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(La séance est ouverte à quinze heures.)
Comme il est d’usage chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions porteront sur des thèmes européens.
Nous commençons par une question du groupe UMP.
Il s’agit bien sûr d’une très bonne nouvelle, qui traduit la pertinence des choix du Gouvernement depuis deux ans. Pouvez-vous donc nous dire, monsieur le ministre, comment vous avez accueilli cette décision, et nous préciser les objectifs de croissance visés avec la poursuite de cette discipline budgétaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Je veux rendre hommage à la majorité et en particulier à Gilles Carrez, rapporteur général du budget (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), qui ont fait en sorte, depuis quatre ans, sous les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin, que soit atteint l’objectif du « zéro volume » pour les dépenses. Ce résultat exceptionnel a permis à notre pays de sortir de la procédure engagée contre lui.
M. Migaud essaie bien de trouver des arguments pour dire que la France va moins bien, mais les faits sont là : le chômage diminue, la consommation s’améliore et les finances publiques se portent mieux qu’en 2002. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Telle est la réalité !
Vous devez également être embarrassé, monsieur de Courson, de n’avoir pas voté ces budgets vertueux, qui ont permis à la France d’être le premier des grands pays européens – avant l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne – à passer sous la barre des 3 % du PIB pour son déficit. (Mêmes mouvements.)
Notre poids dans l’Union européenne s’en trouve accru et nous sommes donc davantage entendus,…
L’engagement de la France est de revenir à l’équilibre budgétaire et de passer sous la barre des 60 % d’endettement d’ici à 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Tel est l’engagement que j’ai pris au nom de la France. Je sais qu’il pourra être tenu, à moins que l’on n’ouvre de nouveau les vannes, comme certains propos le laissent craindre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ce n’est en tout cas pas le projet de l’UMP ! (Mêmes mouvements.)
La voie que nous avons choisie est une bonne nouvelle pour la France et pour l’Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Oui, partout en Europe, les sociétés démocratiques ont besoin de sécurité et doivent se donner les moyens d'agir contre le terrorisme et la criminalité organisée. Non, nos concitoyens français et européens ne sont pas prêts à voir réduire et menacer le droit à la vie privée des personnes au gré de dérives sur lesquelles plus aucune autorité responsable n'exercerait de contrôle. Ailleurs en Europe, on renforce et on coordonne le contrôle démocratique quant à l’usage des fichiers informatiques et des nouvelles technologies. En France, on l’affaiblit.
Oui, les choix et les actes inspirés par le ministre de l'intérieur sont inquiétants, et ils s’accumulent : fichages à des fins politiques, dysfonctionnement des fichiers informatisés, contournement de l'autorité de contrôle, comme l'a récemment dénoncé le président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, le sénateur de l’UMP Alex Türk.
Ces dérives sont aussi angoissantes qu’inutiles pour les Français. Une société plus sûre, ce n'est pas une société de surveillance omniprésente et envahissante. Dans notre République, la CNIL est le « gendarme des fichiers ».
Est-ce un hasard ? Un décret surprenant et inacceptable, que j'ai en main, est en préparation à la Chancellerie pour limiter les moyens d'action de la CNIL, dont l’indépendance et l’autorité sont désormais en danger.
Je ne vous poserai, monsieur le garde des sceaux, qu’une seule question, car je sais le Gouvernement expert dans l'art de répondre à toutes les questions sauf à celle qu’on lui pose : sauf à être montré du doigt dans l’Europe des libertés, ne croyez-vous pas qu'il est grand temps de renforcer les moyens d'action, de contrôle et de coopération européenne de la CNIL, plutôt que de les réduire ?
Vous vous êtes également livré à une attaque en règle contre la transposition d’une directive européenne. Je ne comprends pas ce que vous avez voulu dire. Une loi d’août 2005 prévoit en effet la transposition de deux directives. L’une a déjà été transposée et l’autre va l’être. La question qui reste à trancher est la suivante : s’agissant des libertés publiques, doit-on rester au seul niveau du règlement intérieur de la CNIL ou procéder par le biais d’un décret du Premier ministre ? La Chancellerie, précisément parce qu’il s’agit des libertés publiques, recommande à ce dernier la seconde solution. Autrement dit, nous offrons une protection supplémentaire aux citoyens : c’est tout le contraire de ce que vous affirmez.
Regardons les réalités en face. La Russie, premier fournisseur en gaz des pays européens, a été parfaitement fiable jusqu'en 2006. Elle a ensuite utilisé le gaz et le pétrole comme des armes. Pour s'en convaincre, il n'est qu'à rappeler les coupures dans les livraisons à ses voisins ou la décision de mettre un terme aux subventions à ses anciennes républiques sœurs.
Face à ces méthodes unilatérales, l'Europe a impérativement besoin d'une politique de l'énergie et, au-delà, doit assurer des échanges fiables, transparents et sécurisés avec la Russie, comme le prévoit d'ailleurs la Charte de l'énergie.
La renégociation de l'accord de partenariat et de coopération avec la Russie nous donne l'occasion de préparer une stratégie commune à tous les pays européens. À lire les déclarations de Mme Merkel, la présidence allemande de l'Union européenne y est prête. Et nous, Français, sommes-nous prêts à l'accompagner ? Il y a en effet urgence. Voilà plus d'un an que la sécurité de l’approvisionnement européen est évoquée lors des sommets de l'Union…
Je voudrais ajouter que ce qui s’est passé la semaine dernière vous donne raison, madame la députée. Avec l’accord finalisé entre l’entreprise allemande E.ON et l’entreprise espagnole Endesa, les deux pays ont décidé de jouer ensemble dans le domaine énergétique, et nous allons désormais être obligés de nous doter de très grands acteurs pour faire face aux défis que vous avez évoqués. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
Grâce à son grand projet avec la Belgique, la France s’est donné les moyens d’aller de l’avant. La politique européenne consiste à augmenter le nombre de terminaux méthaniers afin de permettre un approvisionnement mieux diversifié, auprès d’autres pays fournisseurs que la Russie. Cela implique des investissements considérables, et le projet que nous défendons fera de Suez et Gaz de France le numéro un mondial en matière de gaz naturel liquéfié.
Je rappelle aussi que la chancelière Angela Merkel a fait de cette question un sujet clef de la présidence allemande. La France soutiendra cette position ; elle soutiendra le renforcement du dialogue entre l’Union européenne et la Russie, ainsi que l’émergence de leaders transnationaux dans le domaine de l’énergie, à l’image de ce que viennent de réaliser les Espagnols et les Allemands ; elle soutiendra enfin la multiplication des gazoducs – je pense notamment ici au projet Metgaz, en Afrique du Nord.
L’énergie est une question essentielle, et je suis proprement consterné lorsque j’entends certains sur ces bancs demander que la France abandonne son programme nucléaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Demain, les fonctionnaires manifesteront contre votre politique, pour l'emploi et le pouvoir d'achat. Ils ont raison et nous les soutenons.
En cinq ans, vous avez supprimé près de cent mille emplois dans la fonction publique d'État.
Loin d'être des privilégiés, comme vous le prétendez, les hospitaliers, les enseignants, les postiers contribuent au développement social et économique, à la cohésion des territoires, à l'égalité des citoyens.
Au nom de la baisse de la dépense publique, vous tentez de justifier une politique qui sacrifie les usagers et les agents ! Vous êtes fidèles en revanche aux orientations européennes, au pacte de stabilité, à la réduction des budgets, à la concurrence, aux privatisations, sans oublier l'engagement de M. Sarkozy de ne remplacer qu'un départ à la retraite sur deux s’il accède à la Présidence de la République !
Élève zélé de l'Europe libérale, vous refusez de faire payer les profits financiers et vous faites ce choix politique dangereux d'affaiblir, en le soumettant à une logique commerciale, l'outil de cohésion et d'efficacité sociale qu'est le secteur public.
Monsieur le Premier ministre, partagez-vous l'objectif de M. Sarkozy ? Allez-vous répondre aux attentes de respect et de dignité des agents, et donner aux services publics les moyens de leurs missions ? Allez-vous agir pour une réorientation de la politique européenne sortant les services publics du carcan libéral ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
En dix ans, vous avez été incapables de boucler le moindre accord avec les partenaires sociaux dans la fonction publique. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) Alors, permettez-moi de vous remémorer trois dates : le 25 janvier 2006, nous avons signé un accord sur le pouvoir d’achat avec trois partenaires sociaux, la CFDT, la CFTC et l’UNSA-fonctionnaires ; le 21 novembre 2006, un deuxième accord a été signé avec la CFDT, la CFTC et la CGC sur la formation ; le 17 janvier dernier enfin, un nouvel accord sur le pouvoir d’achat a reçu l’approbation de la CFDT, de la CFTC et de la CGC.
Je peux aller plus loin : en matière d’amélioration des carrières, qu’avez-vous fait ? Rien ! Nous, nous avons restructuré, avec le soutien des partenaires sociaux, l’ensemble de la catégorie C des fonctionnaires, c'est-à-dire ceux qui ont le plus faible niveau de revenus.
Regardez donc ce qui a été fait et félicitez-vous de notre action. Nous avons été à l’écoute des fonctionnaires, qui n’avaient jamais été aussi bien entendus par les gouvernements de gauche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Trop longtemps, nous avons considéré notre planète comme immortelle. Aujourd'hui, cet aveuglement n'est plus possible. Les symptômes se multiplient, et nous savons les analyser, grâce aux institutions et aux instruments dont la communauté internationale s'est dotée ces dix dernières années.
Grâce aussi à des voix qui se sont élevées. C'est d'abord celle du Président de la République, qui, depuis de nombreuses années, a porté sur la scène internationale son engagement total et a voulu que soit organisée à Paris la Conférence internationale pour une gouvernance écologique mondiale, qui s'est tenue le week-end dernier. Ce sont aussi des témoignages, comme celui du sénateur américain Al Gore, avec son film Une vérité qui dérange ; c'est Yann Arthus-Bertrand et ses photos qui parlent d'elles-mêmes ; c'est, bien sûr, Nicolas Hulot et le Pacte écologique. Je me souviens encore du témoignage de cet homme engagé, lors de la convention organisée par l'UMP, dès 2005, à la demande de son président Nicolas Sarkozy. (Huées sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
Le moment est venu de franchir une nouvelle étape…
Alain Juppé, président du comité d'honneur de la Conférence internationale, a confirmé que quarante-six pays se sont d'ores et déjà engagés au sein d'un groupe pionnier pour l'Organisation des Nations unies pour l'environnement.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, quelles seront les prochaines étapes de ce combat de justice et de solidarité pour que cet élan vital ne retombe pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Jeudi, la réunion du groupe intergouvernemental sur l’évolution climatique a montré qu’il existait au plan scientifique un consensus mondial sur les conséquences du réchauffement. Puis, vendredi et samedi, s’est tenue, à l’initiative du Président de la République, une conférence internationale sur une gouvernance écologique mondiale, à laquelle ont participé deux cents personnes, soixante pays, cinquante ministres de l’environnement.
Jusqu’à la convocation de cette conférence, cinq cents conventions traitaient des questions climatiques – on imagine sans peine avec quelle inefficacité… Le Président de la République a fait, au nom de tous les participants – qu’il s’agisse de M. Juppé ou encore de M. Védrine – des propositions visant à mieux prendre en compte les équilibres écologiques de la planète. Il a notamment proposé la création d’une organisation des Nations unies pour l’environnement. Dans cette perspective, un groupe des « Amis de l’ONU pour l’environnement » a été créé ; sa première réunion devrait avoir lieu au Maroc, dans quelques mois.
Je terminerai en rappelant que M. de Boer, secrétaire exécutif de la convention sur l’évolution climatique, a suggéré que tous les chefs d’État et de gouvernement se réunissent pour créer une organisation mondiale de l’écologie. C’est tout à l’honneur de la France et du Président de la République d’avoir été les premiers à le proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ce phénomène n'est pas nouveau. En 1989, le grand reporter Alain Louyot retraçait déjà, dans son ouvrage Gosses de guerre, le quotidien des enfants soldats. Presque vingt ans après, malgré des efforts importants entrepris, notamment par la France, la situation reste extrêmement préoccupante.
Comment ne pas être affecté par le drame de cette jeunesse, enrôlée, de gré ou de force, par des chefs de guerre sans scrupules ? Comment ne pas s'indigner lorsque nous savons le sort réservé aux jeunes filles, enlevées, envoyées en première ligne, violées et réduites en esclavage ? Comment rester insensible au témoignage d'Ishmael, cet ancien enfant soldat de Sierra Leone qui, sorti de l'enfer, a pu expliquer lors de la conférence, qu'auparavant tuer était pour lui un geste aussi banal que boire un verre d'eau ?
Dans ce contexte, l'adoption des « engagements de Paris » à l'issue de la conférence témoigne de la détermination de la communauté internationale de mettre un terme à ces pratiques d'un autre âge.
Monsieur le ministre, il est désormais essentiel que ces engagements s'imposent à tous. Comment comptez-vous les faire respecter par les pays coupables, et notamment par ceux qui n'ont pas pris part à la conférence ?
Ce sujet terrible – car il s’agit d’un crime contre l’humanité – est à l’intersection de deux domaines : les conflits et la pauvreté. Jusqu’à présent, toutes les organisations non gouvernementales, toutes les institutions internationales s’étaient réunies, en particulier au Cap, pour défendre la dignité de ces enfants.
Avec la directrice exécutrice de l’UNICEF, Mme Ann Veneman, j’ai voulu réunir la première conférence internationale politique : soixante pays présents y participaient, dont trente représentés au niveau ministériel. Les principes que nous défendons sont alors devenus des engagements politiques. Nous voulons instaurer des normes juridiques afin qu’il soit interdit d’enrôler un enfant, tant à des fins sexuelles que militaires. À ce jour, soixante pays ont signé ce texte, afin que ces enfants soldats soient immédiatement libérés et qu’ils puissent ensuite se réinsérer dans la vie de tous les jours. Car, voyez-vous, un enfant soldat, c’est un enfant perdu pour la paix, mais c’est aussi un enfant perdu pour la croissance du continent africain, et donc pour la jeunesse du monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
En Côte-d’Ivoire, les soldats français déployés depuis 2002 dans le cadre de l’opération « Licorne » ne voient pas venir la fin de leur mission et chacun se demande combien de temps encore la France va maintenir plus de 3 500 soldats sur place, où la situation semble se dégrader. Le Chef du Gouvernement, Konan Banny, qui doit organiser des élections, tout en désarmant les rebelles au nord et les milices au sud, ne semble pas avoir prise sur les événements.
Force est de constater qu’un silence de plomb entoure nos interventions militaires en Afrique subsaharienne. Notre gestion des crises y est devenue illisible, en dehors, bien sûr, des mesures ponctuelles prises pour protéger nos ressortissants. Dans quelle guerre sommes-nous engagés ? S’agit-il de participer à des opérations de maintien de la paix ? De maintenir des régimes plus ou moins légitimes ? De sauvegarder des intérêts purement français ? Quelle est la nature de nos accords de défense ou de coopération, souvent très anciens, avec les pays africains et, la plupart du temps, méconnus du Parlement ? Autant d’interrogations qui auraient dû donner lieu à un débat devant le Parlement, ce qui aurait permis de lever le flou sur les finalités et le contenu de la politique africaine de la France.
Monsieur le Premier ministre, en l’absence d’un tel débat, je souhaiterais que vous informiez la représentation nationale en indiquant clairement ce qui justifie les interventions de la France en Afrique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
C’est l’honneur et la fierté de la France de défendre ce continent africain, pour le développement duquel nous nous investissons beaucoup. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Sans développement ni stabilité, ce continent serait une menace pour l’équilibre du monde.
Je ne peux pas accepter que vous qualifiiez notre action d’illisible. Non, monsieur Quilès, elle est au contraire très lisible. Nous travaillons à la paix et à la stabilité de ce continent, car, encore une fois, sans paix ni stabilité, il n’y a pas de développement. Nous veillons à la protection de nos ressortissants et nous travaillons à la formation des armées africaines. Nous avons une conception de partenariat avec l’Afrique, tant pour le développement que pour la formation militaire, car l’Afrique doit prendre son destin en main. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
En faisant de la lutte contre l'insécurité routière l'un des trois grands chantiers de son quinquennat, le Président de la République a suscité une mobilisation nationale pour lutter contre ce fléau. Les efforts engagés par le Gouvernement portent leurs fruits : au début de cette année, vous avez annoncé les excellents résultats de 2006, avec, si l’on peut dire, seulement 4 703 morts. Ce sont là des résultats historiques, dont chacun doit se réjouir.
Les efforts de prudence et le civisme de nos compatriotes ont permis d'obtenir ces chiffres. Certes, beaucoup de conducteurs ont protesté contre la pression des radars. Mais je crois qu'aujourd'hui, chacun, dans notre pays, a pris conscience de la valeur d'une vie. Depuis 2002, 10 000 vies ont été épargnées, faisant baisser le taux de mortalité sur nos routes de 43 %, et 100 000 blessés ont été évités.
Malheureusement, cet optimisme est contrebalancé par les chiffres du mois de janvier, qui semblent indiquer un léger recul par rapport à l’année passée. Cela laisse à penser que certains de nos concitoyens relâchent leur vigilance et leurs efforts, dans l'espoir d'une amnistie présidentielle des infractions routières.
Sauver une vie est essentiel et n'a pas de prix. Monsieur le ministre, comment analysez-vous le recul des chiffres du mois de janvier ? Par ailleurs, quelles mesures comptez-vous prendre pour continuer à faire baisser de manière significative le nombre de blessés et de tués sur nos routes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cette augmentation du nombre d’accidents semble répartie sur l’ensemble du territoire, et en particulier sur les routes départementales et nationales comme sur les autoroutes. Cela semble indiquer qu’il y a un relâchement sur le respect des limitations de vitesse. Mais il faudra approfondir cette analyse.
Alors, que faire ? Je vais rencontrer dans quelques instants l’ensemble des associations nationales de prévention routière pour qu’elles nous aident, comme elles l’ont toujours fait, à mobiliser nos concitoyens sur le thème de la responsabilité. Vendredi matin, nous nous réunirons autour du Premier ministre pour décider de mesures techniques complémentaires. Je me rendrai ensuite, et ce dès lundi, dans un certain nombre de départements où la situation est particulièrement critique.
En outre, avec le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy (« Où est-il ? » sur les bancs du groupe socialiste. – « Et Ségolène ? » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), nous avons décidé de renforcer les contrôles sur la route à partir de ce week-end, qui est le premier des départs en vacances de février. Il sera donc très important de faire passer un message de responsabilité à cette occasion. Enfin, il est indispensable que tous les candidats à l’élection présidentielle disent, comme l’a fait Nicolas Sarkozy, qu’il n’y aura pas d’amnistie ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Nos concitoyens sont attachés de longue date à notre système de protection sociale. Sa défense est de notre responsabilité commune et son principe fondateur est pour nous tous un impératif : garantir à chacun un égal accès aux soins de qualité.
Aujourd’hui, le régime général couvre près de 85 % de la population française et représente à lui seul plus de 80 % des dépenses de santé, soit 120 milliards d’euros. Dès lors, tout détournement des ressources de leur objectif initial est une atteinte à ce principe essentiel de solidarité collective.
Au cours de la législature, nous avons mené des réformes courageuses – notamment sur la santé – dont l’objectif est de mieux soigner en dépensant mieux. C’est dans cette logique que l’assurance maladie a intensifié ses contrôles et sa lutte contre les abus et les fraudes. Les actions engagées ont d’ores et déjà permis d’économiser plus de 87 millions d’euros en un an et de détecter six fois plus de fraudes qu’en 2005.
Monsieur le ministre, nos concitoyens sont exigeants et ils ont raison de l’être. Ils attendent que l’on encourage les bonnes pratiques afin de sauvegarder notre système de protection sociale. Sous votre impulsion, les prérogatives de l’assurance maladie en matière de contrôle et de lutte contre les fraudes aux prestations d’assurance maladie ont été renforcées en 2006. Ainsi, la CNAM vient de signer, avec la police nationale et la gendarmerie, un accord de coopération pour renforcer la prévention et intensifier la lutte.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, préciser le contenu de cet accord et ce que nous pouvons en attendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
L’an dernier, 87 millions d’euros ont été économisés, parce que nous avons mis un terme à certaines fraudes. En 2007, au moins 112 millions d’euros seront économisés, qui nous permettront de mieux rembourser les assurés sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous assumons cette volonté politique, qui devrait d’ailleurs être partagée sur tous les bancs.
Depuis la réforme de 2004, nous nous sommes également dotés de moyens juridiques. Surtout, nous avons mis en place une méthode de travail, avec la création d’un comité national de lutte contre les fraudes, qui s’est réuni hier, pour la troisième fois, au ministère de la santé, afin de réfléchir sur la façon dont nous allons travailler.
Une volonté politique, des moyens juridiques et des méthodes de travail nous permettent aujourd’hui de renforcer la solidarité : c’est ce que vous attendez, comme tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Un sujet inquiète particulièrement nos concitoyens, notamment les plus modestes d’entre eux : la franchise médicale que veut instaurer le candidat de l’UMP, c’est-à-dire la part non remboursée par la sécurité sociale et restant à la charge du patient. Le Gouvernement l’a déjà augmentée de un euro pour chaque acte médical et de dix-huit euros pour les actes les plus lourds. Qu’elles viennent de vous, monsieur le ministre, ou du candidat, les déclarations contradictoires se multiplient sur ce sujet, entraînant interrogations et incompréhensions et avivant le sentiment d’insécurité sociale chez nos concitoyens.
La conviction profonde du groupe socialiste est que cette proposition est particulièrement dangereuse.
Elle est dangereuse et financièrement inefficace. Vous prétendez qu’elle permettra de réduire le déficit de l’assurance maladie, déficit que vous avez décidé de faire payer aux générations futures. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est oublier qu’il est dû essentiellement aux soins des maladies les plus graves ou chroniques.
Elle est dangereuse, parce que socialement injuste, car elle pénalisera en premier lieu les plus modestes.
Elle est enfin dangereuse au niveau sanitaire.
Monsieur le ministre, ma question est simple : souhaitez-vous instaurer une franchise médicale et ainsi confirmer l’orientation politique de votre candidat : la « thatchérisation » de la société française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Vous avez fait allusion au déficit de l’assurance maladie.
Vous qui avez inlassablement sillonné la France – et en particulier le superbe département du Lot (Sourires) –, vous savez qu’en dépit de la concurrence exercée par de nouvelles destinations, de grandes marges de progression sont possibles, en fréquentation comme en chiffre d’affaires. Vous êtes à l’origine d’une nouvelle politique touristique, définie par les comités interministériels du tourisme de 2003 et de 2004, et qui s’est traduite par la mise en œuvre d’un plan « qualité » et d’une nouvelle stratégie marketing pour Maison de la France, l’organisme de promotion touristique de notre pays. Cette politique a eu des retombées positives. Pouvez-vous, monsieur le ministre, préciser à la représentation nationale les principales données de ce bilan et indiquer quelle est son incidence en termes d’emplois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez rappelé notre action : élaboration d’une nouvelle stratégie marketing ; mise en place d’un plan « qualité » pour rendre notre produit à la fois plus lisible et plus compétitif ; modernisation du cadre juridique avec la codification des textes législatifs relatifs au tourisme.
Ces mesures portent aujourd’hui leurs fruits : la France a accueilli 78 millions de touristes en 2006, soit 2,7 % de plus, et ces derniers ont dépensé 35 milliards d’euros, ce qui représente une augmentation de 2,5 %. La clientèle provient à 75 % de pays européens, les visiteurs espagnols et hollandais étant en augmentation sensible. Mais 2006 a aussi été marquée par la forte croissance des touristes chinois – quelque 600 000. Cette évolution a profité à l’hôtellerie, avec un taux d’occupation qui progresse de 1,2 % pour atteindre 75 %, surtout dans les hôtels de plus haut de gamme. Dans la petite hôtellerie, la progression est de 2,1 %, et est, là encore, plus sensible dans les installations de haut de gamme.
En matière de tourisme social, les émissions de chèques vacances ont dépassé, pour la première fois, le milliard d’euros. Au moment où je vous parle, plus de 60 000 personnes ont bénéficié des dispositifs d’aide au départ mis au point par l’Agence nationale pour les chèques vacances et Bourse solidarité vacances.
S’agissant de la répartition des flux touristiques, la saison hiver 2006-2007 a été très bonne. Pour les mois qui viennent, nous nous posons quelques questions. Il faut simplement espérer que la neige reviendra, faute de quoi nous pourrions connaître de sérieuses difficultés.
Enfin, concernant l’outre-mer, les résultats sont contrastés : augmentation des nuitées en Martinique et en Guyane, stabilité en Guadeloupe. Pour La Réunion, on observe un frémissement depuis quelques semaines : la crise du Chikungunya semble marquer le pas.
En matière d’emploi, nous observons la plus forte progression depuis cinq ans : dans les neuf premiers mois de 2006, 19 200 emplois nets ont été créés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Chaque année, 15 millions de nos concitoyens sont pris en charge dans les services d’urgence publics et privés. Il s’agit d’un rouage essentiel de notre système de soins, dont on constate malheureusement souvent les limites. Trop souvent, les cas les plus urgents côtoient ceux qui relèvent davantage de la « bobologie ». Il ressort des travaux menés par la mission que les causes de l’engorgement des structures des urgences ne sont pas à rechercher uniquement dans les moyens dont elles disposent, mais s’expliquent par des insuffisances dans la prise en charge des urgences médicales, en amont comme en aval.
La mission a eu pour objectif de formuler des propositions visant à désengorger les services d’urgence hospitalière. Je souhaite insister particulièrement sur les maisons médicales de garde, qui constituent, j’en suis persuadé, une solution d’avenir.
Comme la mission a pu le constater, le bilan des maisons médicales de garde est largement positif. Outre qu’elles contribuent à la remédicalisation du milieu rural et incitent les médecins à mieux s’impliquer dans les permanences de soins, elles peuvent aussi permettre de désengorger les urgences hospitalières et constituer un point de repère pour la population en milieu urbain. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a permis de progresser vers la pérennisation de leur financement. Toutefois, il convient d’aller plus loin et de les inscrire dans un cadre cohérent, simplifié et lisible. À cet effet, une circulaire en cours d’élaboration devrait fixer le cadrage national des maisons médicales. Sa publication est attendue pour 2007. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet et nous indiquer les suites que vous comptez donner aux propositions élaborées dans le cadre de notre mission, afin d’éviter que son rapport ne reste lettre morte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
S’agissant du « cœur » des urgences, 380 millions d’euros ont été mis en œuvre dans le cadre du plan « urgences », et nous évaluons maintenant, service par service, si cette somme a été suffisante. Nous savons déjà que cinquante services d’urgences doivent être entièrement reconstruits – je pense notamment à celui de l’hôpital Saint-Antoine, pour lequel nous n’avons que trop tardé, comme Jean Bardet pourrait le confirmer – et que quinze nouvelles antennes SMUR devront être ouvertes dans les années à venir, afin de renforcer la présence des urgences sur le territoire.
Toutefois, le dispositif des urgences ne se limite pas aux urgences hospitalières. Nous souhaitons développer le recours au centre « 15 », en suscitant ce réflexe par une campagne d’information à destination du grand public qui débutera à la fin du mois de mars. Par ailleurs, 300 permanenciers supplémentaires seront recrutés en 2007 de façon à réduire le temps d’attente.
Bien que les professionnels libéraux fassent un travail remarquable, on ne prend plus, aujourd’hui, des gardes comme par le passé. Les maisons médicales de garde sont donc une bonne réponse. Leur nombre a été quintuplé en trois ans, et nous allons continuer dans cette voie. Nous allons simplifier les formalités, car le travail d’un médecin n’est pas de remplir des dossiers en permanence : trop d’entre eux ont subi des tracasseries administratives en voulant ouvrir de telles maisons. Enfin, leur financement sera désormais pluriannuel, ce qui permettra de renforcer la permanence des soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann.)
Conformément à la décision de la Conférence des présidents, ces deux textes vont donner lieu à une discussion générale commune.
La parole est à M. Jérôme Bignon, suppléant M. Didier Quentin, rapporteur de la commission mixte paritaire.
On ne peut que se féliciter de l'ambiance constructive qui aura présidé aux travaux du Parlement sur ces textes depuis leur première lecture au Sénat au mois d’octobre dernier. Les deux chambres ont eu une approche complémentaire et non contradictoire, puisque chacune d'entre elles a adopté plusieurs centaines d'amendements, majoritairement destinés à préciser et corriger les textes très longs et techniques à bien des égards qui leur étaient soumis.
Ces projets sont ambitieux, ne serait-ce que par la diversité des questions qu'ils abordent. Pour ne citer que les principaux sujets, ils concernent les nouveaux pouvoirs normatifs reconnus aux départements et régions d'outre-mer, le statut de quatre collectivités d'outre-mer et le droit électoral applicable outre-mer.
Les modalités selon lesquelles les conseils généraux et régionaux d'outre-mer pourront être habilités par le législateur à modifier les lois et règlements localement applicables pour tenir compte de leurs « caractéristiques et contraintes particulières » ont été précisées à l'Assemblée nationale et au Sénat. Les amendements adoptés par les deux assemblées sur ce sujet important visaient essentiellement à assurer une meilleure publicité aux demandes d'habilitations, à limiter à deux ans la durée des habilitations accordées, à confier l'ensemble du contentieux au Conseil d'État, à compléter l'information du Parlement et à assurer la conformité du nouveau dispositif à l'article 73 de la Constitution. La CMP n'a été saisie d'aucune demande de modification à ce sujet, le texte semblant désormais relativement consensuel.
La CMP a, en revanche, poursuivi le travail de clarification et d'amélioration formelle des dispositions des nouveaux statuts de quatre collectivités d’outre-mer : d'une part, les deux collectivités existantes de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon ; d'autre part, les deux nouvelles collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, actuellement communes de la Guadeloupe. Pour chacune de ces collectivités, les statuts s'inspirent directement du droit commun départemental s'agissant des règles relatives au fonctionnement des institutions, du contrôle de légalité et à la démocratie locale. Sur ces sujets, l'Assemblée nationale s'est efforcée, sauf exception justifiée, d'aligner plus complètement les rédactions proposées sur le droit commun et entre statuts, afin de faciliter l'accès au droit et de préserver la cohérence de la jurisprudence. La CMP a poursuivi dans cette voie.
Le régime législatif applicable à Mayotte est modifié sur plusieurs points. L'actuel principe de spécialité législative, assorti d'exceptions, est remplacé par le principe d'assimilation législative, lui aussi assorti d'exceptions, ce qui revêt avant tout une portée symbolique dans la perspective d'une future départementalisation. Toutefois, l'application du droit commun en matière fiscale est reportée de 2007 à 2013, en raison des difficultés locales liées au cadastre. De même, le code des douanes ne s'appliquera pas dès 2007, ni même en 2009 comme l'avait souhaité le Sénat, mais seulement en 2013, compte tenu de l'amendement gouvernemental que nous avons adopté lors de notre séance du 24 janvier dernier. Il conviendra de veiller à la cohérence entre ces échéances et le calendrier retenu pour une éventuelle transformation du statut de Mayotte en DOM-ROM. En effet, comme le souhaitait notre collègue Kamardine, un amendement gouvernemental a prévu que le conseil général de Mayotte pourrait demander la transformation du statut de l'île en DOM-ROM dès la première réunion suivant son renouvellement en 2008, et non en 2011. Cela conduirait à y rendre applicable tout le droit commun, sauf dispositions contraires dans les lois et règlements.
Les sénateurs présents en CMP n'ont contesté ni ces choix ni les aménagements apportés à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue rapporteur, Didier Quentin, pour renforcer à Mayotte la transparence financière, le bon fonctionnement des services publics, ainsi que l'apprentissage de la langue française. Il est vrai qu'en sens inverse, notre assemblée n'était pas revenue sur la décision sénatoriale d'étendre à Mayotte la faculté d'adapter les lois et règlements.
En revanche, la CMP a rétabli la rédaction du Sénat visant à exclure l'ensemble des questions scolaires des compétences de la collectivité départementale de Mayotte, car celle-ci ne peut pas relever seule le défi que représente la démographie insulaire. Elle a également jugé préférable de préciser les charges nouvelles résultant de l'application du nouveau statut pour la collectivité qui lui seront compensées dans les conditions de droit commun, comme notre assemblée l'avait prévu pour Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'initiative de notre collègue Gérard Grignon.
La CMP n'a pas apporté de changement de fond aux statuts proposés pour Saint-Pierre-et-Miquelon et pour les nouvelles collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, si ce n'est pour aligner sur le droit commun départemental le régime indemnitaire applicable aux membres de leurs conseils territoriaux.
La collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon sera dotée de compétences plus étendues en matière de fiscalité, d'urbanisme et d'exploitation de la zone économique exclusive, tandis que les communes de l'archipel seront mieux associées à l'exercice de certaines d'entre elles. La CMP n'est pas revenue sur les modifications apportées à l'Assemblée nationale pour renforcer les conditions d'information des conseillers généraux sur les décisions qui leur sont soumises et associer plus étroitement la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon aux négociations internationales intéressant l'archipel.
Rappelons également que les statuts de Saint-Barthélemy et Saint-Martin doteront chacune de ces deux îles, distantes de 250 kilomètres de la Guadeloupe, d'une collectivité unique se substituant à la commune, au département et à la région, ce qu’avaient accepté les populations concernées lors de la consultation organisée le 7 décembre 2003. Ces nouvelles collectivités d’outre-mer, dirigées par un conseil territorial et un conseil exécutif, disposeront de compétences spécifiques en matière de fiscalité, d'urbanisme, de logement, de tourisme, de voirie et de transports routiers, ce qui leur permettra d'adopter des normes adaptées à leurs spécificités.
S'agissant des dispositions électorales, se posait d'abord la question du niveau de la prime majoritaire à accorder à la liste arrivée en tête aux élections aux conseils territoriaux de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Alors que le Sénat avait choisi un niveau de prime correspondant au tiers des sièges, l'Assemblée nationale a préféré porter le niveau de la prime à la moitié des sièges. La CMP a trouvé un compromis, en maintenant la prime à la moitié des sièges pour Saint-Pierre-et-Miquelon, mais en la réduisant au tiers des sièges pour Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Par ailleurs, sur proposition du rapporteur du texte au Sénat, la date de la première élection des sénateurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin a été reportée de 2007 à septembre 2008. Cette solution, s'inspirant de celle trouvée à l'Assemblée nationale pour l'élection des députés de ces deux îles, permettra à ces sénateurs d'être élus en même temps qu'une série sénatoriale, donc de bénéficier d'emblée d'un mandat d'une durée de six ans.
Enfin, il convient de signaler que les sénateurs membres de la CMP ont approuvé les dispositions électorales introduites à l'Assemblée nationale, concernant aussi bien l'élection des députés de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin que la réforme du mode de scrutin aux élections de l'Assemblée territoriale de la Polynésie française.
Les dispositions relatives aux conditions d'exercice de la démocratie directe à Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon n'ont pas été modifiées en CMP. Il en va de même pour le contrôle exercé par les juridictions financières dans ces quatre collectivités et pour le statut des Terres australes et antarctiques françaises, des îles Éparses de l'océan Indien et de l'île de Clipperton.
Il convient, en revanche, de mentionner plusieurs nouveaux articles relatifs à Mayotte insérés par le Gouvernement à la fin du projet de loi ordinaire, lors de l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale en séance publique le 24 janvier dernier, sans que ceux-ci aient été débattus. Ces nouvelles dispositions – qui se rapprochent du statut des cinquante pas géométriques applicable en Guadeloupe et en Martinique – visent à assouplir les règles d'urbanisme applicables sur le littoral de Mayotte et permettront ainsi de régler des problèmes extrêmement difficiles. Elles ont également pour but d’étendre à cette collectivité le droit commun de la commande publique et à rapprocher du droit commun le droit régissant actuellement les communes mahoraises. Sensibles à l'urgence invoquée par notre collègue Kamardine, nous n'avons pas souhaité revenir sur ces ajouts en CMP, malgré les interrogations suscitées par leur introduction tardive et leur imperfection formelle, dont on nous dit qu'elle pourrait être rapidement corrigée par ordonnance, notamment.
Enfin, la partie du projet de loi consacrée au recours aux ordonnances, traditionnellement important outre-mer, n'a fait l'objet que d'ajustements formels en CMP. Il convient à cet égard de rappeler que nous avions adopté, lors de notre séance du 24 janvier dernier, une série d'amendements gouvernementaux visant à étendre le champ des habilitations accordées au Gouvernement pour légiférer par ordonnance. Celui-ci sera donc autorisé non seulement à tirer les conséquences mécaniques des réformes statutaires, à moderniser le droit social applicable dans les collectivités d’outre-mer et à faciliter la lutte contre l'immigration clandestine outre-mer, mais aussi à étendre aux collectivités ultramarines le droit commun dans de nombreux domaines ; à adapter le droit des étrangers et de la détention provisoire à Saint-Barthélemy et Saint-Martin et à moderniser l'état civil et l'organisation des juridictions à Mayotte.
Les dispositions contenues dans les deux projets qui nous sont soumis, très diverses et d'apparence technique, sont attendues par nos concitoyens d'outre-mer, car elles permettront d'y clarifier le droit applicable et d'y dynamiser la démocratie locale. Ce constat explique largement qu'il n'ait pas été difficile, au fond, de faire s’accorder à leur sujet les députés et les sénateurs.
Je vous invite donc à adopter ces projets dans le texte de la CMP.
Ces deux projets de loi, approuvés à la quasi-unanimité par le Sénat le 31 octobre 2005 et à l’unanimité par votre assemblée le 24 janvier 2006, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, répondent à trois objectifs majeurs :
Tout d’abord, mettre en œuvre les dispositions de la Constitution qui structurent le nouveau cadre institutionnel et statutaire de l’outre-mer au sein de la République, conformément aux engagements pris par le Président de la République. Ces engagements, le Parlement les a inscrits dans notre loi fondamentale, avec la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 ;
Ensuite, respecter les engagements pris lors des deux consultations du 7 décembre 2003, au cours desquelles les électeurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin se sont exprimés très majoritairement en faveur de la transformation statutaire de ces deux îles ;
Enfin, renforcer l’État de droit outre-mer, en clarifiant les statuts en vigueur et en améliorant la démocratie locale.
En dehors des nombreuses et fort judicieuses améliorations techniques apportées lors de l’examen des deux textes par les deux Assemblées, il n’existait plus que quelques points de divergences entre elles. Ils ont pu être surmontés en commission mixte paritaire, et l’accord que nous propose le rapporteur satisfait entièrement le Gouvernement. Qu’il me soit permis de saluer ici les membres de cette commission pour le travail remarquable qu’ils ont accompli de même que pour l’esprit qui a présidé au travail initial lors de la lecture qui a permis d’aboutir au vote unanime de l’Assemblée nationale. Je veux, cher Jérôme Bignon, vous dire ma reconnaissance personnelle et vous remercier pour les ajouts pertinents qui ont permis d’aboutir à ce texte.
Le Sénat a approuvé hier les conclusions de cette CMP. Je souhaite vous apporter quelques précisions particulièrement importantes sur plusieurs points pour lesquels vous avez d’ailleurs trouvé un accord.
S’agissant de la représentation parlementaire des deux nouvelles collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, la CMP a accepté ma proposition, d’ailleurs préalablement adoptée par vous, de ne faire entrer en vigueur la création des deux sièges de député qu’à l’occasion du renouvellement général de l’Assemblée qui suivra celui de juin 2007. Cette entrée en vigueur différée permettra de lever tous les obstacles de nature constitutionnelle, notamment la question essentielle, sur laquelle les Sages du Conseil constitutionnel s’étaient prononcés, d’un redécoupage des circonscriptions législatives, qui pourra être réglée avant l’élection des deux nouveaux députés. Il appartiendra à la prochaine législature d’en définir les modalités.
De même, la commission mixte paritaire a proposé que la représentation des deux nouvelles collectivités d’outre-mer au Sénat n’intervienne qu’à l’occasion du renouvellement triennal de septembre 2008, comme pour toutes les précédentes créations de sièges de sénateurs. Le parti a toujours été pris d’échelonner leur entrée en vigueur au fil des renouvellements triennaux ultérieurs.
S’agissant des indemnités versées aux élus pour l’exercice effectif de leurs fonctions, la commission mixte paritaire a retenu, à juste titre, un montant identique à celui versé aux élus départementaux de la Guadeloupe, étant précisé que le projet de loi organique se borne à fixer des plafonds que les collectivités sont libres de ne pas atteindre. Cet ajustement permettra de clore une polémique inutile et d’assurer aux élus en charge de collectivités dotées de très importantes compétences, puisqu’elles cumulent les pouvoirs normalement dévolus en droit commun à plusieurs niveaux de collectivités territoriales, une indemnité juste et proportionnée à leurs responsabilités.
Enfin, le Gouvernement a déposé quatre amendements, qui ont été hier approuvés par le Sénat. Je précise qu’ils sont le fruit de l’échange entre le Gouvernement et la commission mixte paritaire. Il s’agit pour le Gouvernement de corriger certaines erreurs matérielles afin de préciser le véritable sens ou la véritable portée de certains articles. Tel est, en particulier, l’objectif de l’amendement sur les recettes issues de l’octroi de mer à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy. L’article sera ainsi conforme aux motifs qui avaient présidé à son adoption par l’Assemblée nationale.
Dans le prolongement de ces deux projets de lois je m’engage devant vous à prendre rapidement toutes les mesures réglementaires nécessaires pour que l’application de ces deux textes ne connaisse aucun retard. J’entends en particulier agir très rapidement pour que la création des deux nouvelles collectivités d’outre-mer entre dans sa phase concrète compte tenu des délais très brefs qui sont impartis par la loi organique.
Il en va de même pour les habilitations accordées au Gouvernement afin qu’il prenne des ordonnances dans certains domaines éminemment sensibles pour la qualité de vie de nos concitoyens. Je cite à titre d’exemple la bioéthique, les droits des malades, la sécurité publique, le renforcement de la lutte contre l’immigration clandestine, sujet ô combien sensible dans certaines de nos collectivités, la destruction des constructions illicites sur le domaine des collectivités publiques ou encore la sécurité civile.
Mesdames, messieurs les députés, au cours de ces presque deux années au service de l’outre-mer, j’ai pu mesurer combien les débats parlementaires sur l’outre-mer étaient riches et toujours de très grande tenue, témoignant du regard attentif porté par la représentation nationale sur les indispensables évolutions demandées par nos concitoyens ultramarins.
L’important travail de codification que nous avons réalisé, le degré d’implication personnelle qui a été le vôtre lors de l’examen de textes tout aussi sensibles, monsieur le président Houillon, et le travail de la commission des lois aux côtés du Gouvernement nous ont permis de mettre en ordre le droit applicable à l’outre-mer et de respecter la parole donnée, permettant de conforter l’État dans ses missions aux côtés des collectivités territoriales, dans une démocratie encore plus vivace.
Ces deux projets de loi s’inscrivent dans cette logique de la parole donnée. Je vous demande donc d’approuver les conclusions de la commission mixte paritaire et les quatre amendements que j’aurai l’occasion de défendre un par un.
Grâce à votre vote, la République offrira ainsi la capacité à chaque département et à chaque collectivité d’outre-mer de prendre en main son développement en fonction de ses propres richesses, de sa propre diversité, dans le respect, bien sûr, de nos valeurs communes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. René Dosière.
J’avais alors déposé une exception d’irrecevabilité à titre personnel, puisque, sur les dispositions relatives à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, j’étais en divergence avec la position officielle de mon parti. J’ai dit tout ce que j’avais à dire, et je n’y reviendrai pas.
Si j’ai déposé celle-ci aujourd’hui à titre personnel, c’est par précaution, mais la position que j’exprimerai sera celle du parti socialiste car je ne parlerai aujourd’hui que d’un article nouveau, qui ne figurait pas dans le texte que vous nous avez présenté, monsieur le ministre, et qui modifie la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.
Puisque le Conseil constitutionnel sera saisi de cette loi organique, je voudrais développer quelques observations.
Première observation : depuis la révision constitutionnelle de 2003, l’article 39, alinéa 2, de la Constitution précise que les projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat. C’est bien ce qui s’est produit pour le texte que vous nous soumettez, mais il ne comportait pas de disposition relative au scrutin en Polynésie, et cette disposition modifiant la loi électorale en Polynésie n’a pas été discutée au Sénat, contrairement à ce que vous nous avez dit ici, monsieur le ministre.
Or une disposition qui modifie le régime électoral d’une collectivité territoriale d’outre-mer concerne bien le fonctionnement et l’organisation de cette collectivité, et sa mise en application va d’ailleurs modifier les équilibres politiques au sein de la Polynésie, car il ne s’agit pas en plus d’un retour au mode de scrutin antérieur puisque la loi de 2004 avait modifié non seulement le mode de scrutin mais également le nombre de circonscriptions et celui des conseillers territoriaux.
Rappelez-vous par ailleurs les observations de notre collègue Béatrice Vernaudon sur les conséquences de ce découpage et de ce nombre de représentants à l’Assemblée territoriale de Polynésie. Cela soulève un certain nombre de problèmes et le texte ne résout pas du tout ces difficultés.
Autrement dit, j’estime que ce changement de régime électoral, qui vient après des changements de mode de scrutin en 2001 puis en 2004, n’est pas conforme à la sécurité juridique dont les Polynésiens peuvent se prévaloir.
Il est vrai que le Conseil constitutionnel évoque rarement cette notion de sécurité juridique, qui constitue pourtant un aspect du droit à la sûreté proclamé dans l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Je n’ai d’ailleurs retrouvé qu’une exception : c’est la décision n° 96-373 du 9 avril 1996, relative, déjà, à une loi organique sur la Polynésie française.
Je voudrais cependant vous citer la conclusion d’une étude de M. François Luchaire, ancien membre du Conseil constitutionnel, parue dans les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 11, du 1er septembre 2001 : « Le Conseil protège la sécurité juridique sans l’invoquer expressément, préférant mobiliser, pour arriver à un résultat analogue, c’est-à-dire pour assurer aux personnes physiques et morales un environnement juridique décemment stable, intelligible et paisible, des raisonnements et principes plus divers et plus classiques, mais aussi plus sûrement ancrés dans notre bloc de constitutionnalité. »
Deuxième observation : l’amendement adopté par l’Assemblée est sans rapport avec le texte qui nous a été soumis. De mon point de vue, il s’agit d’un cavalier, qui n’a pas de lien avec le texte initial, et je crois d’ailleurs que c’est la seule limite que le Conseil constitutionnel fixe au droit d’amendement.
Depuis 2003, en effet, la Constitution individualise le statut de chaque territoire, qui devient un statut en soi. Or, dans le texte d’origine, il n’y avait rien sur la Polynésie, et pour cause, puisque la loi organique qui règle le statut de la Polynésie date de 2004. C’est une loi qui portait sur les territoires de Mayottte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, mais rien sur la Polynésie. Or une disposition aussi essentielle que la modification du mode de scrutin est naturellement beaucoup trop importante pour qu’on puisse penser qu’elle puisse avoir un lien avec ce projet. On peut même dire qu’elle s’apparente, du fait de ses conséquences, à une sorte de mini-projet de loi déguisé. La Polynésie, qui n’était pas concernée par ce texte, voit son régime électoral modifié. Nous ignorons les conséquences de cette modification proposée de manière subreptice.
Troisième observation : l’article 74 de Constitution rend obligatoire la consultation de l’Assemblée territoriale lorsqu’il s’agit d’un texte qui la concerne – procédure qui, heureusement, ne s’applique pas aux amendements. Mais, en l’occurrence, il s’agit ici d’une modification du mode de scrutin. L’importance de cette disposition aurait, me semble-t-il, mérité que l’on respecte l’article 74, d’autant que le cinquième alinéa précise que cette consultation vaut pour « le régime électoral de son assemblée délibérante ». Il est vrai que le texte ne concernait pas d’emblée la Polynésie, mais c’est désormais le cas, et l’Assemblée territoriale n’a pas été consultée.
On me répliquera que l’Assemblée territoriale a discuté des modes de scrutins et des modifications électorales. Il est vrai qu’une séance s’est tenue le vendredi 12 janvier, mais dans des conditions d’organisation un peu curieuses. J’ai bien essayé de savoir ce qui s’y est dit. Je vous invite, mes chers collègues, à consulter, comme je l’ai fait, le site internet du Haut commissariat ou celui de l’Assemblée territoriale de la Polynésie. Mais, pour avoir accès au Journal officiel de la Polynésie française, il faut un code. Je n’ai donc pas pu le consulter. Le dernier procès-verbal de séance dont on peut disposer remonte au mois de juin 2006. Bref, que s’est-il dit très exactement lors de cette séance ? On a parlé, comme on sait le faire, dans l’Assemblée territoriale de la Polynésie.
Tout ce que l’on peut dire, c’est que l’amendement de M. Geoffroy, cosigné par Mme Vernaudon, qui a été soumis à notre commission, n’a pas fait l’objet d’une discussion lors de cette séance du 12 janvier. L’Assemblée de Polynésie a examiné d’autres dispositions, notamment un projet d’amendement de M. Michel Buillard, lequel, si j’en crois que le compte rendu de la commission des lois, a retiré son amendement au profit de celui de M. Geoffroy et de Mme Vernaudon. En tout état de cause, ce dont a discuté l’Assemblée de Polynésie, pour autant que l’on considère que cette séance était une séance de consultation, n’avait strictement rien à voir avec l’amendement que nous avons finalement adopté.
Dans ces conditions, on peut parler d’un détournement de procédure permettant de faire adopter, par l’Assemblée nationale, un amendement modifiant le régime électoral, sans que l’Assemblée de Polynésie ait été consultée, comme l’impose la Constitution.
Je soumets ces trois arguments juridiques à la sagesse du Conseil constitutionnel. En réalité, on est dans la manœuvre politique. Le gouvernement légitime d’Oscar Temaru – légitime car appuyé par une majorité de suffrages – a été renversé par une motion de censure votée par l’ensemble des forces politiques dites « autonomistes », y compris les membres associés de son propre gouvernement issus des îles, que l’on appelle là-bas les îliens – selon une pratique, que nous ne connaissons pas en métropole, qui consiste à censurer son propre gouvernement pour participer au suivant en retrouvant le même ministère.
Or, aussitôt élu, le nouveau président de la Polynésie est venu en métropole, où, miracle, il a été reçu dès le lendemain de son arrivée par le Président de la République, le surlendemain par le Premier ministre, le jour d’après par le ministre de l’outre-mer, qui lui ont tous confirmé leur soutien à la modification du mode de scrutin. Il avait fallu plusieurs mois à son prédécesseur pour être reçu par les autorités de la République.
J’ai reçu, au nom du groupe socialiste, et en présence de Béatrice Vernaudon, la délégation de Polynésie. Elle a reconnu que l’on avait eu raison, il y a trois ans, de s’opposer à la réforme du mode de scrutin. Et comme la religion est une dimension importante de la culture polynésienne, on m’a dit que chacun là-bas faisait son mea culpa, y compris, paraît-il, Gaston Flosse. Mais lui doit le faire au moins trois fois par jour !
J’ignore si cette manière de procéder est contraire à la Constitution. Je le pense, mais il appartiendra en tout état de cause au Conseil constitutionnel de nous le dire très vite. J’ai en tout cas une conviction : elle est contraire à la morale.
Le moins que l’on puisse dire est que M. Dosière n’est pas très convaincu : il conclut son propos en avouant ne pas savoir. Pourtant, si l’on présente une exception d’irrecevabilité, c’est que l’on dispose d’arguments incontestables prouvant que le texte est contraire à la Constitution. M. Dosière est d’autant moins convaincu qu’il n’attend même pas de notre assemblée qu’elle vote son exception d’irrecevabilité puisqu’il nous renvoie à la décision du Conseil constitutionnel,...
Que, par voie d’amendement, on trouve dans ce texte des dispositions concernant une collectivité d’outre-mer n’est pas un cavalier. Sur ce point, je suis confiant sur le sort que fera, à ce texte, le Conseil constitutionnel.
Vous avez vous-même reconnu qu’il s’agissait non d’un projet de loi, mais d’un amendement, et que, fort heureusement, les amendements n’étaient pas soumis à la même règle que les projets de loi. Votre deuxième argument tombe aussi lourdement qu’il est fragile.
(L’exception d’irrecevabilité n’est pas adoptée.)
C’est la raison pour laquelle, respectueux de la volonté populaire exprimée outre-mer et satisfait de plusieurs des clarifications apportées, au moins sur ces points, par le Parlement, le groupe socialiste de l’Assemblée nationale a, comme celui du Sénat, voté ces textes et confirmera naturellement ce vote en approuvant les conclusions de la commission mixte paritaire.
Grâce à l’article 1er de la loi organique, la Constitution s’appliquera enfin dans les trois ans outre-mer après sa dernière modification. C’était une ardente obligation, dont on ne peut que blâmer le retard.
L'article 3 permet de mettre le statut de Mayotte en conformité avec la Constitution : la révision constitutionnelle ayant fait de Mayotte une collectivité d’outre-mer régie par l'article 74, son statut, qui était jusqu’ici défini par une loi ordinaire votée sous la précédente législature, relève désormais d'une loi organique.
Nous sommes globalement satisfaits par ce nouveau statut : il dote Mayotte de droits dont bénéficient déjà les autres collectivités, tels que le référendum local ou le droit de pétition ; il assure la dévolution à la collectivité de l'ensemble des compétences relevant des conseils régionaux et généraux, à l'exception de la construction et de l'entretien des collèges et lycées ; il étend les domaines où les lois et règlements s'appliquent de plein droit, dans la perspective d'une évolution statutaire à partir de 2008.
Les articles 4 et 5 de la loi organique tirent les conséquences du choix massivement exprimé par les habitants des îles du Nord de la Guadeloupe lors des consultations de décembre 2003 : plus de 95 % des électeurs de Saint-Barthélemy et plus de 76 % de ceux de Saint-Martin s’étaient prononcés alors en faveur de l'accession de ces deux îles au statut de collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution. Comme vous le savez, le Parti socialiste a soutenu cette évolution lors de la consultation : la création de ces deux collectivités d'outre-mer est justifiée au regard de leur situation géographique et de l'organisation administrative, puisque les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin connaissent depuis longtemps un destin différent du reste de l'archipel guadeloupéen.
Je rappelle, en accord avec notre collègue Victorin Lurel, retenu cet après-midi en Guadeloupe, que Saint-Barthélemy et Saint-Martin évoluent dans un environnement international spécifique, tant sur le plan économique et social que sur le plan culturel, et s’inscrivent dans une histoire singulière qui explique, s'il en était besoin, la volonté affirmée de leurs élus d'assumer leurs responsabilités dans le cadre du régime d’autonomie défini à l'article 74.
Comme le rapport d'information de la commission des lois du Sénat le préconise, l'indispensable coopération de Saint-Martin avec la partie néerlandaise de l'île suppose qu'elle soit également dotée dès maintenant du plus haut degré d'autonomie, ce qui est l'objet de ce statut.
Ces nouveaux statuts permettent également de régler la délicate et très ancienne question fiscale : la compétence dévolue en cette matière aux deux nouvelles collectivités ne constitue pas une exception puisqu’elle reprend un dispositif en vigueur dans toutes les autres collectivités régies par l'article 74 et en Nouvelle-Calédonie.
Ce projet de loi organique mettra fin à l'incompréhension mutuelle qui règne en ce domaine, et à l'absence d’application effective de la législation, en organisant une autonomie fiscale pleinement responsable, encadrée par une convention conclue entre chacune des deux futures collectivités d'outre-mer et l’État.
Enfin, il aurait été paradoxal que, distinctes de la Guadeloupe, ces îles continuent à être représentées par des parlementaires guadeloupéens. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont pris leurs responsabilités sur ce point.
Je ne m’étendrai pas sur le toilettage juridique des statuts de Saint-Pierre-et-Miquelon, des Terres australes et antarctiques françaises ainsi que de l'Île Clipperton : ces clarifications étaient nécessaires, et elles sont naturellement bienvenues.
Vous me permettrez, monsieur le ministre, d’adresser cependant deux critiques fortes à ce projet, qui reste insuffisant sur deux points à nos yeux fondamentaux.
Premièrement, j’approuve la démonstration magistrale de notre collègue sénateur Claude Lise : je crains qu’en dépit de la réécriture par le Sénat de l'article 1er de la loi organique mettant en œuvre l'article 73-3 de la Constitution, le pouvoir dévolu par cet article à ces collectivités ne reste finalement lettre morte. Il ne traduit en rien le souhait des élus d'outre-mer de se voir reconnaître un pouvoir d'initiative législative dans des domaines techniques, et il devra, comme d’autres dispositions du titre XII de la Constitution, être réécrit afin que la décentralisation se concrétise enfin et qu'une partie du pouvoir normatif soit réellement transférée aux collectivités locales.
Deuxièmement, les dispositions relatives aux îles du Nord restent peu satisfaisantes, en dépit des améliorations apportées par les sénateurs, qui en ont gommé les aspects les plus choquants, notamment le curieux différentialisme appliqué à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy. L’accompagnement au développement de ces collectivités, la prise en compte des particularités culturelles, principalement linguistiques, de Saint-Martin ainsi que – je veux particulièrement insister sur ce point – l'accompagnement financier de cette collectivité demeurent insuffisants.
Le passage de Saint-Martin au régime de l'article 74 ne doit pas signifier le retour à une forme insidieuse d’abandon, ou au « cartiérisme », chronique de Paris s’agissant de l’outre-mer. L’État ne doit pas abandonner les îles du Nord ; il doit tenir compte des grands retards de développement de Saint-Martin. Il s'agit pour nous, socialistes, qui sommes attachés à la solidarité et à l’intervention de l’État, d'une question de principe.
L’État ne peut pas, au moment où il dresse le constat de sa carence prolongée à Saint-Martin, faire appel au sens des responsabilités des élus et de la population de l'île comme s'il voulait les punir de leur audace. Une attitude responsable de l’État aurait précisément consisté à en tirer toutes les conséquences en reconnaissant la nécessité pressante d'un véritable « plan Marshall » pour Saint-Martin en matière d’équipements : le groupe socialiste du Sénat a introduit un tel plan à l'article L.O. 6344-3 et j’espère sincèrement que l’État le mettra en œuvre et le respectera scrupuleusement. Faute en effet d’un plan d'accompagnement et de développement d’une durée raisonnable, c’est le beau concept d'autonomie et de liberté qui serait discrédité. En admettre le principe et en reconnaître l'absolue nécessité, ce n'est pas sombrer dans l'assistanat : la solidarité nationale bien comprise commande de créer une dotation de rattrapage et de premier équipement pour Saint-Martin.
Pour que cette évolution ne rime pas avec abandon, elle aurait donc dû être davantage accompagnée par l’État, comme je l’ai dit, sans parvenir totalement à attirer votre attention, monsieur le rapporteur. Or cet accompagnement est laissé in fine aux bons soins du conseil régional et du conseil général de la Guadeloupe, alors que ceux-ci percevront moins de dotations de la part de l’État et moins de recettes fiscales du fait même de cette évolution.
L'extension du bénéfice de la dotation de continuité territoriale aux personnes qui doivent se rendre outre-mer pour un événement familial grave, si elle ne peut être que saluée dans son principe, aurait mérité, pour assurer l’effectivité de son application, une augmentation importante de cette même dotation, faute de quoi elle grèvera un peu plus encore les finances des collectivités régionales, à moins qu’elle ne reste, comme je le crains, un pur effet d'annonce. Le groupe socialiste reconnaît néanmoins que cette disposition ouvre une brèche en posant que la continuité territoriale doit également s'entendre de la métropole vers l’outre-mer. Là encore, le débat démocratique qui va s'engager dans les mois à venir sera l'occasion de revenir sur ce sujet essentiel de la continuité territoriale, qui, je n'en démords pas, ne sera pas réglé par un subventionnement public déguisé aux compagnies aériennes. Je me permets de rappeler à ce propos que notre candidate à l'élection présidentielle s'est engagée à œuvrer pour la mise en place de prix plafond pour la desserte de l'outre-mer, par la voie de la concertation et du renforcement des obligations de service public pesant sur les compagnies aériennes : je doute fort que les propositions minimalistes que j’ai entendues lundi soir dans la bouche de Nicolas Sarkozy – celui-ci s’est montré bien timide à l’égard des compagnies ariennes puisqu’il s’est contenté d’évoquer une aide individuelle, proposition qui aura très probablement pour effet d’augmenter au contraire le prix du billet – aient quelque chance d’améliorer la liaison aérienne entre l’hexagone et les outre-mer.
Je voudrais enfin, après notre collègue Dosière, dont chacun connaît l’engagement en faveur de la Polynésie, réitérer de la façon la plus vive notre opposition à la nouvelle proposition de modification du mode de scrutin en Polynésie française, qu’on s’étonne de voir apparaître ainsi, en fin de législature, dans un texte pourtant consensuel par bien de ses aspects. Nous vous mettons à nouveau solennellement en garde, monsieur le ministre, puisque le rapporteur persiste à ne rien écouter de mes propos – entendre l’opposition fait pourtant partie de votre rôle, monsieur le rapporteur.
En un mot, il s’agit d’œuvrer encore une fois à sauver le « système Flosse ». Je vous reconnais le mérite, monsieur le ministre, de le faire plus subtilement – et donc plus efficacement peut-être – que votre prédécesseure, mais l’intention reste la même.
Ces réserves étant faites, le groupe socialiste votera ce projet de loi…
En conclusion, je voudrais souligner, en vue des débats des mois à venir, dans lesquels, j’en suis sûr, les outre-mer seront très présents, que ces nouveaux statuts constituent une preuve parmi d'autres de la très grande vitalité des outre-mer. Véritable laboratoire institutionnel, qui permet l’adaptation de la règle de droit aux spécificités locales, les outre-mer méritent d’être mieux connus et mieux compris des Français, dans ce monde bouleversé, où, pour reprendre les mots d’Édouard Glissant, « il n’est plus possible de maintenir l’idée qu’une communauté aurait une identité qu’elle imposerait d’une manière définitive au reste du monde ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
J’ai été choqué, en tant que député, de vous entendre expliquer, monsieur Dosière, que la Constitution priverait les députés de leur droit d’amendement dès lors qu’il s’agit de l’outre-mer. Votre interprétation signifie en effet que les députés n’ont aucune possibilité de modifier un texte relatif à ces collectivités qui n’aurait pas été d’abord examiné par le Sénat. Par pitié, messieurs les Sages du Conseil constitutionnel, préservez le droit d’amendement des députés, notamment des députés d’outre-mer. Ceux qui, comme vous, chers collègues de Polynésie présents aujourd’hui, doivent parcourir des milliers de kilomètres pour participer à nos délibérations se trouveraient fort marris de ne pas pouvoir modifier les projets du Gouvernement que le Sénat n’aurait pas examinés ! Vous avez inventé là, monsieur Dosière, une forme de tutelle des sénateurs ultramarins sur les députés ultramarins et l’ensemble de la nation. Cette invention est pour le moins surprenante venant de vous, qui nous avez habitués à beaucoup plus de rigueur et de sérieux, d’autant qu’il s’agit sans doute de votre dernière intervention dans cet hémicycle.
Vous nous assurez, monsieur Dosière, qu’une modification du mode de scrutin mettrait en cause la sécurité juridique. Or deux élections ont déjà eu lieu selon le mode de scrutin actuellement en vigueur. Si les Sages suivent votre raisonnement et invalident cette disposition – vous comprendrez que j’y sois attaché, puisque l’UDF a toujours prôné ce mode de scrutin – je leur pose la question : combien faut-il d’élections avant qu’on puisse changer un mode de scrutin sans provoquer d’insécurité juridique ? Trois, quatre, cinq, six ? De surcroît, vous n’avez trouvé qu’une mention de cette notion dans la jurisprudence constitutionnelle, sur un sujet qui n’a aucun rapport.
Ce n’est pas davantage un cavalier. Il n’y a rien d’illogique en effet, comme l’a souligné très franchement notre collègue tout à l’heure, à ce que le Parlement s’efforce, ainsi qu’il l’a déjà fait dans les débats précédents sur ce texte, d’améliorer l’organisation des collectivités d’outre-mer et de leurs assemblées, et cela d’autant moins que le Gouvernement, loin de toute intention de blocage, s’en est remis à la sagesse de l’Assemblée.
En outre, contrairement à ce que prétend M. Dosière dans les arguties de sa démonstration, c’est bien l’Assemblée de la Polynésie française qui a demandé cette modification du mode de scrutin, même si elle n’a pas rédigé elle-même le texte correspondant – car il s’agit là d’une prérogative du Parlement. Il y avait d’ailleurs deux textes : une motion, que M. Dosière a omis de citer, qui visait à rétablir le mode de scrutin précédent et qui a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée de la Polynésie française, les indépendantistes ayant choisi de boycotter ce vote, et un autre texte, attribué à M. Buillard et qui reprenait en réalité la proposition de loi qu’Hervé Morin et moi-même avions déposée. Le texte qui a été soumis à l’Assemblée nationale et au Sénat avait donc rassemblé les suffrages de la Polynésie française, et nous n’avons fait que jouer notre rôle de représentants de la nation en l’adoptant.
Nous voyons bien, mes chers collègues, ce qui se passe : à défaut d’une position juridique forte, certains empilent les arguments, tortillent les faits et déforment la réalité pour embrouiller les choses dans l’esprit du juge. Lorsqu’il s’agit des Sages du Conseil constitutionnel, le procédé me semble un peu cavalier.
Enfin, je tiens à dire notamment devant vous, Mme Vernaudon, que j’ai été choqué par les propos méprisants qui ont été tenus à cette tribune sur les élus îliens, dont vous êtes et que vous connaissez bien, chère collègue. On nous explique que ces élus se vendraient au gré des élections et des avantages qui leur seraient consentis. Ces propos, s’ils sont couverts par l’immunité parlementaire, n’en sont pas moins excessifs.
Il va de soi que des élus peuvent changer d’avis. Comme je l’ai déjà exposé lors de l’examen du texte en première lecture, avec le mode de scrutin précédent, le système de la prime majoritaire obligeait des candidats défendant des idées distinctes à se présenter sur la même liste. Ce fut le cas de la liste UPLD, conduite à l’époque par M. Temaru et qui réunissait indépendantistes et autonomistes. M. Temaru avait pris envers ses collègues élus avec lui sur cette liste et envers l’ensemble du peuple polynésien l’engagement de ne pas évoquer l’indépendance tant qu’il serait président de l’Assemblée de la Polynésie française, mais il n’a jamais respecté cet engagement et n’a cessé de faire des déclarations sur l’indépendance de la Polynésie, tant en France qu’à l’étranger, dans différents pays du Pacifique, de telle sorte qu’il a perdu sa majorité. Voilà tout ce qui s’est passé en Polynésie française.
Mieux vaut donc tout simplement un mode de scrutin qui permette à ceux qui partagent les mêmes idées de se présenter ensemble, puis de passer des contrats de gouvernement : c’est la voie de la stabilité. Ce fut d’ailleurs le cas durant des années en Polynésie française, même si c’était sous l’égide de l’actuel sénateur de Polynésie française, dont nous contestons par ailleurs la capacité à diriger la Polynésie et la légitimité.
Je tiens aussi à souligner, puisque la question a été évoquée, qu’à la différence des socialistes et de leurs amis en Polynésie, dont M. Temaru, les élus proches de l’UDF – à savoir ceux du Fetia Api, et notamment leur chef de file, M. Philip Schyle, président de l’Assemblée de la Polynésie française – n’ont pas plus que l’UDF changé d’avis sur le mode de scrutin en Polynésie. Nous avons combattu le changement en 2004 et continuons à le combattre. Grâce à une nouvelle interprétation de l’Assemblée, nous revenons à un mode de scrutin qui, s’il n’est pas tout à fait le même que précédemment et n’est pas parfait – je souscris, à cet égard, au jugement de Béatrice Vernaudon –, est bien plus sain que le système que nous avions alors laissé adopter.
Ce ne sont pas l’UDF ni les élus du Fetia Api qui ont changé d’avis, monsieur Dosière, mais vous, qui étiez à nos côtés pour combattre le mode de scrutin mis en place en 2004. Vous changez d’avis, parce que ça vous arrange, parce que ça vous paraît aujourd’hui plus opportun, plus conforme aux intérêts de vos amis politiques en Polynésie française. Vous nous dites que la délégation d’élus polynésiens qui est venue rencontrer tous les groupes de cette assemblée a fait son mea culpa ? Il est bien triste que vous ne fassiez pas le vôtre ! Au lieu de remporter avec nous, comme vous auriez pu le faire, une victoire sur le mode de scrutin mis en place 2004, vous préférez poursuivre les intérêts électoraux de M. Temaru en espérant, à l’approche de l’élection présidentielle, que Mme Royal gagnera quelques voix de plus à ces manœuvres et à ces mensonges. Cela me paraît tout à fait déplacé.
Au-delà de cet amendement, si essentiel soit-il pour la Polynésie française, nous avons encore bien des choses à dire sur le projet de loi.
Comme en première lecture, si nous approuvons pleinement les évolutions statutaires prévues pour Saint-Barthélémy, qui nous paraissaient satisfaisantes et pour lesquelles Saint-Barthélémy nous semble prêt, nous ne partageons toujours pas cet avis pour Saint-Martin. Nous ne nions pas que Saint-Martin doive, pour les raisons légitimes exposées par les différents orateurs qui se sont exprimés sur cette question, bénéficier de ce nouveau statut et jouir de l’autonomie de gestion que lui donnerait une assemblée unique regroupant les compétences traditionnellement dévolues aux trois niveaux que représentent la commune, le département et la région. Saint-Martin doit certes avoir une capacité d’adaptation législative, mais à la condition que les collectivités qui existent aujourd’hui soient dans une situation assez stable. En effet, nous les mettrions en danger si nous ne parvenions pas à régler d’abord le problème des flux migratoires avec la partie hollandaise de l’île, et notamment celui des personnes qui travaillent dans cette partie et viennent profiter des prestations sociales de la partie française. Il nous faut aussi stabiliser les finances de cette collectivité. Si donc l’évolution proposée est souhaitable, elle est sans doute un peu rapide. À cet égard d’ailleurs, monsieur le ministre, l’UDF considère que la suppression par le Sénat du délai que prévoyait le texte initial du Gouvernement est une véritable erreur.
Il nous paraît, ensuite, excessif de créer deux sièges de députés pour deux îles comptant respectivement 6 000 et un peu moins de 40 000 habitants et représentées jusqu’à présent à l’Assemblée nationale par M. Victorin Lurel. S’il était nécessaire de créer des postes de sénateurs – car une collectivité territoriale doit être représentée –, il ne nous paraissait donc pas nécessaire de faire de même à l’Assemblée nationale.
Le procédé choisi me paraît en outre très curieux. Comme vous l’avez vous-même indiqué, en effet, ces deux nouveaux députés ne doivent pas être élus en juin 2007, mais en 2012. Or, comme l’ont rappelé tous les orateurs, le Conseil constitutionnel demande que les circonscriptions électorales soient modifiées au cours de la prochaine législature. Mieux aurait donc valu attendre la refonte de la carte électorale globale. Cela aurait évité une erreur politique, qui gênera de surcroît le redécoupage électoral nécessaire en Guadeloupe – tout comme à Saint-Martin et à Saint-Barthélémy.
Je souhaiterais, pour en finir sur ce sujet, lever une inquiétude et j’espère, monsieur le ministre, obtenir une réponse de ce gouvernement, même si ce n’est pas lui qui appliquera demain ce dispositif. Il doit être clair que, si on n’élit pas ces députés en 2007, ce n’est pas pour les élire en 2008 ou 2009 ! Nous serions en effet confrontés à une situation curieuse – sur laquelle il n’est d’ailleurs pas inutile d’attirer l’attention du Conseil constitutionnel, qui de toute façon en sera saisi – : après avoir élu un député en 2007, comme tous les autres Guadeloupéens de la même circonscription, les habitants de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy en éliraient un autre, ce qui, sauf dissolution, ferait de ces 46 000 personnes les seuls citoyens français à voter deux fois au cours de la même législature ! Ce serait là une curiosité, une novation dont je n’ose imaginer les conséquences.
Quant à Saint-Pierre-et-Miquelon, cher monsieur Grignon, l’évolution statutaire nous paraît positive. Pour Mayotte, elle est indispensable, comme je l’ai dit plus longuement en première lecture. Je tiens à remercier le Gouvernement du gros travail de codification réalisé pour toutes ces collectivités – travail que son volume rend peut-être quelque peu indigeste pour les députés que nous sommes, mais qui était nécessaire pour permettre à chacun de mieux s’orienter dans les dispositions législatives applicables aux différentes collectivités d’outre-mer et qui se justifie par l’individualisation bien plus grande que la réforme constitutionnelle de 2003 a permise pour chacune d’entre elles.
Enfin, monsieur le ministre, vous comprendrez toute la satisfaction que j’éprouve, à quelques semaines de la fin de la mandature, à avoir pu remporter avec ma collègue Béatrice Vernaudon une petite victoire, ouvrir une petite brèche dans la théorie absolue qu’appliquait ordinairement l’État français en matière de continuité territoriale. La proposition de M. Paul visant à imposer des tarifs aux compagnies aériennes me semble une mauvaise voie : nous aurons plutôt intérêt à faire jouer la concurrence qu’à la tuer en imposant des tarifs qui nécessiteront par ailleurs des subventions. Encore faudrait-il, bien sûr, que cette concurrence soit réelle et effective.
En tant que député de métropole qui m’investis sur tous les textes qui ont trait à l’outre-mer, je me bats depuis cinq ans, comme le font, j’en suis certain, les députés ultramarins, pour permettre à nos compatriotes originaires d’outre-mer qui vivent en métropole de continuer à voir leur famille grâce à une aide des collectivités locales et au fonds créé par le Gouvernement à cet effet – même si le montant de ce dernier ne suffit pas. C’est le sens de l’amendement que Béatrice Vernaudon et moi-même avons proposé. Je reconnais d’emblée que cet amendement est insuffisant – dix ans sans revoir sa famille, c’est trop long ! Vous connaissez le règlement de l’Assemblée, chers collègues : il a fallu faire passer ce dispositif sous les fourches caudines de l’article 40 de la Constitution pour que l’amendement puisse être examiné. Toujours est-il qu’il l’a été et qu’il a été adopté. Je suis convaincu – comme Mme Vernaudon et M. Grignon, je n’en doute pas – qu’une brèche est désormais ouverte et que, si la question doit être encore clarifiée à l’avenir par la législation, il n’en est pas moins admis désormais que ceux qui vivent en métropole et ceux qui vivent outre-mer ont droit à la continuité territoriale.
Il est certain, cher monsieur Grignon, que les budgets actuels ne suffiront pas pour satisfaire tout le monde, mais du moins pourra-t-on peut-être enfin débattre du budget consacré à la continuité territoriale. Pardonnez-moi de comparer une fois encore – la dernière pour cette législature – ce budget avec celui que l’État consacre à la continuité territoriale en Corse. Venir de Corse en métropole coûte tout de même moins cher que de venir de Polynésie, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de la Guadeloupe ou de la Réunion – sans oublier la Nouvelle-Calédonie, qui pourrait m’en vouloir de cette omission !
La brèche que nous avons ouverte est une véritable victoire des parlementaires de la métropole qui se battent pour l’outre-mer et des parlementaires français de l’outre-mer qui se battent également pour leurs concitoyens. Il faudra, certes, que les gouvernements et les budgets futurs prévoient les moyens de poursuivre le mouvement. L’avancée accomplie n’en est pas moins réelle.
Pour ces raisons, monsieur le ministre, malgré les réserves que nous avons émises à propos de Saint-Martin et notre désaccord sur la création des nouveaux sièges de députés, nous voterons pour le texte que vous nous présentez et qui est issu de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Concernant d’abord les nouveaux pouvoirs normatifs reconnus aux départements et régions d’outre-mer, le titre Ier du projet de loi organique définit les modalités d’exercice par les assemblées délibérantes des départements et régions d’outre-mer de ces nouveaux pouvoirs reconnus par l’article 73 de la Constitution, lequel prévoit qu’après y avoir été habilités par la loi, les départements et régions d’outre-mer peuvent adapter les lois et règlements à leurs caractéristiques et contraintes particulières et fixer des règles dans certaines matières pouvant relever du domaine de la loi.
Nous ne pouvons cependant regarder ces nouveaux pouvoirs que comme un premier pas vers plus d’autonomie. En effet, la procédure, telle qu’elle est prévue, est particulièrement lourde et complexe, et, pour que ce pouvoir puisse s’exercer effectivement, il faudra compter sur la bienveillante attention du Gouvernement, qui devra accepter d’inscrire à l’ordre du jour du Parlement les demandes d’habilitation, sans quoi le pouvoir normatif des départements et régions d’outre-mer pourra rester tout relatif.
Pour ce qui concerne le nouveau statut de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, je tiens aussi à rappeler quelques remarques.
Les populations de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ont fait le choix de se transformer en collectivités uniques. Il était du devoir du Parlement de traduire législativement leur aspiration et nous faisons un point d'honneur, nous, les élus communistes, à toujours défendre le droit à l'autodétermination des départements d'outre-mer et de leurs populations. Toutefois, en devenant collectivité d'outre-mer, le changement de statut de ces communes ne sera pas sans conséquences sur la situation financière de la Guadeloupe. Je tiens ici à vous rappeler notre inquiétude quant à la diminution des dotations et des recettes fiscales qui en résultera pour cette collectivité territoriale.
En lien avec la question de la situation financière de la Guadeloupe, je dois ici revenir sur le statut fiscal de Saint-Barthélemy. Nous avons été quelques-uns sur ces bancs à dénoncer le statut d'exonération fiscale dont jouit ce petit paradis pour milliardaires. La défiscalisation de fait de cette île, qui est devenue un des hauts lieux de villégiature et de plaisance de la grande bourgeoisie, ne peut souffrir d'aucune justification. Il n'est pas acceptable que les résidents de l'île la plus riche de Guadeloupe soient exemptés de toute forme de solidarité fiscale avec le reste du pays et, surtout, avec le département de France le plus sinistré par le chômage et la pauvreté. Cette exemption de toute fiscalité de redistribution, qui n'a que trop duré, est contraire à tous nos principes. Vous nous assurez, monsieur le ministre, que « les nouveaux statuts permettront enfin de régler la délicate – et très ancienne – question fiscale ». Nous voulons vous croire. Néanmoins, nous continuons à craindre qu'ils ne soient qu'un énième démantèlement des régulations de solidarité et de cohésion sociale.
En dépit de ces observations et de nos craintes, nous approuverons l'évolution institutionnelle des collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, au nom du respect de la volonté populaire qui s'est exprimée dans ces communes guadeloupéennes. Notre vote positif doit être apprécié au regard de cet attachement au principe de l'autodétermination.
S'agissant de la modification du mode de scrutin en Polynésie française, qui a été introduite par notre assemblée et confirmée lors de la CMP, nous ne pouvons que réaffirmer notre hostilité totale. Comment accepter, à quelques semaines des échéances présidentielles et législatives, que l’on s’engage sur un tel terrain de modification des règles du jeu électoral, même si ces nouvelles règles ne s’appliqueraient qu’en 2012 ? Comment l’accepter sans y voir des manœuvres politiciennes auxquelles le système Flosse nous a habitués ? J’ajouterai que nous nous interrogeons aussi sur l’inconstitutionnalité de l’amendement en raison de son caractère cavalier. C’est pourquoi nous avons voté tout à l’heure la motion de procédure défendue par René Dosière.
Les questions institutionnelles et statutaires sont des préalables incontournables pour le devenir de l'outre-mer, son développement économique et social. En effet, l'économie ne peut être dissociée du politique et il ne peut y avoir développement véritable sans responsabilité politique. Ces projets de loi, malgré les inquiétudes qui sont les nôtres et que je vous ai rappelées ici brièvement, sont un premier pas vers une autonomie réelle outre-mer et participeront de sa responsabilité et de son développement véritable. C'est pourquoi nous les voterons.
Permettez-moi tout de même, monsieur le ministre, d’achever mon propos sur une note moins positive : tandis que nous allons voter ce texte, le dernier de la législature concernant l’outre-mer, je ne peux passer sous silence la souffrance de sa population qui tente de survivre aujourd'hui à une situation sociale qui ne cesse de se dégrader.
Je tiens tout d'abord à saluer une étape importante dans la modernisation statutaire des collectivités ultramarines grâce à un travail considérable accompli par le Gouvernement, par notre rapporteur Didier Quentin et par mes collègues des deux assemblées, sans oublier bien évidemment l'excellent travail et la disponibilité permanente des administrateurs des commissions des lois des deux assemblées.
Ces deux projets de loi étaient demandés, attendus, et le dispositif législatif proposé est – faut-il le rappeler ? – d'une ampleur inhabituelle. En témoignent d'ailleurs les très nombreuses dispositions techniques qui restaient en discussion en CMP : l'équivalent d'un millier d'articles codifiés. Mais cette apparente complexité ne doit pas dissimuler les enjeux politiques importants qui s'attachent aux dispositions que nous nous apprêtons à approuver.
En effet, ces textes concernent les compétences normatives des départements et des régions d'outre-mer, ils définissent le statut de quatre collectivités d'outre-mer tout en modernisant les règles de droit électoral qui s'y appliquent et en améliorant la démocratie directe locale.
Je n'évoquerai que quelques-unes des très nombreuses dispositions que comportent ces deux textes.
Tout en garantissant aux collectivités d'outre-mer leur appartenance à la République, la révision constitutionnelle de mars 2003 leur offre désormais un cadre institutionnel et juridique plus souple. Le principe d'identité législative est réaffirmé, mais il est prévu que les lois et règlements puissent faire l'objet « d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières » des collectivités. C'est tout le sens de l'article premier du projet de loi organique qui définit les conditions dans lesquelles ces « marges de manœuvre et d'adaptation » pourront être mises en œuvre par les conseils territoriaux et régionaux.
Le deuxième objectif poursuivi, c'est la définition des statuts de quatre collectivités d'outre-mer : d'une part, un cadre actualisé et rénové pour Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon ; d'autre part, le passage du statut de communes à celui de collectivités d'outre-mer pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, respectant ainsi la volonté exprimée en ce sens par les habitants des deux îles lors de la consultation organisée le 7 décembre 2003.
S'agissant de Mayotte, ce sont des compétences clarifiées mais c'est surtout un pas vers un régime législatif et des règles plus proches du droit commun. Un changement symbolique, dans la perspective d'une future départementalisation.
S'agissant de Saint-Pierre-et-Miquelon, ce texte reprend, et j'en remercie le Gouvernement, l'essentiel des dispositions de la proposition de loi statutaire que j'avais déposée en novembre 2004. Il affirme et renforce les compétences spécifiques de la collectivité territoriale relatives à la fiscalité directe et indirecte, à l'urbanisme et au logement. Il les affirme et il les renforce. En effet, ces compétences fiscales sont complétées par le pouvoir du conseil territorial de lever une redevance sur les exploitations d'hydrocarbures off-shore dans la zone économique exclusive française, disposition adoptée par notre assemblée par voie d'amendement lors de l'examen de la loi de finances 1998. De plus, le conseil territorial pourra attribuer les titres miniers aux compagnies pétrolières dans la zone économique exclusive française. Ces deux dispositions clarifient définitivement et simplifieront les négociations actuelles et futures avec les compagnies pétrolières, dans une zone extrêmement riche en hydrocarbures off-shore, zone sur laquelle Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse fondent déjà la part essentielle de leur développement économique et dont les nouvelles découvertes apparaissent régulièrement.
Cette loi organique – et non ordinaire comme la loi statutaire de 1985 – clarifie aussi définitivement la situation de l'archipel à l'égard de l'applicabilité de la loi, la réforme constitutionnelle de mars 2003 ayant intégré les collectivités d'outre-mer à l'article 74 de la Constitution géré par le principe de la spécificité législative et non de l'assimilation, de l'identité législative tel que le prévoyait le statut de 1985 excepté pour la fiscalité, l'urbanisme et le logement.
Affirmer, conforter, adapter, mais aussi moderniser et démocratiser : c'est ainsi que le mode d'élection du conseil territorial est modifié par la création d'une circonscription unique, que le conseil territorial pourra déléguer les compétences en matière d'urbanisme aux communes, que sont étendues plusieurs innovations de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 – expérimentation, référendum décisionnel, consultation des citoyens, droit de pétition, etc.
S'agissant de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, je rappellerai, d'une part, que le Sénat a souhaité que ces deux collectivités soient représentées à la Haute assemblée et qu'il s'est prononcé à l'unanimité pour la création de deux sièges de sénateurs dont la première élection devrait intervenir en septembre 2008, d'autre part, que nous avons longuement débattu, en commission des lois, et dans cet hémicycle le 24 janvier dernier, de la création de deux sièges de députés dont l'élection interviendra à compter du renouvellement général suivant celui de juin 2007. Au titre des dispositions électorales, la CMP s'est prononcée pour le maintien d'une prime de 50 % des sièges pour les élections au conseil territorial de Saint- Pierre-et-Miquelon et pour la fixation de la prime majoritaire à un tiers des sièges pour les élections des conseillers territoriaux de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
Enfin, je m’associe aux vœux de mes collègues de Polynésie pour un retour à la stabilité politique, ce que devrait faciliter la modification du mode de scrutin adoptée le 24 janvier – j’ai cru comprendre que ce n’était pas l’avis de tout le monde, mais en démocratie, il n’y a pas de scrutin parfait.
En conclusion, monsieur le ministre, je vois dans ces deux textes, comme mes collègues du groupe UMP, de réels progrès pour l'outre-mer, la voie ouverte vers une meilleure compréhension du fonctionnement juridique de l'outre-mer.
Mais je rappellerai qu'au-delà des institutions, l'outre-mer a besoin d'une véritable considération et d'une vraie politique globale de développement et de diversification économiques. Les dispositions Perben en 1994, la LOUM, et la loi-programme en 2003 plus fortement encore, allaient en ce sens. Néanmoins certains de nos collègues – qui ne sont pas présents aujourd’hui –, sur tous les bancs de cette assemblée, de même qu'au Sénat, semblent avoir une image de l'outre-mer, des outre-mers, qui est parfois choquante. On ne réglera pas les difficultés de l'outre-mer à coup de petits amendements ou de dispositions sectorielles. L'outre-mer a besoin d'une politique globale, d'une approche globale de sa situation réelle, de ses situations extrêmement diverses. L'outre-mer ne coûte pas à la France, mais il a beaucoup apporté, apporte encore beaucoup à la France et pourrait apporter encore beaucoup plus. L'outre-mer, c'est la France dans le monde, c'est un formidable tremplin au service de la langue, de la culture, des technologies, du rayonnement de la France dans le monde. L'outre-mer fait aussi de notre pays le deuxième espace maritime au monde : l'espace maritime hexagonal, sa zone économique exclusive, c'est 400 000 kilomètres carrés ; avec l'outre-mer, cet espace maritime passe à 10 millions de kilomètres carrés et confère à notre pays et à ses territoires des droits souverains en matière économique, notamment pour l'exploitation des ressources du sous-sol marin, droits qui peuvent porter, au-delà des 200 miles marins, sur 1 million de kilomètres carrés supplémentaires sur le sous-sol marin si notre pays défend ses droits conformément à la convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982. C'est tout cela l'outre-mer et bien plus encore.
Cela dit, monsieur le ministre, les textes que nous examinons aujourd'hui sont le résultat d'un immense travail et vont dans le sens que nous souhaitons pour asseoir l'avenir de l'outre-mer. Le groupe UMP y adhère avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Je voudrais d’abord dire, en rejoignant les propos en fin d’intervention de Gérard Grignon, que l’outre-mer est effectivement une chance pour la France comme la France est une chance pour les outre-mers, et que nous devons construire des relations de confiance, équilibrées entre les outre-mers – parce qu’elles sont bien plusieurs – et la France. La représentation nationale a un grand rôle à jouer dans la construction de ces relations.
En ce qui concerne la réforme du mode de scrutin pour l’élection des représentants à l’Assemblée de Polynésie, je tiens à rassurer mes collègues : cette modification est une demande de la majorité des Polynésiens. M. Temaru, lorsqu’il a été élu en 2004, s’est engagé, dans son discours d’investiture, à réunir tous les groupes politiques pour réfléchir et proposer une modification du mode de scrutin.
C’est pourquoi j’ai regretté que ma proposition de loi n’ait pas été transmise pour avis à l’Assemblée de Polynésie. Elle visait à la suppression de la prime majoritaire et suggérait un redécoupage, pour éviter une situation qui me semble un déni de démocratie.
Quoi qu’il en soit, je tiens à rappeler à mes collègues que la modification du mode de scrutin répond à une demande de la majorité des Polynésiens, auxquels son annonce a apporté un certain apaisement, même si un sondage récent révèle que deux tiers d’entre eux pensent qu’ils devront retourner aux urnes avant l’échéance de 2009 pour ramener une véritable stabilité. En effet, l’assemblée actuelle a été élue en deux temps, ce qui a introduit un certain flou. Mais il importe que le mode de scrutin soit modifié en amont. À cet égard, je rejoins M. Geoffroy : certes, cette modification est introduite par un amendement parlementaire, mais n’entre-t-il pas dans nos prérogatives d’user du droit d’amendement pour relayer les demandes de la population ?
En scindant les articles 73 et 74, la Constitution a permis une évolution progressive des relations entre les collectivités, notamment celles visées à l’article 74, et la métropole. Nous serons par conséquent amenés à modifier les lois organiques qui nous régissent. Puisque, une fois par an, le vote de la « loi balai » permet d’apporter certaines rectifications nécessaires, on ne voit pas pourquoi les parlementaires d’outre-mer n’en profiteraient pas pour proposer des améliorations de leurs institutions ou de leur mode d’organisation.
En ce qui concerne la dotation de continuité territoriale, je tiens pour une victoire pour les parlementaires d’avoir réussi, malgré l’opposition du Gouvernement et même du rapporteur, à agrandir la brèche et à faciliter le droit au passage des Ultramarins dans leur collectivité d’origine. Je souhaite que le Gouvernement abonde, à l’avenir, la dotation, qui est un outil d’équité, et qu’il entretienne et promeuve la diversité et la richesse culturelles des Ultramarins contraints de travailler en métropole.
Je finirai par le problème du logement. M. Dosière a regretté que, à Paris, les portes se soient ouvertes plus facilement devant le nouveau gouvernement de Polynésie que devant le précédent.
Des crédits ont pu être affectés au financement de projets indispensables pour résorber l’habitat insalubre en Polynésie. Le mois prochain, une conférence portera sur le logement, principalement dans les départements d’outre-mer, et, dès la semaine prochaine, nous aborderons l’examen du texte sur le droit au logement opposable. J’insiste sur la priorité qui doit être accordée, en cette fin de mandature, aux collectivités visées à l’article 74 de la Constitution et au problème de l’insalubrité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi ordinaire.
Le premier d’entre eux est l’amendement n° 1 rectifié du Gouvernement, qui vise à une meilleure coordination et à la correction d’erreurs matérielles.
La parole est à M. le rapporteur suppléant.
(L'amendement est adopté.)
Il s’agit d’un amendement de précision déposé par le Gouvernement.
Y êtes-vous également favorable, monsieur le rapporteur ?
(L'amendement est adopté.)
Il s’agit d’un amendement du Gouvernement, visant à la correction d’une erreur matérielle.
Votre avis est-il également favorable, monsieur le rapporteur suppléant ?
(L'amendement est adopté.)
Souhaitez-vous le défendre, monsieur le ministre ?
(L'amendement est adopté.)
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures.)
La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.
Le texte que nous examinons aujourd'hui viendra combler un manque dans la panoplie de nos outils économiques et renforcera notre attractivité, tout en offrant un maximum de garanties pour éviter tout détournement de ce nouvel instrument.
L'amélioration de la compétitivité de notre droit constitue à mon sens un élément clé de la politique d'attractivité économique de notre pays. La nécessité de se préparer à l'avènement d'une économie de l'immatériel est une condition nécessaire au développement, dans notre pays, des activités de services financiers et juridiques, source essentielle de croissance et d'influence pour la France.
Lors de la dernière loi de finances rectificative, j'ai ainsi souhaité permettre aux cabinets d'avocats français d'exercer sous la forme juridique d'une association d'avocats à responsabilité limitée, afin de favoriser leur développement national et international. Dans cette perspective, nos professionnels du droit doivent également disposer d'instruments juridiques performants leur permettant de se battre à armes égales avec leurs concurrents étrangers.
Or, bien que la fiducie remonte au droit romain, force est de constater que notre droit français ne connaît toujours pas cette notion. Pourtant, ce dispositif juridique est loin de se résumer au seul trust. Il est certes couramment utilisé dans des pays relevant de la sphère anglo-saxonne – Grande-Bretagne, États-Unis, Canada, Australie –, mais il l'est aussi – et l’on a parfois tendance à l'oublier – par des pays de tradition romano-germanique, tels que l'Allemagne, la Suisse, le Luxembourg ou la Province du Québec. La France ne peut demeurer en retrait. L'ouverture des frontières et l'internationalisation des échanges rendent indispensable la création d'un outil comparable, afin de permettre aux entreprises et aux investisseurs de trouver dans le droit français les ressources équivalentes à celles qu’ils sont habitués à trouver dans d'autres droits. En effet, faute de pouvoir disposer d'un instrument adapté en droit interne, les entreprises françaises doivent souvent avoir recours à des montages étrangers, ce qui engendre une délocalisation des opérations juridiques et financières hors de nos frontières. Je n'ai pas besoin de revenir sur les exemples déjà évoqués lors de vos travaux en commission.
La situation est d'autant plus regrettable que notre droit connaît déjà certains mécanismes fiduciaires, dont l’utilisation reste néanmoins très spécifique. Je pense aux mécanismes de titrisation ou au PERP. Il manque donc un texte général sur la fiducie, mettant en place un outil qui s'adapterait aux besoins actuels et futurs. Tel est l'objet de la présente proposition de loi.
La fiducie se présente comme un contrat par lequel une personne – le constituant – transfère la propriété de biens ou des droits à une autre personne – le fiduciaire – et lui donne mission de les gérer dans un but déterminé, au profit d'un ou de plusieurs bénéficiaires. Le principe de liberté contractuelle sera au cœur de ce contrat. Ainsi les parties auront toute latitude pour organiser comme elles le veulent leur relation fiduciaire, notamment la destination des biens et droits transférés. L’innovation la plus remarquable réside évidemment dans la consécration de la notion de patrimoine d'affectation. En effet, les biens remis en fiducie formeront un patrimoine autonome, qui ne sera plus celui du constituant, mais qui ne s'intégrera pas non plus à celui du fiduciaire. Ainsi, les procédures collectives qui pourraient être ouvertes au bénéfice du constituant ou du fiduciaire n'affecteront pas les biens remis en fiducie.
Les utilisations de cet outil seront diverses. On citera notamment la « fiducie sûreté », qui pourra garantir l'exécution d'une obligation avec toute l'efficacité que confère la propriété, et la « fiducie gestion », qui permettra de confier la gestion de biens ou de certaines activités d'une entreprise à un tiers de confiance. Mais il ne s'agit que d'exemples et les parties au contrat seront libres d'adapter cet outil à leurs besoins.
La France devait avoir un tel instrument. Toutefois, on ne peut ignorer certains risques de dérives auxquelles cette institution a pu donner lieu. Il ne faut pas les exagérer et rejeter l'instrument tout entier pour cette raison, car son absence en droit français ne fait que pénaliser ceux qui en ont un réel besoin. Aussi avez-vous souhaité, à juste titre, que ce nouvel outil soit entouré d'un certain nombre de garanties permettant d'éviter que la fiducie française ne soit détournée de ses objectifs.
Le texte qui vous est soumis comprend donc plusieurs mesures garantissant une utilisation raisonnable et contrôlée de ce nouvel instrument. J'en citerai quatre, qui me semblent essentielles.
Premièrement, si la fiscalité ne doit pas constituer un frein au développement de ce nouvel instrument, il doit être clair que la fiducie française est conçue comme un outil juridique et non comme un outil d'optimisation fiscale. C'est pourquoi un régime de neutralité fiscale a été mis en place, que ce soit en matière d'imposition des bénéfices et des plus-values, de droits d'enregistrement ou de TVA. S'agissant en particulier de l'impôt sur les bénéfices, les transferts d'actifs vers et en provenance du patrimoine fiduciaire ne seront pas imposés, tandis que le résultat de la fiducie le sera au nom du ou des constituants, conformément au régime fiscal des sociétés de personnes, bien connu des entreprises.
Deuxièmement, l'exercice de la fonction de fiduciaire sera réservé à certains organismes financiers réglementés, tels que les établissements de crédit, les entreprises d'investissement et les entreprises d'assurance. Un tel dispositif présente les garanties de compétence et de sérieux nécessaires à l'établissement de la relation de confiance entre le constituant et le fiduciaire. Par ailleurs, la régulation et les contrôles auxquels sont soumis ces établissements permettent de minimiser les risques liés au blanchiment d'argent.
Troisièmement, les mesures de publicité des fiducies, assurant un droit de communication élargi au profit des autorités de contrôle, fiscales et judiciaires, permettront également d'éviter que la fiducie ne devienne le vecteur d'activités frauduleuses.
Enfin, vous savez que le Gouvernement souhaite exclure la « fiducie transmission », appelée aussi « fiducie libéralité », ainsi que la possibilité pour les personnes physiques d’être constituants. Ces limitations sont indispensables pour éviter la remise en cause des dispositions d'ordre public du droit des successions et des régimes des majeurs incapables.
En toute hypothèse, ces garanties et limitations, nécessaires pour éviter toute dérive dans l'usage de ce nouvel instrument, n'en remettront évidemment pas en cause l'intérêt essentiel. La fiducie représentera notamment une réelle avancée pour les opérations commerciales ou de financement. En pratique, il s'agit des principaux domaines dans lesquels le besoin de fiducie s'est fait sentir et qui génèrent un risque de délocalisation juridique, et donc de marginalisation du droit français et de ses professionnels.
Nous avons tiré les leçons du passé. En effet, vous n'ignorez pas le sort qui fut réservé aux précédents projets sur la fiducie, parfois très ambitieux, trop sans doute, puisqu'ils échouèrent tous. Le garde des sceaux et moi-même formons le vœu qu'il n'en sera pas de même pour ce texte. La malédiction qu'emporte toute tentative d'introduction de la fiducie en droit français doit être vaincue par notre volonté commune de prouver la capacité de notre droit à évoluer, à s'adapter aux exigences d'une société moderne, tout en respectant ses traditions juridiques. Il n'existe, dès lors, qu'une seule possibilité : la discussion doit aboutir à un vote conforme. C'est en ce sens qu'a œuvré votre commission des lois, sous l'impulsion de votre rapporteur, M. Xavier de Roux, que je remercie une nouvelle fois pour son pragmatisme et son efficacité.
Il ne s'agit pas d'éluder le débat : peu de sujets auront fait l’objet d’aussi longues réflexions au cours des dernières années, avec, du reste, une remarquable convergence des conclusions. Il faut maintenant concrétiser ces réflexions. Je suis particulièrement heureux que le mérite puisse en être attribué à une initiative parlementaire qui, grâce à vous, je n'en doute pas, consacrera une étape importante et attendue de la modernisation du droit français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Entrée très tôt dans notre droit, utilisée dès le Moyen Âge pour protéger ou transmettre le patrimoine des croisés partis en terre sainte, devenue courante au XVIIIe siècle, cette institution a disparu avec le code civil parce qu'elle semblait être un instrument de nature à tourner les règles nouvelles de succession. La fiducie s’est donc éteinte en même temps que le droit d'aînesse et, depuis deux siècles, alors qu'elle a progressé aussi bien dans les pays de droit romano-germanique qu'anglo-saxon, elle est toujours absente de notre droit. Frappée d'un étrange interdit, elle est devenue une sorte de tabou.
Aujourd'hui, la France reste donc l'un des rares pays européens à ne pas disposer de l'institution fiduciaire ou de son pendant anglo-saxon, le trust, qui se distingue de la fiducie par la séparation qu'il instaure entre le contrôle des biens et la jouissance qu'ils procurent. Ce splendide isolement hexagonal est évidemment préjudiciable à l'attractivité du territoire, dès lors que les règles tendent à s'harmoniser dans l’Union européenne.
Le législateur français le sait depuis fort longtemps, mais cette question fait l’objet d’un tabou puissant. Plusieurs projets ou avant-projets de loi ont bien été rédigés – en 1989, 1992 et 1994, c’est-à-dire sous des majorités de droite et de gauche – afin d’instaurer dans notre pays un régime général de fiducie, mais aucun de ces textes n’a abouti. Il semble, monsieur le ministre, que la forteresse fiscale ait toujours résisté avec la plus grande énergie.
Les travaux du Sénat ont permis de donner à l’institution fiduciaire suffisamment de flexibilité pour assurer son succès auprès des praticiens. Alors que le texte initial distinguait les deux finalités généralement reconnues à la fiducie à la française, à savoir la gestion et la constitution d’une sûreté, il a finalement été décidé de lui attribuer un cadre unique, plus souple d’emploi.
De même, nos collègues sénateurs ont veillé à maintenir un équilibre entre cet impératif de flexibilité et la nécessaire présence de garanties contre un usage frauduleux, en interdisant la fiducie constituée à des fins de libéralité, en limitant la portée du droit des titulaires de créances sur le patrimoine fiduciaire aux seules créances nées de la conservation ou de la gestion de celui-ci ou en prohibant le transfert de biens dans un patrimoine au cours de la période suspecte des procédures collectives.
Il convient également de souligner que la qualité de fiduciaire a été limitée aux seuls organismes financiers agréés, alors qu’à l’origine, la proposition de loi permettait également aux personnes physiques d’exercer cette fonction.
D’importantes garanties ont également été prévues sur le plan fiscal – un domaine où le principe de précaution prévaut. En ce qui concerne l’enregistrement et la publicité foncière, tous les actes constatant la formation, la modification ou l’extinction d’un contrat de fiducie, ainsi que le transfert de biens et de droits complémentaires au fiduciaire, devront être soumis à la formalité de l’enregistrement.
En matière de taxation directe, le Sénat a veillé à ce que le constituant fasse l’objet d’une imposition sur les résultats de la fiducie – une imposition qui se trouvera imputée sur l’impôt sur les sociétés uniquement, compte tenu de l’exclusion des personnes physiques du champ de la fiducie.
Pour ce qui est de la TVA, c’est le fiduciaire qui devra acquitter cette taxe, dont l’assise portera sur son activité au titre de la fiducie. Il sera également redevable de la taxe professionnelle et de la taxe foncière, au titre de la fiscalité locale. Comme vous le voyez, nous sommes très loin d’une technique susceptible de permettre une évasion fiscale quelconque, le dispositif ayant été très soigneusement verrouillé afin d’éviter toute dérive de cette nature.
J’ajoute, enfin, que nos collègues sénateurs ont tenu à lever toute suspicion en promouvant la transparence de l’instrument fiduciaire. Un article de la proposition de loi traite plus particulièrement de la traçabilité des documents comptables concernant la fiducie.
Au total, la fiducie à la française ne sera ni un trust, ni un instrument de fiscalité, mais bien un outil juridique au service des entreprises françaises. Cette restriction de son champ d’application peut, j’en conviens, susciter une certaine déception.
Personnellement, je peux comprendre que la récente réforme du droit des successions et des libéralités, entrée en vigueur au 1er janvier 2007, ayant déjà apporté plus de souplesse, l’on estime préférable de se donner un peu de recul avant d’envisager d’introduire une fiducie-libéralité, qui aurait fatalement des répercussions sur notre droit des successions. Ainsi, la tradition demeure.
Comme l’a dit M. le ministre, chacun sait que ne pas offrir un instrument de droit peut aboutir à la délocalisation de certaines opérations. Nous en avons des exemples récents, qu’il n’est pas nécessaire de citer.
(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures trente, sous la présidence de M. Jean-Louis Debré.)
Mesdames, messieurs les huissiers, veuillez faire entrer M. le premier président de la Cour des comptes.
……………………………………………………………..
Vous avez la parole, monsieur le premier président.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, c'est la troisième fois que me revient l'honneur de vous présenter ce rapport annuel, dont vous savez qu'il fête cette année, comme la Cour, son bicentenaire. L'exercice pourra donc paraître rituel. Mais ce geste conserve un sens. Il rappelle que cette communication, apparemment banale, est l'aboutissement d'un long combat et le signe d'une victoire : celle du Parlement. Car si le rapport annuel a deux cents ans, le principe de sa communication aux assemblées n'en a que 175.
Le Parlement avait déjà définitivement conquis, dès 1817, le pouvoir de voter le budget, puis, dans les années suivantes, d'en contrôler l'exécution, conquête fondatrice s'il en est. Mais il fallut attendre 1832 pour qu'il obtienne de pouvoir prendre connaissance du rapport annuel initialement réservé au seul souverain. Cette transmission fut le point d'orgue de l'avènement du pouvoir parlementaire.
La fonction d'assistance au Parlement, ainsi implicitement reconnue à la Cour, n'a cessé, depuis, de s'élargir, avant d'être à nouveau consacrée et amplifiée par la LOLF. Aujourd'hui, ce n'est plus seulement un rapport annuel que nous vous remettons. Depuis 2002, ce sont 188 référés, 167 rapports particuliers, cinq rapports sur l'exécution budgétaire, cinq rapports sur la sécurité sociale, quatre rapports préliminaires, 45 rapports établis à sa demande sur la base des articles 58-2 de la LOLF et 14 de la loi organique de 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, qui ont été remis au Parlement.
Pour la seule année 2006, nous vous avons ainsi remis 34 rapports particuliers, 31 référés et huit rapports réalisés à votre demande portant notamment sur la gestion de la prime pour l'emploi, le financement des régimes spéciaux de retraite…
La dynamique s'est donc radicalement accélérée. En 2002, nous consacrions un quart de notre temps de travail à ces travaux. En 2006, la proportion avait doublé et elle est, selon toute vraisemblance, encore appelée à s'accroître. Et encore me suis-je abstenu de prendre en compte les rapports publics thématiques et autres travaux qui ne relèvent pas directement de notre mission d'assistance mais qui vous sont également communiqués.
Le fait est trop souvent ignoré et je voudrais le souligner : il est peu de parlements au monde qui reçoivent autant de « substance » de leur institution supérieure de contrôle que le Parlement français.
Je ne saurais mieux rappeler que nous sommes à votre disposition. À votre disposition pour assister dans ses travaux d'évaluation et de contrôle la commission des finances. À votre disposition pour assister la commission des affaires culturelles, familiales et sociales dans ses travaux relatifs aux lois de financement de la sécurité sociale. Je viens moi-même régulièrement m'exprimer devant ces instances et répondre, par ailleurs, aux questions des missions d'évaluation et de contrôle. Nous sommes à votre disposition, enfin, pour mener les enquêtes sur les sujets que vous jugez utiles.
C'est pourquoi, comme je l'ai annoncé à l'occasion de la séance solennelle de la Cour, nous tiendrons désormais l'ensemble des parlementaires régulièrement informés de la liste de nos communications. Par ailleurs, nous assortirons désormais la transmission de nos référés et rapports particuliers de synthèses explicatives.
La Cour entend en outre se donner les moyens d'une plus grande réactivité. Nous savons que nous devons mieux nous adapter au rythme de vos travaux. C'est pourquoi nous demanderons la réduction des délais de contradiction avec les organismes contrôlés qui expliquent, pour une bonne part, un décalage trop fréquent entre le temps du Parlement et celui de la Cour.
Nous nous sommes par ailleurs et d'ores et déjà mis en situation d'assumer celles de nos nouvelles compétences qui prennent effet cette année. Nous vous remettrons au printemps prochain quatre documents. Deux sont déjà connus de vous : le rapport sur les résultats, lequel sera enrichi cette année, pour la première fois, des commentaires de la Cour sur les performances obtenues pour une vingtaine de programmes, et le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques qui actualisera et approfondira l'analyse contenue dans le présent rapport annuel. Le troisième document sera l'expression de notre opinion sur les comptes de l'État, rédigé au terme du processus de certification, et qui viendra en lieu et place du rapport sur les comptes réalisé l'an dernier.
À propos de la certification, je voudrais encore une fois rappeler ici que nous ne concevons pas nos nouvelles missions comme des armes de censure ou de sanction d'une politique. Nous nous contentons de nous prononcer sur la conformité et la fidélité des états comptables au référentiel que l'État s'est donné.
De façon plus générale, nous avons bien conscience que les réformes comptable et budgétaire qu'impose la LOLF sont lourdes et très ambitieuses. Les administrations, je leur en donne bien volontiers acte, ont déjà fourni un effort énorme pour répondre à ces nouvelles exigences et nous n'avons pas manqué de souligner les progrès déjà réalisés. Nous travaillons en outre dans une logique de partenariat et d'accompagnement de la réforme plus que de sanction ou de censure. Les rencontres et les échanges avec les ministères sont plus nombreux que jamais et nous veillons à répondre à leurs propres attentes.
Nous avons ainsi nous-mêmes engagé de profondes réformes internes pour nous adapter aux enjeux de la LOLF. Conformément aux préconisations du rapport de MM. Lambert et Migaud, nous avons spécialisé nos équipes. Nous distinguons mieux les différents types de contrôle : le juridictionnel, la certification, et l'examen de la gestion font l'objet de méthodologies, de contrôles, de rapports et de délibérés distincts.
Afin que nous soyons en mesure de répondre totalement à votre attente, il nous reste à trouver la procédure de concertation la plus appropriée pour nous permettre, s'agissant de l'évaluation de la performance, programme par programme, de nous engager sur les travaux dont vous aurez vous-mêmes signalé la priorité. Il serait absurde de procéder autrement : notre vocation est de vous assister. C'est à vous de dire vos besoins. Nous saurons adapter nos programmes en conséquence.
Vous l'aurez compris : nous voulons vous être réellement utiles comme nous souhaitons l'être, également, au Gouvernement et aux citoyens. Et le rapport public que nous vous remettons ce jour et que je présenterai demain à la presse, leur est également adressé.
Mettre à la disposition des citoyens une expertise impartiale sur le fonctionnement de l'administration, mettre au jour ses faiblesses et les améliorations nécessaires, mais aussi ses succès, c'est contribuer au débat démocratique. Et il est symptomatique de se souvenir que le seul régime qui ait douté de l'utilité du rapport annuel au point de le supprimer fut le régime de Vichy.
Utiles nous le serons en restant impartiaux. Utiles nous le serons en restant à l'écoute et au service des uns et des autres, du Parlement, du Gouvernement et des citoyens. Comme le rappelait le Président de la République à l'occasion de notre séance solennelle de rentrée, « gardons-nous de remettre en cause ce principe d'équilibre ».
C'est dans cet esprit en tout cas, en souhaitant répondre à vos attentes et à celles de nos différents interlocuteurs, que nous avons élaboré ce millésime du rapport annuel. Il s'ouvre, comme l'an dernier, sur une analyse de la situation des finances publiques. Les chiffres sont encore provisoires mais mettent en évidence une amélioration sensible. Je n'entre pas dans le détail puisque, comme je vous l'ai dit, nous consacrerons à ce sujet un rapport spécifique au printemps, et ce sur des chiffres définitifs.
Je soulignerai simplement que certains des facteurs de cette amélioration sont conjoncturels. C'est dire que l'effort accompli reste à compléter pour améliorer encore la maîtrise de la dépense publique, seule vraie garantie du caractère pérenne des résultats obtenus et à obtenir.
Le rapport annuel 2007 est en tout cas l'occasion d'illustrer par des exemples variés et concrets les voies envisageables pour atteindre cet objectif général et, j'ai cru le comprendre, consensuel.
Le premier tome contient cette année 20 analyses de ce type portant sur des secteurs très divers.
Nous examinons notamment plusieurs dispositifs d'aide, aides agricoles et aides à l'entreprise. Et vous le verrez, nos conclusions convergent : les aides foisonnent, mais leurs conditions d'attribution ne sont que très imparfaitement contrôlées et leur efficacité très partiellement mesurée ce qui ne donne pas une garantie décisive sur leur utilité.
De même, l'insertion sur les aides personnelles au logement permet de revenir sur une observation récurrente de la Cour : dans un contexte budgétaire très contraint, il est indispensable de mieux cibler les aides. Sans cela, leur niveau par bénéficiaire risque de demeurer insuffisant, voire de l'être toujours davantage.
Nous revenons également sur le régime d'indemnisation des intermittents du spectacle. Notre conclusion est claire : la réforme de 2003 n'a pas encore réglé le problème qui est tout à la fois un problème financier et un problème d'équité.
En matière de santé et de sécurité sociale, nous abordons successivement la question des urgences et celle des soins palliatifs. Je n'entrerai pas dans le détail mais soulignerai simplement que, dans les deux cas, le problème est moins un problème de moyens qu'un problème de comportements et d'organisation de l'offre de soins.
Nous consacrons également, vous le verrez, des développements à la recherche en matière de sciences et techniques de l'information et de la communication ainsi qu'à l'autonomie de gestion des établissements d'enseignement du secondaire. Vous trouverez aussi dans le rapport une insertion consacrée aux centres de rétention administrative et plusieurs insertions portant sur la gestion locale, réalisées avec l'aide des chambres régionales et territoriales des comptes.
Mais ce n'est pas tout. Nous consacrons cette année un deuxième tome presque aussi important que le premier à l'examen des suites données à nos précédents contrôles : …
À ce titre, le rapport montre que la Cour a été incontestablement suivie dans nombre de ses recommandations portant sur la régularité et l'efficience de la gestion des organismes qu'elle contrôle. Et il apparaît très clairement que c'est lorsque nous revenons régulièrement dans un organisme ou sur une politique donnée, lorsque nous faisons état précisément et régulièrement des suites données à nos observations que nous obtenons les résultats les plus probants.
Je ne veux pas me lancer ici dans un recensement exhaustif de nos travaux de suivi mais j'appelle votre attention sur quelques exemples très encourageants.
Ainsi, lors d'un nouveau contrôle de la Banque de France, dont nous avions très sévèrement critiqué certains aspects de la gestion en 2005, nous avons constaté des avancées majeures : le réseau a été drastiquement réduit, les effectifs diminués et des gains de productivité importants ont été réalisés. Certes, nos recommandations sur la nécessaire refonte de la gestion des ressources humaines et de l'action sociale gardent toute leur actualité. Mais l’établissement s’est engagé sur la bonne voie.
Autre exemple pour Météo France : à la suite à nos recommandations, la tenue de la comptabilité a été améliorée, une comptabilité analytique a été mise en place et les procédures de gestion interne ont fait l'objet d'une meilleure formalisation.
Les résultats de notre contrôle de suivi sur EDF sont également encourageants : comme nous le recommandions, l'électricien a recentré son activité internationale sur des participations stratégiques.
Je pourrais multiplier les exemples. Vous en trouverez de nombreux dans le corps de ce rapport.
Mais je mentirais par omission si je me contentais de dresser un tableau exclusivement positif. Il est en effet des domaines où les progrès sont lents. C'est le cas notamment de la gestion des ressources humaines et des rémunérations. Dans nombre des établissements que nous avons à nouveau contrôlés, nous avons retrouvé inchangées des pratiques critiquables.
Concernant plus particulièrement les pensions des fonctionnaires par exemple, si la loi de 2003 a consacré des avancées majeures, force est de constater néanmoins que certains dispositifs très coûteux et très contestables d'indemnités servies aux pensionnés résidant outre-mer ou de bonifications de dépaysement accordées aux fonctionnaires ayant exercé à l'étranger et dans les DOM-TOM n'ont pas été remis en cause ou à tout le moins adaptés à la réalité des situations. (Applaudissements sur divers bancs.)
Dans ces domaines, à cause d’une regrettable multiplicité d’intervenants souvent cruellement dépourvus de tout moyen de suivi statistique et de pilotage, les résultats obtenus sont beaucoup moins évidents. C’est probablement à plus long terme que nous pouvons espérer des changements plus convaincants.
Un mot, enfin, sur le rapport d’activité de la Cour de discipline budgétaire et financière. Comme l’an dernier, il fait l’objet d’une publication séparée, annexée au rapport public. Désormais, ce document est bien plus qu’un simple rapport d’activité puisque nous en avons fait un vecteur privilégié de communication pour mieux faire connaître le rôle et la jurisprudence de la Cour de discipline. Il a également vocation à devenir un outil de référence pour les praticiens et les autorités habilitées à saisir la Cour de discipline budgétaire et financière – dont je n’oublie pas, monsieur le président, que vous faites partie.
En 2005, les moyens d’instruction et de jugement de la Cour de discipline ont été renforcés, son fonctionnement interne amélioré et les délais de traitement des affaires réduits. Cette Cour traite un nombre croissant de saisines et pourrait faire plus encore : il ne faut donc pas hésiter à la saisir. Nous souhaiterions voir son rôle encore renforcé par une réforme législative d’ampleur. Je suis convaincu que tout le monde y gagnerait car cela contribuerait à réduire le risque de pénalisation de l’action publique. Nous espérons que nos efforts en ce sens porteront leurs fruits.
Telles sont, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les quelques observations dont je voulais vous faire part. J’espère que nos travaux vous apporteront une analyse et une expertise susceptibles d’éclairer vos débats. C’est dans cet esprit en tout cas que nous avons travaillé et que nous continuerons de le faire en cette année d’anniversaire de la Cour des comptes. N’oublions pas que pour ancienne qu’elle soit, sa vocation à vos côtés est aujourd’hui radicalement confortée et vivifiée : nous savons donc où est le chemin. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements prolongés sur tous les bancs.)
En cette dernière année de la XIIe législature, je tiens à vous dire combien l’Assemblée nationale et ses commissions ont apprécié la qualité de leur collaboration avec la Cour des comptes. Ainsi que vous l’avez vous-même souhaité à l’instant, j’espère que nos liens institutionnels demeureront aussi fructueux qu’ils l’ont été au cours des dernières années.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.
Le rapport public est la traduction la plus médiatisée de l’indispensable travail de contrôle de la dépense. L’essentiel reste, bien entendu, que nous puissions conduire notre action dans la durée, et c’est la raison pour laquelle l’attention particulière que porte la Cour aux suites que l’on donne à ses préconisations est un gage de progrès durable.
Sachez, monsieur le premier président, que l’Assemblée nationale est extrêmement attachée au contrôle permanent des suites données aux préconisations de la Cour. À ce titre, notre commission des finances a désigné deux d’entre nous – un député de la majorité et un de l’opposition – pour suivre en permanence les réponses apportées aux recommandations qui figurent dans le rapport public.
Je rappelle aussi que, dans le cadre de la révision de la loi organique à laquelle nous avons procédé en 2004, nous avons introduit un débat, certes facultatif, sur les préconisations du rapport public, et j’espère que nous aurons l’occasion de l’organiser le moment venu.
Le ministère des finances, en particulier le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État – heureuse réforme qui a regroupé au sein d’un même ministère budget et réforme de l’État ! – a engagé un programme d’audits particulièrement efficace. Je salue cette démarche, car elle a permis des gains de productivité grâce à une meilleure connaissance des circuits administratifs et une analyse plus fine de leurs procédures. Ces audits sont donc très utiles pour le ministère des finances et le travail interministériel, mais aussi pour l’exercice du contrôle parlementaire.
Ici même, à l’Assemblée nationale, nous avons mis l’accent dans nos travaux sur l’amélioration du contrôle de la dépense publique. Et je salue à nouveau, en présence de Didier Migaud, l’apport considérable de la LOLF. Nous avons mis un point d’honneur à respecter les calendriers fixés par la loi organique de 2001, relative au budget de l’État, et par celle de 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Ce dernier texte est essentiel, puisque je rappelle que dans notre pays l’ensemble des dépenses sociales dépasse 450 milliards d’euros. C’est une somme considérable si on la rapproche des 280 milliards du budget de l’État !
Au cours de la prochaine législature, il nous appartiendra – quel que soit le résultat des élections – de développer les énormes potentialités offertes par ces deux lois organiques, au profit du budget de l’État comme des finances sociales.
Le troisième acteur, monsieur le premier président, c’est la Cour des comptes, qui a parfaitement rempli le rôle qui lui appartient en propre pour faire de l’examen de la loi de règlement un moment fort de la discussion budgétaire. Je rappelle les trois composantes du rapport sur l’exécution des lois de finances : le rapport préliminaire, le rapport sur les résultats de la gestion budgétaire et enfin le rapport sur les comptes de l’État. D’ailleurs, le rapport préliminaire, s’il fait l’objet de l’attention vigilante des députés de l’opposition, il est également lu avec intérêt par les députés de la majorité.
Voilà l’exemple typique d’une bonne réforme. Après celle du réseau, qui ne relève ni du législatif ni du réglementaire, ce sera la première réforme d’un régime spécial de retraite par l’alignement sur celui des fonctionnaires !
Enfin, je tiens à souligner à quel point la Cour des comptes a répondu aux demandes de notre assemblée puisque nous travaillons ensemble chaque année pour sélectionner un certain nombre de thèmes particulièrement importants. M. le premier président en a cité plusieurs : la gestion de la prime pour l’emploi, la formation continue dans les universités, la gestion des personnels détachés dans des fonctions autres que l’enseignement… Sur toutes ces questions, nous sommes en train de progresser.
M. Méhaignerie et moi-même, au sein de la mission d’évaluation et de contrôle, coprésidée par Augustin Bonrepaux et Yves Deniaud, travaillons avec la Cour des comptes dans un climat d’équipe, et nous avons obtenu à plusieurs reprises des résultats spectaculaires, l’État ayant souvent pris le relais. Georges Tron peut notamment témoigner de l’excellente coopération qui a présidé aux travaux sur la gestion immobilière de l’État.
Ces résultats sont tellement exemplaires que vous comprendrez, monsieur le premier président, que nous souhaitions que votre vision de l’équidistance vous rapproche de plus en plus de l’Assemblée nationale. (Sourires.) Plus qu’une critique, voyez-y un hommage ! (Applaudissements sur tous les bancs.)
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.
Je tiens à mon tour à saluer la qualité des relations qui existent entre le Parlement, en particulier la commission des finances de l’Assemblée, et la Cour des comptes – et vous-même, monsieur le premier président. Tout au long de ces cinq années, au sein de la mission d’évaluation et de contrôle, tant sur le choix des thèmes que sur l’application de la LOLF, nous avons enrichi la qualité de nos relations et nous nous sommes efforcés de donner suite à vos recommandations.
Au cours de ces cinq dernières années, nous avons tous pu constater que les politiques publiques ne souffrent pas d’une insuffisance de moyens, mais d’une confusion dans leurs objectifs, d’un empilement des structures et d’une complexité croissante des procédures.
Le Parlement peut-il aller plus loin ?
Je le crois, en particulier pour ceux de nos collègues qui voudraient procéder à des contrôles sur pièces et sur place, à partir des audits – et je remercie le ministère de l’économie et des finances de s’y être engagé totalement – et des rapports de la Cour des comptes. Il y a des corps d’inspection qui ont du temps libre... Peut-être serait-il possible, sans créer de nouveaux postes, qu’ils nous apportent leur aide. Nous en avions fait la demande au Premier ministre.
En conclusion, chers amis, quel que soit le sort que réserveront les urnes aux uns et des autres, je souhaite que nous soyons tous animés par le souci d’une plus grande efficacité de la dépense publique et d’une simplification des modes de fonctionnement des administrations.
Au terme de ces cinq ans de législature, permettez-moi d’adresser mes remerciements à la commission des finances. Au-delà de nos différentes sensibilités, nous avons souvent été unis dans nos propositions et nos conclusions. Nous avons connu des déceptions. L’une des plus cuisantes a concerné les fameuses retraites en Polynésie et dans certains territoires. Voir quelques collègues arriver à la dernière minute pour voter contre les propositions unanimes de la commission ne nous a pas fait plaisir ! On nous a aussi refusé la suppression de certaines agences. Néanmoins, nous avons eu des satisfactions – Gilles Carrez en a parlé – concernant l’immobilier de l’État, la Banque de France et beaucoup d’autres sujets. Ce n’est qu’un début, monsieur le premier président.
Ces remerciements, vous le comprendrez, s’adresseront également à Gilles Carrez (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) qui a fait mentir la légende selon laquelle un président de commission des finances et un rapporteur général devaient souvent faire état de désaccords. Nous n’en avons eus ni sur le fond, ni sur la forme, ni sur le plan de l’exposition médiatique.
Pour terminer, je dirai qu’il n’est pas possible d’exiger plus de la Cour des comptes et des administrations sans avoir, mes chers collègues, le même degré d’exigence vis-à-vis de nous-mêmes, en particulier en ce qui concerne notre mission de contrôle de la dépense publique. C’est un défi que la LOLF lance à chaque parlementaire. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann.)
Cette proposition de loi sera d'abord utile pour faire évoluer la doctrine juridique en matière d'unité du patrimoine. Cela me semble très important.
Permettez-moi d'évoquer un souvenir à cet égard. Dans les années 1990, j'avais été le rapporteur de la loi sur le commerce et l'artisanat, dite « loi Madelin », et nous nous étions heurtés à l'époque à une difficulté concernant le patrimoine de l'entrepreneur individuel qui pouvait se trouver saisi en totalité, alors que ses dettes étaient de valeur inférieure, et cela au nom du principe de l'unité du patrimoine. J’avais été très préoccupé par le caractère paradoxal et très contraignant de cette doctrine du droit civil. Celle-ci est aujourd’hui battue en brèche, et c’est heureux. Cette proposition de loi sur la fiducie remet en question la conception française de l'unité du patrimoine, puisque le constituant pourra transférer la propriété d'un bien à une autre personne, le bien se trouvant « hors patrimoine » pour la durée du contrat.
Cette proposition de loi est également utile car elle nous permettra de doter notre pays d'un outil actuellement disponible dans d'autres pays de l’Union européenne, ce qui met nos entreprises dans une situation d'infériorité. Les députés qui sont sensibles à la défense de nos entreprises,…
Actuellement, la France est l'un des rares pays européens à ne pas disposer de l'institution fiduciaire ou de son pendant anglo-saxon, le trust, qui se distingue de la fiducie par la séparation qu'il instaure entre contrôle des biens et jouissance qu'ils procurent.
Pourtant, ce dispositif bénéficie d'une grande souplesse d'utilisation, particulièrement efficace dans un cadre commercial ou pour un financement international. Dans ce contexte, l'introduction de la fiducie en droit français permettra certainement à la France d'éviter des délocalisations de capitaux. Là encore, chers collègues, je sais que vous y êtes tous très sensibles.
J'en veux pour preuve certaines opérations financières importantes, impliquant des sociétés ou des groupes relevant du droit français, qui ont été menées sur la base de montages juridiques effectués à l'étranger. En 1987, le groupe PSA s'est ainsi tourné vers le mécanisme américain du trust pour réaliser un transfert d'actifs et de dettes vers une structure chargée de les gérer, pendant que l'entreprise se concentrait, et c’est normal, sur son redressement commercial et industriel. Plus récemment, dans le cadre de sa récente restructuration, le groupe Alstom, dont l'État français reprenait une partie du capital, créait, lui aussi, un trust anglo-saxon. Enfin, à l'occasion du lancement de son « Euromillions », la société Française des Jeux s'est vue contrainte de s'associer à ses homologues européennes dans le cadre d'un trust de droit anglais, faute de disposer d'un instrument adapté en droit français.
Comme le souligne notre rapporteur, « de tels exemples, pour symboliques qu'ils soient, n'en sont pas moins révélateurs des contraintes juridiques de plus en plus manifestes qu'une absence d'harmonisation de notre droit national avec nos principaux partenaires européens et internationaux fait peser sur les milieux d'affaires français. » Dans ce contexte, peut-on repousser plus longtemps la transposition, dans notre droit, d'un instrument d'une grande souplesse, qui pourrait placer notre pays dans une meilleure situation de compétitivité par rapport aux pays de common law, dans un environnement caractérisé par une internationalisation croissante des échanges économiques et financiers ?
Enfin, cette proposition de loi est utile parce que le contexte juridique communautaire et international pousse à l'évolution de notre droit interne. Le Parlement européen a adopté, le 15 novembre 2001, une résolution invitant à l'harmonisation des droits des États membres dans divers domaines, dont celui des trusts. Le 2 mai 2003, la Commission européenne a établi un contrat type de trust applicable aux rapprochements soumis à l'autorisation de la direction générale de la concurrence, de sorte que les groupes français appelés à se restructurer au niveau européen disposent d'opportunités qui, paradoxalement, n'existent pas au niveau national.
Après les différentes tentatives avortées rappelées par M. le ministre, la présente proposition de loi nous offre donc la possibilité d'introduire – enfin – en droit français un régime complet de fiducie, comportant des dispositions relatives au droit des obligations, au droit fiscal, au droit comptable et au droit pénal. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Le régime proposé trouve sa source dans le contrat, ce qui l'ancre dans notre tradition juridique.
En outre, les travaux du Sénat se sont efforcés de donner à l’institution fiduciaire prévue par la proposition de loi suffisamment de flexibilité pour assurer son succès auprès des praticiens.
À cet effet, alors que la proposition de loi distinguait initialement les deux finalités reconnues à la fiducie à la française − à savoir la gestion et la constitution d’une sûreté −, il a finalement été décidé de lui attribuer un cadre unique, plus large et plus souple d’emploi.
Comme M. le ministre l’a rappelé, le dispositif prévu par le texte sera par ailleurs strictement encadré. Nous touchons là, cependant, une des limites du texte qui nous est proposé, car il faut se méfier d’un encadrement trop strict. En tout cas, cela mérite discussion. Afin de se prémunir contre d’éventuels usages frauduleux du dispositif, la proposition de loi interdit la fiducie constituée à des fins de libéralité, limite la portée du droit des titulaires de créances sur le patrimoine fiduciaire aux seules créances nées de la conservation ou de la gestion de celui-ci et prohibe le transfert de biens dans un patrimoine au cours de la période suspecte dans le cadre des procédures collectives.
À l’origine, la proposition de loi du sénateur Marini permettait aux personnes physiques d’être parties prenantes d’un contrat de fiducie. Cela me semblait préférable. Dans le dessein − bien compréhensible, même si, je le répète, il faut se méfier de l’outrance − de limiter des fraudes éventuelles, le Gouvernement prévoit d’écarter les personnes physiques de la proposition de loi. La qualité de constituant est limitée aux personnes morales soumises à l’impôt sur les sociétés. Dans le même esprit, le fiduciaire devra être un établissement bancaire, une compagnie d’assurances ou un établissement d’investissement, et sera tenu de faire une déclaration à la cellule de renseignement financier rattachée à Bercy.
La proposition de loi prévoit enfin, comme l’a rappelé notre rapporteur, la création d’un fichier national recensant l’ensemble des contrats de fiducie, de manière à centraliser les informations et à permettre un suivi plus efficace des services de l’État chargés de lutter contre les activités illicites.
Dans un souci de transparence, le Sénat a prévu des dispositions strictes soumettant les fiduciaires, ainsi que les professions juridiques ou judiciaires les assistant, à l’obligation de déclarer les sommes ou les opérations fiduciaires soupçonnées d’être d’origine illicite.
Parallèlement, la proposition de loi prévoit la règle de la neutralité fiscale : même si, sur le plan juridique, le transfert de propriété a bien eu lieu vers le fiduciaire, le constituant demeurera soumis au règlement des droits d’enregistrement et de l’impôt sur les sociétés dû sur les biens transmis.
Voici résumées les principales dispositions de cette proposition de loi amendée au Sénat. Le groupe de l’UMP la votera, car elle nous offre l’occasion d’inscrire dans notre droit le principe de la fiducie qui, nous en sommes convaincus, permettra à nos entreprises de trouver en France des réponses qui existaient ailleurs et qui les poussaient à la délocalisation.
Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous faire part de ma conviction : cette proposition de loi ne peut être qu’un premier pas et il faudra que nous nous penchions sur l’extension de ce principe aux personnes physiques. Il faudra aussi pouvoir à terme décliner des applications de la fiducie en matière de gestion, de sûreté et de libéralités.
Dans le même temps, le lobbying engagé par la même organisation patronale − qui n’est avare ni d’écrits ni de déclarations publiques − a justifié que la commission fût convoquée en urgence, le 30 janvier après-midi, pour examiner, lors d’une réunion qui s’est tenue le 1er février au matin, la proposition de loi sur la fiducie. Sans avoir le temps de travailler le texte en profondeur, nous avons été sommés de lutter contre les délocalisations juridiques.
Sur le fond, il faut entrer dans le débat. M. de Roux, notre rapporteur, explique qu’il est urgent de « rompre le splendide isolement hexagonal » en introduisant dans notre ordonnancement juridique l’institution fiduciaire d’inspiration anglo-saxonne, mais tempérée par les propositions sénatoriales et gouvernementales. J’observe que, parallèlement, on refuse aux consommateurs l’action de groupe en invoquant les « dérives » du même droit anglo-saxon. Pour le Gouvernement, le droit anglo-saxon est donc une inépuisable source d’inspiration quand il s’agit de transformer la France, peu à peu, et de la mettre pratiquement au standard des paradis fiscaux.
Vous savez que le droit anglo-saxon a considérablement durci la réglementation relative à la responsabilité des chefs d’entreprise et lutté contre l’impunité civile. Ainsi, aux États-Unis, la loi Sarbanes-Oxley, votée en 2002, a engagé une pénalisation de la responsabilité des dirigeants d’entreprises.
Depuis 1995, sur le sujet des rémunérations patronales − qui n’est pas sans rapport avec la fiducie −, nous avons eu successivement le rapport Viennot 1, le rapport Viennot 2 et le rapport Bouton. Dernière venue, Mme Parisot a publié, au mois de janvier, ses recommandations sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux de sociétés cotées. Pendant qu’on fait des rapports et qu’on ne légifère point, Philippe Jaffré quitte Elf, en 1999, avec 30 millions d’euros d’indemnités, Daniel Bernard quitte Carrefour, en 2005, avec 9,5 millions d’euros assortis d’une retraite chapeau annuelle de 1,25 million, Antoine Zacharias quitte, en 2006, une entreprise qu’il laisse en pleine forme, avec 13 millions d’euros de prime de départ et une retraite chapeau de 2 millions par an, et, en 2007, Laurence Danon touche 2,5 millions d’euros de prime de départ. Mais, en l’occurrence, il n’y a pas d’urgence. Ce qui est urgent, c’est de lutter contre « le splendide isolement » de la France, qui déplaît tant à M. de Roux !
Le pacte social dans les entreprises subit une déchirure politique sans précédent, et le candidat de l’UMP à l’élection présidentielle va se pavaner dans toutes les usines en clamant que ce que font ces patrons est scandaleux. Le groupe socialiste a déposé des amendements pour vous mettre en demeure de légiférer sur ce sujet : nous avons encore le temps avant la fin de la législature. Ainsi, nous pourrons mettre votre crédibilité à l’épreuve. J’attends la réponse de M. Breton, qui, lui non plus, n’est pas avare de retraites chapeau et de jetons de présence en tous genres. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ceux qui dispensent des leçons de modération salariale sont les premiers à s’en exempter. Cela s’appelle la reconstitution du privilège.
Vous citiez le Parlement européen, à majorité d’ailleurs libérale,...
Dans leur rapport sur les typologies des risques de blanchiment, les experts du GAFI « ont examiné cette question, en se penchant brièvement sur la nature des fiducies en tant que relations juridiques, sur les usages qui peuvent en être faits et sur la diversité des formes qu'elles peuvent prendre. Cet examen a montré que ce qui préoccupe les autorités chargées de la lutte contre le blanchiment, c'est l'anonymat apparemment inviolable qu'une fiducie peut offrir à son propriétaire ou bénéficiaire réel. Cet anonymat est renforcé par le fait que les documents relatifs à la fiducie ne sont pas considérés comme des informations publiques. »
La réforme sénatoriale permet à des autorités administratives et judiciaires de connaître de tels documents, sans en faire pour autant des informations publiques. Même les critères du GAFI sont bafoués par votre texte, monsieur de Roux !
Alors que, dans le monde entier, on s’inquiète de l’implantation des fiducies, vous vous apprêtez, avec une provocation sans pareil et une désinvolture inquiétante, à installer dans notre droit le cheval de Troie de la mondialisation dérégulée et financière ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ce que vous faites n’intéresse pas le MEDEF : il attend l’étape suivante, celle pour laquelle M. Novelli a montré la voie et M. Breton donné son accord. Cette réforme est en vérité provisoire.
De plus, – si vous permettez cette dernière critique, car il me faut maintenant aller vers l’aboutissement de mon propos –...
En 2005, vous avez offert aux organismes bancaires un super-privilège dans le cadre de l’apport d’argent frais – nous en avions discuté lors de l’examen de la procédure de sauvegarde.
Aujourd’hui, peut-on considérer franchement que, pour autant, le système bancaire fait son travail à l’égard de l’économie française ?
Décidément, le gaullisme a déserté les bancs de la droite : nous voilà aujourd’hui les derniers héritiers du compromis social que le général de Gaulle avait su construire, pour le plus grand bien du pays !
Nous faisons le pari que la proposition de loi que vous nous présentez n’est qu’un texte transitoire, dont vous élargirez le champ d’application. Votre œuvre magistrale aura finalement consisté, avec l’aide de ces dizaines de fonctionnaires pétulants qui encadrent le ministre...
Nous, monsieur de Roux, nous luttons, au contraire, contre les paradis fiscaux, qu’ils soient suisses, luxembourgeois ou monégasques, pour en finir avec une concurrence fiscale dommageable – un rapport de l’OCDE existe sur le sujet. Nous ne voulons pas, comme vous, transformer la France en paradis fiscal, car l’attractivité de notre territoire tient à des services publics de qualité, à un réseau de transport fonctionnel et efficace,...
Les frontaliers français, monsieur Blanc, vont travailler en Suisse pour le niveau des salaires, mais ils tiennent à conserver la protection sociale française.
Le choix d'inscrire ce texte à l’ordre du jour de notre assemblée, à moins de deux semaines de la clôture de nos travaux, aurait de quoi surprendre, s’il ne devait d’abord indigner. Cette inscription relève en effet d'une stratégie claire : donner de nouveaux gages au MEDEF de l’écoute attentive du Gouvernement et de sa majorité. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La semaine dernière déjà, le Gouvernement renonçait, au mépris de ses engagements et des revendications légitimes des associations de consommateurs, à défendre son projet de loi sur la consommation instaurant les actions de groupe à la française. Ce texte attendu, le MEDEF n'en voulait pas. Le Gouvernement l'a retiré. Et non content de céder aux pressions, il lui offre aujourd'hui sur un plateau la création des fiducies. On ne saurait mieux souligner combien le Gouvernement et sa majorité seront restés, jusqu'au bout, les fondés de pouvoir du grand patronat.
La fiducie, dispositif largement répandu dans le droit anglo-saxon, s'est en effet heurtée jusqu'à présent en France à de multiples résistances, essentiellement parce qu'elle peut être utilisée comme un instrument de dissimulation fiscale ou un moyen de blanchiment.
C’est un risque que relevait, en 2002, la conférence des parlements de l'Union européenne contre le blanchiment, en ces termes : « Une lutte efficace contre la délinquance financière impose de reconstituer l'historique des mouvements de capitaux. La traçabilité des opérations et des donneurs d'ordre est un objectif prioritaire ; elle se heurte à plusieurs obstacles, parmi lesquels l'opacité de certaines entités juridiques, fiducies, fondations, sociétés en commandite. »
Vous avez, monsieur le rapporteur, balayé cette objection, estimant que « suffisamment de précautions » ont été prises.
La fiducie permet, par exemple, de loger les dettes d'un groupe dans une filiale distincte, de créer une structure qui gère l'épargne salariale ou de mettre de côté des fonds en vue de la dépollution de sites industriels. Pour les particuliers, la fiducie est utilisée pour transmettre ses biens à ses enfants sans avoir à payer des droits de succession.
Les modifications inspirées par les fonctionnaires du ministère des finances, pour tenter, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, de minimiser l'impact de vos mesures sur les ressources fiscales de l'État ne sont là aussi qu'un faux-semblant. Elles n'auront qu'un temps. Les particuliers, actuellement exclus du dispositif, ne le resteront pas non plus longtemps, car vous créez un précédent. Nous ne sommes évidemment pas dupes de votre stratégie.
Le MEDEF a beau faire mine, dans une note confidentielle, de déplorer que « les limitations de l’usage de la fiducie privent l'institution d'une grande part de son intérêt », il sait qu'à plus long terme, comme le reconnaît d'ailleurs notre rapporteur, ce texte a minima sera complété – c’est ce qu’a d’ailleurs annoncé avec beaucoup de clarté M. Novelli...
La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le défendre.
La commission et le Gouvernement ont un avis défavorable sur l’amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(L'article 1er est adopté.)
La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le défendre.
Je ferai d’abord une première remarque. Je ne sais pas, en effet, si M. Arnaud Montebourg parle aujourd’hui au nom du groupe socialiste...
J’en viens aux amendements que vous avez déposés, monsieur Montebourg. Il s’agit là, et vous le savez très bien, de cavaliers, c’est-à-dire de dispositions qui n’ont strictement rien à voir avec le texte que nous examinons. Voilà pourquoi je ne répondrai qu’une seule fois.
Vous essayez d’introduire des dispositions qui vous chantent, mais quand on parle d’un texte on ne parle pas d’autre chose. Il est vrai que sur tous les sujets, vous savez toujours parler d’autre chose avec talent. En tout cas, je ne vous suivrai pas sur cette voie des cavaliers, et je dirai seulement que la commission des lois a rejeté l’ensemble de vos amendements.
Monsieur Montebourg, je ne répondrai pas à vos attaques personnelles.
Dans votre parti, on vous met au piquet.
Revenons plutôt, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, au fond du texte.
À partir de là, vous auriez dû, monsieur le ministre, répondre sur les intentions. M. Novelli tout à l’heure a évoqué les progrès qu’il faudrait apporter à ce premier texte à l’occasion d’un second texte. Nous voudrions connaître les intentions du Gouvernement car à ce moment précis de l’intervention de M. Novelli, vous avez acquiescé de la tête, monsieur le ministre, montrant par là même que c’était dans vos projets.
Pour ce qui est des mises en cause, monsieur Breton, permettez-moi de vous faire observer que vous n’êtes pas neutre. D’ailleurs vous n’êtes pas un élu de la nation, vous êtes un ministre de la République, avec une trajectoire personnelle.
Pour le reste, au moins le débat a-t-il eu lieu. Nous avons compris dans quelle disposition d’esprit se trouvaient la commission et le Gouvernement. Dorénavant, nous sommes fixés. C’est ce que nous voulions. Dans ces conditions, je retire mes amendements, monsieur le président.
Je mets aux voix l’article 2.
(L'article 2 est adopté.)
(Les articles 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Je ne voulais pas que l’article 18 soit adopté sans que cela soit dit car nous aurons des sinistres et à ce moment-là, nous pourrons nous reporter au Journal officiel. Nous nous retrouverons, monsieur Breton.
(L'article 18 est adopté.)
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)
Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 3547, relatif à la fonction publique territoriale :
Rapport, n° 3660, de M. Michel Piron au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton