
…nous ne sommes pas impressionnés ! (M. Laurent Jacobelli soupire. – Sourires sur plusieurs bancs du groupe RN.) Vous pouvez continuer de crier « sécurité ! » en ayant l’air très sûrs de vous, cela n’a aucune efficacité ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Vous soutenez des mesures qui ont été proposées dans un premier temps par un ministre macroniste ; vous souhaitez qu’elles se perpétuent, alors même que selon vous, l’insécurité continue d’augmenter : tout cela manque de cohérence ! (Mêmes mouvements.) Je veux le dire aux citoyens de ce pays : ce n’est pas parce que l’on hurle « sécurité » que la sûreté est garantie. Encore faut-il prendre des mesures dont l’efficacité a été prouvée et qui garantissent nos droits fondamentaux ! Continuez à bomber le torse, vous ne nous impressionnez pas ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR, LFI-NFP et EcoS. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Sébastien Chenu
Intervention sexiste !
Mme Elsa Faucillon
Vous vous êtes comportés de manière très viriliste lors de l’examen de ce texte, c’est extrêmement agaçant !
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Avis défavorable. Cette mesure est attendue par les agents de la Suge et du GPSR, que j’ai rencontrés dans plusieurs gares et lors des auditions. S’ils nous regardent, ils doivent estimer que ce débat est excessivement politisé, car cette mesure paraît relever du bon sens. Ces agents peuvent déjà réaliser des inspections visuelles, des fouilles ; ils peuvent déjà évincer d’un véhicule ou d’une emprise de transport une personne qui trouble l’ordre public. En revanche, ils ne peuvent pas lui interdire d’accéder à la gare, donc d’y revenir. À la gare de Lille, les équipes de la Suge m’ont expliqué qu’elles jouaient toute la journée au chat et à la souris avec certaines personnes qui passent leur temps à sortir et entrer. Elles demandent à pouvoir mettre dehors les perturbateurs.
M. Thomas Portes
Cela ne changera rien sur le terrain !
Mme Élisa Martin
Embauchez des policiers et des médiateurs !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous devons néanmoins protéger les populations les plus défavorisées, notamment les personnes sans domicile fixe. Nous l’avons d’ailleurs fait en commission, à la demande de plusieurs députés. Ceux qui viennent régulièrement provoquer les équipes de la Suge et du GPSR, en revanche, doivent pouvoir être évincés.
Mme Élisa Martin
Ce n’est pas ce qui est écrit !
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Ces amendements de suppression rappellent combien cet article est important : il apporte une plus-value opérationnelle très attendue par les agents, comme vient de le rappeler M. le rapporteur. Il permet d’interdire l’entrée en gare aux personnes qui troublent l’ordre public ou adoptent un comportement dangereux, « de nature à compromettre la sécurité des personnes ou la régularité des circulations ». Les agents sont quotidiennement confrontés à l’ivresse, aux violences, à des gens qui ont commis une infraction dans la gare, qui ont déjà été soumis à une injonction d’en sortir et qui y reviennent. Ils doivent pouvoir leur en interdire l’accès sans avoir à attendre qu’une nouvelle infraction soit commise dans l’emprise, comme c’est le cas actuellement. C’est pourquoi je vous demande de retirer ces quatre amendements. À défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président
La parole est à Mme Stéphanie Galzy.
Mme Stéphanie Galzy
Les gares et stations sont malheureusement des zones où perdure l’insécurité. Ne pas prendre en compte cette évolution, c’est favoriser les actions délictuelles. L’imagination de ceux qui s’en rendent coupables dépasse de loin la compréhension du problème de l’insécurité par certains élus de gauche, dans les transports comme dans le pays. (M. Thomas Portes s’exclame.) Ils ne sont certes pas les seuls à s’aveugler, puisqu’un ancien garde des sceaux considérait qu’il n’y avait pas d’insécurité, mais simplement un sentiment d’insécurité. L’extension des pouvoirs des agents de la Suge et du GPSR, que vous contestez, n’est que la conséquence logique d’une situation sécuritaire qui nous échappe après tant d’années de laxisme. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. Sébastien Delogu.
M. Sébastien Delogu
Qui a déjà été agent de sécurité, dans cet hémicycle ? (M. Julien Rancoule lève la main.) Pour ma part, je l’ai été. Personne ? (Plusieurs députés du groupe RN s’exclament et désignent M. Rancoule.) M. Rancoule, très bien ! (Brouhaha.) Taisez-vous deux secondes, je parle honnêtement !
Mme Émilie Bonnivard
Ce qui signifie que ce n’est pas le cas d’habitude !
M. Sébastien Delogu
Le rapporteur évoque le jeu du chat et de la souris. Il est en effet difficile, pour un agent de sécurité, de devoir toujours interpeller les mêmes personnes. Vous êtes en train de parler d’une conséquence, mais vous ne répondez pas à la cause. Nous demandons simplement, quant à nous, des investissements dans les services publics, dans la police de proximité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il faut plus de police tout court, des moyens pour les policiers, afin qu’aucune délégation de service public ne soit nécessaire. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et DR.)
Plusieurs députés du groupe RN
C’est une blague ?
M. Pierre Cordier
Un député LFI demande des moyens supplémentaires pour la police !
M. Sébastien Delogu
La France insoumise demande une police de proximité, oui ! Pas une police politique, contrairement à vous ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) J’ai exercé ce métier d’agent de sécurité…
M. Pierre Cordier
Il faisait la sécurité de Jean-Luc, non ?
M. Sébastien Delogu
Il ne faut pas dénaturer ce métier. En donnant plus de prérogatives à ces agents, vous les mettez en danger, là où des policiers seraient plus à même d’intervenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Vous devrez aussi refaire toute leur formation professionnelle, tout reprendre depuis le début, ce qui complique tout de même les choses. (Mêmes mouvements.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je ne peux qu’être d’accord avec vous s’agissant du renforcement des moyens pour nos forces de police et de gendarmerie, monsieur Delogu. Nous prenons des mesures en ce sens depuis 2017, et vous votez contre ! (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Sébastien Delogu
Ce n’est pas vrai !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Si, c’est ce que vous faites, loi de finances après loi de finances, loi de programmation après loi de programmation ! Si vous voulez plus de moyens, votez les augmentations de budget et les recrutements ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et HOR.)
Plusieurs députés du groupe RN
Voilà !
Mme Élisa Martin
Nous ne sommes pas d’accord !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
D’autre part, cet article ne concerne pas les agents de sécurité privée, mais uniquement ceux du GPSR et de la Suge, qui sont des agents de sûreté assermentés, ayant suivi plusieurs mois de formation. Ils sont habilités à porter une arme et reçoivent d’ailleurs à cet égard une formation initiale et continue plus longue que celle des forces de sécurité. Nous avons déjà abordé cette question, dès le début de la discussion des articles, avant l’article 1er, lors de l’examen des amendements portant sur le titre du premier chapitre de cette proposition de loi. J’avais rappelé à cette occasion que le texte portait bien sur la sûreté dans les transports, donc principalement le GPSR pour la RATP et la Suge pour la SNCF.
(Les amendements identiques nos 6, 103, 176 et 225 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 113.
M. Fabien Di Filippo
Je le qualifierais d’amendement de sévérité, eu égard à la gravité des faits mentionnés à l’alinéa 3 de l’article 3 : la personne qui compromet la sécurité des passagers ou des usagers des gares ou des lieux de transport, qui refuse de se soumettre à des palpations, qui entrave la circulation ou qui commet un trouble à l’ordre public doit se voir systématiquement interdire l’accès aux espaces, gare ou stations. Actuellement, le texte prévoit qu’elle « peut se voir interdire » l’accès aux lieux, non qu’elle « se voit interdire ».
Un député du groupe LFI-NFP
Et la liberté de se déplacer ?
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Cette formule – « peut se voir interdire » – ne marque aucune absence de sévérité, c’est une formule usuelle dans nos codes législatifs. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même chose : laissons les agents faire preuve de discernement, comme ils le font déjà très bien. L’interdiction doit demeurer une faculté, pas une obligation systématique. Je vous demande de retirer cet amendement, sinon j’émettrai moi aussi un avis défavorable.
(L’amendement no 113 est retiré.)
M. Fabien Di Filippo
J’ai confiance dans ce ministre !
M. le président
L’amendement no 160 de M. Corentin Le Fur est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Cet amendement rejoint la discussion qui a conduit, un peu plus tôt, à l’adoption de l’amendement no 17 deuxième rectification de M. Boucard. Il est redondant : c’est la raison pour laquelle je vous demande de le retirer. À défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis. L’excellent amendement de M. Boucard satisfait en effet celui de M. Le Fur. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 160 est retiré.)
M. le président
L’amendement no 175 de M. Pouria Amirshahi est défendu.
(L’amendement no 175, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 3 est adopté.)
Après l’article 3
M. le président
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 3.
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 197.
M. Ian Boucard
Il tend à autoriser les agents de la Suge et du GPSR à procéder à des contrôles d’identité. Selon le droit en vigueur, ces agents – qui se trouvent pourtant en première ligne – ne peuvent pas contrôler l’identité des contrevenants, mais seulement la relever.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
La question avait déjà été posée en commission. Je suis défavorable à l’amendement, qui tend à confier aux agents de sûreté des transports une prérogative – procéder à un contrôle d’identité – réservée aux forces de police. Le cas échéant, ce problème devrait être posé dans un cadre plus large, impliquant notamment la police municipale, non pas en considérant séparément les forces de sûreté et les forces de sécurité.
