DÉLÉGATION
À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT
DURABLE DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 11

Mardi 28 janvier 2003
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Emile Blessig, président

SOMMAIRE

 

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-Echange de vues avec les députés et sénateurs des départements d'outre-mer sur le régime des fonds structurels dans les départements d'outre-mer

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M. Emile Blessig, président, a rappelé que le constat de la sous-consommation des fonds structurels était à l'origine des travaux en cours de la Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire. Néanmoins, la problématique de l'élargissement de l'Union européenne est très vite apparue, conduisant la Délégation à s'interroger sur leur pérennité en métropole et dans les départements d'outre-mer. Il est donc utile de procéder à un échange de vues avec les parlementaires d'outre-mer, qui, en sus de leur mandat national, sont tous des élus locaux.

M. Joël Beaugendre, rapporteur, a souligné que, depuis la conférence de Séville, les régions en retard de développement - parmi lesquelles figurent les départements d'outre-mer - avaient bénéficié d'un doublement des crédits européens. La consommation de ces crédits, de 1994 à 1999, n'est pas différente de celle constatée en métropole, avec un taux de 80 %, malgré la situation financière difficile des collectivités d'outre-mer. En revanche, la programmation budgétaire pluriannuelle couvrant les années 2000 à 2006 se traduit par de nombreux retards. Pour les départements d'outre-mer, les premières conventions n'ont été signées qu'à la fin de 2001, ce qui explique le très faible taux de consommation des fonds. Ce taux est inférieur à 15 % dans l'ensemble des départements d'outre-mer.

Au-delà de l'exécution des programmes actuels, se pose la question de l'avenir des fonds structurels après l'élargissement de l'Union européenne. En se fondant sur le critère du PIB, les départements d'outre-mer devraient demeurer éligibles à ces fonds, contrairement aux îles Canaries qui dépasseront désormais la moyenne de 75 % du PIB communautaire. Néanmoins une réelle inquiétude se fait jour parmi les élus.

Mme Juliana Rimane a confirmé que l'élargissement de l'Union européenne inquiétait les élus guyanais. Les crédits de l'objectif 1 risquent en effet de diminuer alors qu'ils revêtent une importance cruciale pour les investissements en outre-mer et qu'il n'est pas garanti que l'Etat puisse s'y substituer. Il est par ailleurs irritant de constater que les fonds sont inscrits dans les documents de programmation mais que divers obstacles administratifs, économiques et sociaux empêchent de les consommer.

M. Bertho Audifax a indiqué que l'émergence du concept de région ultrapériphérique avait permis une nette amélioration du régime des fonds structurels. La consommation de ces fonds est plus facile lorsqu'il n'y a qu'un seul intermédiaire pour gérer les dossiers. En revanche, de nombreux retards apparaissent dès lors que plusieurs collectivités sont compétentes pour gérer un dossier, dans la mesure où il y a pluralité de procédures et de documents. Ainsi en est-il à la Réunion pour l'endiguement des ravines. L'Etat ne dispose pas par ailleurs des compétences humaines nécessaires pour gérer les dossiers. Le maintien de l'octroi de mer constitue en outre une nécessité absolue dans la mesure où il abonde les ressources fiscales des communes à hauteur de 30 à 40 %.

M. Joël Beaugendre, rapporteur, a rappelé qu'une récente mission d'inspection de l'Etat en Martinique avait montré les nombreux blocages administratifs qui retardent le versement des fonds structurels. A l'appui des propos de M. Audifax, il apparaît difficile de coordonner les délibérations des communes ou des régions. Pourtant, les fonds communautaires ont indéniablement permis l'éclosion économique des départements d'outre-mer, notamment dans les secteurs du bâtiment, de l'irrigation agricole et du tourisme. Toutefois, l'agriculture des départements d'outre-mer est menacée par une éventuelle réforme de la politique agricole commune et rien ne permet d'affirmer que le taux de croissance économique de l'outre-mer perdurera. Le tissu économique reste extrêmement fragile.

M. Emile Blessig, président, s'est interrogé sur l'implication des élus locaux dans l'élaboration des documents de programmation. Il a ensuite souligné qu'il y avait une grande différence entre les apports financiers de l'Etat et les fonds communautaires. L'Etat obéit à un devoir de solidarité nationale et de péréquation. L'aide communautaire est d'ordre contractuel et s'assimile à une aide au développement. La pérennisation des fonds structurels se justifierait au nom de deux spécificités : la situation géographique des départements d'outre-mer, qui permet une ouverture de l'Union européenne au reste du monde, et la jeunesse de sa population, alors que le reste de l'Union européenne est en déclin démographique.

M. Joël Beaugendre, rapporteur, a rappelé que le traité d'Amsterdam avait permis la reconnaissance du caractère insulaire des départements d'outre-mer mais que certains handicaps, comme l'absence de continuité territoriale, méritaient d'être pris en compte.

Mme Juliana Rimane a souligné que de nombreuses communes de Guyane étaient en situation de sous-développement malgré la présence dans ce département de la base spatiale européenne de Kourou.

M. Bertho Audifax, en réponse au Président Blessig, a indiqué que les milieux politiques et professionnels avaient été étroitement associés à la préparation des documents de programmation à la Réunion. L'existence de subventions tant par l'Etat que par l'Union européenne oblige les élus réunionnais à faire preuve d'un plus grand sens des responsabilités. Néanmoins, les besoins des départements d'outre-mer devraient être envisagés, non seulement compte tenu de leur PIB, mais aussi en fonction de leur éloignement géographique, de leur dynamisme démographique et du coût du travail, plus élevé que dans les pays environnants. Il s'agit en fait d'un choix politique. L'Union européenne peut opter entre une mondialisation du développement social ou considérer que certaines régions se développeront tandis que d'autres s'effondreront.

M. Joël Beaugendre, rapporteur, a appelé à une pérennisation des fonds européens, seuls à même pour l'heure à combler l'instabilité économique des départements d'outre-mer. Les collectivités d'outre-mer ont largement marqué leur intérêt pour l'aide communautaire en apportant au sein des documents de programmation une part financière largement supérieure à celle de l'Etat.

M. Emile Blessig, président, s'est interrogé sur les liens entre les fonds structurels et les contrats de plan dans les départements d'outre-mer.

M. Joël Beaugendre, rapporteur, a indiqué qu'une certaine confusion régnait en la matière...

Mme Juliana Rimane a appelé à un financement intégral par les fonds communautaires de certaines actions de développement. Elle a jugé que de nombreuses communes guyanaises enclavées, situées le long d'un fleuve non navigable, ne disposaient d'aucune marge financière leur permettant d'apporter une contrepartie à un projet éligible aux fonds structurels.

M. Emile Blessig, président, a constaté que des disparités territoriales existaient à l'intérieur des départements d'outre-mer. Il a ensuite remercié les députés d'outre-mer d'avoir participé à cette réunion.


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