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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 14 décembre 2005

101e séance de la session ordinaire 2005-2006

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

contrat de transition
professionnelle

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Le Ridant.

M. Jean-Pierre Le Ridant. Monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, vous avez annoncé dimanche le lancement, à titre expérimental, d’un contrat de transition professionnelle, inspiré d’une proposition du rapport que M. Sabeg vous a remis au mois de mars.

À l’instar de la convention de reclassement personnalisé, ce contrat vise à offrir aux salariés licenciés un accompagnement individualisé en vue d’un retour rapide à l’emploi. Il s’agit d’un dispositif destiné, dans un premier temps, aux salariés licenciés économiques d’entreprises de moins de 300 salariés, qui se verraient proposer une rémunération élevée pendant huit à douze mois, ainsi qu’un accompagnement personnalisé et complet. Les personnes concernées effectueraient un bilan de compétences, des stages de formation, des stages en entreprise à l’issue desquels l’objectif est de leur proposer un emploi durable.

Il s’agit d’un acte volontaire : les salariés seraient libres d’accepter ou de refuser une telle mesure. Il appartiendra au législateur de définir le statut de ceux qui l’auront acceptée.

Ce dispositif serait géré par un office de retour à l’emploi, associant l’UNEDIC, l’ANPE, l’AFPA et les collectivités locales. Son financement serait notamment assuré par les ASSEDIC, l’État intervenant en cas de dépassement. Le contrat de transition professionnelle sera expérimenté dans les semaines qui viennent dans six bassins d’emploi qui constitueront autant de sites pilotes : Valenciennes, Saint-Dié, Vitré, Morlaix, Toulon, Charleville-Mézières.

Monsieur le ministre, en quoi ce nouveau contrat apparaît-il comme une « révolution », ainsi que vous l’avez vous-même qualifié ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) En quoi diffère-t-il de la convention de reclassement personnalisé ? Enfin, de quelle manière les partenaires sociaux et la représentation nationale seront-ils associés à sa mise en œuvre ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean Glavany. Le néo-radical !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avant le vote, il y a huit mois, de la loi sur la cohésion sociale, les licenciés économiques des entreprises de moins de 1 000 personnes n’avaient d’autre solution que de s’adresser aux ASSEDIC et de pointer à l’ANPE, en espérant que la « mère chance » leur permettrait de retrouver une activité. Depuis l’adoption de la convention de reclassement personnalisé, et grâce à la signature, moins de deux mois plus tard, de l’accord entre partenaires sociaux permettant de la mettre en place, un accompagnement personnalisé est désormais proposé aux demandeurs d’emploi. Ce dispositif fonctionne : 35 % des licenciés économiques y ont recours sur la base du volontariat. Nous allons donc évidemment poursuivre dans cette voie.

Néanmoins, face aux importantes mutations auxquelles est confrontée notre économie, le Premier ministre a souhaité une plus grande sécurisation des parcours professionnels tout au long de la vie.

M. Michel Lefait. Bavardages !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Sa récente proposition de « chèque formation universel » s’inscrit dans ce cadre. Nous travaillons donc sur l’expérimentation, à partir du prochain trimestre, d’une plateforme de transition susceptible d’accueillir une personne en licenciement économique, de lui donner immédiatement un statut salarial, …

M. Michel Lefait. Effet d’annonce !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …et de rechercher dans quelles conditions ses compétences pourraient être immédiatement mises à la disposition d’un établissement public ou privé.

Il s’agira donc d’une expérimentation, …

M. Michel Lefait et M. Albert Facon. Et voilà !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …qui sera soumise ensuite aux partenaires sociaux puis à l’Assemblée nationale. L’objectif est que notre pays puisse à la fois assumer les mutations de son économie et protéger ses salariés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

article 4 de la loi
du 23 FÉVRIER 2005

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, l’article 4 de la loi du 23 février 2005, (Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), reconnaissant le rôle positif de la colonisation (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), divise profondément la communauté nationale (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Votre insistance est scandaleuse !

M. Jean-Marc Ayrault. À plusieurs reprises, en particulier lors de l’examen de la proposition de loi du groupe socialiste, il y a deux semaines, nous vous avons demandé l’abrogation de cet article,

M. Francis Delattre. Non !

M. Jean-Marc Ayrault. …pour régler des comptes politiques (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), ni pour rejouer les affrontements de la décolonisation, mais pour corriger ensemble une erreur qui a blessé nombre de nos compatriotes. Deux de vos ministres ont d’ailleurs exprimé la même demande. (Exclamations sur certains bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Arrêtez de jeter de l’huile sur le feu !

M. Jean-Marc Ayrault. Ni vous ni votre majorité n’avez saisi la main que nous vous avons tendue. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Une main assassine !

M. Jean-Marc Ayrault. Pire : des déclarations insensées, émanant du groupe UMP, ont attisé les passions. Un des députés de votre majorité s’est ainsi abaissé à déclarer que sans la colonisation, ni M. Begag ni M. Bertrand ne seraient ministres de la République. (« Honteux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Jusqu’où ira-t-on dans l’indignité ? Il est d’ailleurs choquant que ni vous ni le président de l’UMP n’ayez jugé bon de réagir à de tels propos.

Il est plus que temps, monsieur le Premier ministre, de mettre un terme à cette dérive. Il est temps de consolider une conscience nationale aux racines multiples. C’est notre richesse, notre fierté d’être Français. Et je récuse toute idée de repentance. L’histoire de notre nation comprend des pages glorieuses qu’il faut savoir célébrer, mais aussi des pages plus sombres qu’il faut savoir reconnaître. Ce que nous voulons, c’est construire une mémoire partagée dans laquelle chaque enfant de la République pourra se reconnaître.

Alors, c’est vrai, arrêtons de confondre l’histoire et la mémoire.

M. Richard Mallié. Et vous, arrêtez d’envenimer les choses !

M. Jean-Marc Ayrault. L’histoire appartient aux historiens, la mémoire appartient à la nation.

La mission qui a été confiée au président de l’Assemblée nationale peut, à cet égard, jouer un rôle utile mais elle sera – et je l’ai déjà dit – une mission impossible tant que subsistera ce germe de division.

Monsieur le Premier ministre, ce que je vous demande est simple : videz l’abcès !

Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. L’abcès, c’est vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Vous pouvez prendre l’initiative d’abroger cet article, et même le faire par décret. Alors nous pourrons, ensemble, travailler à rassembler la nation autour d’une mémoire apaisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous sommes une grande nation, qui a connu des épreuves et la grandeur. Il y a, dans notre histoire, des combats exemplaires, l’affirmation d’idéaux qui font notre fierté : les grands principes de 1789, la loi de 1905 sur la laïcité, …

M. Jean-Pierre Brard. La Résistance !

M. le Premier ministre. …l’égalité des chances, dont j’ai décidé qu’elle serait la grande cause nationale pour l’année 2006.

M. Jean-Pierre Brard et M. Maxime Gremetz. Et la Résistance ?

M. le Premier ministre. Voilà des valeurs que nous devons porter haut et défendre.

Je le dis ici solennellement, monsieur le président Ayrault : cette histoire, il ne faut pas seulement la commémorer, il faut la faire vivre au quotidien, il nous faut la partager tous ensemble, il faut en tirer les leçons, avec humilité et enthousiasme.

M. François Hollande. Et après ?

M. le Premier ministre. Mais soyons attentifs à chacun, à toutes les mémoires ; aux souffrances qui sont encore vivantes, aux mémoires qui ne sont pas suffisamment reconnues, aux identités blessées. La République doit leur faire toute leur place.

M. Jean Glavany. Même dans la loi ?

M. le Premier ministre. La France est riche de l’outre-mer, qui affirme notre présence et notre rayonnement sur tous les continents ; elle est riche de ses enfants issus de l’immigration, qui nous apportent leur confiance et leur espoir.

M. Jean-Christophe Cambadélis. Dites-le à M. Sarkozy !

M. le Premier ministre. Nous sommes tous citoyens, égaux en droits et en devoirs (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), …

M. Albert Facon. Même la « racaille » ?

M. le Premier ministre. …fils et fille de la République.

M. Maxime Gremetz. Supprimez l’article 4 !

M. le Premier ministre. Ensemble, nous devons nous retrouver pour faire face aux défis d’aujourd’hui. (« Abrogez ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

D’abord, nous devons affirmer une règle : ce n’est pas au Parlement de faire l’histoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste, sur de nombreux bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Il n’y a pas, en France, d’histoire officielle. (« Absolument ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Il y a seulement le travail des historiens. (« Abrogez ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C’est pourquoi le Président de la République a proposé au président de l’Assemblée nationale…

M. Jean Glavany. C’est ici que l’on vote !

M. le Premier ministre. …de constituer une mission pluraliste pour évaluer l’action législative dans les domaines de la mémoire et de l’histoire.

Mme Huguette Bello. Abrogez !

M. le Premier ministre. Cette mission devra s’entourer d’historiens, et rendra ses conclusions dans les trois mois. Le Président de la République a également demandé…

M. Jean Glavany. Ce n’est pas lui qui fait et défait la loi !

M. le Premier ministre. …que soit créée dans les meilleurs délais la fondation sur la mémoire prévue par l’article 3 de la loi de février 2005.

M. Jean-Christophe Cambadélis. Abrogez !

M. le Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, vous m’avez interpellé.

M. Jean Glavany. Dignement !

M. le Premier ministre. Je ne veux pas qu’il y ait d’ambiguïté dans votre esprit sur ma réponse : il est normal que nous nous posions des questions sur notre identité commune, mais, oui, je suis fier d’être français. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre et plusieurs députés du groupe socialiste. Nous aussi ! Répondez à la question !

M. le Premier ministre. J’assume toute l’histoire de France. Oui, j'ai l’honneur, et tout mon gouvernement avec moi, de servir nos compatriotes et de relever les défis de l’avenir. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Ça, on peut en discuter !

M. le Premier ministre. Tous ensemble, sur ces bancs, nous pouvons dire fraternellement, debout, la tête haute : vive la République, vive la France ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. Et la réponse ?

M. le président. Nous en venons à une question du groupe de l’Union pour la démocratie française. (« Abrogez ! Abrogez ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, un peu de dignité !

M. Jean Glavany. Qui s’est montré indigne ?

tva sur les péages autoroutiers

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Charles de Courson. Monsieur le Premier ministre, l’État français a été condamné à rembourser aux entreprises de transport routier la TVA incluse dans les péages autoroutiers réglés antérieurement à 2001, suite à une décision de la Cour européenne de justice du 19 septembre 2000 et à un arrêt du Conseil d’État du 29 juin 2005. Le coût de ce remboursement est estimé à un milliard d’euros.

Pour ne pas avoir à appliquer ces décisions de justice, le Gouvernement a fait voter vendredi dernier, à l’aube, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, un amendement visant à empêcher ce remboursement.

Cet amendement a été combattu par le groupe UDF pour trois raisons : économiquement, les entreprises de transport routier ont bien payé la TVA que ne récupéraient pas les sociétés d’autoroute ; juridiquement, l’amendement gouvernemental inverse une règle de droit bien établie et est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne de justice ; socialement, le secteur des transports routiers est en grande difficulté, et les mesures visant à rétablir sa compétitivité ne sont pas à la hauteur de la gravité de la situation.

Le groupe UDF, respectueux de l’autorité de la chose jugée, estime qu’il convient de respecter les décisions de justice, quitte à étaler sur deux à trois ans la dette de l’État. Les organisations représentatives du secteur ont lancé des actions de protestation contre cet amendement gouvernemental : blocage des péages, recours juridique. Ils ont demandé des allégements de charges sociales sur les heures d’équivalence.

Pour apaiser la situation, le Gouvernement est-il prêt à revenir au strict respect des décisions de justice ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Non, il n’y est pas prêt !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur de Courson, pour que les choses soient précises dans les esprits,…

Plusieurs députés du groupe socialiste. À l’euro près !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. … je rappelle que, jusqu’au 1er janvier 2001, les péages d’autoroutes n’étaient pas assujettis à la TVA. Ils l’ont été à partir de cette date, suite à une décision de justice prise à l’automne 2000.

Monsieur de Courson, je vous connais de plus en plus et je vous comprends de moins en moins ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Jean Glavany. Arrêtez de le fréquenter !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous avez passé toute la discussion budgétaire à nous expliquer que, vraiment, nous ne gérions pas bien l’argent public et que notre budget était tellement mauvais que vous n’alliez peut-être même pas le voter !

M. Albert Facon. Il a eu raison !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Et maintenant, vous nous demandez de rembourser une TVA qui n’a jamais été acquittée !

M. Guy Geoffroy. Eh oui !

M. Charles de Courson. C’est faux !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Chacun fait comme il veut, monsieur de Courson. Mais notre objectif à tous est de respecter la loi dans sa lettre comme dans son esprit. C’est la raison pour laquelle la TVA acquittée à compter du 1er janvier 2001 est remboursée. Pour la période précédente, il n’y a pas de raison de rembourser un impôt qui n’a pas été payé. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Second point : il faut évidemment discuter avec les routiers. Cette profession connaît de grandes difficultés. D’ailleurs, Dominique Perben a commencé à travailler avec eux sur de nombreux sujets. Nous avons pris, dans ce budget dont vous dites tant de mal, quelques décisions majeures comme le dégrèvement de taxe professionnelle, l’allégement de la TIPP et nous faisons le maximum pour que cette profession puisse travailler dans les meilleures conditions.

Nous aurions aimé un coup de main, monsieur de Courson et nous recevons sans arrêt des coups de griffes. À la fin, cela fatigue ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

pouvoir d'achat

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jean-Claude Sandrier. Je tiens tout d’abord à vous dire, monsieur le Premier ministre, que, sur la question de la colonisation (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) il faut être logique : s’il n’y a pas lieu de légiférer sur l’histoire, demandez alors au président de l’Assemblée nationale de faire tout simplement abroger l’article 4 de la loi de février 2005 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. – « Non ! Non ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, vous répétez chaque jour que la France vit au-dessus de ses moyens.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. C’est vrai !

M. Jean-Claude Sandrier. Nous attendions avec impatience que vous précisiez à nos concitoyens qui vit au-dessus des moyens de la France. Est-ce que ce sont les RMistes dont vous avez fait à nouveau croître le nombre de 5 % en un an ? Ceux qui ont droit à la couverture maladie universelle, dont le nombre a augmenté de 14 % ? Ceux qui fréquentent les Restos du cœur dont le nombre a été multiplié par dix en vingt ans ? Est-ce la caissière de Carrefour dont le salaire a augmenté de 1,79 % l’an dernier… 

M. Jacques Desallangre. Non !

M. Jean-Claude Sandrier. …ou le fonctionnaire dont le traitement a augmenté de 1,8 % ?

M. Jacques Desallangre. Non !

M. Jean-Claude Sandrier. Dites-nous au moins qu’il ne s’agit pas d’eux !

Mais, alors, qui sont-ils, ceux qui font vivre la France au-dessus de ses moyens ? Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que ce sont ces actionnaires (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) qui exigent un rendement de 15 % pour leurs dividendes (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste) ; que ce sont ces sociétés du CAC 40 qui ont vu leurs profits croître de 160 % en deux ans et leurs patrons s’augmenter de 24 % ? Nos concitoyens le voient bien : plus cela va mal pour la croissance, le pouvoir d’achat et l’emploi, plus les profits explosent ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Michel Lefait. Scandaleux !

M. Jean-Claude Sandrier. Un grand professeur d’économie vient d’écrire : « Une hausse des profits n’a pas d’effet favorable sur l’investissement et a un effet défavorable sur la demande, alors qu’augmenter les salaires, ce serait soutenir la consommation et donc la croissance et l’emploi. » Il ajoute même : « Les pays européens qui exportent le plus sont ceux où les coûts salariaux sont élevés. »

Qu’attendez-vous pour relever salaires, retraites et minima sociaux ? Enfin, qu’attendez-vous, à la veille de ces jours de fête, pour augmenter au moins du taux de l’inflation la prime de Noël pour les plus démunis,…

M. le président. Monsieur Sandrier, pouvez-vous poser votre question ?

M. Jean-Claude Sandrier. … alors que vous venez de faire aux plus riches un cadeau de près de 2 milliards d’euros ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Monsieur le président, les précédents orateurs ont disposé de plus de temps que moi !

M. le président. Non, monsieur ! C’est inexact ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je veux bien que l’on me mette en cause, mais une petite lumière m’indique que vous avez dépassé votre temps.

M. Jean-Claude Sandrier. Non, monsieur le président !

M. le président. Comment le savez-vous, puisque vous étiez en train de parler ? J’ai une lumière ici ! Arrêtez de me mettre en cause, parce que vous dépassez à chaque fois votre temps de parole ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Il y a une limite ! J’ai le compte, alors arrêtez ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, le pouvoir d’achat et les salaires sont une préoccupation légitime des Françaises et des Français.

M. Jacques Desallangre. Et du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. A cet égard je vais vous rappeler quelques chiffres.

Le pouvoir d’achat a augmenté de 0,4 % en 2003, de 1,4 % en 2004…

M. Jean-Paul Anciaux. Très bien !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. …et, cette année, sa croissance devrait être supérieure, puisque le salaire moyen ouvrier a crû, au cours du troisième trimestre, de 3,1 %, rebasé sur l’année. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. André Chassaigne. C’est une moyenne !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Néanmoins, il existe de fortes disparités. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Voilà pourquoi, en mars dernier, dans le cadre de la commission nationale de la négociation collective, avec l’ensemble des partenaires sociaux, nous avons mis sous observation 84 branches sur les 274. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vingt-huit accords salariaux ont été signés, mais quatre branches professionnelles nous posent aujourd’hui encore des problèmes importants. Le Premier ministre a rappelé, avant-hier, sa demande d’aboutir enfin à des accords salariaux dans ces branches avant le 15 mars. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Par ailleurs, si la question des salaires est un élément important, celle des revenus est également essentielle.

Ainsi la revalorisation de la prime pour l’emploi,…

M. Jean-Pierre Brard. Cinq euros !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. …l’introduction de la prime de transport dans la négociation annuelle obligatoire pour l’année 2006 (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains),

M. André Chassaigne. C’est tout petit !

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Cinq euros !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. …la participation et la création d’un dividende du travail seront une réponse à votre préoccupation d’un partage égal entre l’entreprise, les actionnaires et les salariés. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Patrick Ollier. Très bien !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Enfin, le fait que nous ayons 130 000 chômeurs de moins est un élément déterminant pour le pouvoir d’achat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Telle est l’action du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) en matière de salaires et de pouvoir d’achat ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Albert Facon. Ceux du CAC 40 !

Terrorisme

M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud, pour le groupe UMP.

M. Alain Marsaud. Monsieur le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, l’actualité de ces derniers jours met en évidence une accélération de la lutte contre le terrorisme menée par les services d’enquête spécialisés. La preuve en est, nous dit-on, que des opérations d’interpellations menées par plusieurs services de police ont eu lieu au cours des derniers jours à travers la France entière. Ces arrestations sont, semble-t-il, le signe d’une présence toujours plus forte sur le territoire national de réseaux islamistes.

Nous avons pu constater, à travers ces différentes interpellations, la diversité des profils des personnes soupçonnées. Il s’agirait, semble-t-il, non seulement d’islamistes confirmés, de délinquants islamisés, mais aussi de braqueurs sans lien connu avec l’extrémisme religieux. Cette connexion au service de la cause terroriste entre le banditisme, la petite délinquance et les liens particulièrement inquiétants noués au sein du milieu carcéral avec la mouvance islamiste soulèvent la question de la menace réelle pesant sur les populations.

Il semble que l’environnement international de ce réseau lui donne une consistance encore plus inquiétante, à laquelle d’ailleurs nous allons tenter de répondre dans les tout prochains jours par la loi.

M. Maxime Gremetz. La question !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Marsaud !

M. Alain Marsaud. Monsieur le ministre d’État, pourriez-vous nous informer sur l’état actuel de cette menace ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Monsieur Marsaud, vous connaissez parfaitement ces questions. La menace terroriste en France est malheureusement bien réelle et elle peut s’exprimer par deux chiffres : depuis le 1er janvier, 142 personnes en relation avec l’extrémisme islamiste ont été interpellées, 31 ont été écrouées.

M. Maxime Gremetz. Vous dites n’importe quoi ! Heureusement qu’il y a des rapports ! (Protestations sur les bancs de groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Ces derniers jours, sur commission rogatoire du président Bruguière, vingt-cinq personnes ont été interpellées. Elles sont à l’heure actuelle en garde à vue et, naturellement, il n’est pas question de faire le point de l’enquête, alors qu’elle n’a pas donné tous ses développements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Ce groupe entretenait des liens avec de nombreux groupes dangereux : le groupe de Francfort, qui avait préparé l’attentat de Strasbourg, des anciens du GIA, des filières tchétchènes et, par ailleurs, le groupe de Safé Bourada. Nous savons également que ce groupe de vingt-cinq personnes avait des relations indirectes avec l’important responsable d’Al-Quaïda qu’est Al Zarkaoui.

Par ailleurs, au moment même où les interpellations avaient lieu, certaines opérations de grand banditisme destinées à financer le djihad étaient en train de s’engager. Aujourd’hui, la perméabilité entre le terrorisme et le grand banditisme est parfaitement avérée.

M. Maxime Gremetz. C’est un secret d’État qu’il nous dit !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Lorsque l’enquête sera terminée et que le délai de garde à vue sera écoulé, les services de police et le juge Bruguière feront bien sûr le point sur cette très importante affaire. Cela valide en tout cas le projet de loi qui a été voté par l’Assemblée nationale et qui va être présenté au Sénat cet après-midi même. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

remplacement des professeurs absents

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Hugon, pour le groupe de l’UMP.

M. Jean-Yves Hugon. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’une des dispositions de la loi sur l’école porte sur le remplacement, par l’un de leurs collègues, des professeurs de collège et de lycée absents pour une durée inférieure ou égale à quinze jours. Vous le savez, cette question a fait débat et suscité des inquiétudes parmi les enseignants, mais elle n’en est pas moins un problème réel.

En effet, en cas d’absence, même de courte durée, d’un professeur, il est impératif de veiller autant que possible à son remplacement pour assurer la continuité de l’enseignement. Cette exigence, qui vise à renforcer l’égalité des chances en évitant les interruptions dans les apprentissages qui fragilisent les élèves les plus faibles, est prioritaire pour l’éducation de nos enfants. Elle est, par ailleurs, souhaitée par les parents.

Cette disposition est entrée progressivement en vigueur depuis la rentrée de 2005. Les textes prévoient que les chefs d’établissement doivent élaborer des protocoles, permettant la mise en œuvre de ce dispositif, fondés sur le volontariat et impliquant une rémunération.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire si la majorité des collèges et des lycées ont déjà signé ce protocole et nous indiquer comment, concrètement, cette mesure est appliquée ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, comme vous, j’ai voulu organiser le remplacement des professeurs absents, parce que cela répond à une forte demande des parents, parce que cela contribue à assurer la continuité du service public de l’éducation nationale et, enfin, parce qu’il s’agit d’un élément important en faveur de l’égalité des chances, concernant notamment les enfants les plus faibles en classe.

J’ai le plaisir de vous annoncer que, suite au décret que j’ai pris le 30 août 2005 sur la base du volontariat et de l’incitation et après concertation avec les organisations syndicales, 66 % des établissements ont, depuis le 10 décembre, leur protocole de remplacement ; les deux tiers d’entre eux disposent donc des modalités de remplacement.

M. Maxime Gremetz. Des modalités, pas des remplaçants !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est un système qui marche bien, puisque, si l’on compare avec la même période de l’an dernier – septembre, octobre, novembre et décembre –, on constate 85 % de remplacements en plus !

M. Maxime Gremetz. C’est la baguette magique !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je salue la communauté éducative qui a bien compris cet enjeu et qui a répondu présent pour assurer le service public de l’éducation nationale ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

intermittents du spectacle

M. le président. La parole est à M. Pierre Bourguignon, pour le groupe socialiste.

M. Pierre Bourguignon. Monsieur le Premier ministre, s’agissant de l’amour sacré de la patrie, (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) je tiens à dire que nous sommes tous ici les représentants de la nation et que la France, la patrie, la République, nous l’aimons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains, et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Le président Ayrault vous a posé une question précise : voulez-vous abroger l’article 4 de la loi de février 2005 sur les bienfaits de la colonisation ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Leonetti. Vous l’avez voté !

M. Pierre Bourguignon. Vous pouvez le faire ou refuser de le faire mais, de grâce, répondez simplement oui ou non à la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Marc Nudant. Mascarade !

M. Richard Mallié. Au Sénat, les socialistes ont trouvé ça bien !

M. le président. Posez votre question !

M. Pierre Bourguignon. Depuis le 8 novembre dernier, les négociations pour une nouvelle convention UNEDIC sur les modalités d’indemnisation du chômage des salariés butent sur les mesures d’économies réclamées par le patronat au détriment des droits des demandeurs d’emploi. L’échec des négociations reporte d’autant la renégociation des articles 8 et 10 spécifiques aux intermittents du spectacle. Or, le 31 décembre, dans dix-sept jours, l’accord signé le 23 juin 2003 cessera d’être valide. Nous savons tous aujourd’hui que cet accord n’a rien résolu ; il a, au contraire, creusé un peu plus le déficit de l’UNEDIC.

Vous avez annoncé la mise en place d’un dispositif social et professionnel de solidarité à destination des intermittents. Pendant deux ans et demi, des parlementaires de toutes les formations politiques de l’Assemblée et du Sénat ont travaillé au sein d’un comité de suivi avec leurs représentants. Ce travail a abouti à une proposition de loi signée par des représentants de chacun des groupes et des non-inscrits sur la pérennisation du régime d’assurance chômage des professions du spectacle, qui a été déposée sous la même forme à l’Assemblée et au Sénat.

Après tant de travail et de patience, nous ne pourrions accepter un report, un rafistolage de dernière minute. Il en va de la création culturelle en France, de la protection des milliers d’intermittents qui font vivre la culture ; il en va d’ailleurs du maillage culturel le plus profond de tout notre pays.

M. le président. Posez votre question, monsieur Bourguignon.

M. Pierre Bourguignon. En cas d’échec des discussions, seriez-vous prêt à inscrire à l’ordre du jour de notre assemblée cette proposition de loi qui, je le rappelle, a été signée par 308 députés et 168 sénateurs appartenant à tous les groupes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Albert Facon. Pour le spectacle, ce n’est pas mal !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Bourguignon, les négociations entre les partenaires sociaux qui gèrent l’assurance chômage doivent aboutir à un accord avant le 31 décembre. Je rappelle que ce régime, qui est quasiment à l’équilibre ce mois-ci grâce à la baisse du chômage ou à l’augmentation des emplois, connaît néanmoins un déficit cumulé de quasiment 14 milliards d’euros. Les partenaires sociaux en sont à la cinquième réunion ; ils doivent se réunir à nouveau vendredi, pour conclure, j’espère. En tout état de cause, le service des indemnités sera assuré à compter du 1er janvier.

En ce qui concerne la négociation elle-même, ce qui paraît consensuel, c’est toute la stratégie d’aide au retour à l’emploi.

M. Jean-Pierre Brard. Ce n’est pas la question ! Elle portait sur les intermittents !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Laissons les partenaires sociaux terminer leurs négociations, dans le respect du paritarisme.

Pour les annexes 8 et 10, j’en appelle aussi au respect du paritarisme. Le chef du Gouvernement a annoncé lundi aux partenaires sociaux que, conformément à leurs souhaits, le fonds d’indemnisation transitoire serait pérennisé sous forme de fonds de solidarité professionnelle. Fort de ces éléments, je ne doute pas qu’ils trouveront un accord qui convienne à la profession, sur la base du rapport Guillot, le pilotage étant assuré par M. Donnedieu de Vabres et par M. Larcher. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

grèves dans le rer

M. le président. La parole est à M. Georges Tron, pour le groupe UMP.

M. Georges Tron. Ma question, à laquelle j’associe plusieurs de mes collègues d’Ile-de-France dont Michel Herbillon et Nicolas Dupont-Aignan, porte sur les événements qui, depuis maintenant dix jours pour la ligne D du RER, aboutissent à ce que 500 000 usagers ne peuvent plus se déplacer.

Je crois savoir, monsieur le ministre des transports, que la décision de suspendre la grève aurait été prise ce matin, pour la ligne D en tout cas, mais je voudrais tout de même poser trois questions qui sont, me semble-t-il, dans tous les esprits.

S’agit-il d’événements exceptionnels ?

La réponse est non. C’est la sixième grève nationale dont les usagers sont victimes,…

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. C’est une honte !

M. Georges Tron. …et la ligne D du RER est qualifiée de ligne poubelle tant les dysfonctionnements du service sont graves. Ils affectent 17 % des trains. C’est malheureusement quelque chose d’habituel.

Peut-on considérer que ces événements sont justifiés ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

La réponse est non, bien entendu, car le motif, chacun l’a en mémoire, est la décision de faire rouler 157 trains supplémentaires afin d’assurer un meilleur service au public, alors que onze personnes viendront renforcer le personnel de la SNCF et qu’il y a eu de longues négociations, plus de soixante heures, entre la SNCF et les représentants syndicaux.

Il s’agit donc de dysfonctionnements réguliers, qui n’ont absolument aucune justification.

Ces événements sont-ils sans conséquence ?

A cet égard, mes chers collègues, j’appelle votre attention sur le fait que nombre de nos concitoyens sont pénalisés lourdement dans leur vie quotidienne. Il s’agit bien entendu de tous ceux qui viennent sur Paris pour travailler, des demandeurs d’emploi, de ceux qui viennent se faire soigner. C’est un bouleversement dans leur vie quotidienne. Les conséquences pour la SNCF sont tout aussi lourdes : plus de 10 millions d’euros sans doute.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, tout en me félicitant de la ligne de fermeté qui a été adoptée par la SNCF et par le Gouvernement, quelles leçons vous comptez tirer de cette crise et notamment du fait que nous avons assisté pour la première fois à une véritable coopération du service public de transport, SNCF, RATP et Optile. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, je vous confirme d’abord que les salariés de la ligne D du RER ont décidé, il y a quelques heures, de reprendre le travail, et je viens d’être informé qu’il en était de même pour ceux de la ligne B. La situation devrait donc redevenir normale dans quelques heures.

Pour autant, l’affaire n’est pas terminée. Il nous faut réfléchir en effet à la manière dont les événements se sont déroulés et en tirer un certain nombre de conclusions.

Comme je l’ai souligné depuis le début, cette grève était totalement disproportionnée par rapport aux enjeux.

M. Jean-Michel Dubernard et M. Guy Geoffroy. Tout à fait !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Il s’agissait en effet de savoir comment on allait mettre en place 157 trains supplémentaires en fin d’année pour faire face à la demande de transport, en particulier dans le département de l’Essonne et au nord-est de la région parisienne. On allait bien sûr engager des conducteurs supplémentaires et organiser les horaires de travail différemment. C’est le type même de discussion qui doit pouvoir se dérouler normalement dans le cadre contractuel de la négociation sociale. Il est très important que, dans le cadre du service public, dont je suis un défenseur, il soit possible de régler les problèmes d’organisation du travail autrement qu’en recourant à la grève dès qu’il y a une difficulté. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

La relation de confiance indispensable entre l’opinion publique, les usagers et le service public passe par cette vision renouvelée et par cette culture du dialogue social. Cela est indispensable. Sinon, ne nous y trompons pas, c’est l’idée même que les Français se font du service public qui subira les conséquences de ce type de dérive ; il faut que nous en soyons convaincus. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

À la suite des discussions que j’avais eues avec le Premier ministre, j’ai demandé hier à la SNCF de mettre en place une indemnisation convenable des usagers dès le mois de janvier. J’avais demandé qu’il y ait des transports de substitution. Mille bus étaient en place ce matin pour le RER B au nord-est de Paris. J’espère que, demain, la situation sera redevenue totalement normale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous l’espérons.

violence envers les femmes

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le groupe UMP.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Madame la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, la violence contre les femmes est un véritable problème de société. Je me réjouis que le Gouvernement ait inscrit à l’ordre du jour prioritaire de l’Assemblée nationale de cette semaine l’examen d’une proposition de loi sur le sujet. Cependant, pour être totalement efficaces, ces mesures législatives ont besoin d’un accompagnement réglementaire ; j’en donne simplement deux exemples.

En cas de violence à l’intérieur d’un couple, la loi sur la récidive prévoit l’éloignement du conjoint violent. Se pose alors la question de la victime et de ses enfants confrontés aux difficultés matérielles du quotidien. Il est important que les pouvoirs publics proposent un véritable dispositif jouant un rôle de relais social.

Autre exemple : celui des femmes immigrées ou issues de l’immigration. Il est clair que le renforcement du tissu social serait la meilleure réponse aux violences urbaines constatées ces dernières semaines. Le rapport de la délégation aux droits des femmes ainsi que le travail de la mission famille montrent le rôle que peut jouer l’autorité morale des femmes pour favoriser l’intégration de l’ensemble de la famille. Des mesures législatives sont en cours d’élaboration, elles concernent le mariage forcé, les mutilations sexuelles, ainsi que le passage de l’âge minimal du mariage pour les filles de quinze à dix-huit ans. Elles ne seront efficaces que si elles sont renforcées par un volet d’accompagnement spécifique pour l’insertion des femmes immigrées dans la société française.

Il y a aujourd’hui des avancées législatives, et je tiens à vous en remercier, ainsi que le garde des sceaux. Comment comptez-vous les mettre en œuvre ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Vous avez raison, madame la députée, et nous en avons parlé à plusieurs reprises dans cet hémicycle : les violences faites aux femmes, les violences au sein du couple ne sont pas tolérables.

Il fallait, dans un premier temps, agir sur les sanctions. Grâce à la proposition de loi que nous avons commencé à discuter hier dans cet hémicycle avec le garde des sceaux, les réponses sont là : les sanctions seront alourdies en cas de circonstances aggravantes.

Nous devons également améliorer la prévention et l’accompagnement.

Les femmes doivent être mieux informées, vous l’avez excellemment souligné dans votre rapport, notamment les femmes issues de l’immigration. Il faut leur faire connaître leurs droits, les accueillir et les faire bénéficier d’un entretien individuel. Nous devons aussi aller vers une obligation de soins pour les auteurs de violences, afin d’éviter que ces violences se perpétuent et entraînent des drames.

Les femmes doivent pouvoir rester chez elles quand elles le souhaitent.

Néanmoins il faut aussi multiplier les capacités d’accueil dans les centres d’hébergement, avec des places réservées, mais également dans les familles d’accueil qui permettent une approche plus humaine, plus personnelle. Il convient aussi d’accompagner les associations qui font un travail remarquable : le Gouvernement a donc décidé d’augmenter leurs subventions de 20 % dès l’année 2006. Nous disposerons alors d’un maillage du territoire, d’une réponse humaine et de l’information nécessaire permettant d’éradiquer ce drame humain. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

DCN

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Viollet, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Claude Viollet. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la défense. J’y associe mes collègues Patricia Adam, Jean-Marc Ayrault, Jean-Yves Le Driant et Jean-Claude Beauchaud.

M. Jean-Marc Nudant. Ce n’est plus une question. C’est un colloque !

M. Jean-Claude Viollet. La loi de finances rectificative pour 2001 a transformé DCN en entreprise nationale dont l’État détient aujourd’hui la totalité du capital. Nous avons soutenu cette évolution qui devait permettre à DCN d’être plus réactive, de recruter des compétences nécessaires à sa pleine vitalité, de prendre toute sa place dans le mouvement d’alliances et de regroupement engagé en Europe, à condition que l’État lui assure un volume suffisant de commandes dans la durée et garantisse l’avenir de ses personnels.

Bien que convaincus de la nécessité de poursuivre cette évolution, qui a d’ores et déjà permis à DCN d’augmenter son chiffre d’affaires, d’améliorer sa productivité et de consolider ses résultats, nous nous sommes opposés en 2004, en l’absence de perspectives clairement établies, à votre projet de loi relatif à l’ouverture de son capital et à la création de filiale. Nous manifestons la même réserve quant au projet de rapprochement entre DCN et Thalès dont l’économie n’est pas davantage développée et dont l’intérêt ainsi que l’urgence ne sont pas démontrés, ce qui suscite l’inquiétude des personnels de DCN mais aussi de Thalès et de leurs filiales comme de leurs sous-traitants.

C’est pourquoi, devant l’imminence d’une décision politique et alors que les comités d’entreprise des deux entités et de leurs filiales sont convoqués, demain 15 décembre, pour une information sur ce projet de rapprochement, et que leurs conseils d’administration vont eux-mêmes avoir à en débattre, nous vous demandons, madame la ministre, d’en informer également la représentation nationale et d’en présenter de toute urgence les différents aspects devant notre commission de la défense nationale et des forces armées.

Parce que les élus que nous sommes, comme les salariés, ont droit à ces informations, parce que la réussite de toute évolution est conditionnée par l’adhésion du plus grand nombre de ses acteurs, nous attendons, madame la ministre, des réponses précises du Gouvernement sur le maintien de l’unicité de DCN, sur la pérennité de chacun de ses établissements, sur leurs plans de charges et leur niveau d’emplois. Bref, nous voulons connaître votre projet pour DCN. (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, c’est toujours avec grand plaisir que je me rends devant la commission de la défense lorsqu’elle demande à m’entendre.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Tout à fait !

Mme la ministre de la défense. Sur ce projet précis, la concurrence internationale dans le domaine naval est et sera de plus en plus rude. D’ailleurs d’autres pays européens s’y préparent, notamment l’Espagne et l’Allemagne.

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, je veux faire de DCN un champion dans son domaine, capable non seulement de résister, mais également de garder son rang sur le marché européen et international. Cette entreprise a effectivement beaucoup progressé depuis quelques années et je salue les efforts accomplis, ainsi que ceux des personnels.

Néanmoins si nous voulons gagner, il faut aller encore plus loin, notamment faire cesser certaines concurrences franco-françaises qui nous affaiblissent et rassembler autour de DCN l’ensemble de nos forces dans ce secteur. Il convient également de donner à DCN un partenaire industriel actif et crédible de manière à renforcer l’entreprise sur le plan interne, à l’export et en Europe. Or DCN et Thalès se sont retrouvés ensemble très souvent sur un certain nombre de projets, en particulier celui des frégates multimissions ou du deuxième porte-avions.

Je sais qu’il existe certaines inquiétudes. Je peux vous confirmer que l’unité de DCN et son ancrage dans les bassins d’emplois seront maintenus.

M. Aimé Kergueris. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Les statuts des personnels seront intégralement conservés. Le contrat d’entreprise se poursuivra notamment avec le MCO, les frégates multimissions et, demain, le sous-marin nucléaire Barracuda. Je peux aussi vous assurer que l’État conservera le contrôle de l’entreprise avec 75 % de son capital.

M. Jérôme Rivière. Très bien !

Mme la ministre de la défense. Je ne détaillerai pas davantage les modalités précises puisque les conseils et le comité d’entreprise doivent d’abord être saisis. Cependant je pense que les éléments que je viens de vous donner sont de nature à rassurer et à montrer notre volonté de faire de DCN un véritable champion de l’industrie navale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

conditions d’éligibilité aux pôles d’excellence ruraux

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Lefranc, pour le groupe UMP.

M. Jean-Marc Lefranc. Ma question, à laquelle s’associe mon excellent collègue Daniel Poulou, s’adresse à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

Monsieur le ministre, vous nous avez présenté il y a peu la politique que vous conduisez en matière d’aménagement du territoire avec la mise en place des premiers pôles de compétitivité et votre projet de création de pôles d’excellence en milieu rural. Je vous félicite de ces démarches innovantes qui suscitent chez nombre d’entre nous un vif intérêt.

Je souhaite néanmoins que vous nous précisiez les modalités d’éligibilité à ces pôles et le calendrier que vous vous êtes fixé. Envisagez-vous de favoriser seulement des projets à vocation agricole ou touristique, tels que l’agropastoralisme dans certaines régions, ou tout autre projet artisanal, industriel voire technologique ?

Permettez-moi de vous soumettre deux exemples concrets.

Dans ma région de Basse-Normandie, la pêche est essentielle à l’économie des secteurs littoraux ; celle de la coquille Saint-Jacques, en particulier, est vitale pour la survie de nombreux armements. La présence récurrente de toxines fragilise cette activité, la commercialisation de ce produit et réduit sa valeur ajoutée. La solution serait de développer une filière de décorticage et de créer ainsi plus de 300 emplois. Les pôles ruraux pourront-ils concerner ces projets de transformation agroalimentaire ?

De même, dans la circonscription de mon ami Daniel Poulou, le bassin d’activité de Cambo-les-Bains emploie plus de 2 000 personnes dans le secteur médical. Un projet de mutation économique dans la chaîne de santé pourra-t-il relever d’un pôle d’excellence rural ?

Autrement dit, monsieur le ministre, les pôles ruraux viseront-ils tous les domaines de l’excellence rurale ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Monsieur le député, nous lançons en effet, cette semaine, à la demande du Premier ministre, un appel à projets pour la création de 300 pôles d’excellence ruraux.

M. Marc Le Fur. Très bien !

M. Augustin Bonrepaux. Avec quels moyens ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Il n’y a pas d’argent !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ceux-ci seront sélectionnés en deux phases, l’une, avant le 1er mars, pour les dossiers qui seront reçus avant cette date, l’autre dans les six mois qui suivront. Bien évidemment, chacun de ces projets devra d’abord s’appuyer sur un objectif de création de richesse, de croissance et de création d’emplois. Ils devront s’appuyer sur des aires territoriales rurales, en dehors de toutes aires urbaines.

Les principaux thèmes retenus concerneront, de manière très large, bien sûr la culture, le patrimoine historique ou naturel, mais aussi le tourisme, la biodiversité, l’agroalimentation, comme le décorticage de crustacés. Ces projets pourront également s’appuyer sur de petites filières industrielles, sur les nouvelles technologies de l’information, bien souvent placées au service de pôles de santé, comme celui auquel vous faisiez référence à Cambo-les-Bains dans les Pyrénées-Atlantiques.

Chacun de ces projets se verra doté d’un million d’euros au maximum, plafonnés à 33 % du montant subventionnable. Nous pourrons aller jusqu’à 50 % pour les dossiers situés en zone de revitalisation rurale. L’État consacrera à cette action jusqu’à 150 millions d’euros.

Autrefois, les territoires ruraux étaient synonymes de vieillissement et de désertification ; aujourd’hui nous avons inversé le cours des choses.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ils sont désormais un lieu de création de richesse, de développement de projets, et de décloisonnement entre le privé et le public. C’est donc une relance de la ruralité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes

M. le président. La parole est à M. Émile Blessig, pour le groupe UMP.

M. Émile Blessig. Monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, vous avez, conjointement avec le ministre de l’économie et des finances, sélectionné les acquéreurs des participations détenues par l’État et l’établissement public Autoroutes de France dans les sociétés concessionnaires d’autoroutes, c’est-à-dire les Autoroutes du Sud de la France, les Autoroutes Paris-Rhin-Rhône ainsi que la SANEF. Rappelons qu’il s’agit de l’exploitation de ces équipements, les infrastructures autoroutières restant propriété publique.

Pouvez-vous nous dire, quels sont les éléments de mieux disant qui ont déterminé votre choix ? Par ailleurs, à quelles dépenses sera affecté le produit financier de cette cession ? Plus précisément, puisque désormais les recettes sont de 14,8 milliards d’euros, combien d’euros seront-ils affectés aux infrastructures de transport ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre Cohen. Une braderie !

M. Gérard Bapt. C’est honteux !

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, le résultat de la procédure de privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes est considéré par le Gouvernement comme tout à fait satisfaisant. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Pierre Cohen. C’est honteux !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. D’abord, sur le plan financier, le résultat est de 14,8 milliards, au lieu des 10 à 12 milliards initialement attendus. (Mêmes mouvements.) Le choix de la procédure en deux étapes a permis à l’État d’obtenir une recette importante.

Trois critères de sélection ont été retenus.

Le premier, au-delà du prix, a été la capacité du groupe candidat à assumer le projet industriel, à exister sur le marché français, européen et international, en particulier dans le domaine des concessions. Ainsi ASF pourra s’appuyer demain sur Vinci, APRR sur Eiffage et la SANEF sur Abertis et quelques investisseurs français de référence.

Autre élément pour moi tout à fait essentiel : comment les repreneurs allaient-ils respecter les conditions de fonctionnement de ces entreprises au plan social. J’avais personnellement reçu les organisations syndicales et je puis vous dire que les repreneurs se sont engagés à maintenir les accords d’entreprise, à conclure un accord de branche et à faire en sorte que l’automatisation des péages n’entraîne ni licenciements ni mutations d’office.

Le dernier élément extrêmement important est, bien entendu, l’intérêt des usagers : grâce à l’éclairage complémentaire que nous a fourni le conseil de la concurrence, nous modifierons les contrats de concession afin d’assurer aux usagers toutes les garanties que cette privatisation de la gestion – et non de la propriété – des autoroutes pourrait entraîner.

Enfin, comme le Premier ministre l’a annoncé, 4 milliards d’euros seront consacrés à l’investissement dans les infrastructures de transport (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire).

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappels au règlement

M. Gérard Bapt. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour un rappel au règlement.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au budget, à cette heure où nous nous réunissons à nouveau dans cet hémicycle, le corps du député Gebrane Tuéni doit être transporté du palais de l’Assemblée nationale libanaise jusqu’à sa dernière demeure. Eu égard à l’amitié qui unit le peuple français et le peuple libanais, eu égard – et je parle en ma qualité de vice-président du groupe d'amitié entre la France et le Liban – aux relations suivies que notre assemblée entretient avec l’Assemblée nationale libanaise, il est normal que nous ayons, en cet instant, une pensée pour Gebrane Tuéni, pour sa famille et pour le Liban.

Dans la personne de Gebrane Tuéni, ce nouvel assassinat a frappé un journaliste et un homme politique ; à travers lui, et après l’assassinat de Samir Kassir et l’attentat contre May Chidiac, c’est la liberté d’expression qui est visée, mais c’est aussi, après l’assassinat de Rafic Hariri, l’homme politique qui a participé au « Printemps libanais », et tous ceux qui ont été les leaders de ce printemps démocratique libanais, qui semblent devoir être éliminés, les uns après les autres.

Voilà pourquoi, monsieur le président, il m’a semblé que l’Assemblée nationale devait, à ce moment, avoir une pensée pour Gebrane Tuéni et pour le parlement libanais. Nous émettons le vœu que la compétence de la commission d'enquête sur l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri soit étendue à tous les assassinats qui ont eu lieu depuis, et que, conformément au souhait du peuple libanais et du gouvernement libanais, un tribunal pénal international punisse les coupables, à quelque niveau de responsabilité et dans quelque pays qu’ils puissent se trouver.

M. le président. La parole est à M. Richard Cazenave.

M. Richard Cazenave. Je tiens, en tant que secrétaire du groupe d'amitié entre la France et le Liban, et au nom de l’Union pour un mouvement populaire, à m’associer à cette pensée pour notre collègue Gebrane Tuéni, lâchement assassiné lundi à Beyrouth. Je veux dire aussi notre émotion et notre indignation devant ce qui se passe au Liban.

Nous nous associons également à la demande du gouvernement libanais, qui souhaite qu’une enquête internationale, conduite sous l’égide de l’ONU, fasse toute la lumière sur la série d’assassinats qui vient d’être rappelée. Il faut que les coupables soient châtiés, afin qu’il soit mis fin à l’engrenage de la violence au Liban.

Je voulais, en cet instant, exprimer toute notre émotion. Nous avons une pensée pour le journaliste, directeur du quotidien Al Nahar, mais aussi pour le député francophone et ami de la France. Nous n’exprimons pas aujourd’hui une réaction purement formelle, mais une émotion profonde et réelle, autant que l’est notre souhait d’une enquête internationale qui permette de châtier les coupables.

M. le président. Je vous remercie, mes chers collègues, pour ces deux rappels au règlement ; ce faisant je suis persuadé de me faire l’interprète de l’Assemblée nationale unanime pour exprimer notre solidarité en ce moment de deuil et d’affliction.

La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Je veux exprimer, à la suite de M. Bapt et de M. Cazenave, qui viennent de tenir des propos très émouvants, la très grande émotion suscitée en France, chez toutes les Françaises et tous les Français, par l’assassinat de M. Tuéni, comme chacun peut le comprendre.

Vous savez ce qu’a été la réaction immédiate de la France à la suite de cet attentat.

Je veux également souligner combien les propos qui ont été tenus étaient forts et importants. Le groupe d’amitié entre la France et le Liban, dont vous êtes l’un des vice-présidents, monsieur Bapt, est l’un des symboles qui prouvent, s’il en était besoin, la grande amitié qui unit nos deux pays, et qui est empreinte d’amour de la liberté et de la démocratie.

Taux réduits de TVA

Discussion d’une proposition de résolution

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution de M. Michel Bouvard tendant à exprimer le soutien de l’Assemblée nationale au Gouvernement dans la négociation européenne sur les taux réduits de TVA (E2365) (nos 2730, 2747).

La parole est à M. le rapporteur de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Michel Bouvard, rapporteur de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au budget, mes chers collègues, le Conseil ECOFIN du 6 décembre 2005 n'est pas arrivé à adopter la réforme du régime des taux réduits de TVA. Il a renvoyé, pour accord politique, ce dossier au sommet européen des 15 et 16 décembre prochain, qui aura principalement à traiter des perspectives financières 2007-2013.

Or ce débat met en jeu la question importante du soutien à certains services à forte intensité en main-d'œuvre, tels la rénovation de logements ou les services à la personne ; ce soutien pourrait également bénéficier à la restauration, par l'instauration pérenne d'un taux de TVA réduit à 5,5 %.

La réforme du système des taux réduits de TVA fait l'objet de discussions communautaires depuis maintenant deux ans et demi. Votre rapporteur a souhaité, à travers le dépôt de la présente proposition de résolution, apporter le soutien fort et immédiat de l’ensemble de la représentation nationale au Gouvernement, qui est en charge de défendre la position de notre pays.

L'adoption de cette proposition de résolution par la commission des finances, dès le 8 décembre, puis par l'Assemblée nationale aujourd'hui, montrerait à nos partenaires l'importance attachée par le Parlement à son issue favorable, dans le respect des institutions européennes, et selon la pratique habituellement mise en œuvre par notre assemblée. Je rappelle en effet que c’est déjà à l’initiative de la commission des finances unanime, à travers une proposition de résolution du 8 avril 1999, qu’on doit l’engagement de la démarche tendant à fixer à titre expérimental un taux réduit de TVA pour les activités à forte intensité de main-d’œuvre.

À cette époque – je le rappelle devant nos collègues de la commission des finances qui ont porté cette résolution au nom du groupe socialiste –, la Commission européenne avait adopté, le 17 février 1999, un projet de directive en ce sens, qui a été rejeté ou ajourné à l’occasion du Conseil ECOFIN du 25 mai 1999.

La majorité débattait également en son sein de l’arbitrage qui devait être rendu entre la baisse de l’impôt sur le revenu que souhaitait le Gouvernement et la baisse ciblée de TVA que défendait la commission des finances.

M. Pascal Terrasse. Tout à fait !

M. Michel Bouvard, rapporteur. Ce rappel montre que l’expression de la représentation nationale est utile. Une telle démarche doit être collective pour aboutir : mes chers collègues, vous me donnerez acte du fait que si les membres socialistes de la commission des finances ont pris alors l’initiative de cette résolution, c’est à la demande du groupe RPR qu’elle a été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

M. Jean-Claude Flory. Excellent rappel historique !

M. Michel Bouvard, rapporteur. Il faut d’abord souligner que les règles communautaires en vigueur sont pour le moins complexes. L’application des taux réduits de la TVA relève d’une compétence communautaire, en application de l’article 93 du Traité instituant la Communauté européenne, et suppose une prise de décision à l’unanimité. Elle est régie par la sixième directive du 17 mai 1977, plusieurs fois modifiée, ainsi que par les actes d’adhésion des nouveaux États membres.