Par ailleurs, si elle venait à être adoptée, cette disposition s’exposerait à la censure du Conseil constitutionnel. En effet, ce dernier a déjà censuré, dans sa décision no 2011-625 du 10 mars 2011, l’ajout des agents de police judiciaire adjoints et des agents de police municipale à la liste des personnes autorisées à procéder à des contrôles d’identité. La réflexion doit donc s’inscrire dans un cadre plus général. Je vous demande de retirer l’amendement, sans quoi mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis.
(L’amendement no 197 est retiré.)
Mme Élisa Martin
C’était un petit test ! Pour voir la température de l’eau !
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 192, 198 et 210, qui font l’objet d’un sous-amendement no 266 du gouvernement.
L’amendement no 192 de M. Nicolas Ray est défendu.
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 198.
M. Ian Boucard
Il prévoit que les agents de la Suge peuvent être autorisés à porter un pistolet à impulsion électrique (PIE).
M. le président
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 210.
M. Éric Pauget
Cet amendement est identique aux précédents. Il s’agit de permettre aux agents de la Suge d’apporter une réponse graduée, adaptée et proportionnée aux situations qu’ils rencontrent.
M. le président
La parole est à M. le ministre chargé des transports, pour soutenir le sous-amendement no 266.
M. Philippe Tabarot, ministre
Il vise à préciser les conditions dans lesquelles les agents de la Suge peuvent être autorisés à porter un PIE, en renvoyant à un décret en Conseil d’État les points suivants : les systèmes de contrôle des pistolets ; les modalités de compte rendu de leur utilisation ; les modalités de mise en place d’une procédure d’évaluation et de contrôle ; les conditions de formation des agents.
Le contenu du futur décret devra s’appuyer sur la décision rendue par le Conseil d’État le 2 septembre 2009, Association Réseau d’alerte et d’intervention pour les droits de l’homme. Il permettra d’encadrer le recours au PIE par les agents de la Suge selon des modalités comparables à celles qui s’appliquent aux forces de sécurité intérieure et aux policiers municipaux.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques et sur le sous-amendement du gouvernement ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je remercie les auteurs des amendements de soulever cette question. Cela correspond à une demande forte des agents de la Suge, que j’ai rencontrés en me rendant à l’université de la sûreté de la Suge ainsi qu’auprès de plusieurs équipes sur le terrain. Les agents de la Suge – les seuls concernés par ces amendements – sont équipés d’armes létales, et souhaiteraient disposer d’une arme de moindre intensité leur permettant, comme l’a indiqué M. Pauget, de graduer leur réponse. J’émets un avis favorable sur le sous-amendement du gouvernement ainsi que sur les trois amendements.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement sur les trois amendements identiques ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, tout en les considérant d’un œil très favorable, sous réserve de l’adoption du sous-amendement du gouvernement.
M. le président
Sur les amendements identiques nos 189 et 213, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Sur l’amendement no 19, je suis saisi par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Chez moi, on dirait : « Bien joué, Callaghan ! » En effet, nos collègues du groupe DR nous présentent d’abord des amendements qui visent à étendre l’usage du PIE, avant que le gouvernement ne propose un sous-amendement qui tend à rappeler – il y est, heureusement, bien obligé – le cadre réglementaire applicable à un tel usage. Les mêmes collègues viennent d’essayer d’étendre l’autorisation de procéder à des contrôles d’identité, capacité que n’ont même pas les policiers municipaux.
De façon générale, nous sommes opposés…
M. Yoann Gillet
À la sécurité !
Mme Élisa Martin
…au fait de doter les agents de telles armes. Ce n’est pas de cette manière que l’on obtiendra l’apaisement recherché dans les gares. La police est nécessaire,…
M. Ludovic Mendes
Vous n’aimez pas la police !
Mme Élisa Martin
…dotée des prérogatives qui sont les siennes, et qui ne doivent pas être confiées – comme vous tentez de le faire article après article, opérant une sorte de glissement – à d’autres agents.
J’entends l’argument du rapporteur selon lequel les agents de la Suge disposeraient ainsi d’un armement intermédiaire, moins dangereux. C’est vrai, mais doter les agents d’un PIE participe d’une forme d’escalade.
M. Laurent Jacobelli
Pfff !
Mme Élisa Martin
En effet – peut-être avez-vous testé cette arme –, se prendre un coup de PIE n’a rien d’anodin. Les conséquences peuvent même être graves pour certaines personnes, selon leur état de santé, que l’agent utilisant l’arme ne peut pas connaître.
M. Romain Baubry
Le pistolet à eau aussi ! Et il n’est pas écolo !
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard.
M. Ian Boucard
Madame Martin, chez moi, on dirait : « Élémentaire, mon cher Watson ! » Nous en avons déjà discuté en commission et le gouvernement vient utilement préciser nos amendements, afin qu’ils puissent prospérer légalement et que les agents de la Suge soient effectivement dotés de PIE.
Mme Élisa Martin
Le gouvernement est obligé de le faire ! Sinon, les agents n’en seront pas dotés !
M. Ian Boucard
Cet échange résume assez bien les débats : une partie de l’hémicycle souhaite mieux protéger les usagers des transports en commun ; une autre partie estime que les personnes les plus dangereuses, dans les transports en commun, sont les agents chargés de la sécurité, par exemple ceux de la Suge – vous avez le droit de le penser.
Mme Élisa Martin
Non ! Mais nous voulons de vrais policiers, pas des ersatz !
M. Ian Boucard
Pour ma part, je fais confiance à ces agents et à leur sens du discernement. Je ne vois pas pourquoi ils sortiraient en permanence leur Taser…
Mme Élisa Martin
Le Taser, c’est une marque ! Le bon terme, c’est PIE !
M. Ian Boucard
…ou, si vous préférez, leur PIE. Je fais pleinement confiance aux agents de la Suge pour savoir quand l’utiliser afin d’assurer la sécurité des usagers. Si nous sommes tous favorables au développement des transports en commun, encore faut-il que les Français s’y sentent en sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs des groupes EPR et HOR.)
Mme Céline Thiébault-Martinez
Ils s’y sentent en sécurité !
(Le sous-amendement no 266 est adopté.)
(Les amendements identiques nos 192, 198 et 210, sous-amendés, sont adoptés.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements, nos 189, 213 et 19, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 189 et 213 sont identiques.
L’amendement no 189 de M. Nicolas Ray est défendu.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 213.
M. Éric Pauget
Il vise à donner aux agents de la Suge et du GPSR l’autorisation d’intervenir immédiatement pour empêcher la réitération d’un meurtre ou d’une tentative de meurtre. C’est un point très important au vu des événements que notre pays a traversés ces dernières années. L’amendement respecte le cadre de la légitime défense et le code de la sécurité intérieure.
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 19.
M. Ian Boucard
Il a été conçu dans le même esprit que l’amendement précédent. Bien que les agents de la Suge et du GPSR soient formés et armés, ils ne peuvent utiliser leurs armes qu’en cas de légitime défense stricte. Ainsi, alors qu’ils se trouvent en première ligne dans les transports publics et qu’ils sont appelés à jouer un rôle décisif en cas de crise, leurs moyens d’action demeurent limités par des règles très restrictives. Une attaque terroriste dans les transports pourrait révéler une faille grave : l’impossibilité pour ces agents d’intervenir rapidement et efficacement pour protéger la population.
La différence entre cet amendement et les deux précédents tient à la mention des lieux où les agents pourraient intervenir : « les gares, stations et véhicules de transport où ils exercent leurs missions ». Il semble bon d’apporter cette précision à la suite du débat que nous avons eu en commission des lois.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Vous soulevez le problème du périple meurtrier, que nous nous devons d’aborder dans cette proposition de loi. La complexité du sujet explique sans doute que nous ne l’ayons pas abordé en commission en novembre – même si nous l’avions fait en mai, sous la précédente législature – et qu’il n’ait pas non plus été étudié au Sénat.
Le traitement de cette question est attendu par les agents de sûreté, mais elle soulève de nombreux problèmes juridiques, qui pourraient donner lieu à un grand nombre de contentieux. En effet, il s’agit d’étendre à ces agents une prérogative jusqu’à présent réservée aux forces de police ; ils deviendraient, pour ainsi dire, une force de sûreté ou de police supplétive. En cas d’adoption de ces amendements, la même question se poserait immédiatement pour d’autres forces supplétives, notamment la police municipale et les agents pénitentiaires. Or la réflexion à ce sujet n’est pas mûre, bien que nous en ayons déjà beaucoup discuté, en mai dernier, je l’ai dit, mais aussi cet automne, notamment avec le gouvernement, avant et après les travaux de la commission. Je vous invite donc à retirer ces amendements, sans quoi mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis, bien que je trouve ces amendements particulièrement intéressants et très bien présentés.
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes.
M. Thomas Portes
Ces amendements sont symptomatiques de votre volonté, depuis plusieurs années, d’étendre l’usage des armes à feux.
M. Ian Boucard
Nous parlons d’attaques terroristes !
M. Thomas Portes
Nous savons à quoi conduit le code de la sécurité intérieure que vous appelez de vos vœux : à la mort de Nahel, d’Ibrahima Bah, d’Alhoussein Camara et de Cédric Chouviat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Nous comptons quinze morts depuis le 1er janvier 2022, tués par la police à cause de la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique. Vous voulez autoriser des agents qui travaillent dans des milieux fermés, dans des trains, à faire un plus grand usage de leur arme : vous êtes totalement irresponsables ! Nous nous opposerons avec force à cette proposition de loi dont la seule conséquence sera davantage de morts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Théo Bernhardt
N’importe quoi !
M. Julien Guibert
Alors, les socialistes, vous n’applaudissez pas ?
M. le président
La parole est à M. Michaël Taverne.
M. Michaël Taverne
Mon cher collègue, il faut relire la loi. Nous sommes en train de parler du cas spécifique du périple meurtrier, pas de la totalité de l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure. Je prendrai un seul exemple : sur les Champs-Élysées, le policier Xavier Jugelé a été tué par un terroriste à la kalachnikov, à bout portant. L’individu s’est ensuite sauvé, avec la kalachnikov à la main. Que proposez-vous de faire dans une telle situation ? De le laisser partir ?
M. Jean-François Coulomme
Vous, vous proposez de dégainer un revolver contre une kalachnikov ?
M. Michaël Taverne
Dans ce cas-là, il faut le neutraliser, parce qu’il a déjà commis un acte criminel.
Mme Élisa Martin
Le neutraliser avec un revolver ?
M. Michaël Taverne
Nous sommes favorables à ces amendements, car ils permettront précisément aux agents, en cas de périple meurtrier, de riposter pour éviter la réitération d’un meurtre. Une telle situation n’a rien à voir avec le cas de Nahel ! Vous êtes complètement à côté de la plaque. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Monsieur Portes, je ne peux pas vous laisser caricaturer ce débat qui, vous le savez vous-même, anime aussi les agents de la Suge et du GPSR. Ces amendements s’inscrivent dans un cadre très précis : celui d’un périple meurtrier ou d’un attentat terroriste. Nous parlons d’individus qui viennent de commettre un ou plusieurs meurtres ou de perpétrer un massacre.
Les agents du GPSR ou de la Suge sont bien souvent les premières forces sur place…
M. Thomas Portes
Ils peuvent déjà intervenir !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Il y a la légitime défense, certes,…
M. Thomas Portes
Bien sûr !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
…mais il peut leur arriver d’être face à un individu qui se balade d’emprise ferroviaire en emprise ferroviaire, autrement dit d’un espace de la RATP à un espace de la SNCF, en tirant sur les gens et en commettant des meurtres en série. Or, face à un tel individu, ils ne peuvent pas agir. Les agents de la Suge et du GPSR disent eux-mêmes qu’il faut mener une réflexion à ce sujet, tout en ayant conscience que cela soulève des questions juridiques, notamment par rapport aux autres forces supplétives.
Je vous en prie, ne caricaturez pas ce débat !
M. Thomas Portes
Des études ont été réalisées à ce sujet !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je répète qu’il concerne précisément le risque terroriste, auquel nos agents peuvent être confrontés, et qui crée certaines tensions au quotidien.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 189 et 213.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 157
Nombre de suffrages exprimés 153
Majorité absolue 77
Pour l’adoption 86
Contre 67
(Les amendements identiques nos 189 et 213 sont adoptés ; en conséquence, l’amendement no 19 tombe.)
(M. Éric Pauget applaudit.)
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)
M. le président
La séance est reprise.
Article 5
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 104 tendant à supprimer l’article 5.
Mme Élisa Martin
Peut-être serait-il plus simple d’indiquer où les agents n’ont pas le droit d’intervenir. Entre les gares, les abords, l’espace public d’une manière générale et, maintenant, les transports dits de substitution et tous les lieux qui en dépendent, ils finissent par se voir attribuer une capacité d’intervention qui nous semble tout à fait disproportionnée. Je répète pour la énième fois que, selon nous, il faut privilégier le recrutement de policiers et de gendarmes.
On nous a interpellés plus tôt au motif que nous n’avons pas voté certains textes comme la Lopmi, la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur. Nous l’assumons car, ce faisant, comme dans le cadre du présent examen, nous remettons en question le cadre d’emploi de la police que vous proposez. Vous concevez les policiers comme des forces de l’ordre tandis qu’ils sont, d’après nous, des gardiens de la paix. De manière générale, nous entendons privilégier la police de proximité. Quant à la police d’intervention, appelée à traiter des situations particulières, elle doit être bien formée et bien équipée. Enfin, il faut bien évidemment davantage d’enquêteurs, car c’est de ces derniers que la police nationale et la gendarmerie manquent tout particulièrement. C’est à cette conception de la police que nous pourrions adhérer.
Nous ne souhaitons pas que la capacité d’intervention des agents soit élargie comme le prévoit l’article, d’où cet amendement de suppression.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Vous ne souhaitez pas que les compétences des agents de la Suge soient étendues aux transports routiers de substitution. Contrairement à ce que vous affirmez, cette extension se justifie parfaitement. Une substitution peut par exemple intervenir lorsqu’un train ne fonctionne plus et qu’un bus est mis à la disposition des voyageurs pour pallier cette défaillance. Il faut bien que les agents de la Suge y assurent la sécurité des passagers !
Je comprends bien votre logique, qui tend à mettre fin, en tous lieux, à toute politique de sûreté,…
Mme Élisa Martin
Mais non, je viens de le dire : nous voulons de vrais policiers !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
…en trouvant des excuses pour ne pas voter les lois examinées dès lors qu’elles prévoient de renforcer les moyens et de mener les recrutements nécessaires pour nous adapter à la réalité de l’insécurité qui affecte nos concitoyennes et nos concitoyens dans leur vie quotidienne et à laquelle ils sont sensibles.
J’émets un avis défavorable sur ce nouvel amendement de suppression d’article.
M. le président
La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, pour donner l’avis du gouvernement.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur
Avis défavorable. La mesure prévue est de nature à améliorer le continuum de sûreté et à l’étendre aux gares routières et aux transports routiers de substitution. Elle est cohérente avec la logique d’ensemble du texte, qui vise à assurer la sécurité de l’ensemble des voyageurs dans toutes les situations.
M. le président
La parole est à M. Michaël Taverne.
M. Michaël Taverne
Je me demande dans quel monde vit l’extrême gauche.
M. Christophe Bentz
C’est clair, on se le demande !
M. Michaël Taverne
Dans ce monde, les policiers sont méchants, ce sont des assassins !
Mme Élisa Martin
Je viens de dire le contraire !
M. Michaël Taverne
Vous est-il déjà arrivé de penser aux gens qui aiment nos forces de l’ordre ? Je rappelle que les Français ont une meilleure opinion de celles-ci que de La France insoumise ! (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
La loi prévoit déjà que toute personne peut intervenir dans l’espace public pour interrompre la commission d’un crime ou d’un délit. Or vous demandez que les agents de la Suge soient absents des transports de substitution. C’est parfaitement loufoque !
Revenez sur Terre, consultez les policiers et la Suge : ils vous apprendront ce qu’est la vraie vie ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
(L’amendement no 104 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 23.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Il s’agit d’un amendement quasi rédactionnel, qui devrait satisfaire notre collègue Élisa Martin puisqu’il précise que l’intervention des agents de la Suge est strictement limitée aux transports de substitution, à l’exclusion par exemple des FlixBus dès lors qu’ils ne se substituent pas à un train.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Avis favorable. Le rapporteur a parfaitement expliqué ce qu’il en était.
(L’amendement no 23 n’est pas adopté.)
(L’article 5 est adopté.)
Article 6
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes, pour soutenir l’amendement no 106.
M. Thomas Portes
Vous voulez autoriser la police municipale à intervenir dans les espaces de transport et les trains en circulation, donc permettre à des agents qui n’y sont pas formés (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe RN) d’intervenir dans un milieu fermé différent de ceux qu’ils connaissent, en présence de dizaines de personnes. On sait du reste très bien ce que vous entendez par formation des policiers municipaux : ce sont des sessions d’une demi-journée confiées à des responsables de la Suge ou de la SNCF qui ne sont pas souvent sur le terrain.
En réalité, vous allez mettre en péril l’ordre public. La police a autre chose à faire qu’intervenir dans les emprises ferroviaires, les trains, les métros ou les bus. Ce n’est pas son rôle ! Vous allez déléguer une mission de maintien de l’ordre de telle sorte que tout le monde puisse intervenir tout le temps et partout, donc n’importe comment !
Un député du groupe RN
Vous êtes formé, vous ?
M. le président
Sur l’article 6, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Défavorable.
M. le président
La parole est à M. Bryan Masson.
M. Bryan Masson
Chassez le naturel, il revient au galop ! Vous prétendiez tout à l’heure défendre les policiers nationaux et municipaux mais, par cet amendement, vous les pointez du doigt, ainsi que les élus locaux qui demandent l’application de cette mesure !
Mme Élisa Martin
C’est vous que nous pointons du doigt !
M. Bryan Masson
Les policiers municipaux sont très bien formés !
M. Hadrien Clouet
Ce n’est pas ce qu’ils disent eux-mêmes !
M. Bryan Masson
Dans la plupart des cas, ce sont des primo-intervenants qui savent ce qu’ils font. Faites-leur confiance : ils sont capables de mener à bien les tâches qu’on veut leur confier.
Vous préférez vous ridiculiser : fort bien ! Pour notre part, nous soutiendrons les policiers municipaux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Hadrien Clouet
Ils sont demandeurs de formations ! Arrêtez !
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Les polices municipales sont placées sous l’autorité des maires. Tout ce qui doit faire évoluer leur cadre d’emploi relève de cette autorité. Il existe d’ores et déjà des conventions liant le maire, la police municipale et les AOT. Il est donc possible de faire intervenir la police municipale dans les transports si le maire l’estime pertinent.
