XVIIe législature
Session extraordinaire de 2024-2025

Deuxième séance du mardi 01 juillet 2025

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Deuxième séance du mardi 01 juillet 2025

Présidence de M. Jérémie Iordanoff
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

    1. Maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité

    Discussion d’une proposition de loi adoptée par le Sénat

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive (nos 1148, 1640).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Ce texte est le fruit du travail parlementaire, mais il est surtout le produit d’un drame : la mort tragique de la jeune Philippine. Tous ici, quels que soient nos appartenances, nos parcours et nos sensibilités, nous avons été saisis d’effroi face à cet assassinat. Tous aussi, nous avons le devoir de faire tout ce que nous pouvons, pour que de telles tragédies ne se reproduisent pas.
    Ce devoir nous impose de changer la loi. Je l’ai souvent dit : quand la règle de droit ne protège plus, alors il faut changer la règle. Cette règle n’a pas protégé Philippine. Elle a malheureusement permis la libération de son bourreau, un étranger en situation irrégulière, qui avait été condamné à sept ans d’incarcération pour viol. Il en avait fait cinq, puis il avait été placé en centre de rétention administrative (CRA), en vue de son expulsion. Or, en dépit de sa dangerosité, il avait été libéré. À quelques jours près, l’administration détenait le laissez-passer consulaire, ce précieux sésame qui aurait permis de l’éloigner dans son pays d’origine.
    Rien ne nous empêche de changer la loi et rien ne fait obstacle à ce que nous retenions ces étrangers dangereux plus longtemps.
    Rien, dans le droit européen, puisque la directive prévoit que l’on puisse porter la durée maximale de rétention des étrangers dangereux jusqu’à dix-huit mois. C’est la durée en vigueur en Allemagne et dans plusieurs autres pays européens. Pourquoi donc s’interdire ce que l’Europe autorise et ce que nos voisins pratiquent déjà ?
    Rien, non plus, dans les grands principes qui fondent notre État de droit. Au contraire : l’État de droit, c’est aussi ce droit à la vie et à la sûreté de sa personne que proclame la Déclaration universelle des droits de l’homme. Or, en l’état du droit, cette sûreté n’est pas garantie.
    Que dirons-nous demain aux Français si un autre drame survient ? Que c’est le droit ? Que c’est comme ça ? Que c’est tout simplement la fatalité ? Qu’on n’y peut rien ? Se protéger derrière des lois qui ne protègent plus, c’est finalement une forme de lâcheté. Le devoir nous impose de changer cette règle, alors faisons-le ! C’est le sens de cette proposition de loi de Jacqueline Eustache-Brinio, que le gouvernement soutient.

    M. Ugo Bernalicis

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    On se demande bien pourquoi !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Elle doit permettre d’allonger à 210 jours la durée de rétention des étrangers en situation irrégulière les plus dangereux.

    M. Ugo Bernalicis

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    Pourquoi 210 jours ?

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    C’est la même durée que pour les individus condamnés pour terrorisme. Les modifications apportées par la commission des lois préservent l’essentiel des dispositions votées par le Sénat tout en améliorant le texte. Ces modifications sont les bienvenues.
    Un mot sur un point important : l’appel du préfet en cas de libération d’un étranger en situation irrégulière par le juge des libertés et de la détention (JLD) doit être systématiquement suspensif, dans tous les cas. Il s’agit d’un texte de bon sens.

    M. Ugo Bernalicis

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    Moi, j’aurais dit xénophobe !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Sortons des fausses oppositions ! Sur l’immigration, on oppose souvent la fermeté à l’humanité. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) C’est absurde : c’est dans le vide de fermeté que surgit l’inhumanité.

    Mme Elsa Faucillon

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    Ça faisait longtemps !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    La mort de Philippine en témoigne, tout comme celle de ces malheureux, jetés par des passeurs sur les routes de l’exode ou dans les flots des noyades.
    Sortons aussi des fausses prudences et des fausses tolérances, qui signent de vraies injustices : je pense à l’injustice faite à tous ces étrangers qui, eux, respectent nos lois, qui ont fait l’effort de demander un visa, un titre de séjour,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Que vous ne délivrez pas en temps et en heure !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    …de s’intégrer, de travailler et qui ne supportent pas que d’autres, qui n’ont pas consenti à ces efforts et n’ont pas respecté nos lois, puissent demeurer sur le territoire français.

    M. Ugo Bernalicis

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    Parce que les préfectures, elles, font des efforts peut-être ?

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Bien sûr, ce texte ne réglera pas, à lui seul, le problème des éloignements. Pour que les étrangers dangereux…

    M. Jean-François Coulomme

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    Dans votre bouche, c’est un pléonasme !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    …soient maintenus en rétention, il faut augmenter le nombre de places en CRA. Dans quelques mois, nous ouvrirons trois nouveaux CRA, à Dunkerque, à Bordeaux et à Dijon, ce qui nous permettra de passer de 1 950 places à 2 400 places. Nous devrions ensuite parvenir à 3 000 places.

    M. Jean-François Coulomme

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    La France entière est un CRA !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Nous travaillons actuellement à l’extension des CRA existants, notamment avec des bâtiments modulaires. Les centres qui ne sont pas dédiés aux individus les plus dangereux doivent pouvoir accueillir les étrangers en situation irrégulière dans des conditions plus souples.
    Pour que les étrangers que nous retenons puissent être éloignés, encore faut-il que leurs pays d’origine les reprennent. C’est pourquoi les accords bilatéraux sont importants. Le dernier a été signé avec le Maroc. (M. Emeric Salmon s’exclame.) Depuis le début de l’année, nous avons pu quasiment doubler les retours forcés : les mesures d’éloignement depuis les CRA ont augmenté de 55,4 %. Nous venons d’aboutir à un autre accord avec le Maroc, qui permet de porter la durée de validité des laissez-passer consulaires de 60 à 90 jours. Ce sont autant de chances de plus de documenter l’origine des étrangers en situation irrégulière et de les éloigner.
    Une discussion au niveau européen est en cours : avec l’ensemble des ministres de l’intérieur, nous sommes en train de nous mettre d’accord pour utiliser des leviers pour faire pression sur les pays d’origine qui ne sont pas suffisamment coopératifs. Je pense notamment au levier des visas : nous pourrions diminuer le nombre de visas européens pour que les pays d’origine délivrent des laissez-passer consulaires. D’autres leviers existent, comme les droits de douane et les aides au développement. Quand les pays ne sont pas coopératifs, pourquoi s’obliger à verser ces aides ? J’insiste sur le fait que de telles mesures seront beaucoup plus efficaces si elles sont menées au niveau européen.
    Pour conclure,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Déjà ? Même pas dix minutes ?

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    …je rappelle qu’il y a quelques semaines, le Parlement et le gouvernement ont su dépasser les clivages pour voter la loi contre le crime organisé. Cette loi, destinée à sauver des vies, changera la donne en nous permettant de combattre à armes égales. Le texte qui vous est soumis peut, lui aussi, protéger et sauver des vies innocentes. Alors tâchons, une fois encore, de passer outre nos divisions : ayons le courage de changer la loi pour protéger nos compatriotes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Marleix, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    M. Olivier Marleix, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Cette proposition de loi est importante. L’incapacité à assurer l’éloignement des étrangers les plus dangereux est l’un des échecs les plus inacceptables de nos politiques d’ordre public et suscite, à juste titre, l’incompréhension et l’indignation de nos compatriotes.
    Certes, cet éloignement est difficile à mener : les États étrangers sont souvent réticents à délivrer des laissez-passer consulaires pour leurs ressortissants criminels ou délinquants. L’éloignement nécessite alors des échanges plus fournis et des relations diplomatiques plus approfondies. Le nerf de la guerre, c’est donc le temps. Donner du temps à l’administration, si et seulement si c’est nécessaire, pour éloigner effectivement des étrangers coupables de crimes ou de délits graves : c’est tout l’objet de ce texte, déposé par Mme Jacqueline Eustache-Brinio et adopté au Sénat le 18 mars dernier.
    Je remercie la rapporteure, Mme Lauriane Josende, pour le travail exigeant qu’elle a mené avec la commission des lois du Sénat. Je salue, par ailleurs, la recherche de consensus qui a présidé aux travaux de notre commission des lois, sous la houlette du président Boudié. L’équilibre que nous avons su dégager me paraît de nature à concilier, pour reprendre les termes du Conseil constitutionnel, d’une part « la prévention des atteintes à l’ordre public » et, d’autre part, « l’exercice de libertés constitutionnellement garanties », au nombre desquelles figure évidemment la liberté individuelle.
    Cette proposition de loi trouve malheureusement un écho dans l’actualité récente, qui a vu la libération d’étrangers dangereux avoir des conséquences dramatiques. Je pense, bien sûr, comme vous, monsieur le ministre d’État, à Philippine Le Noir de Carlan et à sa famille. Son meurtre, en septembre 2024, a bouleversé la France. J’ai aussi une pensée pour Lino Sousa Loureiro, retraité tué à Mulhouse, en février dernier, par un délinquant qui sortait d’un CRA.
    Il a pu être dit, en commission, que nous légiférions sous le coup de l’émotion.

    M. Antoine Léaument

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    C’est le cas !

    Mme Andrée Taurinya

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    C’est vrai !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    C’est évidemment faux, mais l’émotion ne peut pas être absente au moment d’entamer la discussion de ce texte : le drame de la mort de Philippine ou de Lino Sousa Loureiro nous rappelle nos responsabilités de législateur. Chaque mot que nous votons a des conséquences sur la vie de nos concitoyens. L’émotion appelle non pas l’excès et la caricature, mais la dignité et la responsabilité. C’est donc un texte responsable, équilibré et proportionné, que j’ai l’honneur de vous présenter, tel qu’il est issu des travaux de notre commission des lois.
    L’article 1er permet de maintenir plus longtemps en rétention les étrangers les plus dangereux. Je tiens à le rappeler : il n’allonge pas la durée maximale en vigueur en France. Nous pouvons déjà maintenir en rétention pendant 210 jours des étrangers condamnés pour des faits de terrorisme, contre 90 jours dans le régime de droit commun. Ce régime dérogatoire est aujourd’hui appliqué à une petite quarantaine de personnes. Il s’agit donc d’en élargir le champ d’application aux étrangers en situation irrégulière, ayant commis des crimes et des délits graves, faisant l’objet d’une interdiction du territoire français ou constituant une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public.
    En commission, nous avons choisi, dans un souci de proportionnalité, d’énumérer les infractions justifiant la mise en œuvre de ce dispositif, plutôt que de retenir le critère de quantum de peine fixé à cinq ans par le Sénat.
    Il importe de remettre ce dispositif en perspective et de rappeler son incontestable conformité tant au droit européen qu’à nos principes constitutionnels. La directive « retour » de 2008 permet aux États membres d’adopter des dispositions prévoyant une rétention administrative allant jusqu’à dix-huit mois, soit 540 jours. Nous en sommes, en France, à 90 jours dans le cadre du droit commun et à 210 jours seulement dans le cadre du régime dérogatoire.

    M. Antoine Léaument

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    Seulement, dites donc !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Certes, le Conseil constitutionnel a censuré en 2011 une disposition prévoyant la rétention des terroristes pendant dix-huit mois, mais cela tenait moins à la durée de rétention elle-même qu’aux conditions de contrôle par le juge, qui étaient insuffisantes. En effet, il est essentiel de rappeler que toute la procédure est évidemment placée sous le contrôle du juge judiciaire, qui autorise la prolongation de la rétention ou décide d’y mettre fin. Cela se fait à un rythme très exigeant, puisque les rétentions sont autorisées de trente jours en trente jours –⁠ un régime sans équivalent en Europe.
    Les autres pays européens ont, pour la plupart, adopté des législations beaucoup plus fermes : douze mois de rétention en Suède, en Slovénie et en Hongrie ; dix-huit mois en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas, à Chypre, en Croatie, à Malte, en Slovaquie, en République tchèque, en Lituanie, en Estonie, en Pologne et en Grèce.
    Ceux qui s’émeuvent de cette durée de 210 jours ne tiennent donc aucun compte de la réalité des pays qui nous entourent ; j’ajouterai que le projet de règlement « retour » en discussion, approuvé par la Commission européenne, prévoit la possibilité de retenir vingt-quatre mois, soit 730 jours, un étranger non dangereux, relevant du régime de droit commun, et ne fixe pas de durée maximale dans le cas des individus les plus dangereux.

    M. Ugo Bernalicis

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    En gros, vous êtes de petits joueurs !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    La proposition de loi s’inscrit par ailleurs dans un cadre constitutionnel qui garantit le respect de la liberté individuelle. Le Conseil constitutionnel, qui s’est prononcé à plusieurs reprises au sujet de l’allongement de la durée de rétention, a confirmé, dans la décision de 2011 que j’ai citée, que la durée de 210 jours était conforme à la Constitution. Il est important de noter qu’en pratique l’usage de ce régime dérogatoire a toujours été modéré et, si je puis dire, raisonnable : en 2024, il concernait trente-sept individus pour une rétention de 117 jours en moyenne –⁠ contre, rappelons-le, 210 jours possibles.
    Lors de l’examen du texte par la commission, nous avons choisi de modifier le champ d’application de l’article 1er : je n’étais pas favorable à l’établissement d’une liste d’infractions, mais je me suis laissé convaincre par nos collègues et nous avons abouti à une rédaction qui a recueilli un large consensus.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ah non, nous ne sommes pas d’accord !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Le texte en l’état, que je vous invite à conserver, prévoit que le régime dérogatoire s’applique aux étrangers condamnés par le juge judiciaire à une peine d’interdiction du territoire français, condamnés pour un crime ou délit particulièrement grave –⁠ l’article en énumère limitativement quatorze catégories comprenant au total 110 infractions – ou représentant une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public.
    L’article 2, entièrement lié à l’article 1er, vise à éviter la remise en liberté d’un étranger qui représente une menace grave, le temps que le juge statue sur l’appel formé par le ministère public contre l’ordonnance mettant fin à sa rétention. Là encore, le dispositif est fermement encadré par le juge, qui doit statuer dans des délais très brefs. Nous avons adopté en commission un article 2  bis qui permet dans des conditions fort strictes, avec l’autorisation du juge et en présence de l’avocat, la prise sans leur consentement des empreintes digitales d’étrangers entrant en CRA, essentielles pour les identifier, s’adresser au bon consulat et obtenir rapidement un laissez-passer consulaire. Il s’agit surtout que le travail d’identification effectué dans un CRA ne soit pas perdu si la personne, remise en liberté à l’issue des 90 jours du délai de droit commun, séjourne ensuite dans un nouveau CRA sous une autre identité. Je présenterai un amendement visant à encadrer mieux encore ce dispositif en y ajoutant l’obligation de rédiger un procès-verbal de l’opération de prise d’empreintes.

    M. Antoine Léaument

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    Ah ! Ça va, alors. C’est bien, on est sauvés !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    L’article 3, que la commission n’a pas modifié, tend à redéfinir le séquençage de la durée de rétention sans allonger celle-ci, en substituant aux dernières périodes de quinze jours de prolongation une unique période de trente jours, dans les mêmes conditions que la prolongation précédente.
    Après l’article 3, deux autres articles ont été intégrés au texte par la commission. Le premier vise à répondre aux exigences du Conseil constitutionnel afin de permettre, en cas de menace grave et actuelle ou de risque de fuite, la rétention administrative de demandeurs d’asile. Le second, résultant d’une initiative de notre collègue lan Boucard, prévoit les conditions dans lesquelles un étranger dangereux assigné à résidence peut être placé sous surveillance électronique.
    L’article 4 vise à computer en heures des délais prévus en jours, ce qui relève du bon sens ; l’article 5, à sécuriser juridiquement la procédure de retenue pour vérification du droit au séjour en ajoutant au procès-verbal qui en marque la fin une mention relative aux heures auxquelles l’étranger a pu s’alimenter, afin de garantir, comme nous le demande le Conseil constitutionnel, le respect de la dignité de la personne humaine. Les articles 6 et 7 ont trait à l’application du texte outre-mer et à son entrée en vigueur différée.
    Cette proposition de loi contribuera à l’efficacité de notre politique de maintien de l’ordre : elle ne règle pas tout et ne prétend pas le faire ; mais elle permet de mieux traiter le cas des étrangers dangereux qui n’ont rien à faire sur notre sol et dont l’éloignement doit constituer une priorité pour nous tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Motion de rejet préalable

    M. le président

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    J’ai reçu de M. Boris Vallaud et des membres du groupe Socialistes et apparentés une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
    La parole est à Mme Céline Hervieu.

    Mme Céline Hervieu

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    Cette proposition de loi est censée répondre à un drame tragique : le viol d’une femme par un homme déjà condamné, sous le coup d’une interdiction de territoire, mais sorti de rétention sans qu’un laissez-passer consulaire lui ait été accordé. Devant ces circonstances, peut-on avoir la main qui tremble ? Le viol ne compte-t-il pas au premier rang des crimes les plus ignobles ? Bien sûr, j’ai ce soir une pensée forte pour Philippine et sa famille. En tant que socialistes, nous le disons avec la même force : nous soutenons et soutiendrons toujours les textes susceptibles de lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles.
    Reste la question suivante : cette proposition de loi permettra-t-elle à l’avenir d’éviter de tels viols ? La vérité commande de répondre non –⁠ elle ne le permettra pas. Face à la gravité de ce qu’ont vécu Philippine et tant d’autres femmes, rien n’est pire que de brandir de fausses solutions. (Murmures sur les bancs des groupes RN et UDR.) Cet homme était un violeur et un meurtrier avant tout, avant d’être un étranger. Le courage dont vous parlez, monsieur le ministre, consiste justement à ne pas céder à des passions tristes, ne pas donner l’impression que vous cherchez à trouver des solutions alors que ce texte n’aura aucun effet sur la sécurité publique, en particulier la sécurité des femmes ; le courage, c’est justement de ne pas légiférer sous le coup de l’émotion. En vérité, frappée du sceau de la démagogie, la proposition de loi exploite un crime tragique en établissant un lien entre insécurité et immigration ; c’est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés a déposé cette motion de rejet préalable, que je vous invite à adopter.

    M. Antoine Vermorel-Marques

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    Vous êtes abonnés aux motions, aujourd’hui !

    Mme Céline Hervieu

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    Nous devons rejeter cette proposition de loi : pour nos libertés publiques, notre État de droit, elle est dangereuse. Elle vise à élargir un régime d’exception, aujourd’hui réservé aux terroristes, à des étrangers, certes interdits de territoire, faisant l’objet d’une décision d’éloignement à la suite d’une condamnation pour des faits graves, ou dont le comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public. Si la tentation de la sévérité est grande, la dérive pour notre droit, nos libertés, l’est plus encore : ce texte ne vise ni plus ni moins qu’à appliquer à de petits dealers, par exemple, une législation qui jusqu’ici, je le répète, ne pouvait l’être qu’aux terroristes. Il ferait de cette procédure le droit commun de la rétention administrative. Or, si cette rétention constitue une mesure privative de liberté, les CRA ne sont pas des prisons : prévue dans le cadre d’une mesure d’éloignement, la rétention n’a pas de but répressif ou punitif et ne doit pas être assimilée à une incarcération.
    Si l’on suit votre logique, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, pourquoi se limiter à 210 jours ? Pourquoi ne pas enfermer les étrangers jusqu’à l’expulsion définitive, par exemple ? Si vous considérez la privation de liberté comme une mesure de précaution, imaginez le nombre d’individus qu’il faudrait enfermer indéfiniment ! Le danger de telles mesures est donc très grand pour nos libertés publiques, et plus grand encore pour la sécurité au sein de nos CRA. Augmenter la durée de rétention pour les délits de droit commun reviendrait à aggraver les conditions de vie déjà difficiles des personnes retenues comme les conditions de travail des agents ; à la fin, il y aurait atteinte à la sécurité dans ces lieux de rétention.

    M. Fabien Di Filippo

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    Oh là là !

    Mme Céline Hervieu

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    Les conditions de vie y sont indignes. Monsieur le rapporteur, je serais curieuse de savoir quand vous avez visité un CRA pour la dernière fois !

    M. Antoine Léaument

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    C’est vrai, ça !

    M. Pierre Cordier

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    Il y a quinze jours !

    Un député du groupe DR

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    Et vous ?

    Mme Céline Hervieu

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    Non seulement ce texte, encore une fois, est dangereux, et ce motif doit suffire à nous le faire rejeter, mais il est inutile.

    M. Pierre Cordier

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    Un peu comme le PS !

    Mme Céline Hervieu

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    Il y a les textes qui apportent des réponses et ceux qui se contentent de poser des questions : celui-ci pose une question et, je vous le dis, la pose très mal. Il y a les textes nécessaires et les textes inutiles, ces lois qui ne rendent aucun service aux Français : pardon de vous le dire tout de go, mais prolonger la durée de rétention en CRA ne sert à rien. Nous l’avons déjà fait à plusieurs reprises ; avons-nous mieux expulsé les délinquants étrangers, les individus dangereux ? Force est de constater que non.

    M. Fabien Di Filippo

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    Vous ne voulez expulser personne !

    M. Pierre Cordier

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    Bernard Cazeneuve n’est pas d’accord avec vous !

    Mme Céline Hervieu

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    Si l’État demeure impuissant à faire expulser une personne sous obligation de quitter le territoire français (OQTF) à l’issue d’une incarcération de plusieurs années, qui peut croire un instant qu’il y parviendra mieux en quelques mois supplémentaires ? En quoi une durée de rétention plus longue, même d’un mois, facilitera-t-elle l’éloignement d’une personne qui purge sa peine depuis plus de dix ans et dont la date de sortie de détention est connue de l’administration ? C’est pourtant ce à quoi prétend ce texte. Ce qui est étonnant, c’est qu’en commission, monsieur le rapporteur, vous avez vous-même admis votre impuissance.

    M. Pierre Cordier

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    Mais non !

    Mme Céline Hervieu

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    Vous avez dit que vous ne saviez pas si l’on pourrait mieux expulser demain, mais qu’il fallait quand même allonger la durée de rétention. Quel aveu, quelle fuite en avant ! Vous-même, je le répète, reconnaissez l’impuissance de votre texte ! Celui-ci ne règle aucunement la seule question que pose l’éloignement des personnes condamnées pour des faits graves : celle de la capacité de l’administration à obtenir dans les temps les laissez-passer consulaires.

    M. Pierre Cordier

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    On dirait Martine Aubry il y a trente ans. Madame Aubry, sortez de ce corps !

    Mme Céline Hervieu

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    Dans le cas de Philippine, c’est ce problème qui s’est posé. Or l’allongement de la durée de rétention ne permettra pas davantage d’obtenir ces documents, puisqu’ils relèvent d’États tiers, d’États souverains, avec lesquels le ministère des affaires étrangères doit négocier. La question centrale, manifestement éludée par les auteurs de ce texte, demeure celle des moyens dont dispose l’administration pour organiser l’éloignement effectif des personnes condamnées par la justice. Si notre système connaît des défaillances, plutôt que de tirer les leçons de celles-ci,…

    Un député du groupe DR

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    Il faut tirer les leçons de votre insuffisance !

    Mme Céline Hervieu

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    …d’améliorer l’efficacité de l’éloignement en donnant, par exemple, à l’administration les moyens nécessaires à l’obtention de ces laissez-passer,…

    M. Pierre Cordier

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    Pas possible, vous n’avez pas rédigé votre intervention !

    Mme Céline Hervieu

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    …les promoteurs du texte choisissent l’enfermement prolongé comme solution à tout, alors qu’il n’est une solution à rien.

    M. Pierre Cordier

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    François Mitterrand ne pensait pas cela !

    Mme Céline Hervieu

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    Nous le disons en tant que socialistes,…

    M. Pierre Cordier

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    Vous pouvez le dire en tant qu’Insoumis !

    M. Fabien Di Filippo

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    Entre socialistes et Insoumis, il n’y a plus aucune différence : c’est l’extrême gauche !

    Mme Céline Hervieu

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    …il importe d’assurer la sécurité de chacune de nos concitoyennes, chacun de nos concitoyens, et de lutter contre la récidive. Celle-ci étant particulièrement importante pour les crimes sexuels, il est essentiel que l’éloignement des personnes condamnées ait lieu à l’issue de la peine d’emprisonnement –⁠ les peines en la matière sont assez longues pour que l’on soit en droit de l’espérer.

    Un député du groupe DR

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    L’espérance, c’est bien un thème du PS !

    Mme Céline Hervieu

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    Lorsque la personne en cause est emprisonnée pour cinq ou dix ans, peut-être pourrait-on mettre ce temps à profit pour organiser les conditions de son éloignement ? Ce n’est pas ce qui se passe aujourd’hui, et vous nous proposez de prolonger de deux mois la rétention administrative, ce qui ne présente aucun sens ! Pourquoi allonger la durée de cette rétention au mépris de la liberté individuelle, puisque la personne, ayant purgé sa peine, n’est plus enfermée au titre de sa condamnation mais pour des raisons logistiques, administratives ? Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous actez par là une différence de traitement entre un criminel étranger et un criminel français, en opposition frontale avec nos principes républicains : égalité, interdiction de toute forme de discrimination.
    Dégainé dans la précipitation par une droite en pleine surenchère sur l’extrême droite, sous le regard complaisant des macronistes, ce texte est tristement dans l’air du temps : un crime, une proposition de loi –⁠ xénophobe et liberticide pour ne rien arranger, avec l’assentiment d’un premier ministre et d’un ministre de l’intérieur qui, par lâcheté, se refusent à légiférer eux-mêmes. Par lâcheté, monsieur le ministre, car vous imposez ce texte à notre ordre du jour alors que vous savez qu’il ne sert à rien ! Le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), institution placée me semble-t-il sous l’autorité du premier ministre, l’a écrit le 26 juin : « […] la proposition de loi sur le maintien en rétention est inutile –⁠ car inefficace –, dangereuse –⁠ car attentatoire aux libertés fondamentales –, et indigne –⁠ car fondée sur un présupposé discriminatoire ».
    Finalement, le gouvernement, par pure démagogie, n’utilise-t-il pas ce texte pour se montrer inflexible afin de mieux dissimuler son laxisme –⁠ quand il refuse à son administration les moyens d’accomplir ses missions – voire ses errements diplomatiques ? Cette proposition de loi coche, si je puis dire, toutes les cases du mauvais texte : instrumentalisation de l’émotion légitime suscitée par un crime dramatique, mobilisation de fantasmes xénophobes…

    Un député du groupe RN

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    Ah bon ?

    Mme Céline Hervieu

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    …consistant à lier insécurité et immigration ; elle abîme notre État de droit tout en manquant complètement son objectif et échouant à régler le vrai problème.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Que n’avez-vous réussi à régler les vrais problèmes quand vous étiez au pouvoir, le PS !

    Mme Céline Hervieu

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    « Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires », écrivait Montesquieu. Pour défendre les lois nécessaires, nous devons écarter les lois inutiles ; aussi, chers collègues, je vous demande de rejeter l’examen de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre d’État.

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    On ne peut pas tout laisser passer.

    M. Antoine Léaument et M. Ugo Bernalicis

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    C’est vrai, ça !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Vous indiquez que ce texte est contraire à l’État de droit.

    M. Antoine Léaument

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    Il est raciste, même !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Comment pouvez-vous le justifier alors même que la directive « retour » de 2008 prévoit une période de rétention pouvant être portée à 18 mois et que treize partenaires européens l’ont fixée, depuis des années, à 540 jours plutôt qu’à 210 jours ? Vous estimez donc que ces pays violent l’État de droit ? J’en ai parlé cet après-midi lors des questions au gouvernement : le projet de règlement européen « retour », qui doit réviser la directive « retour », prévoit une durée de rétention de deux ans pour les étrangers en situation irrégulière sans que ces individus n’aient commis la moindre faute. Vos arguments sont donc faux sur ce point.
    Ensuite, vous dites que ce texte commet des amalgames ; au contraire, c’est vous qui en faites. Le texte n’amalgame rien du tout : il indique très clairement que ceux qui pourront faire l’objet d’une durée de rétention supérieure à la durée normale de 90 jours sont ceux qui ont commis de graves infractions comme le terrorisme –⁠ c’était déjà le cas – ou le viol. C’est donc une autre erreur de votre part.
    Enfin, vous indiquez que prolonger la période de rétention ne résoudrait rien, ce qui est faux. Lorsqu’il s’agit d’identifier des étrangers –⁠ qui ont souvent brûlé ou perdu volontairement leurs papiers –, de documenter ces identifications et de négocier pied à pied avec les pays d’origine, chaque jour compte. (Mme Justine Gruet applaudit.) Dans le cas de Philippine, tout s’est joué à quelques jours près : si nous avions eu cette loi, Philippine aurait eu la vie sauve. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Vous ne pouvez pas dire que ce texte ne résoudra rien.

    M. Antoine Léaument

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    Un peu, quand même !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Dans le cas du meurtre de Philippine, le laissez-passer consulaire de l’assassin est parvenu seulement trois jours après sa remise en liberté. Son maintien en CRA pour quelques jours supplémentaires aurait probablement permis d’éviter ce drame.

    M. Ugo Bernalicis

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    Qu’est-ce que vous en savez ? Vous avez une boule de cristal ?

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Le simple fait que cette loi aurait pu sauver une vie justifie son utilité pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP)

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    Si nous devions légiférer systématiquement à chaque fait divers, vous auriez pu proposer une loi punissant sévèrement les crapules qui détournent des millions d’euros d’argent public au détriment de l’intérêt général.

    M. Pierre Cordier

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    Quel démago !

    M. Jean-François Coulomme

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    Vous répétez qu’il s’agit de sauver des gens. Avec une loi punissant la fraude fiscale, nous aurions sauvé des dizaines de milliers de contribuables de la faillite dans laquelle votre gouvernement les a plongés !
    Le présent texte fait la course à l’échalote avec le Rassemblement national. L’UDR, comme en témoigne sa misérable niche parlementaire de jeudi dernier, court derrière les textes répressifs et xénophobes du Rassemblement national. Les Républicains, à leur tour, suivent l’UDR dans cette course au texte le plus régressif, répressif et raciste. (Exclamations sur les bancs du groupe DR.)

    M. Pierre Cordier

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    Vous courez après qui, vous ?

    M. Vincent Jeanbrun

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    Qui c’est qui vote les motions avec le RN ?

    M. Jean-François Coulomme

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    Enfin, le groupe EPR court à son tour derrière les Républicains. Voilà la course à l’échalote minable à laquelle nous assistons depuis des mois et des mois.
    Aujourd’hui, vous proposez d’augmenter la durée de rétention en CRA. Comment cette mesure est-elle censée diminuer la dangerosité des personnes concernées ? À la lecture de l’article 1er du texte, on voit bien votre intention d’associer intimement le statut de demandeur d’asile à celui de terroriste, de violeur ou de criminel contre l’humanité. Sur ce dernier point, je me permets de souligner entre parenthèses que si vous vouliez vraiment poursuivre ces criminels, vous auriez pu intercepter des avions survolant notre territoire pour arrêter et placer en CRA certaines personnes poursuivies par la Cour pénale internationale.
    Et tout cela ne sert qu’à modifier le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) ; c’est assez minable.

    M. Pierre Cordier

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    On se demande qui est minable ici…

    Mme Frédérique Meunier

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    C’est lui, le minable !

    M. Jean-François Coulomme

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    Dans le texte, vous parlez d’étrangers qui « représentent une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public ». Je dirais qu’il s’agit tout simplement de personnes coupables de crimes. Sauf erreur, notre code pénal s’applique bien à tout le monde, et pas qu’aux « Français de souche », comme diraient les députés de l’autre côté de l’hémicycle ! Appliquez le code pénal tel qu’il existe et vous préviendrez peut-être les crimes que vous cherchez à éviter.
    Vous vous concentrez sur un cas spécifique issu d’un fait divers ; nous voulons protéger toutes les Françaises et tous les Français. Nous voterons pour cette motion de rejet. (M. Antoine Léaument applaudit.)

    M. Jean-Pierre Taite

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    Débile !

    M. le président

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    La parole est à Mme Chantal Jourdan.

    Mme Chantal Jourdan (SOC)

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    En tant que législateurs, nous avons une responsabilité. Quelles que soient nos préférences politiques, quelle que soit l’origine du texte qui nous est soumis, notre devoir est de nous prononcer en fonction de son potentiel effet positif pour la société au nom de laquelle nous légiférons.
    Si l’on s’arrêtait du titre de la proposition de loi, la question serait traitée, mais cela ne suffit pas. Céline Hervieu a expliqué que ce texte n’aurait aucun effet positif ; qu’il conduirait à prolonger la rétention administrative sans garantir l’éloignement.
    Tous les moyens devraient être mis en œuvre pour obtenir les laissez-passer consulaires durant la rétention afin que la personne soit expulsée à l’issue de celle-ci. Cette loi n’est donc qu’une vitrine. La prolongation de la rétention ne changera rien si ces mesures n’ont pas été mises en œuvre en amont. Nous sommes favorables à une loi véritablement efficace en la matière, qui renforce les moyens de l’administration pour garantir la protection contre les violences sexuelles. Ce n’est pas le cas de ce texte.
    Pour toutes ces raisons, les députés du groupe Socialistes et apparentés voteront évidemment pour cette motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Antoine Léaument

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    Je souhaite faire un rappel au règlement.

    M. le président

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    Il n’est pas possible de faire un rappel au règlement pendant les explications de vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme Frédérique Meunier

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    Bien fait !

    M. Antoine Léaument

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    Le rappel au règlement suspend les débats, selon l’article 58 du règlement. Je souhaite faire un rappel au règlement sur le fondement de l’article 70, alinéa 3.

    M. le président

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    C’est une règle formelle : pas de rappel au règlement pendant les explications de vote. Nous poursuivrons jusqu’au bout.

    M. Antoine Léaument

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    Je ferai un rappel au règlement juste après, alors.

    M. Pierre Cordier

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    Tout ça pour aller boire un verre à la buvette !

    M. le président

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    S’il vous plaît monsieur Cordier, nous allons poursuivre les explications de vote. Chacun s’écoute.
    La parole est à M. Hendrik Davi.

    M. Hendrik Davi (EcoS)

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    Nous voterons pour cette motion de rejet préalable car, quel que soit le drame, on ne légifère pas bien sous le coup de l’émotion ; c’est une règle que nous devrions appliquer. Plus grave encore, vous continuez votre course à l’échalote avec le Rassemblement national.

    M. Pierre Cordier

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    Je préfère l’ail à l’échalote !

    M. Emeric Salmon

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    Je n’aime pas l’échalote !

    M. Pierre Cordier

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    C’est indigeste !

    M. Hendrik Davi

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    Dans cette proposition de loi, vous faites un amalgame, permanent en ce moment, entre immigration et délinquance. Cela vous fait commettre une grave faute du point de vue du droit parce que vous confondez le rôle des CRA –⁠ mettre en rétention ceux que l’on va expulser – et celui de la prison.
    Par ailleurs, ce texte ne résout rien. Monsieur le ministre, si vous avez bien travaillé, vous savez que les chiffres vous donnent tort. En huit ans, la durée de rétention a augmenté de 156 %. Pourtant, dans le même temps, le taux d’expulsion n’a pas bougé d’un iota : il est resté à 40 %. Il n’y a donc pas de lien entre la durée de rétention et le taux d’expulsion. Cela montre bien que ce que vous proposez sera inefficace.
    Enfin, ce texte est dangereux pour tous les étrangers placés dans un centre de rétention. L’article 1er retient une définition relativement floue puisqu’il est indiqué qu’il concerne les étrangers qui représentent une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public. Avec cette disposition, de nombreux étrangers pourront être maintenus en CRA pour une durée prolongée. Or les conditions de rétention y sont exécrables, ce qui favorise le développement des troubles psychiatriques. L’allongement de la durée de rétention augmente ainsi le risque de récidive, ce qui est précisément l’inverse de ce que vous visez. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne Bergantz.

    Mme Anne Bergantz (Dem)

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    Je regrette une nouvelle fois que les motions de rejet versent dans la démagogie et la caricature. Justifier le rejet sur cette proposition de loi au motif qu’elle serait hostile aux étrangers…

    M. Antoine Léaument

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    C’est-à-dire xénophobe !

    Mme Anne Bergantz

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    …est profondément malhonnête. Rappelons que ces dispositions concernent les personnes retenues au sein des CRA, c’est-à-dire uniquement les étrangers en situation irrégulière, qui se rendent coupables de crimes et de délits particulièrement graves.

    M. Antoine Léaument

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    Pas coupables !

    Mme Anne Bergantz

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    Pourquoi refuser le débat, alors qu’il porte sur des mesures visant à mieux protéger nos concitoyens face au risque de récidive de ces criminels ? C’est précisément par le débat que nous avons réussi, en commission des lois, à affiner le texte en limitant l’application du régime dérogatoire de 210 jours à une liste précise d’infractions. Il est question de criminels condamnés définitivement pour meurtre, assassinat, torture, viol, agression sexuelle, trafic de stupéfiants,…

    M. Jean-François Coulomme

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    Des étrangers, quoi !

    Mme Anne Bergantz

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    …proxénétisme, séquestration ou encore association de malfaiteurs.

    M. Fabien Di Filippo

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    Excusez du peu !

    Mme Anne Bergantz

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    Oui, le profil des étrangers commettant de tels actes justifie pleinement une privation administrative de liberté. Compte tenu du risque de récidive, il est légitime de débattre d’une extension de la rétention à 210 jours dans les cas où cela s’avère nécessaire.
    Le groupe Démocrates s’opposera donc à cette motion de rejet, pour que ces discussions essentielles sur des procédures administratives qui affectent directement la sécurité de nos concitoyens puissent avoir lieu. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et DR ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Xavier Albertini.

    M. Xavier Albertini (HOR)

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    Le groupe Horizons & indépendants votera évidemment contre la motion de rejet préalable déposée par nos collègues du groupe Socialistes et apparentés.
    Nous devons mener un débat de fond sur la rétention administrative, empreint de la dignité qu’attendent ceux qui nous écoutent et qui nous regardent. Quelle que soit la position de chaque groupe sur la question, nous ne pouvons pas ignorer la baisse significative du taux d’exécution des OQTF ces dernières années : il a été divisé par trois en dix ans. Or la rétention administrative vise précisément à permettre l’éloignement des personnes sous le coup d’une OQTF. Nous ne pouvons pas ignorer que des faits très graves sont parfois commis sur notre territoire par des étrangers en situation irrégulière qui font pourtant l’objet d’une OQTF ou d’un arrêté d’expulsion.
    La proposition de loi vise à permettre aux magistrats du siège de prolonger le maintien en rétention d’étrangers condamnés pour des faits d’une particulière gravité et de favoriser ainsi leur éloignement. C’est pourquoi notre groupe votera contre la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac (LIOT)

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    Cette proposition de loi ne mérite pas tant d’ignominies. Son objet est relativement circonscrit : elle vise à prolonger de quelques jours la rétention en CRA des étrangers particulièrement dangereux en situation irrégulière, afin de mieux évaluer leur dangerosité ou d’obtenir des laissez-passer consulaires. Elle propose un équilibre satisfaisant entre le respect dû à ces personnes et la protection de nos concitoyens.
    Sera-t-elle efficace pour autant ? Sans doute pas énormément. Seule une OQTF sur dix étant exécutée, il est fort probable que le texte n’ait qu’un effet limité.
    La proposition de loi a été améliorée en commission des lois de notre assemblée ; je tenais à le souligner.
    Nous ne voterons pas la motion de rejet. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LIOT et EPR.)

    M. le président

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    Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon (GDR)

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    Nous voterons résolument pour cette motion de rejet préalable. Ce texte de loi illustre parfaitement la manière dont certains instrumentalisent un crime abject pour proposer une solution à la fois indigne et inefficace.
    Inefficace, parce que l’allongement de la durée de rétention n’a pas d’effet sur le taux d’expulsion. C’est pourtant l’objectif que vous affichez.
    Indigne, parce que ce texte rend les conditions de rétention encore plus délétères. Il s’agit de l’un des effets particulièrement néfastes de cette proposition de loi.
    Je vois bien que vous n’avez que faire des personnes retenues, mais ce texte détériore également les conditions de travail des agents qui interviennent dans les centres de rétention. Je suis sûre que vous êtes nombreux à visiter régulièrement les CRA. (M. Antoine Léaument s’esclaffe.) Vous avez donc pu entendre les agents qui y travaillent. Quand vous leur demandez les chiffres, ils vous confirment que l’allongement de la durée de rétention n’a pas permis d’améliorer le taux d’expulsion. En revanche, cela provoque une forte dégradation des conditions de détention, donc des tensions. Les agents ont plus de mal à gérer la situation –⁠ d’autant que nos centres ont été construits pour des durées de rétention courtes, et pas longues. C’est une discussion que le rapporteur n’a pas voulu avoir et je le regrette. Je n’ai pas l’ambition de favoriser l’adaptation des centres de rétention à des détentions longues ! Mais vous pourriez au moins constater cette inadaptation.
    Enfin, on ne voit pas bien où vous avez trouvé ces 210 jours. Vous légiférez au doigt mouillé. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Matthieu Bloch.

    M. Matthieu Bloch (UDR)

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    Nous venons d’entendre la défense de la motion de rejet présentée par la gauche. Qu’on me permette de le dire clairement : cette motion est l’expression pure et simple d’une irresponsabilité politique. Le groupe UDR s’y opposera, évidemment.
    Rejeter ce texte, ce serait accepter que des individus condamnés pour viol, pour meurtre, pour terrorisme ou pour proxénétisme puissent à nouveau circuler librement sur notre sol, faute de pouvoir être expulsés. Ce serait accepter que la sécurité des Français passe après l’idéologie.
    Nous refusons que la France reste désarmée face à ces profils dangereux.

    M. Antoine Léaument

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    N’importe quoi !

    M. Matthieu Bloch

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    Nous refusons que les règles en vigueur restent une camisole, au détriment de la protection de nos concitoyens !
    Ce texte apporte des réponses de bon sens, proportionnées et encadrées par le juge pour prolonger la rétention des criminels étrangers lorsque leur éloignement n’est pas immédiatement possible.
    À l’UDR, nous croyons qu’il est temps d’arrêter de subir, temps d’arrêter de libérer des individus qui n’ont plus rien à faire sur notre territoire et qui représentent un risque majeur pour la sécurité publique.

    M. Antoine Léaument

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    Mme Le Pen par exemple !

    M. Matthieu Bloch

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    Voilà pourquoi nous voterons contre cette motion de rejet. Nous choisissons la sécurité des Français avant toute chose et nous faisons passer la protection de notre peuple avant les postures idéologiques ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michaël Taverne.

    M. Michaël Taverne (RN)

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    Nous voterons évidemment contre cette motion de rejet.
    Cette motion de la honte caractérise bien la psychologie de la gauche, qui n’a pas la même conception du danger que nous : elle considère que prolonger la rétention d’un individu dangereux est dangereux pour la société.

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est vous qui êtes dangereux pour la société !

    M. Michaël Taverne

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    Que dire alors des individus qui mettent des coups de couteau pour une cigarette ou des coups de machette pour une casquette ? Vous avez vraiment une drôle de définition du danger.
    La gauche est fidèle à elle-même : toute à sa compassion pour les voyous, elle fait preuve d’un laxisme généralisé et insulte les policiers du matin au soir. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Elle ne vote pas les textes qui donnent des moyens supplémentaires à nos policiers. J’entendais Mme Hervieu dire que les socialistes voteraient des textes qui assureraient la protection des femmes : excusez-moi, mais la Lopmi, qui donne des moyens supplémentaires à nos policiers et à nos gendarmes, vous ne l’avez pas votée, comme vous n’avez pas voté la LOPJ, qui donne des moyens supplémentaires à nos magistrats. Vous avez même osé vous opposer au texte qui vise à lutter contre le narcotrafic !

    M. Antoine Léaument

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    Ça c’est vrai !

    M. Michaël Taverne

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    La gauche considère qu’expulser les délinquants étrangers est une mesure d’extrême droite, alors que 95 % des pays du monde le font.

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est du sous-Darmanin…

    M. Michaël Taverne

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    Elle considère même qu’installer des climatiseurs est une proposition d’extrême droite, voire xénophobe –⁠ c’est assez drôle de votre part !
    Il ne faut pas s’arrêter devant cette idéologie. Nous voterons contre la motion. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ludovic Mendes.

    M. Ludovic Mendes (EPR)

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    Le groupe Ensemble pour la République, nous l’avons expliqué en commission des lois, ne considère pas que ce texte réglera tous les problèmes ; mais il apportera des solutions complémentaires dont nous avons besoin.
    Nous parlons de personnes qui ont été condamnées définitivement : l’État de droit a donc été respecté, puisqu’il y a eu une condamnation en première instance, éventuellement un appel, voire une cassation. Ces personnes ont en outre été condamnées pour des faits graves, punis de plus de cinq ans d’emprisonnement, potentiellement pour traite d’êtres humains ; ou alors elles présentent un risque de terrorisme ou de trouble à l’ordre public grave et dangereux. Elles n’ont rien à faire sur notre sol, et doivent être raccompagnées dans leur pays d’origine.
    C’est ce qui est demandé par l’ensemble de la population française, à gauche, à droite ou à l’extrême droite.
    La réalité, c’est que notre responsabilité est de trouver des solutions pour que des personnes dangereuses ne soient pas remises en liberté mais qu’elles repartent dans leur pays d’origine. Pour cela, il faut des laissez-passer consulaires. On sait très bien que certains pays les délivrent difficilement –⁠ c’est pour eux un moyen de pression.
    Ce texte n’est pas la panacée, mais c’est une solution complémentaire qui permet de répondre à un problème de société.
    Je suis élu de la deuxième circonscription de la Moselle, qui compte un CRA où l’on enferme des personnes sorties directement de prison, et je vous assure que nous avons vraiment besoin de ce texte, qui est adapté, juste, équilibré depuis que, tous ensemble, en commission des lois, nous avons réécrit l’article 1er.
    Cette motion de rejet n’a aucun intérêt particulier. Le débat a été clair, sincère, direct et honnête. Je vous propose plutôt de prendre vos responsabilités et de voter ce texte dont nous avons besoin.
    Notre groupe s’opposera à la motion. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ian Boucard.

    M. Ian Boucard (DR)

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    Le groupe Droite républicaine, présidé par Laurent Wauquiez, votera évidemment contre cette motion de rejet préalable.
    Nous ne comprenons pas que certains dans cet hémicycle ne soient pas favorables à l’idée de garder plus longtemps en rétention des gens dangereux.

    Mme Justine Gruet

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    Ils ne veulent pas protéger la société ! Ils ont choisi leur camp !

    M. Ian Boucard

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    Nous ne comprenons pas la confusion que certains font entre étrangers et gens dangereux. Si j’étais un peu malin, je dirais qu’il y a un peu de xénophobie dans les propos tenus par la gauche, qui confond un étranger qui n’a pas le droit d’être là –⁠ et que, certes, nous voulons expulser – et un étranger dangereux, qui représente une menace pour les citoyens français, qui s’est rendu coupable de viol, de violences ou d’actes contre les forces de l’ordre par exemple. Oui, il faut maintenir cet individu en rétention plus longtemps, parce qu’il est dangereux pour la société, pour les Françaises et les Français.

    M. Thibault Bazin

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    Il a raison !

    M. René Pilato

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    C’est l’extrême droite qui est dangereuse pour les Français !

    M. Ian Boucard

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    Vous prétendez défendre les étrangers mais, dans votre cœur immense, vous oubliez de faire une place pour les Français qui sont en danger à cause de ceux que vous voulez maintenir sur le territoire français. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR.) Vous pourriez défendre –⁠ je ne vous le reprocherais pas – les migrants en situation irrégulière ; mais vous entretenez la confusion entre ceux qui n’ont pas le droit d’être ici sans avoir jamais commis de délit et ceux qui n’ont pas le droit d’y être et qui ont en plus commis un délit !

    M. René Pilato

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    C’est vous qui êtes au pouvoir ! Ce qui se passe est le résultat de votre incapacité à gouverner !

    M. Ian Boucard

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    Votre défense de cette motion est ridicule ! Vous êtes ridicules dans votre opposition à ce texte de bon sens, que tous les patriotes devraient reconnaître comme tel. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
    Il faut évidemment défendre la France, les Françaises et les Français. Nous avons, nous, la volonté d’expulser ceux qui sont dangereux pour les Français. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. le président

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    Je mets aux voix la motion de rejet préalable.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        218
            Nombre de suffrages exprimés                217
            Majorité absolue                        109
                    Pour l’adoption                44
                    Contre                173

    (La motion de rejet préalable n’est pas adoptée.)
    (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Léaument, pour un rappel au règlement.

    M. Antoine Léaument

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    Ce rappel au règlement se fonde sur l’article 70, alinéa 3, relatif aux mises en cause personnelles.
    Tout à l’heure, un de nos collègues, M. Taite, nous a traités de « débiles ». (Vives protestations sur les bancs des groupes RN et DR.) Oh si, le compte rendu fera foi : je l’ai entendu jusqu’ici !
    Sur un texte d’une telle importance, compte tenu du nombre d’insultes que nous avons aussi entendues de la part de M. Boucard, il me semble qu’il faut rappeler que les insultes n’ont pas cours dans l’hémicycle. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Monsieur Boucard, vous apprendrez que les patriotes sont républicains et que ce texte ne l’est pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ian Boucard

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    Merci, monsieur Léaument !

    M. Thibault Bazin

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    Merci pour ce moment !

    M. le président

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    Les insultes sont évidemment inutiles dans cet hémicycle, je suis sûr que tout le monde a bien cela en tête.

    Discussion générale

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Je voudrais commencer par dire à M. le ministre d’État que pour pouvoir opposer ceux qui font les bonnes démarches et qui sont dans leur bon droit, et ceux qui ne sont pas dans leur bon droit et qui sont présents dans un centre de rétention administrative, il faudrait d’abord qu’il donne les moyens aux préfectures et aux sous-préfectures de ce pays de faire en sorte que ceux qui sont dans leur bon droit aient leurs papiers en temps et en heure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il est insupportable de recevoir dans nos permanences des gens qui veulent renouveler des cartes de résident de dix ans pour la deuxième, voire la troisième fois, et qui se retrouvent sans papiers, avec des obligations de quitter le territoire français (OQTF).

    Mme Laure Miller

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    Hors sujet !

    M. Ugo Bernalicis

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    Cela relève de votre responsabilité directe et immédiate, et c’est une forfaiture !
    Ensuite, ceux qui sont en centre de rétention administrative après une condamnation pénale, vous pouvez déjà les expulser en 90 jours. Chers collègues qui étiez avec Emmanuel Macron en 2017, vous nous aviez déjà servi le discours sur humanité et fermeté : pour expulser davantage, il fallait augmenter le délai jusqu’à 90 jours, voire 120 dans certains cas. Oh, on allait voir ce qu’on allait voir ! Et que s’est-il passé ? Rien, walou, que tchi, que dalle. Le taux d’expulsion est resté le même.
    Vous avez tous reçu le document de la Cimade, avec le beau graphique : il faut le lire, c’est vraiment bien fait, bien expliqué, bien argumenté.
    On finit par se demander si votre objectif n’est pas de faire souffrir 90 jours de plus –⁠ et encore 30 de plus, pour aller jusqu’à 210 – les gens qui sont là.

    M. Pierre Cordier

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    Nous ne serons pas d’accord là-dessus !

    M. Ugo Bernalicis

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    Car non, être en centre de rétention administrative n’est pas une promenade de santé, mais une souffrance pour n’importe quel être humain qui se retrouve enfermé dans ces conditions !

    M. Pierre Cordier

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    Ce n’est pas une question de souffrance !

    M. Ugo Bernalicis

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    Et c’est une souffrance pour les policières et les policiers qui sont obligés de faire ce travail : la plupart ne veulent pas y rester, ils font ça pour avoir une mutation, souvent pour changer de zone géographique, pour se rapprocher, et ensuite ils cherchent à partir dès que possible. Ces centres de rétention n’ont pas été construits pour enfermer des gens pour des durées aussi longues.

    M. Pierre Cordier

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    Mais tu n’as qu’à les accueillir chez toi !

    M. Ugo Bernalicis

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    Ensuite, vous mettez…

    M. Patrick Hetzel

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    Et les victimes ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Ah, les victimes ! Mes chers collègues, à quel moment les entendez-vous, dans votre procédure ? À quel moment…

    M. Thibault Bazin

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    Elles sont mortes !

    M. Ugo Bernalicis

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    Elles sont mortes ? Toutes les victimes, de tous les délits et les crimes que vous avez inscrits dans votre proposition de loi –⁠ même celles du délit de trafic de stupéfiants ? C’est cela que vous allez m’expliquer ?

    M. Pierre Cordier

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    Les gens qui ne respectent pas les lois de la République n’ont rien à faire ici !

    M. Ugo Bernalicis

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    Que se passera-t-il, avec votre texte ? Des gens qui sont victimes, parce qu’en situation irrégulière, de la traite d’êtres humains, victimes des trafiquants de stupéfiants, seront expulsés…

    M. Pierre Cordier

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    Oui, il faut les ramener au plus vite chez eux !

    M. Ugo Bernalicis

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    …ou plutôt, ils seront gardés jusqu’à 180 jours dans un centre de rétention. Voilà ce que vous allez faire !
    Car si on ne les expulse pas en dix jours, ou douze jours qui est la durée moyenne en ce moment, il n’est pas vrai que cette nouvelle extension donnera de meilleurs résultats. Ce qu’il vous reste, c’est la démagogie, la souffrance des autres, l’affichage politique d’une xénophobie crasse. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Nicolas Bonnet et Mme Céline Hervieu applaudissent également.) Voilà ce que vous faites avec ce texte, et rien d’autre : on le sait, il n’y a pas de corrélation entre le taux d’expulsion et la durée de rétention.
    Vous devrez aussi nous expliquer pourquoi vous avez gardé ce troisième critère de trouble « d’une particulière gravité » à l’ordre public. Vous qui parlez uniquement de gens condamnés parce qu’ils ont tué ou violé, pourquoi avez-vous dressé une liste aussi longue ? C’est bien que votre intention est tout autre. C’est bien que votre intention est de partir d’un fait divers…

    M. Patrick Hetzel

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    Vous savez que c’est faux, vous êtes vraiment dans l’excès !

    M. Pierre Cordier

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    Mélenchon, sors de ce corps !

    M. Ugo Bernalicis

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    …un fait divers qui semble horrible parce qu’il est horrible, et d’en tirer des conclusions plus larges pour flatter votre électorat en expliquant qu’il y a une corrélation entre le fait d’être étranger et le fait d’être délinquant. Voilà ce sur quoi vous surfez. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Les propos sur ce thème sont innombrables, à droite. D’ailleurs, je m’étonne : mais que faites-vous là ?

    M. Ian Boucard

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    Et toi ?

    M. Ugo Bernalicis

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    On voit très peu le groupe DR, d’habitude. Pour tous les autres textes de loi, sur les questions sociales, sur les questions écologiques, on ne voit personne sur les bancs du groupe Droite républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe DR.) Vous mettez même souvent en difficulté le socle commun, avec vos absences.

    M. Thibault Bazin

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    Ciotti n’est pas là ! (Sourires.)

    M. Ian Boucard

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    Arrête-toi, c’est trop long pour TikTok !

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais pour maintenir des gens 210 jours en rétention –⁠ pour les faire souffrir –, vous êtes là. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ou bien peut-être, l’hémicycle étant l’un des rares points de fraîcheur en cette période de canicule, y avez-vous trouvé refuge ? Vous êtes bien étranges, pour des gens qui sont censés défendre l’intérêt général et celui du genre humain.

    M. Pierre Cordier

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    Le genre humain, c’est une notion d’extrême gauche !

    M. Ugo Bernalicis

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    Je sais que vous n’êtes pas très attachés à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, vu les mises en cause permanentes auxquelles vous vous livrez vis-à-vis de ce texte fondamental. Quant à nous, nous le défendrons toujours bec et ongles, dans cet hémicycle comme à l’extérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP, dont plusieurs députés se lèvent. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe DR.)

    M. Ian Boucard

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    Rendez-nous Léaument !

    M. le président

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    Monsieur Cordier, s’il vous plaît, écoutez l’orateur.
    La parole est à M. Paul Christophle.

    M. Paul Christophle

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    Ce texte, comme d’autres avant lui, s’inscrit dans un climat politique et médiatique qui fait l’amalgame entre immigration et insécurité, étranger et danger.

    M. Ian Boucard

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    Mais non, ça n’a rien à voir !

    M. Paul Christophle

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    Ces confusions alimentent la défiance, nourrissent les préjugés et justifient des politiques toujours plus répressives à l’égard des personnes étrangères.

    M. Pierre Cordier

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    J’ai plein d’amis Maghrébins ! Ils sont très bien mais ils respectent les lois de la République !

    M. Paul Christophle

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    Il est temps de regarder ce que ces lois font concrètement : elles portent atteinte à la dignité des étrangers en France. Dans bien des cas, elles mettent en danger leur santé, leur intégrité, et même leur vie. Voilà ce qui se joue aujourd’hui avec cette proposition de loi visant, une fois de plus, à prolonger la durée de rétention administrative. Je dis « une fois de plus » car nous n’en sommes pas à notre coup d’essai en matière de durée de rétention. Depuis plus de dix ans, la durée maximale de rétention administrative n’a cessé de s’allonger : de 7 jours initialement –⁠ rendez-vous compte, chers collègues –, elle est passée à 45 jours en 2011, puis à 90 jours, et même à 210 jours pour les étrangers condamnés pour terrorisme.
    La rétention administrative vise à permettre à l’administration de retenir un étranger le temps pour elle d’obtenir un laissez-passer consulaire de son pays d’origine –⁠ c’est une mesure temporaire. Aujourd’hui, elle devient une peine de prison administrative pour pallier les difficultés rencontrées par l’État dans l’éloignement des personnes concernées.
    Les statistiques sont sans appel. En 2023, la durée moyenne de rétention dans les CRA de métropole était de 28,5 jours. C’est deux fois plus qu’il y a cinq ans. Cet allongement de la durée de rétention a-t-il permis d’expulser plus d’étrangers ? La réponse est non. Le nombre d’éloignements depuis les CRA de métropole a même baissé depuis quinze ans : il est passé d’environ 12 000 en 2019 à 5 400 en 2023. Ainsi, plus on augmente la durée de rétention, moins on arrive à expulser d’étrangers jugés dangereux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    M. Inaki Echaniz

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    Eh oui !

    M. Paul Christophle

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    Pas moins de 81 % des éloignements ont lieu dans les 45 premiers jours de la rétention et moins de 8 % durant les prolongations dites exceptionnelles, au-delà des 60 jours. Contrairement aux justifications avancées lors des réformes successives, l’allongement de la durée de rétention ne contribue pas à augmenter le nombre d’expulsions, voire il le diminue.
    Je suis étonné, monsieur le ministre, que vous souteniez cette proposition de loi. Le groupe LR que vous présidiez au Sénat n’avait pas de mots assez durs pour dénoncer cette mesure lors des débats relatifs à la loi « asile et immigration » de 2018. Le rapporteur du projet de loi, qui est aujourd’hui votre ministre délégué, écrivait : « le gouvernement n’avait malheureusement pas été capable de démontrer l’utilité concrète de l’allongement de la durée maximale de rétention » –⁠ de 45 à 90 jours à l’époque. Il regrettait « une mesure d’affichage, qui ne [s’attaquait] pas à la cause profonde des taux dérisoires d’éloignement […] et qui [risquait] d’être extrêmement coûteuse humainement et financièrement […] ». Il préconisait alors, « plutôt que de se focaliser inutilement sur la durée maximale de la rétention », de se concentrer sur des solutions « plus efficaces » et « plus respectueuses des libertés individuelles […] ».

    M. Inaki Echaniz

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    Vous étiez contre il y a plusieurs années au Sénat !

    M. Paul Christophle

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    Que s’est-il passé, entre 2018 et 2025, pour que votre famille politique quitte ainsi le monde de la raison pour celui des faux-semblants ? La réalité est que vous faites le choix de la facilité en optant pour une mesure d’affichage sans vous attaquer aux causes réelles des difficultés d’éloignement, en l’occurrence l’incapacité à obtenir des laissez-passer consulaires. Vous pouvez allonger autant que vous voudrez la durée de rétention administrative, tant que vous abîmerez nos relations diplomatiques avec les pays vers lesquels vous souhaitez renvoyer des étrangers, vous n’arriverez jamais à rien.
    Avec cette loi, vous laissez des hommes et des femmes croupir dans des centres de rétention, dans l’angoisse, dans l’isolement et dans la souffrance. Vous créez une zone grise, une impasse juridique et humaine pour des milliers de personnes, qui ne sont ni régularisables ni expulsables –⁠ et vous faites croire aux Françaises et aux Français que c’est cela, la fermeté.
    Cette proposition de loi sur le maintien en rétention est inutile car inefficace, dangereuse car attentatoire aux libertés fondamentales, et indigne car fondée sur un présupposé discriminatoire. Ne comptez pas sur nous pour soutenir de telles dérives ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ian Boucard.

    M. Ian Boucard

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    Nous examinons aujourd’hui une proposition de loi très importante, déposée par la sénatrice Les Républicains Jacqueline Eustache-Brinio et adoptée par le Sénat, qui vise à permettre le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive.
    Chacun ici connaît l’ampleur du défi. Chaque année, plus de 100 000 obligations de quitter le territoire français sont prononcées, mais à peine 11,5 % sont effectivement exécutées. Des individus condamnés pour des crimes graves, qu’il s’agisse de terrorisme, de viol, de violence aggravée ou de trafic de stupéfiants, sont ainsi relâchés dans nos rues –⁠ les rues de France –, faute de base juridique suffisante pour les maintenir en rétention au-delà de 90 jours.

    M. Pierre Cordier

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    Eh oui !

    M. Ian Boucard

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    Cette situation inacceptable alimente un sentiment d’impuissance dans les préfectures et chez les forces de l’ordre. Surtout, elle expose nos concitoyens à des risques très importants. Nous ne pouvons plus tolérer qu’un individu condamné pour viol ou pour violence sorte libre d’un CRA, simplement parce que la loi ne permet pas de le maintenir en rétention jusqu’à l’exécution effective de son éloignement. En 2023, plus de 1 200 étrangers condamnés pour des crimes ou délits graves n’ont pas pu être expulsés à l’issue de leur peine. Il est temps de lutter contre cette impunité insupportable pour les profils les plus dangereux.
    La proposition de loi que nous allons examiner apporte des réponses concrètes et équilibrées. Elle prévoit d’étendre le recours à la rétention administrative pour les profils les plus dangereux, en élargissant la liste des infractions concernées –⁠ à l’initiative de M. le rapporteur, Olivier Marleix, que je salue – et en adaptant la durée maximale de rétention jusqu’à 210 jours, sous le contrôle du juge. Elle renforce les garanties procédurales, telles que le contrôle juridictionnel systématique, le respect des droits de la défense et la traçabilité des conditions de rétention.
    Cette loi n’est pas une loi d’exception. Elle ne remet pas en cause l’État de droit. Au contraire, elle donne enfin aux forces de l’ordre, aux magistrats et aux préfets les outils qui leur manquent pour protéger les Français, tout en respectant les droits fondamentaux de chacun. Elle replace la France dans les standards européens de sécurité, alors que nos voisins tels que l’Allemagne, l’Italie ou encore le Royaume-Uni disposent déjà de dispositifs bien plus sévères pour maintenir en rétention les étrangers dangereux.

    M. Pierre Cordier

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    Très bien !

    M. Ian Boucard

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    Cette loi rétablit un principe simple : celui de la responsabilité. Un individu condamné pour des faits graves ne peut pas se prévaloir d’un droit automatique à rester sur notre sol. Il est de notre devoir de protéger nos concitoyens contre la récidive de gens dangereux qui n’ont rien à faire sur notre territoire après l’exécution de leur peine.

    Mme Christine Arrighi

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    C’est votre échec !

    M. Ian Boucard

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    Pour toutes ces raisons, le groupe Droite républicaine, présidé par Laurent Wauquiez, votera évidemment pour cette proposition de loi.

    M. Pierre Cordier

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    Très bien !

    M. Ian Boucard

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    Il me reste deux minutes et dix-huit secondes, j’ai un peu de temps devant moi. Collègues de gauche, comme je l’ai indiqué lors de mon explication de vote relative à la motion de rejet préalable, à force de vouloir tout défendre, vous ne défendez rien. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Et vous, à force de tout réprimer, vous ne réprimez rien !

    M. Ian Boucard

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    Nous pourrions pourtant nous entendre. Certes, nous sommes en désaccord profond quant au fait de défendre le droit au maintien sur le territoire pour les étrangers entrés de manière irrégulière sur le sol français (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP) ; mais j’entends votre raisonnement. En ce qui concerne cette proposition de loi, cependant, vous défendez le droit au maintien sur le territoire des étrangers dangereux ; là, je ne vous suis plus du tout. Comment pouvez-vous défendre le droit de se maintenir sur le sol français de quelqu’un qui a violé, tué, agressé les forces de l’ordre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. Thibault Bazin

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    Comment pouvez-vous défendre ça ?

    M. René Pilato

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    C’est vous qui êtes au pouvoir ! C’est le bilan de votre politique ! C’est vous qui avez du sang sur les mains !

    M. Ian Boucard

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    Cela fait s’écrouler tout votre raisonnement. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous êtes totalement incohérents sur ce point. (Mêmes mouvements.)
    Ensuite, je voudrais dire au groupe UDR présidé par M. Éric Ciotti, qui nous a parfois reproché de ne pas être assez présents, que la proposition de loi que nous examinons est essentielle pour protéger les Français des étrangers les plus dangereux.

    M. Pierre Cordier

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    Ils sont absents !

    M. Ian Boucard

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    Président Ciotti, soyez présent dans l’hémicycle lors de l’examen des textes vraiment importants pour protéger les Français et pas uniquement lors de vos niches, pour conduire des opérations de communication ! Aujourd’hui, personne de votre groupe n’est présent. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    Évitez de vous interpeller, a fortiori quand les députés concernés ne sont pas là ! La parole est à M. Hendrik Davi.

    M. Hendrik Davi

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    La proposition de loi que nous examinons vise à allonger le délai de placement en rétention administrative d’un étranger condamné à une interdiction du territoire français. Alors que la loi « asile et immigration » a déjà allongé la durée de rétention de 45 à 90 jours, vous souhaitez désormais la porter à 210 jours et viser les étrangers menaçant l’ordre public. Admettez qu’avec ce concept flou, tout étranger en situation irrégulière, parfois momentanément, peut être gardé en centre de rétention.
    Même de votre point de vue, vous devriez comprendre qu’allonger la durée de rétention n’a pas d’effet sur le nombre d’expulsions à la sortie des centres de rétention administrative. Alors que depuis plus de huit ans, la durée moyenne de rétention a augmenté de 156 %, dans le même temps, le pourcentage de personnes expulsées de l’Hexagone en sortie de CRA n’a pas bougé –⁠ il stagne autour de 40 %. Par ailleurs, la France expulse déjà de nombreux étrangers. Depuis 2022, elle est à l’origine de plus d’un tiers des mesures d’éloignement délivrées dans l’Union européenne, dont le nombre ne cesse d’augmenter.
    Derrière tous ces chiffres, chers collègues, il y a surtout des êtres humains, qui ont chacun leur histoire –⁠ nous ne l’avons pas assez souligné. Il y a deux ans, j’ai visité le centre de rétention du Canet à Marseille. J’y ai rencontré des personnes venues avec des visas, ayant obtenu des titres de séjour, ayant parfois fondé des familles et travaillé plus de vingt ans sur des chantiers dans le bâtiment. Faute de bulletin de salaire, aucune régularisation n’est possible, et puis un jour tombe une obligation de quitter le territoire français –⁠ les fameuses OQTF. Au Canet, ces personnes sont détenues dans des conditions inhumaines, dans des cellules délabrées, peu ventilées, qui deviennent de véritables fournaises. Aucune activité n’est proposée aux détenus et l’accès aux familles est minimaliste.

    Mme Christine Arrighi

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    Il n’y a plus personne sur les bancs de la Droite républicaine !

    M. Hendrik Davi

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    Mais qu’importent ces histoires, puisque toute votre bataille consiste à faire croire qu’une personne en situation irrégulière est par essence dangereuse. Vous en oubliez l’homme séparé de ses enfants en bas âge, qui croupit des mois durant dans une cellule, alors que tout le monde sait que son expulsion n’aura pas lieu, faute d’accord avec le pays où il est né. Même les gardiens sont désabusés et ne comprennent pas l’intérêt de tout cela.
    Alors pourquoi proposez-vous ce texte ? Vous avez donné la réponse, elle se trouve dans l’exposé des motifs. Cette proposition de loi n’est que l’aboutissement cynique de la récupération politique d’une tragédie qui s’est produite en septembre dernier. Le dire ici ne minimise en rien l’horreur de ce drame. Au lieu de parler du caractère systémique des viols et des meurtres perpétrés par des hommes sur les femmes, quelles que soient leur nationalité ou leur couleur de peau, vous récupérez cet événement par pure démagogie.
    La rétention administrative ne devrait pas être une incarcération et un outil répressif pour y enfermer les délinquants. C’est à la justice et au système pénal de faire ce travail. La rétention est une privation de liberté prévue dans le cadre d’une procédure d’éloignement. Dans sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel rappelle d’ailleurs qu’un étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Allonger inutilement le temps d’enfermement revient à détourner la rétention administrative de son objectif initial. Ce glissement inquiétant illustre parfaitement une logique de communication politique fondée sur la peur et une criminalisation des étrangers aussi inefficace que dangereuse.
    En outre, cette proposition de loi porte atteinte aux libertés fondamentales des retenus. Il y a une corrélation entre la durée de rétention et leur santé physique et mentale. Des associations comme la Cimade compilent, année après année, les conséquences de l’enfermement sur les personnes : suicides, tentatives de suicide, traumatismes, absence de vie privée et familiale, traitement inhumain et dégradant ou atteinte à la dignité des personnes. Lors de ma visite au Canet, de l’aveu même des agents du CRA, la plupart des retenus souffraient de troubles psychologiques. Faute de soins, ils peuvent devenir agressifs envers eux-mêmes ou les autres. Il est évident que les retenir plus longuement ne fait qu’accroître leur violence et le risque de récidive.
    Outre l’allongement de la durée de rétention, plusieurs points sont inquiétants dans cette proposition de loi. Elle supprime l’une des interventions du contrôle du juge judiciaire dans la période des 90 jours de rétention. Vous faites donc disparaître un garde-fou dans la protection des personnes retenues. Elle prévoit également de relever les empreintes digitales d’une personne et de les photographier, sans son consentement et sans avocat, ce qui revient à la nier en tant que sujet de droit.
    Plus grave encore, la rédaction de l’article 1er ne convient pas : elle élargit le champ d’application de la rétention administrative aux personnes étrangères dont le comportement représenterait une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public. Une formulation aussi vague et large laisse le champ libre à des interprétations subjectives voire abusives. Tout étranger peut se retrouver maintenu en centre de rétention administrative –⁠ c’est peut-être l’objectif de votre proposition de loi.
    Enfin, les demandeurs d’asile pourront eux aussi être retenus en cas de risque de fuite –⁠ c’est précisé dans le texte. Chers collègues, ce n’est pas en jouant avec les peurs que l’on résout les problèmes.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Pas plus qu’en refusant de les voir !

    M. Hendrik Davi

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    Cette fuite en avant sécuritaire constitue un énième symptôme d’une politique raciste, consistant à criminaliser les sans-papiers et à confondre droit des étrangers et droit pénal.
    Dans un contexte de trumpisation du monde et de chasse aux migrants, ce texte est dangereux. Ainsi, vous comprendrez que le groupe Écologiste et social votera résolument contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne Bergantz.

    Mme Christine Arrighi

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    Après nous avoir donné des leçons, la Droite républicaine n’est plus là !

    M. Sébastien Martin

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    Je suis là, moi !

    Mme Christine Arrighi et M. Jean-François Coulomme

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    Oh, il en reste un ! (Sourires.)

    Mme Anne Bergantz

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    L’expulsion des étrangers en situation irrégulière qui se rendent responsables de troubles à l’ordre public est un enjeu essentiel de la cohérence globale de notre politique migratoire. Nous avons en effet le devoir de protéger notre société en garantissant la rétention, puis l’éloignement des personnes interpellées ou condamnées pour des crimes et délits commis sur le territoire national.
    Aujourd’hui près de 90 % des étrangers retenus dans les CRA présentent déjà un profil à risque, certains étant situés dans le haut du spectre de la criminalité. Il est donc essentiel d’assurer un recours effectif à la rétention administrative afin de sécuriser leur reconduite à la frontière, tout en prévenant les risques de fuite ou de récidive et ce, le temps qu’un faisceau d’indices puisse être réuni pour confirmer l’identité des personnes et qu’un laissez-passer consulaire puisse leur être délivré par leur pays d’origine. Une telle doctrine s’avère relativement efficace, le retour à la frontière se concrétisant pour 40 % des retenus, alors que l’application des OQTF dans la population générale se situait plutôt autour de 12,5 % sur ces quinze dernières années.
    Or le délai maximal de rétention de droit commun, fixé à 90 jours, s’avère bien souvent insuffisant pour mener ces enquêtes d’identification à leur terme. D’où l’intérêt, pour les profils les plus dangereux, de faire converger à titre exceptionnel ce délai avec les 210 jours de rétention actuellement possibles pour les étrangers condamnés pour des activités terroristes.
    Au nom du groupe Les Démocrates, je tiens cependant à rappeler un principe de réalité : la saturation des CRA ne permettra pas de faire de cette prolongation à 210 jours une procédure ordinaire, et ce malgré le plan de construction qui nous permettra d’atteindre 3000 places à l’horizon 2030.
    Cette dérogation devra donc être réservée à des profils sélectionnés en fonction de leur degré de dangerosité. Je me félicite à ce titre que, lors de nos débats en commission, nous soyons parvenus à préciser une liste resserrée de crimes et délits particulièrement graves ouvrant accès à ces 210 jours maximum de rétention.
    L’examen en commission a également permis d’enrichir le texte en apportant de nouveaux outils très attendus par les services d’enquête pour faciliter l’identification des étrangers. Je pense notamment à la prise d’empreintes digitales et de photographies ; appliquée dans le strict respect de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, cette mesure permettra de recouper certaines données, notamment lorsque l’étranger a déjà été appréhendé sous plusieurs identités.
    Nous saluons par ailleurs la simplification du séquençage et des motifs de prolongation de la rétention administrative, en évitant la saisine systématique du juge des libertés et de la détention au soixante-quinzième jour, alors que les conditions de placement n’ont pas évolué. Cette suppression permettra d’éviter de mobiliser de nombreuses escortes. En effet, les déplacements pour comparaître devant le juge représentent de réels défis logistiques en termes de sécurité et de taux d’encadrement. Nous ne pouvons qu’encourager le gouvernement à poursuivre l’aménagement de salles d’audience au sein des CRA –⁠ pour des audiences physiques ou en visioconférence –, afin que des solutions de substitution aux déplacements sous escorte puissent être trouvées.
    Enfin, malgré tous ces nouveaux outils, se pose la question du sort des étrangers qui ne sont pas expulsés à l’issue de leur rétention. L’examen en commission apporte une nouvelle solution à ce problème, en permettant au juge d’imposer un dispositif de surveillance électronique mobile à l’étranger libéré après 90 jours de rétention.
    Quoi qu’il en soit, il nous faudra continuer à améliorer nos procédures, en travaillant notamment à l’identification des étrangers criminels dès le premier jour de leur détention en prison, afin de garantir une expulsion dès les premiers jours de rétention, ce qui limiterait la saturation des CRA –⁠ c’est sans doute la meilleure solution pour augmenter l’éloignement des profils dangereux.
    Le groupe Les Démocrates soutiendra ce texte, qui répond aux interrogations légitimes de nos concitoyens vis-à-vis de nos procédures. Changeons la loi pour que les étrangers présentant un risque de récidive ne soient pas remis en liberté au bout de 90 jours, et donnons-nous ainsi les moyens d’éviter de nouveaux passages à l’acte ! (M. le rapporteur Olivier Marleix et Mme Blandine Brocard applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Xavier Albertini.

    M. Xavier Albertini

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    Des délits et des crimes sont commis sur notre territoire par des étrangers en situation irrégulière, faisant l’objet, qui plus est, d’une obligation de quitter le territoire français ou d’un arrêté d’expulsion. Ces faits doivent nous interroger collectivement : comment les empêcher ? Nous pouvons reconnaître dans cet hémicycle que la seule réponse qui porte ses fruits à long terme est l’amélioration du taux d’exécution des OQTF et des mesures d’expulsion. Or une telle amélioration ne dépend pas uniquement de la France : elle dépend en grande partie, si ce n’est exclusivement, des États dont sont issues les personnes concernées.
    Nous ne pouvons plus nous contenter de constater cette situation ni de la subir. Le législateur doit prendre la part qui est la sienne dans ce débat et dans l’action. La discussion qui s’ouvre sur la présente proposition de loi sénatoriale offre à cet hémicycle un temps de vérité. Il nous revient en effet, mes chers collègues, de faire évoluer le cadre légal, de sorte qu’il permette d’éloigner effectivement du territoire national les personnes qui doivent l’être et seulement celles-là.
    C’est sous cet angle, et cet angle seulement, que se pose la question de la durée de la rétention administrative. Celle-ci permet à l’administration de maintenir contre leur gré, dans des locaux dont elle a la charge, les étrangers qui font l’objet d’une décision d’éloignement du territoire français et pour lesquels une mesure de contrainte est nécessaire à l’exécution forcée de cette décision. Bien qu’une telle mesure administrative ne soit ni une sanction ni une peine, il s’agit d’une mesure privative de liberté. À ce titre, le dispositif est placé sous le contrôle du juge judiciaire, et cela ne changera pas.
    La faiblesse du taux d’exécution des OQTF ces dernières années doit nous interroger. Le cadre juridique actuel est-il encore adapté pour favoriser l’éloignement des personnes concernées ? En effet, le taux d’exécution des OQTF a été divisé par trois en dix ans : de 22,3 % en 2012, il est passé à moins de 7 % en 2022. Si l’augmentation du nombre d’OQTF émises explique en partie cette baisse, il n’en demeure pas moins vrai que le refus des pays d’origine de délivrer un laissez-passer consulaire joue un rôle majeur dans la difficulté à les exécuter, ce qui entraîne parfois des situations dramatiques.
    On peut par ailleurs observer que l’allongement de la durée de détention favorise l’éloignement effectif. Plus de la moitié des laissez-passer consulaires délivrés l’ont été au-delà du 90e jour de rétention, c’est-à-dire après le terme du régime de droit commun. Ainsi peut-on affirmer de façon factuelle qu’une prolongation de la durée de rétention constitue un moyen efficace pour obtenir ces laissez-passer et permettre l’éloignement des personnes visées par les OQTF.
    Dans ce contexte, la présente proposition de loi vise à permettre au magistrat du siège de prolonger le maintien en rétention d’étrangers condamnés pour des faits d’une particulière gravité, et ainsi à favoriser leur retour dans leur pays d’origine.

    Mme Christine Arrighi

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    En quoi la rétention administrative favorise-t-elle les retours ? C’est contre-intuitif !

    M. Xavier Albertini

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    Le groupe Horizons & indépendants relève avec satisfaction la conformité de la présente proposition de loi avec le droit européen : en cas de retard dans l’obtention des documents nécessaires de la part des autorités étrangères, celui-ci prévoit que le placement initial en rétention peut être prolongé de douze mois maximum –⁠ bien au-delà de ce qui est prévu par le présent texte. Notre groupe se félicite aussi de l’adoption en commission des lois d’un amendement que le rapporteur a retravaillé en y intégrant les composantes d’un amendement des députés Horizons & indépendants. Tel qu’il est réécrit, cet amendement vise à restreindre le champ d’application de l’article 1er en resserrant la possibilité de prolonger la rétention administrative au-delà de 90 jours aux étrangers faisant l’objet d’une interdiction de territoire français (ITF) ; aux étrangers faisant l’objet d’une mesure l’éloignement et ayant été condamnés définitivement pour certains crimes et délits particulièrement graves, limitativement énumérés ; et aux étrangers présentant une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public.
    Nous formons le vœu que cet allongement de la durée de rétention administrative se double d’un rehaussement des moyens budgétaires affectés aux CRA, afin de garantir la dignité des étrangers retenus administrativement. Convaincu que l’allongement proposé favorisera l’éloignement des personnes sous OQTF, le groupe Horizons & indépendants soutient ce texte et votera en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac

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    Plusieurs drames liés à des individus devant faire l’objet d’une expulsion ont suscité, à juste titre, une vive émotion dans tous nos territoires. Il ne s’agit pas seulement de faits divers, mais d’un révélateur des dysfonctionnements de notre système d’éloignement. Pour nos concitoyens, l’impuissance de l’État en la matière n’est plus acceptable et ils attendent du Parlement une réponse aussi claire que possible.
    Face à ce constat, une proposition de loi a été déposée, qui vise à étendre aux étrangers condamnés à des infractions graves le régime dérogatoire de rétention administrative prévue en matière de terrorisme. Notre groupe en comprend les objectifs et prend acte du compromis trouvé par notre commission des lois. Toutefois, nous restons réservés sur ses effets.

    Mme Dominique Voynet

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    Bah, ne la votez pas alors !

    M. Paul Molac

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    Disons-le clairement, cette nouvelle prolongation de la rétention ne sera pas une solution miracle et ne permettra pas à elle seule de répondre aux attentes de nos concitoyens. La Cour des comptes a rappelé que les obstacles à l’éloignement résultent avant tout de problèmes diplomatiques dans l’obtention des laissez-passer consulaires. Or le texte élude totalement ce sujet.
    Il convient de rappeler que les dysfonctionnements actuels sont imputables à l’État et non aux juges, comme certains aimeraient le faire croire. Les discours populistes et les postures de certains membres du gouvernement n’ont eu qu’une faible traduction pratique. Ce décalage alimente la défiance citoyenne.
    La réalité est que le bilan du ministère de l’intérieur n’est pas à la hauteur des enjeux : seule une OQTF sur dix est exécutée en France. Certes, la situation reste compliquée, notamment du fait de la réglementation européenne et de certaines règles de droit qui nous empêchent de faire ce que nous voulons, mais chacun conviendra que c’est assez peu !
    La rétention administrative est un outil utile lorsqu’un étranger présente un risque de fuite ou une menace pour notre sécurité. Le régime de droit commun, limité à 90 jours, n’est parfois pas suffisant et étendre le régime de rétention dérogatoire, allant jusqu’à 210 jours, peut être pertinent dans certains cas graves.
    Si le texte issu du Sénat péchait par excès, la commission des lois a trouvé un compromis : n’étendre ce régime dérogatoire qu’aux étrangers condamnés pour des crimes particulièrement graves comme le crime contre l’humanité, le crime contre les intérêts de la nation, le meurtre ou le viol.
    Il faut toutefois nuancer l’efficacité prêtée à cette mesure. En pratique, l’État n’utilise même pas totalement les délais déjà prévus par la loi. En 2024, seuls trente-sept étrangers étaient placés sous ce régime dérogatoire de rétention, pour une durée de 117 jours. Cela reste, on le voit, une mesure d’exception, et c’est bien ainsi que nous l’entendons.
    D’autre part, généraliser la prolongation de la rétention à 210 jours aura des effets directs sur les centres de rétention, dont chacun sait ici qu’ils sont saturés. Nous disposons de vingt-six centres totalisant 2 000 places, alors même que les émissions d’OQTF progressent de manière très importante. La priorité doit être de placer en rétention les étrangers les plus dangereux. À vouloir trop étendre le périmètre, on risque de diluer les efforts et de compromettre l’efficacité de la rétention pour les cas les plus graves. En réalité, l’État ne pourra pas durablement mener une politique crédible de l’éloignement sans investissements conséquents dans ce domaine. Pour lutter contre le risque d’une remise en liberté résultant de l’impossibilité de prolonger la rétention, il devra surtout donner la priorité à la voie diplomatique.
    Même si ce texte est adopté, le juge restera tenu de mettre fin à la rétention dès que les conditions ne seront plus remplies. Là encore, il est vain de s’attaquer aux juges, les critères étant fixés par la loi, dans les limites prévues par la Constitution. Le juge est tenu de s’assurer que « l’éloignement reste une perspective raisonnable ». La balle est donc dans le camp de l’État : c’est à l’administration de tout mettre en œuvre pour éloigner dans des délais utiles.
    La priorité devrait donc être de repenser notre politique diplomatique afin d’améliorer le taux d’obtention des laissez-passer consulaires, lequel s’établit actuellement à 30 %, voire à 10 % pour certains pays. Notre groupe est au regret de constater que rien dans le texte ne permet de répondre à cette question.

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Nombreux sont ceux qui ont évoqué le drame vécu par Philippine et par sa famille. Ce type d’événement devrait nous inviter à légiférer en faisant preuve de détermination et de prudence plutôt que d’empressement et de démagogie. En l’occurrence, la présente proposition de loi est un exemple –⁠ un mauvais exemple – de ce que peut être l’exploitation d’un crime abject ; elle constitue une solution à la fois indigne et inefficace.
    Elle contribue à une forme de brutalisation de notre État de droit : nos débats montrent bien qu’il s’agit d’abord de montrer du doigt ceux qui seraient, selon vos termes, les « très méchants » –⁠ cette expression a par exemple été utilisée pendant l’examen de la dernière loi « immigration » –, afin de traiter leur cas en dehors de tout cadre judiciaire, comme pour se débarrasser de nuisibles. Ce sont des termes que nous avons souvent entendus ; ils servent à justifier des dérogations qui finiront par s’appliquer à tous.
    En réalité, le texte que nous examinons ne cherche pas à répondre à des drames : c’est un texte idéologique dont l’objectif premier est de faire de l’immigré un délinquant voire un terroriste –⁠ j’y reviendrai, mais la durée choisie pour allonger le maintien en rétention en témoigne. Je veux dire à quel point cela doit résonner comme une alerte pour nous toutes et tous, car lorsqu’on s’en prend ainsi à celui qui est jugé comme l’autre, comme l’étranger par nature délinquant ou criminel, c’est la volonté de restreindre les droits de toutes et tous qui fait son chemin.
    C’est précisément l’objet de cette proposition de loi populiste qui est, comme nombre des lois d’affichage proposées ces dernières années, mensongère, dangereuse et inutile. Elle renforce, je le disais, un amalgame entre immigration et délinquance, faisant de l’irrégularité du séjour un crime en soi –⁠ ce qui, je le rappelle, n’est pas le cas.
    Je veux aussi rappeler que la très grande majorité des OQTF qui sont délivrées dans notre pays sont prononcées envers des personnes qui n’entretiennent aucun lien avec la criminalité, mais qui sont simplement déboutées d’une demande d’asile ou de séjour. La France est responsable d’un tiers des OQTF à l’échelle européenne.
    Cette mesure est donc d’abord inefficace ; d’ailleurs, aucune évaluation n’a été menée par l’État sur les effets de la loi de 2018, qui avait déjà doublé la durée maximale de rétention en la faisant passer de 45 à 90 jours. Pourtant, les associations présentes dans les centres de rétention en mesurent les conséquences concrètes dans leurs rapports annuels. Les visites que nous faisons dans ces centres, au cours desquelles nous interrogeons les personnels qui y sont présents, le prouvent : alors que la durée moyenne de rétention n’a jamais été aussi élevée, la proportion d’éloignements a diminué.
    La durée moyenne d’enfermement atteint près de 33 jours en 2024, soit près de deux fois et demie plus qu’il y a sept ans. Les éloignements ont lieu dans les premiers jours de rétention : moins de 20 % d’entre eux ont lieu après 45 jours et moins de 8 % après 60 jours.
    En fait, l’augmentation du nombre de jours de rétention n’a aucun rapport avec la décision d’éloigner ou pas, et je crois que vous le savez. En revanche, l’absence de vol vers des pays à risque, l’absence de reconnaissance consulaire ou encore des relations diplomatiques perturbées sont autant de raisons qui peuvent conduire à ne pas éloigner un individu ; augmenter le nombre de jours de rétention n’y change rien.
    Ensuite, cette mesure dévoie l’objet légal de la rétention. La rétention est en principe un éloignement à brève échéance et non un outil de prolongation de la détention pour des personnes ayant déjà purgé une peine –⁠ ou n’ayant jamais été condamnées, d’ailleurs. En d’autres termes, un centre de rétention administrative n’est pas une prison : les personnes ne sont pas enfermées pour des crimes ou des délits ; elles le sont pour la simple raison qu’elles se trouvent sur le territoire en situation irrégulière et que l’administration souhaite –⁠ et peut – mettre en œuvre leur expulsion.
    Pourtant, les lois successives qui ont été votées sur l’immigration, tout comme l’article 1er de la présente proposition de loi, conditionnent davantage la rétention à la menace potentielle que représente la personne concernée pour l’ordre public, selon l’administration, qu’aux perspectives d’éloignement à bref délai de ladite personne.
    Pour résumer –⁠ je crois que vous l’avez compris –, l’allongement de la durée de rétention n’a aucun effet sur les objectifs que vous affichez ;…

    Mme Christine Arrighi

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    C’est vrai !

    Mme Elsa Faucillon

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    …en revanche, elle détériore profondément les conditions de la rétention. C’est vrai, monsieur le ministre, à la fois pour les personnes retenues, mais aussi pour les personnels des centres de rétention, dont vous semblez n’avoir absolument que faire. Nous voterons évidemment contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Matthieu Bloch.

    M. Matthieu Bloch

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    Le 27 juin au soir, alors que nous examinions la niche parlementaire du groupe UDR, le ministre de la justice s’est livré à un exercice malheureusement familier aux membres du gouvernement : celui du mépris.

    M. Emeric Salmon

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    Ils ne sont pas nombreux à être présents, d’ailleurs !

    M. Matthieu Bloch

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    Mépris envers notre président Éric Ciotti, mépris envers nos députés ;…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est vous qui avez méprisé votre propre niche ! Vous êtes des amateurs !

    M. Sébastien Martin

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    Les caniches de Marine Le Pen !

    M. Matthieu Bloch

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    …mépris, surtout, envers les Français qui attendaient l’adoption de ces propositions –⁠ elles auraient pu, auraient dû être votées par une majorité de bon sens.
    Et pourtant, quelques jours plus tard, nous sommes là, présents, cohérents, responsables, pour voter une proposition de loi que nous n’avons pas déposée, que nous n’avons pas amendée, mais que nous soutenons, car elle introduit une mesure de protection de nos concitoyens : elle permet de maintenir en rétention les étrangers condamnés pour des crimes d’une particulière gravité, et qui n’ont donc plus rien à faire sur le sol français.
    Contrairement au groupe Droite républicaine et à ses alliés macronistes jeudi dernier, nous voterons ce texte, car nous refusons de faire payer à la sécurité des Français le prix de l’orgueil politicien. Nous voterons ce texte parce qu’il répond à ce que l’immense majorité des citoyens attend : du sérieux, de la fermeté et du bon sens (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP),…

    Mme Christine Arrighi

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    Populistes ! Vous savez très bien que ça ne marchera pas mais vous voterez quand même, parce que vous êtes populistes !

    M. Matthieu Bloch

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    …pour répondre à une situation scandaleuse : des hommes condamnés pour viol, meurtre ou proxénétisme sont libérés au bout de 90 jours faute de pouvoir être expulsés.
    Un rapport d’information sénatorial le disait déjà en 2021 : plus de 1 500 étrangers condamnés pour des faits graves se retrouvent en liberté chaque année, en l’absence d’exécution des mesures d’éloignement. Voici ce qu’il en est : des procédures interminables, des consuls absents et, au bout du compte, des Français assassinés ! Comme l’a rappelé le Conseil d’État le 19 juillet 2022, « la durée de rétention ne doit pas aboutir à des libérations quasi automatiques, faute de perspectives réalistes d’éloignement ». Pourtant, l’administration répond trop souvent qu’elle a respecté les délais. Le droit est devenu une camisole et la sécurité publique, une victime collatérale.
    Le texte de notre collègue Olivier Marleix corrige cette absurdité. Il le fait avec méthode, en fixant à 210 jours la durée maximale de rétention pour les profils les plus dangereux, en plaçant le juge au cœur de la décision, en listant précisément les infractions concernées et enfin en respectant le principe de proportionnalité. Pourtant –⁠ faut-il le souligner ? –, ce texte n’a été rendu possible que parce que le Sénat a tenu bon. Il est vrai que du côté du gouvernement, on préfère souvent fermer les yeux, nous traiter de radicaux et jouer, comme jeudi dernier, la carte de la diversion, de l’attaque ad hominem, de la posture morale.
    Mais aujourd’hui, monsieur le ministre, en votant ce texte avec nos alliés du Rassemblement national, nous vous aidons. Oui, nous vous aidons à exécuter les décisions d’éloignement que vous brandissez comme des priorités sans toujours pouvoir les appliquer. Ironie cruelle : ceux que le fameux socle commun –⁠ dont vous faites partie – méprise sont aussi ceux qui rendent possible votre action.
    Ce qui nous sépare du bloc central, disons-le clairement, ce n’est pas une différence de degré : c’est une différence de nature. Nous ne voulons pas rééduquer les Français ; nous voulons les protéger. Nous ne voulons pas imposer une société abstraite ; nous voulons défendre un peuple concret, enraciné, qui en a assez d’être trahi.

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Ça ne veut rien dire, tout ça !

    M. Matthieu Bloch

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    Entre l’extrême gauche qui rêve d’abolir les frontières et l’extrême centre qui s’échine à les rendre inopérantes, nous choisissons la France réelle, celle des villages où l’on se demande pourquoi tel individu, connu pour ses condamnations, est encore là ;…

    M. Antoine Léaument

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    Marine Le Pen, par exemple ?

    M. Emeric Salmon

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    Elle est française, pour info !

    M. Antoine Léaument

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    Ou M. Balkany, ou M. Sarkozy !

    M. Matthieu Bloch

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    …celle des victimes oubliées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR.) Et à vous, collègues du groupe DR, permettez-nous une remarque amicale mais lucide : nous sommes toujours là pour soutenir vos propositions dès lors qu’elles sont justes, utiles, nécessaires au pays. Mais combien de fois avez-vous été là pour soutenir les nôtres ? Combien de nos textes avez-vous votés, malgré leur convergence avec les vôtres ? Vous semblez courir après nos électeurs mais durant ce mandat, combien de fois les avez-vous méprisés par votre absence, votre courageuse abstention, voire votre opposition ?
    Si nous sommes capables de voter ensemble aujourd’hui, pourquoi ne l’étions-nous pas jeudi dernier ? Si nous sommes d’accord pour prolonger la rétention des criminels étrangers, pourquoi ne pas nous être accordés pour interdire les mariages des personnes faisant l’objet d’une OQTF ? La réponse est entre vos mains. (Mêmes mouvements.)
    En attendant, nous faisons notre part : nous voterons ce texte. Nous assumons de le voter avec vous et nous espérons qu’un jour, vous ferez enfin preuve de courage en cessant d’être les idiots utiles de la gauche et du centre mou, héritiers de ce stupide cordon sanitaire mitterrandien qui a tant abîmé la droite et notre pays.

    M. Julien Guibert

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    Eh oui ! Excellent !

    M. Matthieu Bloch

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    Les Français, monsieur le ministre, vous jugeront non à vos discours, mais aux votes de votre groupe, à vos actes, aux seuls faits. Chers collègues qui aimez la France, l’heure est venue de comprendre que le redressement national exige l’union des patriotes. Comme nos amis italiens ont su le faire autour de Giorgia Meloni (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS),…

    M. Antoine Léaument

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    Ben voyons !

    M. Matthieu Bloch

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    …nous savons que seule l’alliance des forces nationales et populaires peut sauver notre pays de son déclin tant avancé, à cause de la gestion calamiteuse de celles et ceux qui sont au pouvoir depuis plus de quinze ans. Ceux-là prétendent désormais vouloir sauver le pays contre des gens plus raisonnables qu’eux, qu’ils extrémisent à souhait, illustrant parfaitement l’idée que l’on se fait d’un pompier pyromane. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    Que c’était long !

    M. le président

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    La parole est à M. Michaël Taverne.

    M. Antoine Léaument

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    Allez ! Après la première couche, la deuxième !

    M. Michaël Taverne

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    La présente proposition de loi, qui vise à faciliter le maintien en rétention des personnes étrangères condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive, va dans le bon sens. On peut cependant noter qu’elle ne changera rien, fondamentalement, au problème lié à l’immigration massive et incontrôlée que connaît notre pays.
    Cette proposition, faite suite à l’assassinat de la jeune Philippine par un Marocain sous OQTF –⁠ ce n’est malheureusement pas le seul exemple –, est révélatrice d’un État français qui ne maîtrise plus rien, notamment du fait de la succession de gouvernements laxistes, incompétents, bien pensants, qui ont toléré l’intolérable et qui ont pensé pendant longtemps que l’immigration était systématiquement une chance pour la France.
    En matière d’insécurité, les chiffres sont parlants. Par exemple, dans l’agglomération parisienne, 36 % des mis en cause sont étrangers ; la proportion monte à 40 % pour les violences sexuelles, à 50 % pour les cambriolages et à 80 ou 90 % pour les vols à la tire. Ce phénomène est aussi observé dans les grandes métropoles françaises et je rappelle par ailleurs qu’en France, 25 % des détenus sont étrangers.
    Le lien entre immigration et insécurité est incontestable ; c’est d’ailleurs un avis très largement partagé dans le pays, puisqu’un sondage récent montre que 74 % des Français considèrent que ce lien existe. On retrouve même cette idée dans le camp macroniste, puisque notre collègue Rodwell le pense également, même s’il fait figure d’exception.
    La durée de rétention administrative prévue par la directive « retour » de 2008 peut atteindre dix-huit mois, laissant aux États membres beaucoup de souplesse. En Allemagne, cette durée est effectivement de dix-huit mois ; elle est de huit mois en Belgique et de 90 jours en Italie, où elle peut cependant être étendue si des obstacles administratifs subsistent. En Suède et au Danemark, cette durée est illimitée ; pourtant, au Danemark c’est la gauche qui gouverne ! En France, elle ne peut dépasser 90 jours sauf en cas d’activités terroristes ; cette durée est bien en deçà de celle qui a cours chez nos voisins européens.
    D’autres pays font, bien plus que nous, preuve d’objectivité. Regardez la gauche au Danemark ou au Royaume-Uni : elle veut de la fermeté ! En France, en revanche, elle veut libérer les détenus,…

    M. Antoine Léaument

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    Non, ce n’est pas vrai !

    M. Jérôme Buisson

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    Si, c’est vrai !

    M. Antoine Léaument

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    Non !

    M. Michaël Taverne

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    …a plus de compassion pour les voyous que pour les victimes et s’oppose sans problème à un texte visant à lutter contre le narcotrafic. En commission des lois, la gauche a voté contre la présente proposition de loi, qui vise pourtant à écarter de la société les personnes en situation irrégulière et qui représentent un danger. En matière de laxisme, on ne fait pas mieux que la gauche française, qui tape du matin au soir sur nos policiers et nos gendarmes, mais est incapable de soutenir des propositions de loi qui ont pour seul objectif de protéger les Français !
    On sait depuis longtemps dans quel camp vous êtes. Sous Emmanuel Macron, nous connaissons une explosion de l’immigration légale et illégale. Rien que pour l’année 2024, 343 000 titres de séjour ont été délivrés, record toute catégorie pour un gouvernement macroniste soutenu et aidé par le groupe DR –⁠ il ne faut pas l’oublier ! Quand on veut de la fermeté en matière de politique migratoire et quand on parle comme le Rassemblement national, on ne soutient pas un gouvernement pro-immigration. N’est-ce pas, monsieur le ministre ? Voilà votre bilan macroniste.

    M. Antoine Léaument

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    Vous n’avez pas voté la censure !

    M. Michaël Taverne

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    Il est très facile de faire les constats que tout le monde fait depuis trente ans ! Vous faites semblant de faire mais vous ne faites pas, à part quand vous piochez dans le programme de Marine Le Pen. C’est votre côté « en même temps » ! Vous parlez de fermeté, mais votre bilan n’est pas fameux. Homicides : plus 33 %. Infractions sur les stupéfiants : plus 15 %. Violences volontaires : plus 10 %. Violences sexuelles : plus 5 %. Vols, plus 8 %. Et ce sont vos propres chiffres !

    M. René Pilato

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    Tout ça malgré la surenchère pénale ! Cela montre bien que ce que vous proposez ne sert à rien !

    M. Michaël Taverne

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    Je ne parle même pas des mensonges que vous répétez aux policiers et aux gendarmes. Vous promettez des postes supplémentaires, mais ils n’arrivent pas. Vous annoncez des propositions sur la filière investigation, qui est en grande difficulté, mais on les attend toujours et les syndicats sont en colère. Pour votre parfaite information, les macronistes, que vous soutenez, ont voté avec La France insoumise contre le rétablissement des peines planchers à l’égard des auteurs de crimes et de délits commis envers les forces de l’ordre.

    Mme Nadine Lechon

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    Et voilà !

    M. Michaël Taverne

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    Monsieur le ministre, vous êtes membre du parti Les Républicains, n’est-ce pas ? Où étaient les députés du groupe qui en est l’émanation à l’Assemblée, à savoir la Droite républicaine, lors de notre niche parlementaire ? Nous voulions expulser les délinquants étrangers, mais le ministère de l’intérieur s’y est opposé ! Sur les bancs DR, seuls huit collègues sur quarante-trois ont participé au vote. Lors de l’examen du texte narcotrafic, au mieux ils étaient quatre, et jeudi dernier, pour interdire le mariage avec une personne sous OQTF, il n’y avait personne. Si les Français ont besoin de quelque chose, qu’ils n’aillent donc pas voir les DR, qui sont portés disparus !
    Tout le monde a bien compris, monsieur le ministre, que votre volonté de rester à Beauvau ne tient qu’au tremplin qui vous est ainsi offert pour votre com’ et votre agenda personnel. Les Français ne sont pas dupes et les forces de l’ordre n’ont rien à attendre de vous. D’ailleurs, ils l’ont bien compris depuis quelques semaines.

    M. René Pilato

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    Vous les laissez au pouvoir en ne votant pas la censure !

    M. Michaël Taverne

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    Avec Marine Le Pen, nous proposons depuis longtemps aux Français un référendum, car ils n’ont jamais été consultés sur cette question.

    M. Jean-François Coulomme

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    Rendez l’argent !

    M. Michaël Taverne

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    Notre texte est prêt et vous feriez bien de vous en inspirer, monsieur le ministre. Pendant la campagne des élections européennes, Jordan Bardella parlait de double frontière, l’une à l’extérieur de l’Europe et l’autre à l’intérieur. Beaucoup disaient que c’était n’importe quoi, qu’ils ne comprenaient même pas de quoi il s’agissait, alors que c’est extrêmement simple –⁠ les Allemands eux-mêmes, après les attaques de Solingen ou encore de Mannheim, ont évoqué cette double frontière. Mais il faudrait aussi supprimer les pompes aspirantes des aides sociales en France, ce serait également une mesure permettant de lutter contre l’immigration incontrôlée. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    Les centres de rétention administrative sont également un gouffre pour les finances publiques, puisque le coût d’une personne retenue est évalué à 602 euros par jour. À l’heure où l’on demande aux Français de se serrer la ceinture, il serait temps de faire des économies sur l’immigration. Cela tombe bien, c’est ce que propose le Rassemblement national.

    M. Jean-François Coulomme

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    On parle de personnes qui fuient la mort !

    M. Michaël Taverne

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    Nous voterons donc cette proposition de loi qui vise à protéger un peu plus les Français, même si elle ne changera fondamentalement pas grand-chose. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Vincent Caure.

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Enfin quelqu’un de bien !

    M. Vincent Caure

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    Le texte qui nous est soumis tend à faciliter la rétention des personnes condamnées ou dangereuses dans le cadre de l’exécution des mesures d’éloignement qui ont été prononcées à leur encontre. Nous le savons, certains étrangers, le temps de leur éloignement, peuvent troubler l’ordre public. De surcroît, la mesure d’éloignement peut être difficile à exécuter, surtout lorsque les pays concernés refusent de délivrer les laissez-passer consulaires.
    Rappelons d’abord que le premier objectif de la rétention administrative est d’éviter que la personne ne puisse se soustraire à la mesure d’éloignement. Je suppose, du moins je l’espère, que nous partageons, sur tous ces bancs, le même but : garantir l’expulsion des étrangers en situation irrégulière, à commencer par les étrangers dont la condamnation en justice aura révélé la dangerosité.
    La rétention ne saurait être une peine complémentaire comme le voudraient les députés du Rassemblement national, qui vont jusqu’à proposer de facturer la nuitée en CRA !
    La rétention n’est pas davantage une mesure d’autoritarisme. Nous ne saurions nous en passer dans notre État de droit, car le taux d’exécution des OQTF est meilleur pour celles qui concernent les étrangers placés en rétention –⁠ presque 40 %. La rétention laisse le temps d’obtenir plus certainement un laissez-passer consulaire. Il s’agit de donner à l’État les moyens d’éloigner ceux qui doivent l’être.
    Nous ne saurions nous en passer car certains étrangers, comme certains citoyens, sont dangereux en ce qu’ils troublent et menacent l’ordre public : aux citoyens français, la prison sur notre territoire ; aux étrangers, l’exécution de leur mesure d’éloignement.
    La rétention ne peut être une mesure générale ou qui concernerait trop de personnes. Indépendamment de toute considération sur les places disponibles en CRA, les mesures privatives de liberté décidées par l’autorité administrative, toujours sous le contrôle du juge judiciaire, se doivent de demeurer proportionnées et nécessaires.
    C’est pour cette raison que les groupes EPR, Démocrates et Horizons & indépendants avaient, tout comme le président de la commission des lois, déposé en commission des amendements identiques en ce sens pour réaffirmer qu’il n’y a pas de chemin possible sans proportionnalité et sans restriction de la mesure proposée. Nous avons pu aboutir à un compromis sur cet article 1er, qui est au cœur du texte. Le groupe EPR salue cette avancée qui a permis que l’article soit largement adopté. Outre les améliorations légistiques apportées à la copie issue du Sénat, nous avons pu restreindre le champ d’application de l’article.
    Notre groupe se montre en revanche plus réservé pour l’article 3, qui tend à modifier le séquençage de la rétention administrative de droit commun. Cette disposition s’éloigne en effet du périmètre initial et de l’objet premier de ce texte, qui devait concerner la seule rétention des individus sous OQTF condamnés pour des faits graves. L’article 3 tend en effet à modifier le séquençage de la durée de droit commun de 90 jours, et non la procédure dérogatoire conduisant à la rétention de 210 jours.
    Il nous semble par ailleurs qu’une telle mesure ne saurait être prise sans étude d’impact ni débat approfondi.
    Nous ne sommes pas plus favorables à la rédaction actuelle de l’article 3  ter.
    Avant d’examiner plus avant cette proposition de loi, il nous faut à présent faire la critique de deux lectures opposées qui aboutiraient hélas au même résultat : préférer le statu quo à toute évolution de notre droit. Contrairement à ce que nous avons entendu en commission, il ne s’agit nullement, par ce texte, de créer une nouvelle durée de rétention ni de déborder du cadre européen de la directive « retour », loin de là.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ça c’est sûr, avec la majorité de droite et d’extrême droite au sein des instances européennes, ce n’est pas la peine d’aller plus loin !

    M. Vincent Caure

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    Nous ne faisons pas de la rétention prolongée une obligation, mais nous étendons ce qui reste une faculté, toujours avec l’aval du juge judiciaire. Nous ne visons, contrairement à ce qui a été asséné en commission, que les étrangers dangereux et non l’ensemble des personnes placées sous OQTF.
    Pour appliquer ce texte, nous devrons nous appuyer sur les budgets et les plans approuvés par le passé, en particulier le plan visant à porter à 5 000 le nombre de places en centres de rétention administrative. Nous pouvons faire évoluer notre droit, mais ce qui sera décisif pour assurer l’application de ce texte reste la qualité des moyens que nous mettrons à la disposition des policiers et des gendarmes. Nous devons nous refuser à ne légiférer que sous le coup de l’actualité. Jamais notre assemblée ne s’est grandie de législations qui avaient pour seul fondement le fait divers.
    Enfin, disons-le, si ce texte est utile, il ne réglera pas toutes les questions que peut poser, en termes d’ordre public, la présence de citoyens dangereux en situation irrégulière. La solution ne réside nullement dans la régularisation massive telle que la proposent certains sur ces bancs ; elle ne se trouvera pas davantage dans le seul champ intérieur, puisque c’est aussi au niveau des relations internationales qu’il faut aussi agir.
    Seule une évolution de la délivrance des laissez-passer consulaires permettra de régler ce problème sur le long terme.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Ensemble pour la République votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    Bravo !

    M. le président

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    La discussion générale est close.
    La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Puisque vous m’autorisez à dire quelques mots, je commencerai par m’adresser à Céline Hervieu, qui a parlé de loi xénophobe –⁠ d’autres, sur ces bancs, auront même qualifié ce texte de raciste.

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est possible !

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Nous regrettons que des termes aussi forts soient banalisés, employés hors de propos (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR),…

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous, nous regrettons qu’ils aient à être employés !

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    …au risque d’en diluer le sens et surtout, de désarmer notre capacité collective à dénoncer les véritables discriminations. Nous devons, sur un tel sujet, faire preuve de la plus extrême prudence. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    On a quand même un ministre qui a parlé de Français de papiers et qui est favorable aux des statistiques ethniques ! Il faudra nous expliquer !

    M. Jean-François Coulomme

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    Il y en a un qui doit se sentir visé !

    M. Ugo Bernalicis

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    Oh, il n’a pas honte, c’est son fonds de commerce politique !

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    En réalité, beaucoup d’erreurs ont été commises dans les interventions au cours de la discussion générale –⁠ je ne peux croire qu’elles ont été volontaires.
    Monsieur Bernalicis, vous avez cité l’exemple d’une personne, homme ou femme, enfant, mineur, adolescent ou adulte, qui serait victime, par exemple, de la traite des êtres humains. Vous avez dit que, par ce texte, nous condamnerions cette personne à la rétention. C’est tout l’inverse qui est prévu dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : les victimes de la traite des êtres humains peuvent obtenir un titre de séjour, précisément parce qu’elles sont victimes. Elles ne sont donc en rien concernées par la situation que nous ciblons ; au contraire, elles sont protégées.

    M. Ugo Bernalicis

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    Elles seront condamnées pour trafic de stupéfiants ! Ne faites pas semblant de ne pas avoir compris.

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    Madame Faucillon, vous avez dit que nous faisions de l’irrégularité du séjour un crime en soi. Mais il n’est pas question de prolonger la rétention pour de simples personnes en situation irrégulière. Ces personnes ne sont pas du tout concernées par cette proposition de loi et ce n’est pas ce qui est prévu à l’article 1er.
    J’en profite pour en reprendre les quelques points, dont nous pourrons discuter à nouveau lors de la présentation des amendements de suppression. Cela a été dit à plusieurs reprises –⁠ j’ai d’ailleurs remercié le rapporteur d’avoir accepté un compromis –, j’ai souhaité que nous réduisions le champ des infractions pour lesquelles la durée de rétention pourrait être portée de 90 à 210 jours, afin de nous en tenir à l’annonce faite par le gouvernement il y a quelques mois de cibler –⁠ l’expression ne me semble pas des plus heureuses – les criminels les plus importants, en particulier ceux qui se seraient rendus coupables d’un crime de sang, si ma mémoire est bonne, monsieur le ministre.
    Par ailleurs, les mesures d’interdiction du territoire français sont des décisions judiciaires. Personne n’est en situation irrégulière par nature. C’est une décision qui peut assortir automatiquement une autre peine, ou bien être prononcée par le juge. En tout cas, les infractions qu’elle accompagne sont toutes relativement graves. Vous les retrouvez dans le rapport d’Olivier Marleix : association de malfaiteurs, proxénétisme, vol avec violence, viol sur majeur, homicide volontaire, violence par conjoint ou concubin, agression sexuelle sur mineur. Ce ne sont pas des personnes qui seraient simplement en situation irrégulière qui sont concernées par la disposition, mais des personnes qui ont été condamnées par la justice et à l’encontre desquelles a été prononcée une interdiction de territoire français, la fameuse ITF.

    M. Antoine Léaument

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    Il y a aussi les personnes représentant une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public !

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    J’en viens au troisième point, les personnes représentant une menace d’une particulière gravité. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Hendrik Davi a dit, me semble-t-il, qu’au fond tous les étrangers seront concernés. Lui aussi a employé une expression qui a sans doute, là encore, dépassé sa pensée, celle de chasse aux étrangers. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Ce n’est pas, bien évidemment, l’objectif de ce texte. Les menaces d’une particulière gravité sont définies depuis longtemps par le juge administratif. Par exemple, ce ne sont pas les simples menaces ni les simples troubles à l’ordre public.

    M. René Pilato

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    Quels seront vos critères d’appréciation ?

    M. Florent Boudié, président de la commission des lois

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    Ce sont des actes d’une réelle gravité, comme le refus d’obtempérer accompagné de violences, les violences commises en réunion, la répétition, la pluralité, la multiplication d’actes de délinquance –⁠ à ce titre, les condamnations antérieures seront prises en considération. La menace d’une particulière gravité est ainsi constituée quand des condamnations pénales ont été prononcées. Tout le monde ne sera donc pas concerné, contrairement à ce qui a pu être prétendu, par ce texte qui prévoit au contraire des mesures proportionnées.
    Vous avez soulevé la menace de dangers que cette proposition de loi ne fait pas courir. Au contraire, le compromis auquel nos travaux en commission des lois ont permis d’aboutir témoigne de notre volonté de ne permettre l’allongement de la durée de rétention que dans des cas bien précis et ciblés. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ils sont passés où, les Républicains ?

    Article 1er

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Léaument.

    M. Antoine Léaument

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    Monsieur Retailleau, vous êtes ministre de l’intérieur et président des Républicains. Hélas, vous êtes à la fois un mauvais ministre de l’intérieur et un mauvais républicain.
    Mauvais ministre de l’intérieur parce que vous n’avez rien fait en la matière, vous contentant d’apparaître sur les plateaux de télévision. C’est d’ailleurs pour cette raison que vous êtes aussi un mauvais républicain, car lorsque vous vous livrez à cette démonstration, c’est pour exciter la haine contre les étrangers.
    Vous avez déclaré que l’immigration n’était pas une chance pour la France et c’est précisément ce qui nourrit nos soupçons lorsque vous ciblez de manière répétée les étrangers. Même les Français ne sont pas protégés, puisque vous avez osé dire que certains régresseraient vers leurs origines ethniques.
    Monsieur Retailleau, ce sont là des propos xénophobes et racistes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Lors d’un récent meeting, vous avez déclaré ne plus supporter que l’on vous accuse d’un pseudo-racisme. Pourtant, monsieur Retailleau, en tant que ministre de l’intérieur, votre rôle est en principe de combattre le racisme. Or vous avez osé tenir de tels propos la semaine dernière, alors même que la France avait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme pour sa pratique des contrôles au faciès, ce qui veut bien dire que des actes racistes ont été commis.
    Sur ces sujets, monsieur Retailleau, vous êtes un mauvais ministre de l’intérieur et un mauvais républicain, puisque vous ne prenez pas les mesures qui s’imposent.
    Dans le cas particulier de cette proposition de loi, vous osez invoquer la mémoire de Philippine. C’est une honte de procéder ainsi. Nous voulons tous lutter contre le crime, les viols, les meurtres mais, contrairement à vous, nous sommes fidèles à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui proclame que la loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Aussi, pour un étranger qui viole ou qui tue, nous voulons la même justice que pour un Français, c’est-à-dire la punition par la loi commune. Nous ne voulons pas des centres de rétention administrative, ainsi que vous le proposez. Je poursuivrai mon propos lors de la présentation de l’amendement no 13. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à M. Emeric Salmon.

    M. Emeric Salmon

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    L’article 1er de ce texte contient l’essentiel de votre dispositif. Michaël Taverne vous en a expliqué les raisons, nous voterons cet article sans nourrir la moindre illusion quant à son effet sur la situation des criminels et des délinquants que nous devons expulser.
    Non, monsieur le ministre, je n’ai pas confiance en vous !

    M. René Pilato

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    Vous avez confiance puisque vous n’avez pas voté la censure !

    M. Emeric Salmon

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    Comment vous faire confiance quand, chez moi, à Lure, vous avez hébergé un dangereux criminel pendant huit mois à l’hôtel aux frais du contribuable –⁠ vous n’avez pas trouvé le moyen de l’expulser durant ces 210 jours de rétention puis ces huit mois d’hôtel. Où est-il aujourd’hui ? Selon vos services, il serait en rétention, soit un retour à la case départ alors que la seule destination pour lui est l’expulsion !
    Non, nous n’avons pas confiance en vous ! Cependant, nous voterons l’article 1er, car nous aurons besoin de cet outil lorsque Marine Le Pen et Jordan Bardella seront aux commandes du pays.

    M. René Pilato

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    Dans vos rêves !

    M. Emeric Salmon

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    C’est seulement dans ces conditions que les Français auront confiance, que nous aurons confiance en nos dirigeants. Aujourd’hui, cette confiance fait défaut ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Ne pas voter la censure, c’est faire preuve de confiance !

    M. le président

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    La parole est à Mme Céline Hervieu.

    Mme Céline Hervieu

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    Je souhaite répondre à M. le président de la commission des lois sur l’emploi du terme « xénophobie » : je confirme qu’un texte qui fait un amalgame direct entre le fait d’être étranger et l’insécurité promeut la xénophobie.
    Je ne l’invente pas et vous le savez : ce texte a été déposé au Sénat à la suite du meurtre dramatique de Philippine. Vous vous souvenez du traitement politico-médiatique de cette affaire ; on ne cessait de répéter sur les chaînes d’information en continu que le meurtrier était de nationalité étrangère et sous OQTF, comme si cela était directement lié au fait qu’il soit un meurtrier et un violeur.
    Monsieur le président de la commission, il faut dire les choses : cette loi vise spécifiquement les étrangers en laissant entendre que le fait d’être étranger et en situation irrégulière conduit potentiellement à être un criminel, un meurtrier et peut-être un violeur. Assumez, allez jusqu’au bout ! Si ce que vous dites n’a aucun sens –⁠ nous reviendrons sur l’inefficacité des mesures que vous proposez à l’occasion de la discussion des amendements –, j’assume pour ma part le terme de « xénophobie », parce que vous créez une distinction et une discrimination entre un violeur français et un violeur étranger.
    Pour moi qui suis une femme, la place d’un violeur est en prison, qu’il soit français ou étranger ; sa place n’est pas dans un CRA. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Une fois condamné, il doit purger sa peine en prison. Mais, lorsque sa peine est purgée, je me moque qu’il soit gardé quarante jours de plus dans un CRA. Ce n’est pas ça qui est important !

    M. Pierre Cordier

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    Celui qui est en situation irrégulière n’a rien à faire chez nous !

    Mme Céline Hervieu

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    Vous créez une distinction légale entre les Français et les étrangers contraire à nos principes républicains : je la dénonce à travers le terme de « xénophobie » ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)

    M. Ian Boucard

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    Une fois sa peine purgée, il doit partir !

    M. Pierre Cordier

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    Vous êtes déconnectés des réalités !

    Mme Elsa Faucillon

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    Vous pourriez au moins écouter ce qu’elle dit !

    Mme Christine Arrighi

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    Ou alors, retournez à la buvette !

    M. le président

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    Sur les amendements nos 4 et identiques, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Céline Hervieu, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Céline Hervieu

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    Le groupe Socialistes et apparentés propose un amendement de suppression de l’article 1er de cette proposition de loi.
    Nous l’avons dit : ce texte répond à des préoccupations démagogiques. C’est l’application du principe « un crime, une loi » ou « un fait divers, une loi »,…

    M. Ian Boucard

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    Vous préférez « un crime, une commission » ?

    Mme Céline Hervieu

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    …ce qui n’est rien d’autre que de la communication politique.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Un sujet que vous connaissez bien !

    Mme Céline Hervieu

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    Le texte ne répond pas à la problématique réelle, à savoir le fait que nous n’obtenons pas les laissez-passer consulaires.
    Il est incroyable d’entendre M. Boucard…

    M. Laurent Wauquiez

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    L’excellent M. Boucard !

    Mme Céline Hervieu

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    …nous accuser de vouloir laisser les délinquants et les criminels dans la rue,…

    Mme Justine Gruet

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    Attaque personnelle, monsieur le président !

    Mme Céline Hervieu

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    …alors que vous savez pertinemment que, dans le cas de Philippine, la personne était emprisonnée depuis cinq ans. Alors qu’elle est restée en détention cinq ans, l’administration française n’a pas été capable d’exécuter la mesure d’éloignement ! Et vous êtes en train de nous expliquer les yeux dans les yeux que trente jours de plus en centre de rétention administrative vont régler la difficulté… C’est un mensonge et c’est très grave !
    Au demeurant, ce n’est pas la première fois que vous manipulez les violences sexistes et sexuelles pour servir et nourrir votre discours xénophobe et discriminatoire ! (Exclamations sur les bancs du groupe DR.) Mais les violeurs de Bétharram ou ceux de Gisèle Pélicot ne sont pas des étrangers et on ne vous entend pas beaucoup à leur sujet ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR.)

    M. Ian Boucard

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    Je suis pour qu’on les punisse !

    Mme Céline Hervieu

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    Qu’allez-vous faire ? Les placer en CRA pour protéger les femmes ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR.)
    Franchement, c’est n’importe quoi ! En réalité, ces situations sont complexes, et la question de fond est celle des laissez-passer consulaires.
    Un texte fondé sur un amalgame entre étrangers et danger distille un message xénophobe ; ce n’est même pas subliminal, puisque c’est écrit noir sur blanc. Ce n’est pas moi qui vous le dis, mais le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) dans sa lettre du 26 juin dont j’ai cité quelques passages. Écoutez-le ! La commission travaille sous l’autorité du premier ministre : ce ne sont pas des gauchistes patentés.

    M. Ian Boucard

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    Démagogie ! Vous valez mieux que ça !

    M. Ugo Bernalicis

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    Et vous, vous valez moins !

    Mme Céline Hervieu

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    Nous proposons la suppression de l’article 1er de ce texte, réécrit de manière honteuse en commission des lois. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    M. Ian Boucard

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    On n’écrit pas la loi pour des cas particuliers !

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l’amendement no 13.

    M. Antoine Léaument

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    Tout à l’heure monsieur Retailleau, je vous ai dit que vous étiez un mauvais républicain. Je poursuis sur cette idée.
    Le drapeau tricolore qui flotte dans cet hémicycle est né d’une révolution qui a commencé par la prise de la Bastille, prison dans laquelle le roi Louis XVI pouvait enfermer qui lui plaisait par lettre de cachet. (Protestations sur les bancs des groupes RN et RN.)

    M. Pierre Cordier

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    Ce n’est pas ta révolution !

    M. Antoine Léaument

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    Aujourd’hui, vous faites la même chose avec des prisons de la Bastille particulières, réservées aux étrangers !

    M. Pierre Cordier

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    Bolchévique !

    M. Antoine Léaument

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    En effet, contrairement à ce que vous dites, le texte de loi que vous proposez n’autorise pas uniquement le placement en CRA de personnes condamnées, il vise également les personnes suspectées d’être dangereuses.

    M. René Pilato

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    Le problème est là !

    M. Antoine Léaument

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    C’est là que commencent les difficultés ! Qui décide qu’une personne est suspecte d’être dangereuse ? L’autorité administrative, c’est-à-dire le pouvoir exécutif !

    M. René Pilato

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    Eh oui, collègues, c’est l’arbitraire !

    M. Antoine Léaument

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    Autrement dit, si le drapeau tricolore est issu d’une révolution qui s’opposait à ce qu’un pouvoir exécutif absolu puisse enfermer n’importe qui sur simple lettre de cachet, nous sommes revenus à la situation prérévolutionnaire, mais cette fois pour les seuls étrangers. (M.  Maxime Laisney applaudit.) Voilà pourquoi nous soutenons que vous ne respectez ni l’article 1er de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen –⁠ « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. » – (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR) ni son article 6 –⁠ « La loi doit être la même pour tous » –. J’insiste sur le fait que cet article ne dit pas que la loi doit être la même pour tous les Français, mais bien la même pour tous.
    Pour notre part, nous défendons ces valeurs en affirmant que les personnes ayant commis des actes délictuels ou criminels doivent être jugées et condamnées. Pour y parvenir, encore faudrait-il que la police nationale dispose d’un logiciel efficace et que la justice ait des moyens, mais ce sont des sujets que vous n’abordez jamais !

    M. Laurent Wauquiez

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    Allez, on avance ! On vote !

    M. Antoine Léaument

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    Il y a plus ! Ma collègue Céline Hervieu l’a dit : vous utilisez les étrangers et les immigrés pour masquer l’ensemble des violences, des viols, des meurtres qui sont commis non par eux, mais souvent par des Français, au sein de la famille elle-même ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR. –  Mme  Céline Hervieu applaudit également. –  Protestations sur les bancs du groupe DR.) Voilà comment vous invisibilisez les violences qui existent dans la société en ne luttant jamais contre elles avec efficacité. Honte à vous, monsieur Retailleau, qui salissez ce drapeau ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et GDR. –  Protestations sur les bancs des groupes DR et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 32.

    Mme Elsa Faucillon

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    C’est aussi un amendement de suppression.
    Dans ce débat, il est temps de rappeler un fait : ce qui caractérise les auteurs de violences et de crimes sexuels et sexistes, c’est le fait qu’ils sont des hommes, pas le fait qu’ils sont étrangers. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS. –  Mme  Céline Hervieu applaudit également.) C’est la donnée majeure qui caractérise ces violences, donnée que vous cherchez à éviter, à la fois pour déverser librement votre haine sur les étrangers et pour détourner l’attention des réponses sociales à apporter en termes de démasculinisation, de dévirilisation et d’éducation. (Mêmes mouvements.) C’est terrible parce qu’en vous éloignant de cette donnée, vous vous éloignez aussi des réponses qui seraient efficaces pour lutter contre les crimes à caractère sexiste et sexuel.
    Nous demandons la suppression de cet article parce qu’il organise un détournement légal de ce que sont les centres de rétention. Le placement en rétention suppose une décision d’éloignement et une perspective réelle d’expulsion. C’est sur ce dernier point que le ministre de l’intérieur se retrouve en grande difficulté, parce qu’à force de délivrer des OQTF en très grand nombre, il fait chuter le taux d’expulsion ! Alors il essaye de se raccrocher aux branches, d’intégrer des éléments du programme du Rassemblement national, de jouer les gros bras. Tout cela pour rien, car en allongeant la durée de rétention, il n’augmentera pas le taux d’expulsion, mais ne fera que contribuer à rendre encore un peu plus inhumaines les conditions de rétention. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Je voudrais enfin l’interroger, ainsi que le rapporteur, sur la durée de 210 jours. A-t-elle été choisie au doigt mouillé, ou juste parce qu’elle correspond à la durée d’enfermement des terroristes et qu’il faudrait soumettre tout le monde au même régime ? Je voudrais une réponse. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Hendrik Davi, pour soutenir l’amendement no 52.

    M. Hendrik Davi

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    Cet amendement propose de supprimer l’article 1er qui marque un recul en matière de protection des libertés fondamentales.
    Ce texte prévoit une rétention administrative pouvant aller jusqu’à 210 jours, y compris à l’égard de personnes qui n’ont pas été condamnées par une juridiction pénale. Imaginez-vous ce que sont 210 jours en CRA ? J’espère que vous les avez visités…

    M. Laurent Wauquiez

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    Oui, nous, on les a visités !

    M. Hendrik Davi

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    Le texte vise notamment des étrangers pour lesquels une mesure d’expulsion est envisagée en raison d’un soupçon de radicalisation ou de menace à l’ordre public. Il ne s’agit pas de mesures ciblées, prises au cas par cas, dans un cadre judiciaire clair, mais d’une privation prolongée de liberté sur la base d’une appréciation administrative, sans jugement judiciaire et parfois sans preuve formelle de dangerosité.
    De surcroît, vous élargissez le champ du placement en rétention aux étrangers frappés d’une interdiction du territoire français ayant commis des infractions relativement courantes, sans exiger aucune condition de gravité de celles-ci. C’est terrible ! Autrement dit, selon une logique d’automatisme et non d’individualisation, on risque d’enfermer pendant plusieurs mois des personnes qui ne présentent aucune menace directe, sans que leur situation ait été examinée dans sa singularité. Le texte organise en réalité une peine masquée et non individualisée.
    Pour conclure, je vais essayer de vous réveiller un peu, parce que vous n’avez pas l’air d’écouter.

    M. Pierre Cordier

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    Heureusement que les écologistes sont là pour nous réveiller !

    M. Hendrik Davi

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    Ce soir, beaucoup d’entre vous ont bu un peu d’alcool –⁠ les tests d’alcoolémie sont inutiles, je l’entends à vos voix.

    M. Ian Boucard

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    Qu’est-ce qu’il raconte ? Vous entendez ce qu’il dit, monsieur le président ?

    M. Hendrik Davi

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    Quand on prend le volant après avoir bu de l’alcool, on risque sept ans d’emprisonnement si on tue quelqu’un sur la route. (Brouhaha sur les bancs du groupe DR.) Avec ce texte, si vous êtes étranger, en plus de ces sept années de prison, vous écoperez de presque une année en CRA !
    Voilà ce que vous êtes en train d’insérer dans la loi, parce que vous imaginez que vous ne serez jamais des criminels –⁠ alors qu’on peut tous, à un moment ou un autre, commettre des délits ! Vous ne l’envisagez pas parce que, pour vous, les criminels sont forcément des étrangers !

    M. Ian Boucard

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    Nous parlons de violeurs, collègue Davi ! Franchement, vous valez mieux que ça !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Je regrette que la gauche de cet hémicycle entretienne une forme de confusion sur ce sujet. Cet article ne concerne pas les étrangers, mais des étrangers criminels ou délinquants, ce qui n’est pas la même chose !

    M. Jean-François Coulomme

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    Dans ce cas, comment se fait-il qu’il modifie le Cesada ?

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Il est absolument scandaleux de vous entendre entretenir en permanence cet amalgame entre étrangers, criminels et délinquance.

    M. Hendrik Davi

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    La place des criminels est en prison ! C’est vous qui entretenez l’amalgame !

    M. Thibault Bazin

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    Souffrez qu’il vous dise la vérité !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Vous faites preuve d’énormément de mauvaise foi. Lisez le texte, vous verrez qu’il concerne des étrangers qui ont été condamnés par le juge judiciaire à une peine d’interdiction du territoire français. Il ne crée pas une peine d’embastillement ! Il vise à autoriser le placement en rétention d’étrangers qui se sont rendus coupables de l’un des quatorze crimes ou délits identifiés dans l’article 1er.
    Il vise aussi, de manière complémentaire, des étrangers qui constituent une menace d’une particulière gravité, une notion que la jurisprudence du Conseil d’État a parfaitement définie.

    Mme Justine Gruet

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    Ils défendent l’indéfendable !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Par ailleurs, cet article 1er est extrêmement proportionné, puisque la durée maximale de rétention est fixée à 210 jours. En son temps, la coalition de gauche allemande –⁠ dont les Verts allemands ont fait partie pendant des années – a accepté une durée de rétention de 540 jours. Pourquoi la gauche française s’interdit-elle d’aller jusqu’à 210 jours pour les étrangers dangereux ?

    Mme Christine Arrighi

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    Parce qu’on est en France !

    M. René Pilato

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    On défend les valeurs de la République !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Par dogmatisme !

    Mme Christine Arrighi

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    Vous faites l’amalgame entre CRA et prison !

    M. Olivier Marleix, rapporteur

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    Avis évidemment défavorable sur ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. Pierre Cordier

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    Très bien !

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Même avis défavorable sur les quatre amendements.
    Premièrement, madame Faucillon, ça n’est pas moi, ministre de l’intérieur, qui décide qu’il faut délivrer une OQTF en cas d’irrégularité de séjour, c’est simplement la directive « retour », c’est la loi européenne !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Eh oui !

    Mme Elsa Faucillon

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    Arrêtez de raconter des salades !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    La preuve en est que la Cour de justice de l’Union européenne a condamné l’Allemagne en 2021 justement parce qu’elle ne prononçait pas d’OQTF alors qu’elle était confrontée à des difficultés liées au séjour des étrangers sur son territoire.

    M. René Pilato

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    L’Allemagne, vous venez de la citer en exemple !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    C’est très clair : nous ne faisons qu’appliquer la loi européenne, il ne s’agit pas du tout d’une mesure discrétionnaire prise par le ministère de l’intérieur.
    Deuxièmement, depuis que je suis ministre de l’intérieur, le nombre d’éloignements a augmenté de 16 %, en dépit des différends qui nous opposent à l’Algérie (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.) Sans ces problèmes d’ordre diplomatique qui bloquent toute réadmission sur son territoire, ce chiffre serait bien supérieur à 20 ou 25 %.

    Mme Christine Arrighi

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    Facile à dire !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Par ailleurs, tout le monde semble ignorer qu’il existe une différence entre « rétention » et « détention ».

    Mme Céline Hervieu

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    Justement !

    Mme Christine Arrighi

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    Expliquez-nous !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Les étrangers en situation irrégulière réputés dangereux qui ont été, la plupart du temps, condamnés par la justice, sont placés en centre de rétention –⁠ et non en centre de détention.

    M. Pierre Cordier

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    Eh oui !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Par conséquent, s’ils coopèrent, ils pourront bénéficier d’une aide au retour. Nous avons d’ailleurs connu le cas de ressortissants afghans qui avaient commis des crimes dans notre pays et l’ont quitté après avoir opté pour un retour volontaire.
    Monsieur Léaument, l’inversion des valeurs est une pratique courante chez les Insoumis.

    M. Guillaume Kasbarian

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    Eh oui !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Vous m’accusez des pires maux. Or votre parti souffle quotidiennement sur les braises de l’antisémitisme –⁠ en se cachant bien sûr derrière l’antisionisme. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, RN, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    M. Vincent Jeanbrun

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    Scandaleux !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    Un de vos membres, qui s’est rendu il y a quelques jours en Algérie, n’a pas eu un mot pour Boualem Sansal. Il n’a pas non plus parlé du drapeau français, mais a dit qu’il embrassait le drapeau algérien. Moi, le seul que j’embrasse, c’est le drapeau bleu blanc rouge, le drapeau français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et HOR et sur plusieurs bancs des groupes Dem et RN.  – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. René Pilato

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    Vous êtes un clown !

    M. Bruno Retailleau, ministre d’État

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    M. Delogu –⁠ puisque c’est de lui qu’il s’agit – a-t-il demandé des comptes au régime algérien ? Car savez-vous comment celui-ci traite les étrangers en situation irrégulière qui se trouvent à la frontière avec le Niger ? Il les refoule dans le désert, sans nourriture et sans eau, alors qu’il fait une température de 50 degrés. Qu’en dites-vous ? Le dénoncerez-vous, oui ou non ?
    Vous procédez à une inversion des valeurs. C’est irresponsable, c’est une honte ! Vous êtes le parti de l’indignité ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Pierre Cordier

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    Un peu d’honnêteté intellectuelle, ça ne fait pas de mal !

    M. Ugo Bernalicis

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    Darmanin était meilleur, là c’est d’une tristesse !

    M. le président

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    La parole est à M. Ian Boucard.

    M. Ian Boucard

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    Il est difficile de répondre aux propos qui ont été tenus dans le cadre de la défense de ces amendements, car la discussion est partie dans tous les sens.
    Tout d’abord, monsieur Davi, comment pouvez-vous comparer des personnes qui ont bu un verre de trop à des violeurs, à des agresseurs ? (« Ce n’est pas ce qu’il a dit ! » sur plusieurs bancs du groupe EcoS.) Vous que j’ai côtoyé dans le cadre de l’examen de la proposition de loi relative à la simplification de la vie économique, je pense que vous valez mieux que cela.
    Madame Faucillon, nous sommes tous, sur l’ensemble des bancs –⁠ en tout cas je l’espère –, contre le viol et contre les violeurs. En revanche, il convient d’établir une distinction. Je souhaite que l’on enferme les violeurs français plus longtemps et dans des conditions plus pénibles. L’ensemble de mon groupe Droite Républicaine, présidé par Laurent Wauquiez, est d’ailleurs favorable à ce que la durée de l’enfermement soit plus longue. Malheureusement, chaque fois que des textes visant à durcir les conditions de rétention des violeurs et à en allonger la durée…

    Mme Elsa Faucillon

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    Rétention ou détention ? Le lapsus est intéressant !

    M. Ian Boucard

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    …nous ont été soumis, votre groupe a brillé par son absence, comme l’ensemble de cette gauche qui prétend défendre les femmes. Je le regrette parce que, par ailleurs, je suis tout à fait d’accord avec le reste de vos propos.
    En revanche, s’agissant des violeurs étrangers, je souhaite que, dans un premier temps, ils exécutent leur peine en prison –⁠ et que celle-ci soit très longue, plus longue que celles qui est prévue actuellement – et qu’ensuite ils repartent dans leur pays afin d’éviter qu’ils violent d’autres femmes en France.
    Madame Hervieu, je connais votre probité morale et votre attachement à la République. Les propos que vous avez tenus ce soir ne reflètent pas les valeurs que vous défendez au quotidien.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ça suffit !

    M. Ian Boucard

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    Vous prétendez défendre les personnes étrangères. Or vous faites, contrairement à nous, une terrible confusion entre, d’un côté, les personnes étrangères en général et, de l’autre, celles qui ont commis un délit. Je précise au passage que nous n’avons aucun souci avec les personnes étrangères en situation régulière.
    J’en viens à présent aux personnes étrangères en situation irrégulière. Nous pensons qu’elles doivent quitter notre pays. Parmi elles, certaines ont, en plus, commis un délit –⁠ un viol, une agression. Je m’étonne que vous ayez pu défendre celles-ci ce soir !

    M. Dominique Potier

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    Elle ne les a pas du tout défendues !

    M. Ian Boucard

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    Sincèrement, comment pouvez-vous prétendre que vous défendez les femmes si vous défendez aussi ceux qui les ont violées ? Quelle honte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Vincent Caure.

    M. Vincent Caure

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    Je veux exposer les raisons pour lesquelles nous voterons contre ces amendements de suppression.
    Je m’adresserai tout d’abord à Mme Hervieu, puisque nous avons travaillé ensemble sur ces questions en commission. Nous sommes d’accord pour considérer que le problème résulte aussi de la difficulté à obtenir des laissez-passer consulaires. Toutefois, cela ne nous empêche pas, en tant que législateurs, de nous préoccuper de ce que deviennent les étrangers sous OQTF, définitivement condamnés par la justice, dès lors qu’ils se trouvent sur notre territoire, ni d’envisager une détention prolongée.
    Ensuite, M. Léaument aime trop l’histoire pour ignorer que lorsqu’on avait recours à la lettre de cachet, le juge des libertés et de la détention n’intervenait pas à huit reprises –⁠ quatre fois pour se prononcer au fond, quatre fois en appel. Personne, ici, n’affirmera le contraire et il est donc assez malhonnête de comparer l’embastillement tel qu’il se pratiquait au XVIIIe siècle et les mesures que nous votons ce soir.   (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)
    Par ailleurs, le ministre a rappelé que la notion de menace d’une particulière gravité se fondait sur une jurisprudence fournie du Conseil d’État…

    M. Ugo Bernalicis

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    Justement, nous cherchons depuis tout à l’heure ! Elle n’est pas si fournie !

    M. Vincent Caure

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    …et trouvait ses racines dans l’ordonnance de 1945 sur le droit des étrangers. Nous ne parlons pas, en l’espèce, de menus larcins –⁠ vous le savez parfaitement. La liste, telle que nous l’avons adoptée en commission, comprend les crimes contre l’humanité, les assassinats et le trafic d’êtres humains. Nous sommes donc très loin du menu fretin. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Léaument.

    M. Antoine Léaument

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    Monsieur le ministre de l’intérieur, quelle haine dans vos propos ! (M. le ministre rit.)

    M. Thibault Bazin

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    Il n’y avait aucune haine !

    M. Antoine Léaument

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    À l’évidence vous ne me connaissez pas, mais cela va bientôt changer. Je vous invite par exemple à lire les propos que j’ai tenus au sujet de Boualem Sansal. J’ai dit que, si l’on défend la liberté d’expression, il faut aussi défendre celle des personnes avec lesquelles on n’est pas d’accord. Comme je l’ai fait pour d’autres, j’ai donc appelé à sa libération. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.  – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe DR.)

    M. Ian Boucard

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    Pourquoi Manon Aubry a-t-elle dit l’inverse ?

    M. Vincent Jeanbrun

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    Et M. Delogu, qu’est-ce qu’il en dit ?

    M. Antoine Léaument

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    Vous avez dit que le seul drapeau que vous embrassiez était le drapeau tricolore. Eh bien sachez que le bleu et le rouge, les couleurs du peuple, y encadrent le blanc, la couleur du roi, ce qui signifie que le peuple doit toujours exercer un contrôle sur l’exécutif.
    Vos collègues, d’ordinaire absents, hurlent ce soir contre ceux qui défendent les valeurs de la République. Eux-mêmes prétendent pourtant incarner cette République, présente jusque dans le nom de leur groupe.
    Laissez-moi vous dire que, sur nos bancs, siège une France qui sait tout ce qu’elle doit à l’immigration, aux combattants de la liberté qui ont débarqué en Provence et que vous salissez aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ian Boucard

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    Ça n’a rien à voir ! Nous parlons de délinquants !

    M. Antoine Léaument

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    Depuis que vous avez été nommé ministre, vous ne faites qu’une chose : vous vous en prenez successivement aux Algériens, aux Insoumis, aux musulmans et aux étrangers, puis vous recommencez dans un ordre différent.

    M. Pierre Cordier

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    Vous êtes déconnecté !

    M. Antoine Léaument

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    Les Français voient bien comment vous agissez. Ils se rendent compte de votre incompétence.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    De la vôtre aussi, on vous rassure !

    M. Antoine Léaument

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    Vous n’étiez même pas présents pour défendre votre proposition de loi sur le narcotrafic,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Exactement !

    M. Antoine Léaument

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    …préférant prendre part à la campagne interne à votre parti, Les Républicains –⁠ qui porte bien mal son nom. (M. Christophe Bex applaudit.)
    Je vous le dis : vous nous trouverez toujours en travers de votre route…

    M. Ugo Bernalicis

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    Toujours !

    M. Thibault Bazin

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    Et réciproquement !

    M. Antoine Léaument

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    …lorsque vous voudrez appliquer la politique prônée par le camp d’en face, eux dont le parti a été fondé par les descendants des collabos et des Waffen-SS ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.  – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et DR.)

    M. le président

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    Monsieur le député, il faut conclure.

    M. Antoine Léaument

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    Oui, ici se trouve la France qui se souvient de ce qu’elle doit aux Manouchian, aux étrangers qui ont combattu à nos côtés jusque dans la mort ! Nous n’oublions pas, nous, ce que nous leur devons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Pierre Cordier

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    Gauchistes !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Dites ça à Delogu !

    M. Pierre Cordier

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    Marcel Déat, sors de ce corps !

    M. Emeric Salmon

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    Pour qui se prend-il ?

    M. Pierre Cordier

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    Jacques Doriot, sors de ce corps !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Quelle arrogance !

    M. Pierre Cordier

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    Et Mitterrand ! Il faut avoir un peu de culture !

    M. le président

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    La parole est à Mme Céline Hervieu.

    Mme Céline Hervieu

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    J’ai l’impression que nous ne nous comprenons pas. Vous nous accusez de protéger les criminels. Or, manifestement, vous n’avez pas tout compris. D’ailleurs, monsieur Boucard, vous avez fait un lapsus intéressant lorsque vous avez dit « rétention » à la place de « détention ». Vous devriez écouter notre ministre de l’intérieur qui a expliqué, à l’instant, quelle était la différence entre les deux.

    M. Ian Boucard

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    Je suis pour la prison suivie de l’expulsion !

    Mme Céline Hervieu

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    La place d’un criminel est en prison –⁠ il doit y rester plusieurs années, c’est le principe de la détention. En revanche, on place des personnes dans un centre de rétention pour des raisons administratives, liées à une irrégularité sur le territoire. Cela n’a rien à voir avec le fait d’être ou non criminel. Dans un centre de rétention administrative, vous ne trouvez pas uniquement des criminels.

    M. Ian Boucard

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    Nous ne parlons pas des autres, madame Hervieu !

    Mme Céline Hervieu

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    Dès lors, vous conviendrez que des dérives sont possibles et que le texte pose un problème de proportionnalité. C’est d’ailleurs pour cette raison que la CNCDH a pointé les limites du texte et que le Conseil constitutionnel pourrait le retoquer.
    Ce que nous remettons en cause, c’est l’effectivité de cette mesure. Car je pense que nous sommes tous d’accord, ici, pour considérer que nous ne souhaitons pas de violeurs sur notre territoire ni en liberté, qu’ils soient étrangers ou non.

    M. Ian Boucard

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    Eux, là-bas, si ! (L’orateur désigne les bancs du group LFI-NFP.)

    Mme Céline Hervieu

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    Ce n’est pas la question !

    M. Pierre Cordier

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    Si, c’est la question !

    M. Ian Boucard

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    Vous, je vous crois, mais eux, je ne les crois pas !

    Mme Céline Hervieu

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    Vous dites que vous souhaitez les expulser. Or je vous informe qu’une expulsion ne se décrète pas. Il faut d’abord trouver un accord et obtenir un laissez-passer. C’est la procédure.

    M. Ian Boucard

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    Il faut qu’ils partent !

    Mme Céline Hervieu

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    Ceux qui défendent réellement les victimes cherchent des mesures efficaces, monsieur Boucard. Or celle-ci ne l’est pas.
    Quant à vous, monsieur le ministre, vous êtes hors sujet lorsque vous parlez de l’antisémitisme de La France insoumise. Je ne comprends pas ce que vient faire cet argument dans notre débat.
    Par ailleurs, aussi difficiles que soient nos rapports avec l’Algérie, pensez-vous réellement que les propos que vous tenez nous aideront à obtenir, dans le cadre des relations diplomatiques, des laissez-passer consulaires de la part des pays du Moyen-Orient et du Maghreb ? Je ne comprends pas vraiment pas votre méthode en matière de politique étrangère. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 4, 13, 32 et 52.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        112
            Nombre de suffrages exprimés                112
            Majorité absolue                        57
                    Pour l’adoption                37
                    Contre                75

    (Les amendements identiques nos 4, 13, 32 et 52 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, demain, à quinze heures :
    Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi visant à lutter contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur ;
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive ;
    Discussion du projet de loi portant création de l’établissement public du commerce et de l’industrie de la collectivité de Corse ;
    La séance est levée.

    (La séance est levée, le mercredi 2 juillet, à zéro heure dix.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra