N° 1114

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003.

AVIS

PRÉSENTÉ

TOME VII

DÉFENSE

TITRE III ET PERSONNELS CIVILS ET MILITAIRES

D'ACTIVE ET DE RÉSERVE

PAR M. Pierre LANG,

Député.

--

Voir le numéro : 1110 (annexe n° 40)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. -  LE BUDGET DU TITRE III EST GLOBALEMENT SATISFAISANT 7

A. L'ÉVOLUTION DES GRANDES CATÉGORIES DE COÛTS 7

1. Un budget de consolidation 7

2. Le fonctionnement, hors RCS, est confortablement doté 8

B. LES MESURES DE REVALORISATION DU PERSONNEL DE LA DÉFENSE 9

1. Les mesures financées par le fonds de consolidation de la professionnalisation 9

2. Les autres mesures en faveur des militaires 10

3. L'effort consenti à l'égard des personnels civils 10

II. -  VERS UNE STABILISATION GLOBALE DES EFFECTIFS 11

A. UNE BAISSE DU NOMBRE DE CIVILS COMPENSÉE PAR L'AUGMENTATION DES EFFECTIFS MILITAIRES 11

B. LES EFFECTIFS MILITAIRES ARMÉE PAR ARMÉE 12

1. L'armée de terre 12

2. La marine 13

3. L'armée de l'air 13

4. La gendarmerie 14

5. Les services communs 14

C. LE PERSONNEL CIVIL 15

1. Un déficit qui se résorbe lentement 15

2. D'importants efforts de recrutement 16

3. Les transferts de Giat Industries et de la DGA 17

III. -  L'ENTRAÎNEMENT ET L'ACTIVITÉ DES FORCES 19

A. UNE AMÉLIORATION SIGNIFICATIVE DE L'ENTRAÎNEMENT 19

1. L'armée de terre atteindra dès 2004 les objectifs fixés par la programmation 19

2. Les bâtiments de la marine navigueront davantage 20

3. Des objectifs à la hausse pour l'armée de l'air 21

4. L'entraînement de la gendarmerie pénalisé par une importante activité 21

B. DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES INTENSES 21

C. DES MISSIONS INTÉRIEURES ESSENTIELLES 23

1. Les missions d'assistance aux personnes et aux biens 23

2. Les autres missions non militaires 23

IV. -  LE MAINTIEN DU LIEN ENTRE LA NATION ET SES ARMÉES 25

A. L'ÉVOLUTION DE LA CONCERTATION DANS LES ARMÉES 25

1. Vers une évolution du statut des militaires 25

2. Un moral en nette amélioration 25

B. LE PARCOURS DE CITOYENNETÉ 26

1. L'enseignement de défense et le recensement 26

2. Les journées d'appel de préparation à la défense (JAPD) 27

3. L'évolution des préparations militaires 28

C. LES RÉSERVES 29

1. Un sous-effectif qui se comblera lentement 29

2. Des moyens financiers en augmentation constante 30

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

I. -  AUDITION DE MME EVELYNE RATTE, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE POUR L'ADMINISTRATION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 33

II. -  AUDITION DES ASSOCIATIONS DE RETRAITÉS MILITAIRES 39

III. -  AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES SYNDICATS DES PERSONNELS CIVILS DE LA DÉFENSE 46

IV. - EXAMEN DES CRÉDITS 52

INTRODUCTION

Conforme à la loi de programmation militaire dont il constitue la deuxième annuité, le projet de budget du titre III du ministère de la défense permet la consolidation de l'armée professionnelle. Il stabilise les effectifs militaires aux alentours de 356 000 postes, confirmant ainsi la pertinence du format inscrit dans la loi de programmation militaire pour les années 1997-2002. Il ajuste, à la marge, les effectifs en fonction des évolutions des armées et des besoins.

Le projet de budget pour 2004 poursuit le plan d'amélioration de la condition militaire et prévoit de nouvelles mesures destinées à rendre la défense plus attractive. Recruter et fidéliser des effectifs aussi importants de militaires professionnels est devenu une des préoccupations principales des états-majors. La professionnalisation des armées n'ayant pas été réussie par les seuls militaires, le budget pour 2004 s'attache également à la revalorisation de la composante civile de la défense au travers de dotations qui atteignent un montant inégalé au cours d'un passé récent.

Le projet apporte en outre quelques améliorations bienvenues en matière de fonctionnement courant et notamment d'entraînement. Les prévisions d'activité fixées aux forces pour 2004 laissent à penser que les objectifs assignés par la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008 seront bientôt atteints. L'instruction et les exercices sont d'autant plus indispensables que les forces sont amenées à servir en opérations extérieures de manière fréquente, dans des conditions pouvant à tout moment devenir dangereuses.

Ce projet de budget ne doit pas pour autant masquer les efforts consentis par le ministère de la défense qui contribuera, comme toutes les administrations, à la maîtrise des dépenses publiques en ne remplaçant qu'une partie de ses agents civils partant en retraite. Signal clair de la volonté politique des autorités de respecter les engagements pris, ce projet de budget constitue un témoignage du soutien que le pays apporte aux personnels qui assurent sa protection.

Après une présentation générale du titre III, qui permettra d'apprécier l'évolution globale des crédits affectés au fonctionnement des armées, le rapporteur étudiera la situation des effectifs du ministère de la défense, armée par armée. Ayant présenté l'activité des forces, il examinera enfin la pérennité du lien entre la Nation et ses armées à travers la formation proposée à la jeunesse et le développement de la réserve.

I. -  LE BUDGET DU TITRE III EST GLOBALEMENT SATISFAISANT

L'évolution des crédits inscrits au titre III du projet de budget de la défense pour 2004 est, de l'avis général, globalement satisfaisante. Le projet de budget, qui respecte pour la deuxième année consécutive la loi de programmation militaire, permet la consolidation d'un outil de défense professionnalisé, en ajustant les effectifs aux besoins et en améliorant le fonctionnement courant et l'activité des forces.

Si le projet de budget pour 2004 poursuit, à juste titre, le plan de revalorisation de la condition militaire, il reconnaît également les qualités professionnelles du personnel civil à travers plusieurs mesures concrètes.

Un rapide examen des grandes catégories de coûts montre une hausse, modérée, mais réelle, de la plupart des postes budgétaires du titre III, notamment en matière de fonctionnement courant.

Le montant des crédits inscrits au titre III du ministère de la défense (hors pensions) s'élèvera en 2004 à 17 504,61 millions d'euros, soit une hausse de 0,5 % par rapport à la loi de finances pour 2003. Cette évolution est due, pour l'essentiel, à la consolidation des mesures entrées en vigueur en 2002, à l'impact de nombreuses mesures en faveur du personnel, ainsi qu'à une réévaluation des crédits de fonctionnement.

Titre III : Dotations par grandes catégories de coûts

(en millions d'euros)

 

Catégories de coûts

2002

2003

2004

Évolution

2003-2004

Évolution

2002-2004

Rémunérations et charges sociales

13 394

13 981

13 928

- 0,4 %

+ 4, 0 %

Alimentation

277

291

273

- 6,2 %

- 1,3 %

Entretien programmé des matériels (1)

57

54

0

- 100 %

- 100 %

Produits pétroliers

463

444

410

- 7,6 %

- 11,4 %

Fonctionnement courant

2 296

2 506

2 742

+ 9,4 %

+ 19,4 %

Compensation SNCF

151

151

151

0 %

0 %

Titre III hors RCS

3 243

3 446

3 576

+ 3,8 %

+ 10,3 %

Total titre III

16 637

17 426

17 505

+ 0,5 %

+ 5,2 %

(1) L'entretien programmé du matériel dépend désormais entièrement du titre V

 

Les crédits de rémunérations et charges sociales diminuent de 52 millions d'euros, ce qui représente une baisse de 0,4 %, mais cette réduction résulte d'un transfert intervenu au sein du titre III : des crédits de personnels, d'un montant de 127 millions d'euros, ont été soustraits du total des rémunérations et charges sociales et intégrés dans les crédits de fonctionnement hors RCS. Il s'agit d'une expérimentation, pour quatre unités militaires, de la globalisation des crédits qui devrait devenir la règle avec l'entrée en vigueur de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Si l'on ne tient pas compte de ce transfert, les crédits de rémunération et charges sociales augmentent de 75 millions d'euros, ce qui représente une hausse de 0,5 % qui recouvre notamment :

- la création de postes budgétaires, conformément à la loi de programmation, pour 5,7 millions d'euros ;

- la création de postes budgétaires conformément à la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (41 millions d'euros) ainsi que des mesures catégorielles spécifiques à la gendarmerie (13,5 millions d'euros) ;

- la poursuite de l'amélioration de la condition militaire (53 millions d'euros) et de l'effort indemnitaire en faveur du personnel civil (13,5 millions d'euros) ;

- le financement de la deuxième tranche du fonds de consolidation de la professionnalisation (27 millions d'euros) destiné à augmenter l'attractivité du métier des armes ;

- le renforcement des réserves opérationnelles (32 millions d'euros).

À l'inverse, des économies d'un montant proche de 59 millions d'euros sont rendues possibles par une modification des méthodes de gestion et une meilleure prise en compte de l'analyse prévisionnelle des personnels.

Les crédits hors rémunérations et charges sociales augmentent de 3,79 %, mais, si l'on fait abstraction des transferts de crédits de rémunérations et charges sociales et d'investissements réalisés dans le cadre de l'expérimentation de globalisation de certains budgets, la dotation hors RCS est relativement stable (+ 0,1 %).

Les principales mesures inscrites au projet de loi de finances pour 2004 sont les suivantes :

- une augmentation de 13 millions d'euros des crédits consacrés à l'entraînement des forces ;

- une hausse de 20 millions d'euros des crédits d'externalisation qui s'étendra, en 2004, à la gestion des logements, à la formation initiale des pilotes d'hélicoptères, à la gestion du parc des véhicules commerciaux ainsi qu'au soutien logistique en opérations extérieures ;

- une augmentation de 26,3 millions d'euros alloués à la gendarmerie ;

- la disparition des crédits d'entretien programmé des matériels (- 53,9 millions d'euros) désormais tous intégrés dans le titre V ;

- des économies liées à l'évolution des cours des produits pétroliers (- 30,7 millions d'euros) et à une amélioration des règles de gestion (- 19,2 millions d'euros) ;

- une augmentation de 5 millions d'euros des crédits consacrés à la réserve.

Instauré par la loi de programmation militaire pour 2003-2008, le fonds de consolidation de la professionnalisation est doté d'une enveloppe globale de 572,58 millions d'euros sur la période. Il vise à fidéliser le personnel militaire et à rendre plus attractif le métier des armes afin d'assurer un flux de recrutement important et régulier.

En 2003, ce fonds s'est établi à 18,93 millions d'euros et a permis le financement de deux mesures : une modulation des primes d'engagement (11 millions d'euros) ainsi que la mise en _uvre d'un programme immobilier d'accueil des engagés chargés de famille (7,93 millions d'euros).

En 2004, une somme de 27 millions d'euros s'ajoutera à ces crédits et permettra d'assurer le financement de nouvelles indemnités. Une prime de haute technicité, d'un coût de 16 millions d'euros, sera versée aux sous-officiers ayant plus de vingt ans de service. Une seconde prime, réversible et modulable, sera versée aux personnels détenant un savoir-faire dans les spécialités pour lesquelles les armées rencontrent des problèmes conjoncturels de fidélisation. La liste des spécialités critiques et des niveaux de qualification concernés sera révisée annuellement. Le coût de cette mesure est évalué à 11 millions d'euros.

Enfin, un ensemble de mesures vise à accroître l'attractivité du nouveau statut du corps des praticiens des armées et du corps des militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA), face à la concurrence de la fonction publique hospitalière et du secteur libéral. D'un coût d'un million d'euros, ces mesures concernent notamment la création d'une prime de service de nuit au profit des MITHA, d'une prime pour les praticiens en formation, la création d'un corps d'internes dans le statut de praticien des armées, ainsi qu'une provision en vue du repyramidage partiel du corps des médecins des armées.

Outre les mesures de fidélisation et d'attractivité du métier militaire financées par le fonds de consolidation de la professionnalisation, le personnel militaire bénéficie de mesures statutaires à hauteur de 67,144 millions d'euros.

La plus importante de ces mesures, d'un montant de 53 millions d'euros, est destinée à financer la poursuite du plan d'amélioration de la condition militaire, engagé en 2002 (85,1 millions d'euros) et poursuivi en 2003 (54,3 millions d'euros).

Les principales autres mesures financières qui seront prises en faveur des militaires concerneront spécifiquement la gendarmerie. Ainsi, 6,64 millions d'euros seront consacrés à la revalorisation de la prime d'officier de police judiciaire. La revalorisation de l'indemnité de sujétions spéciales de police des personnels de gendarmerie coûtera 2,357 millions d'euros, contre 0,5 million d'euros pour celle de la prime de qualification des officiers brevetés. L'attribution d'un échelon exceptionnel coûtera un million d'euros, tandis que trois millions d'euros de primes de résultats seront provisionnés.

De mesures de reconnaissance à l'égard du personnel civil du ministère de la défense étaient attendues. Des crédits d'un montant de 13,5 millions d'euros permettront, en 2004, de les financer. Cette somme sera, pour la seule année 2004, supérieure au total des crédits obtenus au cours des cinq années 1998-2002.

2,588 millions d'euros de mesures nouvelles seront inscrits au budget de l'administration centrale du ministère de la défense. Cette somme concernera principalement la revalorisation des indemnités forfaitaires pour travaux supplémentaires et des primes de rendement (1,382 million d'euros), la revalorisation de la prime de rendement versée au personnel de catégorie C (0,927 million d'euros) et le repyramidage du corps des attachés d'administration centrale.

8,912 millions d'euros de mesures nouvelles seront inscrits au budget des personnels civils des services extérieurs. Ces crédits seront principalement utilisés pour revaloriser l'indemnité d'administration et de technicité (3,831 millions d'euros), pour financer le repyramidage du corps des ouvriers d'État (1,633 million d'euros), pour augmenter les indemnités forfaitaires pour travaux supplémentaires (un million d'euros) et pour revaloriser d'autres indemnités.

Enfin, deux millions d'euros seront consacrés à la revalorisation des indemnités des personnels civils de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

II. -  VERS UNE STABILISATION GLOBALE DES EFFECTIFS

La professionnalisation étant désormais achevée, les effectifs du ministère de la défense sont en voie de stabilisation. Les quelques ajustements annoncés ne bouleversent ni l'équilibre général entre les armées ni celui entre les civils et les militaires. La réalisation, sur le long terme, des effectifs budgétaires devient désormais une préoccupation centrale des états-majors.

Pour la première fois depuis la mise en place d'une armée professionnelle, les effectifs budgétaires du ministère de défense augmentent légèrement, après une réduction drastique liée à la professionnalisation. L'année 2003 avait connu une hausse apparente (+ 1 352) due à l'intégration dans les statistiques des 1 500 élèves de l'école polytechnique, mais qui masquait en réalité une légère déflation. L'armée française comptera, en 2004, 356 752 militaires.

La hausse enregistrée dans le projet de loi de finances pour 2004 se fait à périmètre constant et concerne plus particulièrement les personnels militaires (+ 647). L'évolution des effectifs prend acte du déficit important en sous-officiers en supprimant 557 postes dans cette catégorie, au profit des militaires du rang (+ 2 342) qui bénéficient également d'un transfert vers leur catégorie de nombreux postes de volontaires (- 1 604), difficiles à pourvoir. La catégorie des officiers connaît une augmentation de 466 postes, principalement liée à l'embauche de 298 médecins au sein du service de santé des armées.

Créations et suppressions de postes au PLF 2004

 
   

Air

Terre

Marine

Gendarmerie

DGA

Service de santé

Autres

Total

 

Officiers

+ 83

+ 28

+ 9

+ 41

- 26

+ 298

+ 33

+ 466

    Militaires

Sous-officiers

- 459

- 1 169

+ 4

+ 1 136

 

- 74

+ 5

- 557

 

Militaires du rang

+ 393

+ 2 093

- 144

       

+ 2 342

 

Volontaires

- 7

- 1 586

- 5

- 6

     

- 1 604

 

Sous-total

+ 10

- 634

- 136

+ 1 171

- 26

+ 224

+ 38

+ 647

 

Titulaires

- 23

- 135

+ 92

- 15

- 177

+ 46

+ 41

- 171

 

Contractuels

+ 10

- 4

- 13

- 1

- 26

 

+ 8

- 26

    Civils

Ouvriers d'État

- 19

- 205

+ 150

+ 11

- 16

- 104

- 51

- 234

 

Sous-total

- 32

- 344

+ 229

- 5

- 219

- 58

- 2

- 431

TOTAL

- 22

- 978

+ 93

+ 1 166

- 245

+ 166

+ 36

+ 216

Les effectifs civils, en revanche, diminueront de 852 emplois en 2004, ce qui représente une réduction 1 %. Cette évolution marque la participation du ministère de la défense à l'effort de maîtrise des emplois publics. Elle résulte de l'absence de renouvellement d'une partie des départs à la retraite (612), ainsi que de la suppression de postes vacants ou de la transformation d'emplois. En contrepartie, le ministère de la défense accueillera 421 emplois du compte de commerce DCN. Le solde des réductions d'effectifs s'élève donc statistiquement à - 431 emplois.

Les mesures de réduction d'emplois civils dans les unités seront limitées, priorité étant donnée à la capacité opérationnelle des forces. Les suppressions concernent donc prioritairement l'administration centrale et la délégation générale pour l'armement (DGA), même si cette dernière est autorisée à créer cent emplois d'acheteurs.

Si elles sont de tailles et de structures très variées, les armées ont toutes une même préoccupation : réaliser les effectifs budgétaires et réduire les déficits, notamment en sous-officiers, qui pourraient rapidement devenir pénalisants.

La situation globale de l'armée de terre s'est améliorée en 2003, le sous-effectif étant limité à un peu moins de 4 000 personnes, dont environ 2 500 militaires et 1 500 civils. En 2002, le déficit atteignait 7 783 postes.

Chez les militaires, c'est principalement dans les catégories des sous-officiers et des volontaires que se trouvent les plus gros sous-effectifs. La transformation de 1 000 postes de sous-officiers en autant de postes d'engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT) et celle d'une nouvelle tranche de 1 572 postes de volontaires également en EVAT devraient mettre davantage en adéquation le profil des postes offerts et la demande des candidats à l'engagement. Le déficit global enregistré par les forces terrestres devrait en conséquence être réduit.

 

Effectifs réels et budgétaires de l'armée de terre

Terre

Effectifs LFI pour 2003

Effectifs réels 1er juillet 2003

écart

 

Officiers

15 776

15 450

-326

Sous-officiers

51 274

50 320

-954

Militaires du rang

66 470

66 409

-61

Volontaires

3 954

2 794

-1 160

Civils

30 396

28 921

-1 475

Total

167 870

163 894

-3 976

 

LFI : loi de finances initiale

La catégorie des civils continue, de son côté, à enregistrer un important déficit qui pourra difficilement être comblé tant que perdurera l'interdiction faite aux armées d'embaucher de nouveaux ouvriers. Cette mesure est destinée à favoriser le délicat redéploiement des salariés de DCN et de Giat Industries.

La marine nationale est l'armée qui connaît, proportionnellement à sa taille, le plus grand sous-effectif, militaires et civils confondus. Avec 3 023 emplois vacants, ce sont 5,5 % des postes qui ne sont pas pourvus.

 

Effectifs réels et budgétaires de la marine

Terre

Effectifs LFI pour 2003

Effectifs réels 1er juillet 2003

écart

 

Officiers

4 823

4 542

- 281

Officiers mariniers

29 293

29 469

+ 176

Militaires du rang

8 550

7 170

- 1 380

Volontaires

1 601

1 465

- 136

Civils

10 296

8 894

- 1 402

Total

54 563

51 540

- 3 023

Si le déficit en officiers, identifié depuis plusieurs exercices budgétaires, s'est stabilisé, le sous-effectif en militaires du rang s'est aggravé, passant de - 1 175 en 2002 à - 1 380 en 2003. Le déficit en civils s'est accru de 37 %.

Si toutes les catégories de personnels de l'armée de l'air connaissent un sous-effectif, ce sont surtout les sous-officiers qui font défaut, avec un déficit qui atteint le chiffre inquiétant de 1 449 postes.

 

Effectifs réels et budgétaires de l'armée de l'air

Terre

Effectifs LFI pour 2003

Effectifs réels 1er juillet 2003

écart

 

Officiers

6 840

6 772

- 68

Sous-officiers

37 673

36 224

- 1 449

Militaires du rang

17 185

16 670

- 515

Volontaires

1 898

1 260

- 638

Civils

5 702

5 650

- 52

Total

69 298

66 576

-2 722

Généralement bien formés, les sous-officiers expérimentés constituent un personnel très convoité par les entrepreneurs du secteur civil qui proposent en général des rémunérations supérieures à celles des armées.

Ce déficit, que les autorités tentent de combattre en augmentant le recrutement, est d'autant plus dommageable qu'il prive l'armée de l'air d'une partie de sa main-d'_uvre la plus qualifiée et contribue à rendre plus difficile encore l'entretien et la disponibilité des matériels.

La gendarmerie est la seule institution militaire à avoir vu ses effectifs progresser pendant la phase de professionnalisation. C'est également celle dont les effectifs réels se rapprochent le plus de ceux prévus en loi de finances.

 

Effectifs réels et budgétaires de la gendarmerie

Terre

Effectifs LFI pour 2003

Effectifs réels 1er juillet 2003

écart

 

Officiers

4 087

3 954

- 133

Sous-officiers

78 013

78 224

+ 211

Militaires du rang

0

0

0

Volontaires

15 203

14 330

- 873

Civils

1 876

1 869

- 7

Total

99 179

98 377

- 802

Le déficit en officiers se réduit graduellement, grâce à un effort consenti en matière de recrutements. Si le nombre de sous-officiers est proche des effectifs théoriques, celui des volontaires (gendarmes adjoints) enregistre toujours un important déficit, toutefois en voie de résorption : - 873 en 2003 contre - 2 684 en 2002. En 2004, les effectifs de la gendarmerie seront augmentés de 1 166 postes supplémentaires.

Les services communs connaissent, à des niveaux divers, des déficits dans la plupart des catégories de personnel.

Le service de santé des armées, comme l'année dernière, continue à pâtir d'une conjoncture démographique défavorable conjuguée à la forte attractivité du secteur civil. Ce service subit, en conséquence, un déficit de près de 10 % de ses effectifs (- 1 245 postes). Ce sous-effectif se réduit toutefois légèrement sur un an puisqu'il concernait 1 598 postes en 2002.

La situation du service des essences n'est guère meilleure, même si les déficits portent sur des nombres plus réduits (174 emplois non pourvus). De son côté, la délégation générale pour l'armement (DGA) qui connaissait un certain équilibre de ses effectifs l'an dernier, enregistre en 2003 un important déficit (- 2 588), essentiellement dû à un fort sous-effectif de ses personnels civils (- 2 402).

Effectifs réels et budgétaires des services communs

 

Service de santé des armées (SSA)

Service des essences des armées (SEA)

Délégation générale pour l'armement (DGA)

Effectifs budgétaires LFI 2003

Effectifs réels au 1er juillet 2003

Effectifs budgétaires LFI 2003

Effectifs réels au 1er juillet 2003

Effectifs budgétaires LFI 2003

Effectifs réels au 1er juillet 2003

Officiers

3 415

3 033

223

200

1 934

1 804

Sous-officiers

4 431

4 245

339

290

77

132

Militaires du rang

240

244

849

780

0

0

Volontaires

260

231

0

0

226

115

Civils

5 834

5 182

972

939

12 984

10 582

Total

14 180

12 935

2383

2209

15 221

12 633

La professionnalisation des armées a conduit à une augmentation sensible des effectifs budgétaires de personnel civil du ministère de la défense, les militaires, désormais moins nombreux, devant se concentrer sur le c_ur de leur métier.

Le ministère de la défense éprouve, depuis plusieurs années, des difficultés à pourvoir les postes créés. En 1999, le déficit en personnels civils a atteint son maximum avec 9 300 emplois vacants. En 2000, le sous-effectif était ramené à - 5 400 avant de se creuser à nouveau en 2001 : - 7 500.

État du sous-effectif en personnel civil

 

2000

2001

2002

2003

Armée de terre

- 2 164

- 3 484

- 2 758

- 1 475

Marine

- 911

- 1 352

- 1 469

- 1 402

Armée de l'air

- 300

- 419

- 349

- 52

Gendarmerie

- 27

- 205

- 176

- 7

Autres services

- 1 998

- 2 058

- 210

- 1 073

Total

- 5 400

- 7 518

- 4 962

- 4 009

Depuis lors, il semblerait que les efforts de recrutement aient fini par porter leurs fruits, puisque le déficit a été ramené à moins de 5 000 en 2002 avant de se réduire à seulement 4 000 en juillet 2003.

Personnels civils du ministère de la défense

(y compris les comptes de commerce)

Catégorie
des personnels

2002

2003

évolution

TITULAIRES

     

- Catégorie A

5 669

5 750

+ 81

- Catégorie B

13 219

13 349

+ 130

- Catégorie C

26 728

26 476

- 252

Total

45 616

45 575

- 41

CONTRACTUELS

     

- Catégorie A

3 366

3 288

- 78

- Catégorie B

1 894

1 600

- 294

- Catégorie C

2 718

2 727

+ 9

Total

7 978

7 615

- 363

OUVRIERS

- Chefs d'équipe

- Autres

4 370

41 644

4 349

41 036

- 21

- 608

Total

46 014

45 385

- 629

TOTAL GÉNÉRAL

99 608

98 575

- 1 033

Pour assurer la montée en puissance des personnels civils dans le cadre de la professionnalisation, plus de 4 000 postes ont été ouverts aux concours, annuellement, entre 1999 et 2002. En 2003, 1 800 postes sont ouverts. Pour réduire les délais, les procédures administratives ont été aménagées, de sorte que les épreuves se déroulent désormais avant l'été, les affectations intervenant dès septembre. D'autres aménagements ont permis d'organiser des concours sur titre pour certaines catégories de personnels, certains concours ont été régionalisés et le recours aux listes complémentaires a été encouragé.

Malgré ces mesures, le sous-effectif est demeuré important, pour les raisons suivantes :

- le maintien d'un gel de 1 050 emplois, auquel a succédé une mise en réserve, a pesé sur les effectifs jusqu'à la fin de l'année 2001. Cette mise en réserve a été levée en 2002 ;

- les restrictions d'embauche d'ouvriers d'État n'ont pas permis de combler les vacances. Les autorisations exceptionnelles (500 en 1998, 250 en 2000, 250 en 2001) ont été très inférieures aux besoins (environ 1 000 par an). L'autorisation d'embauche, accordée fin 2002, qui permet le recrutement exceptionnel de 900 ouvriers d'État réduira, en 2003, le nombre de postes d'ouvriers vacants ;

- les concours de fonctionnaires techniques ne permettent pas toujours de recruter l'intégralité des personnels souhaités en raison de la localisation géographique des postes proposés qui conduit des lauréats à renoncer au bénéfice de leur admission ;

L'année 2002 constituait la quatrième année d'application du plan stratégique, économique et social (PSES) de la société Giat Industries. Bien que le terme du PSES ait été fixé au 31 décembre 2002, les transferts de personnels se poursuivent. Au 31 juillet 2003, 1 040 réintégrations au sein du ministère de la défense ont été enregistrées. 62 % de ces reclassements ont été effectués dans l'armée de terre, 11,5 % dans la DGA, 4,6 % dans la gendarmerie, 3,9 % dans l'armée de l'air et 1,9 % dans la marine.

Réintégration du personnel de Giat Industries

 

1999

2000

2001

2002

2003 (1)

Ouvriers

172

269

181

167

25

Personnel non ouvrier

64

89

35

31

7

Total

236

358

216

198

32

(1) Au 31 juillet.

Les principales difficultés rencontrées dans le reclassement des personnels de l'entreprise sont liées à la contrainte de mobilité, peu de postes étant proposés dans le même bassin d'emploi.

Par ailleurs, la réorganisation de la direction des programmes, de la méthode et du service de la qualité de la DGA, décidée en 2002, conduit à la fermeture de 52 sites. Alors que l'essentiel des restructurations a été réalisé, il apparaît que seulement 286 personnels de la DGA ont été transférés vers les états-majors et les services communs, ce qui reste assez éloigné des objectifs initiaux qui prévoyaient 566 mouvements.

III. -  L'ENTRAÎNEMENT ET L'ACTIVITÉ DES FORCES

L'examen du titre III ne se réduit pas aux questions d'effectifs. L'instruction et les exercices sont indispensables à une armée professionnelle dont la majeure partie des forces est appelée à servir en opérations extérieures, dans des conditions parfois périlleuses.

Grâce à un effort sensible consenti sur les crédits dévolus aux exercices, l'entraînement des unités devrait s'approcher des normes définies par la loi de programmation. Seule la médiocre disponibilité de certains matériels, notamment aériens, tempère cette amélioration sensible.

Après les difficiles années 1999 et 2000, au cours desquelles l'entraînement des forces terrestres était tombé à un plancher de 68 jours par an, le nombre de jours d'exercices s'est amélioré, atteignant 75 jours en 2001 et 86 jours en 2002. En 2003, l'entraînement des forces terrestres devrait s'élever à 94 jours.

Années

Nombre de journées d'exercice avec matériels

Nombre de journées d'exercice sans matériels

Nombre total de journées d'exercice

    1999

34

34

68

    2000

34

34

68

    2001

35

40

75

    2002

36

50

86

    2003 (1)

40

54

94

    2004 (2)

50

50

100

(1) estimation (2) projet de loi de finances pour 2004.

Les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2004 (182,20 millions d'euros) laissent à penser que l'armée de terre pourra enfin atteindre cent jours d'exercice par an, objectif inscrit dans la loi de programmation militaire pour les années 1997 à 2002 et réaffirmé par celle qui lui a succédé.

L'entraînement des pilotes de l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT), en revanche, devrait rester stable en 2004, aux alentours de 160 heures de vol par an. Ce niveau, relativement faible, mais qui reste supérieur au seuil de sécurité fixé à 150 heures de vol annuelles, pourra difficilement être relevé en raison de la faible disponibilité des appareils. Une amélioration significative de l'entraînement des équipages ne pourra désormais être constatée qu'avec l'arrivée de nouveaux matériels, aptes à un plus grand nombre d'heures de vol. La livraison, d'ici quelques mois, des premiers exemplaires du Tigre devrait apporter un début de concrétisation à cet espoir. N'est pas incluse, dans les chiffres relatifs à l'entraînement, l'importante et inhabituelle activité des appareils mis à la disposition de la sécurité civile, cet été, pour lutter contre les incendies de forêt. Les 1 400 heures de vols enregistrées à l'occasion de cette mission viennent s'ajouter à l'activité militaire classique des équipages de l'ALAT.

L'activité à la mer comporte une part d'entraînement (exercices nationaux, interarmées et interalliés) et une part de missions réelles. Le temps consacré à l'entraînement fluctue en fonction de l'activité opérationnelle. L'exécution des missions étant aussi l'occasion d'améliorer le savoir-faire des équipages, il est parfois délicat de dissocier missions et entraînement.

L'activité des unités en 2002, stable sur l'ensemble de la flotte, se caractérise par une progression sensible des grandes unités au détriment des bâtiments auxiliaires. Le volume global d'activité a été de 248 962 heures de navigation pour l'ensemble de la flotte, ce qui représente environ 85 jours de mer par bâtiment, avec d'importantes disparités : ainsi, les bâtiments de combat ont navigué 106 jours, contre 77 pour les bâtiments de soutien et 64 pour les navires auxiliaires.

Activité des principaux types de bâtiments en 2002

 

Bâtiments de combat

Bâtiments de soutien

Bâtiments auxiliaires

Heures de mer

153 691

15 943

55 381

Nombre moyen d'heures de mer par bâtiment


1 958


1 386


1 035

Nombre moyen de jours de mer par bâtiment


106


77


64

Nombre moyen de jours d'absence par bâtiment


134


148


91

Les équipages d'aéronefs de la marine atteignent globalement les normes d'activité fixées. Le total d'heures de vol effectuées par l'aviation navale en 2002 laissait apparaître une augmentation de 2,2 % de l'activité. Si les pilotes de Super-Étendard n'ont volé que 180 heures, ceux d'Hawkeye et d'Atlantique 2 ont volé 350 heures et ceux de Lynx et de Panther 250 heures.

Les objectifs pour 2004 sont les suivants :

- 100 jours de mer par an et par bâtiment, exception faite des navires de haute mer qui devront naviguer 110 jours ;

- 180 heures de vol par pilote de chasse et 220 heures pour ceux appontant de nuit ;

- 250 heures de vol pour les pilotes d'hélicoptères embarqués, 220 pour les pilotes de Dauphin et 180 pour les pilotes de Super-Frelon ;

- 350 heures de vol pour les équipages de patrouille maritime.

En 2002, l'armée de l'air a effectué 259 000 heures de vol au lieu des 298 000 prévues. L'aviation de combat a volé 92 000 heures (165 heures par pilote), l'aviation de transport près de 91 000 (315 heures par pilote), les écoles 68 000 et les avions de complément 8 800. Ce déficit de 39 000 heures est principalement dû à la faible disponibilité des appareils de combat et de transport.

Pour maintenir le niveau opérationnel de ses équipages, l'armée de l'air a fixé, pour 2003 et 2004, les objectifs d'heures de vol annuels suivants : 180 heures pour un pilote de combat, 400 heures pour un pilote de transport et 200 heures pour un pilote d'hélicoptère.

En 2003, la prévision annuelle d'activité, initialement fixée à 288 000 heures, a été révisée à la baisse en juillet et est désormais fixée à 265 000 heures, ce qui reste supérieur au résultat de 2001.

L'entraînement des pilotes passe également par la participation aux exercices internationaux. La loi de programmation militaire prévoit de faire participer chaque équipage à un exercice majeur international tous les deux ans. Ce niveau d'entraînement a été atteint en 2003 et devrait l'être encore en 2004.

L'entraînement, en gendarmerie, concerne essentiellement la gendarmerie mobile. Aux termes de la loi de programmation militaire 2003-2008, chaque escadron doit bénéficier de 35 jours de neutralisation pour la formation à la résidence ou en camp d'entraînement. En outre, un tiers des unités devrait effectuer annuellement un stage de recyclage de maintien de l'ordre à Saint-Astier.

L'emploi soutenu des escadrons de gendarmerie mobile au cours du premier semestre 2003 ne permettra pas d'atteindre l'objectif des 35 jours d'instruction collective. Les événements en Côte d'Ivoire, le sommet d'Évian, la coupe de football des confédérations et les manifestations liées à la réforme des retraites ont mobilisé un total de 47 escadrons de gendarmerie mobile.

Les gendarmes départementaux, de leur côté, se sont entraînés 10 jours en 2001, puis 7,5 jours en moyenne en 2002. Les normes d'entraînement ont été fixées à 15 jours par an par la loi de programmation militaire.

Les opérations extérieures, qui occupent une bonne place dans l'activité des forces, représentent également un surcoût non négligeable pour le budget des armées. La plupart de ces dépenses sont imputées au titre III du budget de la défense, notamment pour tout ce qui concerne le financement des rémunérations, plus élevées hors du territoire métropolitain.

Au 1er juin 2003, 14 721 militaires étaient en mission, hors du territoire national, qu'il s'agisse d'opérations placées sous l'autorité de l'ONU, d'opérations internationales menées dans le cadre d'autres structures ou d'opérations placées sous commandement purement national.

Effectifs militaires engagés en opérations extérieures au 1er juin 2003

Opérations menées dans le cadre de l'ONU (Liban, Érythrée-Éthiopie, Sahara occidental...)

Armée de terre

239

Marine

4

Armée de l'air

4

Gendarmerie

95

Services communs

4

Total

346

Engagement international hors ONU (Afghanistan, Kosovo, Bosnie, République démocratique du Congo...)

Armée de terre

6 030

Marine

673

Armée de l'air

1 086

Gendarmerie

306

Services communs

169

Total

8 364

Opérations sous commandement national (Cameroun, Côte d'Ivoire, Tchad, Centrafrique,...)

Armée de terre

4 436

Marine

901

Armée de l'air

423

Gendarmerie

168

Services communs

83

Total

6 011

Total général

14 721

Les effectifs recensés ci-dessus au titre des opérations extérieures ne doivent pas être confondus avec ceux des forces dites « prépositionnées » qui sont stationnées dans des pays avec lesquels la France a conclu des accords de défense. Ces forces représentent 10 148 militaires. Au total, ce sont donc 24 869 militaires qui étaient stationnés, au 1er juin 2003, hors du territoire français.

Effectifs militaires prépositionnés à l'étranger

Le surcoût des opérations extérieures correspond aux dépenses supplémentaires par rapport à l'activité normale et dont les armées doivent faire l'avance à partir des crédits affectés à leurs activités courantes. Des crédits complémentaires sont généralement ouverts en cours de gestion, par décrets d'avance et en lois de finances rectificatives.

En 2003, le ministère de la défense a pris part à trois grandes missions d'assistance aux personnes et aux biens : la lutte contre les incendies de forêt, l'aide sanitaire lors de la canicule et l'aide apportée lors du cyclone Erika, en Nouvelle-Calédonie.

- L'effectif engagé par les armées dans le cadre du plan Héphaïstos (lutte contre les feux de forêt) a été d'environ 480 militaires par semaine. Huit hélicoptères, utilisés pour des missions de surveillance et de transport ont volé pendant un total de 1 400 heures, consommant en deux mois la quasi-totalité de leur potentiel annuel (200 heures par machine). Le coût de l'opération est estimé à 4,5 millions d'euros.

- Une trentaine de lits ont été mis à disposition par trois hôpitaux militaires de la région parisienne, au titre du soutien des services hospitaliers lors de la canicule. Par ailleurs, neuf conteneurs frigorifiques ont été mis à disposition de la préfecture des Hauts-de-Seine. Du 11 au 20 août 2003, les hôpitaux militaires ont constaté une augmentation de 35 % du nombre de patients aux urgences.

- 500 gendarmes sont intervenus pendant neuf jours en mars 2003 au titre de l'assistance aux personnes victimes du cyclone Erika, en Nouvelle-Calédonie. Le coût de cette opération est estimé à 0,14 million d'euros.

Enfin, l'armée de terre et l'armée de l'air participent au transport de la paille au profit des agriculteurs sinistrés par la sécheresse. Le bilan financier de cette opération n'est pas encore connu.

En 2003, le ministère de la défense a pris part à deux grandes missions non militaires ne relevant pas de l'aide d'urgence aux personnes et aux biens : le plan Vigipirate et la protection du sommet du G8 à Evian.

- En moyenne, 970 militaires participent chaque mois à la mise en _uvre du plan Vigipirate, pour un coût annuel estimé à 3 millions d'euros.

- Le sommet du G8 qui s'est tenu du 1er au 3 juin, à Evian, a mobilisé des personnels de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie pendant plusieurs mois. Plusieurs dizaines d'aéronefs, avions, hélicoptères, drones, ont été mobilisés. Le coût de cette opération est évalué à 14,62 millions d'euros.

IV. -  LE MAINTIEN DU LIEN ENTRE LA NATION ET SES ARMÉES

Pour beaucoup, le service militaire était le meilleur garant du lien entre la Nation et ses armées. Même si cette idée doit être nuancée en raison, notamment, des inégalités induites au cours des derniers temps entre les conscrits, il faut reconnaître qu'un risque de décrochage pourrait exister entre l'institution et la société civile. Pour l'éviter, une attention toute particulière est accordée, au sein des armées, à la concertation, qui évolue régulièrement. À l'extérieur des armées, le parcours de citoyenneté a pour objet de faire mieux connaître les enjeux de la défense aux jeunes gens. Les réserves, désormais ouvertes aux personnes sans passé militaire, constituent une autre forme du lien entre la Nation et ses armées.

Le Président de la République a souhaité qu'une réflexion sur le statut général des militaires soit engagée, dans le respect des principes fondamentaux de discipline, de neutralité et de disponibilité. Une commission, présidée par le vice-président du Conseil d'État, a été mise en place le 5 février 2003 et devra rendre ses conclusions avant la fin de l'année.

L'évolution de la concertation est l'un des axes de recherche. Le mandat confié au groupe de travail fixe les orientations suivantes :

- rechercher les moyens d'améliorer la cohérence du système de concertation et renforcer la représentativité et la crédibilité de ses organes ;

- envisager des innovations complémentaires susceptibles de conforter la prise en compte des préoccupations militaires ;

- intégrer dans les réflexions les dispositions en vigueur dans les autres armées occidentales.

Le moral des armées peut être évalué en particulier à travers les rapports établis tous les deux ans, et plus fréquemment dans la marine. Ces documents, élaborés à partir d'une expression directe du personnel, informent sur son état d'esprit, ses attentes et ses préoccupations.

Dans l'armée de terre, les engagements du Gouvernement, notamment en matière budgétaire, ont contribué à améliorer le moral des militaires en 2003, même si quelques inquiétudes liées à l'évolution du statut et à la poursuite d'éventuelles restructurations persistent. Le renforcement des capacités est accueilli très favorablement et suscite une mobilisation autour de l'engagement opérationnel, conforté par le rôle majeur et valorisant des unités engagées en Côte d'Ivoire. Les actions en faveur de l'amélioration de la condition du personnel, telles la réduction du temps d'activité et d'obligation professionnelle des militaires (TAOPM) ou les mesures financières du plan d'amélioration de la condition militaire, ont été très bien accueillies. Toutefois, des fragilités susceptibles de s'aggraver entre jeunes et anciens ainsi qu'entre personnels civils et sous-officiers sont nettement perceptibles. Subsistent également des facteurs d'insatisfaction liés pour l'essentiel au manque de moyens et au sentiment d'une insuffisante prise en compte de la technicité des personnels. L'impression d'inadéquation entre les moyens, humains et matériels, et les missions persiste, surtout parmi les régiments de mêlée (infanterie, chars) dont l'activité est particulièrement importante.

Dans la marine, les mesures du plan d'amélioration de la condition militaire et les dispositions de la loi de programmation ont également suscité un net regain de confiance. Le principal facteur d'insatisfaction concerne les conditions de travail qui se trouvent souvent altérées par les difficultés liées à l'entretien des matériels. Les marins sont très conscients de la spécificité de leur métier, dont ils tirent une légitime fierté. Ils restent néanmoins attentifs aux évolutions des conditions de travail de la société civile et attachent de l'importance aux mesures d'allègement de contrainte mises en place en 2002.

Le moral semble également élevé dans l'armée de l'air, même si la succession de changements de fond auxquels l'institution militaire a dû faire face ces dernières années a pu créer une certaine lassitude. Par ailleurs, la vétusté de certains matériels et les difficultés devenues chroniques en matière de logistique cristallisent l'attention du personnel et développent un climat de découragement qui pourrait, à terme, conduire à une baisse de moral dans certaines unités.

Le parcours de citoyenneté a été créé par la loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national. Ce parcours se déroule en trois phases : un enseignement de défense, un recensement en mairie à l'âge de seize ans et la participation à une journée d'appel de préparation à la défense (JAPD).

L'enseignement de défense, qui incombe à l'éducation nationale, est dispensé dans le cadre de l'éducation civique, juridique et sociale, en particulier en classes de troisième et de première. Cet enseignement présente aux élèves les enjeux de la défense nationale d'aujourd'hui, les menaces et les réponses à y apporter. Les professeurs sont formés à cet enseignement dans le cadre de trinômes regroupant l'éducation nationale, la défense et l'institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN).

Le recensement est une formalité obligatoire qui permet de connaître l'état de la ressource dans l'hypothèse où le service national, qui n'est que suspendu, serait rétabli. Il permet également de convoquer tous les jeunes à l'appel de préparation à la défense et de les inscrire de manière automatique sur les listes électorales. L'attestation de recensement délivrée à cette occasion est indispensable pour s'inscrire à un concours ou examen soumis au contrôle de l'autorité publique. En cas d'oubli, une régularisation est possible jusqu'à l'âge de 25 ans.

Au 1er avril 2003, le taux de jeunes gens nés entre 1980 et 1983 n'ayant pas participé aux opérations de recensement est, en moyenne, de 3,3 %. Ce chiffre diminue régulièrement grâce à l'effort constant des personnels de la direction du service national, en partenariat avec les mairies et les établissements d'enseignement.

La journée d'appel de préparation à la défense a commencé le 3 octobre 1998 avec les jeunes garçons nés à partir du 1er janvier 1980. Depuis le 8 avril 2000, les jeunes filles nées à partir du 1er janvier 1983 sont également convoquées. Au 15 juillet 2003, 3 189 041 personnes ont participé à une JAPD.

D'une manière assez stable, 88,6 % des personnes convoquées se rendent aux JAPD. Ce chiffre n'intègre pas le fait que les absents, pour la plupart, demandent à être convoqués ultérieurement, ce qui est possible jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Au total, depuis le 3 octobre 1998, 93 % des Français nés en 1980 ont participé à la journée d'appel de préparation à la défense. Les 7 % restants peuvent demander à suivre cette journée jusqu'à leur 25ème anniversaire, c'est-à-dire jusqu'en 2005.

Le taux de satisfaction atteint 80,7 %, ce qui constitue une moyenne assez élevée. Les abandons en cours de journée ou exclusions sont particulièrement rares (0,06 %). Les personnes se déclarant intéressées par les activités de la défense varient de 15 % à 25 % selon les années. Au cours de la session 2002-2003, 15,4 % des personnes ayant suivi la JAPD se sont déclarées intéressées par un éventuel engagement.

Ces journées permettent également de détecter les jeunes en grande difficulté de lecture (3 à 4 % en moyenne), dont les coordonnées sont transmises aux acteurs sociaux et éducatifs.

Si les résultats incitent à la poursuite de la JAPD, dont l'objectif principal est de sensibiliser les jeunes au devoir de défense, la ministre de la défense souhaite néanmoins rendre cette journée plus utile en améliorant la perception que les jeunes peuvent avoir de l'institution militaire. Ainsi, sur la plupart des sites d'accueil, des visites et des présentations de matériel sont organisées depuis peu, de manière à donner une vision plus concrète des armées.

Une meilleure information sera fournie aux jeunes sur les différents modes de recrutement par les armées ainsi que sur les métiers proposés. Deux nouveaux modules seront introduits : le premier visera à développer le volet civique, en donnant aux jeunes citoyens une idée plus claire de leurs droits et devoirs ; le second aura pour objectif de former les jeunes Français au secourisme et comprendra une initiation aux gestes élémentaires de premier secours.

L'année 2003 marque une augmentation du nombre de préparations militaires. Cette évolution s'explique par l'intérêt désormais double de ces préparations, acquisition d'une formation militaire générale et découverte de l'institution militaire qui dépasse le cadre de la réserve.

Effectifs des préparations militaires et préparations militaires supérieures depuis 1998

 

1998

1999

2000

2001

2002

2003 (1)

PM

PMS

PM

PMS

PM

PMS

PM

PMS

PM

PMS

PM

PMS

Air

167

98

10

35

04

32

09

0

0

0

0

0

Mer

1 146

76

993

57

762

40

801

40

825

70

1 007

154

Terre

1 407

347

1 147

273

986

182

1 070

232

812

14

0

0

Gendarmerie

0

0

231

0

226

24

624

56

494

48

472

63 (2)

Total

2 720

521

2 381

365

1 978

278

2 503

328

2 131

132

1 479

217

PM : préparation militaire. PMS : préparation militaire supérieure

(1) chiffres arrêtés au 1er juillet (2) nombre d'inscrits pour une session se déroulant en septembre 2003.

Avant 1999, la gendarmerie n'organisait pas de préparation militaire ou de préparation militaire supérieure.

Toutefois, les armées n'ont pas toutes la même approche de ces formations. Ainsi, l'armée de l'air a abandonné son dispositif de préparation militaire au profit de la formation militaire initiale du réserviste (FMIR). Elle a mis en place, dès 2002, une véritable politique de recrutement dans la réserve fondée sur la formation initiale, afin d'attirer des citoyens issus du seul secteur civil. Cette politique ambitieuse a permis de former 292 réservistes en 2002 et 393 pour le seul premier semestre 2003.

En revanche, la gendarmerie a conservé intégralement son dispositif de préparation militaire, qui semble lui donner satisfaction, et n'a pas souhaité instituer de FMIR afin de ne pas disperser ses moyens.

La marine et l'armée de terre ont conservé et adapté leurs formations militaires tout en instaurant la FMIR, considérant ces deux dispositifs comme complémentaires. Cette dynamique particulière transforme les préparations militaires en porte d'entrée dans la réserve ; elles permettent d'évaluer la détermination des jeunes à servir dans la réserve comme dans l'armée professionnelle tout en assurant une certaine sélection.

Pour les réservistes, la FMIR s'inscrit dans la continuité des préparations militaires : ils reçoivent une formation militaire générale dans le cadre de la préparation militaire, puis bénéficient d'une formation plus spécialisée, dans le cadre de la FMIR. Pour l'armée de terre et la marine, la FMIR ne concurrence donc pas la préparation militaire qui permet aux jeunes Français de découvrir concrètement l'institution militaire en vue d'un engagement ultérieur dans la réserve comme dans l'armée professionnelle. En 2004, cinq millions d'euros seront consacrés au financement de la FMIR, afin de poursuivre le recrutement de jeunes réservistes issus du seul secteur civil.

La loi n° 99-894 du 22 octobre 1999, portant organisation de la réserve militaire et du service de défense, a achevé le dispositif législatif créant une armée entièrement professionnelle en assurant la création d'une composante réserve.

L'objectif final de 100 000 réservistes, désormais repoussé à l'horizon 2015, a été ramené à 94 035. Les objectifs intermédiaires ont également été modifiés, la croissance annuelle étant limitée à 6 000 réservistes pour atteindre un effectif de 62 000 volontaires en 2007. L'objectif, peu réaliste, de 82 000 réservistes en 2008 sera prochainement ramené à 68 000.

 

objectifs d'effectifs de volontaires de la réserve opérationnelle par armées

 

OBJECTIFS

objectif

objectif

 
 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2015

Terre

12 890

14 680

16 320

17 960

19 400

28 000

29 000

Air

4 250

4 500

4 800

5 200

5 600

8 000

8 257

Marine

4 600

4 800

5 000

5 200

5 400

6 500

7 678

Gendarmerie

14 500

17 600

20 600

23 200

26 100

32 000

40 000

Service de santé des armées

1 650

2 300

3 150

4 300

5 350

7 000

8 600

Service des essences des armées

110

120

130

140

150

500

500

TOTAL

38 000

44 000

50 000

56 000

62 000

82 000

94 035

 

Source : Ministère de la défense.

Au 1er juillet 2003, les armées comptaient 33 494 réservistes ayant signé un engagement à servir dans la réserve. En augmentation de 20 % par rapport à la même période en 2002, ce chiffre est encore loin des objectifs.

L'attitude, parfois rigide, de certains employeurs vis-à-vis de leurs salariés réservistes constitue une des principales raisons de ce sous-effectif. Il apparaît indispensable de mettre au point des mécanismes d'incitation à l'égard des chefs d'entreprise, de manière que les réservistes aient plus de facilité à accomplir leurs périodes d'activité et ne soient plus obligés de dissimuler, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, leurs activités militaires généralement pratiquées pendant les congés.

Nombre d'engagements à servir dans la réserve (ESR) au 1er juillet 2003
et objectifsà l'horizon 2015

 
 

Militaires du rang

Sous-officiers

Officiers

ARMEE DE TERRE

Réalisé au 01/07/2003

2 525

4 613

4 671

Proportion réalisée

20 %

46 %

72 %

Objectif 2015

12 500

10 000

6 500

ARMEE DE L'AIR

Réalisé au 01/07/2003

583

2 078

1 295

Proportion réalisée

23 %

66 %

50 %

Objectif 2015

2 515

3 152

2 590

MARINE

Réalisé au 01/07/2003

348

2 053

1 485

Proportion réalisée

15 %

60 %

76 %

Objectif 2015

2 264

3 455

1 959

GENDARMERIE

Réalisé au 01/07/2003

6 489

4 639

1 414

Proportion réalisée

28 %

31 %

70 %

Objectif 2015

23 225

14 746

2 029

SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

Réalisé au 01/07/2003

4

177

1 20

Proportion réalisée

1 %

4 %

44 %

Objectif 2015

640

4 660

3 300

SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES

Réalisé au 01/07/2003

4

25

71

Proportion réalisée

1 %

83 %

355 %

Objectif 2015

450

30

20

 

Source : ministère de la défense.

Conscientes de la nécessité de mener des actions énergiques pour susciter davantage de volontariat, les autorités ont décidé d'augmenter les moyens financiers consacrés aux réserves.

Ainsi, le budget 2003 a déjà fait l'objet d'un abondement de 17 millions d'euros en cours d'exercice. Cet effort est poursuivi en 2004, puisqu'une mesure nouvelle de 37 millions d'euros est inscrite au titre des réserves afin d'accroître l'entraînement. Une amélioration de la formation effective ainsi qu'une durée minimale d'activité seront proposées aux réservistes. Par ailleurs, la création d'une prime de réactivité, pour les réservistes s'engageant à revêtir l'uniforme en dehors des périodes planifiées, est en cours d'étude.

Crédits consacrés aux réserves depuis 2001

(en millions d'euros)

 

Air

Terre

Marine

Gendarmerie

Services communs

Total

2001   

7,3

18,2

2,6

9,3

2,5

39,9

2002   

9,1

26,9

4

13,4

2,5

55,9

2003 (1)

7,4

20,1

5,6

12,5

4,1

49,7

2004 (2)

8,7

28,2

9,2

30,8

4,8

81,7

(1) Loi de finances initiale. Les crédits consacrés aux réserves ont été abondés de 17 millions d'euros en cours d'exercice.
(2) Projet de loi de finances.

La durée annuelle de service dans la réserve peut varier d'une armée à une autre, mais reste globalement située aux alentours de 20 jours. Elle est de 23 dans l'armée de terre, 24 dans l'armée de l'air, environ 19 jours dans la marine et 14 jours dans la gendarmerie.

Pour la période 2005-2008, le besoin moyen d'augmentation des crédits consacrés aux réserves est estimé à 25 millions d'euros par an.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. -  AUDITION DE MME EVELYNE RATTE, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE POUR L'ADMINISTRATION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu Mme Evelyne Ratte, secrétaire générale pour l'administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093), au cours de sa réunion du mercredi 22 octobre 2003.

Mme Evelyne Ratte a indiqué que l'élaboration des lois de finances concernait ses services à plusieurs titres :

- le secrétariat général pour l'administration (SGA) participe, par l'intermédiaire de la direction des affaires financières, à la préparation du budget du ministère et dispose d'une vision d'ensemble sur les grands équilibres qui le composent ;

- le SGA gère l'évolution statutaire et indemnitaire des personnels, en particulier civils, par l'intermédiaire de la direction de la fonction militaire et du personnel civil ;

- à travers les deux directions issues en tout ou partie de l'ex-secrétariat d'Etat aux anciens combattants, le SGA a la responsabilité de l'évolution et de la négociation des crédits en faveur du monde combattant ;

- enfin, le SGA est lui-même gouverneur de crédits.

Le SGA ne gère en propre que 169,1 millions d'euros de crédits de fonctionnement et, en ce qui concerne les investissements, 125,7 millions d'euros d'autorisations de programme et 143,1 millions d'euros de crédits de paiement.

Ces crédits sont affectés à cinq missions principales :

- la gestion de l'administration centrale, qui bénéficie de 57 millions d'euros en fonctionnement, tandis que les investissements s'élèvent à 45 millions d'euros d'autorisations de programme et 62 millions d'euros de crédits de paiement ;

- la mise en _uvre de la journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD), pour 26,7 millions d'euros ;

- l'action sociale ;

- les travaux d'infrastructure en matière de logements civils et militaires : 10 millions d'euros seront affectés à l'entretien et 54 millions d'euros à la construction ;

- l'aide au monde combattant, par le biais de subventions aux établissements publics et notamment à l'office national des anciens combattants, pour 49,4 millions d'euros, et à l'institut national des Invalides, pour 7,1 millions d'euros ; 6,5 millions d'euros sont affectés au fonctionnement des directions interdépartementales des anciens combattants.

Les crédits de fonctionnement augmentent de 4 % du fait de la modification du périmètre de calcul ; les crédits d'investissement diminuent en raison de la fin de certaines opérations. La gestion des crédits du secrétariat général pour l'administration s'inscrit à la fois dans la recherche d'une meilleure efficacité et dans l'anticipation des méthodes que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) va introduire.

Dans cette optique, trois priorités ont été définies :

- la mise en place d'enveloppes de crédits limitatifs pour chaque entité dont le SGA assure le soutien. L'expérience concerne cette année les frais de déplacement. En 2004, il est prévu de l'étendre aux dépenses d'informatique, d'abonnements, d'achat de mobilier et de formation. Un système de compte rendu périodique de consommation de crédits et d'alerte, en cas de consommation trop rapide, a été mis en place. En 2005, l'exercice concernera les dépenses d'entretien immobilier, d'équipements informatiques et télématiques. La mise en place progressive d'une comptabilité analytique sur la base d'unités d'oeuvres permettra de rapprocher une activité et son coût ;

- l'année 2004 sera consacrée à améliorer les outils de pilotage des effectifs civils. Le SGA emploie, au 1er mai 2003, 7 451 agents, soit 1,8 % des effectifs du ministère (76 % de civils et 24 % de militaires), ce qui représente une masse salariale de 210 millions d'euros. Ces effectifs ne sont pas identifiés en nomenclature budgétaire, dans la mesure où les militaires, mis à disposition par les armées, sont comptabilisés dans les effectifs budgétaires des armées ; les personnels civils sont intégrés dans l'ensemble des personnels civils de l'administration centrale et des services déconcentrés du ministère. Les effectifs du secrétariat général pour l'administration ont baissé de 8,4 % entre mai 2002 et mai 2003. Cette diminution va se poursuivre en 2004, du fait de la non compensation partielle des départs à la retraite et d'économies en emplois dans certaines directions ;

- le contrôle de gestion sera développé ; certaines directions, comme la direction du service national, font déjà l'objet d'un contrôle de gestion articulé sur des indicateurs d'activité trimestriels. Cette direction a connu une profonde réorganisation depuis 1997 et a été contrainte d'améliorer sa productivité : ses effectifs sont passés de 7 150 postes en 1996 à 2 900 en 2003. Le coût de la journée d'appel et de préparation à la défense est passé de 162 euros en 2002 à 134 euros en 2003. L'objectif, pour 2004, est d'appliquer le contrôle de gestion à la fonction immobilière et à la fonction archives. La mission d'aide au pilotage par le contrôle de gestion sera rattachée directement au SGA qui aura ainsi la responsabilité d'un système coordonné et cohérent de contrôle de gestion pour l'ensemble du ministère. En 2004, des efforts devront être consentis en matière de recrutement de contrôleurs de gestion et de formation des personnels. Ils porteront également sur la définition d'outils permettant d'extraire les données des systèmes comptables et financiers et sur la présentation d'indicateurs statistiques. La conduite des programmes d'armement, la maintenance opérationnelle des équipements, les fonctions de soutien sont les domaines sur lesquels portera cet effort.

Abordant la politique des ressources humaines du ministère de la défense, Mme Evelyne Ratte s'est déclarée convaincue que la professionnalisation n'était pas un défi pour les seuls militaires, mais concernait également les personnels civils.

Les effectifs civils connaîtront en 2004 une légère réduction de 1 % (- 852 emp1ois, ce qui portera les effectifs budgétaires à 97 721 emplois). Cette évolution marque la participation du ministère à l'effort de maîtrise des emplois publics. Elle résulte de l'absence de renouvellement d'une partie des départs à la retraite (612), de la suppression de postes vacants (81) et de la transformation d'emplois (15). Comme, en contrepartie, le ministère de la défense accueille des emplois du compte de commerce DCN à hauteur de 421 postes, le solde se situe donc à - 431 emplois. Les suppressions concernent prioritairement l'administration centrale civile et militaire, ainsi que la délégation générale pour l'armement (DGA), même si cette dernière a été autorisée à créer cent emplois d'acheteurs.

Dans la continuité du budget 2003, le plan de reconnaissance professionnelle pour les personnels civils bénéficie d'un nouvel effort en vue d'améliorer l'attractivité du ministère. En deux ans, le montant des mesures nouvelles atteint près de 27 millions d'euros, ce qui est supérieur au total des crédits obtenus dans les budgets de la période 1998-2002. Ces mesures qui se partagent en revalorisation de primes et amélioration de déroulement de carrière concernent cette année tout particulièrement trois catégories de personnels :

- les personnels d'encadrement, qui mettent en _uvre la réforme de l'Etat ;

- les personnels de la filière sociale, qui accompagnent et soutiennent les agents dans les transformations et adaptations de structure ;

- les fonctionnaires de l'ordre technique, afin de leur donner des déroulements de carrière rénovés correspondant à la nature et à la qualification des compétences techniques.

Le ministère de la défense comptera, en 2004, 356 752 militaires. Des créations de postes sont prévues : 1 200  gendarmes, 1 000 engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT) et 179 personnels pour le service de santé. L'effort d'amélioration de la condition militaire est poursuivi et les objectifs du fonds de consolidation de la professionnalisation (FCP) devraient être atteints. Le plan d'amélioration de la condition militaire (PACM) représente 53,08 millions d'euros en 2004 et permettra de financer onze mesures catégorielles. L'annuité du FCP s'établit en 2004 à 49,93 millions d'euros, en augmentation de 27 millions, et assure le financement de mesures d'attractivité et de fidélisation. Ces dispositions incluent notamment la mise en place, à hauteur de 11,92 millions d'euros, de primes d'engagement, dont le taux est modulé en fonction de la difficulté à recruter. 33,93 millions d'euros sont prévus en 2004 pour financer l'attribution d'une indemnité de haute technicité reconnaissant les responsabilités exercées par les sous-officiers comptant plus de vingt ans de service. Des primes pour les spécialités soumises à une forte concurrence sur le marché de l'emploi sont instaurées tandis qu'est poursuivi le programme immobilier d'accueil des jeunes engagés chargés de famille.

La reconnaissance de la compétence et des résultats par la politique de rémunération est engagée au ministère de la défense depuis plusieurs années. Pour les militaires, elle se fonde sur la notation ainsi que sur le renouvellement ou non des contrats. Il convient d'aller plus loin, notamment pour les officiers supérieurs et généraux, afin d'introduire la possibilité de moduler les rémunérations. La création d'une prime de résultat pour les personnels de la gendarmerie est également envisagée. S'agissant des personnels civils, les primes des cadres supérieurs peuvent déjà varier du simple au triple et sont attribuées par les directeurs en fonction des résultats individuels.

Mme Evelyne Ratte a ensuite abordé la réforme de l'Etat et la modernisation des méthodes de gestion.

Les actions d'externalisation doivent être développées, afin d'améliorer l'efficacité des dépenses militaires. Une directive ministérielle du 26 mars 2003 définit le cadre de cette démarche, le recours à l'externalisation étant considéré comme un moyen d'améliorer la performance des services et de revaloriser le travail du personnel. La poursuite des actions d'externalisation s'inscrit dans une approche pragmatique et doit être réversible, en fonction des résultats obtenus. Parallèlement, un dispositif de formation à la mobilité sera proposé aux personnels civils dont l'emploi est concerné par une mesure de restructuration liée à l'externalisation. Plusieurs nouveaux projets d'externalisation seront examinés en 2004, en ce qui concerne la gestion des logements, la formation initiale des pilotes d'hélicoptères, la gestion du parc des véhicules automobiles ainsi que le soutien en opérations extérieures.

La mise en commun, au niveau régional, des moyens affectés aux activités de soutien sera encouragée. Des travaux en ce sens sont actuellement conduits par les comités interarmées régionaux qui comportent des représentants des forces armées et des services interarmées. Cela concerne, en particulier, le dépannage des véhicules militaires, le regroupement de certains marchés de services et de fournitures courantes et l'interarmisation du transport de fret et des transports collectifs de personnel.

La ministre a souhaité dynamiser la politique immobilière et a engagé à ce titre plusieurs études. Un groupe de travail définit actuellement les critères de répartition du patrimoine du ministère, afin de déterminer les immobilisations qui doivent être impérativement conservées, celles qui peuvent être vendues et celles sur lesquelles persistent des interrogations.

La cohérence de l'outil informatique d'administration et de gestion sera renforcée, notamment par la création de bases de données communes et la mise en place d'équipements compatibles, afin de réaliser des économies d'échelle.

Enfin, le ministère de la défense a engagé un processus de dématérialisation des procédures d'achat, en ouvrant sur Internet une véritable place de marché du service public de défense qui concerne la totalité des achats du ministère. Cet outil est très largement utilisé par les entreprises : en août, près de 2 000 sociétés y étaient inscrites.

Ces différentes initiatives ont pour objectif d'améliorer la qualité du service rendu et de réaliser des gains de productivité ; cette démarche s'inscrit pleinement dans la volonté du Premier ministre de mettre en _uvre une véritable réforme de l'Etat.

Le président Guy Teissier a exprimé son inquiétude au regard de la faiblesse du recrutement prévu pour la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) : une personne sous statut militaire et quelques dizaines de civils viendront renforcer les effectifs de la DGSE, dont le budget baissera légèrement. Il a souhaité connaître par ailleurs l'état d'avancement des travaux de la commission de révision du statut général des militaires, présidée par M. Renaud Denoix de Saint-Marc, vice-président du Conseil d'Etat.

Mme Evelyne Ratte a indiqué que les personnels civils de la DGSE étaient nombreux. L'encadrement est assuré par le corps particulier des chargés d'études, qui devrait bénéficier des mêmes revalorisations que celui des administrateurs civils. Un effort est fait dans le projet de loi de finances pour 2004 en vue d'améliorer l'attractivité des postes civils de la DGSE. Sur les 13,5 millions d'euros prévus pour le personnel civil, 2 millions sont réservés à cette direction, afin de financer des revalorisations indemnitaires et des congés spéciaux.

Abordant la question de la réforme du statut militaire, elle a précisé que le rapport de la commission présidée par M. Denoix de Saint-Marc serait remis à la ministre dans les prochaines semaines. Les travaux ont duré un peu plus longtemps que prévu, dans la mesure où l'examen de l'incidence de la réforme des retraites sur les limites d'âge a dû être ajouté au programme de travail. Les conclusions du rapport devraient être présentées aux conseils de la fonction militaire (CFM) et au conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) lors de leur session de décembre. Un projet de loi pourrait être déposé à la fin du printemps.

M. René Galy-Dejean a souligné que l'action exemplaire de réforme accomplie par le ministère de la défense, comparativement à d'autres, devait être davantage mise en valeur. Évoquant l'éventualité d'une gestion interministérielle des cessions d'actifs, il a souhaité savoir dans quelle mesure le ministère de la défense était concerné. Enfin, il a demandé des précisions sur l'implication du secrétariat général pour l'administration dans la mise en _uvre de la loi organique relative aux lois de finances : le budget du ministère ne sera plus organisé par armée, mais par agrégats couvrant les grands programmes, ce qui implique une évolution par rapport aux structures actuelles du ministère.

Mme Evelyne Ratte a rappelé que le Premier ministre s'était engagé à ce qu'un million de mètres carrés publics puissent être aliénés au cours des prochaines années. Un chargé de mission a été nommé pour mettre en _uvre cet engagement. Cette décision suppose-t-elle la création d'une agence interministérielle supplémentaire ? Aucune modification n'a été apportée à ce jour au processus de décision en cours au sein du ministère de la défense, ni à la structure financière, notamment pour ce qui concerne les retours financiers issus des cessions. Le ministère apportera son concours à la réalisation de l'objectif fixé par le Premier ministre.

La LOLF sera un outil très puissant qui contribuera à faire évoluer le ministère. La ministre a souhaité améliorer le processus de décision, en donnant au chef d'état-major des armées la possibilité d'influer sur les arbitrages en matière capacitaire. Jusqu'ici, ce dernier, très présent lors de l'élaboration des lois de programmation militaire, l'était moins lors de la mise en _uvre annuelle de la programmation à travers les lois de finances. Il convient de permettre une cohérence des choix tout au long de la loi de programmation.

M. Charles Cova a souhaité avoir des informations sur les conséquences du rattachement au ministère de la défense du secrétariat d'état aux anciens combattants.

Mme Evelyne Ratte a estimé que cet adossement bénéficiait largement au secrétariat d'Etat en lui facilitant notamment les négociations budgétaires. Le ministère de la défense et le secrétariat d'Etat aux anciens combattants tirent tous deux profit de cette solution. Cette réforme a été accompagnée d'une rationalisation de la politique de la mémoire, jusqu'ici exercée conjointement par l'office national des anciens combattants (ONAC), les directions interdépartementales des anciens combattants et par la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA). Désormais, l'ONAC s'est vu confier la responsabilité de l'ensemble de cette politique dans le cadre d'un contrat d'objectifs. Cent postes de chargés de mission seront créés afin de lui permettre de remplir sa mission. Les emplois correspondant à la politique de la mémoire des directions interdépartementales des anciens combattants ont été supprimés, tandis que ceux de la DMPA le seront en deux ans.

M. Jérôme Rivière a interrogé Mme Evelyne Ratte sur la valeur marchande des actifs pouvant être cédés. Puis, il a souhaité savoir si l'utilisation d'Internet destinée à rendre immatérielles les procédures d'appel d'offres est facturée aux entreprises et, dans l'affirmative, s'il est envisageable de moduler ce coût en fonction du degré d'engagement de ces dernières en faveur des réserves. Enfin, il a demandé si, dans le cadre de la politique d'externalisation, les comparaisons entre les prix pratiqués par les entreprises privées et le coût du service public tiennent compte de l'impact de la TVA.

Mme Evelyne Ratte a indiqué que le secrétariat général pour l'administration ne disposait pas d'une évaluation d'ensemble de la valeur marchande du patrimoine susceptible d'être cédé. Les évaluations sont conduites en fonction de la réalisation de chaque opération et l'on ne dispose pas encore d'une capacité de gestion systématique et d'arbitrage des actifs, comme cela se pratique dans le secteur privé.

L'utilisation d'Internet pour accéder aux marchés publics du ministère de la défense est un service facturé aux entreprises, mais dont le coût diminue régulièrement. L'idée de moduler les prix des prestations en vue d'inciter les entreprises à soutenir les réserves mérite d'être étudiée.

La TVA est un élément qui vient perturber les comparaisons entre le coût des prestations réalisées par le service public et celles fournies par le secteur privé. L'analyse précise du coût du maintien d'une activité au sein du service public reste très difficile à réaliser.

M. Yves Fromion a précisé que, si les crédits de la DGSE baissent en 2004, c'est en raison de l'évolution du titre V, liée à l'achèvement du programme d'infrastructures immobilières. En revanche, les crédits du titre III augmentent de trois millions d'euros et permettent le recrutement de 47 agents civils supplémentaires.

M. Jean Lemière a demandé si le suivi du sort des blessés de l'attentat de Karachi était de la compétence du secrétariat général pour l'administration, en relevant que la revendication des associations de blessés portant sur l'obtention d'une rente à 100 % n'a pas été satisfaite.

Mme Evelyne Ratte a précisé que ce suivi relevait pour l'essentiel de DCN et de la délégation générale pour l'armement, mais que le secrétariat général pour l'administration avait participé à la rédaction de textes, à l'accompagnement en vue de la recherche d'emplois et à la gestion des dossiers de pension. S'il paraît difficile d'accéder aux demandes complémentaires, l'instruction de ce dossier continue toutefois.

II. -  AUDITION DES ASSOCIATIONS DE RETRAITÉS MILITAIRES

La commission a entendu les représentants des associations de retraités militaires au cours de sa réunion du mercredi 25 juin 2003.

Le président Guy Teissier a rappelé que l'audition annuelle des associations par la commission avait traditionnellement lieu à l'automne, à un moment où les choix budgétaires du Gouvernement sont déjà arrêtés. C'est pourquoi il a, lors de la dernière réunion de ce type, le 2 octobre 2002, proposé que cette rencontre soit organisée à la fin de la session ordinaire, afin que la commission soit informée des revendications des retraités avant même le lancement de la procédure budgétaire.

M. Georges Gabrielli, président national de la fédération nationale des officiers mariniers quartiers-maîtres en retraite et veuves (FNOM), a rappelé les revendications des associations de retraités militaires qui restent à ce jour sans solution. Il a ainsi évoqué la révision des droits à pension des lieutenants retraités avant 1976, la retraite des maréchaux des logis chefs de la gendarmerie, la demande de suppression du remboursement sur patrimoine successoral des sommes perçues au titre de l'allocation supplémentaire et celle d'une révision à la hausse du minimum vieillesse pour les veuves.

Il a réitéré le souhait que les pensions militaires d'invalidité versées aux personnels des armées de terre et de l'air ainsi que de la gendarmerie soient alignées sur celles accordées aux personnels de la marine. Les associations de retraités militaires proposent aussi un assouplissement des règles d'attribution des pensions militaires d'invalidité et une meilleure prise en compte des maladies professionnelles des militaires, à l'image de ce qui s'est produit avec les maladies liées à l'amiante.

Le soutien social des retraités est également au c_ur des préoccupations. C'est pourquoi il est demandé que les retraités puissent siéger aux comités sociaux en ayant une voix délibérative.

En accompagnement de la professionnalisation, il s'avère souhaitable de prendre en compte les bénéfices de campagne dans le calcul des pensions vieillesse des anciens militaires, d'attribuer une pension de retraite aux engagés blessés et réformés avant d'avoir atteint cinq années de service et de modifier la loi n° 96-1111 de professionnalisation des armées afin de supprimer l'effet couperet de la fixation à soixante ans de l'âge à partir duquel une pension militaire peut être assimilée à un avantage vieillesse. De même, il est nécessaire que l'Etat intervienne auprès des partenaires sociaux pour obtenir des associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (ASSEDIC) la réparation du préjudice causé à d'anciens militaires entre 1992 et 1997.

Enfin, il conviendrait de mieux définir les règles d'imputabilité au service d'accidents survenus en opérations extérieures, en permission ou à l'occasion d'escales.

Le président Guy Teissier a fait observer que certaines de ces revendications étaient prises en compte dans le projet de loi portant réforme des retraites et que d'autres seraient certainement abordées dans la réflexion sur la modernisation du statut général des militaires.

M. André Arrouet, président national de l'union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a observé que le projet de loi portant réforme des retraites préserve l'essentiel du régime des militaires. Il a rappelé que les associations des retraités militaires ont toujours soutenu que le maintien intégral de la pension à jouissance immédiate constituait une des garanties fondamentales liées à la condition militaire. Cependant, certains principes n'apparaissent pas suffisamment pris en compte.

Ce sont les militaires des grades les moins élevés qui sont pénalisés : un caporal chef quittant les armées après quinze ans de service perçoit, en 2003, une pension normale de 583 euros mensuels, portée au minimum garanti de 680 euros. Ce dernier, bien que récemment aménagé, n'intègre pas certaines bonifications, telle celle dite du cinquième du temps de service. Les associations de retraités militaires souhaitent une intervention de la représentation nationale pour remédier à cette carence.

M. Pierre Ingouf, président de la confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrières (CNRM), s'est réjoui que le projet de loi portant réforme des retraites préserve les principales dispositions du régime militaire de retraite. Le souci des associations militaires porte sur une répartition aussi équitable que possible de l'effort entre les différentes catégories de citoyens et à l'intérieur même des armées.

Plusieurs des mesures actuellement envisagées, en se cumulant, pénalisent gravement les plus modestes des militaires. Ainsi, il faudra accomplir deux années et demie de service supplémentaires pour bénéficier d'une pension à jouissance immédiate sans décote. L'effort demandé aux militaires statutairement soumis à des limites d'âge et des services imposés n'est pas proportionnel à celui des autres agents de l'Etat. Il porte, pour eux, sur quinze ou vingt-cinq ans alors que, pour les autres fonctionnaires, il portera sur quarante ans.

De même, à partir de 2008, seules les bonifications spécifiques liées aux campagnes et aux services aériens ou sous-marins seront prises en compte pour le calcul du minimum garanti.

Enfin, l'indice servant de base pour le nouveau calcul du minimum garanti ne sera atteint qu'en 2013, alors que le mode de calcul changera dès 2004, ce qui pénalisera les militaires les plus modestes quittant le service d'ici à 2013.

Les associations de retraités militaires expriment deux souhaits au sujet du minimum garanti : que son mode de calcul actuel soit maintenu et que les pensions servies soient indexées sur le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Elles suggèrent également deux autres mesures. En premier lieu, les dispositions du projet de loi portant réforme des retraites, qui ouvrent aux membres des corps enseignants la possibilité de poursuivre leur carrière dans la fonction publique, les collectivités locales et les établissements public à caractère administratif jusqu'à l'obtention des droits correspondant à la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein, devraient être étendues aux militaires qui n'auront pas atteint le nombre d'annuités nécessaires à la liquidation d'une pension à taux plein, ni bénéficié du dispositif régissant le cumul. En second lieu, les associations membres du conseil permanent des retraités militaires (CPRM), parfaitement représentatives des 500 000 retraités militaires et ayants cause, devraient être présentes au sein du conseil d'orientation des retraites (COR), qui va se voir confier un rôle accru puisqu'il aura pour mission de décrire les évolutions et les perspectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite.

M. Pierre Verdier, président de la fédération nationale des retraités de la gendarmerie (FNRG), a demandé que les retraités militaires siègent également au comité de la fonction militaire de leur armée d'origine, puisque les sujets et les textes mis à l'étude au programme du conseil supérieur de la fonction militaire y sont étudiés préalablement. Il serait également souhaitable d'autoriser l'adhésion des militaires en activité aux associations de retraités. Dans la mesure où ces dernières sont considérées comme des groupements professionnels, cette adhésion n'est actuellement pas possible. Pourtant, les militaires en activité peuvent adhérer à des fédérations de parents d'élèves, lesquelles présentent souvent un caractère politique.

M. Guy Rebeyrol, trésorier général de l'association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'armée française (ANFASOCAF), a accueilli avec satisfaction la mise en chantier par le Gouvernement de la réforme du statut général des militaires, lequel n'a été que très peu modifié depuis 1972, alors que la société et les armées ont considérablement évolué. Le Président de la République a souhaité qu'une réflexion sur l'adaptation du statut général des militaires soit engagée, dans le respect des principes fondamentaux de neutralité et de disponibilité. Un rapport d'étape sera établi à l'été 2003 et sera soumis à l'arbitrage du Président de la République. Il est à craindre que cette réforme soit réduite a minima et il convient que la détermination des parlementaires lors de la discussion du projet permette de déboucher sur un texte législatif en harmonie avec son temps. L'ANFASOCAF souhaite la mise en place d'une association corporative permettant l'amélioration de l'expression des attentes des militaires, la cohérence et le réalisme des revendications ainsi qu'un renforcement de la cohésion. En ce qui concerne la réforme des retraites, les militaires peuvent redouter qu'une transposition mécanique des dispositions qui seront prises pour l'ensemble de la fonction publique les pénalise en raison de la brièveté des carrières liée aux limites d'âge spécifiques. Le droit à une carrière complémentaire dans le secteur public ou privé devra être maintenu. Enfin, l'ANFASOCAF proteste énergiquement contre l'article du projet de loi sur les retraites traitant des bonifications d'annuité pour enfant, qui tend à mettre en conformité le droit français avec des décisions de la Cour de justice des Communautés européennes.

Le président Guy Teissier a rappelé que le conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG) traitait des problèmes des gendarmes en activité et non de ceux des retraités, et qu'il est donc normal d'y refuser la participation des associations de retraités. La question des retraites relève du ministère de la défense, qui tient compte à son sujet des revendications des associations. L'adhésion des militaires en activité aux organisations de retraités transformerait celles-ci en représentations syndicales de fait, ce qui n'est pas acceptable au regard du statut général des militaires. La référence aux associations de parents d'élèves n'est pas pertinente, car les militaires en activité qui y adhèrent n'en sont pas membres du fait de leur statut.

M. Maurice Côme, président national de l'union nationale du personnel en retraite de la gendarmerie (UNPRG), a fait savoir qu'il remettrait par écrit au président de la commission les questions que son association souhaitait soulever.

M. Henri Lacaille, président de l'union nationale de coordination des associations militaires (UNCAM), a suggéré que la proposition de loi n° 349 de M. Charles Cova visant à préserver les droits aux allocations de chômage des militaires retraités soit intégrée par voie d'amendement au projet de loi sur les retraites en cours d'examen par le Parlement.

M. André Arrouet, président national de l'union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a approuvé l'alignement du système des pensions de réversion des veuves du régime général sur le régime de la fonction publique, plus favorable, car non soumis à condition d'âge. Une inégalité persiste cependant : le taux de pension de réversion du régime de la fonction publique est égal à 50 % du montant de la pension de l'ayant-droit, alors qu'il est de 54 % en ce qui concerne le régime général. Dans un objectif d'équité, il est souhaitable que l'alignement se fasse également dans le sens le plus favorable. Il convient par ailleurs de réviser à la hausse le minimum vieillesse et de supprimer du patrimoine successoral les sommes perçues au titre de l'allocation vieillesse.

M. Bernard Lefevre, président du syndicat national des anciens médecins des armées (SAMA), a souligné que les médecins militaires quittent en général les armées avec une retraite militaire très partielle. Si des réformes semblent indispensables, l'allongement du temps de service, les pénalités prévisibles pour les carrières courtes, les réformes indiciaires auront très rapidement des conséquences importantes sur le maintien du niveau de vie des retraités. Les motifs de solidarité nationale invoqués risquent de mener à l'instauration de régimes de capitalisation dont on sait qu'ils pèsent plus fortement sur les moins favorisés que sur les plus nantis. Les militaires, qui comprennent ces motifs de solidarité, mais qui ne figurent pas parmi les plus favorisés, risquent de pâtir assez lourdement de ces réformes, alors que d'autres formules sont sans doute possibles.

L'allongement de deux ans et demi du temps de service, dont on ne connaît pas réellement l'intérêt pour le service, compliquera une réinsertion déjà très difficile dans le monde médical civil et sera très pénalisant pour la constitution indispensable d'une deuxième retraite. Certains spécialistes (chirurgiens, anesthésistes, urgentistes...) devront exercer jusqu'à un âge avancé, pouvant aller jusqu'à 70 ans, voire plus.

Un autre souci des médecins militaires retraités concerne l'augmentation considérable des primes d'assurance de responsabilité professionnelle, qui peuvent être doublées ou triplées sans aucune justification satisfaisante.

Enfin, il faut que la réforme du statut des militaires permette de donner à ceux-ci les mêmes droits qu'à la plupart des autres soldats européens. L'article 10 de ce statut doit être révisé et mis en accord avec le droit constitutionnel français, les droits de l'homme et le projet de Constitution européenne. L'introduction du syndicalisme dans les armées ne semble pas acceptable aujourd'hui. Pourtant, les rapports cordiaux entre le SAMA et les responsables militaires montrent bien qu'un syndicalisme professionnel peut responsabiliser les différents acteurs dans un esprit de service plutôt que de pouvoir ou de contrepouvoir.

Le président Guy Teissier s'est élevé contre l'introduction de syndicats dans les armées. Le métier des armes comporte une spécificité irréductible, celle du risque de sa vie, ce qui le rend incompatible avec le développement d'une vie syndicale. Si certains pays voisins ou amis ont permis l'introduction du syndicalisme dans les armées, cette mesure doit être mise en parallèle avec les capacités opérationnelles effectives de ces armées.

Le statut général des militaires prévoit des limites d'âge incompatibles avec le maintien en exercice de médecins ou de chirurgiens trop âgés. Les possibilités de rachat d'années d'études permettent de remédier aux inconvénients des carrières commencées tardivement ; en tout état de cause, les médecins militaires sont considérés comme militaires dès leur première année d'études. Enfin, l'allongement de deux ans et demi de la période d'activité nécessaire pour une retraite à taux plein demandera un effort limité. Il est légitime que la communauté militaire participe à l'effort commun ; elle a d'ailleurs accepté cette mesure de façon favorable, les militaires les moins gradés étant même partisans de carrières plus longues.

M. Alain Bonavita, président de l'association nationale des officiers de carrière en retraite (ANOCR), a attiré l'attention sur l'indexation des retraites sur les prix. Celle-ci écartera les retraités de l'enrichissement de la Nation. Elle présente un risque de diminution des revenus des retraités supérieure à celle de ces dernières années. Si, pour les actifs, cette mesure présente un caractère d'incitation à la souscription d'un régime de retraite complémentaire, cette démarche ne sera pas possible pour les personnels déjà retraités qui se trouveront ainsi pénalisés.

Le statut des veuves devrait également évoluer. Beaucoup d'entre elles, ayant sacrifié leur vie professionnelle au maintien de la cohésion familiale, n'ont pas d'autre droit à retraite que celui d'une pension de réversion. Il serait souhaitable que le taux de celle-ci soit porté à 55 %. Cette mesure paraît d'autant plus justifiée qu'il semble que soit envisagé un alignement des conditions d'ouverture du droit à pension de réversion des régimes privés sur les régimes publics, alors que les taux de pension de réversion du privé sont plus favorables.

Enfin, des inquiétudes subsistent sur la réalisation financière des mesures envisagées. Une réduction des crédits alloués aux armées entraînerait sans doute un désarroi profond et une désaffection pour les forces armées qui serait regrettable et qui semble déjà se manifester dans la diminution du nombre des engagés.

Le président Guy Teissier a répondu qu'il n'y avait pas eu de gel de crédits. En outre, lors de ses déplacements dans les unités, on lui a exposé que la qualité des engagés était suffisante. Certains régiments peuvent ainsi se permettent de réformer jusqu'à 20 % de leurs soldats après six mois de services, sans éprouver de difficultés pour compléter leurs effectifs.

Certains des membres de la commission de la défense ont déposé sur le projet de loi relatif aux retraites plusieurs amendements allant dans le sens des préoccupations des associations des retraités. Ces amendements portent notamment sur les bonifications dont pourront bénéficier les militaires pour services à la mer et outre-mer, sur le prolongement de la dégressivité de la bonification du cinquième de 60 à 62 ans, sur l'aménagement de dispositifs de décote pour éviter que les officiers entrés au service au-delà de vingt-deux ans et demi ne soient soumis à une double décote, sur le maintien de la pension de retraite à quinze ans de service pour les officiers féminins mères de trois enfants ou d'un enfant invalide à 80 % et sur l'octroi de la pension de réversion à 100 % pour le conjoint d'un militaire de la gendarmerie décédé en service. D'autres amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution, notamment la revalorisation de la pension de lieutenants admis à la retraite avant le 1er janvier 1976 et la possibilité pour les militaires de bénéficier de la surcote, mais ces thèmes pourront être évoqués lors de l'examen des articles correspondants.

M. Yves Fromion a fait part de difficultés qui lui avaient été signalées, s'agissant du cumul entre la pension militaire et civile pour les officiers quittant le service dans les conditions prévues par l'article 70-2 du statut général des militaires.

Le président Guy Teissier a répondu que la commission serait vigilante sur ce point.

Observant que les représentants des associations de retraités militaires désiraient s'exprimer sur des sujets plus larges que les retraites, M. Jean-Michel Boucheron a souhaité qu'ils soient consultés sur un problème sur lequel il a déclaré avoir du mal à forger son opinion, à savoir la représentation et l'expression des personnels militaires d'active. Sous une forme ou une autre, par exemple par le biais d'un rapport d'information, la commission devrait entendre les points de vue et évaluer les expériences étrangères en la matière.

Le président Guy Teissier a souligné qu'il était opposé à la représentation syndicale des personnels militaires d'active. Il a proposé que la commission auditionne de nouveau les représentants des associations de retraités militaires lors de ses travaux sur le projet de loi qui portera révision du statut général des militaires.

M. Michel Voisin a estimé que le problème de la représentation des militaires reste pendant. Si l'ensemble des membres de la commission reste opposé à l'introduction du syndicalisme dans les armées, il demeure nécessaire de réfléchir aux moyens de renforcer le lien entre les armées et la Nation, sous peine de le voir se distendre.

Le président Guy Teissier a fait valoir un avis différent, en observant que lors des journées défense-Nation, qui se sont déroulées du 8 au 10 mai 2003, une véritable sympathie des populations civiles s'est manifestée à l'égard des armées, qui avaient déployé pour l'occasion des moyens importants, notamment à Marseille où un débarquement a été simulé sur les plages. L'adhésion de la Nation vis-à-vis de ses armées semble plus forte depuis la professionnalisation. Il faut s'en réjouir, car une telle communion ne s'était pas ressentie depuis bien longtemps.

M. Michel Voisin a estimé que l'adhésion des populations à l'égard des armées était plus forte dans les grands centres urbains que dans les zones rurales, où les forces disposent de moins de moyens pour se mettre en valeur.

M. Gilbert Le Bris a observé la grande complexité des questions touchant aux statuts et à la fonction militaires. En présentant un corps commun de revendications, les associations de retraités militaires ont accompli une avancée pédagogique concrète, mais insuffisante, puisque les revendications sectorielles ont également été longuement détaillées. La compréhension globale des problèmes reste assez difficile pour ceux qui ne sont pas suffisamment spécialistes de ces questions et il serait bon que les associations de retraités militaires hiérarchisent davantage leurs revendications et les présentent de manière plus simple, ce qui permettrait de sensibiliser davantage l'ensemble des parlementaires aux problèmes auxquels elles s'intéressent.

Le président Guy Teissier a souligné que les associations représentées avaient formulé au début de la réunion des demandes concrètes et communes, sous une forme synthétique et hiérarchisée.

M. Michel Voisin a estimé que le discours qui avait été tenu devant la commission était le même que celui que les parlementaires entendent lors des assemblées générales locales des différentes associations de retraités militaires. La représentation nationale dans son ensemble est donc sensibilisée aux problèmes qui touchent les retraités militaires.

III. -  AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES SYNDICATS DES PERSONNELS CIVILS DE LA DÉFENSE

La commission a entendu des représentants des syndicats des personnels civils de la défense au cours de sa réunion du mercredi 22 octobre 2003.

M. Charles Sistach, secrétaire général de la fédération syndicaliste FO de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés, a déclaré que le projet de budget 2004 se situait dans la continuité des budgets précédents et a regretté qu'il ignore l'amélioration de la condition des personnels civils du ministère de la défense.

En 2004, les effectifs civils diminueront de 852 postes, soit près de 1 %, alors qu'ils ont déjà été réduits de plus de moitié durant les dix dernières années. Aucune mesure de recrutement d'ouvriers de l'Etat n'a été décidée, le retour des personnels de Giat Industries et de DCN ne pouvant être considéré comme des embauches. Cette volonté politique de réduction permanente d'effectifs pose le problème de la réalisation des missions du ministère. Cette situation, sciemment provoquée, sert de prétexte à l'externalisation, sous couvert de recentrer les personnels sur le c_ur de leur métier. Or, il n'est pas évident que l'externalisation aboutisse effectivement à des économies.

L'amélioration de la condition des personnels civils constituera la portion congrue du budget 2004 : seules 223 mesures d'avancement sont prévues pour les ouvriers d'Etat, sur un effectif global de 46 000 personnes, et rien n'est prévu pour les personnels issus d'établissements restructurés ni pour les personnels fonctionnaires. Les crédits de formation sont essentiellement affectés aux personnels dont les emplois sont restructurés et ne participent aucunement à l'amélioration de la technicité de l'ensemble des agents.

Si les personnels militaires, notamment les réservistes, retirent quelques avantages de ce budget en trompe-l'_il, les personnels civils du ministère de la défense sont superbement ignorés. L'externalisation négociée avec le MEDEF, la déconcentration, la rémunération au mérite déstructurent le ministère de la défense, qui ne peut dès lors plus être considéré comme le ministère de la défense « nationale ».

M. Didier Duret, secrétaire général adjoint de la fédération nationale des travailleurs de l'Etat - CGT, a déclaré que la politique ultralibérale menée par l'actuel gouvernement en matière de défense suscitait un rejet profond parmi les agents du ministère ainsi que parmi les personnels des sociétés nationales sous sa tutelle. Les choix opérés tournent le dos à une véritable politique de défense nationale. Le projet de loi de finances 2004 en est la démonstration.

Avec le projet baptisé « Giat 2006 », c'est à un véritable crime d'Etat que veulent se livrer le Président de la République, la ministre de la défense et le président directeur-général de Giat Industries. C'est l'un des fleurons de l'industrie nationale mécanique de haute technologie qui est menacé, à terme, de disparition. Les propositions industrielles et sociales alternatives formulées par les organisations syndicales dans le cadre de l'accord de méthode ont été prises en compte par de nombreux élus, mais n'ont reçu aucun écho de la part de la direction du groupe. Cependant, le plan de M. Vigneron, qualifié d'exemplaire par la ministre, vient d'être suspendu par une décision du tribunal de grande instance de Versailles. Les propositions de reclassement des salariés de Giat, que ce soit au sein du ministère de la défense ou dans l'ensemble des fonctions publiques, ne sont pas crédibles. Face à ce blocage, la seule solution serait d'organiser une table ronde impliquant l'ensemble des parties concernées, mais la ministre n'a pas donné de réponse positive à cette proposition syndicale.

Quatre mois après le changement de son statut, DCN est déjà agitée par des perspectives d'alliances sans projet industriel, alors que les capacités de l'entreprise continuent de se réduire par manque d'investissements dans l'outil de production, du fait aussi d'une organisation du travail essentiellement fondée sur l'accélération de l'externalisation des activités.

Le projet de loi de finances pour 2004 accélère la destruction des capacités industrielles des établissements et réduit les moyens humains, ce qui risque de compromettre les livraisons et commandes des matériels dès 2004. L'aspect social est quasiment absent de ce projet de budget, puisque le ministère ne lui consacrera que 0,38 euro par jour et par agent civil. Dans le même temps, avec une hausse de 27 millions d'euros par rapport à 2003, ce projet fait la part belle au financement de l'armée de métier, consacrant en particulier d'énormes efforts financiers au renforcement de l'arme nucléaire et à sa modernisation, au détriment des commandes d'équipements conventionnels dont ont besoin nos forces armées, de l'amélioration de la condition sociale des salariés de la défense et, au-delà, d'autres secteurs, comme la santé publique ou l'éducation.

M. Jacques Lepinard, secrétaire général de la fédération établissements et arsenaux de l'État - CFDT, s'est félicité que, dans un contexte économique difficile, le projet de budget pour 2004 fasse de la défense une priorité gouvernementale. La progression des crédits du titre V était indispensable pour rétablir le niveau de disponibilité des matériels. Toutefois, l'exécution du budget pour 2004 ne doit pas reproduire les dysfonctionnements affectant actuellement certains services et le principe de « neutralité fiscale » du changement de statut de DCN doit être pleinement respecté. Par ailleurs, il apparaît nécessaire que les crédits d'équipement consacrés aux armements terrestres, plus particulièrement ceux susceptibles de concerner Giat Industries, permettent de limiter les conséquences du plan social de l'entreprise ; la suspension de l'application de ce plan par le tribunal de Versailles est positive, le temps ainsi dégagé devant permettre d'améliorer le traitement social.

La volonté d'externaliser la gestion du patrimoine immobilier de la défense et des parcs automobiles suscite la plus grande inquiétude parmi les personnels civils. Il est souhaitable que des études d'impact soient conduites avant toute prise de décision.

Enfin, M. Jacques Lepinard a salué les efforts prévus en 2004 au profit des personnels civils pour l'amélioration de leur condition. Cependant, les mesures proposées, à hauteur de 13,5 millions d'euros, se conjuguent à la poursuite de la déflation des effectifs et à l'absence persistante de perspectives pour certains personnels. L'effort effectué en direction de la composante militaire ne doit pas conduire à oublier la composante civile.

Mme Marie-Christine Ledieu, secrétaire générale adjointe de l'union nationale des syndicats autonomes, a exprimé sa satisfaction sur le respect par l'Etat de ses engagements de 2003 et sur la hausse des crédits d'équipement proposée dans le projet de budget pour 2004, qui devrait permettre de préserver les carnets de commandes et les emplois des industries de défense.

Cependant, la situation économique peu favorable ainsi que le contexte budgétaire contraint font peser le risque d'une inflexion à la baisse des dépenses militaires de la France et pourraient conduire à ne pas respecter les annuités fixées par la loi de programmation militaire. Il convient de s'interroger sur l'avenir de Giat Industries, dont le plan social vient de faire l'objet d'une décision de justice allant dans le sens des propositions syndicales.

S'agissant de la gestion des ressources humaines, elle a déploré la part très faible des mesures nouvelles réservées au personnel civil, en dépit de certaines avancées. Les conséquences des restructurations projetées par la stratégie ministérielle de réforme risquent d'affecter en priorité les personnels civils, dont les effectifs vont diminuer de 1 %, alors même que la professionnalisation exigerait une augmentation.

M. Denis Lefebvre, président de la fédération CFTC des personnels civils du ministère de la défense, a souligné la pertinence de la hausse du budget du ministère de la défense de 4,3 % dans le contexte international actuel, ainsi que l'intérêt d'exclure les dépenses militaires du pacte de stabilité. Le surcoût lié aux opérations extérieures ne doit pas non plus peser sur le budget du ministère. La CFTC regrette cependant la stagnation des dépenses de fonctionnement et la diminution de 852 postes affectant les personnels civils, notamment les ouvriers d'Etat. 344 de ces emplois doivent être supprimés en région Sud-Ouest, alors que des reclassements devront être trouvés pour les personnels des établissements de DCN à Ruelle et de Giat Industries à Tarbes, Toulouse et Tulle. L'effort réalisé en vue d'améliorer les régimes indemnitaires des fonctionnaires du ministère de la défense répond à une nécessité, car ces personnels ont été largement touchés par des restructurations successives ces dernières années. La CFTC attache une importance particulière à la revalorisation des indemnités des adjoints administratifs et des personnels techniques de catégorie C, ainsi qu'à la fluidité de l'avancement.

S'agissant de Giat Industries, après une première décision de justice encourageante en référé, la CFTC demande une révision totale du projet Giat 2006, tant dans son volet industriel que dans son volet social. DCN, désormais dotée d'un nouveau statut de société de droit privé, devra pour sa part bénéficier d'un plan de charge conséquent. Enfin, la mutualisation des ressources, déjà mise en place pour le soutien de la délégation générale pour l'armement (DGA), laisse présager un recours excessif à l'externalisation qui constitue, avec la mise en _uvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), un des grands thèmes de la modernisation du ministère. La plus grande vigilance s'impose en la matière.

Tout en reconnaissant la conformité du projet de budget aux orientations de la loi de programmation militaire, M. Gérard Aubert, président de la fédération de l'encadrement civil de la défense - CGC, a insisté sur les difficultés affectant le secteur industriel du ministère. À l'instar de ce qui s'est passé pour l'armée de terre avec Giat en 1990, la marine ne peut plus s'appuyer sur le soutien de la direction des constructions navales, depuis sa transformation en société nationale de droit privé le 1er juin dernier. DCN devra être capitalisée en trois ans à hauteur de 350 millions d'euros, au détriment des crédits d'investissement de la DGA, et la marine devra acquitter la TVA. De plus, les cadres n'ont plus confiance dans la nouvelle société et souhaitent massivement réintégrer les services de l'Etat. Les deux composantes industrielles subsistant à la DGA rencontrent aussi des difficultés. À la suite de l'interdiction de recruter opposée à la SIMMAD, le service de la maintenance aéronautique a dû faire face à de graves retards de paiement, assortis d'intérêts moratoires, qui perturbent l'approvisionnement et menacent l'activité des trois ateliers industriels de l'aéronautique. Les crédits d'investissement de la direction des centres d'expertise et d'essais sont par ailleurs réduits de 30 % en 2004, cette baisse des moyens s'ajoutant au vieillissement des personnels. D'une façon générale, le syndicat défense-CGC craint que la politique d'armement évolue vers une mise en concurrence accrue et vers le recours aux achats sur étagères, dictés par un souci de rentabilité immédiate, aux dépens d'une industrie nationale de pointe.

Des économies peuvent néanmoins être réalisées sur les frais de fonctionnement du ministère, les efforts engagés jusqu'ici s'étant cantonnés aux personnels civils ou aux hommes du rang. Le personnel civil coûtant moins cher que le personnel militaire à l'Etat, il serait judicieux d'employer exclusivement des civils sur des postes non projetables. De plus, les primes d'embarquement ou de vol ne devraient pas être attribuées à des militaires occupant un poste administratif en métropole et ne partant jamais en opérations extérieures. Les distorsions de traitement existant entre personnels civils et militaires, y compris sur des postes identiques, ne sont pas toujours justifiées. Une rationalisation des emplois entre personnels civils et militaires s'impose donc. Elle permettrait ainsi de réduire le titre III et de laisser des marges de man_uvre pour le titre V.

Le président Guy Teissier a souligné l'importance de l'augmentation du budget de la défense et précisé que les crédits prévus pour 2003 seront consommés en totalité, ce qui n'était pas arrivé depuis très longtemps. La mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense a ainsi pu constater que 97 % des crédits du titre III avaient été consommés au 30 septembre. Pour la deuxième année consécutive, l'annuité prévue par la loi de finances initiale sera exactement conforme à la loi de programmation militaire.

L'externalisation de certaines activités va de pair avec l'existence d'une armée moderne et professionnelle. Le président Guy Teissier a précisé qu'à titre personnel il n'était pas favorable à une externalisation trop poussée et empiétant sur le c_ur du métier militaire. L'exemple de l'armée britannique, qui tente actuellement de revenir sur le processus d'externalisation du service de santé, doit être médité.

En ce qui concerne les crédits destinés à l'acquisition de matériels, les prévisions de la loi de programmation militaire ainsi que les livraisons prévues en 2004 montrent que l'effort est soutenu. Les crédits d'investissement des titres V et VI progressent de 9 % en 2004.

Il est nécessaire que le changement de régime de TVA pour DCN soit neutre pour le budget de la marine, les crédits nécessaires devant être ouverts dans le collectif de fin d'année 2003. Le plan de charge de DCN reste convenable et sera consolidé à terme par le programme Barracuda. La commande du deuxième porte-avions est prévue pour 2006, la décision sur le mode de propulsion de ce bâtiment devant être prise prochainement.

Il conviendrait de traiter différemment les dépenses militaires dans le cadre du pacte de stabilité, afin de tenir compte de l'effort consenti pour la sécurité de tous les Européens par certains Etats, dont au premier chef la France.

La SIMMAD s'est révélée être un outil précieux qui a permis d'améliorer sensiblement la disponibilité des matériels de l'armée de l'air. Si des retards de paiement ont pu être constatés, ils ont été comblés depuis lors. En 2003, les armées n'ont pas constitué une variable d'ajustement du budget. Les effectifs d'officiers supérieurs sont parfois considérés comme élevés, mais il convient de souligner avec quelle efficacité la réduction du format des armées et le passage à la professionnalisation ont été conduits, notamment au regard des difficultés que connaissent certains pays voisins. La possibilité pour les militaires de cumuler leur retraite avec un emploi civil apparaît nécessaire. S'agissant des officiers généraux, leurs compétences peuvent être mises à profit par les industries de défense et ils peuvent servir de lien entre les armées et le monde civil.

M. Jean-Claude Viollet a rappelé que la commission de la défense lui avait confié, ainsi qu'à M. Georges Siffredi, une mission d'information sur le suivi des mesures sociales d'accompagnement relatives à Giat. Il convient d'étudier avec attention les propositions formulées par les syndicats dans le cadre de l'accord de méthode ainsi que le traitement qui leur a été réservé par la direction, de prendre en considération la complexité des statuts des personnels et de ne pas oublier le sort des sous-traitants, tout en ayant conscience des limites des possibilités de reclassement dans les fonctions publiques ainsi que de celles offertes par les emplois créés en vue de revitaliser les bassins concernés par la réforme de Giat Industries. Enfin, la question des alliances dans le cadre européen est posée.

Rappelant qu'il avait publié, en 2002, un rapport sur l'externalisation, M. Michel Dasseux a constaté avec satisfaction que les organisations syndicales étaient sensibles aux problèmes soulevés par ce sujet et que même les députés les plus libéraux étaient conscients des difficultés. L'externalisation ne doit pas conduire la puissance publique à déléguer ses fonctions régaliennes et l'expérience britannique montre qu'il est très difficile de revenir en arrière.

M. Jean-Claude Sandrier a souligné que deux événements nouveaux étaient intervenus s'agissant de Giat : le rapport des cabinets mandatés par les syndicats, concluant à la possibilité de mettre en _uvre un plan alternatif, et le désaveu infligé à la direction par le tribunal de grande instance de Versailles. Le choix de s'adresser au Président de la République, chef des armées, est fondé puisqu'il s'agit d'une question humaine et industrielle, mais également stratégique. Il convient de soutenir l'initiative d'une table ronde réunissant tous les acteurs concernés afin de définir une solution industrielle et stratégique, cette dernière étant indispensable pour assurer l'indépendance nationale en matière de défense.

M. Charles Sistach a souligné que ses inquiétudes portaient sur le recours à l'externalisation lorsqu'il s'agit d'activités du c_ur du métier de la défense. En la matière, le respect du dialogue social et des intervenants doit être réel. Il est à craindre que ce processus corresponde davantage au souhait de dégager des marges de man_uvre plutôt qu'à celui d'améliorer les capacités militaires.

Le président Guy Teissier a indiqué qu'il n'était pas persuadé que les marges éventuellement dégagées bénéficient au ministère de la défense.

M. Jérôme Rivière s'est déclaré choqué de l'exacerbation par certains syndicats des différences entre les personnels civils et militaires. Les officiers ont mené à bien les restructurations des armées et la professionnalisation. Compte tenu de la forte amélioration des crédits de la défense en 2003 et 2004, on peut s'interroger sur l'attitude de ces organisations syndicales lorsque ce même budget diminuait lors de la précédente législature.

IV. - EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Pierre Lang, les crédits du titre III et des personnels civils et militaires d'active et de réserve pour 2004, au cours de sa réunion du mercredi 29 octobre 2003.

Après l'exposé du rapporteur pour avis, M. Charles Cova a regretté que les 380 000 euros nécessaires pour régler le problème des retraites des lieutenants et de leurs ayants cause n'aient pu être inscrits dans le projet de loi de finances pour 2004, alors qu'il s'agit d'une question de justice sociale et d'équité, cette question concernant seulement 378 ayants droit et 1 178 ayants cause, la plupart très âgés.

M. Pierre Lang, rapporteur pour avis, a fait valoir que, s'il s'agit d'un souci largement partagé au sein de la commission, les dispositions de l'article 40 de la Constitution interdisent une initiative parlementaire sur cette question, dont le règlement ne pourrait résulter que d'une proposition d'origine gouvernementale.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du titre III et des personnels civils et militaires d'active et de réserve pour 2004.

*

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Au cours de sa réunion du mercredi 29 octobre 2003, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la défense pour 2004, les membres du groupe socialiste votant contre.

N° 1114 - tome VII - Avis de M. Pierre Lang au nom de la commission de la défense sur le budget des personnels civils et militaires d'active et de réserve du projet de loi de finances pour 2004


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