Je considère que, s’agissant des questions touchant à la police municipale, quoi que vous en disiez, c’est au maire et seulement à lui de décider. Dans l’ensemble, les maires ont tendance – ils ont bien raison – à vouloir faire usage de leur police municipale comme d’une police de proximité, c’est-à-dire d’effectifs dédiés à tel ou tel secteur, connus et reconnus des habitants et des commerçants.
Vous proposez tout autre chose. Cela fait partie des raisons pour lesquelles nous nous opposons à vous. Nous refusons tout glissement de responsabilité entre la police nationale, les agents de sécurité privés ou parapublics et les polices municipales. S’agissant de ces dernières, il faut respecter les maires, qui fixent leur cadre d’emploi et leurs missions prioritaires.
(L’amendement no 106 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 6.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 139
Nombre de suffrages exprimés 137
Majorité absolue 69
Pour l’adoption 105
Contre 32
(L’article 6 est adopté.)
Après l’article 6
M. le président
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 222 portant article additionnel après l’article 6.
M. François-Noël Buffet, ministre
Il vise à accorder aux agents de police judiciaire adjoints, parmi lesquels se trouvent les gendarmes adjoints volontaires, les policiers adjoints et les réservistes, la possibilité de constater certaines infractions en matière de transport. Ils participent déjà activement à la sécurisation des différents moyens de transport collectifs et pourraient en faire davantage, au bénéfice de tous. D’ailleurs, de récentes évolutions législatives ont déjà étendu cette compétence aux policiers municipaux et aux adjoints de la RATP et de la SNCF.
Cet amendement autoriserait en outre l’ensemble des agents de police judiciaire adjoints, non seulement ceux que je viens de citer mais aussi les policiers municipaux et les gardes champêtres, à procéder, dans les transports publics, à l’inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille.
Cet amendement s’inscrit donc dans la droite ligne de l’ensemble du texte, puisqu’il a pour objet de renforcer le continuum de sécurité dans l’intérêt de chaque usager.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Cet amendement comble un vide juridique. Avis favorable.
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard.
M. Ian Boucard
C’est un très bon amendement, qui complète les travaux que notre Assemblée a menés, lors de l’examen de la proposition de loi relative à la sécurité globale et de la Lopmi, afin de conférer davantage de prérogatives aux policiers et gendarmes volontaires ou réservistes, qui accomplissent un important travail de sécurisation, notamment durant l’été.
On l’oublie mais, si les Jeux olympiques et paralympiques se sont aussi bien déroulés dans nos territoires ruraux alors que les policiers et les gendarmes étaient largement mobilisés à Paris, c’est grâce à ce vivier de volontaires et de réservistes qui ont accompli leur mission dans ces territoires.
Mme Émilie Bonnivard
Tout à fait !
M. Ian Boucard
Il est bon de souligner leur qualité en leur accordant de telles prérogatives.
(L’amendement no 222 est adopté.)
Article 7
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 7, 108 et 226, tendant à supprimer l’article 7.
La parole est à Mme Marie-José Allemand, pour soutenir l’amendement no 7.
Mme Marie-José Allemand
L’article 7 prévoit la possibilité pour les agents d’Île-de-France Mobilités (IDFM) de visionner les images de vidéosurveillance. Là encore, compte tenu des risques que ferait peser cette possibilité sur le respect des droits et des libertés garanties par la Constitution, une telle mesure n’apparaît pas souhaitable. (MM. Arthur Delaporte et Sébastien Saint-Pasteur applaudissent.)
M. le président
Sur l’amendement no 70, sur l’amendement no 161 et sur l’article 7, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 108.
Mme Élisa Martin
L’encadrement par la loi du visionnage des images de vidéoprotection n’est pas prévu pour la beauté du principe, mais vise à protéger ce que certains mettent en cause, amendement après amendement, à savoir la vie privée, la liberté d’aller et venir, la liberté d’opinion – par exemple, la fréquentation du local d’un syndicat, d’un parti politique ou encore d’une église. C’est bien la raison pour laquelle le droit de les visionner est extrêmement encadré. J’ai en face de moi de grands spécialistes des sujets que nous évoquons,…
Un député du groupe RN
C’est vrai ! Merci de le rappeler !
Mme Élisa Martin
…et ils savent que, dans un centre de vidéosurveillance municipal, même le maire doit signer un registre en indiquant la durée de sa présence. Cela laisse à penser que la question est loin d’être neutre. Nous ne sommes pas favorables à la multiplication des possibilités pour tel ou tel de visionner ces images.
M. le président
La parole est à M. Édouard Bénard, pour soutenir l’amendement no 226.
M. Édouard Bénard
Nous souhaitons, nous aussi, la suppression de l’article 7, qui autoriserait les agents d’IDFM chargés de la sûreté d’accéder au centre de coordination opérationnelle de sécurité (CCOS).
Rappelons que l’accès au CCOS donne la capacité de visionner une quantité massive d’images de vidéoprotection. C’est la raison pour laquelle cet accès doit être sécurisé, comme cela vient d’être rappelé : il doit nécessairement être assorti de certaines garanties, afin d’assurer une conciliation entre l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et le droit au respect de la vie privée. Je vous renvoie sur ce point à la décision du Conseil constitutionnel du 20 mai 2021 relative à la loi « sécurité globale ». Premièrement, la mission principale des agents d’IDFM n’est pas la gestion de la sûreté. Deuxièmement, les finalités précises et limitées de l’accès de ces agents au CCOS ne sont pas définies dans l’article. Aussi l’ouverture de l’accès au CCOS aux agents d’IDFM apparaît-elle disproportionnée et injustifiée.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous abordons l’article relatif au CCOS de la région Île-de-France, créé en juillet 2022 dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques. J’espère qu’au terme de la discussion, nous garderons cet article mais aussi son équilibre bâti en commission, notamment à la suite des échanges que nous avons eus, lors des auditions et des déplacements de terrain, avec l’ensemble des acteurs qui travaillent dans ce centre et participent à son pilotage. Le CCOS parvient aujourd’hui à coordonner l’ensemble de la politique de sécurité en matière de transports publics sur la région Île-de-France.
À ce stade sont présents au CCOS la sous-direction régionale de la police des transports, la gendarmerie nationale, les correspondants des services internes de sécurité de la Suge et du GPSR, ainsi qu’un représentant d’Optile – l’organisation professionnelle des transports d’Île-de-France, association qui regroupe les entreprises privées de transport de voyageurs –, mais non, paradoxalement, la région Île-de-France, alors que celle-ci a contribué à l’installation du CCOS.
Au regard de l’ouverture à la concurrence et à la demande même du préfet de police de Paris, il est apparu de bon sens, pour améliorer le fonctionnement de notre politique de sécurité, de permettre à la région Île-de-France, par l’intermédiaire d’IDFM, de disposer d’un siège au CCOS, étant entendu que la politique de sécurité restera pilotée par l’État. Je pense que nous devons pour le moment maintenir cet équilibre avant peut-être, dans les années qui viennent, de mener une réflexion plus large sur le rôle que pourraient jouer d’autres acteurs, notamment les autorités régionales.
L’avis est donc défavorable sur ces amendements de suppression qui, s’ils venaient à être adoptés, s’avéreraient à mon sens une erreur au regard de la bonne coordination de nos politiques de sécurité. J’en veux pour preuve le bilan positif de l’expérimentation menée en la matière lors des Jeux olympiques et paralympiques, le préfet de police de Paris ayant accueilli au CCOS un représentant d’IDFM afin d’assurer la meilleure sécurité possible dans nos transports durant cette période.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
L’avis est défavorable. Les dispositions de l’article 7 visent à autoriser les agents d’IDFM exerçant des missions relatives à la sûreté des transports à visionner, au sein des salles de commandes de l’État, les images des systèmes de vidéoprotection déployés dans les réseaux de transport en commun, dans les mêmes conditions que celles applicables aux agents de la SNCF et de la RATP. Il est prévu que ce visionnage ne pourra se faire que sous l’autorité et en présence de policiers nationaux ou de gendarmes, ce qui garantira la proportionnalité du dispositif. Cette mesure apportera incontestablement une réelle plus-value opérationnelle en permettant d’établir un lien avec l’ensemble des opérateurs de transport, au-delà même de la SNCF et de la RATP.
Par ailleurs, je tiens à indiquer à l’Assemblée nationale que l’amendement no 24 du rapporteur, portant article additionnel après l’article 19, prévoit le lancement d’une mission chargée d’expertiser le rôle des AOT en matière de sûreté dans un contexte d’ouverture à la concurrence, ce qui permettrait de clarifier leur champ d’intervention.
(Les amendements identiques nos 7, 108 et 226 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Julien Rancoule, pour soutenir l’amendement no 70.
