COMPTE RENDU N° 2

12/03/95

Mercredi 30 mars 2005
(Séance de 17 heures)

Présidence de M. Pascal Clément, président de droit

SOMMAIRE

 

Pages

- Examen du rapport de M. Patrice Gélard, sénateur, sur la saisine de la commission des Lois du Sénat relative au bilan des autorités administratives indépendantes


2

- Examen des modalités de réalisation de cette étude

5

L'Office a examiné, sur le rapport de M. Patrice Gélard, sénateur, les suites à donner à la saisine de la commission des Lois du Sénat relative aux autorités administratives indépendantes.

M. Pascal Clément, président de droit, après avoir rappelé que l'Office avait été saisi par la commission des Lois du Sénat d'une étude dressant le bilan des autorités administratives indépendantes (aai), alors qu'il avait lui-même évoqué cette éventualité au cours des débats sur la création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations, a indiqué qu'il incombait aujourd'hui à l'Office de se prononcer sur les suites à donner à cette saisine et, dans l'hypothèse de l'engagement d'une étude, sur le recours à des collaborations extérieures.

M. Patrice Gélard, sénateur, rapporteur, a tout d'abord rappelé que, aux termes de l'article 7 du règlement intérieur de l'Office, le rapporteur sur la saisine peut soit proposer de ne pas y donner suite, soit suggérer à l'auteur une nouvelle formulation, soit enfin proposer d'engager une étude pouvant conduire à l'établissement d'un rapport, cette étude pouvant être réalisée au sein de l'Office ou être confiée à des experts ou organismes extérieurs, dont les conclusions nourriraient la réflexion du rapporteur.

S'agissant des motifs de la saisine, le rapporteur a souligné qu'une vingtaine d'organismes sont aujourd'hui qualifiés par la loi ou la jurisprudence d'autorités administratives indépendantes, rassemblant des instances très diverses quant à leur domaine d'intervention, leurs pouvoirs, leur organisation et leurs moyens.

Pour sa part, dans son étude consacrée à ces autorités en 2001, le Conseil d'État a identifié quatre critères justifiant la création de telles instances : garantir l'impartialité des interventions publiques dans un domaine touchant aux droits et aux libertés ; assurer la participation de personnes d'origine et de compétences diverses ; permettre une action rapide et adaptée de l'État ; enfin, faciliter le recours à la médiation.

Leurs missions peuvent être regroupées en deux catégories distinctes : la régulation, notamment dans certains secteurs économiques, et la protection des libertés publiques. Certaines d'entre elles, à l'instar du Conseil de la concurrence, peuvent exercer un pouvoir de sanction considérable, y compris financier.

Dans la plupart des cas, ces autorités ont été créées en réponse à des difficultés ponctuelles, sans approche préconçue, sans cohérence d'ensemble, et sans vocation systématique à perdurer dans leur forme initiale. Cette hétérogénéité justifie aujourd'hui que le Parlement souhaite en dresser le bilan, proposer des améliorations et tracer éventuellement des perspectives d'évolution.

Sans viser à définir un modèle juridique trop uniforme, qui ne serait pas adapté aux différents cas d'espèce, il conviendrait en particulier d'identifier les difficultés que peut présenter leur articulation avec les juridictions et les administrations centrales, de s'interroger sur l'adéquation de leurs pouvoirs et de leurs moyens à leur mission, et d'évaluer globalement les garanties de leur indépendance. À cet égard, les incidences éventuelles de la loi organique relative aux lois de finances sur l'indépendance financière de ces autorités appelleront un examen approfondi, tant en ce qui concerne la pertinence de la place de ces autorités dans la nomenclature des missions et des programmes, que leur soumission aux principes de fongibilité des crédits, voire de régulation budgétaire par l'autorité même qu'elles sont chargées de contrôler. De même l'Office devrait-il rechercher les voies d'un équilibre entre la nécessaire indépendance de ces structures et le suivi parlementaire de leur activité et de leur gestion.

Au-delà de la notion d'autorité administrative indépendante, est apparue récemment la catégorie des autorités publiques indépendantes. Celles-ci sont dotées d'une indépendance institutionnelle et financière encore supérieure, puisqu'elles disposent de la personnalité morale, à l'instar de l'Autorité des marchés financiers et de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance, celle-ci bénéficiant même de ressources financières propres.

Le bilan proposé permettrait de mesurer les conséquences de ces évolutions, de suggérer le regroupement de certaines autorités aux missions analogues, ou d'établir un ensemble de préconisations applicables, le cas échéant, à la création de nouvelles instances.

En conclusion, le rapporteur a proposé d'engager deux études complémentaires, la première dressant un bilan complet des autorités administratives indépendantes, la seconde prenant la forme d'une étude de droit comparé. Il a également proposé à l'Office de se prononcer sur le cahier des charges du marché dont ces deux études constituent chacune un lot.

Le président Pascal Clément a souligné que les choix opérés par le Gouvernement dans le classement des autorités administratives indépendantes dans la nouvelle nomenclature budgétaire pourraient donner lieu à discussion. Il s'est également étonné de la possibilité de réduire les crédits de ces dernières en cours d'année, avant d'observer que ces autorités se caractérisaient surtout par leurs différences, certaines étant dotées de pouvoirs considérables, et d'autres de moyens fort réduits. Soulignant l'importance de l'étude envisagée, il a souhaité connaître les raisons qui militaient selon le rapporteur pour confier l'étude envisagée à des intervenants externes, et non à l'Office lui-même.

Le rapporteur a souligné l'ampleur des investigations à entreprendre et l'intérêt du recours à une expertise extérieure, notamment universitaire.

Le président Pascal Clément a suggéré que, s'il était indispensable de financer une étude externe, il ne fallait pas s'interdire de recourir aux services d'un cabinet de conseil ou d'audit, dans la limite des crédits disponibles à cet effet, et a évoqué la possibilité de s'appuyer sur le travail remarquable que la Cour des comptes, insuffisamment entendue par le Gouvernement, était également susceptible de produire. Il a relevé que, pour intéressante que puisse s'avérer une démarche de droit comparé, celle-ci ne devait pas faire perdre de vue l'essentiel, c'est-à-dire la pertinence du recours à la formule des autorités administratives indépendantes en France.

Le rapporteur, soulignant la pratique insuffisante du droit comparé en France, a estimé que l'observation des expériences menées dans des pays voisins permettrait d'éviter de commettre bien des erreurs. S'agissant des aai, qui existent partout en Europe et sont confrontées à des problèmes comparables, une étude de droit comparé paraît donc particulièrement opportune.

Quant aux organismes susceptibles de répondre à l'appel d'offre, il est à craindre que les cabinets de conseil demandent des honoraires trop élevés par rapport aux ressources de l'opel, contrairement aux laboratoires universitaires.

M. Jean-Jacques Hyest, premier vice-président de droit, a précisé que l'Office devait d'abord s'interroger sur la question du recours ou non à une collaboration extérieure, sachant que la conduite des travaux restera de la responsabilité du rapporteur. À cet égard, il a rappelé sa propre expérience de rapporteur de l'opel sur les entreprises en difficulté : une étude avait alors été demandée à trois personnalités dont les conclusions fondées sur des expériences variées ont contribué utilement à sa propre réflexion. Quant aux cabinets de conseil, la pratique montre que la fiabilité de leurs analyses n'est pas toujours assurée.

En tout état de cause, si la décision de faire appel à un organisme extérieur est prise, il faudra ensuite arrêter un cahier des charges, sur la base duquel des candidats se déclareront. Il n'est donc pas possible de préjuger aujourd'hui du résultat de l'appel d'offres. L'opel aura à déterminer les candidatures retenues lors d'une prochaine réunion.

M. Bernard Derosier, député, s'est dit très intéressé par la présentation faite par le rapporteur et a souhaité pouvoir disposer de la liste complète des aai. Il s'est déclaré réservé sur le recours à une collaboration extérieure préalable, considérant que si les cabinets de conseil peuvent avoir une utilité en matière d'organisation et de méthode, ils ont trop souvent tendance à orienter leurs conclusions en fonction de ce que souhaite le client. En revanche, il existe des compétences qu'il serait souhaitable de mobiliser, telles celles des rapporteurs spéciaux des commissions des finances ou celles des magistrats de la Cour des comptes.

Le rapporteur a précisé que la Commission des finances du Sénat s'était occasionnellement livrée à un exercice de ce type, mais qu'elle n'avait alors pas suffisamment abordé la dimension juridique du problème, d'où l'utilité de l'Office, qui est un organe regroupant des représentants de l'ensemble des commissions des deux Chambres.

M. Xavier de Roux, député, a estimé que le foisonnement et la diversité des compétences et des pouvoirs des aai exigeaient probablement d'avoir recours à des expertises multiples et que celle de la Cour des comptes pourrait être opportunément envisagée.

Le président Pascal Clément, a regretté que la création d'autorités indépendantes soit souvent la seule réponse que la puissance publique propose lorsque surgit un problème. Cette tendance est d'ailleurs favorisée par l'Union européenne qui incite à la création de telles structures.

M. Jean-Jacques Hyest, premier vice-président de droit, a indiqué que le projet de cahier des charges faisait précisément entrer la dimension européenne dans le champ de l'étude.

Conformément aux conclusions du rapporteur, l'Office a décidé de donner suite à la saisine, d'engager une étude pouvant conduire à l'établissement d'un rapport et de recourir à des collaborations extérieures pour réaliser deux études complémentaires, la première dressant un bilan complet des autorités administratives indépendantes, la seconde, de droit comparé.

Le rapporteur a alors présenté le projet de cahier des charges pour les deux lots du marché public à passer, le premier relatif à une étude dressant le bilan des autorités administratives indépendantes, le second relatif à une étude de droit comparé. Il a indiqué que l'appel d'offres sera clos le 9 mai 2005 et que l'office se réunira à nouveau pour choisir les personnes ou organismes chargés de réaliser les études, étant précisé que des rapports d'étape devraient être remis en juillet, et les rapports définitifs à la fin du mois d'octobre, au plus tard au mois de novembre. Il a ajouté que l'équipe des experts devra comporter, pour le premier lot soumis à appel d'offres, un expert en finances publiques.

Le président Pascal Clément, président de droit, s'est interrogé sur l'étendue du champ de la première étude, extrêmement détaillé puisqu'il compte neuf champs principaux, et qui pourrait être plus succinct.

Le rapporteur a précisé que chacun des points figurant dans l'appel d'offres devait être examiné afin d'éviter une approche trop sectorisée de la question.

M. Xavier de Roux, député, a souligné que certains des points faisant l'objet de la commande, comme par exemple les raisons et circonstances conduisant le Parlement et le Gouvernement à créer des autorités administratives indépendantes, ne pourront dispenser les membres de l'Office de donner dans un second temps leur propre explication politique.

M. Jean-Jacques Hyest, premier vice-président de droit, a rappelé que le rapport final serait établi par le sénateur Gélard et que les deux études faisant l'objet du cahier des charges ne constitueront que des aides à la réflexion.

L'Office a adopté sans modification le projet de cahier des charges présenté par le rapporteur.

--____--


© Assemblée nationale