L’article 28 de la sixième directive autorise de façon permanente les États membres qui appliquaient avant 1991 des taux réduits ou nul sur la restauration à continuer à le faire. Ces États sont l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas et le Portugal. Il faut rappeler que la situation du Portugal a été assimilée à celle d’avant 1991 au terme d’un débat tenu en 1999 et 2000, et que la France aurait pu saisir cette occasion pour obtenir elle aussi l’application de cette mesure si le Gouvernement avait fait preuve alors de plus d’assiduité et de volonté au sein du Conseil ECOFIN.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2001, M. Didier Migaud, alors rapporteur général, évoquait ainsi, dans son rapport n° 2624 du 10 octobre 2000, sa réponse à la question que nous avions formulée en commission des finances quant à l’attitude de la France dans cette situation : « Après avoir observé que seul le Gouvernement était habilité à indiquer à la représentation nationale les modalités selon lesquelles il avait défendu la position de la France dans une négociation communautaire, votre rapporteur général a fait observer qu’un taux intermédiaire serait en tout état de cause incompatible avec les règles communautaires. » L’ambiguïté de la réponse montre bien que la position du Gouvernement n’était pas aussi claire qu’on voulait bien le dire.

M. Marc Le Fur. C’est intéressant !

M. Michel Bouvard, rapporteur. J’ajoute que l’Autriche a bénéficié du même régime après son adhésion, en 1995.

Depuis 1999, des taux de TVA sont autorisés à titre temporaire pour des activités figurant sur une liste de services à haute intensité de main-d’œuvre : petits services de réparation, rénovation et réparation de logements privés, lavage des vitres et nettoyage des logements privés, services de soins à domicile et coiffure. Neuf États membres ont fait usage de cette faculté pour certains secteurs. C’est sur cette base que la France, en contrepartie de la suppression d’une réduction d’impôt sur le revenu, a établi la taxation à taux réduit des travaux sur les locaux d’habitation de plus de deux ans, comme d’ailleurs sur le lavage des vitres, le nettoyage des logements privés et les services de soins à domicile. Initialement prévu pour ne s’appliquer que jusqu’au 31 décembre 2002, ce dispositif a été prorogé par deux fois, jusqu’au 31 décembre 2005.

Par ailleurs, d’autres dérogations limitées dans le temps et échelonnées jusqu’à la fin de 2010 ont été introduites pour les nouveaux États membres dans leurs actes d’adhésion. Ainsi Chypre, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie sont autorisées à appliquer un taux réduit sur la restauration jusqu’au 31 décembre 2007.

La multiplicité de ces régimes d’exception entérinés au fil des ans est source d’inégalités entre les États membres et la Commission européenne reconnaît même qu’elle ne connaît pas avec certitude les taux réduits applicables dans certains États membres.

Par ailleurs, les discussions communautaires sur les taux réduits de TVA sont particulièrement difficiles.

En juillet 2003, la Commission européenne a proposé une révision générale des taux réduits de TVA, dans un souci de simplifier, d’unifier et de pérenniser les différents systèmes dérogatoires. En permettant, dans sa proposition, un taux réduit de TVA pour la restauration, la Commission européenne en reconnaissait les effets bénéfiques sur l’activité économique et l’emploi, en France comme chez nos partenaires.

Le compromis proposé par la présidence luxembourgeoise à la fin du premier semestre de 2005 n’a pas été adopté. Il définissait un mécanisme de flexibilité donnant aux États membres la faculté d’appliquer jusqu’au 31 décembre 2015 un taux réduit de TVA sur les services de restauration et certains services à haute intensité de main-d’oeuvre. Il pérennisait les dispositions spécifiques dont bénéficient les anciens États membres et prolongeait jusqu’au 31 décembre 2015 celles dont bénéficient les dix nouveaux États membres.

La présidence britannique a présenté, entre septembre et novembre 2005, trois compromis successifs qui s’appuyaient assez largement sur le compromis luxembourgeois. Chaque fois, les services de restauration figuraient parmi ceux pour lesquels un taux réduit de TVA était possible, et la France s’y est à chaque fois ralliée. Le Parlement européen, quant à lui, a toujours soutenu la Commission et les différentes tentatives de compromis.

Cette situation de blocage est aujourd’hui essentiellement imputable à la position de six États membres : l’Allemagne, la Suède, le Danemark, la Slovaquie, l’Autriche et l’Estonie, soit pour des questions de principe, soit pour des raisons budgétaires relatives aux pertes de recettes fiscales.

Enfin, la réforme des taux réduits de TVA est plus que jamais nécessaire.

La France demande le maintien de l’application du taux réduit à la réparation et à la rénovation de logements et aux services à la personne, ainsi que l’extension de la même faculté à la restauration.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Michel Bouvard, rapporteur. Dans le secteur du bâtiment, ce taux réduit de TVA a permis la création de 50 000 emplois. En 1999, l’OFCE estimait à 25 000 le nombre de créations d’emplois qu’induirait cette mesure : nous en avons créé le double. Un supplément de 2 milliards d’euros de travaux a en outre été généré chaque année, accompagné de 500 millions de recettes fiscales et sociales supplémentaires par an, d’une rénovation croissante de l’habitat et d’une lutte plus efficace contre le travail clandestin. Des études ont montré que la diminution du taux de la TVA s’est traduite par une répercussion à hauteur de 75 % sous forme de baisse des prix.

La situation particulière de la restauration mériterait une mesure analogue. En France coexistent deux taux : un taux plein pour la restauration traditionnelle, qui représente vraisemblablement moins de 50 % du secteur, et un taux réduit pour la restauration à emporter et la restauration rapide,…

M. François Rochebloine. La « mal-bouffe » !

M. Michel Bouvard, rapporteur. …ce qui crée des distorsions de concurrence. Le système actuel aboutit de fait à favoriser les fast-food, alors que notre pays, qui est celui de la gastronomie et du tourisme, devrait au contraire encourager la restauration traditionnelle. Cette dernière emploie 800 000 salariés, avec d’importants gisements potentiels d’emplois qui pourraient être utilisés si les métiers devenaient plus attractifs. Les professionnels estiment en effet que quelque 60 000 postes sont vacants dans la restauration et l’hôtellerie.

Cette mesure serait d’autant plus justifiée pour la restauration qu’il s’agit d’une activité à forte intensité de main-d’œuvre. Elle serait source d’un surcroît d’activité et on pourrait en attendre 40 000 autres emplois. Le secteur de la restauration emploie traditionnellement une grande proportion de jeunes salariés, souvent peu qualifiés, à qui il offre une première insertion sur le marché du travail. Nous devons avoir cette donnée présente à l’esprit, le secteur étant également un de ceux qui assurent encore la promotion sociale des salariés.

Les professionnels de la restauration se sont engagés à répercuter la baisse de TVA sur les salaires et sur les prix. Se posera en effet, monsieur le ministre, si la négociation aboutit, le problème des allègements de charges actuellement consentis, qui représente de la part du Gouvernement un effort de 800 millions d’euros.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Michel Bouvard, rapporteur. La profession devrait s’engager à une consolidation de l’ensemble des mesures prises en sa faveur.

Cette mesure attendue par les professionnels permettra en outre aux restaurateurs de programmer et de réaliser des investissements qui ont jusqu’à présent été reportés.

Des taux réduits sur ces services ne gêneraient nullement nos partenaires européens, dans la mesure où ils s’appliquent à des services de proximité qui ne sont pas soumis à la concurrence européenne ou internationale. Ils ne créent donc aucune difficulté de fonctionnement pour le marché intérieur.

M. Jean Lassalle et M. François Rochebloine. Très bien !

M. Michel Bouvard, rapporteur. Pour toutes ces raisons et en prévision du conseil européen qui se tiendra demain et après demain à Bruxelles, l’Assemblée nationale se doit – telle est du moins la position unanime de la commission des finances – d’apporter par son vote sur la proposition de résolution un soutien franc et massif au Gouvernement dans cette négociation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le président de la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne.

M. Pierre Lequiller, président de la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la deuxième fois cette semaine, nous sommes réunis pour un débat concernant l’Europe. Le Parlement est ainsi mieux associé au processus de décision européen, et je m’en réjouis.

L’objectif de la pérennisation du taux réduit de TVA de 5,5 % pour les travaux sur les logements anciens et de son extension à la restauration sur place est essentiel. Cette mesure est favorable à l’emploi et à la croissance.

L’application de la TVA à taux réduit a créé de 50 000 à 60 000 emplois dans le bâtiment. Il s’agit maintenant d’étendre ce modèle au secteur de la restauration, selon des modalités qui seront fixées dans le cadre d’un accord avec la profession, comme nous l’a indiqué jeudi dernier le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

Telle est la position clairement affirmée par la délégation pour l’Union européenne, qui a déjà adopté une résolution en ce sens. Le rapport d’information de 2003, présenté par M. Daniel Garrigue au nom de la délégation, intitulé Taux réduits de TVA : une réforme nécessaire, en rappelle les motifs. De ce fait, la préservation et l’extension du taux réduit expriment aussi la position de l’Assemblée nationale. Cette résolution de 2003 est en effet devenue définitive après quelques aménagements de la commission des finances.

En adoptant la proposition de résolution de Michel Bouvard, l’Assemblée affirmera son plein soutien au Gouvernement dans une négociation difficile. La décision communautaire, qui est indispensable, exige en effet l’unanimité des vingt-cinq États membres de l’Union européenne. La France doit donc convaincre du bien-fondé de sa demande les vingt-quatre autres pays, dont certains sont très réticents.

Cette résolution conforte notre volonté politique. Elle s’inscrit également dans le respect des règles et de l’esprit de l’Europe, qui reposent sur la négociation et le partenariat. De nombreuses assemblées parlementaires en Europe ont des pratiques similaires avant les conseils européens.

Nous demandons en effet le soutien d’autres États membres dans cette difficile négociation, notamment celui de l’Allemagne qui, nous le savons tous, joue un rôle essentiel. Le Président de la République a rencontré la semaine dernière la chancelière Angela Merkel. En de telles circonstances, les contacts bilatéraux se poursuivent jusqu’au dernier moment.

Le geste politique que nous accomplirons aujourd’hui sera un appui appréciable pour la négociation en cours. La proposition de résolution de Michel Bouvard, adoptée à l’unanimité par la commission des finances, représente donc la voie de l’efficacité, et c’est pourquoi elle est tout à fait bien venue.

Elle permet à l’Assemblée, à un moment clef, de rappeler sans ambiguïté son soutien au Président de la République et au Gouvernement, lequel, selon les termes mêmes du Premier ministre hier après-midi, fera tout pour que cet engagement soit tenu.

Pour sa part, la Délégation est déjà intervenue en ce sens hier soir, en émettant elle aussi, à l’unanimité, un avis favorable à l’adoption de la résolution n° 2730. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Thierry Mariani, premier orateur inscrit.

M. Thierry Mariani. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, en ma qualité de député de Vaucluse comme en tant que président du groupe d’étude de notre assemblée sur les métiers de l’hôtellerie et de la restauration, je me réjouis de cette résolution qui tend à démontrer la volonté de notre assemblée de voir le Gouvernement obtenir de nos partenaires européens le droit de baisser à 5,5 % la TVA sur la restauration.

Bien évidemment le Gouvernement peut compter sur le soutien du groupe UMP sur ce texte qui nous permet d’affirmer devant la représentation nationale, nos partenaires européens et tous les restaurateurs, la volonté de l’ensemble des députés de la majorité présidentielle – et, je l’espère, de tous les membres de notre assemblée – de voir aboutir sur ce dossier la promesse du Président de la République, Jacques Chirac, souvent réitérée et renouvelée par les différents gouvernements.

Pour autant, je persiste à penser, comme jeudi dernier, que cette proposition de résolution est une solution a minima. En effet, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement a préféré utiliser la procédure du vote bloqué plutôt que de laisser la majorité adopter un amendement en ce sens, cosigné pourtant par 202 députés, c’est-à-dire par la majorité du groupe UMP. C’est dommage !

M. René Couanau. Dommage, en effet !

M. Thierry Mariani. Sinon vous auriez pu, monsieur le ministre, arriver demain à Bruxelles fort d’un vote de l’Assemblée nationale et de votre groupe parlementaire, qui aurait démontré tout notre attachement à la concrétisation de nos promesses et notre soutien au Gouvernement. Comme l’a en effet rappelé M. Goasguen, dans la norme juridique, une loi est d’un niveau plus élevé qu’une résolution.

En tout cas vous irez demain à Bruxelles avec cette résolution qui, je l'espère, sera adoptée à l'unanimité. Je tiens à vous dire que je vous fais confiance pour continuer à négocier l’obtention d’un taux réduit de TVA en faveur de la restauration et pour aboutir.

Pour autant, je m'interroge sur deux points.

Première hypothèse : les négociations européennes aboutissent demain.

M. Pascal Terrasse. C’est toute la question !

M. Thierry Mariani. Quand pourrons-nous alors effectivement baisser la TVA sur la restauration ?

M. René Couanau. C’est pas demain la veille !

M. Yves Bur. Tout de suite !

M. Pascal Terrasse. Après les présidentielles !

M. Thierry Mariani. Vous nous avez indiqué, dans cet hémicycle, que vous négocieriez à nouveau avec les restaurateurs. Pourtant André Daguin, président de l'UMIH, avait déjà conclu un accord gagnant-gagnant en juin 2004…

M. Augustin Bonrepaux. Pour qui ?

M. Thierry Mariani. …avec le ministre d’État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de l'époque, Nicolas Sarkozy. Au terme de cet accord, les restaurateurs ont – en contrepartie des aides à l'emploi Raffarin – amélioré les conditions de travail de leurs salariés et renforcé l'attractivité du secteur en augmentant le SMIC hôtelier. Il faut souligner que le secteur a globalement augmenté ses salaires de 16 % depuis 2004.

Monsieur le ministre, j’ai récemment découvert une note de la DARES – la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques –, organisme qui dépend du ministère de l’emploi, indiquant : « C'est en effet dans cette branche que le salaire de base mensuel a le plus augmenté. L'indice de salaire de la branche a progressé de 3,3 % sur l'ensemble de l’année alors que l'augmentation pour l'ensemble des secteurs d'activité a atteint 2,6 %. »

De plus, le SMIC mensuel du secteur de l’hôtellerie-restauration est désormais supérieur de 275 euros au SMIC de droit commun. C’est-à-dire que les aides accordées ont produit des effets en améliorant sensiblement les salaires et l’attractivité de l’hôtellerie-restauration.

Ce secteur attend cette baisse de la TVA pour pouvoir embaucher. Autour de moi, dans cet hémicycle, nombreux sont les députés qui connaissent des patrons de restaurants qui font 35 heures en deux jours, ne prennent pas de jours de congé hebdomadaire, ont du mal à poser leurs vacances car ils ne parviennent pas à recruter. (« Très juste ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Cette baisse de la TVA ne résoudra bien sûr pas tous les problèmes, mais elle permettra certainement d’y parvenir partiellement.

Je précise que l'hôtellerie-restauration est, selon l'observatoire de l'ANPE, le troisième secteur qui a créé le plus d'emplois au cours du second semestre de 2004 : plus de 10 000 emplois créés. Si les restaurateurs ont créé 10 000 emplois en six mois avec la baisse des charges, il est bien évident que la promesse de créer 40 000 emplois, faite par leurs représentants syndicaux, notamment le président de l'UMIH, a de fortes chances d’être tenue avec la baisse de la TVA à 5,5 %.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer dans quel texte nous inscrirons la baisse effective de la TVA sur la restauration si les négociations européennes aboutissent ?

Cela étant, il est une seconde hypothèse : les négociations européennes n'aboutissent pas. Que ferons-nous alors pour tenir nos engagements ?

M. Pascal Terrasse. Vous serez battus !

M. Thierry Mariani. Les députés de notre majorité ont été élus en 2002 pour mettre en œuvre le projet législatif de notre président. Nous avons promis aux restaurateurs que nous baisserions la TVA sur la restauration traditionnelle le 1er janvier 2006. Nous devons tous tenir nos engagements. Il en va de la crédibilité de notre majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Ma question est donc simple : le 19 décembre, lors de la présentation du projet de loi de finances rectificatives au Sénat, le Gouvernement français pourra-t-il enfin décider de faire jouer le principe de subsidiarité ?

Monsieur le ministre, avec la cinquantaine de collègues qui étaient présents jeudi soir, nous avons longuement évoqué cette possibilité. Quelle que soit notre position par ailleurs, nous sommes tous d’accord sur l’objectif. Cependant nous sommes nombreux à penser, en voyant l’Allemagne décider seule d’augmenter ses taux de TVA, que nous avons peut-être au Parlement le droit de choisir seuls de baisser la TVA sur des prestations locales et non délocalisables, comme la restauration traditionnelle.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Thierry Mariani. C’est le principe de subsidiarité.

Monsieur le Ministre, comme mes collègues du groupe UMP, je voterai bien sûr cette résolution présentée par Michel Bouvard.

M. Jean Lassalle. Moi aussi !

M. Thierry Mariani. Toutefois, avec les 202 députés qui ont signé l’amendement défendu jeudi dernier, je vous demande solennellement, si les négociations européennes n'aboutissent pas, de tout faire pour que nous puissions tenir nos engagements pris en 2002 devant les restaurateurs et devant les Français, et peut-être, une prochaine fois, de nous laisser voter l’amendement que nous avions déposé.

M. René Couanau. L’espoir fait vivre !

M. Thierry Mariani. Sur ce dossier, vous le savez, nous avons une obligation de réussir, parce que c’est une promesse que nous avons faite, parce que c’est une nécessité pour l’emploi dans ce secteur, et aussi, comme le montre déjà le résultat des premières mesures Raffarin, parce que c’est également un secteur dans lequel nous pouvons améliorer la condition sociale des personnes qui y travaillent. Ces mesures Raffarin ont déjà posé une première pierre ; il nous appartient maintenant, avec cette baisse de la TVA que, je l’espère, vous obtiendrez demain, de poser la seconde et dernière pierre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec un sentiment d’amertume que s’engage ce débat relatif à la baisse de la TVA sur la restauration. En effet, alors qu’un conseil des ministres va se tenir pour traiter des questions fondamentales pour l’avenir de l’Union européenne, puisque c’est l’intégralité de nos choix budgétaires communs qui est en jeu, l’Assemblée nationale française ne se prononcera par un vote que sur la question bien particulière, très réductrice, de la TVA sur la restauration. Sur la question fondamentale du budget européen, sur l’avenir de l’Europe, il nous a été interdit de voter ! Cela illustre parfaitement, monsieur le ministre, votre absence de vision constructive et solidaire de la politique européenne.

Nous continuons d’affirmer, comme l’a rappelé hier Jean-Louis Bianco au nom du groupe socialiste, que la position de la France exprimée par le Gouvernement ne peut en aucun cas constituer une réponse aux enjeux présents et futurs du développement de l’Union. La position qui refuse toute progression du budget européen est suicidaire. Elle rend impossible le respect des engagements en matière de recherche et d’investissements, elle ne donne pas à l’Union les moyens d’assurer la réussite de l’intégration des nouveaux États membres, elle nous prive de tout moyen commun d’action en matière de développement économique et social.

La seule préoccupation de la majorité parlementaire est aujourd’hui de faire passer la pilule de ses renoncements auprès des restaurateurs.

M. Thierry Mariani. Oh !

M. Augustin Bonrepaux. Triste spectacle que cette vision de l’Europe, dont vous ne sortirez pas grandis.

Les socialistes, de leur côté, n’ont pas à rougir des mesures qu’ils ont proposées au Parlement dans ce domaine au cours des dernières années. Entre 1997 et 2002, nous avons pris, en matière de TVA, des mesures générales et des mesures ciblées. Cela n'avait pas été le cas sous la législature précédente.

M. Pascal Terrasse. Ils avaient augmenté la TVA !

M. Augustin Bonrepaux. Vous avez certainement oublié que la TVA avait augmenté de deux points, passant de 18,6 % à 20,6 %.

M. Pascal Terrasse. Avec Juppé le Canadien !

M. Guy Geoffroy. Pour payer vos dettes !

M. Augustin Bonrepaux. À l'époque, nous n’avions pas entendu de voix s’élever dans votre majorité pour s'inquiéter des conséquences qu'une telle mesure pourrait avoir sur certains secteurs d'activité, y compris celui de la restauration.

Nous avions ensuite, pour notre part, baissé la TVA d'un point, la ramenant de 20,6 % à 19,6 %, et plaidé en faveur de baisses ciblées, les plus importantes d'entre elles concernant les travaux dans les logements et les services à domicile. Nous avions saisi l'occasion de la réouverture de ce dossier en 1999 pour formuler nos propositions en faisant preuve, je crois, d'une grande détermination. Au reste, l'initiative n'est pas tant venue du Gouvernement que de l'Assemblée,…

M. Michel Bouvard, rapporteur. Ça, c’est certain !

M. Augustin Bonrepaux. …en particulier de la commission des finances et du groupe socialiste.

M. Michel Bouvard, rapporteur. C’était le groupe RPR qui avait fait inscrire la résolution à l’ordre du jour !

M. Augustin Bonrepaux. À l'initiative de la commission des finances et du groupe socialiste, nous avions donc voté une proposition de résolution. Le gouvernement de l'époque, notamment le ministre de l'économie et des finances, s'était engagé à défendre cette position et il était parvenu à convaincre nos partenaires européens. Seulement il est vrai que la force de conviction de la France était telle à l’époque qu'elle pouvait emporter l'adhésion de nos partenaires. Nous avions fait le choix d'une baisse ciblée de la TVA sur les travaux dans les logements et sur les services à domicile, et nous ne le regrettons pas car ces secteurs sont utiles, particulièrement pour les personnes âgées, qui recourent de plus en plus aux services à domicile.

C'est pourquoi il faut d’abord obtenir la reconduction et la pérennisation de ce dispositif. Nous souhaitons que le Gouvernement français obtienne toutes les assurances dans ce domaine et que les quelques réponses qui ont été apportées soient concrétisées afin de permettre à ce très bon dispositif de bénéficier d'une visibilité à long terme. Vous nous reprochez parfois d'avoir dilapidé les fruits de la croissance en gâchant les capacités dont nous disposions, mais vous êtes bien contents que nous ayons proposé et obtenu la réduction ciblée de la TVA pour les travaux dans les logements, ainsi que d'autres mesures qui ont conduit à des créations d'emplois et à une réelle baisse du chômage, ce qui n’est plus le cas actuellement.

S'agissant de la restauration, je vous fais observer que, sous la législature précédente, nous avons pris une mesure dont les restaurateurs ont été les principaux bénéficiaires : celle de la suppression de la base salaires de la taxe professionnelle. Pour l’instant, nous avons fait beaucoup plus que vous en faveur de ce secteur. Au moment de la campagne présidentielle, nous avions également porté la revendication d'un taux réduit de TVA pour la restauration et Lionel Jospin s'était engagé à soutenir cette proposition.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Vous ne l’aviez pas soutenue comme le Premier ministre !

M. Augustin Bonrepaux. Lorsque nous étions interrogés à ce sujet, nous répondions qu'il fallait attendre la renégociation des différentes annexes en 2002 et que l’accord de l’Europe était indispensable. Lionel Jospin avait d'ailleurs eu l'honnêteté de s'engager en faveur de cette nouvelle réduction ciblée tout en précisant qu'il ne pouvait pas garantir le résultat, compte tenu des règles qui s'imposent à la France au niveau européen. Il a toujours tenu, lui, un langage responsable. Ce n’est pas le cas de Jacques Chirac !

À l’en croire, rien de plus facile ! On voulait le taux réduit de TVA ? On l'aurait dès qu'il serait réélu ! Chaque premier de l'an, de nombreuses promesses ont été faites, mais le plus difficile, bien sûr, est ensuite de les tenir. Vous avez même fait inscrire en 2003, dans la loi de finances pour 2004, une disposition concernant une baisse conditionnelle de TVA, mais sans en prévoir le financement. On peut comprendre l'exaspération des restaurateurs auxquels on a fait croire, depuis 2002, que tout était acquis. L'erreur a surtout été de laisser penser que la France pouvait obtenir seule cette décision.

Le président Jacques Chirac n'a d'ailleurs pas été le seul à en faire la promesse : vous tous, au sein de la majorité, vous avez répété, pendant les élections, que tout pouvait changer du jour au lendemain. À vouloir dissimuler de la sorte la vérité, vous avez beaucoup déprécié la classe politique et, aujourd’hui, vous vous trouvez confrontés à de réelles difficultés. Le problème, c'est que l'UMP n'a jamais tenu un discours responsable vis-à-vis des restaurateurs, ce qui place ses députés en position délicate dans leurs circonscriptions.

Cela étant, nous souhaitons, nous aussi, une réduction ciblée de la TVA, et nous voulons que le Gouvernement puisse l’obtenir, car elle serait utile pour ce secteur, à condition que les professionnels s'engagent sur un certain nombre de points que je vais préciser. Nous espérons que les négociations ne seront pas trop longues, une fois obtenu l'accord de nos partenaires européens, pour que cette baisse puisse devenir effective. Nous soutenons donc fermement cette initiative, même si nous regrettons la démagogie dont beaucoup d'entre vous ont fait preuve au sujet de cette mesure.

M. François Rochebloine. Il y en a autant d’un côté que de l’autre !

M. Augustin Bonrepaux. En ce qui nous concerne, nous n'avons jamais changé d'avis et nous continuons à défendre la TVA réduite pour la restauration, à la fois pour soutenir ce secteur et pour supprimer les distorsions de concurrence entre la restauration traditionnelle et la restauration rapide.

M. Pascal Terrasse. Absolument ! Excellent !

M. Augustin Bonrepaux. Cependant, il est indispensable que des engagements précis soient pris par le secteur de la restauration, car il a déjà bénéficié d’une réduction de 1,5 milliard d’euros et nous n’avons pas constaté de réelle amélioration des conditions de travail du personnel, de revalorisation des salaires ou de création d’emplois.

M. René Couanau. C’est vrai !

M. Augustin Bonrepaux. Cette baisse ne devrait donc être accordée que dans le cadre d’un contrat précisant les engagements en matière de création d’emplois,…

M. François Rochebloine. C’est le cas !

M. Augustin Bonrepaux. …de revalorisation des salaires, d’amélioration des conditions de travail et de baisse de prix pour les consommateurs. Nous soutenons fermement cette résolution et nous voulons espérer, monsieur le ministre, que, malgré la démagogie et l’hypocrisie de la majorité tout entière depuis les campagnes électorales de 2002, malgré aussi la situation calamiteuse de nos comptes publics, vous pourrez obtenir cette décision.

J’en profite pour constater que la proposition de résolution qui nous est soumise signe l’arrêt de mort d’une autre de vos promesses électorales, celle concernant l’application des taux réduits aux produits culturels, tels que les livres.

Cependant, je suis un peu surpris que la commission des finances puisse aborder ce projet avec cette détermination, avec de tels arguments, sans se poser la question de son financement. Cela représente tout de même un coût de 3 milliards.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Mais non !

M. Augustin Bonrepaux. Elle ne se pose pas cette question, au moment où le rapport Pébereau préconise l’arrêt des baisses d’impôt et souligne l’endettement exceptionnel – plus de 1 100 milliards d’euros – de notre pays, malgré la décrue, entre 1997 et 2002,…

M. François Rochebloine. Il y avait la croissance à cette époque !

M. René Couanau. Alors monsieur Bonrepaux, êtes-vous d’accord ou pas avec cette résolution ?

M. Augustin Bonrepaux. …due au gouvernement Jospin !

Puisque la commission des finances ne le demande pas, il est indispensable, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez dès à présent les dispositions que vous comptez prendre afin que, comme l’a demandé Thierry Mariani, cette baisse puisse s’appliquer au plus tôt.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Augustin Bonrepaux. Alors que la commission Pébereau vous recommande de ne plus baisser les impôts, vous avez déjà décidé, je vous le rappelle, une nouvelle baisse, non financée, de 3,6 milliards d’euros.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous vous faites plaisir !

M. Augustin Bonrepaux. Cette baisse ne s’appliquant que l’année prochaine, vous laissez à vos successeurs le soin de la financer.

Pouvez-vous encore ajouter 3 milliards d’euros supplémentaires sans financement, et aggraver d’autant le déficit et la dette ?

M. Michel Bouvard, rapporteur. Cela ne fait pas 3 milliards !

M. Augustin Bonrepaux. Il y a dès maintenant des arbitrages à faire : je souhaite que vous nous en informiez.

La loi de finances pour 2004 prévoit en effet que la réduction de TVA s’appliquerait dans les quatre mois qui suivraient la décision de l’Union européenne.

M. Didier Migaud. Quatre mois : c’est long !

M. Augustin Bonrepaux. Il est donc impératif de prévoir ce financement dans la loi de finances pour 2006, à moins qu’il ne s’agisse encore d’une promesse pour les élections de 2007 ! (Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – « Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Yves Bur. Soyez sérieux, monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux. Il ne saurait en outre être question qu’une telle mesure soit financée par régulation budgétaire et par une suppression de crédits sur la plupart des postes du budget au détriment de secteurs déjà en difficulté. Surtout il est inenvisageable que cela se réalise en dehors de l’Assemblée nationale.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous vous posons des questions précises.

Premièrement, allez-vous transmettre l’addition de cette baisse d’impôt à vos successeurs, ce qui représenterait une note totale de 6,6 milliards d’euros et, par conséquent, une aggravation de la dette ?

Deuxièmement : allez-vous procéder à des arbitrages dans le prochain budget et réduire les autres baisses d’impôt non financées ou les dépenses pour 2006 ? Ou encore – troisième hypothèse – envisagez-vous un collectif budgétaire dans les quatre mois qui viennent pour assurer le financement de cette réduction ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Le 3 juillet 2002, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, s'est présenté devant notre assemblée nouvellement élue pour sa déclaration de politique générale. Il se déclarait « déterminé à convaincre nos partenaires européens de la nécessité de baisser à 5,5 % le taux de TVA sur la restauration », car il s'agissait d'un « secteur créateur d'emplois ». Il s'engageait ainsi à faire aboutir la promesse faite aux Français par le Président Jacques Chirac lors de la campagne présidentielle.

Mes chers collègues, où en sommes-nous trois ans plus tard ? Malheureusement toujours dans la même situation, c'est-à-dire dans l'attente d'un accord européen qui permettrait d'instaurer un taux réduit de TVA de manière durable dans le secteur de la restauration et du bâtiment.

Depuis 1999, des taux de TVA réduits sont autorisés à titre temporaire sur une liste de services à haute intensité de main-d'œuvre, dans toute l'Union européenne. La France bénéficie ainsi d'un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux sur les locaux d'habitation de plus de deux ans. Initialement prévu pour une application jusqu'au 31 décembre 2002, ce dispositif a été prolongé par deux fois, désormais jusqu'au 31 décembre prochain.

Arrivant au terme de ce dispositif dérogatoire, il est aujourd'hui question d'une pérennisation de cette possibilité de taux réduit de TVA dans certains secteurs et d’y inclure la restauration.

La France avait soutenu les propositions luxembourgeoises et britanniques qui n'ont malheureusement pas su faire émerger un accord entre l'ensemble des États membres, la règle de l'unanimité s’appliquant pour les questions relatives à la TVA. On retrouve un problème que l'UDF soulève depuis plusieurs années : le mariage des deux règles que sont l'harmonisation et l’unanimité paralyse la construction européenne.

Ainsi le conseil ECOFIN du 6 décembre n'a pas permis de dégager un accord. La décision a donc été renvoyée au conseil européen des 15 et 16 décembre, voire au 24 janvier 2006, date du prochain conseil ECOFIN.

C'est dans ce contexte que, par ma voix et celle de Jean-Pierre Abelin, le groupe UDF a pu exprimer à deux reprises, lors des séances de questions au Gouvernement, l'intérêt qu'il porte à l'instauration d'un taux réduit de TVA dans les secteurs du bâtiment et de la restauration.

Il nous semble donc important de soutenir les démarches de la délégation française puisque les effets positifs sur l'emploi et l'activité économique sont remarquables.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. François Rochebloine. Dans le seul secteur du bâtiment, le taux réduit de TVA a permis la création de 50 000 emplois, comme l’a rappelé le rapporteur. Il a aussi généré 500 millions d’euros de recettes fiscales et sociales supplémentaires, résultant d'une activité économique dynamisée avec un chiffre d'affaire en augmentation de plus de 2 milliards d'euros par an.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Ce sont en effet les chiffres annuels !

M. François Rochebloine. Au-delà de l'aspect économique, il convient de souligner que ce dispositif a permis d'entreprendre une rénovation de l'habitat et de lutter contre le travail au noir ; le rapporteur l’a aussi rappelé. De plus, le coût de cette mesure est budgété, monsieur le ministre, dans le projet de loi de finances pour 2006.

En revanche, pour le secteur de la restauration, la situation est particulière. En effet, à la différence de la TVA relative aux travaux dans le bâtiment, le Gouvernement n'a pas inscrit dans le budget le coût de cette mesure, ce qui risque d'affaiblir quelque peu sa crédibilité dans la négociation.

Cependant, l'instauration d'un taux de TVA réduit à 5,5 % relève du bon sens et de l'équité, puisqu'il s'applique déjà dans le secteur de la restauration à emporter. Il convient donc de l'instaurer également dans le secteur de la restauration traditionnelle, pour éviter tous les effets de distorsions de la concurrence.

Dans les deux cas, un taux réduit de TVA ne fausserait pas la concurrence au sein du marché intérieur. Pour des raisons politiques, économiques ou sociales, l'instauration d'un taux réduit de TVA dans ces deux secteurs nous semble primordiale.

Au nom du groupe UDF, je veux rappeler que l'application d'un taux réduit de TVA dans les secteurs du bâtiment et de la restauration doit s'accompagner de créations d'emplois, d'une hausse des salaires et d'une baisse des prix pour les consommateurs.

Le Gouvernement français se trouve donc aujourd'hui face à ses responsabilités et aux engagements pris devant les citoyens par le Président de la République. Les promesses non tenues ont pendant trop longtemps alimenté la désaffectation des Français à l’égard des élus politiques. Respectons donc aujourd'hui nos promesses d'hier.

Soutenant la délégation française dans ses négociations au niveau de l'Union européenne, le groupe UDF votera cette proposition de résolution. Nous comptons fermement sur votre détermination et votre engagement, monsieur le ministre, pour obtenir un résultat positif. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Je tiens d’abord à dire à mes collègues de la majorité qu’après le temps de l’inaction et de la soumission vient pour eux celui de l’empressement, ou, plutôt, de la frénésie !

M. Jean-Claude Sandrier. Très juste !

M. Jacques Desallangre. Pour camoufler votre incapacité à obtenir satisfaction, vous avez en effet inscrit à l’ordre du jour un projet de résolution sans force contraignante visant à faire allégeance au Gouvernement, sous couvert d’une agitation aussi forte que soudaine.

Ce brutal changement d'ordre du jour vise à dissimuler votre soumission, alors que monte la fronde des restaurateurs. Cette petite manœuvre est aussi destinée à tenter de faire patienter ces derniers, selon le principe qu’une promesse maintes fois renouvelée deviendrait une fiction que quelques naïfs pourraient prendre pour la réalité.

Toutefois les Français et les restaurateurs ne sont pas des naïfs et ils ne vous croiront pas lorsque, pendant la prochaine campagne électorale, vous leur promettrez encore, la main sur le cœur, d’obtenir la TVA à 5,5 %.

M. François Rochebloine. Ce sera réglé avant !

M. Jacques Desallangre. Je l’espère, monsieur Rochebloine, mais le ministre n’a pas l’air d’en être aussi persuadé que vous.

M. Jean-Claude Sandrier. Quatre ans de perdus !

M. Jacques Desallangre. Au-delà de vos petites tactiques parlementaires opportunistes, il faut nous attacher au fond du problème.

Nous n'avons pas besoin d'une résolution soutenant l'action – ou plutôt l'inaction – d'un gouvernement frappé d'atonie. Présentez-nous une loi : nous la voterons ! Votons immédiatement le passage de la TVA à 5,5 % comme nous nous y sommes engagés et arrêtons de tergiverser. Plus encore que d’un soutien, le Gouvernement a besoin d’une correction qui le remette dans le chemin de ses engagements.

Nous avons toujours – est-il besoin de le rappeler – soutenu sans faille et sans discontinuité ces propositions. Notre engagement s'est exprimé dès la précédente législature. En 1997, j'interrogeais déjà avec certains de mes collègues les ministres de l'époque sur les disparités frappant la restauration traditionnelle taxée à 20,6 %, contre 5,5 % pour la restauration à emporter. La réponse qui me fut apportée n'était pas à la hauteur de mes attentes, mais elle présentait l'avantage de la franchise : au moins n’était-elle pas l'œuvre d’un tartuffe.

Insatisfait de la réponse, j'ai, comme nombre de députés opiniâtres, renouvelé la question en 2001. La réponse du Gouvernement sembla s'assouplir, tout en restant insuffisante. Avec quelques collègues, j'ai donc déposé le 16 mai 2001 une proposition de loi visant à « favoriser le développement de l'emploi dans la restauration par l'extension à l'ensemble de ce secteur du taux réduit de TVA ».

M. Jean-Claude Sandrier. C’était trop tôt !

M. Jacques Desallangre. Nous considérions que la différence des taux créait une distorsion de concurrence et que l'application du taux réduit aux activités à forte intensité de main d'œuvre devait permettre la création d'emplois.

Une enquête réalisée en mars 2000 auprès de plus de 3 600 restaurateurs faisait apparaître que l'harmonisation des taux de TVA à un niveau réduit se traduirait en premier lieu par une baisse des prix. Il est de l'intérêt des professionnels de la restauration traditionnelle et populaire de faire tout leur possible pour restaurer des conditions concurrentielles favorables à la pérennité de leurs établissements.

Dès lors, il est probable qu'une baisse des prix se traduirait par un nouvel essor de l’ensemble de la restauration, et plus particulièrement de la restauration traditionnelle. Elle viendrait ainsi conforter les nombreux commerces de proximité et de très petites entreprises présentes dans ce secteur. Implantées en milieu rural, celles-ci prennent une part essentielle dans le maintien de l'activité et contribuent à la mise en œuvre d'une politique active que l'on pourrait qualifier de « non-déménagement du territoire ». En ville, elles assurent le maintien du lien social et d'une réelle convivialité.

Par ailleurs, près de 85 % des restaurateurs investiraient pour améliorer la qualité des prestations offertes et plus de 80 % des entreprises sont prêtes à embaucher au moins une personne par établissement. On sait en effet qu'il existe un fort potentiel d'emplois dans l'hôtellerie et la restauration. On peut estimer au minimum à 40 000 le nombre d'emplois supplémentaires susceptibles d'être créés dès la première année grâce à une baisse de la TVA à 5,5 %.

En outre, une baisse de TVA permettrait de lutter efficacement contre les activités et les revenus dissimulés. Elle permettrait aussi à ce secteur de s'engager dans l'ère de la modernité en développant une véritable politique d'embauche et d'amélioration des conditions de travail.

Ce taux réduit est parfaitement possible au regard des règles de droit communautaire. Bien que la sixième directive européenne prévoie l'application du taux normal de TVA à la restauration, on note que huit États membres bénéficient de dérogations pour appliquer un taux réduit.
L’application d’un taux réduit est donc parfaitement envisageable, notre pays pouvant s’aligner sur les principales destinations touristiques européennes, lesquelles appliquent un taux réduit à la restauration, la France faisant exception.

À titre d’exemple, une directive dérogatoire du 30 mars 2000 a validé rétroactivement – rétroactivement ! – la possibilité, pour le Portugal, d’appliquer un taux réduit à sa restauration. La France pourrait suivre le même exemple.

Quant au coût budgétaire, la baisse des prix, qui correspond à un engagement de la profession, entraînera une augmentation de la fréquentation donc du chiffre d’affaires de la restauration traditionnelle, créant, par là même, de nouvelles recettes fiscales, comme ce fut le cas pour le secteur du bâtiment. En outre, cette disposition se traduira, de manière incontestable, par des créations d’emplois, ce qui viendra alléger les charges pesant sur nos régimes sociaux en en accroissant les ressources.

Notre volonté n’a pas faibli avec le changement de gouvernement puisque, en juillet 2002, puis en octobre de la même année, mon collègue, Jean-Claude Sandrier, a défendu un amendement visant à modifier l’article 279 du code général des impôts, afin d’unifier le taux de TVA à 5,5 % pour l’ensemble de la restauration.

M. Jean-Claude Sandrier. Eh oui !

M. Jacques Desallangre. Combien y a-t-il eu, à ce moment, de députés de la majorité pour soutenir notre proposition ?

M. Jean-Claude Sandrier. Bonne question !

M. Jacques Desallangre. Zéro !

Il est très simple de le vérifier puisque nous avions demandé un scrutin public, afin que chacun prenne ses responsabilités en toute transparence. Je tiens le résultat à la disposition de quiconque le désire.

Quels étaient, il y a trois ans, les arguments du gouvernement Raffarin et de sa majorité UMP-UDF ? Notre rapporteur évoquait une « opportunité sans précédent » en 2003 et vous-même, monsieur le ministre, déclariez que le vote du Parlement gênerait le Gouvernement et handicaperait la position française à Bruxelles. C’est ce que vous avez encore répété, il y a huit jours. Vous dites le contraire aujourd’hui. Est-ce la girouette qui tourne ou le vent ?

Citons les propos que tenait le rapporteur en 2002 : « La commission des finances a émis un avis défavorable à ces amendements mais elle a souhaité, à l’unanimité, que cette négociation puisse aboutir en 2003 pour une mise en place effective au plus tard en 2004. » Nous sommes à la fin de décembre 2005 : trois années ont passé, sans aucun résultat positif.

Le ministre, pour sa part, assurait la représentation nationale – déjà ! – de la détermination du Gouvernement, de « sa volonté sans faille » et, convaincu, affirmait : « Nous y parviendrons au cours de l’année 2003. » Déjà ! Il demandait, évidemment, que le Parlement ne s’en mêle pas et qualifiait notre amendement d’inopportun : « Une telle initiative serait de nature à compromettre l’issue de la négociation et nous exposerait peut-être d’ailleurs immédiatement à une procédure d’infraction initiée par l’un de nos partenaires qui ne voudrait pas, à terme, adopter cette solution. »

Votre initiative d’aujourd’hui apparaît donc comme opportuniste et, j’ose le dire, à la limite de la démagogie.

M. Jean-Claude Sandrier. Que de temps perdu !

M. Jacques Desallangre. Je vous le dis franchement, nous sommes, les uns et les autres, Gouvernement et représentation nationale, au coude à coude dans cette affaire. Ce qu’il nous faut, ce n’est pas vaincre ici, sur notre petit territoire, c’est aboutir. Et aboutir, c’est négocier, négocier en convainquant, en faisant partager notre conviction et notre détermination. C’est cette volonté et cette détermination que j’exprime ici ce soir. Si vous voulez apporter votre aide, suivez mes recommandations.

Mes chers collègues de l’UMP et de l’UDF, vous vous êtes, naguère, soumis aux injonctions du Gouvernement et avez retiré, en catimini, presque honteusement, vos amendements sur ce sujet. Votre discrétion de l’époque est à la mesure du bruit que vous faites aujourd’hui. Est-ce pour calmer votre mauvaise conscience ?

En effet c’est toujours la même rengaine que nous entendons depuis 2002. La semaine dernière, encore, M. Copé n’a-t-il pas affirmé que nous n’avons jamais été aussi près d’aboutir et qu’il fallait donc rester tranquille ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est la vérité !

M. Jacques Desallangre. Mais faisons un peu de politique ! Votre embarras est compréhensible, car votre idéologie libérale (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) vous impose de favoriser les impôts proportionnels et indirects comme la TVA.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ah ! Ça tardait à venir !

M. Jean-Marc Nudant. Cela manquait !

M. le président. Du calme !

M. Jacques Desallangre. Il fallait que cela fût dit !

M. Michel Herbillon. Ce n’est pas nouveau !

M. le président. Monsieur Herbillon, vous allez pouvoir vous exprimer bientôt ! Écoutez M. Desallangre !

M. Jacques Desallangre. Oui, même si c’est un peu désagréable !

Ce n’est pas nouveau, en effet, mais il faut le répéter car c’est toujours d’actualité.

N’oublions pas que l’ampleur du problème peut être imputée aux gouvernements de droite ; par exemple, au gouvernement Juppé, qui a augmenté de 2 % la TVA applicable à tous les biens ou services, donc à la restauration, en particulier. (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

La part des impôts directs dans les recettes de l’État est, en effet, plus faible en France que chez nos voisins. La part des impôts indirects, elle, est au-dessus de la moyenne des pays de l’Union européenne, représentant 34,1 % des recettes fiscales. La taxe sur la valeur ajoutée reste la principale recette fiscale de l’État : elle a rapporté, en 2004, 156 milliards d’euros contre 44,8 milliards pour l’impôt sur les sociétés. Ces chiffres illustrent la conception de la politique fiscale libérale en vigueur dans notre pays, mais aussi dans nombre d’autres.

La TVA est, en effet, un impôt dégressif et injuste car il pèse plus lourdement dans le budget des ménages modestes que dans celui des ménages aisés. À mesure que les revenus augmentent, la part consacrée à la consommation, rapportée au revenu global, diminue, alors que la propension à épargner, investir et spéculer augmente.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Alors, vous êtes contre la baisse de la TVA pour la restauration !

M. Jacques Desallangre. Non, c’est au contraire une raison supplémentaire pour nous de soutenir cette baisse, car nous sommes toujours favorables au rééquilibrage de la fiscalité et à la résorption de l’imposition indirecte proportionnelle. Nous souhaitons toujours une baisse générale de la TVA. Nous ne pouvons donc, ne serait-ce que par cohérence intellectuelle, que soutenir les demandes sectorielles dans les activités à forte intensité de main d’œuvre.

Pour nous, le réel critère de l’opportunité d’une telle mesure est son effet sur l’emploi, c’est-à-dire sur le nombre de créations nettes, mais aussi sur les conditions de travail et de rémunération des salariés. C’est au nom de ce principe que nous avions demandé et obtenu, lors de la précédente législature, l’application du taux de TVA réduit au secteur du bâtiment, qui permit la création de plus de 40 000 emplois et 500 millions de recettes fiscales et sociales, par la hausse du chiffre d’affaires global.

Et vous, qu’avez-vous fait depuis 2002 ? Vous n’avez cessé de nous opposer l’argument suprême : la directive européenne et donc le refus de Bruxelles !

On mesure la force du carcan européen qui nous empêcherait de décider quelles activités doivent être, sur notre territoire, soumises à telle ou telle fiscalité. Nous ne sommes plus maîtres de l’impôt, ni de battre monnaie. Avouez que c’est là un exemple de notre souveraineté piétinée.

Que de rigueur et de détermination en matière fiscale et économique, mais que nous ne voyons jamais en matière sociale. Y a-t-il des directives imposant un taux minimum de prélèvements sociaux sur les salaires ? Non. Pourtant, ce serait bien utile pour assurer les conditions d’une juste concurrence intracommunautaire.

Vous auriez, aujourd’hui, nous dites-vous, besoin du soutien du Parlement uni derrière cette revendication pour surmonter l’obstacle européen. Mais nous avons déjà voté, en 2003, une résolution allant en ce sens, mais il ne s’est rien passé ensuite, rien, car je reste persuadé que le Gouvernement n’en a pas la volonté. Si vous l’aviez, monsieur le ministre, pourquoi aurions-nous, sous la gauche, en 1999, obtenu de haute lutte, la TVA réduite sur le bâtiment, alors que vous êtes incapable de l’obtenir pour la restauration ?

M. Michel Bouvard, rapporteur. Vous auriez pu, à l’époque, l’obtenir aussi pour la restauration, comme les Portugais !

M. Jacques Desallangre. Étions-nous meilleurs négociateurs que vous ne l’êtes ? Non, mais sans doute y avait-il, alors, plus de volonté ; nos partenaires européens en avaient conscience et sentaient que nous ne transigerions pas. La négociation est un art et, dans le cas présent, les autres États voient dans votre jeu et savent que vous ne tenez pas vraiment à cette mesure.

Le rôle du Parlement, notre rôle est donc de vous forcer à la défendre et de vous donner plutôt qu’un vague soutien, une sorte de mandat impératif, vous empêchant de revenir bredouilles. Puisque vous ne semblez pas avoir cette volonté, nous devons l’avoir pour vous. Il serait donc souhaitable que la résolution soit modifiée. Plutôt que d’affirmer benoîtement que le Parlement « soutient la position du Gouvernement français », il serait plus judicieux d’écrire que le Parlement « impose au Gouvernement français de… ».

Par cette formulation impérative, nous signifierions au Gouvernement que le Parlement prête une attention rigoureuse à la négociation, et que c’en est fini des mesures dilatoires et des atermoiements qui durent depuis près de dix ans.

Permettez-moi une courte citation. « Jean-Pierre Raffarin me charge de vous dire, monsieur le député, qu’ils se sont inquiétés des risques de distorsion de concurrence que vous avez soulevés. Il a donc été demandé à la direction du tourisme et au service de la législation fiscale de se pencher sur cette question pour déterminer, d’une part, la réalité de la distorsion et, d’autre part, les solutions pouvant être appliquées pendant la période transitoire d’harmonisation. »

Autre citation : « Il reste, vous le savez, que le Gouvernement se veut toujours très attentif à la situation du secteur de la restauration dont la place dans la vie de notre pays et l’importance pour l’emploi sont reconnues. À cet égard, le Premier ministre a demandé que soit organisée une table ronde consacrée à l’examen de la situation économique de la restauration, notamment au regard des règles de TVA applicables dans ce secteur. Cette table ronde associera les professionnels et les départements ministériels concernés et permettra, je l’espère, de dégager un consensus dans ce domaine ».

Le problème, c’est que ces deux citations de ministres UMP datent de 1996 et 1997. Souhaitons, monsieur le ministre, que vous réussissiez, aujourd’hui, beaucoup mieux que les gouvernements Juppé et Raffarin !

Dans ce contexte, la discussion qui nous intéresse aujourd’hui, et qui relève, répétons-le, davantage d’une motion de soutien au Gouvernement et d’une opération de publicité politique, ne peut que susciter notre suspicion sur les profits politiques recherchés.

Si nous soutenons l’initiative de faire avancer le dossier auprès des autorités européennes, et soulignons en effet l’opportunité de cette mesure que nous avons toujours défendue, nous ne pouvons que dénoncer la stratégie qui consiste, pour la majorité, à défendre publiquement des positions qu’elle n’a pas été en mesure de faire prévaloir faute d’une réelle volonté politique. En fait, vous voulez engranger les bénéfices politiques d’un dossier qui n’a pas attendu la mobilisation de l’actuelle majorité pour obtenir des soutiens au sein même de cette enceinte parlementaire, bien au-delà de vos rangs. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.

M. Michel Herbillon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun ici a conscience, naturellement, que les négociations sur les taux réduits de TVA s’annoncent complexes et difficiles, lors du conseil européen qui se déroulera demain et après demain, à Bruxelles. Chacun mesure également l’enjeu pour la France de voir ces discussions aboutir à la pérennisation du taux réduit de TVA pour les travaux de rénovation dans les logements et à la mise en place de ce taux réduit dans le secteur de la restauration.

Dans un tel contexte, il est donc essentiel, j’allais dire naturel, que notre assemblée s’exprime avant ce conseil, pour manifester unanimement son soutien à la position du gouvernement français dans le cadre des discussions en cours.

M. Jean-Claude Sandrier. Vous en avez mis du temps !

M. Michel Herbillon. C’est, en outre, une belle illustration de l’implication, que nous souhaitons plus forte, du Parlement dans les questions européennes.

La position française – il faut le souligner – s’appuie sur la volonté de la Commission, depuis 2003, de procéder à une révision générale des taux réduits de TVA, afin de rendre le système plus rationnel, plus lisible et plus équitable. Je remercie donc notre collègue, Michel Bouvard, d’avoir pris l’initiative de cette proposition de résolution, qui permet de manifester ce soutien et qui conforte la résolution que nous avions déjà adoptée sur le même thème, en décembre 2003.

Par notre vote, aujourd’hui, notre assemblée n’a nullement l’intention d’engager un bras de fer avec nos partenaires européens sur ces sujets. Cela n’aurait évidemment aucun sens et irait même à rencontre de nos intérêts, compte tenu de la règle de l’unanimité qui prévaut en matière de TVA. Non, notre prise de position a pour but de faire comprendre, de faire entendre à nos partenaires – notamment au principal d’entre eux, l’Allemagne – comme s’y emploie avec détermination, depuis trois ans, le Gouvernement, combien notre pays a besoin de ce taux réduit de TVA pour ces secteurs fortement créateurs d’emplois que sont le bâtiment et la restauration.

C’est une mesure nécessaire, indispensable, au regard de la priorité qui est la nôtre de lutter contre le chômage. C’est là l’enjeu essentiel, celui qui prévaut sur tous les autres.

Ce qui se passe depuis six ans maintenant dans le secteur du bâtiment est là pour nous démontrer l’impact extrêmement positif de la baisse de la TVA sur l’activité, sur le nombre de créations d’entreprises et d’emplois, ou encore sur la diminution du travail au noir.

M. Jean-Claude Sandrier. Vous avez perdu trois ans !

M. Michel Herbillon. Certes, cette mesure induit une perte de recettes fiscales pour l’État, mais dans le contexte de chômage que nous connaissons, un tel investissement en vaut la peine, au regard du surcroît d’activité et d’emplois qu’il génère. On estime à plus de 2 milliards d’euros d’activité et à 50 000 créations d’emplois l’impact de cette baisse de la TVA dans le secteur du bâtiment.

Nul doute que la réduction du taux de TVA dans la restauration, qui est l’un des secteurs où l’on emploie le plus de main d’œuvre, aura des effets comparables et tout aussi bénéfiques.

Ce serait de surcroît, dans le secteur de la restauration, une mesure d’équité qui mettrait fin à la distorsion de concurrence entre la restauration traditionnelle et la vente à emporter qui bénéficie déjà du taux réduit, comme les traiteurs et la restauration collective. Un accord sur la TVA lors du conseil européen serait donc une bonne nouvelle pour l’économie française, mais également pour l’image de l’Europe, à un moment où celle-ci traverse une phase difficile.

Les débats sur la stratégie de Lisbonne, c’est bien, mais des mesures concrètes en faveur de la rénovation des logements et de la restauration, ce serait encore mieux ! Ce sont de telles mesures, concrètes, génératrices d’emplois et d’activité économique qui rendront l’Europe populaire auprès des Français et qui réduiront la fracture dont le résultat du référendum du 29 mai a malheureusement été l’une des illustrations.

Voilà pourquoi, mes chers collègues, il est utile et même indispensable que notre assemblée, aujourd’hui, fasse bloc et exprime unanimement son soutien à la position française. Ce sera un symbole fort et un appui utile pour les discussions qui s’engageront demain et qui, je l’espère, aboutiront à cette baisse du taux de TVA qu’attendent tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la délégation, mes chers collègues, bien entendu, nous voterons unanimement cette proposition de résolution de l’Assemblée nationale (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), afin que le conseil européen poursuive les accords initialement conclus sous le gouvernement de Lionel Jospin en faveur de la baisse des taux de TVA sur les travaux dans les bâtiments anciens.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Il était temps !

M. Jérôme Lambert. Cet accord avait été obtenu en 1999 sans les difficultés que nous constatons aujourd’hui, sans grande proclamation non plus et sans promesse préalable : il résultait tout simplement d’une situation politique s’appuyant sur une situation financière bien appréhendée et qui nous était alors favorable.

Aujourd’hui, comme prévu, cet accord doit être réexaminé, mais les conditions dans lesquelles s’engage la négociation sont particulièrement difficiles et inquiètent tous les professionnels du secteur du bâtiment, qui se sont d’ailleurs mobilisés en masse pour nous encourager à les soutenir.

Si nous obtenons de nouveau cette baisse du taux de TVA, nous pourrons dire que nous aurons eu chaud, car, à la veille de cette décision, nous pouvons encore craindre une réponse négative, chacun soufflant le chaud et le froid. Une réponse négative serait catastrophique, et le climat d’aujourd’hui est presque à l’image de cette crainte. Chacun sent bien en effet que la politique de la France, du fait des choix opérés par la majorité et par le Gouvernement, est souvent mal perçue par nos partenaires européens et les déclarations que nous pourrons faire ici ne contribueront pas nécessairement à arranger la situation.

Nos partenaires, comme nous-mêmes, ont pu constater la dégradation de nos comptes publics. De 2002 à 2005, la dette publique est ainsi passée de 58,2 % à 62,2 % du PIB. Cette augmentation phénoménale ne peut passer inaperçue. Notre déficit public, quant à lui, dépassera pour la troisième année consécutive le seuil des 3 % du PIB !

C’est dans ces conditions budgétaires, résultant de votre politique fiscale, que nous allons négocier le maintien de la baisse de certaines rentrées fiscales et demander de nouvelles baisses. Nous aurions pu espérer un contexte meilleur, résultant d’une meilleure politique fiscale au plan national.

C’est donc dans ces conditions que nous demandons unanimement la baisse du taux de TVA sur la restauration. À la différence de celle obtenue sur les travaux dans le secteur du bâtiment, il ne s’agit pas d’une simple reconduction, déjà difficile à obtenir, mais d’une nouvelle demande, même si la promesse faite aux professionnels est déjà ancienne : voilà en effet trois ans que vous la prodiguez mais que vous ne parvenez pas à obtenir cet accord. Entre-temps, la situation s’est encore dégradée, rendant cet accord sans doute plus difficile.

Il faut cependant espérer que le conseil acceptera à l’unanimité de nous donner satisfaction, sans pour autant marchander la position de la France sur les autres dossiers essentiels qui seront examinés. Malgré les enjeux en cours pour l’Europe, nous n’aurons pas ici à nous prononcer sur ces discussions, et nous le regrettons. Le conseil ferait bien de se pencher sérieusement sur la question de la TVA sur la restauration, car, à y regarder de près, les réglementations sont multiples, ce qui nous fonde à demander un accord dont bénéficient déjà certains.

Certains États appliquent en effet des taux égaux pour la restauration à emporter et pour la restauration sur place, d’autres appliquent des taux supérieurs pour la restauration à emporter, et d’autres, dont la France, appliquent un taux supérieur pour la restauration sur place. Il est donc bien difficile de s’y retrouver, et l’argument qui consiste à faire valoir des distorsions de concurrence peut d’ores et déjà être écarté, compte tenu de la situation présente. La seule difficulté que nous devrons surmonter est celle de la situation budgétaire de notre pays et de quelques autres. Nous ne pouvons donc que nous en prendre à nous-mêmes et espérer, grâce à la mobilisation de tous, que nous parviendrons à arracher cet accord in extremis.

Le groupe socialiste aurait engagé cette négociation sur d’autres bases fiscales et budgétaires, comme nous avions su le faire en 1999. Nous souhaitons cependant parvenir à un accord en faveur des professionnels de la restauration, car nombre d’entre eux en profiteront et nous pouvons espérer un effet bénéfique sur l’emploi dans un secteur qui peut encore se développer.

Membre de la délégation pour l’Union européenne et du groupe socialiste, je souhaite que nous puissions aboutir, mais je mets en garde la majorité sur les dangers qu’il y a à faire des promesses en sachant pertinemment que les tenir ne dépend pas seulement de celui qui les prodigue. Nous constatons aujourd’hui les conséquences sur l’opinion de promesses faites il y a trois ans et non tenues. Il est temps de mettre un terme à cette affaire et de tout faire pour qu’elles soient enfin tenues, même si le contexte dans lequel se tiendra cette discussion, dans le cadre du financement global de l’Union européenne, laisse craindre de nombreuses transactions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Yves Bur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de résolution de Michel Bouvard tendant à exprimer le soutien de notre assemblée au Gouvernement avant le conseil européen au cours duquel sera abordée la négociation européenne sur les taux réduits de TVA, est particulièrement judicieuse.

M. Jean-Claude Sandrier. Il était temps !

M. Jean-Pierre Grand. Dans toutes nos régions, en particulier dans la mienne, le Languedoc-Roussillon, ô combien touristique, nous sommes tous conscients des difficultés rencontrées dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Mes collègues ici présents, Mme Franco, M. Morel-A-L’Huissier et M. Mach, qui soutiennent cette proposition, ne me démentiront pas.

La baisse de la TVA à 5,5 % dans le secteur de la restauration comptait au nombre de nos engagements pour cette législature. Y parvenir demeure plus que jamais notre but. Le 28 novembre dernier, la profession nous a rappelé toute l’importance qu’elle attache à cette décision. La restauration est un métier difficile, ingrat et soumis à des conditions économiques aléatoires.

Dans l’attente d’une décision européenne qui permettrait à la France de baisser son taux de TVA, les restaurateurs se sont engagés par convention à revaloriser les salaires, un accord sur la prévoyance et un autre sur la formation professionnelle complétant ce dispositif. Ils ont ainsi montré leur bonne volonté. On ne saurait donc aujourd’hui leur faire un mauvais procès quant à l’utilisation de cette marge de manœuvre financière que serait la baisse du taux de TVA. Cette diminution substantielle, dans un secteur dynamique et fortement créateur d’emplois, contribuerait aussi à faire baisser les prix pour le consommateur, relancerait le marché de la restauration, en permettant d’éviter les distorsions de concurrence, et supprimerait la disparité de traitement entre les ventes à consommer sur place – la restauration dite traditionnelle –, imposées au taux normal de la TVA, aujourd’hui de 19,6 %, et les ventes à emporter – je pense en particulier aux fast-food –, soumises quant à elles à un taux réduit de 5,5 %.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Jean-Pierre Grand. Cette profession joue un rôle de premier plan dans le domaine essentiel de l’emploi. L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie estime à plus de 40 000 le nombre d’emplois qui pourraient être créés.

Dans les stations touristiques, où l’on observe depuis quelques années un changement radical du comportement de nos concitoyens et de leur gestion du temps libre, une telle mesure permettrait aux restaurateurs d’ouvrir leur établissement en aval et en amont de la saison proprement dite. Je pense en particulier aux travailleurs saisonniers. Il y là un intérêt non négligeable pour la vie et l’animation des stations touristiques, mais aussi pour remploi.

La France, rappelons-le, demeure la première destination touristique mondiale. Nos restaurateurs concourent pleinement à un accueil de qualité. Les entreprises doivent rester viables pour continuer à offrir ces prestations typiquement françaises. Mais ne perdons pas de vue que la filière de la restauration est bloquée : près de 3 000 dépôts de bilan sont prononcés chaque année. Notre restauration et notre hôtellerie ne doivent pas devenir les musées d’un certain art de vivre à la française, Donnons-leur les moyens d’innover et de relever les défis économiques.

La France doit convaincre ses partenaires européens du bien-fondé de sa démarche qui ne s’inscrit naturellement pas dans le soutien à un domaine économique directement en concurrence avec les autres États. Nous savons le Gouvernement fermement déterminé à aboutir et, monsieur le ministre, nous vous faisons confiance. Ici même, hier, le Premier ministre a souhaité parvenir à un résultat concret à Bruxelles. Aujourd’hui, nous devons l’assurer du soutien plein et entier de la représentation nationale…

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Grand. …afin de l’aider à convaincre nos partenaires européens du bien-fondé de notre démarche.

Voilà pourquoi cette proposition est particulièrement utile et bienvenue pour soutenir une profession qui, à son tour, soutiendra la croissance et donc l’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse. C’est en ma qualité de rapporteur spécial du budget du tourisme que le groupe socialiste a souhaité que j’intervienne.

Entre 1997 et 2002, ainsi que l’a rappelé Augustin Bonrepaux, nous avons pris des mesures à la fois générales et ciblées en matière de TVA. À la suite de l’augmentation de deux points voulue par Alain Juppé en 1995-1996, nous avons ramené le taux de TVA de 20,6 % à 19,6 %.

Des mesures ciblées ont profité à tout un pan de notre activité, en particulier dans le secteur du bâtiment qui était en crise lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités en 1997, provoquant des ravages sur l’ensemble du territoire national. La baisse de la TVA a permis à ce secteur de créer de nombreux emplois. Nous avons également mis en place la baisse de la TVA sur les services à domicile, car ce secteur rend de grands services, notamment aux personnes âgées. Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous pérennisiez ces mesures mises en œuvre par vos prédécesseurs.

J’ajoute que le programme électoral de l’actuelle majorité, en 2002, prévoyait également une baisse de la TVA dans le secteur du disque. Je souhaite vous entendre à ce sujet, car la proposition de résolution n’en fait absolument pas état, alors même que nous débattrons la semaine prochaine de la transposition d’une directive européenne sur les droits d’auteurs. Le secteur du disque bénéficiera-t-il également de cette mesure ?

Le secteur de la restauration est en crise faute de personnels et parce que la concurrence avec la restauration collective et la restauration rapide est de plus en plus rude. La France, qui se distingue par son activité touristique, a besoin de s’appuyer sur sa culture culinaire. La restauration doit, par un dispositif fiscal, être consolidée et accompagnée dans son développement. Ce devrait être particulièrement le cas de la petite hôtellerie de montagne, que vous connaissez bien, monsieur le rapporteur, ainsi que M. Bonrepaux. Vous avez été nombreux ces dernières années à vous soucier de la petite hôtellerie, qui rencontre d’énormes difficultés.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Tout à fait ! C’est un vrai problème !

M. Pascal Terrasse. Selon une dépêche de l’AFP, la présidence britannique de l’Union européenne laisse entendre qu’elle proposera au Gouvernement une liste des activités pouvant être concernées par une baisse de la TVA. La porte est donc ouverte et l’on peut prévoir d’autres demandes, des coiffeurs par exemple ou du secteur du disque.

Monsieur le ministre, vous avez estimé le coût de la baisse du taux de la TVA à 3,5 milliards d’euros, équivalant d’ailleurs à ce que vous avez envisagé pour le bouclier fiscal.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Mais non : 380 millions ! Vous mélangez les chiffres !

M. Pascal Terrasse. Où allez-vous prendre cette somme alors que le rapport Pébereau met en évidence la situation catastrophique dans laquelle se trouvent les comptes publics de l’État ?

De plus, Londres demande que ce dossier soit lié aux négociations sur l’ensemble du budget européen. Comme vous l’a dit hier Jean-Louis Bianco, lors du débat sur le budget européen qui n’a malheureusement pas été suivi d’un vote, nous aimerions savoir comment tout cela va s’organiser. Il ne faudrait pas en effet qu’une disposition au profit de la restauration coûtant quelque 3 milliards d’euros…

M. Michel Bouvard, rapporteur. C’est largement surestimé !

M. Pascal Terrasse.… ait des conséquences sur la politique agricole commune ou sur les politiques de l’innovation et de la recherche, dont nos concitoyens attendent beaucoup. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je me réjouis de me trouver une nouvelle fois devant vous – cela m’arrive souvent en ce moment ! (Sourires) – pour évoquer les termes de la résolution relative au taux réduit de TVA présentée par Michel Bouvard avec la compétence et la précision qu’on lui connaît. C’est en quelque sorte le deuxième épisode du feuilleton que nous avons entamé la semaine dernière, et il y a une certaine cohérence à nous retrouver aujourd’hui pour honorer ce rendez-vous.

La réforme du système des taux réduits de TVA fait l’objet de discussions communautaires depuis maintenant deux ans et demi, depuis que la Commission européenne a déposé, en juillet 2003, sa proposition de directive.

Le Gouvernement français, vous le savez, soutient très activement cette proposition, avec deux demandes particulières : la pérennisation du taux réduit de TVA pour les services à haute intensité de main-d’œuvre et les travaux dans les logements et l’application du taux réduit à la restauration. Sur ce sujet, la détermination du Gouvernement est totale. Elle a été réaffirmée lors du conseil ECOFIN, il y a quelques jours, et le sera de nouveau lors du conseil européen des 15 et 16 décembre prochain. Dominique de Villepin l’a rappelé hier devant votre assemblée : la France est totalement déterminée à tout faire pour obtenir un résultat concret.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. D’abord, nous voulons pérenniser la TVA à taux réduit qui s’applique aujourd’hui aux services d’aide à la personne et aux travaux dans le secteur du bâtiment.

M. Jean Lassalle. Parfait !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Dans ces secteurs, la réduction du taux de TVA à 5,5 % a permis de créer plus de 40 000 emplois et de faire reculer le travail illégal.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est le type même de mesure qui a donné des résultats très concrets sur notre économie…

M. Pascal Terrasse. Grâce à Jospin !

M. Michel Bouvard, rapporteur. Grâce aux parlementaires !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …et sur laquelle nous
avons donc toutes les raisons de continuer à nous engager.

Nous voulons assurer aux professionnels de ces secteurs la visibilité dont ils ont besoin au-delà du 1er janvier 2006 pour établir leurs devis et assurer leurs commandes. En tout état de cause, à supposer qu’aucun accord ne soit trouvé lors du conseil, il a été convenu d’évoquer à nouveau cette question lors du prochain conseil ECOFIN de janvier et de continuer à appliquer ce taux d’ici là.

Nous voulons également étendre la TVA à taux réduit à la restauration. Un engagement politique a été pris. Il s’appuie naturellement sur une analyse économique que nous sommes nombreux à partager. En effet, une telle mesure permettrait de créer des emplois, de préserver cette activité sur l’ensemble du territoire et, bien sûr, de favoriser la croissance économique. Le Gouvernement a donc toutes les raisons de continuer à militer activement auprès de nos partenaires européens pour obtenir cette autorisation. Quand on a un tel dossier, qui est bon pour l’emploi, pour la croissance et pour un secteur économique essentiel en matière de services, il va de soi que tout doit être fait pour obtenir gain de cause. J’ajoute que ce sujet doit être traité indépendamment des autres thèmes inscrits à l’ordre du jour du conseil.

M. François Rochebloine. C’est évident !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il s’agit de quelque chose de spécifique dont vous connaissez, comme moi, l’historique. Jamais nous n’avons été aussi proches d’un accord que lors du conseil ECOFIN du 6 décembre dernier ; je l’ai indiqué ici même à une heure tardive de notre débat budgétaire. C’est le fruit d’efforts continus de ce gouvernement à lever les réticences de nos partenaires sur nos demandes. Nous n’avons donc pas de leçons à recevoir, monsieur Bonrepaux. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pascal Terrasse. Nous posons des questions !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je vous ai entendu parler de démagogie,…

M. Guy Teissier. Ce sont des spécialistes en la matière !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …tout en soutenant notre démarche d’ailleurs.

Je ne voudrais pas gâcher cet après-midi, mais Michel Bouvard et moi-même avons souri, car vous oubliez sans doute les propos suivants, tenus en octobre 2000 par le ministre de l’économie et des finances de l’époque, M. Fabius : « S’il est indéniable que la profession connaît des difficultés, ce n’est pas une baisse du taux de TVA qui permettra de les résoudre. » Et M. Fabius avait alors été applaudi sur les bancs du groupe socialiste. (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Augustin Bonrepaux. Lui, au moins, n’était pas démagogique !

M. Pascal Terrasse. Il n’a pas fait de promesses ! Vous, vous en avez fait, aux chasseurs par exemple !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous allez me dire que c’était juste M. Fabius ! Le problème, c’est que son prédécesseur, Dominique Strauss-Kahn, répondait le 26 octobre 1998 à une question écrite posée le 29 juin 1998 – les retards dans les réponses aux questions ne datent pas d’aujourd’hui ! –, réponse que le même Michel Bouvard, très bon en documentation française (Sourires), m’a glissée fort opportunément : « Il convient de souligner que la baisse du taux de TVA sur la restauration n’apparaît pas, contrairement aux mesures d’allégement direct du coût du travail, de nature à contribuer efficacement à la lutte contre le chômage. » Avant de faire un numéro sur la démagogie, il faudrait balayer devant sa porte !

M. Pascal Terrasse. Débrouillez-vous avec vos promesses !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je remercie M. Lambert d’avoir annoncé que le groupe socialiste voterait cette résolution, ainsi que M. Desallangre et M. Terrasse, mais je veux leur dire que, sur ces sujets difficiles, il vaut parfois la peine de se rassembler au service du pays et que je me réjouis de la perspective d’un vote unanime sur cette résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous devons évidemment tout faire pour convaincre nos partenaires, et je salue d’ailleurs le travail accompli sur ce sujet par la présidence britannique et par la Commission.

Cette proposition de résolution, présentée par Michel Bouvard et soutenue par Pierre Lequiller, que vous examinez aujourd’hui à la veille du conseil européen, me paraît extrêmement utile. Elle vient en effet appuyer nos efforts et exprimer le soutien de l’Assemblée nationale au Gouvernement dans la négociation européenne sur les taux réduits de TVA.

Je veux le dire en conscience, comme je l’ai fait il y a une semaine : aucun de nous ici ne doit faire semblant d’ignorer comment les choses se passeraient, notamment sur le plan juridique, si était choisie une autre voie que cette résolution. Je tiens à le souligner, car je sais que les uns et les autres, avec la même conviction et la même volonté de soutenir le Gouvernement, ont exprimé sur ce point des stratégies différentes. Nous ne pouvons diminuer le taux de TVA dans un secteur donné que si nous obtenons l’accord unanime des vingt-cinq États membres de l’Union, comme l’a fort opportunément rappelé M. Rochebloine.

Je veux le répéter à mon ami Thierry Mariani : si nous baissions le taux de TVA sans avoir obtenu l’accord unanime de nos partenaires européens,…

M. Jérôme Lambert. Ce serait irresponsable !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …nous ne serions plus en conformité avec le droit communautaire, plus précisément avec la directive en vigueur. À très brève échéance, à peine quelques mois, nous serions dès lors traduits devant la Cour de justice européenne par la Commission.

M. Jérôme Lambert. Comme pour le textile !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Cette dernière est gardienne du droit communautaire et elle engagerait sa responsabilité si elle ne poursuivait pas un État membre dont la législation est contraire à une directive. Elle a compétence liée en ce domaine. Nous avons accepté cette règle du jeu et nous serions bien contents de pouvoir l’utiliser si d’autres pays européens prenaient des dispositions non conformes à ce que nous souhaitons.

Certains estiment cette directive contraire au traité au nom du principe de subsidiarité. Même si cette thèse était exacte, cela ne changerait rien, car ce qui compte pour la Cour saisie d’une législation d’un État membre, c’est la conformité de cette législation avec la directive, pas de la directive avec le traité. C’est là toute la difficulté de l’exercice auquel nous nous livrons.

La Cour de justice n’aurait plus le choix : elle constaterait que la France est en infraction et, le cas échéant, elle condamnerait notre pays à payer des astreintes. Les restaurateurs, pour leur part, devraient alors verser à l’État la TVA résultant de la différence entre le taux normal de TVA à 19,6 % et le taux à 5,5 %. D’ici là, ils seraient placés dans une insécurité juridique et financière faisant perdre tout effet bénéfique à la TVA à 5,5 %. Peut-on imaginer prendre de tels risques ? Non, c’est impensable. Vous le voyez, la formule de la résolution est infiniment plus sage. Jean-Pierre Grand l’a parfaitement rappelé.

De plus décider unilatéralement d’appliquer un taux réduit de TVA heurterait nos partenaires en les mettant devant le fait accompli à la veille d’une discussion importante. Avec cette résolution, l’Assemblée nationale affiche clairement son soutien à la démarche du Gouvernement, alors que nous n’avons jamais été aussi proches d’un accord. C’est un plus considérable et je veux remercier Michel Herbillon pour ses propos.

Évidemment, il s’agit aussi d’un acte fort de l’Assemblée nationale, qui montre à nos amis allemands – ils sont nos principaux partenaires – en particulier à Angela Merkel, qui a pris ses fonctions il y a quelques jours et avec laquelle nous devons instaurer une relation de confiance, que notre détermination à la convaincre, au nom de l’amitié entre la France et l’Allemagne, est totale.

Je ne conclurai pas cette intervention sans vous dire quel chemin vous proposera le Gouvernement si nous obtenons demain l’accord auquel nous aspirons.

Vous savez qu’il y a en réalité deux étapes.

La première est européenne : nous devons emporter l’unanimité.

Dans cette hypothèse, il n’y aura, s’agissant de la TVA sur les travaux de rénovation dans les logements d’habitation et sur les services à domicile, aucun besoin de modifier notre droit interne, puisque le taux réduit est d’ores et déjà appliqué. Celui-ci a en effet été inscrit dans le projet de loi de finances qui vous a été présenté pour 2006, puisqu’il ne s’agit que de prolonger ce qui existe déjà.

M. François Rochebloine. En effet !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. S’agissant de la TVA sur la restauration, en revanche, le législateur sera appelé, si nous avons gain de cause, à intervenir pour baisser le taux de TVA et fixer la date d’entrée en vigueur du nouveau taux.

Naturellement, chacun a compris l’état d’esprit du Gouvernement à cet égard. La mise en œuvre de la TVA à taux réduit n’interviendra que dans le cadre d’une discussion avec les professionnels de ce secteur.

M. Pascal Terrasse. Dans quels délais ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il est important qu’ils mesurent bien, comme tous les Français, d’ailleurs, non seulement l’effort considérable qu’une telle mesure représente pour le contribuable, mais aussi l’esprit positif qu’il conviendra d’adopter. Ces discussions permettront à chaque Française et à chaque Français de comprendre nos objectifs en termes de création d’emplois et d’investissement.

M. Pascal Terrasse. On peut déjà commencer ces discussions !

M. Augustin Bonrepaux. Elles devraient même être terminées !

Mme Arlette Franco. Quelle mauvaise foi, chez nos collègues socialistes !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il faut que chacun comprenne bien notre état d’esprit en ce qui concerne la création d’emplois, l’augmentation des salaires dans ce secteur et la baisse des prix pour les consommateurs.

Aujourd’hui la restauration représente 740 000 emplois, mais il y a surtout 60 000 offres d’emplois qui ne trouvent pas preneurs, à cause de conditions de travail difficiles, comme l’a rappelé M. Mariani, et de rémunérations qui ne sont pas en rapport avec la dureté du travail. Un effort substantiel devra donc être réalisé dans tous ces domaines.

Comme vous le savez, le Gouvernement a montré l’exemple en s’accordant avec la profession pour supprimer le SMIC hôtelier, un système injuste qui décomptait de la paye du salarié une partie de ses repas. Cet effort en faveur du pouvoir d’achat, le Gouvernement l’a accompagné en accordant aux employeurs une prime à l’emploi dans la restauration de 114,40 euros par salarié et par mois. Ces éléments sont déjà pris en compte dans le budget pour 2006.

Il faudra aussi que tous les accords passés fin 2004 dans le cadre de la convention de branche soient respectés, notamment l’attribution de congés supplémentaires et de jours fériés.

Enfin, il faut que tous les Français s’y retrouvent. Je le dis très clairement : les prix devront baisser. Depuis deux ans, le Gouvernement travaille avec beaucoup de force et de conviction pour accroître le pouvoir d’achat des Français. La baisse de la TVA sur la restauration doit s’inscrire, elle aussi, dans cette politique.

Mme Arlette Franco. Bien sûr !

M. François Rochebloine. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Voilà la situation à la veille du conseil européen. Nous partageons un même devoir de réussite. Dans cette négociation, la position de la France est déterminée.

La proposition de résolution que vous allez adopter, du moins si j’en crois vos interventions, contribuera à notre réussite. Elle consolidera notre objectif, qui est de gagner cette négociation et de renforcer la position de la France en Europe. La délégation française pourra s’appuyer sur ce texte, qui contribuera à emporter la conviction de nos partenaires européens.

Au nom du Gouvernement, je veux saluer votre initiative, que je crois juste et responsable. Je vous invite naturellement à adopter cette proposition de résolution en l’état. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Article unique

M. le président. J’appelle maintenant l’article unique de la proposition de résolution dans le texte de la commission.

Sur cet article, je suis saisi d’un amendement n° 1.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Il s’agit d’un amendement d’ordre rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’article unique et d’en venir aux explications de vote (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire)

M. Pascal Terrasse. Sur un tel sujet, il est important que la représentation nationale puisse s’exprimer ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. …je vous indique que je suis saisi d’une demande de scrutin public.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.

M. Didier Migaud. Monsieur le président, le débat est suffisamment important pour que nous puissions prendre quelques minutes supplémentaires pour entendre les explications de vote de chacun des groupes.

M. Jean-Marie Geveaux. On sait déjà ce qu’ils pensent !

M. Didier Migaud. Je me réjouis d’ailleurs que nous soyons aussi nombreux pour débattre de cette proposition de résolution. Je regrette cependant que certains députés du groupe de l’UMP, qui ont fait des déclarations fortes, ne soient pas présents aujourd’hui, ce qui peut paraître étonnant.

M. Thierry Mariani. Pas du tout ! Ils sont tous là !

M. Jérôme Rivière. Comme si les socialistes étaient nombreux !

M. Didier Migaud. Nous voterons cette proposition de résolution, car nous souhaitons aider le gouvernement français dans la négociation qu’il conduit au niveau européen. Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le souligner la semaine dernière : nous soutenons ce dossier. Évitons, par conséquent, les polémiques inutiles.

Pour ce qui est des réductions de TVA, je rappelle que, sous la législature précédente, elles ont atteint un montant d’environ 10 milliards d’euros, votés à l’initiative de la majorité précédente. Elles se sont concrétisées par une réduction d’un point du taux de TVA et plusieurs réductions ciblées, dont la plus importante concernait évidemment les travaux dans les logements.

C’est parce que la commission des finances et le groupe socialiste de l’Assemblée nationale l’ont fortement souhaitée que le Gouvernement français a demandé et obtenu l’autorisation des instances européennes. Je rappelle en effet que, sous l’avant-dernière législature, le taux de TVA n’avait pas été baissé, mais augmenté.

Pour notre part, nous préférons les baisses de TVA ciblées aux baisses de l’impôt sur le revenu. Elles sont plus conformes à notre conception de la justice fiscale.

M. Jean-Marie Geveaux. N’avez-vous jamais baissé l’impôt sur le revenu ? Et Fabius ?

M. Didier Migaud. Nous savions qu’un nouveau rendez-vous avait été fixé fin 2002 avec nos partenaires européens, pour élargir les réductions ciblées de TVA. La question de la restauration était donc posée.

Certes, la baisse du taux de TVA dans la restauration figurait parmi les engagements du candidat Jospin, mais nous avons toujours reconnu qu’elle ne réglerait pas tous les problèmes dans ce secteur. D’où la phrase que vous avez tenu à citer, monsieur le ministre, qui n’a rien d’incompatible avec cette proposition et qui, à nos yeux, est le contraire de la démagogie. En revanche, ce que nous pouvons reprocher au Président de la République, et qui explique l’exaspération de beaucoup de restaurateurs, c’est d’avoir prétendu en 2002 qu’il suffisait que la France souhaite la réduction du taux de TVA pour que ses partenaires l’acceptent. Nous l’avons vu : c’était un peu plus compliqué que cela. Il a fallu plusieurs années…

M. Jean-Jacques Descamps. Parce vous avez voté non !

M. Didier Migaud. Ne compliquez pas les choses, monsieur Descamps. Elles sont déjà assez difficiles comme cela !

M. Bernard Accoyer. M. Descamps a raison !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. M. Descamps a fait mouche ! (Sourires.)

M. Didier Migaud. Le délai important qui s’est avéré nécessaire pour que ce dossier revienne au niveau européen montre que certains ont tenu des propos plus responsables que d’autres.

J’espère donc, monsieur le ministre, que vous nous annoncerez de bonnes nouvelles jeudi soir ou vendredi. Nous souhaitons que cette éventuelle décision se concrétise le plus rapidement possible. Pour cela, en effet, vous n’avez pas besoin d’une autorisation législative. L’Assemblée vous l’a déjà donnée en votant un amendement aux termes duquel la décision peut prendre effet dans les quatre mois qui suivront l’accord donné au cours d’un sommet européen.

M. Pascal Terrasse. On peut même éviter d’attendre quatre mois !

M. Didier Migaud. Vous avez donc d’ores et déjà toute capacité pour agir et négocier avec les restaurateurs, afin qu’ils respectent, de leur côté, les engagements qu’ils ont pris en matière d’emploi, de rémunération salariale, de condition de travail et de prix. Nous pensons que ces négociations peuvent être conduites le plus rapidement possible.

En revanche, l’intervention législative sera vraisemblablement nécessaire sur un point : si nous obtenons l’accord de Bruxelles, il faudra un collectif budgétaire pour inscrire dans le budget pour 2006 une somme qui n’y figure pas actuellement et concrétiser ainsi les engagements que nous prenons.

En attendant, je renouvelle le soutien du groupe socialiste à cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Sur le vote de l’article unique de la proposition de résolution, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Thierry Mariani. Je serai bref, puisque le débat a, je crois, été clair.

Monsieur le ministre, cette proposition de résolution bénéficiera bien entendu du soutien du groupe de l’UMP. Je salue d’ailleurs l’initiative de notre collègue Michel Bouvard, qui l’a déposée. Peut-être même, fait assez rare dans cet hémicycle, sera-t-elle votée à l’unanimité.

M. Jérôme Lambert. Quelle clairvoyance ! (Sourires.)

M. Thierry Mariani. Elle n’en sera que plus forte pour vous aider demain à faire aboutir cette juste revendication, dans l’intérêt de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Je vous remercie de votre concision, monsieur Mariani.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Pierre-Christophe Baguet. Quelques mots, en complément des propos de mon collègue François Rochebloine.

Ce sujet, monsieur le ministre, vous a mobilisé pendant de nombreuses heures, durant ces dernières années, tant lors du vote de la loi de finances pour 2006, que lors de l’examen de la loi de finances rectificative pour 2005, qui s’était poursuivi jusqu’au petit matin.

L’UDF a toujours été fidèle et respectueuse de ses engagements à l’égard d’une disposition qui lui paraît de bon sens. Je ne reviendrai donc pas sur nos débats, bien que cette résolution apparaisse comme un moindre mal.

La première raison de l’adopter relève du respect de la parole donnée. On ne peut pas susciter des espoirs légitimes et ne pas se donner tous les moyens d’atteindre les objectifs annoncés. Sinon, en retour, l’effet est funeste : c’est le désespoir, ainsi que ses conséquences dramatiques sur le plan économique et humain.

La deuxième raison est tout aussi importante : c’est le souci d’une plus grande justice. On ne peut accepter plus longtemps une TVA à taux réduit pour la vente à emporter et au taux maximum pour la restauration sur place. Quelle justice y a-t-il, en effet, à taxer le service et le travail ? Aucune ! Alors, rétablissons d’urgence l’équité. Il en va de notre bien-vivre ensemble et du respect mutuel, qu’il est de notre devoir de défendre.

La troisième raison d’adopter ce texte tient à la création d’emplois. Le taux réduit de la TVA sur le bâtiment a permis 40 000 créations d’emplois. On en attend 50 000 dans la restauration.

La quatrième raison est que ce texte permettra évidemment une relance de l’économie, grâce aux investissements importants qui ne manqueront pas d’intervenir après l’adoption de cette mesure.

La cinquième raison est que ce texte maintiendra la France au rang de première destination touristique mondiale.

Encore une fois je répète que toutes ces observations de bon sens ont été longuement développées par le groupe d’études sur les métiers de l’hôtellerie, de la restauration et des loisirs, brillamment animé par nos collègues Thierry Mariani et Philippe Folliot, ici présents.

Je ne reviendrai pas, monsieur le ministre, sur la divergence de nos stratégies. Nous soutenions qu’un vote de notre assemblée aurait été un message de détermination plus fort adressé à nos partenaires européens. Vous avez préféré cette résolution. Le groupe UDF la votera donc, avec le fervent espoir qu’au bout du compte, ce sont les restaurateurs, et toute la France avec eux, qui gagneront. C’est ce que nous souhaitons ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jean-Claude Sandrier. Nous voterons bien sûr ce projet de résolution, tout en constatant à nouveau que, sur ce dossier, nous avons perdu trois années,…

M. Jean-Jacques Descamps. Et même plus, par votre faute !

M. Jean-Claude Sandrier. …et peut-être même davantage. Trois années pour l’emploi ! Oui, il aura fallu trois années pour que le Gouvernement consente à demander, sur ce dossier, l’avis et le soutien de l’Assemblée nationale. C’est invraisemblable !

M. Jean-Marie Geveaux. La gauche ne voulait pas de cette mesure !

M. Jean-Claude Sandrier. Vous aviez l’occasion de le faire dès octobre 2002, quand nous avons présenté un amendement proposant d’abaisser à 5,5 % le taux de TVA dans la restauration. Pas plus que mon collègue Jacques Desallangre, je ne vous rappellerai le résultat du vote ! Vous aviez l’occasion d’apporter votre soutien à notre proposition, voire de la faire voter à l’unanimité. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? Parce que le Gouvernement était sûr d’obtenir satisfaction en 2003, comme il a été sûr d’obtenir satisfaction en 2004, puis en 2005.

Vous vous êtes trompés. Faut-il que vous soyez sous la pression des restaurateurs mobilisés pour demander enfin l’avis et le soutien de l’Assemblée nationale ?

M. Guy Teissier. Mauvais joueur !

M. Jean-Jacques Descamps. Quelle démagogie communiste !

M. Jean-Claude Sandrier. Nous voterons ce projet de résolution (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), mais nous exigeons que les restaurateurs s’engagent fermement à créer des emplois…

M. François Rochebloine. Ils l’ont dit !

M. Guy Teissier. C’est pour cela que nous demandons la baisse de la TVA !

M. Jean-Claude Sandrier. …et à améliorer les conditions de travail et les salaires de leurs employés. C’est le moins que nous puissions leur demander s’ils obtiennent un taux de TVA à 5,5 %.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l’article unique de la proposition de résolution.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est ouvert.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

L’Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Sécurité et développement
des transports

Suite de la discussion d’un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, relatif à la sécurité et au développement des transports (nos 2604, 2723).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 13.

Article 13

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, inscrit sur l’article 13.

M. Daniel Paul. Monsieur le président, je souhaite que nos travaux se déroulent dans des conditions plus correctes qu’hier soir. En effet, à la fin de la séance, vers une heure du matin, on nous a soumis un amendement inattendu qui était pour le moins malvenu. Or je constate que la liasse qui nous a été distribuée contient d’autres amendements de la même veine. Nous serons donc sans doute conduits à vous demander des explications sur cette façon de procéder.

Monsieur le ministre, l’article 13 autorise le recours à des partenariats public-privé pour la réalisation des infrastructures ferroviaires. Cette évolution est censée permettre, selon vos propres termes, une « politique dynamique et modernisée des investissements ». Cela appelle quelques commentaires.

Si le principe n’est pas contestable en soi, la pratique qui risque de s’instaurer est aléatoire. En effet, de tels partenariats ne sont envisageables que pour les lignes très rentables. Ainsi la possibilité offerte par le Gouvernement, risque de dynamiser la construction d’infrastructures rentables, comme la liaison Paris-Roissy-Charles-de-Gaulle ou des lignes TGV, mais qu’en sera-t-il de la majorité des infrastructures de transport, pour lesquelles le retour sur investissement ne peut se concevoir que sur la longue durée, voire la très longue durée ?

Nous sommes donc en désaccord avec le Gouvernement, non sur le principe, mais sur le contenu de ces partenariats. La création d’infrastructures de transport doit correspondre à l’intérêt général pour permettre à l’État de garantir un service public de qualité. En effet, selon le principe constitutionnel de la continuité territoriale, l’État doit assumer ses missions d’aménagement du territoire et assurer l’égal accès de tous aux infrastructures de transport.

Or l’article 13 lui permet de se désengager de ces missions de service public. Le Gouvernement est d’ailleurs coutumier de ce type de démarche, comme en témoignent sa tentative, l’été dernier, de confier aux régions le financement des lignes interrégionales ou, plus récemment, le décret du 14 octobre dernier, qui rebaptise l’ancien CIADT en « Comité interministériel d’aménagement et de compétitivité des territoires ». Il s’agit, certes, d’un simple changement de terminologie, mais il est symboliquement très important : même les territoires sont en concurrence.

Cet article ne permettra pas de répondre aux immenses besoins de rénovation et de modernisation du réseau ferroviaire. Rappelons que, selon le rapport d’audit sur les infrastructures de transport ferroviaires rendu le 7 septembre dernier, ces besoins sont estimés à hauteur de 600 millions d’euros par an sur vingt ans, avec un pic de 1 milliard d’euros d’investissement entre 2006 et 2011. Dans ce rapport, on peut lire également, à propos du patrimoine de la SNCF, que le manque d’entretien des ouvrages d’art laisse craindre des risques de chute sur les voies dans les traversées de tunnel et que les voies et appareils de voie des lignes faiblement chargées se trouvent dans un mauvais état. Une aide s’avère donc, là encore, nécessaire pour assurer le confort, mais aussi la sécurité des passagers. Enfin, les experts relèvent que le nombre des ralentissements permanents imposés pour des raisons de sécurité est en constante augmentation.

Pourtant, le développement des infrastructures ne devrait pas être un objectif inatteignable, puisque plusieurs de nos voisins ont su mener une politique qui lui était plus favorable, ainsi qu’à la sûreté. Actuellement, la France dépense moins que plusieurs de ses voisins européens pour la maintenance de ses lignes de chemin de fer. Or le rapport met en garde contre une politique de maintenance à courte vue, qui induit à long terme une dérive sérieuse des coûts d’infrastructure et de ses performances. Autrement dit, les investissements sont nécessaires, tant pour la sécurité des voyageurs que pour la bonne santé économique de l’entreprise.

Le recours aux financements privés, qui intervient dans un contexte de désengagement de l’État, porte en lui le risque tendanciel d’un début de privatisation des infrastructures de transport. Actuellement, l’établissement public RFF est propriétaire de ces infrastructures, mais qu’adviendra-t-il si une société privée décide d’investir dans la construction d’infrastructures et dans leur entretien ? Pourquoi n’en serait-elle pas propriétaire ? On voit ainsi se profiler des monopoles privés par axe.

Or les infrastructures ferroviaires font partie du patrimoine public et doivent rester sous maîtrise publique. C’est pourquoi nous souhaitons que la politique des transports soit scellée dans un projet pluriannuel de développement entre RFF, la SNCF et l’État, fixant les objectifs et les moyens. Ce projet pluriannuel permettrait de gagner en lisibilité, responsabiliserait les acteurs et permettrait de garantir une offre de transport répartie sur l’ensemble du territoire répondant aux besoins de mobilité.

Nous souhaitons également que l’État s’engage dans le désendettement de RFF et de la SNCF. La reprise de la dette s’élève aujourd’hui à près de 40 milliards d’euros, dont 7,3 milliards pour la SNCF et 25 milliards pour RFF. En désendettant ces sociétés, l’État contribuerait à dégager des capacités d’autofinancement importantes qui permettraient d’investir et de moderniser le système. Signalons par ailleurs que les frais financiers annuels liés à la dette sont d’environ 380 millions d’euros pour la SNCF et de 1,3 milliard pour RFF. Cette dette étouffe RFF et l’oblige à augmenter ces péages.

Dans la loi de finances pour 2005, le désengagement de l’État était manifeste, puisqu’elle prévoyait l’extinction de la dotation relative à la gestion de la dette de RFF et la suppression des crédits pour le service annexe d’amortissement. Nous souhaitons que le Gouvernement s’engage concrètement à désendetter Réseau Ferré de France et la SNCF, afin de permettre à ces entreprises publiques d’investir.

En tout état de cause, nous voterons contre l’article 13.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Il est curieux de constater que les partenariats public-privé, s’ils intéressent nombre d’exécutifs locaux de gauche, qui les jugent utiles à l’action publique et à la rénovation du service public, sont, au niveau national, systématiquement contestés dans leur principe même par nos collègues. Ce décalage entre la pratique locale et le discours national est assez frappant.

Les critiques, qui sont apparues dès la loi d’habilitation, ont été renouvelées à l’occasion d’un recours devant le Conseil d’État contre l’ordonnance du 17 juin 2004. Heureusement, ces recours n’ont pas abouti et nous disposons aujourd’hui d’un outil nouveau qui permet de stimuler la croissance et l’investissement, en particulier dans les infrastructures de transport. Toutefois, comme je l’indiquais hier, il est apparu que les dispositions de la loi de 1997 pouvaient faire obstacle à ces contrats de partenariat dans le domaine ferroviaire. Le texte qui nous est proposé met les choses au clair et permet de mobiliser les partenariats public-privé au service d’une politique d’infrastructures ambitieuse. Sans ces derniers, les projets décidés lors du comité interministériel d’aménagement et de compétitivité du territoire d’octobre 2005 ne pourraient être menés à leur terme.

M. Daniel Paul. Quel aveu !

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. Soit on veut mener à bien la politique d’infrastructures à laquelle nous aspirons pour notre pays – réalisation de nouvelles lignes à grande vitesse, mise en place du GSM-R ou du TGV Rhin-Rhône –, et les partenariats public-privé sont alors sinon indispensables, du moins utiles en termes d’efficacité et de calendrier. Soit on se refuse, pour des raisons purement idéologiques, à mobiliser cet outil – qui a été adopté par de nombreux autres pays et qui, avec la délégation de service public, a longtemps placé la France à l’avant-garde –, et l’on se prive alors des infrastructures et des services publics dont nous avons besoin.

M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 13.

Je suis d’abord saisi de deux amendements, nos 66 et 150, tendant à la suppression de l’article.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 66.

Mme Martine Billard. En matière d’infrastructures de transports, nous avons besoin d’une politique d’autant plus volontariste que, dans une perspective à long terme, pour lutter contre l’effet de serre et anticiper la baisse des réserves de pétrole, il faut transférer une partie du transport routier, gros consommateur de carburant, vers des modes de transport non polluant, à savoir ferroviaire ou fluvial, ce qui permettra également de réserver le pétrole restant aux usages pour lesquels il demeure indispensable.

N’oublions pas que les décisions que nous prenons maintenant engagent aussi les générations futures. Et quand il s’agit d’équipements aussi lourds que les infrastructures de transports, il convient de prendre en compte les besoins qui se feront sentir au moins sur les cinquante années à venir.

Les Verts ont toujours dit qu’il ne fallait abandonner aucune infrastructure. Les lignes secondaires, même si on les estime non rentables à un moment donné, doivent être conservées ; il faut même en construire de nouvelles. En tout cas nous ne voulons pas qu’il y ait d’un côté les lignes rentables, fonctionnant bien car correctement financées par le privé – on ne peut reprocher à une entreprise privée de rechercher le profit, comme on se saurait admettre qu’elle génère des déficits subventionnés par des fonds publics – et de l’autre, celles qu’on laissera à la charge des régions ou d’on ne sait qui, dont le financement restera aléatoire.

Par ailleurs, j’attends de savoir quelle sera la position du rapporteur et du Gouvernement à propos de la liaison express avec Roissy, mais on a l’impression que quand une région n’est pas d’accord, on lui impose des décisions au mépris de la décentralisation.

Ce qui m’inquiète avec l’article 13, ce n’est pas tant le principe de l’ouverture de sources de financement complémentaires, que la disparité qui pourrait en résulter et ses conséquences sur le fonctionnement de certaines portions du réseau.

M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues, pour soutenir l’amendement n° 150.

Mme Odile Saugues. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il est urgent de construire de nouvelles infrastructures de transport ferroviaire afin de répondre aux besoins, et de revitaliser les lignes actuelles, sur lesquelles on constate de fréquents ralentissements imputables à un entretien insuffisant et effectué de façon parcellaire.

Cependant, la méthode que vous proposez, celle du partenariat public-privé, n’est pas acceptable, car elle va aboutir à ce que les opérateurs privés s’arrogent les lignes les plus rentables, délaissant les autres tronçons qui doivent pourtant continuer à fonctionner pour assurer le service public. Le désengagement de l’État va également à l’encontre du souci de sécurité qui est le nôtre. Pour toutes ces raisons, notre groupe propose la suppression de l’article 13.

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Une mise au point s’impose, car j’entends dire trop de choses qui n’ont rien à voir avec notre texte. Le partenariat public-privé porte sur la réalisation d’infrastructures ferroviaires. Une fois construites, celles-ci seront intégrées au réseau de RFF et la SNCF y fera rouler des trains dessus. Ne racontez pas n’importe quoi, ou je vais finir par penser que vous n’avez pas lu le texte !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Au moins, c’est clair !

M. le président. Monsieur le ministre, il me semble que vous avez émis un avis défavorable sur les amendements n° 66 et 150. (Sourires.)

Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements. Ne nous privons pas de moyens utiles et réalistes pour réaliser rapidement de nouvelles infrastructures et améliorer le réseau existant. En outre, le recours aux partenariats public-privé est strictement encadré, de manière à garantir la sécurité, et les prérogatives de la SNCF sont préservées, dans le cadre des missions de service public.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Au paragraphe II de l’article 13, il est bien précisé que « le contrat ou la convention peut porter sur la construction, l’entretien et l’exploitation de tout ou partie de l’infrastructure, à l’exclusion de la gestion du trafic et des circulations ». Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre, il ne s’agit donc pas uniquement de la construction d’infrastructures.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 66 et 150.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. J’en viens à deux amendements identiques, nos 2 et 36.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n° 2.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. Pour les opérations individualisées, et pour les ouvrages réalisés sous exploitation, le maître d’ouvrage public RFF peut trouver avantage à confier à la SNCF non seulement un mandat de maîtrise d’ouvrage, mais aussi des missions de maîtrise d’œuvre ou la réalisation des travaux. L’amendement n° 2 vise à éviter l’application à ce cas de la règle d’incompatibilité posée à l’article 4 de la loi MOP.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 36.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Je n’ai rien à ajouter puisqu’il est identique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2 et 36.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 171 de la commission est rédactionnel.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 171.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 3.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. L’amendement n° 3 précise que le rapport demandé par le Sénat portera sur les relations entre l’État, le gestionnaire de l’infrastructure du réseau ferré national et les gestionnaires délégués.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, car la rédaction du Sénat nous semble satisfaisante et ne mérite pas d’être développée davantage. En outre, il n’y a qu’un seul gestionnaire délégué, la SNCF.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Même avis,

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. Je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 3 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n° 5.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. L’amendement n° 5 vise à supprimer la mention « d’intérêt national ou international », ce qui, d’une part, allège la rédaction du texte, d’autre part, lève une ambiguïté sur la possibilité de recourir au partenariat public-privé pour des opérations d’intérêt régional. Certes, celles-ci ne constituent pas une catégorie à part, et elles peuvent entrer dans le cadre national, mais il nous paraît préférable de ne pas les exclure a priori du champ des partenariats public-privé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. En effet, un projet régional peut parfaitement présenter un intérêt national du point de vue de l’aménagement du territoire – ainsi, la résorption d’une difficulté au niveau local peut améliorer la fluidité du trafic au niveau national – et il ne nous paraît pas utile de l’indiquer explicitement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Même avis.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. Je suis disposé à retirer également cet amendement, mais j’aimerais que le Gouvernement précise que la rédaction actuelle du texte couvre bien les projets d’intérêt régional.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. C’est un cours de français que je vais être obligé de donner ! (Sourires.) Si c’est ce que vous voulez, je vous confirme que la mention « d’intérêt national », n’exclut pas qu’un projet puisse présenter aussi un intérêt régional.

M. le président. Vous retirez donc cet amendement, monsieur Mariton.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. Oui, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 5 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l’amendement n° 6.

M. Hervé Mariton, rapporteur pour avis. L’amendement n° 6 explicite le fait qu’un délégataire de service public puisse percevoir directement, sur la nouvelle infrastructure construite par lui, les redevances d’usage liées à l’utilisation de celle-ci.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Cet amendement a été accepté par la commission. En effet, l’un des éléments qui permettent de définir une délégation de service public tient au mode de rémunération du délégataire, celle-ci devant être liée de manière substantielle au résultat d’exploitation du service. En l’espèce, il faut permettre au délégataire de percevoir les redevances liées à l’utilisation des infrastructures.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6.

M. Daniel Paul. Contre !

(L’amendement est adopté.)

M. Daniel Paul. C’est scandaleux !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 121.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Le Gouvernement est donc favorable.

Je mets aux voix l’amendement n° 121.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 71 de M. Abrioux est-il défendu ?

M. Pierre Cardo. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Cet amendement n’a pas été examiné par la commission, mais la complexité du projet exige que l’État en assure le pilotage. C’est pourquoi, à titre personnel, j’émets un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Une fois de plus, on nous présente un amendement dans des conditions tout à fait inacceptables. On nous explique que l’État prendra totalement à sa charge la liaison express vers Roissy. Tant mieux, au moins pour le STIF, mais il s’agit là d’un projet extrêmement lourd, j’espère que vous en avez conscience.

En tout cas, nous assistons, depuis hier soir, à une parodie de débat. Nous avons le sentiment que certains élus de la région parisienne viennent ici régler leurs comptes. Or cela n’est pas correct ; disant cela, je ne vous mets pas en cause, monsieur le ministre. Ainsi, l’amendement de M. Devedjian sur le STIF visait tout simplement à paralyser cette instance. Faut-il rappeler que M. Devedjian est un ami de M. Sarkozy, président du conseil général des Hauts-de-Seine ? M. Sarkozy, qui n’est pas content que le STIF puisse prendre un certain nombre de décisions a donc demandé à M. Devedjian de bloquer la machine.

Je m’élève contre ces amendements scélérats, qui n’ont pas été examinés dans de bonnes conditions par l’Assemblée.

S’agissant plus précisément de l’amendement n° 71, et cette opinion n’est pas partagée par tout le monde sur les bancs de gauche, je suis quant à moi favorable à cette liaison. Je considère en effet que la situation actuelle n’est pas satisfaisante et que la région parisienne doit disposer d’une liaison permettant de se rendre rapidement à Roissy. C’est un élément important pour le développement économique.

Je suis cependant surpris que vous acceptiez de sortir cette liaison de son cadre naturel, à savoir le Syndicat des transports d’Île-de-France qui avait vocation à s’occuper de cette question. J’ignore pourquoi vous avez décidé en quelque sorte de recentraliser en reprenant au STIF une de ses compétences, et de mettre à la charge de l’État l’ensemble de cette opération. J’espère que vous avez mesuré la responsabilité que vous prenez ainsi. En tout cas, la méthode choisie n’est pas la bonne. Une discussion, notamment avec le président du conseil régional d’Île-de-France, était pour le moins nécessaire. Vous ne l’avez pas organisée et ce n’est pas correct.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je tiens moi aussi à manifester mon indignation tant sur l’amendement d’hier soir que sur celui-ci. Nous avons d’ailleurs échappé à un troisième amendement sur le STIF que M. Jego n’est pas venu défendre. Cela donne le sentiment que l’UMP, qui a perdu la majorité au sein du STIF, essaie de prendre sa revanche en revenant sur la décentralisation. (Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Christophe Baguet. Mais non !

Mme Martine Billard. En outre, les Verts ne sont pas favorables à cette liaison dont ils voient mal l’utilité. Il faut en effet aujourd’hui dix-huit minutes au minimum et vingt-huit minutes au maximum pour aller de la station Châtelet à l’aéroport Roissy–Charles-de-Gaulle. Or il est évident que la liaison express entre la gare de l’Est et Roissy ne pourra être nettement inférieure à ce délai.

L’amendement prévoit certes que l’État assurera le pilotage du projet, mais il pourra s’agir aussi d’une délégation de service public. L’opération pourra donc être transférée au privé. Je rappelle à ceux qui l’auraient oublié le fiasco de l’Orlyval, exploité au départ par Matra. Un an après sa mise en service, il s’est retrouvé en effet en liquidation judiciaire et l’exploitation de la ligne a dû être reprise par la RATP. La liaison express connaîtra-t-elle le même sort ? On imposerait au bout du compte à la région Île-de-France, qui n’en voulait pas, une ligne qui sera ensuite confiée à la SNCF, laquelle devra en assurer le coût et subira ainsi un hold-up.

Je m’étonne en outre que le maire d’Aulnay-sous-Bois ait cosigné cet amendement alors précisément que son conseil municipal a voté un vœu contre cette liaison. Pourquoi, d’une façon plus générale, certains députés défendent-ils cette ligne ? Il serait gênant, semble-t-il, que les voyageurs arrivant à Roissy se retrouvent dans un wagon de RER avec les passagers lambda.

M. Pierre Cardo. Ils vont dans les mêmes avions !

Mme Martine Billard. Faut-il faire en sorte qu’ils ne soient pas contraints de se mêler aux gens du peuple ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Il importe donc de prévoir une ligne pullman réservée aux riches.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ces clichés sont ridicules !

M. Pierre Cardo. Ce raisonnement est malsain, madame !

Mme Martine Billard. Non ! C’est exactement ça, Sinon, pourquoi faudrait-il construire une nouvelle liaison alors que celle qui existe permet déjà de relier l’aéroport au centre ville en dix-huit minutes ?

Le pire, c’est que cette ligne empruntera en grande partie les voies du RER B. Avec une liaison assurée tous les quarts d’heure, imaginez le nombre de RER en moins pour tous les usagers des banlieues concernées alors qu’il faudrait au contraire renforcer la ligne B au regard de la concentration et de l’augmentation de la population dans cette zone.

Au moment où il est nécessaire d’affecter davantage de moyens financiers pour améliorer les transports en commun collectif, on nous propose une ligne particulière réservée aux voyageurs qui vont prendre leur avion à Roissy. Cette proposition est proprement scandaleuse ! Comme le conseil régional d’Île-de-France ne veut pas de ce projet, vous êtes contraints de faire ce mini-coup d’État local en imposant cette liaison par le biais de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je ne reprendrai pas ici les propos que j’ai tenus cette nuit, à une heure quinze, sur les pérégrinations de l’amendement scélérat qui nous a été soumis. Il en va de même pour celui-ci, qui porte le numéro 71. Décidément, vous n’avez pas de chance avec vos amendements : apparemment, ils se perdent en route. Il reste que des amendements aussi lourds de conséquences et aussi significatifs en termes de relations entre l’État et la plus grande région de France ne sont pas examinés en commission et arrivent dans cet hémicycle au détour d’un texte portant sur la sécurité dans les transports. Cette méthode est absolument inadmissible.

Je n’ose imaginer, monsieur le ministre, ce que vous auriez dit si, voilà quelques années, Jean-Claude Gayssot, alors ministre des transports, avait osé procéder de la sorte. Vous auriez hurlé et vous auriez eu raison de le faire. Mais aujourd’hui, vous participez à une mauvaise action.

S’agissant de l’amendement n° 71, il est précisé, dans le premier alinéa, qu’ « un décret en Conseil d’État définit les modalités d’établissement par l’État d’une liaison ferroviaire express directe dédiée au transport des voyageurs entre l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle et Paris. » L’État assume ainsi ses responsabilités. Soit, mais le second alinéa précise :

« Ce décret fixe notamment les modalités de désignation des exploitants, les conditions générales de financement, de réalisation et d’exploitation de la liaison ainsi que les règles tarifaires propres à celle-ci, l’exploitation du service de transport lui-même étant assurée dans les conditions prévues à l’article 18 de la loi du 30 décembre 1982. »

Nous sommes là dans le cadre des partenariats public-privé. Comme je l’ai dit précédemment, ce projet sera extrêmement juteux pour l’entreprise privée à laquelle on attribuera l’exploitation. Et cela ne tardera pas car la mise en application du texte est très rapidement prévue. Tout cela est cousu de fil blanc et infiniment condamnable.

Régler ainsi un différend entre l’État et une collectivité territoriale, compétente en la matière – vous le reconnaissez d’ailleurs dans l’exposé sommaire de l’amendement –, n’est pas digne, monsieur le ministre. Vous auriez pu procéder autrement. Rien ne vous obligeait à présenter cette disposition dans le présent texte. Cet amendement aurait pu être soumis à la commission des affaires économiques, ne serait-ce qu’au cours de la réunion qu’elle a tenue ce matin, à onze heures trente. De même, l’amendement n° 75 aurait pu également être débattu en commission. Ces méthodes sont vraiment indignes.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Moi, je trouve que ce sont les propos que vous venez de tenir qui sont inadmissibles, messieurs ! Vous faites en effet semblant de ne pas savoir comment les choses se passent à l’Assemblée nationale pour donner l’impression, à la lecture du compte rendu, et à travers la suspicion que vous faites peser tant sur la commission que sur les auteurs des amendements, qu’on s’est livré à un coup monté.

M. Daniel Paul. Eh oui !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Non, et vous le savez très bien !

La commission s’est réunie ce matin pour discuter d’un texte relatif au logement. Depuis le temps que vous siégez sur ces bancs, vous auriez pu au moins lire le règlement de notre assemblée !

M. Daniel Paul. Vous l’adaptez comme vous le voulez !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Le règlement prévoit une réunion, et une seule, au titre de l’article 88 et celle-ci a eu lieu.

Par ailleurs, et je le rappelle afin que cela soit clairement établi au compte rendu, les amendements nos 71 et 75 ont le mérite, sur un total de 180 amendements, d’avoir été déposés parmi les premiers. S’ils ne sont pas arrivés devant notre commission, ce dont je peux m’émouvoir au même titre que tous les députés ici présents, c’est qu’ils ne sont pas revenus assez rapidement des services chargés d’en examiner la recevabilité.

Monsieur le président, vous en ferez la remarque à qui de droit. Cette procédure est en effet tout à fait indépendante de la commission des affaires économiques, que j’ai l’honneur de présider, et de ses services. Cessez donc de nous faire de faux procès, messieurs, et d’imaginer des complots qui n’existent pas !

Cela étant, si vous aviez été présent avec nous cette nuit, monsieur Caresche,…

M. Christophe Caresche. J’aurais été heureux d’être parmi vous !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. …vous auriez déjà entendu ces arguments. Lorsque M. Devedjian a déposé son amendement, personne sur les bancs de cette assemblée n’y a vu l’ombre d’une manœuvre ou d’un complot. Les députés présents cette nuit ont appris, en revanche, que, depuis le 1er juillet, il y a vacance du pouvoir au STIF puisque le président n’assume pas sa responsabilité et que l’instance régionale ne désigne pas ses représentants. Souhaitant fort justement que le STIF puisse fonctionner, M. Devedjian a donc présenté un amendement permettant de débloquer une situation figée depuis six mois pour des raisons politiciennes, pour le coup. Et cela n’est pas du fait de la majorité, monsieur Caresche.

La commission a examiné l’immense majorité, pour ne pas dire les trois quarts, des 180 amendements qui ont été déposés. Pourquoi ne faites-vous donc pas allusion aux autres amendements qui ne nous ont pas été soumis, car il n’y a pas que ces deux malheureux amendements, monsieur Paul,…

M. Daniel Paul. Ce ne sont pas de « malheureux » amendements ! Ne nous prenez pas pour des naïfs !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. …qui aient été retenus. Je regrette que vous ne parliez pas de tous les autres.

M. Daniel Paul. Mauvaise opération politicienne !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Cet amendement est extrêmement important sur le fond. Il s’agit en effet de savoir si la France va se doter dans les toutes prochaines années d’un système de liaison directe entre le centre ville de Paris et l’aéroport de Roissy. Nous savons tous aujourd’hui combien il est difficile de se rendre à Roissy, quel que soit le mode de transport utilisé. Si cette liaison est rapidement réalisée, la France sera ainsi dotée d’un des aéroports les plus attractifs de toute l’Europe occidentale. L’enjeu est donc considérable.

Par ailleurs, et nous avons pu le constater en entendant les différents intervenants, le conseil régional d’Île-de-France est partagé sur cette affaire, pour des raisons que l’on peut du reste comprendre. On peut en effet admettre que la comparaison de cet investissement avec d’autres concernant un très grand nombre d’habitants de l’Île-de-France soulève quelques interrogations. C’est précisément pour éviter ce type de problèmes qu’il nous est apparu préférable, après avoir pris contact avec le président de la région Île-de-France, de sortir du débat interne à la région ce dossier qui, à l’évidence relève de l’intérêt national. C’est à l’État de reprendre la main sur ce projet et d’assumer la responsabilité de le réaliser.

J’ajoute que, dans le contrat de plan qu’il a signé avec la région Ile-de-France, l’État prévoit d’apporter 100 millions d’euros pour la rénovation du RER B, sur un coût total de 200 à 220 millions d’euros, ce qui montre bien qu’il n’abandonne pas ses responsabilités en ce qui concerne l’amélioration des transports collectifs en région Ile-de-France.

Cet amendement peut nous permettre d’aller vite et de ne pas mettre cet investissement important en concurrence avec d’autres, tout aussi légitimes, que cette région entend réaliser. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est tout à fait favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. J’ai bien entendu vos explications, monsieur le ministre, et je suis moi-même favorable à tout ce qui améliore cette liaison express, très importante pour l’attractivité économique de la métropole parisienne. Vous comprendrez en revanche que, sur des sujets aussi importants, le fonctionnement – ou plutôt le dysfonctionnement – de notre assemblée, ainsi que l’a décrit le président Ollier, nous pose problème : nous avons découvert ces amendements il y a quelques heures !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous aussi !

M. Christophe Caresche. Quand je dis « nous », je pense à l’Assemblée dans son ensemble ! C’est un problème dont vous devez peut-être discuter avec le président de la commission des finances, mais nous ne pouvons pas travailler dans de telles conditions.

Cet amendement et celui qui concerne le STIF provoquent un véritable émoi chez les élus – toutes tendances confondues – de la région Ile-de-France. Traiter les problèmes de cette façon relève d’une mauvaise méthode.

En ce qui concerne le STIF, monsieur le ministre, vous avez évoqué les échanges que vous avez eus avec le président du conseil régional : cela me paraît de bonne méthode. Je ne suis pas certain – je suis même sûr du contraire – que l’amendement qui a été déposé hier par M. Devedjian l’ait été dans les mêmes conditions. Que M. Devedjian, président du conseil général des Hauts-de-Seine, vienne régler à l’Assemblée nationale un problème entre le conseil général des Hauts-de-Seine et le conseil régional d’Ile-de-France est très contestable !

Mme Martine Billard. C’est vrai !

M. Christophe Caresche. Ce n’est pas le rôle de l’Assemblée nationale : nous ne sommes pas une assemblée d’élus locaux et personne ici ne devrait agir de la sorte !

M. Richard Cazenave. Bien sûr, vous êtes étrangers à de telles pratiques !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Imaginez que l’on fasse la même chose pour la région Alsace : je crois que vous apprécieriez peu.

Je rappelle à M. le président de la commission que l’article 91 de notre règlement dispose que la commission peut être réunie si des amendements n’ont pu être examinés dans les conditions prévues par l’article 88. Il nous était donc possible d’examiner ces amendements en commission. Le fait que les difficultés d’une région soient gérées à l’Assemblée nationale pose un vrai problème. Si l’on commence comme cela, jusqu’où ira-t-on ?

Concernant le conflit sur la gestion du STIF, je vous rappelle que des négociations sont en cours pour définir la part que l’État devra financer après transfert de la gestion du STIF à la région et aux départements. Ces négociations semblent sur le point d’aboutir. En tant qu’élue d’Ile-de-France, je ne puis que m’étonner de la volonté de passer en force dont témoignent l’amendement d’hier soir et celui-là, sur des questions gérées par les instances représentatives de la région Ile-de-France.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71.

M. Daniel Paul. Contre !

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 13, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 13, ainsi modifié, est adopté.)

Article 14

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 13, 68, 81 et 145 tendant à la suppression de cet article.

La parole est à M. Christian Kert pour soutenir l’amendement n° 13.

M. Christian Kert. L’article 14, monsieur le ministre, semble parachuté dans le paysage radiophonique français. Nous considérons qu’il n’est pas nécessaire d’inscrire dans la loi la création de radios d’autoroutes. Elles existent et se développent depuis plus de quinze ans avec l’aval du CSA, qui sait très bien le rôle qu’elles jouent en matière de sécurité. Nous insistons à notre tour sur leur utilité.

La loi du 30 septembre 1986, qui porte sur les libertés publiques, a déjà été retouchée, mais toujours après de multiples concertations et un débat parlementaire approfondi. Or cet article 14 n’a en revanche fait l’objet d’aucune concertation préalable avec les acteurs radiophoniques. Dominique Baudis, président du CSA, indiquait dans un courrier adressé en octobre dernier au Premier ministre que l’autorité de régulation n’avait pas été saisie pour avis sur ce texte.

Par ailleurs, conformément aux dispositions votées dans le cadre de la loi du 10 juillet 2004, le CSA mène depuis plusieurs semaines une concertation avec tous les acteurs radiophoniques pour optimiser l’usage du plan de fréquences sur lequel travaille depuis quelques mois notre collègue Pierre-Christophe Baguet. Ce travail fastidieux entrepris par le CSA consiste à trouver un équilibre entre 1 070 opérateurs privés qui se partagent quelque 3 400 fréquences. C’est cet équilibre que viendrait télescoper le droit de priorité prévu par cet article 14.

Certes, l’article 26 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit déjà des droits de priorité, mais au bénéfice de sociétés publiques clairement identifiées par la loi : Radio France, France Télévisions, Arte. L’article 14 instaurerait un droit de priorité au profit de personnes morales non définies par la loi, qui poursuivraient un objectif de service public de sécurité routière, lequel serait défini par décret. S’agissant d’un texte qui touche aux libertés publiques, ce degré de flou n’est pas acceptable au regard des prérogatives législatives.

Le Premier ministre lui-même a annoncé que la loi du 30 septembre 1986 serait retouchée l’année prochaine pour prendre en compte l’arrivée de la télévision sur les mobiles. Cette opportunité législative permettra au Parlement d’étudier à nouveau cette question, après une véritable concertation avec les acteurs concernés, qu’une telle disposition inquiète, après avis du CSA et dans le cadre d’un débat parlementaire qui aura accordé toute l’attention que méritent des enjeux de liberté publique.

Vous en conviendrez, monsieur le ministre, toutes ces raisons militent en faveur de la suppression de l’article 14.

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Hamelin, pour soutenir l’amendement n° 68.

M. Emmanuel Hamelin. Monsieur le ministre, aux arguments qu’a développés M. Kert, j’ajoute que cet article 14 ne répond pas aux exigences de la directive européenne. Il modifierait de façon importante la loi de septembre 1986 en matière de liberté de communication audiovisuelle, ce que nous aurions tort de sous-estimer tant les enjeux sont importants, et affecterait en profondeur le mode d’attribution des fréquences radio. De plus, comme l’a indiqué Christian Kert, il est en contradiction totale avec les travaux conduits par le CSA, dans des conditions difficiles, en vue d’optimiser la planification de la bande FM.

Nous sommes tous d’accord pour considérer que l’information sur la sécurité routière est un objectif d’intérêt général, mais il est déjà porté par l’ensemble des radios et il n’y a pas lieu d’instaurer une telle priorité au bénéfice de certaines d’entre elles.

La loi sur la communication audiovisuelle de 1986 dispose que le CSA attribue en priorité des fréquences aux sociétés du service public de la communication audiovisuelle. Le Parlement, dans sa grande sagesse, a toujours évité d’instaurer des catégories prioritaires de radios privées. Il serait donc singulier, voire dommageable de bouleverser un équilibre maintenu au fil des législatures par la loi sur la liberté de la communication.

Nous savons que le CSA aurait souhaité être consulté, au moins pour avis ; cela n’a pas été le cas. On peut imaginer qu’il le sera pour le projet de loi modifiant la loi de 1986 qui devrait nous être présenté en 2006.

Je précise que l’article 14 ne mentionne pas les bénéficiaires de la priorité, ne définit pas la mission de service public d’information routière et ne donne aucune indication sur le nombre et l’étendue de ces services. Il ne dit pas non plus quel serait le critère d’attribution qui permettrait de départager plusieurs concurrents.

Par ailleurs, si cet article était adopté, n’importe quelle collectivité locale pourrait créer sa propre radio prioritaire, dès lors qu’elle rendrait un service public d’information routière, y compris dans une grande agglomération comme Paris. Cela modifierait considérablement les équilibres précaires qui existent, dans les agglomérations comme en dehors de celles-ci, ce qui serait dommageable. Comme Chrisitan Kert, je pense que la sagesse voudrait que l’Assemblée renvoie cette discussion au projet de loi sur la communication audiovisuelle, annoncé pour 2006.

M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues, pour soutenir l’amendement n° 81.

Mme Odile Saugues. Notre collègue Christian Kert a parlé de l’article 14 comme d’un parachutage. Effectivement, cet article permettrait à toutes les radios du secteur privé, sous prétexte d’une mission de service public d’information routière, de bénéficier du droit de préemption jusqu’alors réservé au seul service public télévisuel et radiophonique. Le CSA s’en est d’ailleurs inquiété auprès du Premier ministre, craignant qu’un tel droit ne remette en cause l’équilibre actuel du paysage radiophonique.

Cet article, présenté en marge du plan de réorganisation des fréquences de la bande FM prévu en 2006, ressemble à un contournement du CSA, pourtant seul habilité à délivrer les fréquences radiophoniques après consultation des candidats. Pour cette raison, nous sommes opposés à cet article et demandons sa suppression.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour soutenir l’amendement n° 145.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je vous indiquais hier soir, monsieur le ministre, que toute modification de la loi de 1986 sur la liberté de communication – rien de moins ! – devait être maniée avec la plus extrême prudence. Tous les spécialistes de l’audiovisuel qui sont présents ce soir savent bien que ce qui touche la radio touche en cascade la télévision et la presse écrite ; c’est un véritable jeu de dominos !

Cet article est la négation du travail parlementaire réalisé année après année pour donner une véritable indépendance à l’autorité de régulation qu’est le CSA. J’ai rédigé en 2002 un rapport sur l’optimisation de la bande FM et, en 2004, notre assemblée a modifié les échéances des autorisations à émettre afin de parvenir en 2006 à une solution d’ensemble.

Cet article remettrait aussi brutalement en cause l’équilibre fragile qui existe entre les catégories de radios – privées, associatives et indépendantes – et entre le service public et les radios privées. Ce serait un éléphant dans un magasin de porcelaine, et cet avis est partagé sur tous les bancs de cet hémicycle. Lors de la discussion de son budget et en réponse à notre collègue Frédéric Dutoit, du groupe des député-e-s communistes et républicains, le ministre de la culture et de la communication lui-même a dit son opposition à cette mesure. Je m’étonne donc de la retrouver aujourd’hui dans ce texte.

Monsieur le ministre, même si l’information routière est un objectif d’intérêt général incontestable, la sagesse voudrait que l’on renvoie cette mesure à la modification de la loi sur la liberté de communication qui devrait nous être proposée en 2006, comme l’a annoncé le Premier ministre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission a émis un avis favorable à l’amendement de M. Kert.

Si l’objectif de sécurité routière poursuivi par l’article est tout à fait légitime, il ne nous semble pas suffisamment encadré et risque de compromettre les équilibres de la loi de 1986 en matière d’attribution de fréquences. En effet, celle-ci énumère précisément les bénéficiaires de la priorité d’accès à la ressource, ce que ne fait pas l’article 14. Les zones d’émission pertinentes au regard de l’objectif poursuivi ne sont pas non plus définies. On crée ainsi un accès prioritaire à une ressource rare − la ressource électrique −, dans des conditions exorbitantes du droit commun, en faveur d’une catégorie potentielle d’intervenants extrêmement large. Cela risque de mettre en péril la diversité de notre paysage radiophonique, alors même que le CSA travaille à un plan d’optimisation des fréquences.

Pour toutes ces raisons, la commission a accepté l’amendement de suppression de l’article.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le Gouvernement n’a jamais eu l’intention de proposer au Parlement d’empiéter sur les pouvoirs du CSA, même si celui-ci en a peut-être eu l’impression. Il ne s’agit nullement d’un conflit de pouvoir entre l’exécutif, le législatif et une autorité administrative indépendante. Sans doute aurons-nous à y revenir dans un autre texte, mais nous devons d’ores et déjà nous demander comment utiliser ce type de service radio.

Tout le monde connaît et écoute les informations routières sur la fréquence 107,7 MHz. Le progrès technique aidant − GPS ou Galileo −, la route va devenir de plus en plus intelligente et nous serons amenés à développer de nouveaux services à l’automobiliste, tels des systèmes de localisation, dont une part transitera sur les ondes de la radio. Il est donc très important que nous conservions un système pratique et que la fréquence soit la même sur tout le territoire.

Je reconnais bien volontiers que, jusqu’à présent, le CSA a privilégié cette solution, mais rien ne nous garantit, et rien ne garantit au Parlement et aux gouvernements de demain, qu’il en ira toujours ainsi. Je sais bien que, depuis le mois d’octobre, où l’article 14 a été adopté sans discussions au Sénat, différents intervenants du monde de l’audiovisuel se sont manifestés. Pourtant, cet article est vraiment soucieux de l’intérêt général, puisqu’il vise à préserver la possibilité d’avoir, sur l’ensemble du territoire, une même fréquence disponible pour les services que j’ai évoqués.

Je constate que nos points de vue divergent : ça n’est pas une affaire, mais je voulais souligner la préoccupation qui nous a guidés.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 13, 68, 81 et 145.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 14 est supprimé et l’amendement n° 143 n’a plus d’objet.

Article 15

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n° 178.

M. Daniel Paul. Cet amendement vise à apporter quelques éclaircissements.

Hier, vous avez indiqué, monsieur le ministre, que vous compreniez les difficultés du transport routier, laissant entendre que les critiques que nous formulions à l’encontre de la répartition entre les divers modes de transport, en particulier entre le routier et le ferroviaire, s’expliquaient par le fait que nous voulions la mort du transport routier, ce qui est faux.

Aujourd’hui, le transport routier souffre d’une sous-tarification due à une concurrence agressive, qui ne permet plus aux entreprises les plus fragiles d’équilibrer leurs charges. Ce n’est pas en accentuant le principe de la concurrence, en jouant sur les tarifs du gazole ou en remboursant telle ou telle part des charges de gazole qu’on réglera le problème, car on trouvera toujours des chauffeurs routiers prêts à venir travailler pour moins cher dans des entreprises européennes, et les règles de l’exploitation capitaliste − comme on dit dans le parti dont je suis membre − pourront ainsi continuer de s’appliquer.

Il n’existe pas de réglementation concernant la tarification du transport routier de marchandises depuis une directive de 1986 imposant la liberté des prix dans le secteur. C’est d’ailleurs pour cela que sera défendu, tout à l’heure, un amendement instituant une taxe en Alsace : pourquoi ne pas l’étendre à toute la France ?

La libre concurrence mise en œuvre au niveau européen favorise le dumping social. Si tous les secteurs − routier et ferroviaire − subissent les effets pervers de cette politique libérale, ces deux modes de transport ne sont pas tout à fait égaux. La structure de l’externalisation des coûts, qui était estimée à 230 milliards d’euros au niveau de l’Europe des Quinze en 2000, met clairement en évidence cette inégalité : alors que moins de 2 % étaient imputables au fer, près de 97 % l’étaient à la route. Ces coûts externes sont essentiellement supportés par la collectivité et, de plus en plus, par les collectivités territoriales, sans réellement être imputés à l’activité de transport ; c’est donc le contribuable qui paie.

Cette situation est évidemment entretenue par le patronat privé, car elle lui permet de se soustraire à la prise en charge des nuisances et des effets secondaires de son activité. Elle lui permet aussi d’user d’un outil de production mis à sa disposition à moindres frais, voire gratuitement : pour le transport routier, c’est notamment le cas en ce qui concerne les infrastructures, les conditions sociales faites aux salariés et les nombreux allégements de charges et défiscalisations accordés au patronat. Vous pouvez, certes, continuer jusqu’au bout dans cette direction, mais ce sera pour aller dans le mur.

Cette absence de prise en compte de la réalité des coûts a une incidence directe sur la sous-tarification du transport. Elle joue un rôle de premier ordre dans le dumping tarifaire, fiscal et social qui fertilise la crise profonde de ce secteur.

Devant ce constat alarmant, et dans un souci de préservation des fonds publics, nous proposons de mettre en place, au niveau français et européen − car, logiques avec nous-mêmes, les camions circulant à travers toute l’Europe, nous pensons qu’il faut privilégier l’harmonisation par rapport à la loi de la jungle qui prévaut actuellement −, une tarification sociale obligatoire, c’est-à-dire un prix minimal qui prenne en compte les problématiques sociales, économiques et environnementales : salaires, qualifications, baisse du temps de travail, coûts des infrastructures, coûts de l’application du droit du travail et, bien évidemment, coût environnemental.

Tel est le sens de notre amendement. Je suis persuadé, en voyant l’attention de mes collègues de la majorité, qu’ils sont sensibles à mes arguments.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Pas à ceux-là !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. L’amendement a été repoussé par la commission. M. Paul le savait du reste, puisqu’il assistait à notre réunion.

M. Daniel Paul. Oui, mais je suis un éternel optimiste !

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Compte tenu de la crise qu’il traverse actuellement et eu égard au nombre d’emplois concernés, le secteur routier n’a pas besoin de charges supplémentaires.

M. Daniel Paul. C’est pourquoi vous allez en ajouter en Alsace !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 178.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15.

(L’article 15 est adopté.)

Après l’article 15

M. le président. Après l’article 15 je suis saisi de deux amendements, nos 60, deuxième rectification, et 182, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Richard Cazenave, pour soutenir l’amendement n° 60, deuxième rectification.

M. Richard Cazenave. L’article L. 132-8 du code de commerce permet à un transporteur sous-traitant, dit « transporteur voiturier », de réclamer le paiement de sa prestation auprès du destinataire ou de l’expéditeur lorsqu’il lui est impossible de l’obtenir auprès du transporteur principal, dit « commissionnaire ».

La loi assure ainsi la protection du transporteur voiturier en cas de défaillance du commissionnaire de transport qui l’a affrété. Or la jurisprudence − notamment un arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 2004 − a inspiré cet amendement, qui considère que toute interdiction de sous-traiter doit faire l’objet d’une convention expresse entre le commissionnaire et l’expéditeur ou le destinataire. Cette convention ne dispense pas l’expéditeur ou le destinataire de payer le transporteur sous-traitant, si l’interdiction n’est pas mentionnée dans le contrat que ce transporteur a passé avec le commissionnaire.

Cette question est un peu compliquée et nous devons être soucieux de précision juridique. Je dois même avouer ma perplexité, car je ne suis pas certain que la rédaction de l’amendement n° 60, deuxième rectification, soit préférable à celle de l’amendement n° 60 rectifié. (Sourires.)Celui-ci disposait en effet : « Toute interdiction de sous-traiter doit faire l’objet d’une convention expresse qui n’est pas opposable au transporteur substitué si l’interdiction n’est pas mentionnée dans le contrat de sous-traitance. »

Cette rédaction paraissait plus sobre. L’amendement n° 60, deuxième rectification, plus bavard, n’est pas forcément plus précis. Je n’ai pas assisté aux travaux de la commission et, bien que cosignataire de l’amendement qui, sur le fond, me paraît important, je prends sa défense au pied levé, mais je serai très attentif à ce qu’auront à dire la commission et le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le ministre pour présenter l’amendement n° 182 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 60, deuxième rectification.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. J’avais souhaité sous-amender l’amendement n° 60 rectifié, qui m’aurait semblé satisfaisant si l’Assemblée avait substitué à la dernière phrase les mots « sauf si celui-ci en a eu connaissance explicitement dans son contrat ». M. Cazenave vient de présenter une deuxième rectification qui complique tout. Je suis totalement défavorable à cet amendement, qui ne me paraît pas facile à sous-amender, ne serait-ce que parce qu’il se contredit d’une phrase à l’autre, alors même que le sujet est particulièrement délicat.

M. le président. Monsieur Cazenave, l’amendement n° 182 du Gouvernement a le même objet que le vôtre, tout en proposant une meilleure rédaction. Acceptez-vous de retirer à son profit l’amendement n° 60, deuxième rectification ?

M. Richard Cazenave. Je le retire d’autant plus volontiers, monsieur le président, que l’amendement n° 182 reprend la rédaction initiale de mon amendement. La boucle est ainsi bouclée !

M. le président. L’amendement n° 60, deuxième rectification, est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 182 du Gouvernement ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission avait souhaité que l’amendement n° 60, deuxième rectification, légitime sur le fond, soit réécrit au plus tard d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, afin de disposer d’une rédaction définitive qui convienne à tout le monde. Puisque tel est le cas avec l’amendement n° 182, la commission ne peut qu’être favorable à cette nouvelle rédaction.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182.

(L'amendement est adopté.)

Article 15 bis

M. le président. Je suis saisi d’un amendement de suppression, n° 40, de l’article 15 bis.

La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. L’article 15 bis, introduit par le Sénat, a pour objet de soumettre à l’application de la LOTI les deux roues effectuant du transport de marchandises pour le compte d’autrui. Une telle disposition est susceptible de générer un surcoût considérable lié aux formalités bureaucratiques, s’agissant notamment de l’inscription au registre visé aux articles 7 et 8 de la LOTI, ce qui nuirait au développement de l’emploi dans ce secteur.

En outre, seuls seraient soumis à ces formalités les deux roues effectuant du transport pour le compte d’autrui et non ceux le réalisant pour leur propre compte, comme les livreurs de pizza. La commission a donc souhaité la suppression de l’article 15 bis.

Néanmoins, sensible à la volonté du Sénat de permettre l’exercice de ces activités dans des conditions optimales de sécurité, elle a adopté l’amendement suivant, n° 41, qui vise à sécuriser ces transports.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 15 bis est supprimé.

Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 15 bis.

Après l’article 15 bis

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 41.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La compétence du ministre des transports ne couvre, du fait de la rédaction actuelle de l’article L. 611-4 du code du travail, que les entreprises de transports publics exerçant à titre principal une activité au moyen de véhicules ayant au moins deux essieux.

Cet amendement a pour objet de l’étendre à l’ensemble des véhicules routiers motorisés, afin de permettre aux inspecteurs du travail des transports de contrôler également les coursiers utilisant les véhicules deux roues – motos, scooters, mobylettes...

Il répond à la préoccupation exprimée par le Sénat en matière de sécurité des transports effectués par des véhicules deux roues, sans pour autant alourdir les formalités administratives.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour présenter l’amendement n° 149.

M. Pierre-Christophe Baguet. Cet amendement tend à compléter celui qui vient d’être proposé par le rapporteur, en étendant, comme le proposait le Sénat, aux entreprises de transport routier de marchandises utilisant des véhicules à deux roues motorisées, l’application du cadre juridique prévu par la LOTI dans ses articles 7 et 8 pour les autres véhicules de transport.

Aujourd’hui, les entreprises effectuant du transport léger de marchandises pour le compte d’autrui avec des deux roues motorisées ne sont pas tenues de s’inscrire au registre des transporteurs et échappent de ce fait aux obligations qui en découlent : capacité professionnelle et financière, conditions d’honorabilité, contrôle de l’inspection du travail des transports.

L’amendement du rapporteur permet de soumettre ces entreprises au contrôle de l’inspection du travail des transports, mais, en ne rendant pas l’inscription obligatoire au registre des transporteurs pour ces entreprises, il ne permet pas de mettre fin à une concurrence déloyale, dangereuse pour la profession.

Mon collègue de l’UMP, Jacques Pélissard, président de l’association des maires de France, a cosigné cet amendement, très soucieux qu’il est de lutter contre toute forme de travail insuffisamment encadrée. Sans vouloir brider, monsieur le rapporteur, le développement de quelque entreprise que ce soit, il convient de veiller à ce qu’elles puissent travailler dans des conditions de concurrence loyale. Or trop d’entreprises ne se soumettent pas au contrôle, ce qui n’est pas bon pour la profession.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement.

J’y suis, à titre personnel, défavorable car il reprend les dispositions de l’article 15 bis que nous venons de supprimer. Or, pour les raisons que j’ai évoquées, si nous avons souhaité renforcer la sécurité et le contrôle, nous n’avons pas voulu soumettre les entreprises à des formalités administratives supplémentaires trop lourdes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Défavorable, par souci de cohérence.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je ne pense pas, monsieur le rapporteur, que les formalités en question soient très lourdes. Les sociétés devront, en tout état de cause, répondre aux demandes de l’inspection du travail et des transports : je ne vois donc pas pour elles de complications nouvelles, alors qu’à l’inverse nous gagnerions beaucoup à les faire entrer dans le cadre des articles 7 et 8 de la LOTI.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 15 ter

M. le président. L'article 15 ter ne fait l’objet d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 15 ter est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 15 ter.

Après l’article 15 ter

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, pour défendre l’amendement n° 134.

M. Yves Bur. Depuis le 1er janvier, l'Allemagne a instauré une taxe kilométrique, appelée Lastkraftwagen Maut, s'appliquant aux poids lourds de douze tonnes et plus circulant sur le réseau autoroutier fédéral.

La mise en place de cette taxe a entraîné un report significatif du trafic des poids lourds en transit vers le réseau routier alsacien et lorrain, estimé, d’après une étude effectuée par la direction régionale et départementale de l'équipement d'Alsace, entre 1 100 et plus de 2 000 camions par jour, selon les sections. Ce nombre représente donc une augmentation considérable du trafic des poids lourds, qui essaient ainsi d’éviter le péage automatique en vigueur sur les autoroutes allemandes.

Ce phénomène de report risque même de s’aggraver puisque le ministre président du Land voisin, M. Oettinger, m’a indiqué que le Bad-Wurtemberg, rencontrant les mêmes problèmes sur ses routes nationales – les bundesstraße – et régionales, il entendait étendre éventuellement le péage sur ces voies. Une telle décision ne ferait qu’aggraver la situation sur les routes alsaciennes dans le sens Nord-Sud, alors que le trafic trans-européen actuel, qui pénalise déjà lourdement la circulation, a suscité un ras-le-bol de la population.

Cet effet de report était prévisible depuis bien longtemps, mais on a, comme d’habitude, préféré attendre avant d’annoncer quelques mesurettes : des études, puis des contrôles renforcés, c’est-à-dire rien. Une fois de plus, nous sommes confrontés à l’impuissance publique, celle de l’État, de la région et autres collectivités territoriales, bref devant une impuissance politique.

C’est la raison pour laquelle, avec mes collègues alsaciens, je propose de mettre en place, ainsi que l'autorise le récent article 37-1 de la Constitution, une expérimentation, d'une durée de cinq ans et limitée à la région Alsace. Il s’agirait de taxer les poids lourds de plus de douze tonnes en transit qui empruntent le réseau routier à proximité d'axes payants, seule solution selon nous pour faire cesser ce report.

Cette taxe aura un impact marginal sur le transport routier infrarégional, mais le développement du trafic de transit international ne peut que croître. Son recouvrement s'inspire du système en vigueur sur les autoroutes allemandes, le Toll-Collect. Ce système, entièrement automatisé, permettrait de reverser aux collectivités françaises gestionnaires des réseaux le montant de la taxe, qui serait compris entre 0,001 et 0,015 euro par tonne et par kilomètre, soit une douzaine d’euros pour une centaine de kilomètres. C’est l’absence de recouvrement de ces 12 euros qui explique l’augmentation considérable du trafic en Alsace.

Les estimations effectuées, notamment par la direction régionale et départementale de l'équipement, montrent que ce type de péage pourrait générer entre 4 et 5 millions d’euros de recettes supplémentaires, ce qui n’est pas négligeable.

Monsieur le ministre, en permettant une telle expérimentation, on apporterait une réponse enfin concrète à une préoccupation de tous les automobilistes alsaciens qui n’en peuvent plus d’étouffer dans le trafic de camions. Certes, on irait à l’encontre de la pensée unique, mais cet amendement est l’occasion d’expérimenter, à l’échelle d’une région, un système qui fonctionne, sachant qu’il serait évalué au bout de cinq ans. Une telle expérimentation devrait nous permettre, j’en suis sûr, d’en tirer des conclusions intéressantes pour d’autres régions qui rencontrent des problèmes de même nature dans notre pays.

La seule manière de sortir d’un tel imbroglio serait, in fine, la mise en place d’une taxe européenne. Nous n’y sommes pas encore, mais le débat ne fait que commencer.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais bien que n’étant pas adepte de la pensée unique, j’émettrai, à titre personnel, un avis défavorable.

Outre que nous sommes dans le cadre d’un problème frontalier, la taxe proposée frapperait de la même manière les poids lourds nationaux, ce qui paraît aller à rebours des efforts qui ont été consentis dans ce secteur en crise.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je connais, monsieur Bur, le problème que vous évoquez et j’ai d’ailleurs eu l’occasion, lors d’un récent déplacement en Alsace, d’en discuter avec plusieurs élus dont vous-même. Pour autant, votre amendement me semble prématuré car, comme vous le savez – vous y avez d’ailleurs fait allusion avec malice –, une étude a été lancée par la région Alsace et les deux départements qui la composent pour tenter, avec le concours de l’État, de trouver des solutions.

Par ailleurs, le dispositif que vous proposez est certes ingénieux mais également terriblement complexe. Il suppose un système déclaratif, comme dans les démarches que l’on fait en douane, et des contrôles qui ne seront pas simples.

Je comprends la motivation des auteurs de cet amendement mais, avant de me prononcer favorablement, un examen plus approfondi me semble nécessaire, notamment l’organisation de tests et d’une concertation avec les professionnels.

Je vous propose donc que nous prenions acte ensemble de la nécessité de ne pas rester inactifs et d’essayer de trouver au plus vite des solutions, en sachant que les contraintes sont assez lourdes. Il faut un dispositif qui soit constitutionnel, c'est-à-dire qui soit égalitaire – le vôtre l’est probablement –, qui soit compatible avec les textes européens et, surtout, qui soit pratique et efficace.

Je suis tout à fait disposé à travailler très sérieusement avec vous, avec la région Alsace et avec les deux départements impliqués, pour sortir de ces difficultés, mais, pour l’heure, je vous demande de retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Bur, accédez-vous à cette demande ?

M. Yves Bur. Monsieur le ministre, je n’attendais pas une autre réponse de votre part. Cependant vous parlez de complexité quand nous ne faisons qu’introduire un péage ; vous affirmez que ce système n’est pas pratique alors qu’il marche très bien en Allemagne et qu’il n’y a donc aucune raison de chercher à innover techniquement.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Ce n’est pas le système allemand.

M. Yves Bur. La méthode de collecte existe. Elle est automatisée, simple et pratique pour l’ensemble des camionneurs.

Je suis d’accord pour que nous travaillions ensemble, mais je préfère que nous votions sur cet amendement. Si, par bonheur pour l’Alsace, il était adopté, nous pourrions travailler à l’améliorer afin que les choses avancent plus rapidement. Personne ne croit un instant, en tout cas pas moi, que, autrement, nous aboutirons rapidement. Donc, je maintiens l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je soutiens l’amendement de M. Bur, non par opportunisme politique, mais parce qu’il répond à l’une des interrogations que j’ai formulées précédemment. J’étais même tenté de proposer un sous-amendement qui aurait supprimé les termes « pour la région Alsace », afin de généraliser l’expérimentation à l’ensemble du territoire. Les problèmes ne sont pas que frontaliers.

M. Yves Bur. Tout à fait !

M. Daniel Paul. Nous constatons ainsi tous les jours que lorsqu’une autoroute est parallèle à une route nationale ou à une route départementale, les poids lourds circulent sur ces dernières. En Basse-Normandie par exemple, les poids lourds empruntent non pas l’autoroute A 13 mais la route nationale qui lui est parallèle et qui n’a pas fait l’objet du même entretien, au grand dam des communes normandes qui avaient espéré se débarrasser des semi-remorques avec la construction de l’autoroute.

Il s’agit non pas de refuser les routiers, mais d’assurer un confort de vie. Si nous ne prenons pas ce genre de mesures, nous aurons de plus en plus de difficultés.

Cet amendement ne contrevient pas aux règles européennes. Et si l’expérimentation peut, demain, être étendue à d’autres régions frontalières, l’Alsace aura fait figure de région d’avant-garde, cher collègue.

M. Yves Bur. Une fois de plus ! L’Alsace, pionnière de la décentralisation !

M. Daniel Paul. Vous voyez que nous savons être positifs.

J’aurai aimé, monsieur le ministre, que vous preniez les mêmes précautions sur les deux amendements autrement plus lourds qui ont été proposés cette nuit et tout à l’heure.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. M. Bur ayant décidé de maintenir son amendement alors que j’en avais demandé le retrait, l’Assemblée va devoir voter. Auparavant, je tiens à ajouter, avec une certaine gravité, que, dans le contexte économique actuel, il faut faire attention à la façon dont les décisions sont perçues.

Je comprends bien la problématique alsacienne mais ce n’est pas la seule région à connaître des difficultés dans ce secteur économique. Or, comme vient de le démontrer M. Paul, vous lancez un signal : si on commence une expérimentation en Alsace, la profession va s’attendre à ce qu’elle soit étendue. C’est pourquoi, en tant que ministre des transports qui assume pleinement ses responsabilités, je demande très clairement à l’Assemblée de ne pas adopter cet amendement. Je le répète : dans le contexte actuel, je considère que ce ne serait pas raisonnable sur le plan économique si le système devait être généralisé.

M. Yves Bur. On ne fera jamais rien alors !

M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues.

Mme Odile Saugues. Le débat soulevé par l’amendement de nos collègues alsaciens montre qu’il serait quand même grand temps de mettre sur pied une véritable politique européenne du transport routier. Cet amendement, s’il était adopté, provoquerait à l’évidence un glissement vers d’autres régions. Il paraît difficile de lancer un test dans cette seule région frontalière.

Cela dit, je crois qu’il serait temps de faire comme nos collègues européens. Je ne méconnais pas les difficultés du transport routier et nous sommes tous au courant de ce qui se passe. Néanmoins si nous voulons définir une véritable politique européenne et faire payer aux transports routiers les coûts réels en termes d’environnement et d’infrastructures, il ne faut pas procéder au coup par coup. La recherche d’un équilibre s’impose. L’Europe est là pour nous aider dans cette réflexion.

Adopter cette mesure soulagerait la région Alsace mais engendrerait une vague déferlante qui irait jusqu’au Havre et jusqu’à la circonscription de mon collègue Daniel Paul. Ce n’est pas la solution. Il faut mener une réflexion beaucoup plus poussée et se demander pourquoi le rail a tant de difficultés, pourquoi le routier n’est pas soumis à certaines contraintes et pourquoi nos voisins, eux, ont jugé bon de collecter une taxe qui semble légitime. Il faut avoir le courage de reconnaître ces problèmes. Ce n’est pas en esquivant nos responsabilités que nous les résoudrons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 175 de M. Mariton est-il défendu ?

M. Yves Bur. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. L’amendement n° 175 n’a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, j’y suis favorable.

De la même façon que l’État compense les transferts de compétences, il est légitime que les transferts de compétences entre départements et communautés d’agglomération soient couplés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 175.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur Bur, défendez-vous également l’amendement n° 174 de M. Mariton ?

M. Yves Bur. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Même avis que précédemment.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Sagesse !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.

(L'amendement est adopté.)

Articles 15 quater et 15 quinquies

M. le président. Les articles 15 quater et 15 quinquies ne font l’objet d’aucun amendement.

Je mets aux voix l’article 15 quater.

(L’article 15 quater est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15 quinquies.

(L’article 15 quinquies est adopté.)

Article 15 sexies

M. le président. L’amendement n° 118 rectifié est rédactionnel.

La commission et le Gouvernement y sont favorables.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 15 sexies, modifié par l'amendement n° 118 rectifié.

(L'article 15 sexies, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15 septies

M. le président. L’article 15 septies ne fait d’aucun amendement. Je le mets aux voix.

(L'article 15 septies est adopté.)

Article 15 octies

M. le président. Je suis saisi de l’amendement, n° 151, qui tend à supprimer l’article 15 octies.

La parole est à Mme Odile Saugues, pour défendre cet amendement.

Mme Odile Saugues. La position de mon groupe est la même que concernant la construction des infrastructures ferroviaires. Pour des raisons identiques, nous demandons la suppression de l’article 15 octies.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’émets un avis défavorable, pour les mêmes raisons qui m’ont conduit à émettre un avis défavorable sur les amendements de suppression de l’article 13.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Mon intervention aura pour conclusion le rejet de l’article, mais je veux dénoncer, une fois de plus, le fait que l’on étende à ce mode de transport le recours au partenariat public-privé ainsi qu’aux délégations de service public pour la construction, l’entretien et l’exploitation de tout ou partie de l’infrastructure.

Dans ce contexte de désengagement financier de l’État, les investissements privés seront-ils à même de répondre à l’enjeu du développement du fluvial ?

La voie fluviale est en effet sous-utilisée en France ; je l’ai rappelé longuement hier dans mon intervention. Elle ne représente que 4 % des transports en France, contre 42 % aux Pays-Bas et près de 14 % en Allemagne. Si les activités fluviales françaises sont importantes près des zones frontalières, ailleurs, les fleuves sont désespérément sous-utilisés. Or, selon la fédération française des associations de protection de la nature et de l’environnement, il serait possible, sans aménagement particulier, de multiplier par trois ou quatre le trafic sur la Seine et par sept sur le Rhône. Ce mode de transport est beaucoup moins polluant que le routier. Il est donc urgent de le développer.

Un problème se pose cependant, que vos services connaissent certainement : lorsque le fluvial gagne des parts de marché, c’est en règle générale le ferroviaire qui en pâtit.

En outre, le fluvial entraîne, du fait des ruptures de charges, des coûts de manutention élevés. Seules des aides au développement de la voie d’eau et la prise en compte des coûts réels de la route pourront lui redonner un certain avantage.

Certes, il s’agit d’un mode de transport plus lent que la route, mais de nombreuses marchandises ne nécessitent pas un acheminement dans les vingt-quatre heures. Aux dires des chargeurs, ce qui importe, c’est la ponctualité et la sécurité.

Quant à son financement, comment l’assurer si on refuse les partenariats public-privé ? J’avais déposé un amendement qui permettait la mise en place d’un pôle public de financement, articulé autour de la Caisse des dépôts et consignations, de La Poste et des caisses d’épargne, de façon à débloquer des financements pour les infrastructures de transport nécessaires à la collectivité, qui ont besoin de prêts à longue durée et à taux réduits. L’épargne populaire pourrait ainsi être mobilisée pour de tels investissements d’intérêt public. Quant à la Caisse des dépôts et consignations, elle dispose de sommes considérables en réserve, qui seraient plus utiles au financement des infrastructures de transport qu’à l’alimentation des marchés financiers.

La mobilisation de fonds d’origine publique pourrait éviter de soumettre les projets à des délais de retour sur investissements extrêmement courts et à des taux de rendement élevés, de l’ordre de 7 à 15 %, et permettrait d’inscrire les subventions dans une logique de long terme, et pas seulement sur tel ou tel projet.

Ce pôle public d’aide aux transports peu polluants pourrait disposer d’autres ressources, par le biais par exemple d’une taxation sur les chargeurs, comme cela a été proposé tout à l’heure, ou sur les gros transporteurs routiers dans le cadre d’une politique de rééquilibrage intermodal pour répondre à la perte de parts de marché de fret ferroviaire.

Un tel financement par un pôle bancaire public permettrait également d’assurer de manière pérenne des financements ainsi qu’une démocratisation de la gestion des ressources publiques. On pourrait aussi créer un conseil de surveillance composé par la représentation nationale, les élus locaux, les comités d’usagers et les personnels des entreprises de transport, qui serait chargé de gérer l’attribution des fonds en les affectant aux projets les plus structurants en termes d’aménagement du territoire, de développement économique et d’égal accès aux services publics. À l’évidence, ce n’est pas cette orientation que vous semblez vouloir donner à votre texte. C’est ce qui motive notre rejet de l’article 15 octies.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. J’en viens à deux amendements identiques, nos 42 et 7.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 42.

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Cet amendement, adopté par la commission des affaires économiques en des termes identiques à l’amendement n° 7 adopté par la commission des finances, vise à prendre en compte les spécificités des voies navigables, ce que la rédaction issue du Sénat ne permettait pas de faire. Il tend à faciliter le recours aux PPP pour le projet Seine-Nord ainsi que pour la réhabilitation des barrages manuels dont la vétusté soulève de graves problèmes de sécurité pour les agents des voies navigables de France.

M. le président. Monsieur Bur, vous confirmez que l’amendement n°7 de la commission des finances est ainsi également défendu ?

M. Yves Bur. Bien sûr !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 42 et 7.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, pour défendre l’amendement n° 8 de la commission des finances.

M. Yves Bur. Cet amendement vise à simplifier et à alléger le texte du projet de loi en supprimant une disposition inutile afin de ne pas ralentir le montage de partenariats public-privé en matière de voies navigables

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Le Mèner, rapporteur. Avis favorable

M. le président. Le Gouvernement est également favorable

Je mets aux voix l’amendement n° 8.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux nouveaux amendements identiques, nos 43 et 9.

M. Yves Bur. L’amendement n° 9 est défendu

M. le président. Merci !

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 43.

M. Dominique Le Mèner. Ces amendements visent à prendre en compte les spécificités des voies navigables et à permettre à l’État de se substituer à Voies navigables de France pour la conclusion des PPP.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 43 et 9.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15 octies, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 15 octies, ainsi modifié, est adopté.)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour
de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, n° 2604, relatif à la sécurité et au développement des transports :

Rapport, no 2723, de M. Dominique Le Mèner, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;

Avis, no 2733, de M. Hervé Mariton, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)