M. Julien Rancoule
Il vise à permettre aux agents des sociétés de sécurité privées qui interviennent dans les gares et dans les transports d’avoir accès au CCOS. Je rappelle que, durant les Jeux olympiques, certains en ont eu le droit. Il s’agit donc simplement de pérenniser ce système. Nous parlons depuis hier soir du fameux continuum de sécurité : je pense qu’il est important d’y intégrer aussi la sécurité privée qui intervient dans les zones concernées par ce texte. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Vous soulevez une vraie question opérationnelle, que nous avions déjà abordée lors des débats en commission. Ma position n’a pas changé. Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai longuement développé il y a quelques instants – je suis passionné par ce sujet qui a trait à l’Île-de-France, ma terre d’élection. Je ne pense pas qu’il faille prévoir au sein du CCOS un siège pour chaque opérateur privé. Il s’agit plutôt d’avoir une bonne organisation, ce que favorisera l’intégration d’IDFM. En outre, je l’ai dit, l’association Optile, qui représente les opérateurs privés, dispose déjà d’un siège au sein du CCOS. À défaut d’un retrait de l’amendement, l’avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Avis défavorable. Je rappelle que, selon les dispositions de l’article L. 1241-2 du code des transports, IDFM a notamment pour mission de « concourir aux actions de prévention de la délinquance et de sécurisation des personnels et des usagers ». Au regard de cette compétence, certes limitée, s’il ne paraît pas souhaitable d’attribuer à IDFM une mission de coordination des services internes de sécurité de la SNCF et la RATP, ni d’étendre ladite mission aux agents de sécurité privée, la présence de ces derniers dans la salle d’information et de commandement relevant de l’État n’est dès lors pas non plus pertinente.
Au demeurant, les agents privés de sécurité agissent toujours pour le compte d’un donneur d’ordre – qui peut être d’ailleurs un exploitant de transports en commun, comme vient de le rappeler le rapporteur –, et ce donneur d’ordre est associé aux décisions dans les salles d’information et de commandement, donc parfaitement en mesure de transmettre les informations aux agents privés de sécurité qu’il a mandatés.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 70.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 161
Nombre de suffrages exprimés 160
Majorité absolue 81
Pour l’adoption 86
Contre 74
(L’amendement no 70 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
L’amendement no 161 de M. Corentin Le Fur est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
La présentation de l’amendement no 161 nécessiterait tout de même une explication plus approfondie qu’un « défendu », tant il changerait la nature de la coordination des politiques publiques de sécurité en Île-de-France : cette coordination, aujourd’hui sous pilotage de l’État, serait confiée à la région. Cet amendement, suggéré par la région francilienne, a sa légitimité dans le débat, mais je pense que c’est à l’État de continuer à exercer cette prérogative. Nous souhaitons autoriser la région à siéger au CCOS – par l’intermédiaire de son AOT, à savoir IDFM – mais non la laisser assurer cette coordination.
Mme Élisa Martin
Oui, c’est hallucinant !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Si cet amendement venait à être adopté, il bousculerait profondément l’équilibre de l’article 7 et ouvrirait une réflexion beaucoup plus large, pour toutes les régions, sur la compétence de coordination des politiques de sécurité dans les transports. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Même avis que le rapporteur : défavorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 161.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 160
Nombre de suffrages exprimés 158
Majorité absolue 80
Pour l’adoption 85
Contre 73
(L’amendement no 161 est adopté.)
(M. Jean-Pierre Taite applaudit.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je demande une suspension de séance de deux minutes, monsieur le président.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quatorze, est reprise à dix-neuf heures seize.)
M. le président
La séance est reprise.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Les deux amendements qui viennent d’être adoptés, tout particulièrement le dernier, modifient en profondeur l’article 7 et la coordination de la sécurité dans les transports d’Île-de-France. Par conséquent, je suis désormais défavorable à l’adoption de cet article qui, ainsi rédigé, ne renforce plus la politique de sécurité mais, au contraire, la détricote.
M. Christophe Bentz
Vous pouvez demander une seconde délibération !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Nous verrons s’il faut recourir à une seconde délibération ou revenir sur le sujet lors des travaux de la commission mixte paritaire. Nous pourrons peut-être en parler pendant la pause entre la séance de l’après-midi et celle du soir. En attendant, j’appelle à repousser l’article 7, ce qui n’était pas ma position initiale.
M. le président
Je mets aux voix l’article 7, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 162
Nombre de suffrages exprimés 156
Majorité absolue 79
Pour l’adoption 82
Contre 74
(L’article 7, amendé, est adopté.)
Mme Stella Dupont
Il n’y avait personne pour voter contre ! Cela m’exaspère !
Après l’article 7
M. le président
Nous en venons à des amendements portant article additionnel après l’article 7.
Sur le premier d’entre eux, le no 200 , je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir ledit amendement no 200.
M. Ian Boucard
Je vous rassure, monsieur le président : pour ma part, je ne suis pas exaspéré et, tout comme vous, je resterai parfaitement calme.
L’exercice des missions de sûreté dans les transports en commun franciliens est éclaté entre une multitude d’acteurs : agents de la police et de la gendarmerie, policiers municipaux, agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP, agents d’entreprises de sécurité privée agissant pour le compte d’un exploitant. En tant qu’autorité organisatrice unique des mobilités en Île-de-France, IDFM est l’entité la plus à même de coordonner les différents acteurs œuvrant au maintien de la sécurité sur le réseau de bus francilien. Lui confier cette mission est l’objet de cet excellent amendement, auquel le rapporteur, j’en suis sûr, sera très favorable. (Mme Christelle Petex et M. Jean-Pierre Taite applaudissent.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Pour en parler régulièrement avec la présidente de la région Île-de-France, je comprends la philosophie de cet amendement,…
M. Jean-Pierre Taite
Il est très bien, cet amendement !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
…mais mon avis est défavorable. En effet, derrière cette mesure et celles adoptées tout à l’heure, il y a tout un programme politique de cette région. Or y souscrire pourrait avoir des conséquences dans toutes les régions, puisque l’amendement ouvre la question de la compétence en matière de sécurité dans les transports. Celle-ci doit-elle revenir à l’État ou à chaque région, le cas échéant par l’intermédiaire de son AOT ? Comme sur l’amendement et l’article précédents, mon avis est défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Dans le même état d’esprit que l’article 7 tel qu’il vient d’être adopté, cet amendement bousculerait fondamentalement la répartition des pouvoirs entre l’État et la région Île-de-France. Mon avis est donc, comme celui du rapporteur, défavorable.
Nous préférons soutenir la demande de rapport qui est l’objet de l’amendement no 24 portant article additionnel après l’article 19. Un tel rapport permettrait d’évaluer correctement la situation et de prendre des décisions, si je puis dire, réfléchies.
M. le président
La parole est à M. Aurélien Saintoul.
M. Aurélien Saintoul
Cet amendement a été déposé par plusieurs députés du groupe Les Républicains, lesquels devraient avoir à cœur de faire respecter la Constitution ! Or, autant que je le sache, notre pays est une République une et indivisible, où les compétences régaliennes comme la sécurité ne devraient pas être distribuées au petit bonheur la chance aux collectivités territoriales ou à d’autres autorités donneuses d’ordre. La sécurité est l’affaire de la police nationale, du ministère de l’intérieur et de personne d’autre.
Vous avez une lubie : confier à Mme Pécresse la sécurité dans les transports d’Île-de-France. Or c’est un problème : on ne gouverne pas en fonction des équilibres politiques au sein des collectivités locales. La question à se poser est : qui doit détenir la compétence en matière de sécurité ? Cette autorité ne peut pas être distribuée selon les résultats de telle ou telle élection. Nous sommes donc radicalement opposés à cet amendement, qui conduirait à un émiettement, sinon à une balkanisation – si j’ose dire –, de la République. (Sourires sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 200.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 168
Nombre de suffrages exprimés 164
Majorité absolue 83
Pour l’adoption 82
Contre 82
(L’amendement no 200 n’est pas adopté.)
(M. Philippe Brun applaudit.)
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes, pour soutenir l’amendement no 124.
M. Thomas Portes
Il vise à supprimer l’article L. 2251-4-2 du code des transports, afin que les agents de la Suge et du GPSR ne puissent plus accéder en direct aux images de vidéosurveillance. D’abord, ils n’ont pas de formation d’enquêteur leur permettant d’exploiter une surveillance en temps réel. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Ensuite, ils ont mieux à faire que de rester devant un écran ; leur priorité est d’être sur le terrain.
Si vous voulez que davantage d’enquêtes soient menées à bien, recrutez dans la police judiciaire et donnez à la police nationale les moyens de faire son travail (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP), mais n’utilisez pas les agents de la Suge et du GPSR pour regarder en direct des images de vidéosurveillance ! C’est inopérant ; c’est une contrainte qu’on leur impose, alors que nous avons besoin de leur présence sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Dès lors que je soutiens l’entrée d’IDFM au CCOS, je suis évidemment favorable au maintien de la Suge et du GPSR dans ce centre. Les en retirer reviendrait à détricoter, donc à affaiblir, la coordination en matière de sécurité dans les transports.
Mme Élisa Martin
Où en est-on en matière d’interopérabilité ? On n’est même pas fichu de faire la base de la base !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je suggère donc le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Il est défavorable, pour les raisons que vient d’évoquer M. le rapporteur. La faculté d’utiliser la vidéosurveillance a été accordée à la Suge et au GPSR compte tenu de leur expertise en matière de sûreté dans les transports ; elle est nécessaire à la mise en œuvre du continuum de sécurité avec les forces de sécurité intérieure. L’article que vous souhaitez supprimer précise que les agents de la Suge et du GPSR ne peuvent visionner les images issues de la vidéosurveillance que sous l’autorité et en présence des forces de sécurité intérieure, aux seules fins de faciliter leur coordination avec ces dernières lors des interventions. Le législateur a adopté un dispositif qui nous paraît équilibré et qui a montré son intérêt, notamment à l’occasion de grands événements sportifs récents.
(L’amendement no 124 n’est pas adopté.)
Article 8
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 109 et 227, tendant à supprimer l’article 8.
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 109.
Mme Élisa Martin
L’article 8 tend à généraliser le recours à ce que l’on appelle les caméras-piétons. Article après article, il est question d’élargissement, dans tous les sens du terme ; ici, il s’agit bien d’une généralisation. Je m’autorise à faire remarquer qu’il aurait été de bon aloi, avant d’en arriver là, de proposer au Parlement une réelle évaluation de ces dispositifs, ce qui n’a pas été le cas.
Les caméras-piétons sont des outils très intrusifs ; leur utilisation pose le problème de la limite entre la sécurité et le respect des libertés. Je ne relis pas le texte que j’ai cité hier mais je pense que vous voyez bien où je veux en venir.
M. Laurent Jacobelli
On voit très bien !
Mme Élisa Martin
De manière logique, le déclenchement de la caméra dépend de l’agent qui la porte, ce qui pose le problème de la manière dont on peut objectiver le recours à cet outil, même si, dans certains cas, l’enregistrement débute un peu avant le déclenchement – par exemple dix secondes auparavant. Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes opposés à cette généralisation.
M. le président
La parole est à M. Édouard Bénard, pour soutenir l’amendement no 227.
M. Édouard Bénard
À mon tour, je déplore l’absence de rapport remis par le gouvernement au Parlement sur l’usage des caméras-piétons, dont l’expérimentation a pris fin le 1er octobre 2024.
Compte tenu des atteintes portées au droit au respect de la vie privée par les caméras-piétons, nous considérons que leur usage doit être limité à certaines catégories d’agents en fonction de leurs missions. En effet, s’il a pu être autorisé pour certaines catégories d’agents, c’est en raison du caractère nécessaire de l’atteinte ainsi portée au droit au respect de la vie privée et de sa proportionnalité au regard des buts poursuivis. Une extension pérenne de l’usage des caméras-piétons aux agents de sécurité interne ne paraît ni répondre à un besoin impérieux ni reposer sur des motifs pertinents et suffisants puisque, comme nous l’avons déjà dit, ces agents, dont le champ d’intervention est restreint, ne disposent pas de prérogatives de police judiciaire. Autant d’arguments qui plaident en faveur de la suppression de l’article 8.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je suis fortement défavorable à ces amendements de suppression, qui visent à empêcher une généralisation attendue sur le terrain par les agents de contrôle. Le bilan de l’expérimentation, qui a pris fin le 30 septembre 2024, est très positif. Je renvoie au rapport remis par le gouvernement au Parlement, qui est disponible à la bibliothèque de l’Assemblée nationale. J’en cite quelques chiffres. Pour les quatre opérateurs qui ont transmis un bilan, 80 % à 94 % des agents ayant participé à l’expérimentation jugent que le port d’une caméra-piéton joue un rôle dissuasif face aux menaces et agressions ; 85 % à 92 % considèrent que les caméras-piétons permettent d’apaiser les situations ; 79 % à 96 % se sentent plus en sécurité grâce à ce dispositif.
M. Jean-Pierre Taite
C’est vrai : c’est plébiscité par les agents !
Mme Élisa Martin
Ce n’est pas comme ça qu’on évalue un dispositif !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
On relève en outre une forte réduction de l’accidentalité. La SNCF a ainsi constaté pour les agents porteurs d’une caméra-piéton, entre l’année 2019 et la période de mai 2022 à avril 2023, une baisse de 35 % des accidents du travail avec arrêt consécutifs à une atteinte ou à un outrage. Le rétablissement du dispositif est fortement attendu.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis que celui de M. le rapporteur. Le gouvernement a bel et bien remis au Parlement un rapport, qui atteste que le dispositif est plébiscité par les agents. Je vous invite à rejeter ces amendements pour conserver les caméras-piétons. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR. – Mme Danielle Brulebois applaudit aussi.)
M. le président
La parole est à M. Ian Boucard.
M. Ian Boucard
À Lyon, depuis la mise en place des caméras-piétons, il y a 32 % d’arrêts de travail en moins. Si vous ne croyez pas le gouvernement, croyez les agents, dont 96 % demandent le maintien des caméras-piétons ! J’ai d’ailleurs entendu un grand élu de gauche, Bruno Bernard, président écologiste de la métropole de Lyon,…
Mme Élisa Martin
Je m’en fous, moi, de Lyon !
M. Ian Boucard
…s’offusquer de la fin de l’expérimentation par ces mots : « On marche sur la tête ! » Il déplorait le manque d’anticipation du ministère de l’intérieur et demandait qu’on laisse aux agents le droit de recourir aux caméras-piétons. Si vous ne nous croyez pas, croyez au moins un élu dont les idées sont plus proches des vôtres que des nôtres et qui a constaté sur le terrain tout l’intérêt du dispositif ! (Mme Christelle Petex et M. Jean-Pierre Taite applaudissent.)
M. le président
La parole est à M. Philippe Latombe.
M. Philippe Latombe
Je m’oppose à ces amendements. Avant le rapport du gouvernement, Philippe Gosselin et moi-même avions remis à ce même sujet un rapport parlementaire, dont les conclusions étaient en tout point similaires : les caméras-piétons sont plébiscitées par les agents.
Mme Élisa Martin
Je ne veux pas le savoir !
M. Philippe Latombe
Lorsque nous avons établi ce rapport, au cours de la précédente législature, nous savions que l’expérimentation allait se terminer. Les syndicats nous avaient confirmé l’intérêt des caméras : elles apaisent les tensions et permettent d’éviter des accidents. Depuis la fin de l’expérimentation, tensions et accidents du travail sont repartis à la hausse. Il est absolument nécessaire de repousser ces amendements, afin que les agents puissent de nouveau porter une caméra-piéton. (M. Jean-Pierre Taite applaudit.)
M. le président
Sur l’article 8, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Dans la mesure où il y a eu deux prises de parole contre les amendements, je prendrai une intervention pour.
La parole est à M. Aurélien Saintoul.
M. Aurélien Saintoul
Une première observation de principe : chaque fois que des agents – du service public ou non – auront à craindre des tensions avec les usagers, faudra-t-il donc installer des caméras ? Celles-ci seront-elles de plus en plus nombreuses, s’imposant dans toutes les interactions entre le public et les agents du service public ?
M. Jean-Pierre Taite
Pourquoi pas, puisque ça marche ?
M. Aurélien Saintoul
Vous êtes dans une logique de fuite en avant orwellienne. La tendance commence, aujourd’hui, par des cas qui semblent légitimes ; demain, cet espionnage sera généralisé à toutes les situations.
Par ailleurs, le rapporteur note que les agents évoquent un sentiment de sécurité ; je trouve piquant de mettre en avant ce terme alors que, si souvent, dans vos rangs, en particulier dans ceux de l’extrême droite, on nous reproche de parler du sentiment d’insécurité.
M. Jean-Pierre Taite
Mais allez donc rencontrer les agents sur le terrain !
M. Aurélien Saintoul
Si le bilan de votre expérimentation était vraiment solide, vous ne parleriez pas de sentiment ou d’impression, mais nous donneriez des chiffres précis.
M. Thibault Bazin
Dans quel monde vivent-ils ?
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je ne peux pas vous laisser tenir de tels propos ! Nous n’avons pas parlé de sentiment de sécurité.
M. Thomas Portes et M. Aurélien Saintoul
Si, c’est le terme employé !
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je vous renvoie au rapport remis par le gouvernement ; il est à la bibliothèque. Les chiffres que j’ai cités tout à l’heure montrent précisément que les caméras-piétons permettent d’apaiser les tensions, de faire baisser le nombre d’altercations, d’éviter des accidents du travail. Il s’agit non pas d’un sentiment, mais d’une réalité. La pérennisation du dispositif correspond à une véritable attente : les agents ne comprennent pas qu’on leur ait demandé, le 1er octobre, de rendre ce matériel qui était plébiscité.
M. Jean-Pierre Taite
Exactement !
(Les amendements identiques nos 109 et 227 ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à Mme Céline Thiébault-Martinez, pour soutenir l’amendement no 9.
Mme Céline Thiébault-Martinez
Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à prévoir un enregistrement systématique des interventions grâce aux caméras-piétons. Le caractère systématique des enregistrements est la condition de leur utilité non seulement pour la protection des agents mais aussi pour celle des usagers. Depuis le début de ce débat, on a beaucoup insisté sur la capacité d’action des premiers, mais on s’est peu intéressé à celle des seconds. Or il est important que chacun puisse faire valoir ses droits si jamais l’interaction en vient à se dégrader. Nous considérons d’ailleurs que le caractère systématique des enregistrements est de nature à protéger les agents tout comme les usagers des transports en commun.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Je ne peux pas vous laisser parler d’un amendement de repli, puisqu’il s’agirait d’aller bien plus loin que le texte. Cela fait davantage penser au Big Brother qu’à la protection des libertés publiques ! Le Conseil constitutionnel, dans une jurisprudence constante et claire, a censuré toutes les dispositions qui introduisaient une vidéosurveillance en continu. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Philippe Tabarot, ministre
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol.
Mme Sandra Regol
Nous discutons de l’encadrement du recours aux caméras-piétons, afin que l’on en tire le meilleur parti. À cet égard, je réagis à votre intervention précédente, monsieur Boucard : si vous aviez été attentif lors de la discussion générale, vous auriez noté que j’avais évoqué deux différences avec nos collègues de gauche, dont celle-ci. Était-il la peine de le redire ?
(L’amendement no 9 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 234.
M. Philippe Tabarot, ministre
Il vise à élargir l’usage des caméras-piétons aux agents de contrôle de nationalité étrangère qui opèrent sur des lignes transfrontalières, notamment Eurostar et Lyria, sur la partie du réseau située dans notre pays. Ces agents sont la cible d’agressions physiques et verbales en nombre croissant ; il paraît opportun de leur donner les mêmes possibilités qu’aux agents français.
M. Jean-Pierre Taite
Merci, monsieur le ministre ! C’est du bon sens !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Favorable.
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol.
Mme Sandra Regol
Le port des caméras-piétons est recevable pour des agents assermentés. Ici, on élargirait leur usage à des agents qui ne le sont pas, et dont le recrutement n’obéit pas aux mêmes critères. On sort donc complètement du cadre. La métropole de Lyon est favorable au port des caméras-piétons, mais le serait-elle s’il s’agissait d’étendre cette faculté à tous les agents, y compris à ceux qui n’ont pas les mêmes devoirs légaux ? On s’éloigne un peu, me semble-t-il, de l’objectif initial : pacifier les relations grâce à ces caméras, dans un cadre législatif normé.
M. le président
La parole est à M. Thomas Portes.
M. Thomas Portes
C’est un symbole des dérives de l’ouverture à la concurrence. Vous ne le dites pas, monsieur le ministre, mais l’exposé sommaire de l’amendement mentionne l’ouverture à la concurrence. Autrement dit, il y aura des appels d’offres, susceptibles d’être remportés par des sociétés privées étrangères qui font travailler des agents non assermentés. Vous voulez donc déployer un dispositif permettant à ceux-ci de faire usage de caméras-piétons.
La solution est dans la fin de l’ouverture à la concurrence et dans un service public ferroviaire 100 % unifié et intégré ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Tabarot, ministre
Il est question non pas des lignes ouvertes à la concurrence, mais des lignes transfrontalières, tout simplement ! (M. Jean Moulliere applaudit.)
M. Ian Boucard
Ça s’appelle le train Lyria !
(L’amendement no 234 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 44 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 44, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 8, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 165
Nombre de suffrages exprimés 161
Majorité absolue 81
Pour l’adoption 123
Contre 38
(L’article 8, amendé, est adopté.)
Article 8 bis
M. le président
La parole est à M. Aurélien Saintoul, pour soutenir l’amendement no 110 tendant à supprimer l’article 8 bis.
M. Aurélien Saintoul
Vous venez de nous dire, monsieur le ministre, que la disposition n’avait rien à voir avec l’ouverture à la concurrence. C’est pourtant bien le cas, puisque l’exposé sommaire de l’amendement no 234 évoque « un contexte d’ouverture à la concurrence ». Il serait bon que le ministre lise les amendements qu’il défend !
M. Thibault Bazin
Un peu de respect ! Vous ne manquez pas d’air !
M. Aurélien Saintoul
Par l’amendement no 110, nous souhaitons supprimer l’article 8 bis, qui vise à étendre l’usage des caméras-piétons aux conducteurs – on cherche manifestement à l’étendre à tous les agents du service public. Outre le problème de principe, la formulation de l’article trahit le parisianisme de ses rédacteurs. En l’état, la disposition ne peut même pas figurer au code des transports car on ne sait pas s’il s’agit de conducteurs d’autobus ou d’autocar – le code des transports lui-même parle de « services publics réguliers de transport routier ».
L’autre problème est de savoir quel usage on fera de ces images. D’après l’article 8 bis, les images captées pourraient être transmises en direct à des postes de commandement. Pourtant, les collectivités qui pourraient être amenées à utiliser ce genre de caméras n’ont pas les moyens de déployer de tels postes. En d’autres termes, les auteurs de l’article ont décidé de plaquer sur le reste du territoire ce qui existe en Île-de-France ou dans des communes de taille très importante ; le dispositif ne sera pas effectif. Vous êtes dans une logique non seulement de fuite en avant, mais aussi d’affichage : aucune de vos propositions ne peut réellement s’appliquer.
Enfin, si vous faites porter une caméra-piéton à tous les chauffeurs de bus et de car de France et de Navarre, il faut au préalable les former à utiliser ce matériel à bon escient.
M. Laurent Croizier
Ils devraient s’en sortir…
M. Aurélien Saintoul
En effet, le droit est contraignant en la matière : on ne peut pas filmer à l’extérieur d’un habitacle, mais seulement à l’intérieur, etc. Bien sûr, aucun financement n’est prévu à cette fin ; aucune formation n’aura lieu, pas plus que la hausse de la rémunération qui devrait accompagner cette augmentation de la qualification des chauffeurs.
Bref, l’article est nul et non avenu.
(L’amendement no 110, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 8 bis est adopté.)
Article 8 ter
(L’article 8 ter est adopté.)
Article 8 quater
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 207 tendant à supprimer l’article 8 quater.
Mme Sandra Regol
Cet amendement de mon collègue Pouria Amirshahi, vise à supprimer l’article, qui prévoit d’expérimenter à Mayotte la captation, la transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique. Cette disposition permettrait à des opérateurs privés de transport scolaire de capter et de conserver des images prises sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public, de manière continue, pendant trois ans. Une telle possibilité constituerait une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée, en contradiction avec le principe de minimisation des données, dès lors que les chauffeurs de transport scolaire mahorais disposeront déjà de la possibilité de recourir aux caméras individuelles – possibilité ouverte par l’article 8 bis que nous venons d’adopter.
Rappels au règlement
M. le président
La parole est à M. Aurélien Saintoul, pour un rappel au règlement.
M. Aurélien Saintoul
Je me fonde sur l’article 100 du règlement, relatif à la bonne tenue de nos débats.
L’article 8 ter, qui a été adopté, ne figurait pas sur nos tablettes ; il n’a pas non plus été présenté par le gouvernement ni par personne d’autre. Il était donc difficile de se prononcer sur ses dispositions ! (Rumeurs.)
M. Ian Boucard
C’est normal, puisqu’il n’y avait aucun amendement déposé sur cet article !
M. Sylvain Maillard
C’est toujours le cas pour des articles qui ne font l’objet d’aucun amendement !
M. Aurélien Saintoul
D’accord, il n’y avait pas d’amendements, mais l’article n’a pas été présenté, et personne n’a donné d’avis sur le fond de ses dispositions. Cela me paraît un peu rapide !
M. Théo Bernhardt
Il faut anticiper !
M. le président
Il se trouve que, lorsqu’un article ne fait l’objet d’aucun amendement, il ne figure pas sur le dérouleur, mais uniquement sur la feuille jaune. Des avis peuvent être donnés, mais ce n’est pas obligatoire.
La parole est à M. Bryan Masson, pour un rappel au règlement.
M. Bryan Masson
J’interviens sur le fondement du même article 100. Je n’ai qu’un conseil à donner à M. Saintoul : bossez sur le texte au lieu de rester enfermé dans l’idéologie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Vous auriez vu cet article… (Le président coupe le micro de l’orateur.)
M. le président
Ce n’est pas un rappel au règlement.
La parole est à M. Aurélien Saintoul, pour un nouveau rappel au règlement.
M. Aurélien Saintoul
Notre collègue vient de me mettre en cause personnellement…
M. le président
Je l’ai interrompu !
M. Aurélien Saintoul
Il m’a recommandé de travailler ! Or nous avons tous, ici, les mêmes capacités et la même force de travail – quoique… (Exclamations.) En tout cas, ce collègue est sorti de son rôle. J’observe que ni le ministre ni le rapporteur n’ont daigné nous expliquer le bien-fondé de l’article 8 ter, alors que c’est leur fonction.
M. Ian Boucard
Il faut lire les textes avant de venir en séance !
M. Philippe Gosselin
Voyons, monsieur Saintoul, vous avez pourtant un peu de pratique parlementaire !
M. Aurélien Saintoul
On devrait travailler dans de meilleures conditions.
M. le président
J’ai fait observer à M. Masson que son intervention ne constituait pas un rappel au règlement et j’ai coupé son micro. Poursuivons la discussion.
Article 8 quater (suite)
M. le président
Sur l’article 8 quater, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 207 ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Défavorable. Le dispositif a été introduit à l’initiative de Sacha Houlié, ancien président de la commission des lois, à la suite des travaux qu’il avait menés avec Élodie Jacquier-Laforge.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
L’avis du gouvernement est défavorable. Il faut n’avoir jamais été à Mayotte pour se rendre si peu compte de ce qui s’y passe ! Cette mesure répond vraiment à un besoin de sécurisation des cars scolaires et de lutte contre le phénomène, bien réel, des caillassages. Entendez ce témoignage personnel : je l’ai vu !
À ceux qui s’inquiéteraient des conditions de mise en œuvre de ce dispositif, je rappelle qu’il est parfaitement encadré : les finalités du traitement sont précisées ; l’effacement des enregistrements sous trente jours est prévu, tout comme l’information du public au moyen d’une signalétique spécifique ; les modalités d’application seront fixées par un décret pris en Conseil d’État après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).
Mme Élisa Martin
Ça, c’est la loi !
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Vous pensez sérieusement qu’un tel dispositif permettra de protéger efficacement les enfants dans les cars scolaires et leurs conducteurs ? C’est ridicule. (MM. Hadrien Clouet et Aurélien Saintoul applaudissent. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)
M. Thibault Bazin
Elle a donné toute sa mesure !
M. le président
La parole est à M. Michaël Taverne.
M. Michaël Taverne
L’extrême gauche a vraiment du mal avec la politique de sécurité, notamment à Mayotte.
Mme Élise Leboucher
Il n’y a pas d’extrême gauche ici !
M. Michaël Taverne
Je rappelle ce qu’a dit M. le ministre : vous ne semblez pas avoir vu les images de ces bus scolaires caillassés ou attaqués par des individus armés de machettes, terrorisant les enfants assis à l’intérieur.
Vous défendez la police judiciaire et vous demandez des enquêteurs – n’est-ce pas, ma chère collègue ?
Mme Élisa Martin
Et des magistrats !
M. Michaël Taverne
Justement, les enquêteurs auront besoin d’images pour interpeller ces voyous et ces sauvages. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. François-Noël Buffet, ministre
Sans vouloir en rajouter, madame Martin, à Mayotte, j’ai vu, de mes yeux vu, des enfants accompagnés par la police sur le chemin de l’école le matin et le soir pour éviter qu’ils soient victimes d’agression. J’ai vu les bus qui les transportaient être caillassés. Sur certains ronds-points, on organise des blocages pour mieux piller les automobiles qui passent. C’est un climat de violence extrême. Je confirme qu’il est absolument nécessaire de recourir à ce moyen pour sécuriser le transport des enfants vers les écoles primaires, les collèges et les lycées.
(L’amendement no 207 n’est pas adopté.)
M. le président
Les amendements nos 45, 46 et 35 de M. le rapporteur sont rédactionnels.
(Les amendements nos 45, 46 et 35, acceptés par le gouvernement, sont successivement adoptés.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 8 quater, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 150
Nombre de suffrages exprimés 133
Majorité absolue 67
Pour l’adoption 115
Contre 18
(L’article 8 quater, amendé, est adopté.)
M. le président
Sur l’amendement no 85, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Après l’article 8 quater
M. le président
La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, pour soutenir l’amendement no 236 portant article additionnel après l’article 8 quater.
M. François-Noël Buffet, ministre
Il vise à permettre, à titre expérimental, le recours à des caméras frontales embarquées sur les tramways, afin d’analyser les accidents, mais aussi de former les personnels.
Dans son rapport annuel de 2022 relatif aux tramways, le service technique des remontées mécaniques et des transports guidés a relevé que, sur les 2 388 événements déclarés pour ce mode de transport, 1 296 étaient des collisions avec un tiers. À cet égard, l’utilisation de la vidéo embarquée constituerait un levier important pour éclairer rapidement les autorités sur l’origine de l’accident et, ainsi, accélérer les enquêtes menées après les accidents de personne. Ce serait en outre un outil précieux pour améliorer la formation des conducteurs.
Je précise que les tramways sont déjà équipés de caméras. Seule l’autorisation manque encore pour les mettre en route – si je puis dire.
M. Thibault Bazin
Très bon amendement !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Avis favorable. Je remercie le gouvernement d’avoir entendu notre demande et d’avoir déposé cet amendement, qui reprend une recommandation formulée par Vincent Caure et le groupe Ensemble pour la République à la suite d’auditions et de déplacements sur le terrain. Un amendement analogue n’avait pas pu être discuté en commission, étant irrecevable pour des raisons financières. L’objectif de l’expérimentation est d’éviter certains accidents de la route et de mieux former le personnel.
M. le président
La parole est à M. Aurélien Saintoul.
M. Aurélien Saintoul
L’amendement fait partie de ceux qu’on chasse par la porte et que le gouvernement réintroduit par la fenêtre ! Quand une telle disposition avait été présentée par le gouvernement en 2021, dans le cadre du projet de loi « sécurité globale », le Sénat l’avait repoussée, tout comme la Cnil dans son avis.
L’usage des caméras frontales embarquées est aujourd’hui réservé au transport ferroviaire. Limité par définition aux voies ferrées, celui-ci ne risque pas de donner lieu à une forme d’espionnage de l’ensemble de la population.
Embarquée sur un tramway, une caméra filmerait l’intégralité de l’espace public, qui n’a pas vocation à l’être ainsi en permanence, pas plus que les allées et venues des uns et des autres. Les personnes et les véhicules qui croisent les tramways n’ont pas vocation à être connus par de quelconques services.
M. Laurent Jacobelli
On dirait qu’il a quelque chose à se reprocher !
M. Thibault Bazin
On pourrait voir les gens dealer sur les quais !
M. Aurélien Saintoul
Le tramway évoluant en milieu ouvert, c’est bien une surveillance de la voie publique que vous cherchez à mettre en œuvre. Or la Cnil a jugé totalement disproportionné un tel dispositif, dont les données seraient d’ailleurs conservées trop longtemps eu égard à l’objectif que vous lui assignez.
Il s’agit donc d’une disposition similaire à celle qui concernait les caméras embarquées par les forces de sécurité intérieure et certains services de secours, laquelle avait été censurée par le Conseil constitutionnel. Nous savons bien que le président de la République a décidé de nommer son bon ami, M. Ferrand, à la tête de cette institution. Sans doute comptez-vous sur sa complaisance pour obtenir un avis favorable. J’ose toutefois espérer que le Conseil ne se déshonorera pas quand nous le saisirons et qu’il censurera l’article issu de cet amendement.
M. Jean-Pierre Taite
Hors sujet ! Il est question de la sécurité des Français !
M. le président
La parole est à M. Philippe Latombe.
M. Philippe Latombe
Je soutiens l’amendement, tout en demandant au ministre une précision : il s’agit bien de se conformer pleinement à la décision du Conseil constitutionnel en brouillant l’image des entrées d’immeuble et d’habitation ? Cette précision ne figurant pas dans l’exposé des motifs, si vous la fournissiez au banc, cela permettrait de s’assurer que la jurisprudence du Conseil constitutionnel sera respectée.
Mme Élisa Martin
Il faut l’écrire !
M. Philippe Latombe
Par ailleurs, je ne doute pas que cette indication sera reprise dans le décret en Conseil d’État prévu par l’amendement.
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre
Je confirme ce que vous venez de dire. En fait, la question porte sur le réglage du cône de vision de la caméra : celle-ci n’a pas vocation à embrasser un plan excessivement large, de façon à respecter les conditions fixées par le Conseil constitutionnel.
Pour le reste, sur des sujets d’une telle importance, je m’étonne que l’on puisse ainsi mettre en cause le président du Conseil constitutionnel et ses membres.
Mme Alma Dufour
Non, seulement Richard Ferrand !
Mme Élisa Martin
Et le président Macron !
(L’amendement no 236 est adopté.)
Après l’article 9
M. le président
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 85 portant article additionnel après l’article 9.
Mme Sandra Regol
Il est intéressant d’intervenir après que M. Latombe a demandé des précisions sur ce qui devrait aller sans dire, mais qui va toujours mieux en le disant, pour ne pas laisser la possibilité d’agir autrement.
Dans cet esprit, l’amendement no 85 vise à rappeler que ne peut être employé aucun dispositif de reconnaissance faciale en temps réel dans les gares, les stations et les véhicules de transport public, pas plus que des systèmes d’identification biométrique ou de reconnaissance des émotions.
Certes, une décision du Conseil constitutionnel, portant sur la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, a déjà tranché en ce sens, mais, vu les amendements déposés pour prolonger des expérimentations dont le bilan n’est même pas rendu public, mieux vaut clarifier le cadre juridique national, dans lequel persiste un certain flou quant à l’illégalité du recours à de tels traitements. Je me permets d’y insister, car le Sénat essaie régulièrement d’en réintroduire la possibilité, heureusement sans succès.
Un tel amendement ne devrait pas poser de problème, puisqu’il répète ce qui va de soi et constitue déjà le cadre de la loi, en le rendant simplement plus clair et compréhensible par tous.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
C’est un amendement important : à ce stade de la discussion, il est bon que nous abordions ces questions, même si je ne vous cache pas que j’émettrai un avis défavorable.
Sur le fond, le principe général d’interdiction que vous souhaitez établir existe déjà dans notre droit. Du reste, l’interdiction pure et simple que vous proposez ne me semble pas pertinente : si nous adoptions l’amendement tel qu’il est rédigé, notre droit entrerait de facto en contradiction avec le droit européen régissant le contrôle des passeports biométriques.
Mme Sandra Regol
Et la reconnaissance faciale en temps réel ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Sur la forme, si l’objet de l’amendement est d’apporter une garantie supplémentaire en inscrivant une interdiction de principe dans la loi, cela me semble une protection bien fragile : ce qu’une loi construit, une autre peut le détruire.
Mme Sandra Regol
Alors, légiférer ne sert plus à rien ?
M. Guillaume Gouffier Valente, rapporteur
Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. François-Noël Buffet, ministre
Avis défavorable, comme le rapporteur.
M. le président
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Pour ma part, je suis très favorable à l’amendement, d’autant plus qu’un article de Disclose nous apprend combien la France s’est mobilisée, lors de la discussion du règlement européen sur l’intelligence artificielle, pour que les États puissent utiliser la reconnaissance faciale et la détection d’émotions en matière non seulement de sécurité publique, mais aussi de maintien de l’ordre – ce qui est proprement incroyable !
Il faut donc évidemment rappeler l’interdiction de ces traitements, de façon à contrer la logique du tout-sécuritaire et du tout-surveillance, si caractéristique de la Macronie. (Protestations sur divers bancs au centre et à droite de l’hémicycle.)
M. Jean-Pierre Taite
Vous devriez venir à Grenoble !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 85.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 135
Nombre de suffrages exprimés 135
Majorité absolue 68
Pour l’adoption 36
Contre 99
(L’amendement no 85 n’est pas adopté.)
M. le président
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3. Ordre du jour de la prochaine séance
M. le président
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra