Deuxième séance du jeudi 15 mai 2025
- Présidence de Mme Naïma Moutchou
- 1. Simplification du droit de l’urbanisme et du logement
- Discussion des articles (suite)
- Article 2 (suite)
- Amendement no 122
- M. Harold Huwart, rapporteur de la commission des affaires économiques
- Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement
- Amendements nos 35, 27, 68 rectifié, 114, 28, 85 et 22
- Sous-amendement no 152
- Après l’article 2
- Article 3
- Amendement no 29
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 3
- Article 3 bis
- Article 4
- Après l’article 4
- Article 2 (suite)
- Explications de vote
- Vote sur l’ensemble
- Discussion des articles (suite)
- 2. Lutte contre la mortalité infantile
- Présentation
- M. Paul-André Colombani, rapporteur de la commission des affaires sociales
- M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins
- M. Laurent Panifous
- Mme Karine Lebon
- Mme Sophie Ricourt Vaginay
- M. Serge Muller
- M. Jean-François Rousset
- Mme Murielle Lepvraud
- M. Arnaud Simion
- Mme Josiane Corneloup
- Mme Marie-Charlotte Garin
- M. Cyrille Isaac-Sibille
- Mme Lise Magnier
- Discussion des articles
- Présentation
Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Simplification du droit de l’urbanisme et du logement
Suite de la discussion d’une proposition de loi
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement (nos 1240, 1378).
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente
Ce matin, l’Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 122 à l’article 2.
Article 2 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 122.
M. Sébastien Huyghe
Pour lui donner plus d’impact, il est proposé de compléter la rédaction de l’alinéa 2 de l’article 2 afin de permettre la construction d’édifices plus hauts dans le cadre de projets qui, bien que structurants pour l’aménagement du territoire et la création d’emplois, ne seraient pas considérés comme des projets d’intérêt national majeur (PINM).
Mme la présidente
La parole est à M. Harold Huwart, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.
M. Harold Huwart, rapporteur de la commission des affaires économiques
Il est défavorable, parce que je ne comprends pas pourquoi il faudrait viser spécifiquement les entrepôts, parce qu’on ne souhaite pas modifier une mesure de nature réglementaire par une loi et parce que la formulation du texte issue des votes successifs de ce matin nous permet déjà de prendre en compte l’essentiel des préoccupations exprimées par l’auteur de l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre chargée du logement, pour donner l’avis du gouvernement.
Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement
Même avis ou demande de retrait.
(L’amendement no 122 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Grégoire, pour soutenir l’amendement no 35.
M. Emmanuel Grégoire
Il vise à prévoir la seconde vie des résidences hôtelières à vocation sociale (RHVS). L’idée est que la dérogation prévue à l’alinéa 2 soit corrélée à la signature d’un protocole qui définirait les conditions de transformation de la résidence hôtelière en logements familiaux, notamment sociaux.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Il est très favorable. L’idée globale est effectivement que les résidences hôtelières construites après la promulgation de la loi puissent, au terme d’une période de cinq ans, réintégrer le parc social, pour offrir plus de logements sociaux. L’amendement permettrait de le faire dans des conditions mieux définies.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Favorable, pour les mêmes raisons.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich.
M. Pierre Pribetich
Un peu avant la pause déjeuner, nous avons adopté l’amendement no 125 de M. Jeanbrun. Après en avoir discuté avec des collègues, je tiens à dire à nouveau qu’il nous pose un grave problème en ouvrant trop largement les possibilités de se détourner de l’esprit du texte. Nous souhaitons que Mme la ministre s’engage à revenir vers des mesures à la fois plus conformes à la sagesse de la proposition de loi et plus efficaces, afin d’éviter une sorte de détournement de l’objet initial de l’article 2.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
C’est exactement ce sur quoi nous vous avons alertés, à propos du texte dans son ensemble et de cet article en particulier. Votre proposition de loi ouvre des brèches et j’ai été assez surprise par vos votes au cours de son examen. Cela a abouti au dépôt d’un amendement qui étend encore le dispositif prévu, avec un coût très lourd pour les RHVS.
Quant à l’amendement défendu par M. Grégoire, il vise à redonner une vocation sociale à un dispositif prévu à l’origine pour le logement social. Rendez-vous compte de la situation ! À cause de l’amendement no 125, adopté à deux voix près, l’article 2 est défiguré et plus dangereux encore que dans sa version initiale. Nous invitons à voter contre l’article ainsi amendé.
Sur l’amendement no 35, que nous comprenons comme une proposition de repli, nous allons peut-être nous abstenir. En tout cas, nous sommes pour le moins interloqués.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Létard, ministre
En réponse à M. Pribetich, je rappelle qu’avant la levée de la séance de ce matin, j’ai eu l’occasion de dire combien j’étais satisfaite de l’équilibre trouvé par M. le rapporteur dans le cadre des débats en commission. Comme je l’ai déjà indiqué, la navette parlementaire va nous permettre de continuer à travailler sur ce sujet et d’aller vers un dispositif qui se rapprochera de cette position d’équilibre.
(L’amendement no 35 est adopté.)
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 27 et 68 rectifié, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public. Je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes similaires concernant les amendements nos 114 et 15.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 27 et 68 rectifié.
L’amendement no 27 de M. Stéphane Peu est défendu.
La parole est à Mme Anaïs Belouassa-Cherifi, pour soutenir l’amendement no 68 rectifié.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Le groupe de La France insoumise refuse l’extension des dérogations aux plans locaux d’urbanisme (PLU). Si les décisions d’urbanisme ne s’organisent plus au sein du PLU, document public et accessible, elles seront à la discrétion des élus locaux, sans ligne directrice et potentiellement sans cohérence territoriale. Nous sommes convaincus que l’augmentation de ces dérogations peut faciliter les mécanismes de corruption et de prise illégale d’intérêts, notamment au travers de modifications du statut de parcelles.
Une extension des dérogations à un nombre beaucoup plus important de communes, sans travail sérieux en amont, nous paraît très dangereuse, surtout si elle est couplée aux autres assouplissements prévus par le texte. Le PLU est un cadre démocratique, approuvé par le conseil municipal en délibération publique et collective. Les maires ne doivent pas avoir davantage de possibilités d’y déroger, surtout si facilement. Nous contestons le fait que simplifier rime avec déréguler, qui semble constituer le fondement de la proposition de loi. Nous proposons donc la suppression de l’alinéa 7 de l’article 2.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Sur la forme, je ne souhaite pas que la représentation nationale donne un écho à un propos laissant entendre que les maires, dans l’exercice de leurs prérogatives d’urbanisme, se mettraient dans des situations de conflit d’intérêts ou de corruption. L’argument me paraît assez déloyal.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Ça n’a rien à voir !
M. Harold Huwart, rapporteur
Sur le fond, je vous invite à regarder vraiment de quoi nous parlons. Vous souhaitez limiter les possibilités de dérogation au PLU au zonage déjà adopté et utiliser d’autres outils dans les zones où sévit la crise du logement. En réalité, le zonage dit TLV – taxe sur les logements vacants – n’intègre pas les communes où le besoin de logements est le plus grand, les territoires où la crise du logement est la plus grave. En cohérence avec l’objectif que vous affichez – faciliter la construction de logements là où il en manque le plus –, vous devriez retirer cet amendement, auquel je suis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Je réitère d’abord mon soutien aux démarches de planification qui permettent aux collectivités de traduire leur projet de territoire et de maîtriser la fabrique de la ville. Il nous faut toutefois écouter la demande de souplesse exprimée tant par les porteurs de projets que par les élus locaux, notamment lorsque des PLU anciens ne permettent pas d’accueillir des projets sans une lourde révision préalable. Or, actuellement, les dérogations ne sont possibles que dans certaines communes où la situation du logement est tendue, mais pas dans celles en tension au sens du zonage dit ABC. Environ 1 800 communes sont ainsi privées d’un dispositif qui constitue un bon levier pour accélérer les projets de construction de logements.
Une autre mesure est quant à elle strictement limitée au périmètre des zones d’activité et à la création de logements. C’est un levier pour refaire la ville sur la ville et un outil de sobriété foncière très attendu par les collectivités, notamment celles qui sont engagées dans le plan gouvernemental de transformation des zones commerciales. Ces deux élargissements raisonnables apportent des outils concrets aux maires bâtisseurs engagés pour produire du logement. C’est pourquoi je suis défavorable aux amendements visant à supprimer l’alinéa 7 de cet article.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Monsieur le rapporteur, nous ne disons pas que les maires sont corrompus, bien au contraire. Toutefois, il suffit qu’un seul se rende coupable de prise illégale d’intérêts ou de clientélisme pour jeter l’opprobre sur l’ensemble des élus, quelle que soit leur couleur politique ou leur attitude. De plus, l’accumulation de tous les assouplissements proposés voile la transparence nécessaire à la vie démocratique. Pour que chacun puisse se dire que les mêmes règles s’appliquent à toutes et à tous, qu’il n’existe pas d’exception à la discrétion d’un tel ou d’une telle, il faut que toutes les décisions soient prises collectivement et de façon transparente. Pour nous, l’accumulation de ce que vous appelez des simplifications risque de donner à certains la possibilité d’aller trop loin et de faire, en toute discrétion, des choses qui ne sont pas correctes.
Mme la présidente
La parole est à M. Joël Bruneau.
M. Joël Bruneau
À cet instant du débat, il convient d’afficher une certaine cohérence à propos des objectifs que nous poursuivons et que nous pouvons partager. Je pense que nous sommes tous d’accord tant sur le besoin de logements que sur le besoin de sobriété foncière. Si nous voulons concilier ces deux objectifs et les rendre compatibles, il nous faut accepter un minimum de la souplesse nécessaire pour reconstruire la ville sur la ville et aménager des zones déjà urbanisées. Ainsi, des quartiers dédiés à l’activité économique ou commerciale pourront trouver une nouvelle vocation et répondre à un nouvel objectif, en l’occurrence l’accueil de logements neufs. C’est le sens de l’article 2, que je vous invite à adopter.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 27 et 68 rectifié.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 26
Contre 37
(Les amendements identiques nos 27 et 68 rectifié ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 114.
M. Sébastien Huyghe
Je défendrai tous les amendements du no 111 au no 117 ainsi que l’amendement no 151, qui obéissent à la même logique. Je les avais déposés dans le cadre de l’examen du projet de loi de simplification de la vie économique ; on m’avait demandé de les retirer pour les redéposer à l’occasion d’un véhicule législatif plus adéquat. Je pense que cette proposition de loi est le bon texte pour les faire adopter.
Le code de l’urbanisme regorge de dérogations facultatives censées encourager les projets à forte valeur environnementale. Pourtant, dans les faits, ces dérogations sont rarement accordées et engendrent des contentieux. Les amendements proposent d’inverser la logique actuelle : au lieu d’imposer aux porteurs de projets de solliciter ces dérogations une à une, celles-ci s’appliqueraient de plein droit. Ce dispositif favorisera les projets alignés sur nos objectifs en matière de biodiversité et de transition bas-carbone tout en garantissant la libre administration des collectivités, qui conserveront la possibilité de refuser les dérogations par une délibération motivée.
C’est une mesure de simplification mais surtout d’efficacité, qui accélérerait le déploiement des stratégies biodiversité et bas-carbone du gouvernement.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable. Le consensus, confirmé en commission, consiste à laisser les dérogations à la discrétion des maires, qui les accordent en fonction de critères précis, propres à chaque territoire. Les transformer en des autorisations de droit revient à vider le PLU de toute autorité. Cela s’éloignerait trop de la position d’équilibre que doivent respecter les documents d’urbanisme.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis, même argument.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Nous nous opposerons à l’amendement no 114 comme aux autres amendements inspirés par la même logique.
Parler de dérogations de plein droit, c’est formuler un oxymore : une dérogation est accordée après examen du projet, sur des critères précis. Vous dites que la libre administration des collectivités par les élus serait conservée ; en réalité, si les dérogations sont applicables de plein droit, elles pourront être accordées sans que le conseil municipal ou d’autres instances démocratiques locales aient le temps de s’en rendre compte et d’adopter une position. Vous ouvrez donc une brèche dangereuse, irrespectueuse de la libre administration des collectivités et du pouvoir de décision des élus locaux.
De plus, on accorde une dérogation parce qu’on considère que le projet coche certaines cases en matière environnementale ou sociale. On ne peut pas le prévoir a priori.
Nous voterons contre l’amendement et nous incitons les collègues à en faire de même.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 114.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 78
Nombre de suffrages exprimés 78
Majorité absolue 40
Pour l’adoption 33
Contre 45
(L’amendement no 114 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Brugerolles, pour soutenir l’amendement no 28.
M. Julien Brugerolles
Nous l’avons déjà mentionné dans la discussion générale : nous ne sommes pas favorables à la possibilité d’autoriser la construction de logements dans les zones d’activité économique (ZAE), car cela relèverait d’une logique de dérégulation du droit de l’urbanisme. Les ZAE offrent aux entreprises du foncier accessible ; y autoriser la construction de logements favoriserait la spéculation, notamment dans les zones tendues : des entreprises risquent de vendre leur terrain pour se délocaliser, au détriment du tissu économique local.
En raison de leur vocation productive, ces zones sont par ailleurs concernées par des sujétions particulières – voiries renforcées, par exemple – et peuvent occasionner des nuisances inhérentes à leur activité, peu compatibles avec la fonction résidentielle. Enfin, comme je l’ai rappelé dans la discussion générale, elles n’ont pas été conçues pour offrir des services publics, ni un réseau de transports en commun. Y construire des logements remettrait en cause les logiques d’urbanisation.
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 85, par le groupe Socialistes et apparentés ; sur l’amendement no 22, par les groupes Rassemblement national et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ; sur le sous-amendement no 152, par le groupe Socialistes et apparentés ; sur l’article 2, par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable.
L’idée est de transposer le dispositif prévu dans la proposition de loi de Romain Daubié visant à faciliter la transformation des bureaux en logements, pour l’appliquer aux friches commerciales. Il s’agit non d’ouvrir les terrains des ZAE à la spéculation, mais de permettre aux maires qui souhaitent réaliser un projet de logement de gagner du temps – entre six et trente mois – sur les délais. En l’état actuel du droit, ces transformations sont possibles mais très longues, puisqu’il faut introduire le changement de destination dans le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI). La procédure accélérée ne concernera que des projets de logements sur des friches commerciales qui ont été depuis longtemps absorbées dans les enveloppes urbaines, et dont les terrains ont de toute façon vocation à être convertis – c’est cohérent avec les documents et cela correspond à la volonté des maires. Beaucoup de collègues peuvent témoigner de la pertinence et de l’intérêt de cette disposition.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Cette mesure est strictement limitée au périmètre des ZAE et à la création de logements. On n’imagine pas un instant que les collectivités souhaiteront implanter des logements au milieu de zones industrielles en activité. Les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) responsables pour délivrer ces dérogations devront motiver leurs choix. Je suis d’ailleurs ouverte à ce que la rédaction soit complétée dans le cadre de la navette parlementaire. On compte de nombreuses ZAE commerciales obsolètes, vieillissantes, avec beaucoup de terrains vacants, complètement intégrées dans la ville et bien desservies par le réseau de transports. Dans ces zones-là, il est très pertinent de faciliter le recyclage foncier au bénéfice du logement. Faisons confiance aux élus, qui savent identifier les cas dans lesquels ces dérogations seront utiles et pertinentes !
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
La possibilité de construire des logements au-dessus de commerces n’a rien de surprenant ni de nouveau. Regardez les centres-villes, vous constaterez que nos ancêtres savaient construire des commerces compatibles avec des logements, dans une logique de sobriété foncière que nous avons perdue avec l’apparition de documents de planification qui ont juxtaposé des zones dédiées chacune à une fonction, et de plus en plus éloignées les unes des autres. C’est cela qui a fait de la voiture le mode de transport privilégié. Introduire de la souplesse permettrait de retrouver cet esprit de sobriété et de bon sens.
(L’amendement no 28 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich, pour soutenir l’amendement no 85.
M. Pierre Pribetich
Il vise à permettre à l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire d’étendre la servitude de résidence principale, instaurée par la loi Echaniz-Le Meur – loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale, ou loi « anti-Airbnb » –, aux logements autorisés dans le cadre de cette dérogation.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis très favorable. Nous avons déjà évoqué ce type de dispositions dans le cadre de la loi « anti-Airbnb ». La mesure contribuerait à garantir que les logements qui verront le jour dans le cadre de cette dérogation seront bien destinés à l’habitation, au service de la population des territoires concernés.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Cazeneuve.
M. Pierre Cazeneuve
Je soutiens cet amendement, qui va dans le bon sens.
Pour rebondir sur les propos de Mickaël Cosson, on parle en effet de la dynamique commerciale de nos communes et des transformations qu’elle a imprimées au tissu urbain. J’avais déposé un amendement en commission, puis en séance, pour élargir le droit de préemption des conseils municipaux et des maires s’agissant des cellules commerciales. Ce droit est indispensable dans le cadre de la politique de dynamisation commerciale des centres-villes – voilà vingt ans que le maire de Rueil-Malmaison, Patrick Ollier, avait défendu l’amendement qui l’a instauré. Cependant, les propriétaires des cellules commerciales détournent la loi en formant des sociétés civiles immobilières (SCI), qui empêchent les élus d’exercer ce droit pour redynamiser les centres-villes en y maintenant des commerces. Mon amendement a malheureusement été retoqué au titre de l’article 40, et je peux le comprendre ; pouvez-vous, madame la ministre, travailler la question avec vos services pour que nous puissions avancer sur ce point au Sénat, dans le cadre de la navette ? Il y va de la dynamique commerciale de nos centres-villes, notamment dans le contexte des zones d’aménagement concerté (ZAC).
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Létard, ministre
Merci, monsieur Cazeneuve, d’appeler l’attention de l’hémicycle sur ce sujet, dont nous avons déjà débattu ! Comme vous, j’ai entendu parler des opérations de cession de parts de société, qui visent à faire échapper les biens immobiliers qui y sont logés au droit de préemption des collectivités. En effet, s’il y a vente non du bien au sens propre, mais uniquement de parts, le droit de préemption ne s’applique pas. C’est un contournement inquiétant, que dénoncent des élus, car le droit de préemption est un levier important pour la maîtrise foncière des collectivités, notamment au service de projets d’équipement public, de logement social ou de revitalisation des commerces de centre-ville.
L’Assemblée nationale avait été, il y a quelques années, à l’initiative d’une proposition de loi tendant à réguler ces cessions de parts de société lorsqu’elles contournaient le droit de préemption des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) ; un travail identique reste à mener pour les biens immobiliers. Je vous remercie de le souligner, mais il faut veiller à bien cibler l’encadrement législatif. En effet, on ne peut pas contrôler chaque cession d’actions, notamment lorsque cela n’emporte pas de transfert de la propriété pleine et entière des biens ou lorsque la préemption porte sur une seule partie d’un bien.
S’agissant des SCI qui détiennent des locaux commerciaux, il faudrait affiner la rédaction de l’amendement que vous aviez proposé. Je souhaite que nous le travaillions ensemble dans les semaines qui viennent, pour avancer sur ce sujet important. Je suis ouverte à la coopération pour aboutir à une disposition qui permette de régler l’affaire.
M. Dominique Potier
Bravo !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 85.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 99
Nombre de suffrages exprimés 98
Majorité absolue 50
Pour l’adoption 70
Contre 28
(L’amendement no 85 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 22, qui fait l’objet d’un sous-amendement.
M. Jean-Luc Warsmann
Nous ne construisons pas assez de logements étudiants en France. L’amendement vise à encourager leur construction en permettant aux maires de bénéficier de dérogations au plan local d’urbanisme pour signer des permis de construire. Cela permettra de faire baisser les loyers et d’assurer l’égalité des chances.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich, pour soutenir le sous-amendement no 152.
M. Pierre Pribetich
Le logement étudiant est une question importante partout en France, particulièrement dans les capitales régionales et les villes universitaires. On ne peut donc qu’être d’accord avec la mesure proposée par le président Warsmann, mais je souhaite que la possibilité de déroger aux règles d’urbanisme pour construire des logements étudiants respecte une condition : les résidences doivent être socialement accessibles et respecter un plafond de loyer fixé par décret. À défaut, nous verrons se multiplier des résidences telles que nous en connaissons déjà, avec des services inaccessibles financièrement aux étudiants aux revenus les plus faibles.
Nous proposons donc de sous-amender l’amendement pour y faire apparaître la notion de résidence socialement accessible et respectant un plafond de loyer fixé par décret, ce qui permettra de réguler le marché et d’éviter l’explosion des résidences pour les étudiants, puisqu’elles constituent un produit de placement. J’appelle toute la gauche à soutenir ce sous-amendement en faveur des résidences pour étudiants à loyers modérés. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis favorable sur l’amendement de Jean-Luc Warsmann, car nous avons effectivement besoin d’augmenter l’offre de logements étudiants, en espérant que cela permettra de faire baisser les prix des loyers.
Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur le sous-amendement. Si la préoccupation de M. Pribetich est légitime, je redoute que la mesure qu’il propose ne restreigne la portée de l’amendement. Je suis donc réservé sur le sous-amendement, que nous avons découvert il y a quelques heures.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Monsieur Warsmann, votre amendement est d’autant plus important que le premier ministre a indiqué, dans sa déclaration de politique générale, que le logement étudiant était une priorité. Ce sujet nous préoccupe tous : la France compte 2,9 millions d’étudiants et l’offre est déficitaire de 250 000 logements environ. Avec l’ensemble des acteurs, nous travaillons à relancer les constructions de logements étudiants. Il y a à peine deux jours, nous étions au Printemps des territoires avec mon collègue Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. La Banque des territoires a annoncé un engagement de 5 milliards d’euros pour accompagner la production de logements étudiants.
Votre amendement prévoit une possibilité de dérogation à la main des collectivités pour autoriser les projets de logements étudiants. Cette mesure me semble équilibrée et de nature à répondre de manière proportionnée à un besoin exceptionnel. Elle viendra compléter les outils et les solutions indispensables. Nous allons déployer une stratégie avec tous les préfets de région, les présidents d’université, les rectorats et les présidents des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous). Tout le monde est mobilisé avec les opérateurs du logement pour agir concrètement et dérouler un plan d’action. J’invite donc l’Assemblée à soutenir l’amendement.
Quant au sous-amendement, compte tenu des besoins et comme qui peut le plus peut le moins, je souhaite que tous les logements étudiants soient concernés par la disposition. Certes, des logements à loyer modéré et accessibles sont nécessaires, mais nous avons aussi besoin de logements libres, car la demande est massive – il serait dommage de la limiter. Avec les opérateurs de logements sociaux, nous voulons être au rendez-vous pour tous les étudiants, notamment ceux dont les revenus sont modestes. Je vous invite donc à retirer votre sous-amendement, monsieur Pribetich.
Mme la présidente
Monsieur Pribetich, souhaitez-vous retirer votre sous-amendement ?
M. Pierre Pribetich
Non, madame la présidente. Je le maintiens non en raison d’un ego démesuré ou par orgueil, mais parce que si vous ne créez pas les conditions de l’accès financier au logement, des marchands de sommeil se précipiteront dans les villes universitaires pour profiter de la manne d’étudiants qui n’ont pas les moyens de se loger dans les résidences aux loyers mensuels de 600 à 700 euros. Je souhaite donc qu’une réflexion soit conduite sur le sujet.
Pour avoir été professeur des universités pendant quarante ans, je sais combien la précarité des étudiants est réelle en France. Il est indispensable de construire des logements à loyer modéré et accessibles pour les étudiants. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Nous partageons bien sûr votre préoccupation concernant le logement des étudiants. Nous nous étonnons, en revanche, qu’un sous-amendement visant à préciser que ces logements doivent être à loyer modéré et accessibles rencontre un si faible soutien.
M. Antoine Léaument
Eh oui !
Mme Claire Lejeune
Nous nous étonnons aussi que l’on ne s’attaque pas à la question des logements vacants dans les grandes villes et qu’aucune politique ne soit menée contre les plateformes comme Airbnb qui freinent l’accès au logement des étudiants. Nous nous étonnons enfin qu’aucune politique ne soit conduite pour leur assurer un niveau de vie correct. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Faut-il rappeler que les étudiants ne parviennent plus non seulement à se loger, mais même à se nourrir ?
Je vois donc une certaine hypocrisie dans les positions exprimées par le gouvernement. Nous soutiendrons le sous-amendement de M. Pribetich, qui a appelé la gauche à se réunir. Pour ma part, j’appelle la gauche à voter contre l’article 2, qui contient des dispositions très graves. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Par vos votes et par l’adoption de l’amendement de M. Jeanbrun, qui crée un dispositif dangereux, vous avez permis qu’une brèche soit ouverte. Chers camarades socialistes, je vous invite à revoir votre position sur l’article. Vous allez créer une situation catastrophique pour les RHVS. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Emmanuel Grégoire
Elle raconte n’importe quoi ! (Protestations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos.
M. Frédéric-Pierre Vos
Je ressens un certain malaise dans cette discussion. L’amendement concerne des règles d’urbanisme, mais notre débat a porté jusqu’ici sur la construction de logements sociaux adaptés aux étudiants, que chacun appelle de ses vœux. Vouloir construire des logements sociaux, vouloir que les étudiants puissent se loger, c’est très bien, mais l’amendement prévoit d’autoriser une dérogation à une règle administrative, ce qui n’est pas du tout la même chose !
J’ai du mal à comprendre comment et pourquoi un règlement d’urbanisme qui permet la construction de logements en ville ne pourrait pas permettre la construction de logements pour les étudiants. Il n’existe aucune restriction en la matière.
M. Hadrien Clouet
On ne comprend rien !
M. Frédéric-Pierre Vos
Derrière cet amendement, n’y aurait-il pas un petit chat qu’on ne voit pas et dont on ne parle pas ? La mesure proposée n’est-elle pas destinée, en réalité, à remplacer les chambres d’étudiant par des logements pour des personnes qui ne sont pas des étudiants ?
M. Antoine Léaument
C’est-à-dire ? Allez au bout de votre idée !
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl
Cet amendement est intéressant parce qu’il vise à pallier une carence des pouvoirs publics en matière de logements étudiants – la ministre l’a reconnu à demi-mot dans son intervention. Depuis des décennies, nous ne construisons pas assez de logements étudiants relevant du secteur public. Chaque Crous fait ce constat. On peut donc comprendre l’amendement de M. Warsmann comme un recours au marché, d’où la nécessité d’assouplir les règles pour les maires afin de leur permettre de lancer la construction de logements à usage exclusif des étudiants.
De ce point de vue, le sous-amendement pose un véritable problème. L’amendement vise des opérations privées, qu’il paraît difficile d’entraver. Vous savez que tout montage privé s’appuie sur des objectifs…
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
De rentabilité !
M. Charles Sitzenstuhl
Exactement. L’amendement est clair : il cible les acteurs privés et non les Crous ou les logements étudiants du ressort de la puissance publique. Si le sous-amendement est adopté et si les loyers des résidences sont plafonnés, le risque est qu’il ne se passe rien du tout. Votre intention est louable, collègues socialistes, mais la question de loyers abordables pour les étudiants concerne en réalité les Crous et n’a rien à voir avec cet amendement.
M. Antoine Léaument
Vous êtes de droite !
M. Charles Sitzenstuhl
Je vois une autre difficulté à ce sous-amendement : comment, sur le plan opérationnel, fixer les plafonds des loyers ? Les villes universitaires ne sont pas seulement les capitales régionales, mais aussi des villes moyennes et des sous-préfectures, qui, par capillarité, accueillent aussi des étudiants. La mesure proposée n’est pas opérationnelle. Je ne voterai donc pas le sous-amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 152.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 128
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l’adoption 45
Contre 80
(Le sous-amendement no 152 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 22.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 132
Nombre de suffrages exprimés 130
Majorité absolue 66
Pour l’adoption 66
Contre 64
(L’amendement no 22 est adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 2, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 123
Nombre de suffrages exprimés 111
Majorité absolue 56
Pour l’adoption 66
Contre 45
(L’article 2, amendé, est adopté.)
Après l’article 2
Mme la présidente
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 2.
Je suis saisie de deux amendements, nos 6 et 10, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Lionel Causse, pour soutenir l’amendement no 6.
M. Lionel Causse
L’intensification des usages des bâtiments existants est une stratégie efficace pour répondre aux besoins de logements et d’espaces pour l’économie sociale et solidaire sans recourir à la construction de nouveaux bâtiments. Le droit de l’urbanisme doit être adapté pour permettre une utilisation plus flexible et diversifiée des espaces bâtis.
Cet amendement vise à favoriser une utilisation plus intensive et diversifiée des espaces existants en permettant l’ajout de destinations additionnelles ou accessoires. Il répond à la volonté de la proposition de loi de faciliter la transformation des bureaux en logements et d’encourager une utilisation plus flexible des espaces bâtis.
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Grégoire, pour soutenir l’amendement no 10.
M. Emmanuel Grégoire
Il est proche de celui de Lionel Causse, mais je n’en suis pas étonné ! (Sourires.)
En tant qu’ancien adjoint à l’urbanisme, je peux témoigner de la perte d’efficacité en matière d’utilisation de l’immobilier, au cours de la journée, au cours du cycle de vie du bâtiment et du point de vue de la différenciation des usages.
Tel qu’il est actuellement rédigé, le code l’urbanisme comporte, il est vrai, des rigidités très difficiles à surmonter, pénalisant aussi bien le multi-usage que les occupations intercalaires. Ces deux amendements, différents dans leur forme mais proches sur le fond, visent à introduire un peu d’agilité en faveur du multi-usage bâtimentaire. Je rappelle une donnée simple : en moyenne, un bâtiment n’est utilisé que 20 % de la journée, ce qui signifie qu’il pourrait l’être autrement pendant les 80 % du temps restant.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
J’émettrai un avis favorable. Les exposés que nous venons d’entendre étaient parfaitement clairs. Il importe que des possibilités de mixité fonctionnelle aillent au-delà de ce qui est déjà prévu : elles doivent être fixées à l’avance, la destination des bâtiments étant déterminée dès l’étape de la construction, et exigent un enrichissement des documents d’urbanisme, ce qui suppose une procédure beaucoup plus lourde. Pour tenir compte des réalités qu’il nous faut affronter dans plusieurs territoires, ces amendements, qui, en réalité, ne sont pas tout à fait identiques, me semblent bienvenus.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Pour ma part, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée. Alors que nous cherchons à promouvoir une utilisation plus diversifiée, du moins plus intensive, des espaces et à exploiter toutes les possibilités d’optimisation qui s’offrent à nous, nous ne pouvons regarder de telles propositions qu’avec bienveillance.
(L’amendement no 6 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 10 tombe.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l’amendement no 39, par le groupe Ensemble pour la République ; sur le sous-amendement no 153, par le groupe Socialistes et apparentés ; et sur l’amendement no 19, par le groupe Rassemblement national.
Ces scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marie Lebec, pour soutenir l’amendement no 39.
Mme Marie Lebec
Cet amendement reprend des dispositions élaborées dans le cadre du projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables, défendu par Guillaume Kasbarian, alors ministre du logement.
Il répond à un constat : de nombreux secteurs et quartiers de nos territoires accueillant des centres commerciaux, des activités économiques, mais également des zones pavillonnaires ont été développés de façon non organisée, sans réflexion d’ensemble, ce qui a entraîné une importante consommation d’espace, en particulier en périphérie des communes. Il n’est pas toujours facile aux élus de réaménager ces secteurs, en particulier les zones pavillonnaires, dont chaque parcelle appartient à un propriétaire différent.
L’enjeu est d’inciter les acteurs des territoires à envisager les zones pavillonnaires existantes et les ZAE comme des espaces de projets à valoriser. C’est pourquoi l’amendement tend à introduire la possibilité de fixer au sein du PLU des orientations d’aménagement et de programmation (OAP) spécifiques, visant au renouvellement urbain dans les zones pavillonnaires et dans les ZAE. Il prévoit par ailleurs un assouplissement des modifications des documents du lotissement et crée un nouvel outil d’aménagement, l’opération de transformation urbaine (OTU), ayant vocation à être mise en œuvre dans les zones pavillonnaires et commerciales couvertes par ces nouvelles OAP.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich, pour soutenir le sous-amendement no 153.
M. Pierre Pribetich
Il vise à garantir que ces opérations de lotissement, souvent profitables pour les promoteurs, tiennent compte des besoins d’évacuation des déchets, d’adduction d’eau et d’approvisionnement énergétique. Si l’on entreprend de reconstruire la ville sur elle-même – dans les zones pavillonnaires –, il convient de s’assurer que les réseaux existants pourront supporter la densification de l’espace et desservir un nombre de logements éventuellement beaucoup plus important que prévu lors du dépôt des documents relatifs à la réalisation de l’opération pavillonnaire initiale.
L’accroissement de la capacité de ces réseaux pouvant être complexe, je souhaite écarter le risque que les coûts en incombent finalement aux collectivités locales.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
J’émettrai un avis favorable sur l’amendement. Partout en France, existent des zones pavillonnaires méritant d’être requalifiées, aussi bien du point de vue de la rénovation énergétique que de la planification urbaine. Compte tenu de l’importance de ces zones, il est indispensable de se doter des moyens de les accompagner dans leur évolution. Comme toujours dans l’histoire de l’urbanisme en France, cela suppose que l’on crée des outils spécifiques pour parer à l’empilement des normes et des contraintes en rendant aux maires une partie des prérogatives dont ils disposaient à l’époque de l’aménagement et dont l’administration les a méthodiquement privés depuis lors. Le concept que vous défendez me semble donc très positif.
Sur le sous-amendement, mon avis sera également favorable. Les maires et les anciens maires qui siègent ici savent bien que la mise en logements ou en habitations d’un quartier entraîne des coûts significatifs du fait de son impact considérable sur les réseaux. Dans le cadre d’une opération globale, ces coûts doivent être intégrés et prévus dès l’origine. Faute de quoi, nous nous exposerions, habitants et élus, à des surprises fort désagréables.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Nous sommes bien sûr très favorables à l’amendement de Mme Lebec. En effet, comme l’a rappelé notre rapporteur, les zones pavillonnaires ou d’activité économique en fin de cycle de vie nécessitent que nous nous attelions à de nombreux projets de requalification. Les collectivités le savent bien, qui déploient des outils innovants pour accompagner ces mutations urbaines, prenant des initiatives comme celle de l’opérateur Grand Paris aménagement (GPA) dans la commune de Houilles – il existe bien d’autres exemples.
L’outil que vous proposez d’employer dans ces zones, l’OAP, est très pertinent pour fixer des orientations douces, souples, qui s’imposent aux porteurs de projets sans figer à l’excès l’évolution de la ville. Le lancement d’une OTU permettra de donner une cohérence à l’ambition que nourrissent les collectivités et les opérateurs, tout en assurant sa lisibilité.
Quant au sous-amendement, nous y sommes aussi favorables. Conformément à l’esprit du texte, il tend en effet à faire évoluer les lotissements et les ZAE à l’initiative des collectivités concernées, lorsque les conditions sont remplies.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
Je tenais à apporter une précision concernant la proposition de notre collègue Pierre Pribetich : dans le cadre de l’instruction d’une autorisation d’urbanisme, l’instructeur est tenu de consulter les services concessionnaires – en ce qui concerne l’énergie ; l’eau potable et les eaux usées –, de sorte que le permis de construire ou d’aménager peut déjà être refusé si le terrain à bâtir est insuffisamment desservi. Le sous-amendement me semble donc satisfait.
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 153.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 118
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 64
Contre 42
(Le sous-amendement no 153 est adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 39, tel qu’il a été sous-amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 128
Nombre de suffrages exprimés 128
Majorité absolue 65
Pour l’adoption 66
Contre 62
(L’amendement no 39, sous-amendé, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. François Jolivet, pour soutenir l’amendement no 19.
M. François Jolivet
L’amendement no 19 a d’abord pour objet d’appeler l’attention de mes collègues députés sur l’inexécution des PLH dans les PLUI. Vous savez que le document programmatique est constitué d’une série de documents à la main des élus : le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), le schéma de cohérence territoriale (Scot), le PLH et le PLUI.
Au terme de l’exécution du PLUI, avant une éventuelle révision ou modification, il apparaît que les orientations du PLH ne sont jamais respectées : par exemple, sur une parcelle qui pourrait accueillir jusqu’à 100 logements, en construisant, comme cela est possible, des bâtiments de cinq étages, on ne peut, au terme de l’instruction, construire que sur deux étages. Si l’on ajoute que la mise en œuvre de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) rendra les terrains à bâtir de plus en plus rares, on risque d’aggraver encore la crise du logement.
Il est donc nécessaire de modifier les règles d’urbanisme. Là où elles disposent qu’on peut construire des bâtiments ayant jusqu’à quatre étages, il conviendrait de préciser qu’ils doivent compter au moins quatre étages. D’autre part, les communes dont les documents d’urbanisme prévoient une densité à atteindre obligatoirement sont pénalisées par rapport à celles dont les documents n’imposent qu’une hauteur à ne pas dépasser – et, à la fin, alors que le document programmatique PLH prévoyait que telle parcelle accueille 1 000 logements en cinq ans, on s’aperçoit qu’une fois les terrains effectivement aménagés et lotis, elle n’en compte que 240.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Bien que l’argument de la densification soit parfaitement recevable et qu’il soit souhaitable que nous allions dans cette direction, respecter la décision souveraine des maires et les prérogatives qu’exercent les élus ne l’est pas moins. Les PLUI tels qu’ils ont été adoptés partout en France fixent des maximums à ne pas dépasser ; en changer la portée risquerait de bloquer nombre de projets en les rendant inacceptables aux yeux de la population, alors même que le défaut d’acceptabilité constitue, comme on sait, le principal frein. Pour toutes ces raisons, même si vos préoccupations sont parfaitement légitimes, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Je partage pleinement votre souhait de favoriser l’utilisation optimale du foncier et de mobiliser les gisements de constructibilité afin de limiter l’artificialisation des sols. Il est crucial que les orientations fixées par les PLU soient respectées et que leur potentiel soit pleinement exploité pour répondre à la crise du logement. Il nous appartient donc d’envoyer un signal clair : si un PLU est rédigé de telle sorte qu’un projet respectant telle ou telle règle puisse être mis en œuvre, ce projet doit être autorisé, sans négociations parallèles aux procédures d’instruction. C’est ce que prévoit le droit ; il me semble donc que votre amendement est satisfait par la rédaction actuelle du code de l’urbanisme, qui prévoit qu’un projet conforme aux règles, notamment en matière de densité, doit être autorisé.
Néanmoins, à ce stade de nos réflexions, ce que vous rappelez dans votre amendement me paraît essentiel, je m’en remettrai donc pour ma part à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich.
M. Pierre Pribetich
Derrière la volonté d’assouplir les conditions d’autorisation des projets pour en accélérer la réalisation, se pose la question de l’évolution à laquelle nous voulons œuvrer collectivement. Ce matin, lors de la discussion générale, j’ai indiqué qu’il fallait passer d’un urbanisme de normes – dont relève votre amendement – à un urbanisme de projets. Si nous voulons éviter toutes les procédures de blocage, une véritable révolution culturelle au terme de laquelle nos concitoyens pourraient participer aux opérations d’urbanisme est nécessaire.
Votre amendement, que je comprends naturellement, ne va pas dans ce sens. Au contraire, il tend à créer un droit, voire une obligation de construire, ce qui ne promeut pas un urbanisme discuté, raisonné, concerté, qui évite les recours en cherchant la convergence des points de vue. Or seul un tel urbanisme est à même d’assurer à nos villes une évolution conforme à la transition écologique et respectueuse de tous nos concitoyens.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
L’amendement de M. Jolivet permet de comprendre ce que vit un maire lorsqu’il fait face à un projet d’urbanisme. Quand il valide le document d’urbanisme de son territoire, il valide le règlement qui y est associé, bien entendu ; mais il y a des règles auxquelles il n’ose pas déroger, faute d’acceptabilité de la part des riverains. Dans des zones tendues ou en carence de logements sociaux, la disposition prévue par l’amendement serait un outil de confort pour le maire : plutôt que de devoir s’employer à rendre un projet acceptable, par exemple en l’amputant de dix ou de vingt logements qui permettraient pourtant de répondre aux besoins de sa population, il verrait son action encadrée par une règle claire, l’obligeant à créer de la densification à l’échelle de sa ville.
Le présent amendement va donc dans le sens de la densification, de la sobriété et de ce que l’on connaissait avant, quand la voiture n’existait pas, au temps où l’on construisait des logements au-dessus des commerces. Je me répète, mais les centres-villes et les centres-bourgs étaient tous composés ainsi, avant l’époque où l’on a cru que les sols étaient renouvelables à l’infini et qu’il était possible de les consommer, de les artificialiser autant qu’on le voulait. Je suis donc plutôt favorable à cet amendement.
M. Thierry Benoit
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. François Jolivet.
M. François Jolivet
Je rejoins notre collègue Pribetich : nous avons besoin d’un urbanisme de projets, c’est une certitude. Cependant, je voudrais dire un mot de la manière dont les règles s’appliquent aujourd’hui – vous connaissez le mécanisme qui préside aux ZAC et aux opérations d’ensemble, auxquelles doivent être associées des études d’impact. La vraie difficulté, c’est que les riverains ne se sentent pas concernés par les projets qui se développent à côté de chez eux, alors que l’ensemble des documents d’urbanisme sont mis à leur disposition.
Dans certains pays d’Europe, seuls les voisins limitrophes peuvent adresser un recours, ce qui incite les porteurs de projet à se mettre directement en contact avec eux. Certaines mairies atteignent leurs objectifs de densité parce qu’elles ont associé le porteur de projet, qu’il soit un promoteur privé ou un office HLM, et l’ensemble des riverains. Or c’est un exercice très difficile ! Dans ce domaine, une modification des règles d’urbanisme mettra beaucoup de temps à se concrétiser.
Je pense aux 2,9 millions de demandeurs de logement que compte notre pays et au ZAN, dont je peux parler aisément puisque je n’ai pas voté la loi « climat et résilience » – en disant cela, je prends peut-être le risque de perdre des voix, mais je précise que je me suis abstenu, même si j’en accepte le principe. Comment s’applique le ZAN ? Prenons une parcelle à lotir qui peut accueillir, au titre d’un document d’urbanisme qu’on appelle le PLH, cent logements ; au bout du compte, seuls quarante-trois logements seront effectivement construits. La parcelle en question sera durablement occupée par quarante-trois logements, alors qu’il aurait dû y en avoir cent ; et pendant ce temps, le nombre de demandeurs de logement ne cesse d’augmenter !
Je voulais donc simplement appeler l’attention de l’Assemblée sur ce point ; c’est un amendement d’appel et j’espère qu’il sera adopté, même si je ne sais pas de quelle manière il s’appliquera. Ayant été maire pendant vingt-deux ans, je pense que nous devons faire confiance aux élus locaux. Dans le PLH, le maire détermine précisément les besoins en logements de sa commune ; ensuite, les services de l’État, en particulier la DDT – direction départementale des territoires –, fixent le nombre de logements qui peuvent être construits sur chaque parcelle pour atteindre cet objectif, au titre du contrôle de légalité, On ne peut pas accepter qu’au bout de ce processus, seuls 45 % des logements soient effectivement construits, alors que les terrains sont lotis !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 19.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 119
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l’adoption 65
Contre 44
(L’amendement no 19 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 98.
M. Sébastien Huyghe
Depuis 2023, la réglementation applicable aux bâtiments neufs a renforcé les exigences en matière de stationnement des vélos, afin d’accompagner le développement des mobilités douces. Toutefois, le cumul des obligations locales relatives au stationnement des véhicules motorisés et des vélos entraîne une augmentation des surfaces dédiées au stationnement dans les bâtiments, au détriment des surfaces habitables ou commerciales, ce qui contribue à une hausse des coûts de construction et des prix de vente.
Pour compenser cet effet, le code de l’urbanisme prévoit la possibilité de réduire le nombre de places de stationnement pour véhicules motorisés lorsque des emplacements pour vélos sont aménagés. Cependant, cette mesure étant facultative, elle est peu appliquée. Le présent amendement vise donc à rendre cette disposition automatique, afin d’assurer une meilleure prise en considération des mobilités douces sans alourdir les contraintes pesant sur les projets immobiliers.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Nous n’avons pas examiné cet amendement en commission ; je donnerai donc mon avis personnel. L’intérêt écologique plaide en faveur de cette disposition, mais je suis attaché – cela vaut pour le présent amendement mais aussi pour tous les autres – à ce que le PLU conserve sa fonction et sa portée. Je suis favorable au remplacement de places de stationnement obligatoires pour véhicules motorisés par des emplacements dédiés aux vélos, remplacement que vous voulez rendre systématique, mais, pour ma part, je pense qu’il faudra l’encadrer strictement et je m’en remets sur ce point à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
En effet, monsieur Huyghe, votre amendement va dans le bon sens : il permettra de transformer des places de stationnement obligatoires au bénéfice du vélo. Cela me paraît être une opération gagnant-gagnant ! Cependant, il faudra préciser sa rédaction au cours de la navette parlementaire, afin de permettre aux collectivités locales d’ajuster ces règles au plus près des besoins de leur territoire en matière de mobilités douces et de transports en commun. Pour le dire clairement, l’idée nous paraît séduisante mais il faudra encore affiner la rédaction de l’amendement. J’y suis donc plutôt favorable et je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
La parole est à Mme Julie Ozenne.
Mme Julie Ozenne
Cet amendement vise à imposer automatiquement une réduction des obligations de stationnement pour véhicules motorisés – qui était facultative – dès lors que des stationnements pour vélos sont créés, dans une proportion fixée par la loi. En cela, il remet en cause le principe de libre administration des collectivités territoriales, qui doivent pouvoir adapter leur règlement d’urbanisme à la réalité locale. La logique d’incitation à la mobilité douce est bienvenue, mais elle ne peut se traduire par un dispositif rigide et uniforme, sans considération pour les contextes territoriaux – densité urbaine, accessibilité en transports en commun, topographie ou pratiques locales. Ce qui peut être pertinent dans un centre-ville dense, doté d’une bonne desserte en transports collectifs, ne l’est pas nécessairement sur des territoires périurbains ou ruraux.
Par ailleurs, cet amendement fait l’amalgame entre stationnements pour vélos et réduction du stationnement automobile, sans s’assurer que les besoins réels en véhicules motorisés seront compensés. Cela risque de produire des effets pervers : saturation du stationnement en voirie, tensions avec les riverains et renchérissement indirect du foncier par une gestion conflictuelle de la place.
Enfin, l’abrogation de l’article L. 152-6-1 du code de l’urbanisme, qui permet justement d’adapter localement les obligations de stationnement, revient à supprimer un outil de souplesse au profit d’un dispositif uniforme, ce qui est en contradiction avec les principes de la décentralisation. Plutôt que d’imposer un ratio rigide, accompagnons les collectivités dans la mise en œuvre de politiques cyclables ambitieuses, en lien avec les besoins de leurs habitants, et ne leur retirons pas les outils qui leur permettent d’élaborer une planification cohérente et adaptée.
M. Pouria Amirshahi
Très bien !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 98.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.).
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 111
Majorité absolue 56
Pour l’adoption 58
Contre 53
(L’amendement no 98 est adopté ; en conséquence, l’amendement n° 115 tombe.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 111.
M. Sébastien Huyghe
Il est défendu. Il va dans le même sens que l’amendement no 114, que j’ai présenté tout à l’heure à l’article 2, celui d’une simplification du code de l’urbanisme.
(L’amendement no 111, ayant reçu un avis défavorable de la commission et du gouvernement, est retiré.)
Mme la présidente
L’amendement no 112 de M. Sébastien Huyghe est défendu.
(L’amendement no 112, ayant reçu un avis défavorable de la commission et du gouvernement, est retiré.)
Mme la présidente
Sur les amendements nos 113, 103, 123 et 101, je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 113 de M. Sébastien Huyghe est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
M. Sébastien Huyghe
Je retire l’amendement.
M. Matthias Renault
Je le reprends !
Mme la présidente
L’amendement no 113, retiré par M. Huyghe, est repris par M. Renault.
Je le mets donc aux voix.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 113
Nombre de suffrages exprimés 113
Majorité absolue 57
Pour l’adoption 46
Contre 67
(L’amendement no 113 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 103.
M. Sébastien Huyghe
Je vais défendre celui-là, qui est un peu différent. Les bâtiments à étages à usage industriel ou logistique constituent une solution efficace à la fois pour répondre aux objectifs de sobriété foncière et pour contribuer à la lutte contre l’artificialisation des sols. Ils permettent de maximiser l’espace tout en créant plus de valeur économique et d’emploi ; dans le secteur de la logistique, ces entrepôts à étages sont particulièrement adaptés à la pénurie du foncier, surtout dans les zones urbaines ou sous contrainte. En rapprochant les entrepôts des consommateurs, ils réduisent la distance de transport et les émissions de gaz à effet de serre. Ce type de construction soutient également la lutte contre l’artificialisation des sols, permettant aux collectivités locales de respecter les objectifs environnementaux tout en développant l’activité économique.
Cependant, une contrainte importante réside dans les limites de hauteur des constructions, fixées par les plans locaux d’urbanisme généralement autour de 10 à 12 mètres. Le présent amendement vise donc à permettre à l’autorité compétente, en général le maire, d’accorder des dérogations aux limites de hauteur des PLU pour des constructions qui répondent à des critères environnementaux. Cette dérogation sera encadrée par un décret pris en Conseil d’État.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable. Lorsque j’étais vice-président de région chargé de l’économie, il a souvent été question de l’installation d’entrepôts logistiques. J’ai pu observer que les moyens mis en œuvre par les géants de la logistique leur ont souvent permis de réaliser leurs projets dans les conditions qu’ils souhaitaient – ils en ont rarement été empêchés. Lever les garanties qui restent dans notre droit pour encadrer la construction de ces entrepôts, même si cela va dans le sens d’une densification, me paraît donc superflu.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
En effet, il existe déjà de multiples dispositions qui facilitent plutôt la construction d’entrepôts ; d’ailleurs, vous vous apprêtez à en ajouter encore une couche dans le projet de loi de simplification de la vie économique ! Nous n’y sommes pas favorables, mais c’est la réalité. Une disposition qui vise à déroger encore une fois au PLU, donc à affaiblir nos outils de planification et toute la démocratie locale sur laquelle ils reposent, ne nous paraît donc absolument pas souhaitable. Les multinationales de la logistique n’ont absolument pas besoin d’une nouvelle mesure dérogatoire, qui s’ajouterait à celles déjà existantes et à celles qui risquent d’être votées dans le texte de simplification de la vie économique.
Par ailleurs, vous ajoutez que les modalités d’exercice de la dérogation seront précisées par décret. La hauteur des entrepôts serait donc déterminée par décret, sans que nous en discutions entre nous ? Votre amendement entretient le flou à ce sujet, mais ils pourraient potentiellement atteindre des hauteurs très élevées.
Pour toutes ces raisons, il faut repousser cet amendement et nous nous y opposerons.
Mme la présidente
La parole est à Mme Stella Dupont.
Mme Stella Dupont
Cela fait plusieurs heures que nous parlons de densification et de simplification. Après l’intervention de M. Jolivet, je m’interroge, comme d’autres sans doute, sur les raisons pour lesquelles les amendements que j’avais déposés pour faire évoluer le dispositif des lotissements jardins n’ont pas été retenus. Peut-être connaissez-vous mal ce mode d’organisation qui mixe habitat et activité agricole, mais il existe et on peut en trouver en zone rurale comme en zone urbaine, même si l’activité agricole est alors moins importante. J’en compte ainsi deux dans ma circonscription. Or il est devenu très difficile de transformer ces lotissements jardins en terrains constructibles car l’accord de tous les colotis est nécessaire. Ces dispositifs très anciens et sclérosés empêchent d’avancer et d’atteindre les objectifs de densification et de simplification que nous nous sommes fixés, souvent à l’unanimité, sur ces bancs. Je ne comprends donc pas pourquoi mes amendements n’ont pas été retenus. Il me semble au contraire nécessaire de travailler ensemble pour simplifier nos procédures et renforcer la densification, dans une logique de projets, comme on l’a dit, et dans le respect des documents d’urbanisme et du PLU, ainsi que le rapporteur le rappelle souvent. Il reste beaucoup de travail, l’exemple des lotissements jardins en témoigne.
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe.
M. Sébastien Huyghe
Je ne comprends pas pourquoi certains s’opposent à cet amendement. La densification est un élément clé de l’économie foncière et surtout la décision sera prise localement, par les maires.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 103.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 124
Nombre de suffrages exprimés 123
Majorité absolue 62
Pour l’adoption 67
Contre 56
(L’amendement no 103 est adopté.)
Mme la présidente
Les amendements nos 116 et 117 de M. Sébastien Huyghe sont défendus.
(Les amendements nos 116 et 117, repoussés par la commission et le gouvernement, sont successivement retirés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 123.
M. Sébastien Huyghe
L’implantation d’infrastructures pour les entreprises de transport routier de marchandises ou pour des activités logistiques stratégiques est cruciale pour la pérennité et l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement, laquelle constitue un élément clé de la compétitivité, de l’attractivité et de l’aménagement du territoire.
L’amendement prévoit que, dans les zones d’activités existantes ou à vocation logistique ou de transport, l’autorité compétente puisse accorder une bonification en bloc des règles du PLU, notamment pour la hauteur, l’emprise ou l’implantation, à condition que le projet concerné crée un nombre significatif d’emplois directs ou indirects ou représente un investissement significatif au regard de l’économie locale.
Ce mécanisme vise à lever les freins liés à des règles d’urbanisme parfois inadaptées à la dimension ou à la nature des équipements logistiques modernes, sans pour autant dessaisir les collectivités locales, qui conservent la maîtrise de la décision.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable car je suis attaché à ce que les règles d’urbanisme s’appliquent et que seuls les projets d’intérêt national puissent en être exonérés, sous contrôle de la loi. Je ne reviendrai pas sur le sujet de la légistique, dont nous avons longuement débattu, mais nous sommes allés très loin et il serait peut-être temps de dresser le bilan de ces constructions, aussi bien en termes d’emploi que d’environnement. Je sais que vous ne partagez pas mes réticences mais je maintiens l’avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Je suis défavorable à la multiplication des dérogations qui finissent par être de plus en plus étendues. De surcroît, l’objet de votre amendement est assez éloigné de la proposition de loi qui vise essentiellement à simplifier le droit pour des projets de logement. La planification est importante pour assurer l’acceptabilité de ces grands projets logistiques ou de transport. Je vous invite à le retirer.
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe.
M. Sébastien Huyghe
Je ne le retire pas car, si on construit des logements, il faut pouvoir approvisionner les populations. Nous avons besoin de ce mécanisme pour faciliter l’implantation de projets économiques stratégiques, notamment dans le domaine des activités logistiques, très pourvoyeuses d’emplois, quoi qu’en pensent nombre d’élus.
Mme la présidente
La parole est à Mme Julie Ozenne.
Mme Julie Ozenne
Sous couvert de soutenir l’économie locale et l’emploi, cet amendement vise à introduire une nouvelle dérogation au plan local d’urbanisme pour des projets logistiques et de transport routier, dès lors qu’ils affichent un certain niveau d’investissement ou de création d’emplois. En réalité, il ouvre la voie à une urbanisation dérogatoire à la carte, guidée par des logiques opportunistes et à court terme.
Plusieurs points posent problème, à commencer par cette logique systématique de contournement du PLU. Le PLU est non un obstacle mais un cadre démocratiquement construit par les élus et les habitants pour garantir le développement cohérent et équilibré du territoire. En permettant d’y déroger en bloc, notamment pour ce qui concerne la hauteur, l’emprise au sol, l’implantation, ou l’aspect extérieur, cet amendement mine la crédibilité même de la planification locale.
Ensuite, les critères sont flous et subjectifs. Que signifie un investissement significatif ou un volume d’emplois indirects ? Sur quelle base objective l’autorité compétente prendra-t-elle sa décision ? L’absence de seuils clairs expose ce dispositif à l’arbitraire, voire à des dérives.
Il s’agit encore d’un modèle économique dépassé. Encourager l’implantation logistique ou d’équipements liés au transport routier de marchandises, en simplifiant leur implantation, c’est renforcer un modèle intensif d’artificialisation des sols, de consommation d’énergie, de surcroît peu créateur d’emplois pérennes et qualifiés. Ce n’est pas compatible avec les objectifs de sobriété foncière, de ZAN, ni avec une véritable stratégie de transition écologique. Le risque de mise en concurence déloyale des territoires est réel en facilitant la captation de projets par des communes prêtes à assouplir leurs règles. On alimenterait alors une concurrence territoriale délétère par laquelle l’intérêt général passe après l’opportunité immédiate.
Enfin, ce dispositif est d’autant plus contestable qu’il vise des zones d’activité déjà existantes, c’est-à-dire des lieux où le droit commun s’applique pleinement et où il est parfaitement possible pour les collectivités d’adapter leur PLU si elles le jugent pertinent.
Il n’est donc nullement nécessaire de créer un nouvel outil de dérogation légal. Le droit de l’urbanisme ne doit pas devenir un droit d’exception permanent. La revitalisation économique des territoires mérite mieux que des dérogations ciblées pour les camions et les entrepôts.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 123.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 117
Majorité absolue 59
Pour l’adoption 64
Contre 53
(L’amendement no 123 est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement de simplification no 151 de M. Sébastien Huyghe est défendu.
(L’amendement no 151, repoussé par la commission et le gouvernement, est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 101.
M. Sébastien Huyghe
L’amendement tend à simplifier la réalisation des projets de carrières en facilitant, pour le maire qui le souhaite, la mise en compatibilité des PLU. Cette démarche s’inscrit pleinement dans l’objectif de simplification tout en garantissant la cohérence territoriale et le respect des enjeux environnementaux.
Un projet de carrière peut être compatible avec le schéma de cohérence territoriale (Scot) mais pour que ce projet soit intégré dans le PLU d’une commune, l’élu local doit se soumettre à la procédure longue et contraignante de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme.
L’amendement tend donc à faciliter le processus en permettant aux maires de recourir à une procédure de mise en compatibilité simplifiée, similaire à celle introduite par l’article L. 300-6-1, initialement prévue pour le logement et depuis étendue à d’autres secteurs.
Cette disposition fait l’objet d’une évaluation à cinq ans pour en mesurer l’efficacité.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 29 à l’article 3, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable. Nous en avons débattu ce matin et les positions ont été clairement établies, d’un côté comme de l’autre. Je ne pense pas, contrairement à ce qui a été dit, que la survie de la filière des carrières dépende d’un vote favorable de l’assemblée sur une disposition exorbitante du droit commun. Par cohérence légistique et par respect pour l’environnement, il faut rejeter cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis, par cohérence avec le débat que nous avons eu ce matin. Il faut limiter les dérogations de plein droit qui contraignent la compétence des collectivités en matière de planification.
Mme la présidente
La parole est à M. Thierry Benoit.
M. Thierry Benoit
Comme ce matin, je soutiens l’initiative de mon collègue Huyghe car en France, contrairement à ce que le rapporteur a dit, les activités de carrière sont soumises à de nombreuses contraintes d’exploitation, d’implantation, d’agrandissement. Notre collègue propose de ne pas faire peser ces obligations sur les élus locaux car bien souvent, par le truchement d’associations environnementales, qui ne sont pas directement concernées par les projets, les élus locaux, les maires, les conseils municipaux sont mis sous pression. L’amendement, s’il était adopté, permettrait de mettre en compatibilité les documents d’urbanisme et le schéma régional des carrières, soulageant ainsi les élus locaux. C’est en ce sens que l’amendement est le bienvenu.
Ce matin, un amendement similaire n’a pas été retenu à quelques voix près. J’espère que celui-ci, dont la rédaction est plus précise, sera adopté.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Décidément, le lobby des carrières est persévérant ! Quand on le sort par la porte, il revient par la fenêtre. Le même débat s’est tenu ce matin, avec les mêmes arguments. Des projets de carrière peuvent se monter mais ils ne sauraient échapper aux règles établies pour tout type de projet, qu’il s’agisse d’une évaluation environnementale ou de la consultation du public concerné.
J’en profite pour revenir sur l’argument, avancé ce matin, selon lequel les carrières ne sont rien d’autre que des espaces naturels dont on extrait des matériaux du sol. Certes, mais un projet de carrière consiste précisément à exploiter ce sol, en recourant à des techniques qui peuvent polluer. C’est pour cette raison que l’évaluation environnementale est indispensable et que des associations sont parfois appelées à se mobiliser pour défendre notre bien commun, l’environnement. Je vous invite à nouveau à rejeter cet amendement.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 101.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 116
Nombre de suffrages exprimés 111
Majorité absolue 56
Pour l’adoption 67
Contre 44
(L’amendement no 101 est adopté.)
Article 3
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Maillot, pour soutenir l’amendement no 29.
M. Frédéric Maillot
Cet amendement vise à sécuriser le recours obligatoire à un architecte ou à un paysagiste concepteur dans le cadre du nouveau permis d’aménager multisites créé par l’article 3.
La nouvelle procédure de permis d’aménager multisites permet de délivrer une seule autorisation pour plusieurs unités foncières non contiguës. En l’état, il existe un risque d’interprétation en défaveur de l’architecte. En effet, le seuil de 2 500 mètres carrés pourrait être apprécié isolément pour chaque parcelle, ce qui réduirait significativement l’exigence de qualité architecturale et paysagère des projets.
Afin de préserver une conception harmonieuse des projets d’aménagement, il est proposé de préciser que, pour les permis d’aménager multisites, le seuil de recours obligatoire aux architectes et paysagistes concepteurs s’apprécie en cumulant les surfaces de l’ensemble des unités foncières concernées.
Mme la présidente
Sur l’article 3, je suis saisie par le groupe Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
Sur l’ensemble des amendements portant article additionnel après l’article 3, je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutins publics.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 29 ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich.
M. Pierre Pribetich
Je demande une suspension de séance.
Mme la présidente
Avant le vote sur l’amendement ?
M. Pierre Pribetich
S’il vous plaît, madame la présidente.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 29.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 88
Majorité absolue 45
Pour l’adoption 88
Contre 0
(L’amendement no 29 est adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 3, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 99
Nombre de suffrages exprimés 97
Majorité absolue 49
Pour l’adoption 78
Contre 19
(L’article 3, amendé, est adopté.)
Après l’article 3
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 3.
Nous commençons par l’examen de deux amendements identiques, nos 119 et 140.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 119.
M. Sébastien Huyghe
Cet amendement, plus consensuel que le précédent que j’ai présenté, vise à inscrire dans le code de l’urbanisme le principe selon lequel les droits à construire découlant des règles de densité fixées par le PLU doivent être pleinement octroyés et utilisés.
Du fait de l’urgence d’atteindre l’objectif zéro artificialisation nette et de la concurrence des usages agricoles, énergétiques et industriels, le foncier disponible se réduit. Or les autorisations de construire fixées par les PLU ne sont en moyenne exploitées qu’à 65 %.
En posant clairement le principe de l’octroi des droits à construire découlant des règles de densité fixées par le PLU, nous garantissons la densification verticale nécessaire pour limiter le gaspillage par l’étalement urbain tout en accélérant la production de logements.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson, pour soutenir l’amendement no 140.
M. Mickaël Cosson
Je le retire car il est satisfait du fait de l’adoption de l’amendement no 19 de M. François Jolivet.
(L’amendement no 140 est retiré.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 119 ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Demande de retrait pour la raison indiquée par M. Cosson ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Monsieur Huyghe, maintenez-vous l’amendement ?
M. Sébastien Huyghe
Je le maintiens car il diffère de l’amendement no 19.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 119.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 107
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 49
Contre 57
(L’amendement no 119 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 120, 146 et 18, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 120 et 146 sont identiques.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 120.
M. Sébastien Huyghe
Sur le fondement d’un arrêt du Conseil d’État du 27 juin 2005, l’unité foncière est définie comme « un îlot de propriété d’un seul tenant, composé d’une parcelle ou d’un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision ». Cette définition ne reflète plus les besoins opérationnels des porteurs de projets. Dans un contexte de transformation des usages, de sobriété foncière et d’aménagement durable, il convient d’adopter une approche plus souple et réaliste du périmètre foncier mobilisé.
L’amendement vise à créer la notion d’« assiette du projet », distincte de l’unité foncière, qui tiendrait compte non seulement des terrains directement bâtis mais aussi des terrains nécessaires à la réalisation ou à l’exploitation du projet. Si cela est justifié par la cohérence du projet, l’assiette ainsi définie pourra couvrir plusieurs unités foncières, voire plusieurs sites. Les modalités de détermination de cette assiette et les justificatifs à produire seraient fixés par décret.
Mme la présidente
Les amendements nos 146 de M. Mickaël Cosson et 18 de M. François Jolivet sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable.
Le permis d’aménager multisites repose sur une logique différente de celle du permis de construire. Les dispositions que nous avons adoptées dans la présente proposition de loi doivent être encadrées par des critères qui n’apparaissent pas dans votre amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Si, dans le cadre de l’instruction des permis de construire, la notion d’assiette de projets est une piste intéressante pour faciliter les projets multisites et appliquer dans certains cas les règles d’urbanisme à une échelle autre que celle de la parcelle, il semble prématuré d’utiliser immédiatement cette notion pour toutes les opérations d’urbanisme. En effet, dès lors que les règles régissant les PLU et les permis de construire sont entièrement fondées sur les parcelles et le zonage, on risque de créer un décalage entre le PLU et les règles applicables et de mettre en grande difficulté les collectivités qui devront instruire les projets.
Laissons-nous le temps de la réflexion sur cette piste très prometteuse. Un groupe de travail est chargé au sein du ministère de creuser la question afin de s’assurer qu’une réforme en la matière sera immédiatement opérationnelle.
Au surplus, l’article 3 apporte une première réponse concrète à votre intention puisque le permis multisites permettra d’instruire de manière concomitante des projets assis sur des parcelles non contiguës.
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Certains amendements sont-ils retirés ?
M. François Jolivet
Je retire le mien.
(L’amendement no 18 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Nous sommes contre cette série d’amendements qui visent à remplacer la notion d’unité foncière par celle d’« assiette de projet ». Une telle mesure nous semble dangereuse car elle risque de donner lieu à un décalage avec l’élaboration des documents de planification tels qu’ils existent aujourd’hui.
En outre, nous venons d’adopter l’article 3, qui prévoit la possibilité d’accorder un permis d’aménager multisites, donc pour des unités non contiguës. Cela me semble également très périlleux. Plutôt que de donner une autorisation globale, il serait nécessaire d’évaluer la non-contiguïté elle-même, notamment l’impact environnemental du projet, y compris dans les zones situées entre les différentes parcelles concernées.
Avec ces amendements et avec l’article 3, vous créez une faille immense en matière de droit de l’environnement. Monsieur Huygue, si les enjeux de sobriété foncière et d’environnement vous tiennent à cœur, comme vous l’avez affirmé lors de la défense de votre amendement, croyez-moi : ces amendements doivent être retirés.
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos.
M. Frédéric-Pierre Vos
Les notions de droit à construire et de vente de droit à construire ne sont pas nouvelles. Il existe des jurisprudences, notamment celle, fameuse, de Marne-la-Vallée, une affaire qui avait coûté 520 millions de francs à l’État parce que l’établissement public vendeur avait garanti les droits à construire. Il est vrai que ces droits étaient calculés à partir de la surface hors œuvre nette (Shon), puisque c’était l’époque des ZAC. On dissociait alors la dimension du terrain de la valeur du droit à construire puisqu’on piochait en quelque sorte dans une boîte, ce qui permettait de vendre des droits à construire supplémentaires.
Les notaires avaient alors déjà appelé l’attention des pouvoirs publics sur le réel danger que fait courir une dissociation de ce type. Je suis favorable à une discussion entre le Parlement et les pouvoirs autour de cette question. Certes, il est possible de séparer les choses mais il ne faut pas partir à l’aventure, n’importe comment.
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe.
M. Sébastien Huyghe
Dans la mesure où un groupe de travail a été constitué, je retire l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
Je retire le mien aussi.
(Les amendements identiques nos 120 et 146 sont retirés.)
Mme la présidente
L’amendement no 7 de M. Éric Woerth est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Sagesse.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 7.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 127
Majorité absolue 64
Pour l’adoption 105
Contre 22
(L’amendement no 7 est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 16, 108 et 145, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 108 et 145 sont identiques.
L’amendement no 16 de M. François Jolivet est défendu.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 108.
M. Sébastien Huyghe
Lorsqu’un permis de construire modificatif est demandé, il est soumis aux nouvelles règles d’urbanisme en vigueur même si l’évolution de ces contraintes ne pouvait être anticipée au moment de la conception du projet.
De tels ajustements peuvent compromettre la conception, donc l’équilibre économique d’un projet en cours de réalisation. Ils peuvent entraîner des surcoûts, des retards voire l’abandon pur et simple de certains programmes.
Cet amendement vise donc à sécuriser les porteurs de projet en cristallisant les règles d’urbanisme applicables au moment de la délivrance du permis de construire.
Cette mesure de bon sens s’inspire du régime prévu en cas d’obtention de permis d’aménager un lotissement qui apporte stabilité et visibilité aux acteurs de la construction.
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson, pour soutenir l’amendement no 145.
M. Mickaël Cosson
Cet amendement, identique au précédent, tend à ce que les règles soient cristallisées pour une durée de sept ans.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Je demande le retrait des amendements nos 108 et 145 au profit de celui de M. Jolivet. Compte tenu de sa rédaction et du choix de limiter la période à trois ans, le dispositif me semble mieux encadré et plus sécurisé juridiquement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
(Les amendements identiques nos 108 et 145 sont retirés.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 16.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 124
Majorité absolue 63
Pour l’adoption 105
Contre 19
(L’amendement no 16 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Grégoire, pour soutenir l’amendement no 12.
M. Emmanuel Grégoire
Cet amendement soulève un problème un peu technique mais très concret. Sur les 20 millions de maisons individuelles, 63 % sont occupées par des ménages de deux personnes ou moins, ce qui nécessitera de procéder à des évolutions majeures des lotissements – c’est même déjà le cas aujourd’hui.
Or le cahier des charges du lotissement – très utile puisqu’il fixe les règles applicables à l’ensemble d’un lotissement – est un document très contraignant en matière de demande d’autorisation d’urbanisme, comme le reconnaît la Cour de cassation dans sa jurisprudence.
Cet amendement vise à faire évoluer ces cahiers des charges dans le sens d’une plus grande agilité, d’une plus grande simplicité. Il faut savoir que les clauses qu’il contient entrent souvent en contradiction avec les règles des PLU et des PLH, les programmes locaux de l’habitat adoptés par les communes.
Nous souhaitons ainsi permettre à un particulier copropriétaire du lotissement de formuler une demande de mise en concordance. Le cas échéant, le maire pourrait lui aussi prendre la main. Évidemment, une telle procédure suppose qu’une enquête publique soit ouverte pour vérifier que personne ne s’y oppose.
Nombre de colotis ont oublié l’existence de ces cahiers des charges ou ne savent plus quel est leur périmètre exact. Pour prendre un exemple concret, si un couple de personnes âgées veut transformer sa maison afin de la rendre plus accessible, il doit déposer une demande d’autorisation d’urbanisme. C’est alors qu’il se heurte aux règles prévues par le cahier des charges.
Avec cet amendement, qui prévoit de renforcer le dispositif de mise en concordance du cahier des charges de lotissement avec les dispositions du PLU, nous proposons donc une mesure de simplification.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis favorable.
Il s’agit d’une question technique mais que connaissent bien ceux d’entre nous qui ont été maires. La rénovation des zones pavillonnaires ne sera pas possible si nous ne donnons pas à la puissance publique les moyens de mettre à jour des documents qui, par négligence ou parce qu’ils contiennent des règles jugées aujourd’hui trop rigides, empêchent certaines évolutions.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Vous souhaitez, par cet amendement, favoriser la modification des documents qui régissent le lotissement, ce qui permettrait de faciliter la réhabilitation et la mutation des zones pavillonnaires. En effet, certains documents anciens constituent un obstacle à la densification douce de ces zones, comportant des règles qui peuvent se rapprocher de celles des PLU, de nature à la fois réglementaire et contractuelle.
Le fait de faciliter l’évolution de ces documents constitue une piste majeure pour transformer la ville. C’est pourquoi le droit prévoit déjà des procédures qui vont dans ce sens.
Le dispositif que vous proposez est plus strict que ce qui est prévu par le droit existant. Vous exigez ainsi une absence d’opposition d’une majorité qualifiée des colotis. Dans l’amendement tel qu’il est rédigé, vous confondez par ailleurs les deux procédures possibles actuellement, l’une à la main du maire après enquête publique, l’autre à la main des colotis eux-mêmes.
Je rappelle enfin que l’Assemblée a adopté l’amendement no 39 de Mme Lebec, qui tend à faciliter la modification des documents d’urbanisme que vous appelez de vos vœux. C’est pourquoi je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Nous demandons une suspension de séance d’une minute afin d’avoir une discussion avec le rapporteur et la ministre.
(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 12.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 117
Nombre de suffrages exprimés 114
Majorité absolue 58
Pour l’adoption 82
Contre 32
(L’amendement no 12 est adopté.)
Article 3 bis
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 79 tendant à supprimer l’article, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Claire Lejeune, pour soutenir l’amendement.
Mme Claire Lejeune
Nous proposons de supprimer l’article 3 bis, qui étend au permis d’aménager les dispositions relatives à la possibilité de délivrer un permis de construire à titre précaire. Cette disposition signifie en effet que des installations pourront être conduites hors du droit commun. La portée des documents d’urbanisme et des procédures qu’ils prévoient s’en trouverait dès lors affaiblie. Or on parle ici d’installations qui, dans certains cas, peuvent occasionner des dégâts irréversibles sur l’environnement – je pense à des installations de voirie ou à des aménagements un peu plus lourds.
Il nous semble dangereux d’assimiler les permis d’aménager aux permis de construire à titre précaire, non seulement parce que nous n’aurons plus les moyens de contrôler les aménagements – ce qui pose aussi un problème de transparence – mais aussi pour des raisons environnementales. En outre, la notion d’aménagement couvre un champ très vaste.
Le cadre juridique actuel nous donne des garanties suffisantes. Il n’est pas nécessaire de créer des dérogations supplémentaires – comme vous tentez de le faire sans cesse dans ce texte.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable.
La disposition, introduite en commission des affaires économiques sur proposition de Mme Lebec, a été adoptée à une large majorité. Il ne s’agit pas de créer une autorisation d’urbanisme générale pour tous les demandeurs.
Je vous propose de retirer cet amendement au profit de l’amendement de précision no 93 que je présenterai tout à l’heure. Il fait d’ailleurs l’objet de sous-amendements socialistes sur lesquels je donnerai un avis favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Je soutiens l’amendement no 93 du rapporteur qui prévoit un dispositif très spécifique, très encadré, qui ne modifie pas le cadre général des autorisations d’urbanisme. Voilà pourquoi je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 79.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 126
Nombre de suffrages exprimés 126
Majorité absolue 64
Pour l’adoption 26
Contre 100
(L’amendement no 79 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 93 de M. le rapporteur est défendu.
Il fait l’objet de deux sous-amendements, nos 155 et 154, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. La parole est à M. Pierre Pribetich pour les soutenir.
M. Pierre Pribetich
Le sous-amendement no 155 vise, dans l’esprit de ce que nous avions proposé pour de telles constructions dans la loi d’urgence pour Mayotte, à obliger le porteur de projet à soumettre au maire de la commune le lieu d’implantation des constructions ou aménagements en question. Il s’agit donc de solliciter d’abord l’avis de M. le maire pour savoir si cela présente un intérêt et s’il est en phase.
Le sous-amendement no 154 tend à rendre obligatoire la constitution de garanties financières pour la dépose des installations et la remise en état des terrains en cas de défaillance du maître d’ouvrage, une situation qui peut se présenter de temps à autre.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et les sous-amendements ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis favorable : l’avis du maire constitue une garantie démocratique et l’obligation de consignation financière auprès de la Caisse des dépôts est une garantie financière qui complète les garanties que nous avons essayé d’introduire par cet amendement à une disposition adoptée en commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Sagesse sur les deux sous-amendements, avis favorable sur l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Les deux sous-amendements proposés par notre collègue Pribetich donnent à lire en creux le danger que représente la disposition introduite par l’article 3 bis. Dans sa version d’origine, sans les sous-amendements, ce dernier ne prévoit ni la consultation du maire ni la constitution de garanties financières susceptibles d’être mobilisées en cas de dommages. Cela présente un risque réel : si le maire n’est pas prévenu, il n’y aura aucun moyen de contrôler l’aménagement et ses dispositions.
Nous persisterons à voter contre l’article dans son ensemble car il nous semble aller beaucoup trop loin dans la dérogation. Nous voterons néanmoins pour les sous-amendements.
(Les sous-amendements nos 155 et 154, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
(L’amendement no 93, sous-amendé, est adopté ; en conséquence, l’article 3 bis est ainsi rédigé.)
Article 4
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 57 et 69, je suis saisie par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Ersilia Soudais.
Mme Ersilia Soudais
Cet article nous inquiète. Il comporte deux dispositions. La première est la réduction des délais de recours contre les autorisations d’urbanisme. S’il s’agit d’aider à l’accélération de la construction des logements sociaux, cette disposition est certes positive, d’autant que plus de 12 millions de personnes ont du mal à se loger, notamment à cause de loyers trop élevés. Si l’on devait répondre à la demande de toutes celles et ceux qui réclament un logement social – réellement social –, il faudrait en construire 1 million. C’est vous dire à quel point le pays est en retard et à quel point nous sommes favorables à une construction rapide. Toutefois, lorsque l’impact environnemental d’un projet est négatif, alors nous sommes bien contents que les délais de recours soient de deux mois.
M. Pierre Cazeneuve
Ce n’est pas cohérent !
Mme Ersilia Soudais
La deuxième disposition concerne la lutte contre les constructions illégales et le phénomène de cabanisation. On sait bien qu’il y a derrière cette disposition, encore une fois, une stigmatisation de ceux qui choisissent d’habiter différemment, notamment les voyageurs. Depuis une quinzaine d’années, on peut noter que l’habitat léger, dans son ensemble, est dans la ligne de mire des préfectures, qu’il s’agisse des caravanes, des mobil-homes, des cabanes ou encore des yourtes. Pourtant, l’habitat léger constitue une véritable source d’inspiration, en particulier pour répondre aux exigences écologiques imposées par la loi ZAN, souvent vue – à tort – comme une impasse.
De façon globale, je m’inquiète aussi de constater qu’on veut encore réprimer plutôt que de traiter le problème à la source. Je rappelle notamment que les voyageurs, par exemple, ne disposent pas d’aires d’accueil en nombre suffisant et que 80 % de celles qui existent sont très polluées. Peut-être faudrait-il commencer par résoudre ces problèmes ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe EPR.) Si vous aviez assisté à l’audition d’Antoine Nil Sauser par le groupe d’études sur les gens du voyage, vous sauriez à quel point l’errance est forcée et non voulue. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 57 et 69, tendant à supprimer l’article.
La parole est à Mme Julie Ozenne, pour soutenir l’amendement no 57.
Mme Julie Ozenne
Par cet amendement, nous demandons la suppression de l’article 4, qui opère un double durcissement inacceptable en matière d’urbanisme : d’un côté, des sanctions disproportionnées contre des formes d’habitat léger souvent choisies pour des raisons écologiques ou sociales ; de l’autre, un affaiblissement du droit des citoyens de contester les autorisations d’urbanisme.
Assimiler une yourte ou une tiny house à une atteinte à l’ordre public, c’est passer à côté d’initiatives qui relèvent parfois de la sobriété foncière, de la résilience locale ou de l’urgence sociale. Ce texte criminalise des choix d’habitat innovants, qui sont souvent ceux d’habitants précaires ou d’acteurs de la transition.
En réduisant le délai de recours gracieux ou en supprimant son effet suspensif, on coupe court à toute tentative de conciliation et de participation citoyenne. L’urbanisme ne peut être une course de vitesse. Il doit être juste, démocratique et à l’écoute des territoires. Tel est le sens de notre amendement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune, pour soutenir l’amendement no 69.
Mme Claire Lejeune
Par cet amendement de suppression, nous nous opposons aux deux dispositions contenues dans l’article.
J’aborderai d’abord la réduction du délai de recours. Le droit au recours est un élément fondamental de notre droit. Que vous apporte la suppression d’un mois qui, pour les associations, pour les riverains, pour nos concitoyens, offre une possibilité supplémentaire de réagir quand ils se rendent compte qu’un projet qui ne leur convient pas s’installe dans leur territoire, leur voisinage ? Comme vient de le souligner notre collègue Julie Ozenne, le recours gracieux donne souvent lieu à un moment de médiation, de dialogue. Or la médiation et le dialogue permettent d’éviter que les conflits aillent plus loin, vers des formes de recours plus contentieuses, qui représentent un coût pour toutes les parties prenantes.
Cet article aura donc un effet contraire à celui que, peut-être, vous recherchez, à savoir la simplification. Vous allez créer du conflit là où l’on aurait pu le résoudre par la médiation.
S’agissant de la seconde disposition, l’augmentation du montant des amendes donne l’impression que vous n’entendez cibler que les propriétaires qui construisent une résidence secondaire en toute illégalité. En réalité, l’outil juridique que vous créez par là pourra être utilisé contre des populations déjà précaires, telles les communautés des gens du voyage, qui, comme l’a souligné notre collègue Ersilia Soudais, s’installent aussi sur des territoires en raison du manque d’espaces correctement réservés pour eux par les communes. Cet outil risque également d’être utilisé contre les habitats légers, que nous devons considérer d’une manière positive.
L’article prévoit donc non seulement une simplification qui est une régression, mais également l’ajout d’un outil répressif. Il ne nous paraît vraiment pas bénéfique et nous vous invitons à voter pour sa suppression. (Mme Sylvie Ferrer applaudit.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable. Je pense que nous avons intérêt à avoir deux débats distincts sur ces dispositions, qui sont différentes.
S’agissant du recours gracieux, je vous confirme les chiffres que nous avions communiqués à la commission. Il fut un temps où le recours gracieux, en droit français, permettait un dialogue propice à éviter un contentieux. C’est ce qu’on apprenait à l’école il y a vingt ans et qui décrivait ce qu’était la réalité vingt ans encore auparavant.
Aujourd’hui, les statistiques établies par les différents rapports du Conseil d’État sont accablantes : les recours gracieux et le délai accordé pour les déposer sont instrumentalisés dans le cadre de manœuvres dilatoires. Ainsi, le recours est presque toujours déposé le dernier jour et les collectivités n’y répondent pas ou elles choisissent de ne pas y répondre en épuisant le délai.
Le droit de l’urbanisme s’est profondément modifié au cours des dernières décennies. Les possibilités de recours se sont tellement multipliées – par l’allongement des procédures, par la possibilité de recourir à des études – qu’elles ne manquent pas. Ce qui manque, c’est le temps nécessaire pour réaliser les projets. Le contentieux de l’urbanisme a vu le nombre de recours exploser. Les tribunaux administratifs ne sont même pas en situation de les traiter, parce qu’à tous les moments de la procédure, bien après le recours gracieux, il y a matière à engager des recours, qui sont parfois aussi des prétextes au service de différentes stratégies, y compris de stratégies de négociation entre les partenaires.
Sur ce point, les statistiques sont claires : le recours gracieux ne permet pas d’éviter le contentieux administratif, il y conduit directement. Sans rien ôter des garanties du juge administratif, nous proposons de réduire le délai de recours et de le rendre non suspensif, de manière à parvenir à ce qui constitue aujourd’hui la lettre et la base du droit, c’est-à-dire à la possibilité pour le juge administratif de dérouler la procédure.
Concernant la deuxième disposition, je lis dans l’exposé des motifs des deux amendements, au sujet de l’habitat illégal, qu’il s’agirait d’un habitat léger, vertueux, écologique, choisi ou encore alternatif. Je ne sais pas si nous parlons de la même planète et de la même réalité !
Ce qui a motivé l’écriture de cette disposition, c’est mon expérience de maire. Face à des situations très diverses, la loi confère au maire le pouvoir de mettre en demeure le propriétaire afin qu’il régularise sa situation. Toutefois, les astreintes dont cette mise en demeure est assortie en prévision du refus du propriétaire ne sont absolument pas incitatives. L’outil dont dispose le maire n’en est donc pas un, ce qui le prive de toute crédibilité dans la conduite de la procédure.
Il me semble important, en cohérence avec le droit existant, que nous nous donnions les moyens d’inciter à la régularisation de ces situations, que notre collègue de Guyane a bien décrites et qui sont très problématiques et doivent être traitées.
Pour ces deux raisons et parce qu’il nous faut avoir un débat sur ces deux points avant de voter sur l’ensemble de l’article, je suis défavorable à sa suppression.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
L’accélération du traitement du contentieux de l’urbanisme sera favorable à tous. La situation actuelle n’est pas satisfaisante, du fait de l’empilement des différents délais et des différents contentieux, qui aboutit à des délais trop longs. Je suis convaincu qu’il s’agit de l’un des obstacles majeurs à la relance de la production de logements, qui constitue un impératif en vue d’apporter des solutions à nos concitoyens – c’est notre responsabilité collective.
Le droit au recours est conventionnellement protégé et il n’est évidemment pas question de le mettre en cause. Il nous faut au contraire faire en sorte qu’il s’exerce efficacement lorsqu’il est utilisé. Le dispositif proposé permettra d’améliorer l’articulation entre les différentes voies de recours et assurera un gain de temps pouvant aller jusqu’à quatre mois. Ce n’est pas négligeable eu égard à la longueur du délai usuel de jugement, qui dépasse souvent un an, voire davantage.
Quant aux mesures relatives à la police administrative, elles sont nécessaires compte tenu de l’accroissement des constructions illégales, souvent désigné par le terme de cabanisation. Le droit doit être respecté par tous. La protection des terres agricoles, les espaces naturels, la protection face aux risques, le respect du droit des riverains imposent à chacun de respecter les règles du PLU et du code de l’urbanisme. Je pense que nous nous retrouvons sur ce point.
Or les maires sont démunis. Ce sont eux que j’entends quotidiennement – notamment dans le Sud de la France, par exemple dans l’Hérault, comme vous le savez – dénoncer l’insuffisance de leurs outils de prévention des implantations illégales dans les zones agricoles. Les collectivités attendent que nous leur apportions des solutions concrètes.
C’est ce que fait ce texte. C’est pourquoi je suis défavorable à ces deux amendements de suppression.
Mme la présidente
La parole est à Mme Constance de Pélichy.
Mme Constance de Pélichy
Je suis assez surprise par ces amendements, s’agissant notamment de la cabanisation.
Nous avons eu tout à l’heure un échange au sujet des documents de planification, lors duquel vous faisiez part, chers collègues, de votre souhait que ces documents puissent être le plan qui permet de protéger l’environnement, de discuter avec la population et de penser l’aménagement du territoire.
M. Sylvain Maillard
Eh oui !
Mme Constance de Pélichy
Je ne comprends pas qu’on veuille sortir ces habitats légers de l’aménagement du territoire, de la question de la planification, des zones où l’on peut résider en sécurité. Il ne faut pas oublier que le maire est responsable à partir du moment où des habitations sont implantées. Cela veut dire qu’il doit aussi, par exemple, assurer la défense incendie. Si cette dernière ne va pas jusqu’aux habitations, il peut en être tenu responsable. Comment fait-on si l’on légitime ces habitations que vous appelez de vos vœux ? Comment fait-on, dans le cadre du respect du droit de l’environnement, pour éviter le mitage ? Comment fait-on pour organiser les mobilités ? (Mme Sandra Marsaud applaudit.) On ne peut pas penser l’aménagement du territoire par la cabanisation ! Il est essentiel de le mettre en œuvre à travers les documents d’urbanisme.
Enfin, s’agissant de la question du droit de recours, le rapporteur et la ministre ont bien dit que les délais d’urbanisme son excessivement longs. On se doit de trouver tous les moyens pour les raccourcir. Aujourd’hui, le droit de recours gracieux ne mène plus, malheureusement, au règlement des contentieux de manière amiable : il est souvent utilisé de manière à rallonger les délais et à embêter le pétitionnaire au maximum. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – M. Romain Daubié applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Pour répondre à ma collègue, je précise qu’il ne s’agit pas par notre amendement de remettre en cause les documents de planification ; nous souhaitons lancer une alerte sur les effets de bord et sur les potentiels usages qui pourraient découler des dispositions de cet article.
Je rappelle que la cabanisation est un phénomène qui s’inscrit aussi dans un contexte de crise du logement, crise à laquelle cette proposition de loi n’apporte que des solutions très partielles, voire parfois déplacées, par rapport aux moyens et aux investissements qu’il faudrait prévoir. La solution proposée dans ce texte, au titre de la défense des maires, est d’augmenter le montant des amendes – qui vont être appliquées à des personnes qui n’ont déjà aucun moyen de payer l’amende inscrite dans le droit actuel. Même si l’on suit votre logique, je ne vois pas en quoi de telles dispositions seraient un plus, y compris pour les maires, pour désinciter à l’installation d’habitats illégaux.
Notre conclusion, c’est que l’article n’est qu’à visée répressive. Voilà ce qui nous inquiète et sur quoi nous essayons de vous alerter – et ce n’est pas incohérent avec les positions que nous avons tenues jusqu’ici sur l’importance de respecter les documents de planification et d’urbanisme.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 57 et 69.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 21
Contre 99
(Les amendements identiques nos 57 et 69 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 70.
Mme Sandrine Nosbé
Par cet amendement, nous souhaitons supprimer les dispositions de cet article qui renforcent la lutte contre les constructions illégales. En effet, derrière le souhait légitime de ne pas permettre des constructions qui vont à l’encontre de l’intérêt général, ces dispositions auront surtout pour conséquence de prolonger une politique répressive qui n’aide en rien la politique du logement. Une partie des constructions illégales est de l’habitat dit léger – caravanes, mobil-homes, cabanes ou yourtes – et ce type d’habitat est depuis une quinzaine d’années de plus en plus dans la ligne de mire des préfectures, qui les considèrent comme des nuisances. On sait pourtant que ces installations sont le plus souvent motivées par des aspirations écologiques ou malheureusement alimentées par la crise du logement – cela concerne également des gens du voyage qui stationnent illégalement en l’absence d’aire d’accueil en nombre suffisant ou aux conditions d’accueil souvent indignes.
Cette volonté de réprimer apparaît contradictoire avec le fait que la loi Alur, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, a mis fin en 2014 à un vide juridique en autorisant les maires à accorder des dérogations pour les habitats légers en résidence principale situés sur des terrains non constructibles – même si cette faculté reste actuellement très peu utilisée dans les PLU.
Les associations de défense de ces habitats rappellent que des constructions légères sont énergétiquement sobres et écologiquement vertueuses. Ainsi, alors que les propriétaires de forêts denses n’arrivent pas à les entretenir, il peut s’avérer bien utile de favoriser l’installation de tels habitants, qui feront alors un travail de débroussaillage, afin d’éviter les feux. Dans un contexte où les élus opposent souvent leurs besoins de nouveaux logements aux enjeux écologiques, il est possible d’envisager l’habitat léger comme une solution, comme le soulignait ma collègue Ersilia Soudais. Au pays de Galles par exemple, lorsque les habitants de ce type de constructions éphémères font la preuve que leur installation produit une empreinte carbone réduite, ils sont régularisés, à l’inverse de la dynamique que nous connaissons en France.
Nous proposons donc la suppression des alinéas 2 à 10.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Votre description idyllique de l’habitat léger écologique, je vous la laisse – tout comme votre justification de tolérer sinon d’autoriser un habitat illégal dans les zones forestières denses par le fait que cela permettrait le débroussaillage et de lutter ainsi contre le risque d’incendie… La ville dont j’ai été le maire a un régiment de sécurité civile et pas mal de sapeurs-pompiers, et ce n’est pas ce qu’ils m’ont dit ! Voilà un argument parmi d’autres que je pourrais aussi développer, mais je m’en tiendrai à un point de clarification : vous rappelez que la loi de 2014 a mis fin à un vide juridique en matière d’habitat léger, en abaissant le niveau d’exigence et en facilitant autorisations et possibilités de régularisation. Nous ne revenons pas sur cette faculté – soit déjà une grande dose de tolérance. Nous ne mettons pas en cause l’habitat léger ; nous mettons en cause l’habitat illégal, notamment quand il se situe dans une zone naturelle ou dans une zone agricole, endroits où vous ne pouvez pas dire que ce type d’habitat n’a pas d’impact sur la pollution et la sécurité. J’ai en tête les visages de ceux qui habitent dans ces zones, ne serait-ce que dans le département dont je suis l’élu : ce ne sont pas des gens qui sont heureux d’y vivre, pas des gens dans la meilleure des santés possibles, pas des gens qui, dans l’hiver au nord de la Loire, sont vraiment ravis d’être là où ils sont.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis. Je n’allongerai pas le débat car je me suis déjà exprimée sur le sujet.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Il faut bien identifier de quoi l’on parle. S’agissant de la cabanisation, elle correspond à des installations précaires de personnes précaires : pensez-vous vraiment que l’outil juridique que vous proposez dans cet article, c’est-à-dire augmenter massivement les amendes prévues pour eux, va être une solution ? Je rappelle que l’article 2 vient d’être adopté et qu’il permettra de réduire les places dans les RHVS, lesquelles contribuent au logement d’urgence et au logement social… En fait, face à la crise du logement, vous utilisez uniquement un outil répressif alors que vous pourriez proposer de libérer des places pour les personnes que vous visez par cet article. Même si l’on adopte votre point de vue, l’outil répressif sera inopérant parce que l’augmentation de quelques milliers d’euros d’amende pour des gens qui n’ont de toute façon même pas les moyens de payer celle actuellement prévue, qu’est-ce que cela va pouvoir leur faire ?
En plus, c’est un outil répressif illégitime quand il est appliqué à des populations qui se trouvent dans une situation de précarité. Encore une fois, collègues, nous vous invitons à voter pour cet amendement qui supprime les alinéas concernés.
(L’amendement no 70 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 47, 56 et 71.
Sur ces amendements, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos, pour soutenir l’amendement no 47.
M. Frédéric-Pierre Vos
La suppression des dispositions actuelles concernant le recours gracieux est le prototype de la fausse bonne idée qui a émaillé les mauvaises réformes du droit de l’urbanisme depuis les vingt dernières années, comme je l’ai exprimé dans mon propos liminaire. Il faut savoir que le seul intérêt du recours gracieux, c’est que le requérant peut alors récupérer le permis de construire, sachant que les communes ne les délivrent pas à l’instant T, leur étude prenant un certain temps, surtout quand ils sont volumineux, et que l’on est obligé d’aller chercher un avocat, qui n’est pas forcément disponible immédiatement. Grâce au délai suspensif du recours gracieux, voilà un temps compensé qui n’est pas décompensable.
Dès lors, si vous supprimez le délai de recours gracieux, que va-t-il se passer ? L’eau cherche toujours à aller à la mer…
Première hypothèse : pour gagner du temps, il suffira de faire une demande d’aide juridictionnelle. Le bureau va mettre un an à répondre et pendant ce temps-là, le délai de recours est suspendu. En voulant soi-disant protéger les constructeurs, les pétitionnaires et autres, on va en réalité « emboliser » le dispositif de l’aide juridictionnelle.
Seconde hypothèse : on pourra aussi faire jouer une disposition du droit des assurances. En effet, si l’on a une assurance protection juridique, le délai que met celle-ci à répondre permettra de suspendre le délai de recours.
Voilà en tout cas qui va créer des situations encore plus graves qu’aujourd’hui parce que les gens croiront avoir un permis définitif alors qu’ils n’auront bénéficié que d’un recours flottant. Et je rappelle que les dispositions de l’article R 600-1 du code de l’urbanisme n’obligent pas le requérant à avertir le pétitionnaire et la commune qu’il a fait une demande d’aide juridictionnelle ; la seule obligation qui lui incombe, c’est de prévenir le bénéficiaire du permis qu’il vient de déposer un recours gracieux. C’est un réel problème.
Mme la présidente
Merci, cher collègue.
M. Frédéric-Pierre Vos
C’est important, madame la présidente, il faut que je finisse.
Mme la présidente
Vous disposez de deux minutes maximum pour la défense des amendements. Je vous redonnerai la parole après l’avis de la commission et celui du gouvernement.
La parole est à Mme Julie Ozenne, pour soutenir l’amendement no 56.
Mme Julie Ozenne
Cet amendement vise à supprimer deux dispositions contre-productives : la réduction à un mois du délai de recours gracieux et la suppression de son effet suspensif. Aujourd’hui, le recours gracieux est un outil de dialogue : il permet de désamorcer les conflits, d’identifier des ajustements, parfois d’éviter un contentieux – mais ce n’est possible que si les travaux ne démarrent pas pendant ce temps de conciliation. Supprimer l’effet suspensif revient à priver les citoyens et les associations de tout levier réel pour faire entendre leurs observations avant que le béton ne soit coulé. Pire : au lieu d’apaiser, cette mesure va encourager les recours contentieux immédiats… Résultat : des tribunaux engorgés, des autorisations plus fragiles et, in fine, des projets ralentis, précisément l’inverse de l’objectif affiché. Ce texte affaiblit la concertation sans accélérer l’action.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression des alinéas 11 à 13.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 86, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public, ainsi que sur l’article 4 par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Bérenger Cernon, pour soutenir l’amendement no 71.
M. Bérenger Cernon
Nous comprenons bien évidemment la volonté d’accélérer les démarches, d’autant plus quand il s’agit de construction, de production de logements sociaux. Cependant, si des délais existent, c’est notamment pour permettre des voies de recours lorsqu’un projet comporte un impact environnemental négatif. Le délai actuel de deux mois pour contester un projet est raisonnable puisque, au-delà de cette durée, l’autorisation devient automatiquement définitive. Il est suffisamment long pour permettre à l’information de circuler et de mesurer la réaction qui découle du projet. À l’inverse, réduire cette durée de moitié n’aurait qu’un impact négatif puisque cela risquerait de provoquer des réactions bien plus virulentes du fait du manque de temps d’information et du sentiment de passage en force.
Nous souhaitons donc supprimer les alinéas 11 à 13, étant donné les désavantages qu’entraîneraient cette modification et la faiblesse, voire la nullité, du gain de rapidité à en attendre.
Quant à la question du nombre de recours qui ne font qu’augmenter, il faudrait plutôt se poser la question des raisons de cette augmentation et non pas, une fois de plus, réduire le temps du dialogue.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Les mécanismes juridiques que décrivent les auteurs de ces amendements ne correspondent pas à ce que les formations du Conseil d’État indiquent dans leur rapport comme une évolution souhaitable du droit de l’urbanisme. Les juristes ne sont donc pas de votre avis.
De même, si l’on écoute les maires ou les porteurs de projet, vos interventions ne correspondent pas à la réalité qu’ils vivent.
Il importe que ces alinéas soient adoptés, sachant du reste que ce ne sont pas ni les délais ni les possibilités de recours sur toutes les autres étapes, y compris celle des études, qui manquent aujourd’hui dans notre droit.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos.
M. Frédéric-Pierre Vos
Je reprends donc mon propos.
Les tribunaux administratifs sont engorgés – ce n’est pas une nouveauté. Ils le sont beaucoup à cause du contentieux des étrangers. Je ne cherche pas à polémiquer mais plus de 70 % des affaires traitées relèvent de ce contentieux.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Ce n’est pas une raison !
M. Frédéric-Pierre Vos
Dans de très rares cas, des chambres sont spécialisées et gèrent les litiges relatifs à l’urbanisme.
En outre, les magistrats changent fréquemment d’affectation. Avec la multiplication des requêtes, celui qui a reçu ou validé le premier recours n’est pas forcément celui qui l’instruira ou qui siégera dans la formation de jugement. Les pertes de temps, problématiques, s’accumulent.
Il faut débloquer des moyens financiers, et ils doivent aller aux tribunaux administratifs. Les juges administratifs accomplissent un travail remarquable ; ils sont en première ligne et ce sont eux qui peuvent faire avancer le contentieux de l’urbanisme, bien plus que toutes les incantations autour de la suppression du délai de recours gracieux.
D’autre part, j’ai déposé un amendement afin que les recours soient obligatoirement introduits par un avocat. Cette professionnalisation me semble souhaitable, car le droit de l’urbanisme est devenu tellement complexe qu’un citoyen ne peut pas affronter seul la procédure devant les juges. Le coût ne représente pas un véritable problème : l’aide juridictionnelle ou les assurances de protection juridique pourront le prendre en charge – cela se fait couramment.
L’article 4 pose un dernier souci : c’est le lien forcé entre le renforcement des sanctions en cas de travaux illégaux et les modifications liées aux recours.
Si notre groupe adhère aux dispositions qui visent à renforcer les sanctions financières et pénales, nous ne sommes pas d’accord avec la suppression du recours gracieux.
Mme la présidente
Merci, cher collègue.
M. Frédéric-Pierre Vos
Que peut-on faire ? Peut-on voter séparément sur ces points ? Le gouvernement acceptera-t-il de revoir la question sereinement avant de commettre une erreur ?
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 47, 56 et 71.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 121
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 66
Contre 55
(Les amendements identiques nos 47, 56 et 71 sont adoptés ; en conséquence, les amendements identiques nos 17, 110, 139 et 142 ainsi que l’amendement no 86 tombent.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 4, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 120
Nombre de suffrages exprimés 118
Majorité absolue 60
Pour l’adoption 98
Contre 20
(L’article 4, amendé, est adopté.)
Après l’article 4
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 4.
Les amendements identiques nos 138 de M. Thibault Bazin et 141 de M. Mickaël Cosson sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Avis défavorable.
Le contrôle de légalité de droit commun doit se poursuivre en matière de décisions d’urbanisme, comme pour toutes les autres décisions.
Mme Estelle Youssouffa
Allez, défavorable, et basta !
(Les amendements identiques nos 138 et 141, repoussés par le gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Sur l’amendement no 59, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre Cazeneuve, pour soutenir cet amendement, qui fait l’objet du sous-amendement no 158.
M. Pierre Cazeneuve
Cet amendement du groupe Ensemble pour la République tend à répondre à l’explosion des recours depuis dix ans – notamment contre les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), mais pas uniquement. Rien qu’en 2021, ces recours ont augmenté de 10 %.
Nous proposons donc d’instaurer une procédure préalable d’admission permettant d’écarter plus rapidement les recours jugés irrecevables. Il s’inscrit dans la philosophie du texte, puisque son adoption contribuerait à désengorger les tribunaux administratifs et à éviter ces recours abusifs, que nous souhaitons tous voir disparaître. Lors de nos débats sur le projet de loi de simplification de la vie économique, nous en avons déjà longuement discuté car ces recours sont désormais systématiques, voire industrialisés.
Une telle procédure permettrait un examen rapide, comme c’est déjà le cas pour certains recours devant la Cour de cassation. Nous espérons ainsi débloquer des projets, éviter, je le répète, l’engorgement des tribunaux administratifs et lever les freins à la construction dans notre pays.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich, pour soutenir le sous-amendement no 158.
M. Pierre Pribetich
Comme souvent, le diable se cache dans les détails. Ce sous-amendement vise à sécuriser constitutionnellement le filtrage des recours – bien souvent dilatoires – en limitant son application aux projets d’intérêt général. Il établit ainsi une proportionnalité entre l’atteinte portée au droit à un recours effectif et l’objectif visé.
Le filtrage s’appliquerait aux opérations d’aménagement ou de construction permettant d’atteindre les objectifs fixés dans le cadre du PLH, aux projets répondant aux exigences de production de logements sociaux en application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), aux opérations programmées d’amélioration de l’habitat, aux opérations de revitalisation de territoire, aux projets permettant la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde, aux opérations de requalification de copropriétés dégradées et aux opérations qualifiées d’intérêt national majeur en application de la loi relative à l’industrie verte.
Si je défends ce sous-amendement au nom du groupe Socialistes et apparentés, c’est que, bien souvent, contrairement à ce que j’ai entendu ces dernières heures, les recours servent principalement à bloquer des opérations de construction de logements sociaux ou de logements à loyer modéré afin d’éviter de répondre aux exigences de la loi SRU.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
Quel est l’esprit du texte ? Il s’agit de réduire les délais sans dégrader ni remettre en cause les garanties offertes par le juge administratif. Parmi ces garanties figure la possibilité, relativement large en droit français, de déposer un recours.
En droit administratif, il me semble que l’admission préalable n’existe que pour la cassation devant le Conseil d’État et pour certains motifs en appel, mais jamais en première instance.
Par cohérence, je me positionnerai donc avec prudence, à la fois sur le sous-amendement et sur l’amendement. Leur adoption ne me choquerait pas mais, initialement, nous avions exclu toute intervention sur le contentieux administratif, dont le Conseil d’État est le garant.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
L’amendement me semble aller dans le bon sens. Il instaure une procédure d’admission préalable des requêtes en matière d’urbanisme, ce qui constitue une piste intéressante. Il me paraît bienvenu de s’en remettre sur ce point à la sagesse de l’Assemblée.
Bien que je comprenne les motivations du sous-amendement, il me semble difficilement applicable. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir le retirer afin que nous poursuivions le travail au cours de la navette, en tenant compte des points que vous soulevez, monsieur Pribetich ; à défaut, l’avis du gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Cazeneuve.
M. Pierre Cazeneuve
Je rappellerai au rapporteur que, lors de l’examen de différents textes au cours des dernières années – comme la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite Elan, ou de celle relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (Aper) –, notre assemblée a voté des dispositions allant dans le même sens, concernant les plus hautes juridictions administratives, l’objectif étant d’accélérer l’examen des recours.
Désormais, le Conseil d’État est ainsi compétent en premier et dernier ressort pour examiner les recours contre les décisions d’installations de production d’énergie renouvelable en mer ou d’installation d’antennes de télécommunications. Ces mesures exceptionnelles portent leurs fruits et elles ont permis une accélération des procédures.
Pourquoi prévoir une procédure d’admission préalable ? Personne ici ne peut nier que nos tribunaux sont engorgés par des recours incessants, parfois déposés par des personnes n’habitant même pas la commune concernée, faute de contrôle sur l’origine géographique des requêtes. Certaines associations se spécialisent dans de tels recours, qui se multiplient et ralentissent inévitablement la construction. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Monsieur Pribetich, je comprends parfaitement l’esprit de votre sous-amendement : il vise à limiter la procédure d’admission préalable aux recours contre les projets jugés prioritaires.
M. Matthias Tavel
L’A69, par exemple ?
M. Pierre Cazeneuve
Toutefois, il ne faut pas oublier que les recours abusifs ne concernent pas uniquement les logements sociaux : toute la construction est affectée – logements intermédiaires, privés, pavillonnaires, R+14 ou projets haut de gamme. Des recours sont déposés matin, midi et soir contre tout type de projets.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Quelle caricature !
M. Pierre Cazeneuve
Limiter le dispositif me semblerait regrettable car cela réduirait son impact alors que notre proposition constitue une véritable avancée pour le droit administratif.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
J’entends dire que l’on ne remet pas en cause le droit au recours. Bien sûr que si ! C’est précisément ce que vous êtes en train de faire, dans ce texte et dans le projet de loi de simplification de la vie économique. Comment éviter les dérives ? Qu’est-ce qui sera considéré comme un recours abusif ?
D’ailleurs, plusieurs articles du projet de loi de simplification de la vie économique prévoient une définition plus stricte de l’intérêt à agir, et l’intérêt à agir de certains est contesté. Le siège social d’une association environnementale, qui défend les enjeux climatiques et la biodiversité, peut être situé à plusieurs centaines de kilomètres du projet concerné par son recours. Pourtant, elle a bien un intérêt légitime à agir !
M. Charles Sitzenstuhl
C’est votre fonds de commerce !
Mme Claire Lejeune
Heureusement que des citoyennes et citoyens se regroupent en associations pour défendre le bien commun et empêcher la bétonisation de toutes nos terres agricoles ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
En outre, dans le projet de loi de simplification de la vie économique, vous élargissez considérablement la notion de projet d’intérêt national majeur pour inclure les data centers et les infrastructures – notamment les projets routiers.
M. Charles Sitzenstuhl
Et alors ? Vous, vous ne voulez rien simplifier !
Mme Claire Lejeune
C’est contre tous ces projets que vous cherchez à limiter les recours ! Vous ne pouvez donc pas prétendre protéger le droit au recours. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS. – Exclamations sur les bancs du groupe EPR.) Au contraire, vous créez des dérogations pour bénéficier de passe-droits, y compris pour des projets écocides, et pour pouvoir construire des autoroutes.
M. Charles Sitzenstuhl
Ah ? Des passe-droits en France ?
Mme Claire Lejeune
Voilà ce que vous êtes en train de faire ! La cohérence entre cette proposition de loi et le projet de loi de simplification de la vie économique est limpide. (Exclamations sur quelques bancs du groupe EPR.) C’est pourquoi nous vous incitons à voter contre cet amendement – et nous sommes trop opposés à l’amendement pour être favorables au sous-amendement, nous espérons que vous le comprendrez, monsieur Pribetich. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Harold Huwart, rapporteur
Il faut accélérer !
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Panifous.
M. Laurent Panifous
Chers collègues, il est dix-sept heures quarante-deux. Je n’ai pas encore pris la parole aujourd’hui. Une fois par an, chacun de nos groupes a l’occasion de présenter son travail lors de sa niche parlementaire. Les députés de notre groupe ont beaucoup travaillé, tout comme leurs collaborateurs. Nous en sommes à six heures de débat sur ce texte. Il est dense et nous savions que son examen prendrait du temps.
Néanmoins, essayons désormais de faire court. Nous avons entendu les positions de chacun par rapport à l’esprit global du texte. Les enjeux et les rapports de force sont désormais clairs. Si chaque intervenant pouvait être concis, notamment lors des explications de vote, cela nous permettrait de défendre d’autres textes importants. Je vous remercie pour votre compréhension afin que nous puissions, un peu, accélérer. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs des groupes SOC et EPR.)
(Le sous-amendement no 158 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 59.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 133
Nombre de suffrages exprimés 130
Majorité absolue 66
Pour l’adoption 104
Contre 26
(L’amendement no 59 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Grégoire, pour soutenir l’amendement no 11.
M. Emmanuel Grégoire
Par cet amendement, je propose une innovation à la fois simple et majeure en matière d’autorisations dans le domaine de l’urbanisme. Il s’agit d’instaurer un droit de réponse à la suite d’un arrêté de refus de permis de construire. Après un tel refus, que se passe-t-il ? Le pétitionnaire peut abandonner le projet, faire un recours administratif ou redéposer l’intégralité du permis de construire, procédure lourde impliquant de redonner de nombreuses pièces.
Je propose d’introduire un nouvel article dans le code de l’urbanisme : en cas d’arrêté de refus de permis de construire, le pétitionnaire disposera d’un mois pour modifier sa demande d’autorisation d’urbanisme. Cela permettrait d’alléger considérablement le travail des services chargés d’instruire le dossier, tout en étant dans l’intérêt de ceux qui déposent des demandes d’autorisation d’urbanisme. Introduire ce droit de réponse profiterait donc à tous. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Sagesse.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
(L’amendement no 11 est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements nos 48, 49, 50 et 51 par le groupe Rassemblement national ; sur les amendements nos 92 et 124, par le groupe Socialistes et apparentés.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos, pour soutenir l’amendement no 48.
M. Frédéric-Pierre Vos
Il s’agit de corriger une injustice entre les constructions édifiées conformément à un permis de construire et les autres. Celles qui sont édifiées sans permis de construire peuvent être régularisées ; si elles ne le sont pas, le code de l’urbanisme prévoit qu’elles soient démolies. Celles qui sont édifiées après obtention d’un permis de construire sont soumises aux dispositions de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, la loi Macron, qui a modifié l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme : cet article ne prévoit pas que les annulations de permis de construire délivrés en zone agricole – la zone A – entraînent la démolition de la construction. En revanche, le code de l’urbanisme dispose que l’on peut procéder à la démolition de constructions à la suite de plaintes et d’une décision du juge, voire du préfet – cela n’entre pas dans le champ d’application de la loi Macron.
Les permis dont il est question ont été demandés, délivrés puis annulés. Les demandeurs peuvent se retrouver dans des situations très complexes dans les zones de montagne, de bord de mer ou plus généralement dans les zones naturelles, notamment si la construction est habitée ou qu’il s’agit d’un local hébergeant une petite entreprise.
Par cet amendement, nous proposons que la commune puisse reprendre la main : si elle vote en faveur du projet, elle pourra mettre en échec la démolition. Cette disposition relève non pas de l’administratif mais du judiciaire, la consultation de la commune pouvant entraîner la mise en échec de la décision de démolition. Soyons bien d’accord : la commune ne sera pas obligée de procéder au vote. Si elle refuse de se prononcer, les mesures judiciaires seront pleinement appliquées.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Je partage votre préoccupation. La commission ne s’étant pas prononcée sur cette disposition, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Nous parlons de décisions de démolition qui seraient prononcées après une annulation d’une autorisation pour excès de pouvoir – si la commune ou l’intercommunalité délivre un permis de construire en commettant une illégalité grave qui viole l’intérêt public.
En outre, le juge judiciaire peut prononcer la démolition d’une construction après annulation du permis seulement si cette construction est située dans une zone à enjeux patrimoniaux ou environnementaux majeurs, comme la bande littorale ou les réserves naturelles.
Dès lors, il ne me semble pas souhaitable de donner à la collectivité qui était généralement compétente pour délivrer l’autorisation annulée la faculté de s’opposer au prononcé de la démolition par le juge. Cela empêcherait de sanctionner les constructions illégales dans des sites à enjeux, qui sont par ailleurs souvent exposés à des risques naturels.
Je souhaite néanmoins travailler sur le sujet, mais il doit faire l’objet d’un approfondissement. C’est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos.
M. Frédéric-Pierre Vos
Si c’est la commune qui a délivré le permis annulé, le pétitionnaire peut intenter un recours indemnitaire contre la commune.
Le but de notre amendement est de préserver des lieux de vie – j’ai connaissance de beaucoup de cas –, tout en épargnant les finances communales. Les permis en question ne sont pas toujours délivrés par de grandes communes, mais par des communes réparties dans des zones naturelles sur tout le territoire, comme vous en avez fait état, madame la ministre. Si le processus d’indemnisation est enclenché, que la démolition va à son terme et que l’action récursoire indemnitaire se répercute sur le patrimoine communal, cela fera des dégâts – cela en fait déjà.
Je répète que cet amendement a pour vertu de donner la main à la commune et au conseil municipal afin d’éviter la démolition. Je ne demande pas d’automaticité : la commune conserve son libre arbitre. Elle peut juger selon ses propres critères, tout en prenant en considération la loi pénale, si elle doit préserver la construction en la sauvant de la démolition – c’est tout. Cela permettra d’éviter des recours indemnitaires brutaux.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 48.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 114
Majorité absolue 58
Pour l’adoption 43
Contre 71
(L’amendement no 48 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos, pour soutenir l’amendement no 49.
Plusieurs députés du groupe LIOT
Défendu !
M. Frédéric-Pierre Vos
Le code de l’urbanisme prévoit que les justiciables peuvent assurer leur propre défense et intenter une action en justice par leurs propres moyens. Depuis le début de nos débats, nous avons une nouvelle fois démontré que le droit de l’urbanisme était devenu extrêmement technique et filandreux. Or on laisse les requérants se débrouiller tous seuls. Cela fait partie d’une tactique : certains recours sont ainsi déclarés irrecevables car le requérant ne s’en sort pas.
Imposer le ministère d’avocat en matière de droit de l’urbanisme aura deux conséquences : cela permettra d’éviter les recours sans queue ni tête évoquant les petits oiseaux ou la chute des arbres,…
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi
Oh là là ! Quel discours caricatural !
M. Frédéric-Pierre Vos
…qui relèvent du droit privé et non du droit de l’urbanisme ; cela participera aussi à la professionnalisation de ce droit devenu extrêmement complexe.
Pour que le dispositif soit complet, il convient de préciser que les services de l’État sont dispensés du ministère d’avocat, comme en matière de recours de plein contentieux.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Pour les mêmes raisons que celles que j’ai exprimées en commission, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 49.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 138
Nombre de suffrages exprimés 128
Majorité absolue 65
Pour l’adoption 36
Contre 92
(L’amendement no 49 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Peio Dufau, pour soutenir l’amendement no 92.
M. Peio Dufau
Arratsalde on, bonsoir !
Par cet amendement, nous souhaitons préserver l’intérêt général. Les projets d’urbanisme font l’objet de nombreux recours. Nous le savons d’expérience : ces recours nous empêchent souvent d’atteindre les objectifs de la loi SRU.
Nous proposons donc d’instaurer un délai de six mois pour l’instruction des recours par le juge lorsque la décision porte sur des projets d’intérêt général – au moins 50 % de logements sociaux. Nous devons construire des logements accessibles. Il n’est pas admissible que nous soyons entravés pendant trois ou quatre ans quand nous essayons de construire ces logements qui sont indispensables aux communes, aux territoires et à l’ensemble de la population.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Sagesse.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Sagesse.
Mme la présidente
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Nous sommes (« Pour ? » sur les bancs du groupe SOC) pour l’amendement – eh oui, cela arrive, quand nous trouvons la cause juste ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe SOC. – M. Emmanuel Grégoire applaudit.)
J’en profite pour préciser que nous n’avons absolument pas cherché à faire durer les débats plus que nécessaire,…
M. Salvatore Castiglione
Allez à l’essentiel alors !
Mme Claire Lejeune
…mais que nous souhaitions creuser les problématiques que vous avez mises sur la table en déposant ce texte. Nous souhaitons nous aussi pouvoir débattre des textes suivants, qui nous paraissent également importants.
J’en viens à cet amendement auquel nous sommes favorables. Nous avons parlé à plusieurs reprises de l’engorgement des tribunaux. Par cet amendement, on donne une priorité aux logements sociaux pour que ces projets puissent voir le jour. Toutefois, nos discussions balaient sous le tapis la cause de ce phénomène – un collègue l’a souligné tout à l’heure, alors qu’il fait partie d’une majorité qui aurait pu redonner des moyens financiers et humains aux tribunaux afin de les désengorger.
Nous vous invitons à voter l’amendement.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 92.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 133
Nombre de suffrages exprimés 88
Majorité absolue 45
Pour l’adoption 70
Contre 18
(L’amendement no 92 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos, pour soutenir l’amendement no 50.
M. Frédéric-Pierre Vos
Il vise à mettre un terme à une pratique administrative récurrente, et souvent abusive, qui consiste à retarder l’instruction des demandes de permis de construire en procédant à des demandes souvent infondées de pièces complémentaires. En qualifiant explicitement ces demandes dilatoires et non prévues par la loi de refus implicites de permis, on permet au justiciable de saisir directement le juge administratif, sans subir une prolongation injustifiée des délais – vous verrez qu’il sera alors possible de faire sortir des logements de terre !
Ce dispositif renforcera la transparence et responsabilisera l’administration en offrant une voie de droit claire contre les pratiques visant à faire volontairement obstacle à la réalisation de projets, souvent pour des raisons idéologiques ou politiques, sous couvert de formalisme.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 50.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 132
Nombre de suffrages exprimés 123
Majorité absolue 62
Pour l’adoption 41
Contre 82
(L’amendement no 50 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos, pour soutenir l’amendement no 51.
M. Frédéric-Pierre Vos
Il vise à renforcer la sécurité juridique des porteurs de projet en matière d’urbanisme, en tirant les conséquences logiques de l’annulation contentieuse d’un refus de permis de construire.
En prévoyant que l’annulation vaut autorisation de construire sur la base du projet initialement déposé, il met un terme à l’insécurité provoquée par certaines pratiques administratives, notamment la substitution de motifs ou l’exigence d’une nouvelle instruction, qui allongent inutilement les délais.
En s’appuyant sur la jurisprudence Lamarche-Jacomet, il est certes possible d’obtenir un permis de construire, mais au prix de six à huit ans de contentieux : la plupart des pétitionnaires abandonnent la procédure en cours de route. Avec le système que nous proposons, l’administration ne pourra plus procéder à la substitution des motifs. Elle pourra toujours refuser un permis, mais elle devra donner les bons motifs, sans les changer en cours de route. On verra alors qui du pétitionnaire ou de la commune aura raison, sur la base du règlement communal.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Harold Huwart, rapporteur
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 51.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 133
Nombre de suffrages exprimés 121
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 39
Contre 82
(L’amendement no 51 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi.
Explications de vote
Mme la présidente
Dans les explications de vote, pour lesquelles je vous invite à la sobriété, la parole est à M. Joël Bruneau.
M. Joël Bruneau (LIOT)
Je vous invite simplement à voter ce texte. Je ne serai pas plus long pour laisser le temps aux débats suivants. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, EPR, Dem et HOR.)
Mme la présidente
Je vous remercie pour ce bel exemple de sobriété. (Sourires.)
La parole est à M. Julien Brugerolles.
M. Julien Brugerolles (GDR)
J’irai vite, moi aussi. Notre groupe était très réservé sur cette proposition de loi dans sa version originale. Les évolutions favorables qui y ont été apportées en séance publique, notamment l’abandon du relèvement du seuil de solarisation obligatoire et l’adoption des amendements de mon collègue Castor concernant la situation très particulière de la Guyane, auraient pu nous conduire à voter en sa faveur. Néanmoins, la multiplication des régimes dérogatoires concernant notamment les entreprises de logistique et de transport ainsi que l’exploitation de carrières adoptée par amendement déséquilibre profondément le texte.
Aussi, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Mme la présidente
Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Frédéric-Pierre Vos.
M. Frédéric-Pierre Vos (RN)
Comme nous l’avons expliqué en ouvrant les débats, le mieux est l’ennemi du bien. Que le législateur reprenne sa place en droit de l’urbanisme est une très bonne chose. Le Conseil d’État y a trop mis son nez, ses membres sont la plupart du temps éloignés des réalités et prennent des décisions hors-sol.
M. Bérenger Cernon
Un peu de respect pour la justice administrative !
M. Frédéric-Pierre Vos
Il faut remettre le droit de l’urbanisme au centre des débats. Le droit de recours est un droit constitutionnellement protégé ; on ne peut pas l’écarter mais on peut amender de façon intelligente – et j’en avais discuté avec le rapporteur – les conditions dans lesquelles peut s’exprimer ce recours, par exemple en obligeant les porteurs de projet à réaliser de mini-enquêtes publiques qui vont déterminer la possibilité ou non d’exercer une voie de recours. On pourra ainsi déminer intelligemment tout ce qui peut paralyser l’action des riverains contre un projet souvent mal compris et souvent mal ficelé.
En revanche, ce à côté de quoi est passée l’Assemblée aujourd’hui, c’est le travail de nettoyage nécessaire du contenu des PLU et des normes d’orientation et de programmation. Si l’on veut avancer, ce n’est pas en trimbalant des monstres juridiques obèses, auxquels les élus qui délibèrent dans les syndicats de communes ou les collectivités territoriales ne comprennent pas forcément grand-chose. Ils sont dans les mains des bureaux d’études, qui écrivent et qui peignent dans ces documents ce qu’ils veulent.
Notre groupe souhaiterait également que le gouvernement travaille intelligemment sur le retour à la dérogation-anticipation. La dérogation-anticipation a été abandonnée à la fin des années 1980, alors que c’est grâce à elle que la France avait pu se rebâtir dans les années 1960 et les années 1970. Dans le cadre de la dérogation-anticipation, c’est la réglementation qui s’adapte au projet et non le contraire. Si nous avons des projets qui échouent, c’est parce que le cadre, souvent trop strict, des normes d’urbanisme adoptées par les conseils municipaux ou les intercommunalités constitue souvent un frein au développement et à la réalisation d’opérations de logement. La plupart du temps, les collectivités sont leurs propres bourreaux ! Mettez-vous bien ça dans la tête, c’est le seul moyen d’avancer.
Mme la présidente
La parole est à Mme Anaïs Belouassa-Cherifi.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi (LFI-NFP)
Depuis le début de l’examen de ce texte, nous sommes abasourdis par le manque de vision susceptible de sous-tendre une vraie politique structurelle du logement. Nous avons examiné une proposition de loi qui était censée simplifier l’urbanisme ; à la place, on sacrifie le droit au logement car les gouvernements successifs n’ont pas su mener des politiques ambitieuses.
L’article 2 de la proposition de loi, sur les résidences hôtelières à vocation sociale, est gravissime. Vous assumez de remplacer une population par une autre et de hiérarchiser les vulnérabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Où iront désormais les personnes qui avaient vocation à séjourner dans ces établissements, monsieur le rapporteur ? Voulez-vous que je vous rappelle les chiffres du mal-logement et du sans-abrisme ? On compte 4 millions de personnes mal logées et 300 000 sans abri !
Il est question d’envoyer des travailleurs dans certaines zones en vue de les réindustrialiser. Mais, pour aller jusqu’au bout de la revitalisation des bassins d’emploi, il faut que ceux qui y travaillent y résident et il faut donc prévoir des logements. Alors, au lieu de niveler les droits par le bas, au lieu de s’attaquer aux résidences hôtelières à vocation sociale, pourquoi ne pas prioriser la construction de logements à proximité de ces lieux de réindustrialisation ? (Mêmes mouvements.)
J’aimerais revenir sur un de vos propos, monsieur le rapporteur. Vous avez dit qu’il y avait en France beaucoup de logements vacants. Présentez-moi ces logements vacants car je pense que les 3 millions de ménages qui sont en attente d’un logement social seraient ravis de les voir !
Votre proposition sur les résidences d’hébergement à vocation sociale va ouvrir une brèche dangereuse dans un contexte de fort manque de places d’hébergement d’urgence et de logements transitoires. Le logement est le point de départ de tout. Avoir un toit, c’est se stabiliser pour construire ou reconstruire sa vie ; au lieu de ça, vous dépossédez tous ces gens.
Madame la ministre, je m’étonne que vous vous associiez à cette funeste proposition de loi, alors que vous me certifiiez il y a quelques mois que le gouvernement était engagé contre la crise du logement. J’observe malheureusement le contraire. (Mêmes mouvements.)
Enfin, que dire des nombreuses dérogations prévues dans ce texte ? Concernant les documents d’urbanisme par exemple, la réduction du champ d’application des PLU nous inquiète profondément. Cette réduction a des conséquences sur l’aménagement et sur l’organisation de nos territoires. Elle risque de conduire à des décisions moins démocratiques et moins transparentes en matière d’urbanisme.
Madame la ministre, je vous reconnais toutefois d’être restée lucide sur un point : la solarisation et la végétalisation des bâtiments, qui jouent un rôle essentiel dans la transition écologique. Vous semblez pourtant avoir oublié que, dans le dernier budget, vous avez considérablement réduit les moyens alloués aux collectivités territoriales pour assurer la transition écologique. (Mêmes mouvements.) Nous vous demandons donc de mettre en cohérence vos discours et vos actes, et de dégager les moyens nécessaires pour financer la transition écologique dans l’ensemble du territoire.
Vous l’aurez compris, La France insoumise est opposée à cette proposition de loi, et nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Pribetich.
M. Pierre Pribetich (SOC)
Cette proposition de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement est une première étape. Des engagements ont été pris pour qu’elle ne soit pas qu’une simple succession de dérogations et que le travail parlementaire, avec la navette vers le Sénat, améliore encore sa qualité.
C’est la première étape d’une longue marche…
M. Matthias Tavel
Tiens ? Il est mao ! (Sourires.)
M. Pierre Pribetich
…pour refonder enfin le code de l’urbanisme vers un aménagement durable de notre espace, vers un urbanisme de projets qui se substitue à un urbanisme de normes et où la démocratie participative trouve enfin sa place, afin de fixer des objectifs discutés et concertés avec la population.
Le groupe Socialistes et apparentés, qui n’oublie pas l’outre-mer, fait le pari de l’intelligence : nous voterons pour la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Jeanbrun.
M. Vincent Jeanbrun (DR)
Je tenais d’abord à saluer Mme la ministre, pour l’impulsion nouvelle qu’elle a donnée au monde du logement, et M. le rapporteur, pour son écoute et son travail.
Le groupe Droite républicaine est satisfait que ce texte apporte un début de réponse à la crise du logement que connaît notre pays. Nous nous réjouissons également de l’adoption de l’amendement défendu par notre groupe, visant à élargir l’usage des résidences hôtelières à vocation sociale aux besoins d’hébergement temporaires liés au développement économique des territoires.
Ce texte met fin à une logique de blocage mortifère et nous espérons qu’il contribuera à relancer la construction de logements dans notre pays. Nous voterons évidemment pour.
Mme la présidente
La parole est à Mme Julie Ozenne.
Mme Julie Ozenne (EcoS)
La simplification ne doit pas devenir un permis de déréguler. Or ce texte instaure un urbanisme d’exception, fait de dérogations permanentes, qui transforment les maires en exécutants et les habitants en spectateurs. Il répond aux pressions répétées des lobbys de l’immobilier, des grandes entreprises extractives et des opérateurs industriels, au détriment des exigences démographiques, climatiques et sociales, qui devraient pourtant guider toute politique d’aménagement du territoire.
Dans ce marasme, la tentative de détricotage de l’article 40 de la loi Aper, sur la solarisation des parkings, a été neutralisée de justesse.
Ce matin, nous avions cru avoir remporté une victoire en repoussant l’inversion de la hiérarchie des normes d’urbanisme, qui avait placé les schémas des carrières au-dessus des documents de planification territoriale ; mais c’était sans compter sur le retour en force du lobby extractiviste, qui a réussi à faire basculer le vote cet après-midi.
Le bilan global reste accablant. Ce texte ne propose pas de réponse à la crise du logement. Il institutionnalise l’urgence permanente comme une méthode de gouvernement. Il délégitime les outils de planification et il affaiblit la démocratie locale.
Nous défendons, nous, écologistes, une autre voie : la sobriété foncière en sanctuarisant les terres agricoles ; la justice sociale, avec un investissement massif dans le logement social et la suppression de la ponction de 1,3 milliard d’euros sur les bailleurs ; une grande loi pour le logement, le droit au logement, avec la construction de 200 000 logements publics écologiques par an, l’encadrement des loyers et l’abrogation de la loi Kasbarian de 2023, visant à protéger les logements contre l’occupation illicite ; la démocratie territoriale en soutenant les collectivités plutôt qu’en les court-circuitant ; l’écologie, avec des bâtiments qui produisent plus qu’ils ne consomment.
Nous votons résolument contre cette proposition de loi. (Mme Karine Lebon applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson (Dem)
Le groupe Modem se prononcera en faveur de cette évolution du droit de l’urbanisme, qui entend répondre à la crise du logement exceptionnelle que nous traversons. Ce texte ne pourra pas tout résoudre mais il lèvera les multiples barrières qui se sont érigées au fil des ans et sont autant de lourdeurs administratives qui nous ont conduits à la pénurie de logements. (M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Cazeneuve.
M. Pierre Cazeneuve (EPR)
Je tiens à remercier Mme la ministre pour la qualité de ses réponses et l’impulsion qu’elle a donnée à ce texte, et à saluer la capacité de dialogue du rapporteur – je pense en particulier à l’intelligence avec laquelle il a su revoir ses positions sur la végétalisation et la solarisation des toitures. Le groupe Ensemble pour la République l’en remercie et votera pour cette proposition de loi, qui répond, en tenant compte de la complexité des différents sujets, aux aspirations de simplification dans un domaine, le logement, qui en a grandement besoin et dans lequel nous devons, ensemble, nous impliquer encore davantage. (M. Sylvain Maillard applaudit.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 149
Nombre de suffrages exprimés 147
Majorité absolue 74
Pour l’adoption 119
Contre 28
(La proposition de loi est adoptée.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et DR ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
2. Lutte contre la mortalité infantile
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Paul-André Colombani et plusieurs de ses collègues visant à lutter contre la mortalité infantile (nos 1237, 1373).
Présentation
Mme la présidente
La parole est à M. Paul-André Colombani, rapporteur de la commission des affaires sociales.
M. Paul-André Colombani, rapporteur de la commission des affaires sociales
L’an dernier en France, 2 700 enfants de moins d’un an sont morts. Derrière ce chiffre terrible, il y a des drames humains, des familles brisées, des interrogations sans réponse. Il témoigne d’un constat partagé : la mortalité néonatale a augmenté ces dernières années pour atteindre le niveau inquiétant de 4,1 ‰, à contre-courant de l’évolution observée dans la majorité des pays européens.
La dégradation de cet indicateur est un signal d’alerte majeur ; elle nous amène à nous interroger sur l’état de santé de la population. Mais elle n’est pas une fatalité.
Le texte que je vous soumets propose d’agir avec lucidité, responsabilité et efficacité. Il repose sur trois piliers, des actions concrètes qui visent le même objectif : réduire la mortalité infantile en renforçant la connaissance de ses causes, en améliorant l’accès aux soins et en garantissant la sécurité des prises en charge.
L’article 1er prévoit la création d’un registre national des naissances, qui fonctionnera dès le 1er janvier 2026. Aujourd’hui, les données de santé périnatale, morcelées, parfois incomplètes, ne permettent pas un suivi fin, réactif et territorialement précis des problèmes. La création de ce registre, comme il en existe dans de nombreux pays, permettra de mieux comprendre les causes des décès néonatals et d’ajuster les politiques de prévention en temps réel. C’est un outil au service de la connaissance, de la transparence et de l’action publique.
Un consensus s’est dégagé au cours des auditions et des débats en commission : les professionnels sont prêts, les données existent, il ne manque que le chaînage et un fondement législatif clair. C’est précisément ce que propose cet article.
L’article 2 prévoyait d’instaurer un moratoire de trois ans sur les fermetures des petites maternités accueillant moins de 300 accouchements par an, et de procéder à un état des lieux, territoire par territoire, pour déterminer précisément leurs besoins.
Cet article a été considérablement amoindri en commission. Si la question de l’audit n’a pas fait débat, le principe d’un moratoire pour les petites maternités a été remplacé par une simple évaluation préalable. Je le déplore.
Aussi ai-je déposé un amendement de rétablissement de ce moratoire, et ce pour deux raisons.
Les petites maternités jouent un rôle crucial dans de nombreux territoires, en particulier les plus isolés. Il n’est pas acceptable d’éloigner les femmes de leurs lieux d’accouchement, c’est pourquoi nous devons garantir la pérennité de ces établissements.
Avant même que nous ayons le débat, je veux lever les inquiétudes : ce moratoire n’est pas une sanctuarisation systématique. Si une maternité est dangereuse pour la sécurité des mères et des enfants, sa fermeture s’imposera. Il faut impérativement sortir d’une logique dogmatique qui pourrait prévaloir dans un sens où dans l’autre : notre seule boussole doit être la santé des mères et des enfants.
L’article 3, quant à lui, rend obligatoire la formation aux gestes d’urgence obstétrique dans toutes les maternités. Les retours d’expérience, les signalements d’incident et les rapports d’expertise montrent qu’en cas de complication obstétricale, chaque minute compte. La formation continue, pluridisciplinaire et adaptée aux pratiques de terrain est une exigence de sécurité et de bon sens.
Certaines maternités ont déjà instauré ces formations, avec succès. Il est temps de les généraliser, de les rendre systématiques et d’assurer les moyens nécessaires à leur déploiement.
Ce texte n’a pas la prétention de tout résoudre – la lutte contre la mortalité infantile appelle une action plus large, qui englobe le combat contre la précarité, le suivi social, la prévention, le soutien à la parentalité et, bien sûr, la santé des femmes. Mais il permet de renforcer un levier structurant, à la croisée de l’accès aux soins, de leur organisation territoriale et de la qualité des prises en charge périnatales.
Je veux saluer l’engagement des soignants, des sages-femmes, des urgentistes et des pédiatres, qui se battent pour garantir la sécurité des naissances, parfois dans des conditions très difficiles.
Je souhaite également remercier les collègues de tous bancs qui ont manifesté leur intérêt pour ce texte, et qui partagent la conviction que ce combat doit nous rassembler au-delà des clivages.
En vous invitant à soutenir cette proposition de loi, je vous propose d’envoyer un signal fort, responsable et utile, dans l’intérêt des enfants à naître, de leurs parents et des professionnels qui les accompagnent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins
Investir dans la santé des enfants est un impératif fort, car elle reflète l’état général d’une société, et annonce celui de la société à venir. À ce titre, je vous remercie, monsieur le député, d’avoir inscrit à l’ordre du jour le sujet, central, de la santé périnatale, que vous avez choisi d’aborder à travers le prisme de la mortalité néonatale et infantile.
En tant que ministre de la santé, mais aussi en tant que médecin, c’est un sujet auquel je prête la plus grande attention, et que je suis de près.
Ces dernières années, différentes études ont montré une évolution préoccupante de certains indicateurs de la santé périnatale. Un engagement national fort est nécessaire afin de mieux comprendre les causes des décès et d’identifier des leviers d’amélioration des organisations et des pratiques.
Les parlementaires se sont largement saisis de ce sujet, de manière transpartisane, en produisant de nombreux travaux de fond et de grande qualité, comme en témoigne cette proposition de loi. Je pense au rapport d’information des sénatrices Annick Jacquemet et Véronique Guillotin sur « L’avenir de la santé périnatale et de son organisation territoriale », présenté en septembre 2024, et à la mission flash sur la mortalité infantile des députés Anne Bergantz et Philippe Juvin, menée en décembre 2023, qui a inspiré certaines dispositions de ce texte.
Comme le soulignent ces travaux et les études récentes menées sur le sujet, il faut agir contre la mortalité néonatale et infantile de façon très globale.
Bien sûr, l’absence de baisse de la mortalité infantile, voire sa légère hausse constatée ces dernières années, doit appeler une réaction. Mais un chiffre ou un taux, lancé parfois un peu vite dans le débat public et médiatique, peut masquer des réalités complexes et des facteurs multiples. Il convient de les appréhender avec recul.
Le recul de l’âge moyen des primipares, l’accroissement du nombre des grossesses multiples, l’âge extrême de certaines parturientes sont des facteurs démographiques à prendre en compte. Les facteurs socio-économiques, notamment la situation précaire où se trouve la mère, jouent aussi. Enfin, les progrès de la médecine ont entraîné une hausse du nombre d’enfants nés grands prématurés, qui autrefois n’auraient pas survécu et auraient été considérés comme mort-nés ou comme fœtus non viables, à la suite d’une fausse couche.
Cela se traduit par des changements réglementaires ou statistiques, par une évolution dans la manière dont nous appréhendons les chiffres de la mortalité infantile.
L’offre de santé obstétrique et périnatale est un élément majeur qui doit être pris en compte dans toute sa complexité. Le fait de résider loin d’une maternité peut augmenter le risque de mortalité néonatale, tout comme le fait d’accoucher dans une structure de niveau 1, si des complications surviennent.
Si je suis revenu, de manière non-exhaustive, sur les facteurs qui peuvent expliquer la hausse de la mortalité infantile, ce n’est pas pour me défausser ou pour diluer nos responsabilités. C’est au contraire pour mieux affirmer la nécessité d’une action forte, globale et coordonnée, qui agisse sur toutes ces facettes.
Je ne peux donc que souscrire aux dispositions de cette proposition de loi.
Elle vise à nous doter d’outils pour mieux objectiver les causes multiples de la mortalité infantile. L’article 1er concrétise la volonté clairement exprimée par le ministère de la santé de créer un registre de la santé maternelle et infantile, afin de répondre aux enjeux de santé périnatale en France et de comprendre les évolutions de la mortalité infantile. Le chantier est en cours : en témoigne l’amendement no 52 du gouvernement, élaboré avec la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).
Ce projet de registre figurait parmi les recommandations de la mission flash sur la mortalité infantile et parmi les propositions du rapport thématique de la Cour des comptes, publié en 2024.
En cohérence avec mon souci que chaque situation locale soit évaluée en fonction des réalités du terrain, je souscris à votre proposition de dresser un état des lieux des maternités pratiquant moins de 300 accouchements par an. Je suivrai, en lien direct avec les agences régionales de santé (ARS), l’avancée de ces travaux et les remontées du terrain.
Suite à l’adoption d’un amendement en commission, l’article 2 prévoit que le rapport que le gouvernement remettra au parlement formulera des propositions de révision des décrets relatifs à la périnatalité. Cela rejoint notre volonté de rouvrir ces travaux, puisque les décrets, publiés en 1998, fêtent leur 27e anniversaire. Ce sera l’occasion de prévoir une articulation avec les dispositions, adoptées en janvier, instaurant des ratios de soignants par patient hospitalisé.
Le ministère de la santé est mobilisé pour que les déterminants de la mortalité infantile soient mieux compris et que l’offre de santé obstétrique et périnatale soit confortée sur tout le territoire. Le ministère de la santé n’a pas pour objectif de fermer des établissements de santé, pas plus qu’il ne conduit une politique de fermeture de services de maternité ! La seule boussole qui me guide, c’est que les femmes, partout en France, puissent être suivies et accoucher dans les meilleures conditions.
Le ministère et les ARS devront définir, avec les professionnels de terrain et les élus locaux, une réponse aux besoins de santé, en fonction de chaque situation, qui satisfasse à l’exigence absolue de qualité et de sécurité des soins et qui prenne en considération les attentes des femmes.
La loi, je le rappelle, prévoit que les suspensions ou les retraits d’autorisation ne sont décidés qu’en cas de manquement important aux lois et règlements pris en faveur de la protection de la santé publique et de la continuité des soins. En dehors de ces situations de danger potentiel pour les patients, les ARS ne peuvent pas retirer une autorisation. Les fermetures sont actées si et seulement si la sécurité des femmes et des nouveau-nés ne peut plus être garantie. C’est un principe ferme, sur lequel je ne transigerai pas.
Vous l’aurez compris, la situation des établissements de santé de proximité, notamment des petites maternités situées en zone rurale, fait l’objet d’une attention toute particulière du ministère de la santé. Toutefois, la lutte contre la mortalité infantile doit passer par une action de santé publique globale et coordonnée, notamment en faveur de la prévention, qui est au centre de mes engagements et de mon action. Au cours des derniers mois, j’ai tenu à renforcer certaines de nos actions de santé publique à destination des tout-petits.
La stratégie vaccinale contre les différentes souches de méningocoques a été intensifiée. Le pic de méningites invasives observé cette année nous a rappelé, hélas, combien ces infections étaient graves. Depuis janvier, la vaccination contre les infections à méningocoques de type ABWY est obligatoire pour tous les nourrissons de moins de 1 an – seule la vaccination contre le type C était jusqu’ici obligatoire ; elle est désormais obligatoire pour tous les enfants de moins de 2 ans – seule la vaccination contre le type B était recommandée.
Le programme national de dépistage néonatal comprend désormais trois nouvelles pathologies, dont l’amyotrophie spinale (SMA), ce qui porte à quinze le nombre de maladies graves détectées dès les premiers jours de la vie. Ce sont autant de séquelles, de complications, de handicaps et de décès qui pourront ainsi être évités.
Le temps me manque pour citer toutes les actions que nous menons en la matière, notamment dans le cadre de la stratégie des 1 000 premiers jours, laquelle implique tous les acteurs, les parents, les institutions, la protection maternelle et infantile (PMI) et les différents professionnels de santé. Elle prévoit également des actions ciblées à destination des populations plus fragiles ou précaires.
Je mène une action résolue en faveur de la formation – il s’agit de former plus et mieux, en fonction des besoins du terrain. Cela permettra de conforter l’offre de santé obstétrique et périnatale dans les territoires, un objectif que nous partageons. Vous avez souhaité introduire, monsieur le rapporteur, une disposition relative à la formation continue, un enjeu auquel j’attache une attention particulière.
Le pacte de lutte contre les déserts médicaux, que je défends avec le premier ministre, comprend des mesures fortes de solidarité entre les professionnels et entre les territoires. Celles-ci visent aussi à améliorer le suivi et le parcours de soins des femmes et des enfants, du début de la grossesse aux premières années de vie.
La santé des tout-petits, le drame que représente le décès d’un nouveau-né touchent au fondement même de mon engagement en tant que médecin et ministre de la santé. La dégradation des indicateurs doit nous pousser à mieux comprendre encore les causes de ce phénomène, qui inquiète légitimement nos concitoyens.
Il s’agit de mieux comprendre pour mieux agir dans les territoires, par des actions ciblées, le « aller vers », la prévention, la formation, les progrès de la science, par la lutte résolue contre les déserts médicaux. Toutes les parturientes, tous les bébés et tous les enfants doivent pouvoir accéder aux soins.
Pour y parvenir, vous pouvez compter sur mon engagement sans faille. Nous avons une obligation de résultat à l’égard de la prochaine génération et ce, dès aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et DR. – M. Elie Califer applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Panifous.
M. Laurent Panifous
4,1 décès pour 1 000 naissances vivantes, ce chiffre devrait nous alerter sur un échec collectif majeur. En 2024, 2 800 enfants sont morts avant de fêter leur premier anniversaire. Ces données statistiques cachent des histoires interrompues, des parents endeuillés, l’attente joyeuse d’un enfant devenue drame silencieux.
Le nombre de ces drames augmente. La France, qui enregistrait les chiffres les moins élevés il y a trente ans en matière de mortalité infantile, se retrouve en bas du classement européen. Pire, on est incapables de déterminer les causes exactes de ce phénomène – il y a consensus pour dire que la création d’un registre national des naissances est, en ce sens, prioritaire.
Bien sûr, il y a des hypothèses, plus ou moins documentées : augmentation du nombre d’enfants nés prématurés, importance des facteurs environnementaux, insuffisamment traités, état de la protection maternelle infantile, en sous-investissement chronique alors que son rôle de prévention et de suivi des publics fragiles devrait être une priorité. Ces éléments doivent être abordés dans le cadre d’une politique globale, à destination des mères et des nouveau-nés.
Mme Marie-Charlotte Garin
Tout à fait !
M. Laurent Panifous
Les facteurs qui agissent sur la santé des mères et des enfants opèrent aussi dans les autres pays européens. Et pourtant, ceux-ci ne connaissent pas une telle augmentation des taux de mortalité infantile. Pourquoi cette exception française ?
Il est très plausible que l’organisation des soins constitue un facteur de risque important, que derrière la montée de la mortalité infantile, il y ait l’éloignement des maternités, le manque de personnel formé, l’épuisement des équipes soignantes. Combien parmi nous se sont battus pour éviter la fermeture d’une maternité sur leur territoire ? (Plusieurs députés lèvent la main.) Nous sommes nombreux à savoir que ces maternités survivent grâce à une dérogation au seuil de 300 accouchements par an, une épée de Damoclès qui les empêche de se projeter à long terme et de bâtir un projet collectif. Il arrive que des parents, dans le doute, choisissent de se tourner vers des maternités plus éloignées, en dépit des risques encourus.
Nous ne devons pas nous résigner à ce mouvement continu de regroupements et de fermetures, qui va à l’encontre des réalités territoriales – ce serait prendre le risque qu’il soit un jour impossible d’accoucher dans son propre département !
En proposant un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, nous n’opposons pas proximité et sécurité. Nous cherchons au contraire à concilier les deux, dans un objectif d’égalité territoriale.
Mme Marie-Charlotte Garin
Bravo !
M. Laurent Panifous
J’avoue ne pas comprendre que la commission soit revenue sur cette disposition. Le moratoire n’est pas un statu quo, mais un objectif que nous nous fixons collectivement. Il s’agit d’évaluer la situation de chacune des maternités qui pratiquent 300 accouchements par an et dont la pérennité est régulièrement menacée.
Notre groupe appelle à en finir avec les logiques de seuil et de normes à l’échelle nationale. Il faut que nous prenions en considération les spécificités géographiques et territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et GDR. – Mme Sophie Mette applaudit également.)
M. Michel Castellani
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à Mme Karine Lebon.
Mme Karine Lebon
Il y a des sujets que la République ne peut plus regarder de loin, des réalités trop lourdes pour être reléguées au silence administratif ou aux marges du débat politique. La mortalité infantile en fait partie. Parce qu’elle dit tout d’un pays, de ce qu’il protège, de ce qu’il abandonne, de celles et ceux qu’il choisit, ou non, de défendre.
Aujourd’hui, dans notre pays, des enfants naissent qui ne vivront pas. Trop souvent, ce sont les mêmes : ceux dont les mères vivent dans la précarité, ceux qui naissent loin des centres de soins, dans les quartiers délaissés ou les territoires ultramarins ignorés, ceux qui n’ont, dès la première seconde, pas les mêmes chances que les autres. Et que faisons-nous ? Nous comptons, nous classons, nous relativisons, mais nous ne répondons pas. Nous ne sommes pas à la hauteur de l’urgence.
Ce texte, ce n’est pas seulement un outil législatif. C’est une alerte, un sursaut, un cri politique pour remettre la vie – toute vie – au cœur de nos priorités. Frantz Fanon a écrit : « Quand je me bats, je me bats pour un enfant, une femme, un homme qu’on assassine quotidiennement dans les coins du monde. » Combattre la mortalité infantile, c’est exactement cela : une lutte contre l’injustice la plus brutale, celle d’une vie qu’on n’a même pas laissée commencer.
Oui, en 2024, en France, 1 enfant sur 250 n’atteint pas son premier anniversaire. Dans les outre-mer, les chiffres doublent, parfois triplent. À La Réunion, on dit zanfan i plèr pa i giny pa tété – l’enfant qui ne pleure pas n’a pas de lait. Faut-il donc crier pour être entendu ? Faut-il supplier pour que nos enfants aient le droit de vivre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme Marie-Charlotte Garin
Bravo !
Mme Karine Lebon
Derrière ces chiffres, ce sont des silences déchirants, des deuils qui n’en finissent pas, des familles brisées, des mères abandonnées dans leur douleur.
L’inégalité territoriale que j’évoque est d’abord une inégalité sociale. Dans les outre-mer, la précarité est une des premières causes de mortalité infantile. Ce ne sont pas des statistiques. Ce sont des histoires, ce sont des vies. C’est cette mère de famille enceinte de sept mois, seule à tout gérer, sans aide ; c’est cette jeune femme enceinte, debout huit heures par jour sur une chaîne de production ; c’est cette adolescente enceinte, battue par son conjoint ; c’est cette femme enceinte, mal logée, vivant dans l’humidité et les moisissures. Ces réalités-là sont connues. Elles sont documentées, mais elles restent ignorées.
À La Réunion, 9 % des grossesses présentent un retard de croissance intra-utérin, 52 % des femmes enceintes sont anémiées, contre un quart seulement dans l’Hexagone, un bébé sur cinq vient au monde avec un poids inférieur à la normale. Ces chiffres ne sont pas une fatalité, ils sont les preuves d’une faillite – la nôtre.
Ces enfants commencent leur vie avec un désavantage et leurs mères, souvent isolées, précaires et confrontées à des conditions de logement indignes ou à des violences, portent seules un fardeau que notre système devrait aider à alléger.
La France, jadis classée 7e pays de l’OCDE à la mortalité infantile la plus basse, est tombée au 27e rang.
Mme Marie-Charlotte Garin
La honte !
Mme Karine Lebon
Depuis 2014, il n’y a eu aucun progrès ! Ce n’est pas seulement inacceptable, c’est indécent !
La proposition de loi que nous examinons est donc une étape nécessaire. Elle tend à créer un registre national des naissances, pour que les données ne soient plus de simples constats mais qu’elles deviennent des leviers d’action. Elle impose des critères rigoureux à toute fermeture de maternité. Elle prévoit la formation continue aux gestes d’urgence obstétrique.
Mais nous devons aller plus loin. Le moratoire sur les fermetures de maternité, initialement prévu, doit revenir dans le texte. Car fermer une maternité, ce n’est pas réorganiser, c’est prendre le risque de laisser une femme accoucher loin, seule, sans recours. Dans certains cas, c’est précipiter la tragédie.
Parce que pendant qu’on tergiverse dans les couloirs ministériels, des maternités ferment, des déserts médicaux se créent et des femmes accouchent seules, loin de tout, parfois dans la détresse, parfois dans le drame ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et EcoS. – Mme Zahia Hamdane applaudit également.)
On ne rationalise pas des vies. On ne comptabilise pas des nouveau-nés dans la colonne des charges. Ce que nous défendons ici, ce n’est pas une revendication de confort, c’est un impératif de justice. Le groupe GDR votera cette proposition de loi. Nous défendrons les amendements qui visent à sanctuariser les maternités, mais notre combat va plus loin.
Nous continuerons à affirmer haut et fort que chaque enfant, où qu’il naisse, doit avoir les mêmes chances de vivre, de grandir et de s’épanouir. Et cela doit se traduire par des actes forts, des politiques courageuses et des décisions à la hauteur de l’urgence.
C’est cela, la justice sociale. C’est cela, l’égalité réelle. C’est cela, le devoir d’une République qui se veut grande ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP et EcoS. – M. Elie Califer applaudit également.)
Mme Marie-Charlotte Garin
Bravo !
M. Jean-Victor Castor
Excellent !
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Ricourt Vaginay.
Mme Sophie Ricourt Vaginay
Il est des chiffres qui ne sont pas que des statistiques. Ceux de la mortalité infantile en font partie. La mortalité infantile progresse depuis plus de dix ans en France et vient troubler nos consciences. Non pas parce qu’elle surprend, mais parce qu’elle déshonore.
Parce qu’elle trahit l’abandon discret d’un devoir fondamental, celui de protéger les commencements. Pour chaque point supplémentaire de mortalité néonatale, ce sont des promesses de vie qui s’éteignent.
Depuis 2012, la France connaît un recul silencieux, mais implacable : la mortalité infantile y est repartie à la hausse, alors qu’elle ne cessait de diminuer depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Notre pays, autrefois fer de lance de la protection néonatale, se classe 22e dans l’Union européenne. Son rang est indigne d’un système de santé que nous prétendons universel, égalitaire et protecteur – le meilleur du monde !
Ce constat n’est pas sujet à polémique puisqu’il est établi, documenté et accepté par l’Insee, la Cour des comptes et les professionnels de terrain. Il est, surtout, le reflet d’un affaissement collectif.
Ce recul est multifactoriel, mais n’a rien d’inéluctable. Il y a d’abord la désorganisation profonde de la filière périnatale, avec des maternités fermées les unes après les autres : on en comptait 1 369 en 1975, on n’en recense plus que 464 aujourd’hui.
Il y a les temps déraisonnables d’accès aux soins, qui dépassent les trente minutes pour près de 900 000 femmes. Il y a le manque de personnel formé, l’épuisement des équipes, l’éloignement des plateaux techniques. Il y a aussi l’absence criante de pilotage national, soulignée par la Cour des comptes, les ARS et les professionnels de santé eux-mêmes.
À ces facteurs s’ajoutent des réalités complexes, que le débat public a trop souvent tendance à contourner, alors qu’elles mériteraient d’être considérées avec lucidité, mais aussi avec beaucoup de bienveillance.
D’abord, la sociologie et la démographie des naissances évoluent : en dix ans, la proportion de nouveau-nés dont la mère est née à l’étranger est passée de 19,5 % à 23,6 %. Ce constat n’est ni un jugement ni une dénonciation, mais un fait statistique établi par l’Insee.
Ensuite, les parturientes ont vieilli : dans un cas sur quatre, la femme qui accouche est âgée de plus de 35 ans. Ce phénomène, répandu dans les sociétés occidentales, entraîne mécaniquement un risque accru de prématurité et de complications.
Enfin, l’intégration dans les statistiques nationales de territoires ultramarins, notamment ceux dont la natalité est très élevée et l’offre de soins insuffisamment structurée, pèse aujourd’hui sur les indicateurs globaux.
Il ne s’agit pas ici de pointer du doigt ou de construire des oppositions stériles entre territoires ou catégories sociales, mais au contraire de mieux les prendre en compte.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui offre trois leviers : la création d’un registre national des naissances, pour enfin disposer d’indicateurs fiables et consolidés ; un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, mesure pragmatique et attendue dans les territoires ; une formation continue obligatoire aux gestes d’urgence obstétrique, indispensable face à la baisse d’expertise dans les petites structures.
Ces dispositions répondent à des constats partagés et nous les saluons, mais d’importants angles morts persistent. D’abord, il n’y a pas de stratégie spécifique aux territoires d’outre-mer, qui concentrent pourtant une part significative des fragilités sanitaires, sociales et structurelles évoquées.
Ensuite, le texte n’aborde pas la prévention à destination des mères les plus vulnérables, alors que nous savons que leur précarité, leur isolement ou les risques médicaux ou sociaux auxquels elles sont exposées constituent des facteurs directs de la mortalité infantile.
Enfin, il manque une vision plus large et plus ambitieuse, celle d’une véritable souveraineté démographique. Soutenir la natalité dans les zones rurales, garantir un maillage territorial en matière, de périnatalité, reconnaître la naissance comme un acte fondateur du lien national : voilà des priorités qui dépassent le seul enjeu sanitaire.
Une République qui laisse mourir ses enfants plus qu’avant est une République qui s’affaisse. La proposition de loi offre une réponse utile et nous la voterons, mais elle n’est qu’un frémissement alors que nous appelons à un sursaut.
La mortalité infantile n’est pas un sujet technique : c’est le reflet de notre capacité collective à transmettre, à protéger, à faire Nation.
Nous demandons donc une loi plus large, plus lucide et plus ambitieuse. Une loi qui assume de redonner sa place à la famille, qui protège les mères et les soignants, qui tienne compte des réalités sociales sans les contourner et qui refonde le pacte périnatal français à l’échelle de tous les territoires.
Ce que nous défendons, c’est la promesse républicaine que toute vie qui commence en France a ses chances. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Serge Muller.
M. Serge Muller
En 2024 en France, 2 700 nourrissons sont décédés avant leur premier anniversaire. Le taux de mortalité infantile est passé de 3,5 à 4,1 décès pour 1 000 enfants nés vivants entre 2011 et 2024. Dans un pays comme la France, héritier d’une grande tradition de médecine publique, cette dérive est une humiliation. Elle révèle l’impuissance d’un État qui, au lieu de protéger les plus fragiles, les abandonne aux conséquences de son propre renoncement.
Derrière ces chiffres, ce sont des drames familiaux à répétition, des vies brisées dès l’origine, une réalité sanitaire que la République ne peut plus ignorer. La mort d’un nourrisson dans notre pays ne devrait jamais être banalisée. Elle dit le recul de la solidarité national et le recul de la protection sociale réelle.
Selon l’Institut national des études démographiques (Ined), la France se situe aujourd’hui au 23e rang européen en matière de mortalité infantile. C’est très grave.
Ce déclassement, profond et durable, traduit non seulement des failles dans la prévention, mais aussi des inégalités criantes d’accès aux soins en France. Ce déclassement, disons-le clairement, est aussi celui d’un modèle : celui d’un État qui a abandonné la maîtrise de son territoire, désorganisé ses services publics et qui refuse de nommer les causes réelles des fractures sanitaires.
Ce n’est pas la faute d’un système de santé mal financé, mais c’est bien celle d’une organisation devenue inégalitaire et déséquilibrée. Ce déclassement est d’autant plus préoccupant qu’il n’épargne aucun territoire et frappe avec une violence particulière les plus fragiles d’entre eux.
Je pense ici à Mayotte, où le taux de mortalité infantile dépasse le seuil alarmant de 9 décès pour 1 000 naissances vivantes. Ce taux n’est pas celui d’un pays développé, mais celui de certains pays en voie de développement. Il reflète une situation sanitaire hors de contrôle, liée aussi à une immigration de masse, qui exerce une pression insupportable sur un hôpital public déjà exsangue.
La mission flash sur la mortalité infantile a posé un diagnostic lucide. Elle a identifié des axes d’action très clairs : mieux informer sur les risques liés à la grossesse et à la petite enfance, garantir un accès rapide à des soins de qualité partout en France et mieux coordonner les interventions auprès des familles vulnérables.
Dans cette perspective, la stratégie des 1 000 premiers jours, lancée en 2020, est censée garantir un accompagnement renforcé de la grossesse jusqu’aux 2 ans de l’enfant. Toutefois, elle reste aujourd’hui très inégalement appliquée.
Ces préconisations ne suffiront pas sans une volonté politique forte, celle de rouvrir les maternités fermées, de rétablir une carte sanitaire équilibrée et de réarmer notre politique familiale, aujourd’hui diluée dans un universalisme abstrait dont plus personne ne veut.
Trop de familles, notamment en zones rurales ou dans les départements d’outre-mer, ne bénéficient d’aucune aide réelle. Trop de professionnels de santé ne disposent ni de temps ni des moyens pour assurer ce suivi précoce.
Ces recommandations doivent désormais trouver une traduction législative concrète. C’est dans cette perspective que nous proposons que les ARS publient chaque année une cartographie des temps d’accès aux maternités, pour rendre visible les déserts médicaux. L’objectif est clair : aucun enfant ne doit naître à plus de trente minutes de trajet d’une structure médicalisée. C’est une exigence minimale dans toute nation qui se respecte.
Nous proposons également une campagne nationale annuelle de prévention, conformément aux conclusions de la mission flash, ou encore la remise au Parlement d’un rapport triennal d’évaluation, décliné par département, pour permettre un pilotage enfin rigoureux et transparent.
Il s’agit ici d’un véritable enjeu de souveraineté sanitaire. Un pays incapable de protéger ses nouveau-nés n’est plus un pays en ordre. (Applaudissements sur les bancs du RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Je tiens une nouvelle fois à remercier notre collègue Colombani pour avoir porté à notre attention l’enjeu majeur de santé publique qu’est la mortalité infantile.
Elle a augmenté ces dernières années, passant de 3,5 ‰en 2020 à 4,1 ‰ en 2024, selon les chiffres de l’Insee. Entre 2000 et aujourd’hui, notre pays est passé du 3e au 23e rang du classement des États de l’Union européenne en fonction de leur mortalité infantile.
Ce constat doit nous alerter. Bien qu’elle n’apporte pas de solutions à tous les problèmes, cette proposition de loi nous fournit l’occasion de discuter de ce sujet important.
Son article 1er propose de créer un registre national des naissances. Nous sommes favorables à cette proposition, car dans ce domaine, la mise en place d’un outil qui recueillera de façon exhaustive et prospective les données est indispensable pour toute évaluation – une étape essentielle, que nous pourrions améliorer. L’efficacité des études rétrospectives est relative et nous devrions systématiquement privilégier les études prospectives, qui permettent d’anticiper.
L’article 2 de la proposition de loi initiale proposait un moratoire sur la fermeture des maternités. Son application aurait entraîné la suspension de toute fermeture de maternité pendant trois ans.
Il est important de rappeler que si des maternités doivent fermer, c’est parce qu’elles ne permettent pas de garantir des accouchements en toute sécurité. Celle-ci peut être compromise par le manque de matériel, de moyens techniques, le manque de personnels qualifiés en obstétrique, en anesthésie, en chirurgie ou en pédiatrie – il suffit qu’un seul paramètre fasse défaut. Je ne confonds pas proximité et sécurité.
Lors de l’examen en commission des affaires sociales, plusieurs évolutions importantes ont été apportées. Plutôt qu’un moratoire, nous avons adopté, avec un amendement du groupe Ensemble pour la République, le principe d’une évaluation des solutions alternatives disponibles pour les parturientes, préalablement à toute décision de fermeture. Il s’agit de tenir compte de ce qui est faisable en toute sécurité, dans un territoire donné.
Cette disposition nous convient pleinement car elle permet de conjuguer deux impératifs qui ne doivent jamais s’opposer : la sécurité des femmes et des enfants, d’une part, l’accès effectif à une prise en charge de qualité dans des délais raisonnables, d’autre part. Revenir sur cet équilibre serait une erreur, raison pour laquelle nous nous opposerons à la réintroduction de l’article 2 initial.
L’article 3 prévoit que, dans le cadre de la formation continue, les professionnels de santé seront formés aux gestes d’urgence obstétrique. C’est un élément essentiel pour garantir la sécurité à toutes les étapes du parcours de naissance. Nous soutenons cet article de bon sens. Vous l’aurez compris, sous réserve du maintien des équilibres trouvés en commission, le groupe Ensemble pour la République votera en faveur du texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Murielle Lepvraud.
Mme Murielle Lepvraud
Je remercie le groupe LIOT, qui a rendu possible l’examen de cette proposition de loi. Je remercie également les journalistes Anthony Cortes et Sébastien Leurquin pour leur ouvrage, qui a donné l’alerte, 4,1. Le scandale des accouchements en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il y a effectivement urgence : en France, 2 800 bébés meurent chaque année avant leur premier anniversaire, soit un taux de mortalité infantile de 4,1 ‰, l’un des plus élevés d’Europe. Si les naissances prématurées représentent 50 % de la mortalité infantile, la mortalité néonatale est également supérieure à la moyenne européenne pour ce qui concerne les accouchements à terme.
Ce constat traduit la défaillance de notre santé publique. Pour l’épidémiologiste Pierre-Yves Ancel, qui dirige l’équipe Epopé – équipe de recherche en épidémiologie obstétricale, périnatale et pédiatrique –, cette surmortalité est sans doute évitable, car elle semble découler de soins sous-optimaux et d’un défaut d’organisation des soins.
M. Damien Maudet
C’est vrai !
Mme Murielle Lepvraud
Depuis cinquante ans, 75 % des maternités ont fermé ; et cela continue, puisque nombre d’entre elles sont actuellement menacées de fermeture : 111 maternités, si l’on se réfère au rapport de l’Académie de médecine, paru en 2023, qui recommande de fermer toutes celles qui réalisent moins de 1 000 accouchements par an.
M. Matthias Tavel
Scandaleux !
Mme Murielle Lepvraud
Depuis plus de trente ans, le seuil au-delà duquel une maternité devrait fermer ne cesse d’augmenter : on est passé de 300 à 500, puis à 1 000 accouchements par an… Ce faisant, vous mettez en danger l’accès aux soins plutôt que vous ne le sécurisez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Quand une femme fait plus de quarante-cinq minutes de trajet pour accoucher, ce n’est pas pour trouver plus de sécurité, mais pour rencontrer plus de risques. (Mêmes mouvements.) Dans certains départements, comme le Lot, la proportion des femmes vivant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité est passée de 6 % à 24 %. Or c’est là que l’on enregistre la mortalité infantile la plus élevée de France hexagonale.
M. Matthias Tavel
Eh oui !
Mme Murielle Lepvraud
À Guingamp, dans les Côtes-d’Armor, la maternité n’est pas fermée, dit-on… mais les accouchements sont suspendus, faute de praticiens. Les femmes du territoire doivent désormais se rendre jusqu’à Saint-Brieuc pour accoucher. Depuis, plusieurs naissances ont eu lieu dans des véhicules. Certains répondront – c’est la vision médicale – que des accouchements inopinés se sont toujours produits. La vision de la maman est tout autre, marquée par la solitude, la peur et l’angoisse de perdre son bébé. (Approbations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
La concentration des maternités nuit à l’accès aux soins pour les femmes et les bébés, mais elle dégrade également les conditions de travail. Les professionnels sur le terrain m’ont confié que dans ces « usines à bébés », les soignants n’ont plus le temps d’accompagner réellement les mères, comme ils le faisaient dans des maternités à taille humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) La rationalisation du travail, la tarification à l’activité (T2A), le management agressif n’ont plus leur place dans notre système de soins ! (Mêmes mouvements.)
J’en viens au contenu du texte. L’article 1er crée un registre national des naissances, assurant une traçabilité en temps réel des conditions de naissance. Ce registre, très attendu, existe depuis longtemps chez nos voisins européens.
L’article 2 du texte initial prévoyait un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité afin que les ARS réalisent un état des lieux des établissements pratiquant moins de 300 accouchements par an, sauf en cas « d’urgence tenant à la sécurité des patients ». Le périmètre de ce moratoire semble trop restreint, car le seuil de la petite maternité menacée de fermeture n’est plus de 300 accouchements, mais bien de 1 000 accouchements par an.
Du reste, la notion « d’urgence tenant à la sécurité des patients » pour y déroger rend ce moratoire inopérant, car c’est toujours pour des raisons de sécurité que l’on ferme une maternité ! Une ARS n’annoncera jamais qu’elle ferme une maternité car le gouvernement a refusé de lui octroyer les moyens nécessaires lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Karine Lebon applaudit également.) Elle ne vous dira jamais non plus qu’un accouchement qui se passe bien n’est pas rentable depuis l’instauration de la tarification à l’activité et que, en conséquence, une maternité de type 1 n’apporte pas de valeur ajoutée à un hôpital. Elle vous parlera en revanche de pénurie médicale, des difficultés à recruter le trio indispensable anesthésiste-gynéco-obstétricien-pédiatre, mais sans jamais mentionner que la pénurie est organisée par la profession elle-même !
En commission, un amendement de la majorité présidentielle, soutenu par le Rassemblement national, a substitué au moratoire une simple évaluation préalable des solutions alternatives possibles avant le retrait de l’autorisation d’activité obstétrique… La Macronie, aidée par le Rassemblement national, a ainsi vidé le texte de sa substance. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Aussi avons-nous déposé des amendements pour rétablir le moratoire et pour l’élargir à toutes les maternités, jusqu’à 1 000 accouchements par an, tout en encadrant très strictement les exceptions – uniquement « en cas de danger avéré, imminent, et d’une exceptionnelle gravité ».
L’article 3 rend obligatoire la formation des professionnels aux gestes d’urgence obstétrique afin qu’ils puissent réagir efficacement lors d’une situation critique, quel que soit leur lieu d’exercice. Face à de telles urgences, chaque minute compte et la compétence peut sauver des vies.
Pour conclure, je vous appelle à rétablir et à élargir le moratoire et à voter pour ce texte qui constitue une première étape dans le combat contre la mortalité infantile. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Simion.
M. Arnaud Simion
Nous l’avons tous dit : depuis quelques années déjà, la France connaît une hausse inquiétante de sa mortalité infantile. En 2024, elle s’est élevée à 4,1 décès pour 1 000 naissances, contre 3,5 quatre ans plus tôt – des chiffres supérieurs à la moyenne de l’Union européenne. La mortalité est par ailleurs socialement biaisée : parmi les mères actives, le taux de mortalité infantile moyen varie de 2,2 ‰ pour les cadres à 3,5 ‰ pour les ouvrières et les employées ; enfin, il est deux fois plus élevé dans les départements d’outre-mer.
Cette hausse est multifactorielle : peuvent l’expliquer l’état de santé de la mère, l’accès aux soins – le risque de décès néonatal est d’ailleurs multiplié par deux lorsque le trajet jusqu’à la maternité dépasse quarante-cinq minutes –, la prévention, la couverture vaccinale, la qualité de la prise en charge, le manque de personnel en PMI. Quant à l’éloignement géographique par rapport aux maternités et autres structures de soins, il s’aggrave ; en cinquante ans, trois quarts des maternités ont fermé ; près de 900 000 femmes résident aujourd’hui à plus de trente minutes d’une maternité, et le nombre de celles vivant à plus de quarante-cinq minutes a augmenté de 40 % depuis 2000.
Face à l’aggravation de la mortalité infantile, le texte propose des solutions, que soutient le groupe Socialistes et apparentés. Elles ont déjà été présentées par les orateurs. J’insiste sur l’enjeu essentiel de l’article 2 : parce qu’il est le cœur de cette proposition de loi, nous essaierons de rétablir le moratoire sur les fermetures de maternité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LIOT.) Oui, il faut mettre plus de moyens ! Plus de moyens financiers, c’est certain. Nous évoquerons aussi cet aspect en présentant un amendement relatif à l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam). Ce texte pare au plus urgent, ce qui n’empêche pas notre groupe d’y être favorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, EcoS, LIOT et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Josiane Corneloup.
Mme Josiane Corneloup
Je salue l’engagement de notre collègue Paul-André Colombani, qui met en lumière avec pertinence un enjeu majeur de santé publique, la mortalité infantile, c’est-à-dire les décès survenant avant le premier anniversaire. En 2024, notre pays a enregistré 4,1 décès pour 1 000 naissances vivantes, contre 3,5 en 2020 : cela représente 2 800 nourrissons décédés avant leur 1 an, dont près de 70 % au cours du premier mois de vie. Une étude parue en février 2022 dans The Lancet met en évidence cette hausse tendancielle. Nous ne pouvons pas rester immobiles. Il est de notre responsabilité de réagir avec des mesures concrètes, adaptées et durables.
Dès 2022, le groupe Droite républicaine a souhaité la création d’une mission flash sur ce sujet, conduite par notre collègue Philippe Juvin, au côté de la députée Anne Bergantz. Leur travail a permis d’éclairer les enjeux, de poser les bases d’une réflexion sérieuse et de formuler dix recommandations, dont certaines figurent dans le présent texte.
C’est le cas de la création d’un registre national des naissances, prévue à l’article 1er. Il s’agit de mesurer, de comprendre et de prévenir la mortalité infantile, en prenant en compte tous les paramètres susceptibles d’être impliqués – citons, de façon non exhaustive, les facteurs sociaux, les facteurs maternels, le déroulé de la grossesse et de l’accouchement, le suivi de l’enfant dans la première année, les conditions de vie ainsi que la prise en charge médicale, dès la première année. Ce registre s’impose car il est tout simplement impossible de bâtir une stratégie efficace sans données fiables. Cela fait d’ailleurs des années que les professionnels alertent sur cette carence.
L’article 2 institue un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, en particulier sur les structures dont l’activité tourne autour de 300 accouchements par an – seuil souvent utilisé comme critère implicite de fermeture. Même si le rapport de la mission flash précise qu’il n’existe pas de données prouvant le lien direct entre l’éloignement de la maternité et la mortalité des nouveau-nés, il faut cependant noter que l’éloignement augmente le risque d’accouchement extra-hospitalier.
Un livre-enquête écrit en 2025 par les journalistes Anthony Cortes et Sébastien Leurquin révèle que le risque de décès néonatal est multiplié par deux lorsque le trajet jusqu’à la maternité dépasse quarante-cinq minutes. La problématique de l’accès géographique doit donc être prise en compte. Un moratoire permettra une évaluation fine des établissements menacés en fonction des territoires. Cela évitera que des décisions irréversibles, fondées sur des logiques purement comptables, soient prises. Il me semble toutefois qu’un moratoire de dix-huit mois serait plus adapté ; je présenterai un amendement en ce sens.
Nous soutenons également fermement l’introduction systématique de formations régulières aux gestes d’urgence obstétrique dans chaque maternité. C’est une exigence de sécurité, particulièrement dans les petites structures ou les structures sous-dotées, où la réactivité des équipes peut faire toute la différence.
J’appelle également l’attention sur un levier parfois sous-estimé et pourtant fondamental : la prévention. J’avais déposé un amendement qui a malheureusement été jugé irrecevable, parce que sans lien avec le texte. Il visait pourtant à mettre en place une campagne nationale annuelle de sensibilisation aux principaux facteurs de risque pendant la grossesse, à savoir l’obésité, le diabète, mais aussi la consommation de tabac, d’alcool ou de stupéfiants.
Informer, accompagner, prévenir, c’est aussi protéger la vie, dès ses premiers instants. Comme le prévoit l’article L. 1411-1 du code de la santé publique : « La politique de santé relève de la responsabilité de l’État. » Celle-ci inclut non seulement le soin, mais aussi la prévention des maladies et la réduction des risques pour la santé. Une campagne de sensibilisation permettrait non seulement de diffuser des messages de santé accessibles à toutes et à tous, mais aussi de renforcer la coordination entre les acteurs de terrain – professionnels de santé, sages-femmes, associations –, qui œuvrent déjà quotidiennement auprès des femmes enceintes.
Prévenir, c’est aussi une manière de réduire les inégalités sociales de santé – l’exposition aux facteurs de risque pendant la grossesse est, nous le savons, plus fréquente dans les milieux les plus précaires. Offrir à chaque femme une information claire, gratuite et régulière, c’est aussi œuvrer pour plus de justice sanitaire.
Le groupe DR votera en faveur du texte.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Charlotte Garin.
Mme Marie-Charlotte Garin
En 2024, 2 700 enfants de moins d’un an sont morts en France. Un enfant sur 250 n’a pas soufflé sa première bougie. En matière de mortalité infantile, parmi les vingt-sept pays européens, nous sommes passés de la septième à la vingt-troisième place. De quoi peut-on être fier, dans ce pays, si nous ne sommes pas capables de sauver les nouveau-nés ?
M. Damien Maudet
C’est vrai !
Mme Marie-Charlotte Garin
Derrière ces chiffres se cachent des drames humains, des deuils et des familles dévastées. Mais la mortalité infantile n’est pas une fatalité : elle est le symptôme d’un système à bout de souffle, qui abandonne les plus fragiles et les plus isolés.
Pourtant, la France constituait un modèle en matière de santé périnatale. Grâce à la sécurité sociale et au maillage des maternités publiques, nous avons su protéger les femmes et les enfants. Mais ce système de santé qui a fait notre fierté, nous le voyons, depuis plusieurs années, littéralement s’écrouler. Pourquoi ? En cinquante ans, les trois quarts des maternités ont fermé. Le nombre de femmes vivant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité a bondi de 40 % depuis les années 2000. Or si vous vous trouvez à plus de quarante-cinq minutes de la maternité, le risque de décès de votre nouveau-né double.
La proposition de loi que nous examinons prévoyait un moratoire sur la fermeture des maternités. Les collègues macronistes l’ont fait supprimer en commission. Qui, ici, pense qu’il y a trop de maternités en France et que nous devrions encore en fermer ? (M. Benoît Biteau applaudit.)
M. Jean-François Rousset
On n’a jamais dit ça !
Mme Marie-Charlotte Garin
Dans quel monde vivez-vous ? Quand une maternité ferme, ce sont les établissements situés aux alentours qui absorbent le choc. La dernière maternité du département récupère tous les transferts d’urgence, souvent sans moyens supplémentaires, avec des équipes déjà à bout. Les sages-femmes, les obstétriciens, les pédiatres enchaînent les déplacements, subissent les réorganisations à la va-vite et les gardes en tension permanente. Et pour les femmes enceintes, c’est la galère au quotidien. Quand on habite loin et qu’on n’a pas de voiture, si des questions ou des inquiétudes surgissent pendant la grossesse, on ne se rend plus à la maternité comme on le faisait avant : on appelle, on attend, on se demande si son cas mérite vraiment un déplacement d’une heure. La proximité, c’était aussi cela : pouvoir poser une question, se rassurer, être accompagnée. Aujourd’hui, cette proximité disparaît et, avec elle, la qualité de l’accompagnement des femmes.
Si les maternités ferment, c’est aussi faute de soignants et de reconnaissance. La pénibilité de ces métiers, bien souvent occupés par des femmes, n’est toujours pas prise en compte. La société a changé, les besoins ont évolué, mais les moyens n’ont pas suivi. Les internes désertent l’obstétrique et les sages-femmes fuient les hôpitaux.
Pendant ce temps, que fait le gouvernement ? Il coupe : 387 millions d’euros viennent d’être annulés dans le budget de la recherche publique. Une décision passée en douce, mais qui en dit long : comment prétendre lutter contre la mortalité infantile en asphyxiant les moyens qui permettraient d’en comprendre les causes ?
J’aimerais aussi que nous entendions collectivement l’alerte lancée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : elle indiquait déjà, en 2017, que 1,7 million d’enfants de moins de 5 ans mouraient chaque année du fait de facteurs environnementaux évitables – j’insiste sur ce dernier mot. Il s’agit, concrètement, de la pollution de l’air, des pesticides et des perturbateurs endocriniens. Toutes les études convergent sur ce point. Or que faisons-nous ? Pendant que nous discutons de mortalité infantile dans l’hémicycle, les membres de la commission des affaires économiques examinent l’inique proposition de loi dite Duplomb ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
Mme Élise Leboucher
La honte !
Mme Marie-Charlotte Garin
Au menu, parmi plusieurs plats indigestes, se trouve la réintroduction de l’acétamipride, un insecticide toxique pour la reproduction et classé comme tel par l’Agence européenne des produits chimiques (AEPC). Autrement dit, pendant que l’on s’interroge ici sur la hausse de la mortalité infantile, on recule dans la pièce d’à côté sur la protection de l’air, de l’eau, et on laisse les lobbys industriels dicter les politiques qui affecteront directement la santé des hommes, des femmes – y compris enceintes – et des enfants à naître de ce pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et GDR.)
Le groupe Écologiste et social soutiendra cette proposition de loi, si le moratoire sur les fermetures de maternité est rétabli. L’idée, proposée à l’article 1er, de disposer d’un registre national des naissances et des décès périnataux est une évidence et une mesure de bon sens. Chers collègues, je vous en prie, soyez cohérents : considérez l’ensemble du problème. Le taux de mortalité infantile est un révélateur ; il n’est pas le fruit du hasard, mais le résultat de choix politiques dans différents domaines : la santé, l’environnement et l’aménagement du territoire. Il faut une approche globale et, surtout, un peu de courage. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. – Mme Karine Lebon et M. Arnaud Simion applaudissent également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Je tiens à remercier M. le rapporteur de nous permettre d’aborder ce sujet grave. En matière de mortalité infantile, notre système de santé est loin d’être exemplaire : avec 4,1 décès pour 1 000 naissances en 2024, il se classe au vingt-troisième rang sur vingt-sept pays européens.
C’est un déclassement, au sens propre comme figuré, un recul préoccupant et difficile à expliquer avec les données dont nous disposons. Plusieurs hypothèses sont avancées : le recul de l’âge des parents concepteurs ; les naissances prématurées de plus en plus nombreuses, désormais à partir du cinquième mois de grossesse ; des facteurs de risques individuels, comme le tabac, la sédentarité et l’obésité ; des facteurs environnementaux, comme l’exposition aux pollutions chimiques ;…
Mme Marie-Charlotte Garin
Par exemple les PFAS dans les poêles à frire, que vous n’avez pas voulu interdire !
M. Cyrille Isaac-Sibille
…les inégalités sociales et territoriales de santé, toujours très fortes ; la dégradation du système de santé, en particulier dans le champ de la périnatalité ; peut-être la formation et la qualité des professionnels de santé ; enfin, des maternités sous-dotées, avec un personnel intérimaire qui se relaie sans stabilité ni coordination au sein des équipes.
Il est inadmissible, monsieur le ministre, que nous ne soyons pas capables, à ce jour, de mieux connaître les causes de ce déclassement. Nous pouvons nous interroger – comme je l’ai fait récemment auprès de professionnels de santé – sur l’absence de publications de la part des sociétés savantes, qui devraient pourtant se préoccuper de ce sujet. Face à la progression de la mortalité infantile en France et aux incertitudes qui l’entourent, nous avons besoin d’y voir plus clair.
C’est pourquoi le groupe Les Démocrates soutient cette proposition de loi, qui doit permettre de mieux identifier et comprendre les facteurs de ces décès précoces. Par ailleurs, je veux saluer l’engagement de nos collègues Anne Bergantz et Philippe Juvin : leur mission flash sur le sujet a nourri ce texte.
L’article 1er prévoit la création d’un registre national des naissances, qui intégrera au système national des données de santé (SNDS) de nombreuses informations aujourd’hui éparpillées, sous-exploitées ou inaccessibles ; il s’agit d’une mesure indispensable, qui fait l’objet d’un consensus. Ce registre deviendra un outil de suivi précieux pour nourrir les recherches et orienter les politiques publiques. Toutefois, je souhaite que le ministre nous assure que les sociétés savantes seront consultées afin d’assurer la validité des critères de ce registre.
L’article 2 porte sur ce que le rapporteur appelle les petites maternités. La commission a supprimé la disposition qui prévoyait un moratoire de trois ans sur leur fermeture. La question mérite d’être traitée avec nuance. Faut-il maintenir, coûte que coûte, des maternités qui pratiquent moins de 300 accouchements par an ? Le seuil de 300 naissances annuelles est-il le bon ?
Ce qui importe, c’est la capacité de ces maternités à conserver une équipe stable et de qualité, réunissant les quatre acteurs indispensables que sont l’obstétricien, l’anesthésiste, la sage-femme et le pédiatre. Il faut faire en sorte que ces quatre acteurs soient toujours présents sur le plateau technique ; au regard de ce problème de démographie médicale, le reste n’est que balivernes. En effet, qui dira qu’il faut privilégier la proximité dans l’accès aux soins, plutôt que la qualité ? Comme le rapporteur, je me demande quelles sont les mesures qui permettraient de garantir une équipe de soignants stable et de qualité dans chaque maternité, grande ou petite.
Si nous devons fermer certaines maternités, parce qu’elles ne disposent pas de ces quatre acteurs essentiels, il est nécessaire de proposer des solutions de remplacement crédibles, comme l’a suggéré l’amendement adopté en commission. Plutôt que de maintenir de petites structures qui fonctionnent grâce à l’intérim, ne pourrait-on pas mieux repérer et suivre les grossesses à risque ? Ne pourrions-nous pas créer, par exemple, des dispositifs analogues à ceux proposés aux parents d’enfants hospitalisés loin de chez eux : la mise à disposition de logements proches de l’hôpital, dans l’attente de l’accouchement ?
Nous devons conjuguer accessibilité, sécurité et qualité des soins : tels sont bien les objectifs visés par le texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et EPR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Lise Magnier.
Mme Lise Magnier
Cette proposition de loi part d’un constat simple mais particulièrement alarmant : alors que la France est l’un des pays les plus riches du monde, la mortalité infantile y augmente. Les chiffres cités lors de la discussion générale sont sidérants ; j’en retiendrai un seul : en 2024, près de 2 700 nourrissons n’ont pas franchi le cap de leur première année dans notre pays. La situation est d’autant plus inquiétante que 70 % de ces décès sont survenus au cours du premier mois de la vie. Vous avez donc raison, monsieur le rapporteur : il nous faut réagir et agir. C’est pourquoi le groupe Horizons & indépendants votera en faveur de votre proposition de loi.
L’un des piliers du texte est la création d’un registre national des naissances. Aujourd’hui, les données de santé périnatales sont éparpillées, rendant difficile l’identification des failles, des causes et des risques, ainsi que l’évaluation de l’efficacité des politiques publiques. Ce registre, attendu de longue date par les professionnels de santé, recommandé par la Cour des comptes ainsi que par la mission menée par Anne Bergantz et Philippe Juvin, permettra de centraliser l’information, de cibler les actions de prévention et d’élaborer des indicateurs fiables pour piloter une politique périnatale ambitieuse. Il s’agit d’un outil indispensable pour réagir rapidement et de manière coordonnée face aux facteurs de risque, qui seront ainsi mieux identifiés.
La question de l’accès aux soins, notamment dans les territoires ruraux, se trouve au cœur du texte. Depuis plusieurs décennies, la France voit le nombre de ses maternités diminuer drastiquement : elle en compte 40 % de moins qu’il y a trente ans. Ces fermetures, souvent justifiées par des motifs de sécurité ou de démographie médicale, ont pour conséquence d’éloigner les femmes enceintes des structures de soins, avec des risques accrus pour la santé des mères et des enfants.
Dans sa version initiale, le texte proposait un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, afin de permettre une évaluation fine et territorialisée des établissements menacés. En commission, un amendement a substitué à la rigidité de ce moratoire une obligation d’évaluation préalable, dans un délai d’un an, des solutions alternatives à la fermeture. Cette approche pragmatique permet de concilier sécurité des patientes et maintien d’une offre de soins de proximité.
Enfin, la proposition de loi prévoit l’obligation de formations régulières aux gestes d’urgence obstétrique dans chaque maternité. Cette mesure, dont on peut s’étonner qu’elle ne soit pas déjà en vigueur, répond à une attente forte des professionnels et des familles ; elle permettra d’harmoniser les pratiques sur tout le territoire, au bénéfice direct des patientes et de leurs enfants.
Ce texte apporte ainsi une réponse cohérente et structurée à la hausse de la mortalité infantile, en dotant notre pays des outils et des moyens nécessaires pour protéger la vie de nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe LIOT.)
Mme la présidente
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Mme la présidente
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Article 1er
------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------